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Pratiques psychologiques 19 (2013) 203–220 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com ScienceDirect Psychologie clinique Les interventions préventives en santé mentale du jeune enfant vues par leurs bénéficiaires : l’exemple du projet CAPEDP Participants’ perception of a perinatal home visiting program conducted by psychologists: The CAPEDP project T. Saïas a,,b,k , C. Delawarde c , É. Pintaux d , S. Favriel e , C. Ménier a , I. Matos a , R. Dugravier f , F. Tubach g,h,i , A. Guédeney i,j,k , T. Greacen e a Laboratoire de psychopathologie et processus de santé, université Paris-Descartes, 71, avenue Edouard-Vaillant, 92774 Boulogne-Billancourt cedex, France b Département de psychologie, université du Québec à Montréal, H3C 3P8 QC Montréal, Canada c CERMES3, CNRS UMR 8211, EHESS, université Paris Descartes, Sorbonne Paris-Cité, Inserm U988, 75270 Paris cedex 06, France d Conseil Général de Seine-et-Marne, 77100 Meaux, France e Laboratoire de recherche de l’EPS Maison-Blanche, 75020 Paris, France f Institut de puériculture, 75014 Paris, France g Département d’épidémiologie et recherche clinique, hôpital Bichat, AP–HP, 75018 Paris, France h Inserm, CIE801, 75018 Paris, France i Université Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité, 75013 Paris, France j Hôpital Bichat, AP–HP, 75018 Paris, France k Inserm U669, PSIGIAM, Maison-de-Solenn, 75014 Paris, France Rec ¸u le 19 septembre 2013 ; accepté le 17 octobre 2013 Résumé Dans le champ de la santé mentale, les interventions à domicile se développent depuis 40 ans. L’étude actuelle décrit le point de vue d’un échantillon de participantes au premier projet expérimental d’intervention de promotion de la santé mentale à domicile en France. Des entretiens qualitatifs ont eu lieu avec 16 participantes. L’analyse montre que leur expérience de la recherche était positive. Elles ont souligné la souplesse du dispositif, la qualité de l’intervention en termes de guidance, de soutien psychologique et la qualité de la relation avec les intervenantes. Les critiques concernaient l’inexpérience Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (T. Saïas). 1269-1763/$ see front matter © 2013 Société franc ¸aise de psychologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.prps.2013.10.003

Les interventions préventives en santé mentale du jeune enfant vues par leurs bénéficiaires : l’exemple du projet CAPEDP

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Pratiques psychologiques 19 (2013) 203–220

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

ScienceDirect

Psychologie clinique

Les interventions préventives en santé mentale du jeuneenfant vues par leurs bénéficiaires :

l’exemple du projet CAPEDP

Participants’ perception of a perinatal home visiting program conductedby psychologists: The CAPEDP project

T. Saïas a,∗,b,k, C. Delawarde c, É. Pintaux d, S. Favriel e, C. Ménier a,I. Matos a, R. Dugravier f, F. Tubach g,h,i, A. Guédeney i,j,k, T. Greacen e

a Laboratoire de psychopathologie et processus de santé, université Paris-Descartes, 71, avenue Edouard-Vaillant,92774 Boulogne-Billancourt cedex, France

b Département de psychologie, université du Québec à Montréal, H3C 3P8 QC Montréal, Canadac CERMES3, CNRS UMR 8211, EHESS, université Paris Descartes, Sorbonne Paris-Cité, Inserm U988,

75270 Paris cedex 06, Franced Conseil Général de Seine-et-Marne, 77100 Meaux, France

e Laboratoire de recherche de l’EPS Maison-Blanche, 75020 Paris, Francef Institut de puériculture, 75014 Paris, France

g Département d’épidémiologie et recherche clinique, hôpital Bichat, AP–HP, 75018 Paris, Franceh Inserm, CIE801, 75018 Paris, France

i Université Paris Diderot, Sorbonne Paris Cité, 75013 Paris, Francej Hôpital Bichat, AP–HP, 75018 Paris, France

