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Biochemical Systematics and Ecology, 1974,Vol. 2. pp. 47 to 51. Pergamon Press.Printedin England. Les flavonoides de deux Lentibulariac~es: Pinguicula vulgaris et Utricularia vulgaris* MAURICE JAY et JEAN FRANCOIS GONNET Service de Phytochimie, Ddpartement de Biologie Vdgdtale. U.E.R. des Sciences de la Nature, Universit~ Claude Bernard Lyon I, 43, boulevard du 11 novembre 1918, 69621-Villeurbanne, France Key Word Index--Pinguicula vulgaris; Utricularia vulgaris: Lentibulariaceae; Angiospermae; 6- and 8- hydroxy flavones. Abstract--Apigenin, isoscutellarein, scutellarein, luteolin, 6-hydroxyluteolin and hypolaetin have been ident;fied in fresh leaves of Pinguicula vulgaris; apigenin, luteolin, 6-hydroxyluteolin and diosmetin were found in Utricularia vulgaris. These identifications, based on spectral characteristics, support a relationship between Lentibulariaceae and Tubiflorae. Rdsumd--A cSt~ de I'apigdnine, de la lutdoline et de I'hydroxy-6 lutdoline communes aux deux especes, les pousses feuilldes d'Utricularia vulgaris poss~dent de la diosmdtine, et les feuilles de Pinguicula vulgaris de la scutellar~ine, de I'isoscutellardine et de I'hypolaetine. Ce profil polyphdnolique milite en faveur d'une parent~ des Lentibulariac~es avec les Tubiflores. Introduction Les Lentibulariac~es sont habituellement rang~es dans I'Ordre des Tubiflores ~ cStd des Scrophulariac~es, Solanac(~es, Gesn~riacdes, Bignoniac6es, Globulariac6es; 1-4 elles par- tagent en effet avec ces derni~res de nombreux caract~res morphologiques: fleurs tdtracy- cliques, pentam~res, zygomorphes; gyn~cde sup~re; staminodisation et avortement au niveau de I'androcde; albumen t~ su~:oirs micro- pylaires et chalaziaux. Toutefois, comme le soulignent Emberger et la plupart des Sys- tdmaticiens, on ne peut consid~rer comme d~finitivement assurde la position syst~matique de cette famille qui prdsente par ailleurs cer- tains traits de Primulales tels que la placenta- tion centrale et I'organog~nie florale; en outre. des affinit(~s s6rologiques ont ~td relev~es entre Lentibulariac6es et Primulacdes. 3 D'un point de vue chimique, I'information relative aux Lentibulariacdes est trb,s restreinte: Bate-Smith 5 signale la presence de composds de fluorescence brune ou violet sombre (non identifies) chez Utricularia coerulea et Pin- guicula sp.; en outre chez cette derni~re esp~ce, I°auteur suppose I'existence de quer- c~tine et de kaempf~rol; enfin Harborne 6 ne peut d~tecter de flavono~'des chez Utricularia gibba var. excelsior. En vue d'~clairer d'un jour nouveau le probl~me syst~matique pos~ par cette famille des Lentibulariac~es, nous nous proposons de d~finir le chimisme polyph~nolique de deux de ses repr~sentants Pinguicula vulgaris L. et Utricularia vulgaris L., et de le comparer ceux des Primulac~es et de diverses families de Tubiflores qui ont fait I'objet d'~tudes d~taill~es. R6sultats chimiques Pinguicula vulgaris La chromatographie sur papier de I'extrait ~th~r~ (obtenu par ~puisement de I'hydrolysat chlorhydrique de feuilles) r~v~le, dans les °Pattie XXX dans la s~rie "'Recherches chimiotaxinomiques sur les Plantes Vasculaires". Pour Partie XXIX voir Kozjek, F., Jay, M. et Netien. G. (1974) Candollea sous presse. Rendle, A. B. (1959) The Classification of Flowering Plants, Vol. II. p. 541. University Press, Cambridge. 2Takhtajan. A. (1959) Die Evolution derAngiospermen, p. 254. Gustav Fischer, Jena. 3Emberger, L. (1960) Trait~ de Botanique Syst~matique (Chadefaud, M, et Emberger, L., eds.), Vol. II, 2, p. 800. Masson. Paris. 4Melchior, H. (1964) Engler's Syllabus derPflanzenfamilien. 12 ddn, Vol. II, p. 465. Borntraeger, Berlin. SBate-Smith. E. C. (1962) J. Linn. Soc. (Bot.) 58, 95. ~Harborne, J. B. et Williams, C. A. (1971 ) Phytochemistry 1O, 367, (Re~u le 17 novembre 1973. Accept~ le 2 janvier1974) 47

