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Thermogram’ 2007 25 Châlons en Champagne, 13 et 14 décembre 2007 Congrès National de Thermographie THERMOGRAM' 2007 LES FONDAMENTAUX EN THERMIQUE DE L’HABITAT Eva DORIGNAC Maître de conférences Département Génie Thermique et Energie - IUT de Poitiers 6 Allée Jean Monet BP 389 F-86010 POITIERS Cedex [email protected] Introduction. Les réglementations thermiques successives de 1975, 1982, 1988 et 2000, ont permis de diviser la consommation énergétique par m² des bâtiments neufs d’un facteur 2 à 2,5. Actuellement, le secteur du bâtiment en France consomme 43 % de l’énergie utilisée et est à l’origine d’au moins 21 % des émissions de CO 2 nationales. [1]. La réglementation thermique a induit, sur les constructions neuves, une réduction de la consommation énergétique tout en préservant le confort des occupants. Les réglementations à venir demanderont toujours un effort plus grand pour les constructions neuves, d’une part, et un effort sur les constructions existantes qui ont peu ou n'ont pas d’isolation thermique, d’autre part. Ce dernier point nécessite la mise en place d’expertises de bâtiment. Nous parlons d’audit énergétique afin de préconiser des axes d’action pour réduire leur consommation énergétique. Il faut donc pouvoir prédire les flux d’énergie dans le bâtiment afin d’agir là où les mesures d’économie d’énergie seront les plus efficaces. La modélisation d’un bâtiment dans sa globalité est en général constituée d’un réseau complexe de résistances et de capacités thermiques entre les différentes zones internes du bâtiment et entre ces zones et l’environnement du bâtiment. La connaissance des fondamentaux en thermique de l’habitat permettra de bien analyser ces flux d’énergie.

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Thermogram’ 2007 25

Châlons en Champagne, 13 et 14 décembre 2007 Congrès National de Thermographie THERMOGRAM' 2007

LES FONDAMENTAUX EN THERMIQUE DE L’HABITAT

Eva DORIGNAC

Maître de conférencesDépartement Génie Thermique et Energie - IUT de Poitiers6 Allée Jean Monet BP 389F-86010 POITIERS [email protected]

Introduction. Les réglementations thermiques successives de 1975, 1982, 1988 et 2000, ont permisde diviser la consommation énergétique par m² des bâtiments neufs d’un facteur 2 à 2,5.Actuellement, le secteur du bâtiment en France consomme 43 % de l’énergie utilisée et est à l’origined’au moins 21 % des émissions de CO2 nationales. [1]. La réglementation thermique a induit, sur lesconstructions neuves, une réduction de la consommation énergétique tout en préservant le confortdes occupants. Les réglementations à venir demanderont toujours un effort plus grand pour lesconstructions neuves, d’une part, et un effort sur les constructions existantes qui ont peu ou n'ontpas d’isolation thermique, d’autre part. Ce dernier point nécessite la mise en place d’expertises debâtiment. Nous parlons d’audit énergétique afin de préconiser des axes d’action pour réduire leurconsommation énergétique. Il faut donc pouvoir prédire les flux d’énergie dans le bâtiment afin d’agirlà où les mesures d’économie d’énergie seront les plus efficaces.La modélisation d’un bâtiment dans sa globalité est en général constituée d’un réseau complexe derésistances et de capacités thermiques entre les différentes zones internes du bâtiment et entreces zones et l’environnement du bâtiment. La connaissance des fondamentaux en thermique del’habitat permettra de bien analyser ces flux d’énergie.

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1 - MODES DE TRANSFERT DE CHALEUR

Dans un bâtiment, les transferts d’énergie prennent principalement la forme de transferts dechaleur. Ces transferts ont pour origine la tendance naturelle de la chaleur à transiter des zoneschaudes vers les zones froides en utilisant essentiellement 3 modes de transport :

• la conduction correspond à la transmission de proche en proche de l’agitation moléculairepar chocs entre molécules ;

• la convection correspond au flux de chaleur émanant de la surface d’un solide vers unecouche de fluide adjacente ;

• le rayonnement correspond au transport de chaleur par émission et absorption derayonnement électromagnétique par les surfaces des corps. En thermique de l’habitat, ondistingue le rayonnement grande longueur d’onde (GLO) et le rayonnement courte longueurd’onde (CLO). Le rayonnement GLO correspond à l’échange de chaleur sans contact entredeux surfaces de solides à des températures différentes et pour des longueurs d’ondecorrespondant au domaine infrarouge du spectre de rayonnement thermique, soit à destempératures proches des températures rencontrées dans le bâtiment. Le rayonnementCLO provient essentiellement du soleil, soit directement, soit indirectement lorsqu’il estdiffusé par l’atmosphère ou réfléchi par les surfaces proches d’un bâtiment. Ilcorrespond aux domaines de l’ultraviolet et du visible du spectre de rayonnement. [2]

Un bâtiment est, essentiellement, un ensemble de volumes d’air séparés par des parois, sièges detransferts thermiques (couplage de différents flux conductif, convectif, par rayonnement GLO etCLO en provenance des environnements extérieur et intérieur). La connaissance du comportementthermique d’une paroi en réponse à des sollicitations est donc utile à la compréhension ducomportement thermique d’un bâtiment. Ces bilans thermiques peuvent être appréhendés soit enrégime variable soit en régime permanent. Le régime variable est évidemment le cas le plus général,et son étude nécessite l’utilisation de l’ordinateur. Dans le cadre de cet article, nous ne nousintéresserons à l’aspect instationnaire que pour expliciter ce qu'est l’inertie thermique. Quant aurégime permanent, il est habituel, en première approximation, de le considérer pour dimensionner lesinstallations de chauffage. Nous décrirons donc la thermique des parois planes des bâtiments enrégime permanent.