k Inserm U669, PSIGIAM, Maison-de-Solenn, 75014 Paris, France

Recu le 19 septembre 2013 ; accepté le 17 octobre 2013

Résumé

Dans le champ de la santé mentale, les interventions à domicile se développent depuis 40 ans.L’étude actuelle décrit le point de vue d’un échantillon de participantes au premier projet expérimentald’intervention de promotion de la santé mentale à domicile en France. Des entretiens qualitatifs onteu lieu avec 16 participantes. L’analyse montre que leur expérience de la recherche était positive. Ellesont souligné la souplesse du dispositif, la qualité de l’intervention en termes de guidance, de soutienpsychologique et la qualité de la relation avec les intervenantes. Les critiques concernaient l’inexpérience

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (T. Saïas).

1269-1763/$ – see front matter © 2013 Société francaise de psychologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.http://dx.doi.org/10.1016/j.prps.2013.10.003

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des intervenantes, l’absence de contacts avec d’autres parents, les difficultés liées à l’arrêt de la rechercheet la place insuffisante laissée aux pères. La discussion porte sur les enseignements à tirer de l’expériencedes bénéficiaires de cette intervention pour le développement d’actions préventives.© 2013 Société francaise de psychologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Étude qualitative ; Prévention ; Parentalité ; Programme ; Santé mentale

Abstract

Objective. – Home-visiting programs have become one of the most popular early childhood interventions,though their impact on parents and children remain uncertain. Outcomes measures often rely on experimentalquantitative design and little space is offered for the voices of those served by these interventions. This paperpresents the results of a qualitative protocol performed by the research team with participants in the CAPEDPproject which took place in France from 2005 to 2011.Method. – All 184 women who had accepted at least one home visit in the CAPEDP programme werecontacted and invited to participate. Individual and group interviews were conducted with the first 16 whoaccepted to participate. The semi-structured interview schedule addressed their overall appreciation of theproject, their initial concerns, the quality of their relationship with their home visiting psychologist, positiveand negative aspects of the intervention and any recommendations they might have for future interventions.Interviews were recorded, transcribed and anonymised. An inductive categorical thematic analysis wasperformed by the research team.Results. – Participants expressed overall satisfaction with the CAPEDP intervention, underlining the qualityof the relationships with the home visitors, usefulness of parental guidance, the fact that the interventioncould be adapted to suit their own personal agenda, routine and needs, the importance of learning how toaccept help and give help to others. Less positive aspects included the fact that the home visitors were notmothers themselves and that they lacked technical experience, the difficulty ending the relationship at theend of the 27-month project, insufficient integration of fathers, the difficult and time-consuming evaluationprotocol and the lack of interaction with other parents during the intervention.Conclusion. – Although mothers who accepted to participate in the qualitative interview schedule may havehad a more positive overall experience of the CAPEDP project than those who declined to participate,participants’ points of view provide potentially useful indications for adapting future home-visiting programsto the French context.© 2013 Société francaise de psychologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Qualitative analysis; Mental Health Promotion; Parentality; Home-visiting program.

1. Introduction

Dans le champ de la santé des jeunes enfants, les interventions préventives à domicile cen-trées sur la promotion de la santé mentale se développent dans différents contextes internationauxdepuis les années 1970 (Kahn & Moore, 2010) et de manière plus récente en France (Dugravier,Guédeney, Saïas, Greacen, & Tubach, 2009), au travers de la mise en place de projets expéri-mentaux (Tubach et al., 2012). Considérant que les environnements socioéconomiques nocifs à lasanté affectent la santé des familles et des enfants (Kovess, 2009 ; Marmot, 2006 ; Segre, Losch,& O’Hara, 2006 ; Von Rueden, Gosch, Rajmil, Bisegger, & Ravens-Sierberer, 2006) et qu’ilscontrecarrent la possibilité pour les familles vulnérables d’accéder aux services de droit commun,les praticiens et chercheurs engagés dans le développement d’actions préventives ont cherchéà développer des interventions proactives ciblées. Ces interventions prennent place au domicile

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de familles identifiées comme étant vulnérables et volontaires pour recevoir des interventionsprécoces (débutant le plus souvent en période prénatale), intensives (ces programmes prévoientenviron une visite toutes les deux semaines) et prolongées (d’une durée de 2 à 5 ans) (Gomby,2005, 2007). Les stratégies utilisées relèvent de l’éducation pour la santé et de la promotion de lasanté mentale.