Les flavonoïdes de deux Lentibulariacées: Pinguicula vulgaris et Utricularia vulgaris

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Page 1: Les flavonoïdes de deux Lentibulariacées: Pinguicula vulgaris et Utricularia vulgaris

Biochemical Systematics and Ecology, 1974, Vol. 2. pp. 47 to 51. Pergamon Press. Printed in England.

Les flavonoides de deux Lentibulariac~es: Pinguicula vulgaris et Utricularia vulgaris*

MAURICE JAY et JEAN FRANCOIS GONNET Service de Phytochimie, Ddpartement de Biologie Vdgdtale. U.E.R. des Sciences de la Nature,

Universit~ Claude Bernard Lyon I, 43, boulevard du 11 novembre 1918, 69621-Villeurbanne, France

Key Word Index--Pinguicula vulgaris; Utricularia vulgaris: Lentibulariaceae; Angiospermae; 6- and 8- hydroxy flavones. Abstract--Apigenin, isoscutellarein, scutellarein, luteolin, 6-hydroxyluteolin and hypolaetin have been ident;fied in fresh leaves of Pinguicula vulgaris; apigenin, luteolin, 6-hydroxyluteolin and diosmetin were found in Utricularia vulgaris. These identifications, based on spectral characteristics, support a relationship between Lentibulariaceae and Tubiflorae. Rdsumd--A cSt~ de I'apigdnine, de la lutdoline et de I'hydroxy-6 lutdoline communes aux deux especes, les pousses feuilldes d'Utricularia vulgaris poss~dent de la diosmdtine, et les feuilles de Pinguicula vulgaris de la scutellar~ine, de I'isoscutellardine et de I'hypolaetine. Ce profil polyphdnolique milite en faveur d'une parent~ des Lentibulariac~es avec les Tubiflores.

Introduction Les Lentibulariac~es sont habituellement rang~es dans I'Ordre des Tubiflores ~ cStd des Scrophulariac~es, Solanac(~es, Gesn~riacdes, Bignoniac6es, Globulariac6es; 1-4 elles par- tagent en effet avec ces derni~res de nombreux caract~res morphologiques: fleurs tdtracy- cliques, pentam~res, zygomorphes; gyn~cde sup~re; staminodisation et avortement au niveau de I'androcde; albumen t~ su~:oirs micro- pylaires et chalaziaux. Toutefois, comme le soulignent Emberger et la plupart des Sys- tdmaticiens, on ne peut consid~rer comme d~finitivement assurde la position syst~matique de cette famille qui prdsente par ailleurs cer- tains traits de Primulales tels que la placenta- tion centrale et I'organog~nie florale; en outre. des affinit(~s s6rologiques ont ~td relev~es entre Lentibulariac6es et Primulacdes. 3

D'un point de vue chimique, I'information relative aux Lentibulariacdes est trb, s restreinte: Bate-Smith 5 signale la presence de composds

de fluorescence brune ou violet sombre (non identifies) chez Utricularia coerulea et Pin- guicula sp.; en outre chez cette derni~re esp~ce, I°auteur suppose I'existence de quer- c~tine et de kaempf~rol; enfin Harborne 6 ne peut d~tecter de flavono~'des chez Utricularia gibba var. excelsior.