2 – TRANSMISSION DE CHALEUR PAR LES PAROIS PLANES DU BATIMENT

EN REGIME PERMANENT

Une paroi mono couche homogène (un seul constituant) séparant deux ambiances thermiquementdifférentes est le siège des trois modes de transfert de chaleur connus : conduction dans la paroi,rayonnement et convection sur les deux faces de la paroi. La figure 1 schématise ces échanges. Enthermique du bâtiment, on s’intéresse quasiment toujours à des parois planes séparant une ambianceintérieure et un milieu extérieur en régime permanent.

En régime permanent, la température et les flux de chaleur sont constants en tout point d’une paroiplane. En d’autres termes, le flux thermique entrant par la surface intérieure est égal au flux quitraverse la paroi et est égal au flux sortant par la surface extérieure.

En conduction, mode de transfert de chaleur principal à l’intérieur de matériaux, la densité de flux dechaleur, ϕ, est proportionnelle au gradient de température T. La loi de Fourier traduit cetteproportionnalité :

gradT.λϕ −= (1)

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Figure 1 - Transferts thermiques au travers d’une paroi - Tai et Tae sont les températuresd'air intérieur et extérieur, Tpi et Tpe sont les températures des surfaces solidesintérieures et extérieures et Tsi et Tse sont les températures de surface intérieure etextérieure.

Le coefficient de proportionnalité λ s’appelle conductivité thermique du matériau et s’exprime enW.m-1.K-1. Dans les matériaux isolants fibreux ou alvéolaires, dont la plus grande partie en volume estconstituée d’air, une partie du transfert de chaleur peut se faire par rayonnement, voire parconvection. Toutefois, même pour ces matériaux, le modèle de transfert par conduction est utilisé, enincluant les effets du rayonnement ou de convection dans une conductivité thermique équivalente ouapparente.

En convection et parfois en rayonnement, les flux de chaleur sont modélisés par la relation deNewton :

Th ∆= .ϕ (2)

Où h est un coefficient d’échange de chaleur, il s’exprime en W.m-2.K-1, et ∆T un écart detempérature entre la surface et son environnement, qui est généralement convectif et radiatif.

2.1. Composant formé d’une couche homogène

La densité de flux traversant une couche homogène plane d’épaisseur e et de conductivitéthermique λ soumise à une différence de température ∆T se calcule à partir de la loi de Fourier :

e

TT

e

T sesi−

−=∆

−= λλϕ . (3)

Par analogie à la loi d’Ohm, on peut poser :

ϕ.RT =∆ où λ

eR = (4)

R est la résistance thermique de la paroi et s’exprime en K.m2.W-1.

La densité de flux entrant dans la paroi est la somme de la densité de flux convectif intérieur et dela densité de flux radiatif intérieur. La densité de flux sortant de la paroi est la somme de la densitéde flux convectif externe et de la densité de flux radiatif extérieur. Comme ces 2 modes vonttoujours en parallèle, on les nomme densités de flux superficiel. Cette densité de flux de chaleursuperficiel entre la surface et son environnement peut s’exprimer par :

( ) Thhcr

∆+= .ϕ (5)

où hr et hc sont des coefficients d’échange de chaleur par rayonnement et convectionrespectivement.

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Ces coefficients sont souvent écrits sous forme de résistances thermiques superficielles :

cr

shh

TR

+=

∆=

1

ϕ(6)

En rayonnement, la loi de Stefan nous dit que la densité de flux de chaleur émise sous forme derayonnement par un corps est proportionnelle à la puissance quatrième de sa température absolue T,soit :

4.. Tr σεϕ = (7)

où σ est la constante de Stefan-Bolzmann, égale à 5,67 10-8 W.m-2.K-4, et ε est l'émissivité totale (surtout le spectre et dans toutes les directions) de la surface, qui vaut 1 pour un corps "noir". Notrepeau, à 35°C ou 308 K émet ainsi 510 W/m2 entre 2,5 et 40 µm de longueur d'onde, et reçoit400W/m2 de surfaces environnantes qui sont à 20°C ou 293 K. Le soleil, à 5 800 K environ, émet64 MW/m2 entre 0,1 et 2 µm.