Les résultats de ces programmes sont encourageants mais restent hautement dépendants deleur contexte d’implantation. Seule la moitié des programmes publiés montre un impact sur lesenfants concernés (Kahn & Moore, 2010). Les questions de l’évaluation (Kahn & Moore, 2010),de l’implantation (Durlak & DuPre, 2008), de la fidélité à l’intervention (Saïas et al., 2012) et dela capacité de ces programmes à retenir les familles (Gomby, 2007) sont régulièrement mises enavant pour expliquer leurs réussites comme leurs échecs.

Les familles participant à ces interventions restent relativement peu associées à l’évaluation del’implantation ou des résultats des programmes, la logique évaluative reposant sur des paradigmesévaluatifs issus des modèles de santé publique, généralisés dans ces modèles d’intervention. Lesprogrammes de ce type doivent en effet, pour être diffusés, pouvoir faire l’objet d’une évaluationréplicable standardisée (Delawarde, Briffault, & Saïas, 2013).

De nombreux auteurs ont ainsi appelé au développement d’études d’implantation et qualitativesdestinées à investiguer les processus sous-tendant la réussite des programmes d’intervention, enportant une attention particulière aux acteurs de ces interventions. Cependant, les études portantsur les professionnels ont dans ce champ pris le pas sur les études qualitatives centrées sur lesbénéficiaires (Hebbeler & Gerlach-Downie, 2002 ; Krysik, LeCroy, & Ashford, 2008 ; Lecroy &Whitaker, 2005).

L’étude actuelle décrit le point de vue de mères ayant participé au premier programme expéri-mental d’intervention préventive à domicile mené en France et destiné à des familles en situationde vulnérabilité psychosociale : le projet Compétences parentales et attachement dans la petiteenfance : diminution des risques liés aux troubles de santé mentale et promotion de la résilience(CAPEDP) (Saïas et al., 2013).

2. Méthodologie

2.1. Le projet CAPEDP

Le projet CAPEDP consistait en une implantation et une évaluation d’un programme de visitesà domiciles mené auprès de jeunes mères volontaires, recrutées sur la base de facteurs de risquepour la santé mentale de l’enfant, identifiés dans la littérature scientifiques. Il s’agissait d’un essairandomisé contrôlé où les participants bénéficiant de l’intervention CAPEDP étaient comparés àun groupe témoin recevant les soins habituellement dispensés en France pour les jeunes mères.Les jeunes mères rencontrées au sein de dix maternités franciliennes devaient, pour participer àla recherche :

• être primipares;• être âgées de moins de 26 ans et ;• présenter au moins l’un des trois critères suivants :

◦ avoir un niveau d’éducation inférieur à 12 années (niveau bac),◦ et/ou se déclarer socialement isolées◦ et/ou bénéficier de la CMU ou de l’AME.

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Un total de 440 participantes ont été recrutées de 2006 à 2009 et 222 ont été randomisées versle groupe « intervention CAPEDP ». Les visites CAPEDP, menées à domicile par des psycho-logues cliniciennes, commencaient au septième mois de grossesse pour se poursuivre environdeux fois par mois jusqu’au deuxième anniversaire de l’enfant. Un manuel d’intervention propo-sant des contenus à aborder avec les familles était utilisé par les psychologues-intervenantes, quinégociaient les objectifs d’intervention avec les familles. Des outils spécifiques, par exemplela vidéoscopie (Guedeney & Tereno, 2012), étaient également proposés aux familles. Lesintervenantes-psychologues étaient âgées de 23 à 34 ans au moment de leur recrutement. Toutesont recu une formation spécifique aux objectifs de la recherche avant leur première visite de terrain.

Les objectifs principaux de cette intervention étaient (a) de réduire la psychopathologie desenfants de deux ans en agissant notamment sur (b) la dépression post-natale et (c) le développementde compétences parentales. Le protocole (Tubach et al., 2012) et l’intervention (Saïas et al., 2013)sont décrits ailleurs et les résultats de cette recherche sont publiés par ailleurs.