En vue d'~clairer d'un jour nouveau le probl~me syst~matique pos~ par cette famille des Lentibulariac~es, nous nous proposons de d~finir le chimisme polyph~nolique de deux de ses repr~sentants Pinguicula vulgaris L. et Utricularia vulgaris L., et de le comparer ceux des Primulac~es et de diverses families de Tubiflores qui ont fait I'objet d'~tudes d~taill~es.

R6sultats chimiques Pinguicula vulgaris La chromatographie sur papier de I'extrait ~th~r~ (obtenu par ~puisement de I'hydrolysat chlorhydrique de feuilles) r~v~le, dans les

°Pattie XXX dans la s~rie "'Recherches chimiotaxinomiques sur les Plantes Vasculaires". Pour Partie XXIX voir Kozjek, F., Jay, M. et Netien. G. (1974) Candollea sous presse. Rendle, A. B. (1959) The Classification of Flowering Plants, Vol. II. p. 541. University Press, Cambridge.

2Takhtajan. A. (1959) Die Evolution derAngiospermen, p. 254. Gustav Fischer, Jena. 3Emberger, L. (1960) Trait~ de Botanique Syst~matique (Chadefaud, M, et Emberger, L., eds.), Vol. II, 2, p. 800. Masson. Paris.

4Melchior, H. (1964) Engler's Syllabus derPflanzenfamilien. 12 ddn, Vol. II, p. 465. Borntraeger, Berlin. SBate-Smith. E. C. (1962) J. Linn. Soc. (Bot.) 58, 95. ~Harborne, J. B. et Williams, C. A. (1971 ) Phytochemistry 1 O, 367,

(Re~u le 17 novembre 1973. Accept~ le 2 janvier1974)

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48 MAURICE JAY ET JEAN FRANCOIS GONNE'[

TABLEAU 1. CONSTANTES CHROMATOGBAPHIQUES DES FLAVONES DE P/NGU/CULA VULGAR/S ET D'UTR,'CL,'LAR/A VULGAR;5

Rf x 100 Syst@me 1 Syst@me 2 Syst@me 3 Syst@me 4 Syst@me 5

Apigenine 61 91 86 81 43 OH-6 Apig~nine 45 70 60 60 25 OH-8 Apig~nine 50 77 72 65 27 Lut~oline 53 79 78 66 2~ OH-6 Lut~oline 34 46 35 49 ~ 2 OH-8 Lut~oline 39 50 53 52 i .3 Diosmetine 64 84 78 78 46

Systeme 1: CP, AcOH 60%; syst¢me 2: CP, n-BuOH-AcOH-H20 (4:1:5); syst¢me 3: CP, t-BuOH-AcOH-H20 (3 t:1:); syst¢me 4: CP AcOH-conc HCI-H20 (Forestal) (30:3:10); syst~me 5: CCM poiyamide. CeH6-MeCOEt-MeOH (4:3:3).

syst~mes solvants classiques, la presence de 3 ou 4 taches de fluorescence violette ou violet brun. Seul le compos~ le plus haut Rr a pu ~tre isol~ par papyrographie et identifi~ par ses caract~ristiques physicochimiques ~h I'apig~n- ine. Pour les autres constituants, le pouvoir s~parateur sur cellulose s'av~rant tr~s insuf- fisant, nous avons eu recours au fractionne- ment sur colonne de polyamide. Ce mode op~ratoire a permis de collecter 4 fractions homog~nes et une fraction h~t(~rog~ne. Dans les fractions chromatographiquement pures, nous avons identifi~ I 'OH-6 apig~nine (scutel- lar(fine), I 'OH-6 lut(~oline, I 'OH-8 lut~oline (hypolaetine) et I'apig~nine. La CCM prepara- tive (polyamide) de la fraction h6t~rog~ne a

livr~ lut~oline et OH-8 apig~nine (isoscutel- lar~ine). Les caract~ristiques chromatograph- iques et spectrophotom~triques UV de ces compos~s sont rapport6es dans les Tableaux 1 et 2. A c6t~ de ce chimisme flavonique majeur dont sont exclus les flavonols querc~tine et kaempf~rol soup£:onn~s par Bate-Smith, nous avons ~galement observ6 des traces de leuco- anthocyanes repr~sent~es probablement par la leucocyanidine.