L'échange net de chaleur par rayonnement entre deux surfaces est, si T1 et T2 sont les températuresabsolues des deux surfaces :

( )4

2

4

12,1.. TT −′= σεϕ (8)

où ε' est une émissivité effective combinée ; pour des surfaces planes et parallèles, son expressionest :

111

1

21

−+

=′

εε

ε (9)

où ε1 et ε2 sont les émissivités totales des deux surfaces.

Dans le cas de la figure 1, l’équation (8) s’écrit :

( ) ( )sprspsp TThTT −=−′= ...

44

,σεϕ (10)

Où Tp est la température de l’environnement (Tpi ou Tpe, figure 1), Ts la température de la surface(Tsi ou Tse, figure 1) et hr un coefficient d’échange par rayonnement.

Le premier terme du développement limité de ( )44

sp TT − permet d’identifier le coefficient d’échange

par rayonnement à :

3

2...4

+′=

sp

r

TTh σε (11)

La densité de flux de chaleur par convection s’écrit :

( )sac TTh −= .ϕ (12)

Où Ta est la température de l’ambiance (Tai ou Tae, figure 1) et Ts la température de la surface (Tsi ouTse, figure 1).

Le coefficient de transfert de chaleur par convection, hc dépend entre autres de la direction du fluxde chaleur, de la rugosité de la surface, de la vitesse de l'air le long de la surface, et de latempérature Ta. En première approximation, les valeurs suivantes sont adoptées à l'intérieur dubâtiment [3] :

• flux de chaleur vers le haut (dalle chauffante, par exemple) hc = 5,0 W.m-².K-1

• flux de chaleur horizontal (parois verticales) hc = 2,5 W.m-².K-1

• flux de chaleur vers le bas (plafond chaud, par exemple) hc = 0,7 W.m-².K-1

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A l'extérieur, l'effet du vent prédomine. L'approximation suivante est proposée [3] :

=ch 4 + 4.v (13)

où v est la vitesse du vent près de la surface en m/s.

A la vue des relations (10) et (12), on remarque que l’échange par rayonnement et par convection nes’écrit pas entre les mêmes écarts de température. Ainsi, pour simplifier le calcul de la densité deflux superficiel, il est courant d’introduire une température résultante sèche, Tr, qui permet deregrouper les deux densités de flux par l’expression :

( )srs TTh −= .ϕ (14)

Avec cr

acpr

rhh

ThThT

+

+=

... et cr hhh +=

La température résultante Tr permet de prendre en compte les échanges entre la surface de la paroiet son environnement radiatif et convectif ; elle est la plus représentative de la notion de confortthermique. Lorsqu'on parle de température intérieure Ti, il s'agit en fait de la températurerésultante Tr,i. Il en est de même pour la température extérieure notée Te ou Tre.

Les résistances thermiques superficielles ont relativement peu d'importance dans la résistancetotale d'un élément de construction bien isolé thermiquement. Aussi, pour les calculs de déperditions,on adopte souvent les valeurs conventionnelles suivantes [3], valables pour des surfaces émissives(ε > 0,8), incluant convection et rayonnement, et valables quelle que soit l'orientation :

• A l'intérieur, hi = 8 W.m-².K-1 soit Rsi = 0,13 m².K.W-1

• A l'extérieur, he = 25 W.m-².K-1 soit Rse = 0,04 m².K. W-1

Par contre, leur rôle est primordial en thermographie : elles sont à l'origine des écarts detempérature ∆T en surfaces des parois (entre deux zones différentes de l'enveloppe). Et uneconnaissance exacte de leurs valeurs devient nécessaire pour effectuer des calculs de déperditions(W/m2) à partir de relevés de température de surface Ts. Si l’on ne souhaite que constater, parthermographie, des défauts d'isolation ou de structure alors il est préférable d'observer les paroisdepuis l'intérieur du fait de la plus grande valeur de Rsi par rapport à celle de Rse puisqu’alors l’écartde températures (entre l’environnement et la paroi) y sera supérieur.

2.2. Lames d’air

Dans le bâtiment, on rencontre également des parois avec des lames d’air non ventilées (doncfermées) ou ventilées. La résistance thermique d'une lame d'air non ventilée ou ventilée, Rg, dépenddes mouvements de convection à l'intérieur de la lame et du rayonnement thermique entre lessurfaces délimitant cette lame. Pour ces parois avec lames d’air, les normes de calcul des résistancesthermiques dans le domaine du bâtiment proposent des valeurs par défaut en fonction de la directiondu flux de chaleur et des dimensions de la lame d’air. [3]

2.3. Composants formés de couches homogènes

La résistance thermique totale d'un composant plan formé de couches homogènes perpendiculaires auflux de chaleur est la somme des résistances des différentes couches du composant :

De surface intérieure à surface extérieure :

gnggnm RRRRRRR +++++++= .......2121

(15)

D'environnement intérieur à environnement extérieur :

simsetRRRR ++= (16)

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où: R1, R2... Rn sont les résistances thermiques des couches homogènes et Rg1, Rg2...Rgn sont lesrésistances thermiques des lames d'air.