Une étude de la fidélité à l’intervention CAPEDP (Saïas et al., 2012) a mis en évidence queles principales composantes de l’intervention étaient respectées lors des visites à domicile, maisque les conditions de vie précaires de la plupart des familles recrutées avaient un impact majeursur la conduite de l’intervention. Les psychologues ont ainsi dû passer un temps important àsoutenir ces familles dans leurs démarches, en leur apportant un soutien particulier au regard desstresses psychosociaux rencontrés. Certaines thématiques d’intervention, prévues dans le canevasd’intervention CAPEDP, ont en réalité été moins adressées qu’initialement prévues : l’éducationà la santé des familles, l’adaptation de l’environnement au développement de l’enfant, le projetde vie de la mère ou encore la logistique du quotidien, le support du père et le jeu avec l’enfant.

2.2. Protocole qualitatif

Cet article porte sur les entretiens réalisés auprès des mères ayant participé à la recherche.La participation à des entretiens a été proposée par deux assistants de recherche, au téléphoneou par courrier postal, à l’ensemble des femmes ayant participé au programme. Seize mères ontrépondu favorablement à l’invitation de l’équipe de recherche. Les entretiens, individuels ou engroupe avaient lieu au sein d’un Centre médicopsychologique ou dans les locaux de l’équipe derecherche. Les personnes y participant recevaient un chèque cadeau de 50 D .

Les entretiens ont été menés par le chef de projet ou par le responsable méthodologique de larecherche. La grille d’entretien semi-directif a été inspirée de celle réalisée dans le projet Preparingfor Life, projet d’intervention similaire à CAPEDP et réalisée par l’équipe de recherche du Dr.Orla Doyle du University College Dublin, avec autorisation. Cette grille questionnait :

• le sentiment global par rapport au projet ;• les attentes initiales des participantes ;• la qualité des relations avec l’intervenante à domicile ;• les bénéfices percus de la participation à CAPEDP ;• l’inscription du projet dans la vie quotidienne ;• les problèmes rencontrés et les recommandations des participants pour le futur développement

de ce type d’intervention.

La durée moyenne de ces entretiens était de 61 minutes (39 à 86 minutes) L’ensemble desentretiens ont été enregistrés après consentement éclairé, transcrits et anonymisés.

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2.3. Analyse des résultats

Les entretiens transcrits ont fait l’objet d’une analyse thématique par codage, regroupementet catégorisation répétées jusqu’à saturation des thématiques présentes (Gray, 2009) suivant uneapproche d’analyse catégorielle de contenu (Strauss & Corbin, 1990). Les entretiens étaient ana-lyses par trois assistants de recherche et le responsable méthodologique. D’une première étape,trois entretiens étaient analysés par tous les investigateurs et des catégories de réponse étaientidentifiées pour chacune des trois principales questions de l’entretien semi-structuré (le vécu duprojet par la mère, ses recommandations pour d’autres projets de ce type, sa situation actuelle).Ensuite, les catégories identifiées étaient utilisées pour catégoriser les autres entretiens. Le respon-sable méthodologique vérifiait la maîtrise de la méthode de catégorisation pour les deux premièresanalyses de chaque investigateur. Si un investigateur identifiait une nouvelle catégorie, il en faisaitpart au groupe, qui décidait de son inclusion ou non dans la grille de catégorisation. Dans l’étapefinale de l’analyse, l’équipe a regroupé les catégories dans des thèmes conceptuels.

À la suite de cette phase de catégorisation, l’ensemble des entretiens ont été repris et le vécude chaque participante a été confronté par deux chercheurs à la grille des catégories obtenues,afin de faire émerger d’éventuelles données singulières signifiantes.

2.4. Profil des participantes

Seize femmes ont répondu à l’invitation de l’équipe de recherche de relater leur expérience lorsde quatre entretiens individuels et quatre entretiens de groupe. En tout, 14 des 16 participantesavaient recu l’intégralité du programme CAPEDP : 32 visites en moyenne jusqu’au deuxièmeanniversaire de l’enfant. Les deux autres participantes avaient souhaité arrêter le projet avant sonterme : une avait recu trois visites jusqu’au 18e mois de son enfant et l’autre sept visites jusqu’ausixième mois de son enfant.