Utricu/aria vu/garis La tr~,s faible quantit~ de mat6riel v~g~tal mis

notre disposition nous a interdit une ~tude exhaustive du chimisme flavonique de cette esp~ce. Toutefois, apr~s un premier fractionne-

TABLEAU 3. PRINCIPAUX IONS (AVEC LEUR INTENSITE RELATIVE) EN SM DES FLAVONES 6-ET 8-HYDROXYL~ES DE PINGU/CUL,4.

4-

£3

+ + O + + + ~ 0 u (J o c..} "T uI "T" "T" ~

OH-6 Apig6nine (100) (4) (2) (7)

286 285 258 257

OH-8 Apig6nine - - ( 7 2 ) - - ( 4 ) - - ( 3 ) - - ( 5 )

OH-6 Lut~oline (100) (6) (6) (10)

302 301 274 273

OH-8 Lut~oline - - ( 1 0 0 ) - - ( 2 1 ) - - ( 1 2 ) - - ( 2 1 )

(3) (14) (97) (32) (6) (t2)

229 169 168 140 139 121

- - ( 2 ) - - - (13 ) - - ( 1 0 0 ) - - - (36) - - - (10) - - ( 1 3 )

(8) (30) (72) (28) (7) (18)

245 169 168 140 139 137

- - - (17 ) - - - ( 70 ) - - - (86) - - - (70) - - ( 4 6 ) - - ( 7 0 )

La nomenclature adopt~e est ceile de Audier "21 les fragments A et B correspondent respeetivement aux noyaux A et B de ]a flavone apr~s RDA'lefragment D = A +1 (caract~ristiquedes~av~neshydr~xy~essur~en~a~B);~efragmentCc~rresp~ndraitse~n I'auteur au noyau B, au C2 et ~ l'oxyg~ne h~t~rocyclique. "L'analyse du spectre UV, et plus pardculi~rement I'aspect de la bande II dans M e O H . permet de distinguer la diosm~tine de son isom~re chryso~riol . 7

7Boutard, 8. (1 972) Th~se Doc. S p , Lyon.

Page 3: Les flavonoïdes de deux Lentibulariacées: Pinguicula vulgaris et Utricularia vulgaris

LES FLAVONOIDES DE DEUX LENTIBULARIACI~ES

TABLEAU 2. PROPRII~TES SPECTRALES UV DES FLAVONES DE P/NGUICULA VULGAR/S ET D'UTRICULARIA VULGARIS

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MeOH AICI., AICI 3 + HCI NaOMe NaOAc NaOAc + H,,BO3

Apig6nine 268. (300). 278. 302, 276, 300 275. 325 278, 328, 269, (300), 336. 347. 384. 342. 382. 394. 392. 342.

OH-5 Apig6nine 284. 336. 304, 375. 302, 361. (279), 308, (264). (278). 289, 344 334. 384. 302. 384.

OH-8 Apig~nine 282. 308, Instable - - Instable lnstable - - (328). (368).

Lut~oline 253. 267, 273, (300). 263, 275. 267. (311). 270, (324). 260, (294), (301), 349. (330). 423. 295. 359. (330). 401. 388. 372.

385.

OH-6 Lut~ol;ne (234). (245). (250), 271. (238), 258. 249. (306), ° (246), (302). 253, 289. 283, 349. 306. 416. 296. 372. (342). 391. 396* 368.