Le coefficient U de transmission thermique des composants est l'inverse de la résistance thermiquetotale d'environnement à environnement, alors que la conductance thermique G est l'inverse de larésistance de surface à surface :

tRU

1= et

mRG

1= (17)

Ainsi, la densité de flux de chaleur passant au travers d'une paroi plane en régime permanent estdonnée par:

( )ei

TTU −= .ϕ (18)

L’écriture des transferts thermiques précédemment décrits au travers d’une paroi suppose letransfert unidirectionnel. Il existe des singularités localisées pour lesquelles cette hypothèse n’estplus valable. Ces échanges thermiques localisés, appelées ponts thermiques, sont à l’origine dedéperditions supplémentaires, principalement au niveau du raccordement des parois et des liaisonsavec le sol.

2.4. Ponts thermiques

Un pont thermique est constitué par toute discontinuité dans la couche isolante, par tout endroit oùla résistance thermique présente une faiblesse. Au voisinage d'un pont thermique, les lignes de fluxse resserrent : davantage de chaleur passe par unité de surface. Les isothermes se déforment ens'écartant les unes des autres. Les lignes de flux restent néanmoins perpendiculaires aux isothermes.Ces ponts sont causes de pertes de chaleur supplémentaires.

On distingue les ponts thermiques géométriques tels que les angles et les coins, et les pontsthermiques matériels, dans lesquels un matériau conducteur de la chaleur traverse la couche isolante.

On classe aussi les ponts thermiques en ponts linéaires, qui ont une certaine longueur, et les pontsponctuels, dans lesquels l'interruption de la couche isolante reste locale. Toute courbure dans lacouche isolante ou dans la paroi constitue un pont thermique géométrique. Les isothermes doiventsuivre la courbure de la paroi et les lignes de flux, qui leur sont perpendiculaires, se resserrent versl'intérieur de la courbure.

La Figure 2 montre un pont thermique géométrique typique, constitué par un angle entre deux parois,le mur est composé de briques avec de la laine minérale et un doublage extérieur en plots de ciment.Les couleurs donnent le niveau des températures (rouge : chaud, bleu : froid). Les lignes bleuesminces sont des lignes de flux. On constate que les isothermes se déforment à l’approche de l’angleet que les lignes de flux sont un peu plus serrées vers l'intérieur du coin qu'en pleine paroi. Les pontsthermiques géométriques n'ont en général pas d’effet important sur les déperditions, parce que lacouche isolante n'est pas interrompue, elle n'est que déformée.

Les ponts thermiques matériels se trouvent en tout endroit où la couche isolante est interrompue outraversée par un matériau plus conducteur. La Figure 3 montre un pont thermique matériel constituéd'une dalle reposant sur un mur avec isolation intérieure. Les lignes minces sont des lignes de flux. Onvoit très bien que les lignes de flux se concentrent fortement au travers du pont et que lesisothermes s'écartent. On observe un net refroidissement et une concentration des lignes de flux dechaleur près du pont thermique.

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Figure 2 - Pont thermique géométrique: angle d'un bâtiment. A gauche, en plan, à droite,isothermes (zones colorées) et lignes de flux. [4]

Figure 3 - Pont thermique matériel: dalle posée sur un mur porteur avec isolation intérieure.A gauche, coupe, à droite, isothermes et lignes de flux. [4]

Les ponts thermiques matériels ont souvent des conséquences plus graves que les pontsgéométriques.

Du point de vue des déperditions thermiques, l'exemple ci-dessus peut être modélisé (ou représenté)par une fuite de chaleur supplémentaire localisée le long d'une ligne horizontale insérée dans uneparoi. C'est un pont thermique linéaire, auquel on attribue un coefficient de déperdition linéique Ψ

(en W.m-1K-1) et une longueur. Une barre de fixation métallique traversant une paroi peut êtremodélisée par une déperdition supplémentaire ponctuelle, localisée c'est un pont thermique ponctuel,auquel on attribue un coefficient de déperdition χ (en W.K-1).

Sur le plan et la coupe des détails de construction, un pont thermique matériel apparaît comme uneinterruption de la couche d'isolant. Il est donc facile à détecter, et devrait être corrigé ou traité demanière appropriée avant de construire. Sur un bâtiment existant, le pont thermique se détecteavant tout par ses effets : apparition de moisissures, de condensation, de zones froides ou chaudes.Il peut aussi se détecter à l'aide de la thermographie (cf. figure 7). La thermographie est une imagede la température de surface extérieure. Comme cette température est d'autant plus élevée que lasurface extérieure est mieux chauffée, notamment par les ponts thermiques, c'est aussi, dans unecertaine mesure, une image des ponts thermiques.

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Les ponts thermiques doivent donc être évités, mais cela n'est pas toujours possible et dans ce cas, ilfaut en tenir compte dans le bilan thermique du bâtiment.