3. Résultats

Le Tableau 1 récapitule l’ensemble des thématiques et catégories identifiées dans l’analyse desentretiens.

3.1. Les attentes initiales des participantes au projet

Les participantes interrogées ont peu fait état d’attentes particulières par rapport au programmed’intervention, ou de motivation spécifique lors de leur recrutement en maternité.

Certaines femmes ont évoqué une curiosité par rapport au projet de recherche :

« J’ai compris qu’il y avait un projet et que je suis invitée et j’ai tout de suite dit “oui”, plutôtpar curiosité, mais c’est très lentement après que je commencais à comprendre comment cava se passer. »,

ou l’intérêt percu d’une visite régulière d’une personne avec laquelle échanger :

« Cela m’a été présenté de facon gaie, légère, je n’étais pas obligé de faire ceci, cela, c’étaitsimple, vous lisez bien le document, ce n’était pas trop compliqué. Une visite de temps entemps pour discuter. ».

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Tableau 1Synthèse des résultats.

Thème Catégories

Attentes initiales des participantes CuriositéIntérêt d’une visite régulièreIntérêt pour la guidance parentaleMéfiance

Apports de CAPEDP pour la famille Satisfaction globaleGuidance parentaleSoutien psychologiqueRéassuranceLutte contre l’isolementEspace de paroleAborder son projet de vieApprendre à demander de l’aideApprendre à recevoir de l’aide

Relations avec les intervenantes Grande proximitéCompétence et motivationDisponibilité et adaptabilitéCapacité de réassuranceIntérêt d’une présence extérieureIntérêt d’une professionnelle rencontrant d’autres famillesRelation de dépendance

Inscription de CAPEDP dans la routine quotidienne Adaptation de l’intervention aux rythmes et aux besoinsRythme trop fréquentPossibilité d’arrêter à la demande

Limites et recommandations Pas de bénéfice percuInexpérience des intervenantesIncompétence technique des intervenantesLongueur des visitesPas de rencontres avec d’autres participantsDifficulté de l’arrêt à 2 ansPlace insuffisante laissée aux pères

Autres thématiques Les critères d’inclusionRelations avec les autres professionnels de santéDifférences avec la PMI ou autres professionnelsL’évaluation CAPEDPL’intérêt porté sur l’ensemble de la familleLa culture des participantesLa capacité à aider les autres

La motivation la plus fréquemment évoquée est celle de la guidance parentale, pour ces jeunesfemmes primipares.

« L’intérêt de la recherche, elle m’a expliqué que c’était pour moi aussi par rapport àmon enfant. Je me suis dit que peut-être comme c’est mon premier enfant je ne sais pascomment. . . comment prendre, je suis sans parents, je suis sans l’appartement et tout ettout. »

Plusieurs participantes ont évoqué une certaine méfiance par rapport aux motivations del’équipe de recherche :

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« Nous, avec mon ancien conjoint, on s’est méfiés au début. On n’avait pas compris ce quec’était. On croyait que c’était plus un truc d’assistant social qui venait surveiller les mèresjeunes. »

« Au début, je me disais que je voyais un psychologue, est-ce que je suis folle ? Pourquoije dois voir un psy ? Au fur et à mesure, ce n’était pas du tout ca. »

3.2. Les apports de CAPEDP pour la famille

Les participantes ont pointé les apports de l’intervention CAPEDP pour leur famille : le soutienapporté, l’espace de parole offert et l’opportunité d’apprendre à être aidée.

« C a aide. »

« C’était sympa. »

« C a m’a énormément [apporté]. »

« Ca va me manquer. »

D’autres pointent davantage la guidance parentale :

« Je ne savais pas encore distinguer les pleurs, j’avais peur de faire mal les choses. »

« Quand elle joue avec [enfant], je vois vraiment qu’elle a eu quelque chose qu’aucunepersonne n’a concernant les enfants : des petits jeux, des chants. Les petits jeux que jedécouvre faire, c’est elle que je copie. »

« J’avais tout le temps des questions qui me passaient par la tête. [. . .] Quand [intervenante]arrive, je lui pose des questions et elle m’apporte des papiers, tout ce qu’il y a à propos dudéveloppement de l’enfant. »

« On aura plus d’assurance en tant que mère pour le prochain enfant. »

Les participantes évoquent régulièrement les supports écrits fournis dans le cadre de larecherche (« Fiches Familles ») comme un aspect particulièrement intéressant, en termes deguidance parentale.