OH-8 Lut~oline 255. 281. (274), 296. 261. 287, 298. 385. ° (258). 294. 265, 284, 342. (320), (336), (306). 360. 318, 384.* 361.

398. (440).

Diosm6tine 252, 268, (262), 276. 282, 276, 294, 270. 304, 275, 320. 253, 266, 290. 343. 295, 360, 392. 356, 384. 384. 378. 347.

*Compos6 montrant une certaine instabilit6 dans les r6actifs concern6s.

ment de I'extrait ethere (obtenu par epuisement de I'hydrolysat chlorhydrique de tiges feuillees) sur colonne de polyamide, suivi de CCM preparative sur ce m6me adsorbant, nous avons isole les deux flavonoTdes majeurs: luteoline et OH-6 luteoline, et deux flavo- nofdes mineurs: apigenine et diosmetine iden-

FULGARIS ET D'UTRICULARIA VULGARIS

o -r-

+ * + • o ~ o

v co ~ v

(19) (11) (13) (10) (12)

119 118 172 84 66

- - (18) ~ (10 ) ~ (24 ) ~ ( 1 5 ) ~ ( 1 2 )

(10) (14) (11) (8) (7)

135 134 112 84 66

- - ( 4 3 ) ~ ( 5 3 ) ~ ( 7 0 ) ~ ( 4 3 ) ~ ( 4 2 )

titles par leurs constantes chromatographiques (Tableau 1) et spectrales* (Tableau 2). Nous n'avons pu detecter chez cette espece de leucoanthocyanes.

Les caracteristiques physico-chimiques des OH-6 et OH-8 flavones qui constituent rorigi- nalite polyphenolique des deux Lentibulariacees etudiees sont en accord avec les donnees de la litterature: I 'OH-6 apigenine ou scutel- lareine connue depuis 1901, a ete plusieurs fois decrite; nous nous sommes reportes & la description de Mabry et al.; 8 en outre la com- paraison directe a pu etre realisee avec un echantil lon fourni par le Dr. Harborne. En ce qui concerne I'OH-6 luteoline et I 'OH-8 luteoline ou hypolaetine, les donn~es chroma- tographiques et spectrophotometriques UV recoupent celles publiees par Harborne. 6.9.1° L'OH-8 apigenine ou isoscutellareine isolee pour la premiX, re fois ~ I'~tat naturel chez Pinguicula vulgaris a fair I'objet d'une com- munication particuli~re. 11 En outre, la structure de ces quatre composes a ete definitivement assuree par SM (Tableau 3), par spectro- metrie de RMN des derives TMS (Tableau 4), enfin par I'etude des produits de la reaction de

eMabry, T. J., Markham, K. R. et Thomas, M. B. (1970) The Systematic Identification of Flavonoids. Springer, New York.

9Harborne, J. B. (1967) Phytochemistry 6, 1643. l°Harborne, J. B. et Clifford, H. T. (1969) Phytochemistry 8, 2071. 11Jay, M. et Gonnet, J. F. (1973) Phytochemistry12, 953.

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50 MAURICE JAY ET JEAN FRANCOIS GONNE1

TABLEAU 4. SPECTRES DE RMN DES DI~RIV#:S TRIMI:tTHYLSILYLCS IDES FLAVONES 6- ET 8-HYDROXYL~ES DE P / N G U I C U L . 4 V U L G A R / S ET D ' U T R I C U L A R I A V U L G A R I S

H-2' H-6' H-3 ' H-5' H-3* H-6 H-8

OH-6 Apig~nine 7,82 d 7,82 d 6,91 d 6,91 d 6.37 s -- 5.56 s (J 8,5) (J 8.5) (J 8.5) (J 8.5)

OH-8 Apig~nine 7,85 d 7.85 d 6.90 d 6.90 d 6,37,~ 6,19 5 - - (J 8.5) (J 8,6) (J 8,5} (J 8,5)