A partir de l’expression de la densité de flux de chaleur (éq. 18), il est possible de déterminer lesdéperditions thermiques d’une paroi entre l’intérieur et l’extérieur par l’expression suivante :

( )ei

TTAU −=Φ .. (19)

Une méthode simplifiée permettant de tenir compte des ponts thermiques dans le calcul desdéperditions de chaleur consiste à attribuer aux ponts thermiques de ce type un coefficient detransmission thermique linéique ψ, en W.m-1.K-1, qui, multiplié par la longueur du pont thermique,s'ajoute aux déperditions des parois :

( )( )ei

TTAU −+=Φ′ .. ψl (20)

Les normes de calcul de déperditions [3] proposent des moyens simples de déterminer lescoefficients ψ en fonction des configurations de pont thermique.

On attribue, de même, un coefficient de transmission thermique ponctuel χ, en W.K-1, aux pontsthermiques locaux constitués par des fixations ou des éléments en forme de barres traversant lacouche isolante. Si on tient compte de tous les éléments de l'enveloppe, le coefficient dedéperditions par transmission de celle-ci vaut:

∑∑∑ ++=j jkk kii iT UAH χψl (21)

Ce coefficient HT est la puissance nécessaire pour compenser les déperditions par transmission autravers de l'enveloppe lorsqu'il y a 1 Kelvin (ou 1 degré Celsius) de différence entre l'intérieur etl'extérieur. Il s’exprime en W.K-1.

2.5. Transmission thermique des fenêtres

Les fenêtres comportent de nombreux ponts thermiques. Pour simplifier le calcul des déperditions,on détermine en premier lieu les aires du vitrage et du cadre puis on calcule approximativement lecoefficient de transmission thermique global d'une fenêtre, Uf par:

cv

ccccvv

fAA

LUAUAU

+

++=

ψ(22)

où Uv est le coefficient de transmission thermique du vitrage, Av, l'aire du vitrage (partie transparente), Uc, le coefficient de transmission thermique du cadre, Ac, l'aire du cadre, Lv, le périmètre total des vitrages, ψc, le coefficient de transmission thermique linéique du cadre du vitrage.

Les règles Th-U [3] donnent des valeurs précalculées de coefficient de transmission thermique globalUf.

Le régime permanent est la base d'une simplification conventionnelle d'estimation des matériels etmatériaux thermiques à installer, mais ne peut en aucun cas représenter le véritable fonctionnementthermique d'un bâtiment.

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3 – DYNAMIQUE DES BATIMENTS

Les caractéristiques thermiques dynamiques d'un composant de bâtiment décrivent soncomportement thermique lorsqu'il est soumis à des conditions aux limites variables, à savoir fluxthermique ou température résultante (intérieure ou extérieure) variable sur l'une de ses faces ou surles deux. Nous nous intéresserons ici essentiellement à la notion d’inertie thermique et nous nousattacherons particulièrement à bien différentier inertie thermique et isolation.

La notion d'inertie thermique dans le bâtiment est complexe du fait qu’elle est différente selon lanature de l’action thermique. Si elle est d’origine extérieure (variation rapide de la températurerésultante extérieure), l’inertie concerne essentiellement l’enveloppe des bâtiments ; le phénomènese traduit par une constante de temps plus ou moins longue, mais a peu d’influence sur laconsommation ou le confort des occupants. Si elle est d’origine intérieure (apports gratuits tels quel’éclairage, les occupants, les ordinateurs,…), l’inertie concerne essentiellement la structure internedu bâtiment (y compris le mobilier) ; elle amortit plus ou moins bien les variations de température.

L’inertie thermique est liée aux matériaux et à la manière dont ils sont répartis dans le bâtiment. Lesprincipales notions physiques des matériaux, regroupées derrière le terme d’inertie thermique,participent au bon rendement, à la bonne utilisation et au confort de la machine thermique qu’estl’habitat. Quelles sont donc les constantes physiques du matériau qui influencent l’inertie thermique ?

3.1. Propriétés physiques des matériaux

• La conductivité thermique λ, en W.m-1.K-1, est une donnée intrinsèque du matériau. Ellecaractérise uniquement ses performances isolantes.

• La capacité thermique Cth, en J.K-1, est le produit de sa masse volumique ρ, en kg.m-³ par sachaleur massique Cp, en J.kg-1.K-1, la quantité de chaleur nécessaire pour chauffer unkilogramme de matériau de 1 Kelvin (ou 1 degré Celsius).

Pour qu'un matériau accumule beaucoup de chaleur, il doit avoir

- une conductivité thermique élevée, pour que la chaleur puisse facilement pénétrer dans le matériau ;

- une capacité thermique élevée, de façon à avoir une grande quantité de chaleur mise en jeu pourélever sa température.

• La diffusivité thermique a, en m².s-1, exprime la "vitesse" avec laquelle la chaleur pénètredans le matériau. Plus elle est faible, plus le front de chaleur mettra du temps à traverserl’épaisseur du matériau, et donc, plus le temps entre le moment où la chaleur arrive sur uneface d’un mur et le moment où elle atteint l’autre face est importante. Cette diffusivités’exprime par :

ρ

λ

.p

Ca =

• L’effusivité b, en J.s-½.m-2.K-1, caractérise la capacité des matériaux à absorber (ou restituer)une puissance thermique, elle s’exprime par :

ρλ .. pCb =

Cette définition montre que l’effusivité évolue comme la conductivité thermique, λ. En conséquence,un matériau absorbera d’autant plus de puissance thermique que la chaleur pourra facilementl’atteindre. Mais l’effusivité évolue aussi dans le même sens que la chaleur volumique ρ.Cp. Parconséquent, il absorbera d’autant plus facilement la puissance thermique que sa température s’élèverapeu sous l’effet de la quantité de chaleur mise en jeu. Ainsi, plus l’effusivité d’une paroi est grande,plus la chaleur interne à la pièce sera absorbée rapidement par le mur, et plus l’élévation de

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température dans le local sera limitée. Pour le confort thermique, on privilégiera donc les matériaux àgrande effusivité.