« Pour moi, les fiches familles m’ont beaucoup aidé et m’aident beaucoup. »

« En fait avoir un bout de papier en soi c’est intéressant, mais on peut lire une fois deschoses qu’on va pas forcément percuter du premier coup. Bon on va poser le papier sur latable et dans trois semaines, le papier, on sait même plus où il est. Alors que là, ce qu’elleessaie de faire, c’est “je te donne le papier mais la semaine prochaine on en reparle de cepapier”. Comme ca c’est vraiment imprimé quoi, ca a vraiment servi à quelque chose. »

D’autres participantes soulignent la préoccupation constante des intervenantes de fournir desréponses à leurs questions.

« C’est vrai que même s’ils ne savent pas ils s’arrangent toujours pour avoir le renseigne-ment. »

« Quand elle ne savait pas, elle me disait qu’elle me donnerait la réponse la prochaine fois,qu’elle demanderait à ses collègues. »

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Elles soulignent l’intérêt du soutien émotionnel et la possibilité de verbaliser leurs problèmes :

« Le point fort, c’est le point psychologique. C’est-à-dire le soutien moral, les parolesréconfortantes. »

« Dans ma période noire, j’ai su qu’elle était là aussi. C’est comme si c’était un psy quivraiment entrait dans nos vies. »

« [Intervenante] m’a fait comprendre des choses sur moi, pas seulement centrées sur le bébé,sur la famille, quelque chose de profond en moi, qui ne voulait pas sortir et que j’avais misde côté. »

La réassurance est également évoquée comme un bénéfice percu par certaines mères :

« C’est par l’intermédiaire de la personne de CAPEDP que je peux me rassurer. »

L’intérêt de CAPEDP pour lutter contre l’isolement et la dépression est pointé :

« Elle a très vite compris comment je marchais, que je pouvais très vite me refermer surmoi-même [. . .] Pendant une période, je n’ai parlé à personne à part mon fils, et elle acontinué à appeler toutes les semaines. Elle ne s’est pas dit “bon, elle est bizarre”, elle nes’est pas fermée, bloquée là-dessus. »

L’espace de parole offert dans le projet constitue pour les participantes un élément positifparticulier. Cet espace de parole prenait la forme d’une opportunité de contacts réguliers :

« Je lui ai parlé souvent de ma vie. »

« Quand on savait qu’elle passait, je savais que pour moi, c’était le moment de faire unepause, soit avec la famille, soit avec les amis. Je voyais quelqu’un de l’extérieur qui savaitpas forcément les choses de ma vie et qui me faisait du bien. »

Comme une opportunité, pour certaines femmes, d’aborder son projet de vie avec l’intervenante :

« Elle me donne des conseils pour tout ce dont j’ai besoin par rapport à ma vie, si c’estprofessionnel, si c’est social. »

Pour certaines participantes, l’entretien qualitatif a été l’opportunité de souligner l’intérêt deCAPEDP pour développer leur capacité de demander de l’aide, d’apprendre à parler à quelqu’un :

« J’ai trouvé que quand je disais – tout simplement de dire, ou de se laisser parler – déjàc’est une solution. »

Comme le fait d’accepter de recevoir de l’aide :

« Aujourd’hui, je suis capable d’accepter que les autres m’aident. »

3.3. Les relations avec les intervenantes

La relation entre les familles et les psychologues intervenantes a été largement renseignée dansle cadre de ces entretiens qualitatifs. Les participantes ont fait état de la qualité de la relation avecles intervenantes, de leurs compétences, de leur disponibilité, de leur capacité à les réassurer,de l’intérêt percu de bénéficier du soutien d’une personne extérieure à leur réseau social, et del’intérêt de la visite d’une professionnelle rencontrant d’autres familles.