OH-6 Lut~oline 7,29 d 7.39 d d - - 6.86 d 6.31 s - - 6.52 ~* (J 2.5) (J 8.6 2.5) (J 8,5)

OH-8 Lut~oline 7,36 d 7,44 d d - - 6,85 d 6.32 s' 6.18 s - - (J 2,5) (J 8.5 2,5) (J 8,5)

Spectres/nCCI 4survarianHA100;valeursdesd~placementschimiquesdonn~esenppm(~chelle6) par rapportauTMSLesnornbresentre parentheses indiquent la valeur des constantes de couplage en Hz. Les signaux sont symbolis6s par s--singulet; d--doublet; d d double doublet. *Pour les 4 flavones, une silylation partielle (voir Mabry e t a l )~ s'accompagne d'un d~placement du signal du proton 3 vers les champs inf~ri- ~eurs d'environ 0.12 ppm par rapport au signal de ce m~me proton sur un compos6 completement silyl&

transposition de Wessely-Moser 12 au cours de laquelle I'hypolaetine et I'isoscutellar~ine sont transform~es respectivement en OH-6 lut6o- line et en OH-6 apig~nine. Ce tout dernier point pourrait nous conduire ~ ~mettre quelques r~serves sur le caract~re naturel des d~riv~s flavoniques 6-hydroxyl6s de Pinguicu/a vu/- garis. En effet, dans la mesure, oQ I'OH-8 apig~nine et I'OH-8 lut6oline sont pr~sentes chez cette esp~ce, nos identifications d'OH-6 apig~nine et d'OH-6 lut~oline concernent- elles des compos#s naturels ou des produits de la r6action de transposition de Wessely-Moser (r~action tr~s classique au cours du traitement du mat@iel foliaire par HCL 2N ~ chaud)? Nous n'apportons pas une r@onse d~finitive en ce qui concerne I'OH-6 apig~nine, compos~ mineur qui n'a ~tre caract@is~ dans I'extrait @hanolique brut de feuilles; par contre, dans ce m#~me extrait, I'OH-6 lut~oline a pu ~tre identifi6e chromatographiquement et spectro- photom~triquement et constitue donc, au moins pour partie, un produit naturel.

Discussion chimiotaxinomique Les deux esp~ces de Lentibulariac~es ~tudi~es peuvent ~tre d~finies par leur richesse en flavones et plus sp~cialement en d6riv~s 6- ou 8-hydroxyl~s d'apig~nine et de lut~oline. On notera toutefois que si I'OH-6 lut~oline est commune aux deux esp#ces, les OH-8 api- g~nine et lut~oline n'ont ~t6 identifi~es que chez Pinguicu/a vu/garis.

D'un point de vue chimiotaxinomique, la presence d'OH-6 lut6oline esttr~s significative; en effet, les travaux de Harborne 6.9 montrent que cette flavone est presque exclusivement I'apanage des Tubiflores, t'auteur l'ayant d6tectee chez 12 Globulariac~es (sur 12 esp~ces trait~es), 8 Labi~es (Prostanth~r- oid6es, Ajugoid~es. StachyoTd~es), 10 Plan- taginac~es (sur 26 esp@,ces analys~es). 2 Buddleiac~es (sur 5 esp~ces ~tudi~es) et 4 Bignoniac~es (sur 1 6 esp~ces analys~es), sans parler des identifications de d@iv~s m6thyl~s d'OH-6 lut~oline chez les P~daliac~es, Ver- b~nac~es et Scrophulariac~es. En dehors des Tubiflores. les citations de cette flavone sont tr~s rares; etles ne concernent en effet qu'un genre de Val~rianac~es (Va/eriane//a 6.13) et une Compos~e ( Coreopsis mutica).~ 4