3.2. Le comportement thermique du bâtiment

Les constructions sont soumises de la part du climat à deux actions différentes.

• Le climat agit sur les températures extérieures des enveloppes. Celles-ci subissent d'abordles variations journalières des températures extérieures. Pour une enveloppe "correctement"isolée, la température de sa face extérieure, si elle n'est pas ensoleillée, est très voisine dela température extérieure. Si la face extérieure est soumise à l'ensoleillement, satempérature est influencée par la densité du flux incident et subit de ce fait, au cours de lajournée, des variations plus importantes.

• Le climat agit également par apport d'énergie à l'intérieur du bâtiment, apport dû aurayonnement solaire transmis à travers les vitrages et dont une grande partie est absorbéepar les parois intérieures.

Il convient de constater dès maintenant que deux types de paramètres, parfois liés entre eux, latempérature et la puissance thermique, vont provoquer la dynamique du bâtiment.

En thermique du bâtiment, les températures et flux peuvent varier tous deux de manières trèsdifférentes :

• les variations de température extérieure peuvent être très lentes et les valeurs de la densitédu flux solaire incident faibles (cas des périodes couvertes) ;

• les variations de températures extérieures peuvent être au contraire brutales et les densitésde flux solaire importantes lors de l'ensoleillement (cas des périodes claires).

Dans le cas de faibles changements de température et de faibles densités de flux, on peut admettreque les températures à l'intérieur des volumes considérés et des structures sont uniformes et qu’enconséquence tout le volume concerné varie en température en fonction de ces faibles changements.La dynamique de ce phénomène n’est alors fonction que de la capacité thermique Cth qui caractérisealors bien "l'inertie thermique" du bâtiment. Cette notion, généralement la mieux comprise,correspond à la situation la moins dynamique.

Dans le cas où les températures varient brutalement et où l’on a un fort ensoleillement, il fautdistinguer les parois qui sont exposées au rayonnement solaire de celles qui n’y sont pas. En effet, laparoi soumise à une densité de flux constante tel qu’un fort ensoleillement voit sa répartition internede température varier très rapidement avec le temps t et avec la profondeur x. Cette variationdépend de la diffusivité a, définie précédemment. Ainsi, certains lieux ont des températuresradiantes (températures de paroi de l’environnement, Tpi ou Tpe figure 1) élevées. A la suite de ceprocessus, il est possible d'obtenir une surchauffe des locaux. La température résultante s'élève dufait de l'augmentation simultanée de la température radiante et de la température de l'air(température de l’ambiance, Tai ou Tae figure 1). Ce phénomène "rapide" entraîne un saut detempérature de surfaces des parois non exposées. La densité de flux que ces parois non exposéessont capables d'absorber est directement caractérisée par l'effusivité b, définie précédemment, etindirectement par la surface S de ces parois non exposées.

Lorsqu'il existe de tels apports passifs (solaires) dans un bâtiment l'inconfort par surchauffe estd'autant plus important que l'effusivité est faible et que la surface d'échange est faible. Et, àconfort et perte thermique identiques, il y a d'autant plus d'accumulation de chaleur passive et doncde restitution décalée dans le temps que l'effusivité des parois est grande.

Ainsi, pour ce type de phénomène thermique dynamique, le confort et le captage solaire dépendentessentiellement des surfaces absorbantes disponibles et de l'effusivité des matériaux qui lesconstituent.

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Notons que la dynamique du bâtiment est un phénomène à considérer pour assurer, voire contrôler, leconfort thermique de ce bâtiment. Rappelons que le confort thermique est défini par deuxparamètres indissociables : la température résultante, Tr et la température des parois, Ts. En effet,la différence entre ces deux températures ne doit pas être supérieure à 3°C, selon les spécialistesdu confort thermique. Par exemple, un air chauffé à 22°C dans une pièce où les murs rayonnent à 15°Csera très inconfortable à l’inverse d’un air chauffé à 18°C et des parois rayonnant à 16°C. Ladifférence de comportement thermique entre les trois parois ci-dessous s’explique par la capacité destockage thermique de certains des matériaux qui les composent. Plus elle est élevée, plus le matériauest capable de stocker ou de restituer des quantités importantes de chaleur (ou de fraîcheur en été).Par ailleurs, plus l’inertie est forte, plus le matériau mettra de temps à s’échauffer ou à se refroidir,plus elle est faible, moins il en mettra.

Figure 4 : Variation de température dans une paroiMur A : Mur en parpaing de ciment de 20 cm non isolé avec une lame d’air de 6 cm et contrecloison en briques pleines.Mur B : Même mur que le mur A, mais avec une lame d’air remplacé par un isolant en liègeexpansé de 6 cm.Mur C : Même composition que le mur B (donc même résistance thermique globale) mais avecl’isolant placé directement à l’intérieur.

La figure 4 montre d’une part l’importance d’interposer une barrière thermique entre l’intérieur etl’extérieur grâce à la présence de l’isolant ; d’autre part qu’une isolation intérieure réduit presquetotalement la possibilité de stockage du mur.

Ainsi, si l’on souhaite un tampon thermique important, il est conseillé de choisir des matériaux àcapacité thermique élevée et de les laisser en contact direct avec l’ambiance du local. Une inertiethermique importante n’est pas intéressante uniquement en été ; en mi-saison et en hiver, elle permetde stocker une partie de la chaleur solaire qui pénètre dans le bâtiment par les fenêtres pour limiterla demande de chauffage en soirée.

Néanmoins, une inertie importante n’est pas conseillée dans tout type de local, notamment pour leslocaux peu occupés, car elle entraîne des difficultés de régulation du chauffage, à cause du temps derelance plus long et du manque de réactivité du local.

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Une masse thermique importante et accessible est à prévoir dans les locaux suivants :

• les locaux à occupation de jour dans les logements, le séjour par exemple ;• les locaux fortement ensoleillés ;• les locaux avec de fortes charges internes (ordinateurs, occupants,…).

Pour résumer, la propriété des constructions à forte inertie est de conserver une température stableet de se réchauffer ou se refroidir très lentement, alors que les constructions à faible inertiesuivent sans amortissement ni retard les fluctuations de température. Ainsi, pour l’été, uneconstruction à forte inertie thermique associée à un système de ventilation la nuit permettra, pourcertaines régions, d’assurer le confort thermique sans avoir recours à un système de climatisation. Enmi-saison et en hiver, elle permet de stocker une partie de la chaleur solaire qui pénètre dans lebâtiment et limite ainsi la demande de chauffage.

Enfin, l’étude dynamique d’un bâtiment à partir d’observations thermographiques, qui ont lieu à uninstant donné sans connaître l'histoire thermique récente du bâtiment, ne semble pas envisageable.

4. LA THERMOGRAPHIE INFRAROUGE

La thermographie infrarouge permet de mesurer les températures superficielles de parois opaques.Pour cela, elle utilise le rayonnement infrarouge émis par la surface dans l’intervalle de longueurd’onde ∆λ qu’elle peut détecter. Cette mesure est sans contact et à distance : elle ne perturbe doncpas le milieu étudié.

4.1. Rappels sur la thermographie infrarouge

Le flux émis par une surface réelle est proportionnel à celui émis par le corps noir (corps deréférence pour le rayonnement thermique) à la même température mais plus faible car pondéré parl’émissivité ε de la paroi. Cette émissivité rend complexe la mesure car elle dépend à la fois de ladirection et de la longueur d’onde. Une première hypothèse simplificatrice est de considérer le corpsétudié comme un corps réel gris diffusant c’est à dire dont l’émissivité est indépendante de ladirection et de la longueur d’onde. Cette dernière hypothèse est justifiée car la bande spectrale∆λ des caméras est généralement étroit. D’autre part, si on ne s’écarte pas de la normale de plus 40 à50°, la luminance est quasi indépendante de la direction.

On a donc

ε'λ = ε = constante sur ∆λ et sur l'hémisphère (23)

Et le flux émis par la surface ayant une température absolue T s’écrit :

( ) ( )TT CNΦ=Φ .ε (24)

Pour un corps réel quelconque, on a la relation suivante :

ε + ρ + τ = 1 (25)

où ε est l’émissivité, ρ, le facteur de réflexion et τ le facteur de transmission.

Observons (figure 5) ce que reçoit la caméra. Elle reçoit :

• le flux émis par la surface elle-même : ε . φCN(Ts) ;• le flux réfléchi par la scène thermique et en provenance de l’environnement radiatif de la

scène ; on fait l’hypothèse que les "objets" de l'environnement radiatif ont des températuresidentiques (environnement uniforme) et que ce sont des corps noirs, alors :φ(Tp) = (1-ε) . φCN(Tp), où Tp est la température de l’environnement.

• le flux émis par l’atmosphère elle-même : on considère le facteur de réflexion del’atmosphère comme nul d’où εatm + τatm = 1 ; alors ce flux s’écrit : (1 - τatm) . φatm.

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Notons que les deux premiers flux traversent l’atmosphère qui en absorbe une partie (plus ou moinsimportante selon sa teneur en eau et en CO2). Ils doivent donc être pondérés par son facteur detransmission τatm.