La valeur d'indicateur taxinomique des OH-8 flavones identifi~es chez Pinguicu/a vu/garis est plus difficile & saisir. Toutefois, abstraction faite de I'isoscutellar~ine dont la distribution botanique se limite pour I'instant ~ cette seule esp~ce, on dolt soutigner que sur 8 citations ant6rieures d'hypolaetine, 6 se rapportent aux Tubiflores (Buddleiac~es et Labi~es-Ajugoi- d~es) 6 et 2 seulement & des families ~trang~res

cet Ordre: Restionac~es (Hypo/aena fasti- giata) t° et Cupressac~es (Juniperus macro- poda). 15 En I'~tat actuel de nos connaissances, il semble donc que cette flavone soit assez caract6risque des Tubiflores et que sa pr6sence chez Pinguicu/a puisse constituer un argument

12Wessely, F. et Moser. G. H. (1938) Monatsch. Chem. 56, 97. 13Greger, H. et Ernet, D. (1973) Phytochemistry 12, 1 693. 14Crawford, D. J. (1 970) Brittonia 22, 93. sSiddiqui, S. A. et Sen, A. B. (1971 ) Phytochemistry 1 O, 434.

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LES FLAVONOIDES DE DEUX LENTIBULARIACEES 51

supplementaire en faveur du rattachement de I'esp~ce & cet Ordre.

Corr~lativement, nos r~sultats permettent d'~carter, sur un plan chimique tout au moins, I 'hypothese d 'une parent6 Lent ibu- lariac~es-Primulac~es; I 'analyse po lyphdno- l ique de ces dernieres rdv~le en effet la presence de f lavonols (querc~tine, kaemp- f~rol, gossyp~tine) et de f lavones simples (d iOH-3 ' , 4' f iavone, OH-5 f lavone, OH-2 ' f lavone, d iOH-5, 2' f lavone, prim~tine, OH-2 ' primdtine . . .), et I'absence totale d 'OH-6 ou -8 apig6nine ou lut~oline. 16-18

En conclusion, si la d6f in i t ion f lavonique de Pinguicula vulgaris et d'Utricularia vulgaris refl~te le profi l po lyph~nol ique des Lent ibu- lariac~es, le maintien de cette famil le dans I'ordre des Tubif lores se trouve parfaitement confirm~ sur un plan biochimique.

~6Harborne, J. B. (1 968) Phytochemistry 7, 1215. ~THarborne, J. B. (1971 ) Phytochemistry 10, 472. ~8Wollenweber, E. (1970) Th~se UniversitY, Heidelberg. 9Gonnet, J. F. et Jay. M. (1972) Phytochemistry 11,231 3.

Partie experimentale P/nguicula vulgaris L. a ~t~ r~colt~e dans les Hautes- Atpes, et Utricularia vulgaris L. dans I'Ain (France). L'extraction et I'identification des flavonoTdes de ces deux esp~ces ont ~t~ conduites selon le protocole classique: 19 hydrolyse (HCI 2N) du materiel v~gdtal, suivie d'une extraction par Et20; apr~s dvaporation libre de ce dernier, le r~sidu flavonTque est chromato- graphi~ sur colonne de polyamide et I'~lution obtenue par Cell6 progressivement enrichi en MeCOEt puis en MeOH. Apr~s contrSle en CCM. les fractions hdtdro- g~nes sont traitdes en CCM preparative sur polyamide et les dluats soumis alors & une derniere filtration sur colonne du m~me adsorbant.

L'identification des divers compos~s a ~td assur~e par spectrophotomdtrie UV en presence des rdactifs classiques, s.z° par spectrophotomdtrie IR apr~s pas- tillage dans KBr, par SM et RMN (apr~s trimdthyl- silylation des -OH selonS), et par comparaison des valeurs de Rf avec les donn6es de la litt~rature.

2°Jurd, L. (1962) The Chemistry of Flavonoid Compounds (Geissman, T. A., ed.). p. 107. Pergamon Press, Oxford. 21Audier, H. (1 966) Bull. Soc. Chim. Fr. 2892.