Figure 5 - Bilan radiatif d’une scène thermique

Le flux reçu par la caméra s’obtient par le bilan suivant :

φreçu = ( ε . φCN(Ts) + (1-ε) . φCN(Tp) ) . τatm + (1 - τatm) . φatm (26)

A partir de ce flux reçu on déduit φCN, puis la température du corps étudié. A la vue ce bilanthermique (éq. 26), il est facile de constater qu’un moyen d’augmenter l'exactitude de la mesure estde rendre le terme (1-ε) . φCN(Tp) négligeable ; pour cela, une forte émissivité est nécessaire. Uneautre difficulté de la mesure par thermographie est la détermination du flux émis par l’atmosphère.En effet, ce flux est calculé à partir de la température de l‘atmosphère et du facteur detransmission atmosphérique, qui dépend de l’humidité relative de l’air et de la distance à laquelle setrouve la caméra par rapport à la paroi.

Appliquée à la thermique de l’habitat, la thermographie infrarouge n’est pas simple. En effet, comptetenu des remarques précédentes, il est préférable d’effectuer les mesures depuis l’extérieur pouréviter les flux parasites des sources chaudes environnantes tels que l’éclairage, les radiateurs, lestuyaux de chauffage…. Néanmoins, le fait que les résistances thermiques superficielles intérieuresdes parois soient supérieures aux résistances superficielles extérieures induit que les écarts detempérature sont plus importants à l'intérieur qu'à l'extérieur au droit d'un défaut d'isolation parexemple, ce qui favorise les prises de vue de l'intérieur. Mais, de l'extérieur, il ne faut pas que letemps soit humide pour que le facteur de transmission atmosphérique soit élevé. Il faut aussi qu’ilfasse chaud à l’intérieur des locaux et froid à l’extérieur pour avoir un gradient de températureimportant. La paroi ne doit pas être ensoleillée pour ne pas avoir de réflexions de l’environnement. Parconséquent, le mieux serait d’opérer de nuit, par temps froid, sec et découvert pour favoriser leséchanges avec le ciel plus froid que les nuages. Le problème est que le régime doit être établi, ce quin’est généralement pas le cas la nuit. Les conditions optimales sont donc l’après midi, par tempscouvert mais sec sur une façade qui n’a pas vu le soleil.

Malgré ces précautions, les résultats obtenus par thermographie infrarouge sont exploitables sur unplan qualitatif mais peu sur un plan quantitatif. En effet, on peut mettre en évidence les différencesd’isolation thermique, les défauts d’isolation, les ponts thermiques… Mais les températures de paroidonnées par la caméra n’ont pas une exactitude raisonnable pour espérer un calcul fiable desdéperditions. En effet, la température de surface dépend non seulement du flux de chaleurtraversant la paroi, mais aussi du transfert de chaleur entre la surface et l’ambiance (flux de chaleursuperficiel), qui peut être très variable, car il dépend du vent, de la géométrie de la surface(rugosités, angles), ce qui modifie fortement la Rse qui est en fait assez mal connue mais dont lavaleur influe directement sur les ∆T mesurés entre surfaces saines et surface à défaut.

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4.2. Exemple de thermogrammes dans le domaine de l’habitat [5]

Défaut d’isolation thermique :

Figure 6 - Façade d'un supermarché - Bardage uniforme - Température ambiante ext + 8°C.

Problème très important sur l'isolant puisque la température de paroi est supérieure à 19°C !

Ponts thermiques :

Figure 7 - Le thermogramme montre des ponts thermiques linéaires horizontaux sur les 3planchers. Au plancher intermédiaire, il y a transfert thermique plus important (12°C pour unetempérature extérieure de +6°C) à l'intersection avec le conduit vertical de cheminée. Il s'agitd'un pont thermique ponctuel dans ce cas. La chaudière à gaz se trouve dans le garage nonspécifiquement chauffé, en bas à gauche. Les combles ne sont pas aménagés, ni chauffés ;l'isolation est sommaire.

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CONCLUSION

Le contexte actuel incite à réduire au maximum les consommations énergétiques des bâtiments. Lesbâtiments neufs, compte tenu de la réglementation thermique en vigueur, peuvent être considéréscomme peu énergivores. Il n’en est pas de même pour les bâtiments existants. La mise en place d’auditénergétique de ces derniers est donc nécessaire pour évaluer ou mesurer leur performancethermique et à terme proposer des solutions pour diminuer leur consommation. La thermographieinfrarouge est un moyen rapide et non perturbateur pour aider à la réalisation de ces auditsénergétiques. Mais d’apparence simple, cette technique de mesure fait appel à des notions complexes.De fait, la maîtrise de ces notions est essentielle pour effectuer une analyse pertinente desrésultats obtenus par thermographie.

REFERENCES

[1] www.actu-environnement.com, Lettre actu environnement 4 septembre 2007

[2] G. GAURRACINO « Performance énergétique de l’enveloppe d’un bâtiment et réglementation » Techniques del’ingénieur BE 9 065. Janvier 2004.

[3] Guide réglementaire du CSTB : Réglementation thermique 2005, Règles de calcul Th-Bât, Th-U

[4] N. MOREL, E. GNANSOUNOU. Energétique du bâtiment. Cours polycopié de l’Ecole Polytechnique Fédéralede Lausanne

[5] www.institut-thermographie.com.