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La relation avec les intervenantes est fréquemment définie par le haut degré de proximité avecles familles, tout en restant dans un cadre professionnel.

« Oui c’est quasiment une amie parce que maintenant que le projet s’est terminé, je nel’invite pas pour une soirée, mais pour moi ce contact est très important. Je pense luienvoyer quelques photos par exemple de quelques phénomènes. Ou peut-être envoyer une-mail qui dit que ma fille elle est comme ci ou comme ca, voilà. Donc c’est plus commeca, ca dépasse le projet. Mais voilà je ne peux pas dire qu’on est devenues des vraiesamies. »

« Donc voilà ; même si c’est pas mon amie, j’ai bien conscience qu’on est pas des meilleuresamies, c’est pas ca l’idée. C’est juste de savoir en tant qu’être humain, qu’il y a une personne.Même si c’est son job, qu’on sait que c’est son taf et pas autre chose. »

« Mais l’approche CAPEDP, grand sourire, cela change des médecins, le discours médical,patient–rendez-vous. »

Les intervenantes sont souvent décrites comme compétentes et motivées, par les participantes.

« À chaque fois que l’on a parlé d’un sujet, elle connaissait des réponses. »

« À travers elles, je trouve les réponses à mes questions. Et les satisfactions. »

« Elle connaît bien son travail, elle est motivée par rapport à mon bébé. »

La disponibilité et l’adaptabilité des intervenantes aux situations particulières font égalementpartie des éléments positifs de la relation évoquées par les participantes

« J’avais une écoute permanente, au téléphone, physique, Internet, dès que j’avais des soucis,je pouvais l’appeler, c’était bien. »

« La voir venir dans ma chambre [de maternité] alors que je ne l’attendais pas du tout [. . .],j’ai trouvé que c’était gentil de sa part de passer, surtout que je m’y attendais pas. Je pensaisque ca allait vraiment commencer quand je serai rentrée à la maison avec l’enfant et elle dela voir venir dans ma chambre je me dis “ah ca fait plaisir quand même”. »

« C’est-à-dire qu’elle ne laisse pas tomber quoi. Si demain ma vie se bouleverse du jourau lendemain et que je me retrouve à la rue, bon elle va pas m’aider, m’héberger, c’estpas ca que je veux dire. . . mais c’est juste qu’on sait qu’il y a au moins une personne quiva pas nous oublier, qui va au moins nous appeler la semaine prochaine parce qu’on aurarendez-vous avec elle. »

Parmi les compétences professionnelles des intervenantes, la capacité à réassurer les femmesparticipant au projet a été mentionnée comme une thématique particulière.

« Quand [intervenante] venait me voir, elle me rassurait, elle me disait qu’il fallait fairecomme-ci, comme-ca et ca m’a beaucoup aidé. Mon compagnon est là, mais il ne connaîtrien aux enfants le pauvre et mes parents je ne leur parle plus, je n’ai pas d’amis. J’avaisjuste [intervenante] qui venait. »

« On peut avoir par exemple des discussions avec des membres de la famille qui ne vontpas forcément comprendre ce que l’on veut dire, alors que la psychologue elle essaie decomprendre. Par exemple, j’aime bien avoir des câlins avec mon bébé et mes sœurs medisent que je suis trop câline avec mon bébé, elles disent que c’est n’importe quoi, alors que

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quand j’en parle avec elle, elle me dit que c’est tout à fait normal, plein de petites chosescomme ca. »

Enfin, les participantes ont pointé à la fois l’intérêt pour elles de recevoir une personneprofessionnelle extérieure à leur réseau social

« Ce que j’ai aimé, c’est qu’une intervenante de l’extérieur vienne chez moi et me demandecomment ca se passe avec mon fils, l’évolution, le développement, “est-ce que des fois vousavez des conflits ?”, comment les résoudre. C’est bien pour les femmes qui ont un premierenfant. »

« C’est bien d’avoir une personne extérieure à la famille. J’en ai parlé à mon époux, il m’adit que cela pouvait être sympa, si tu as un souci, des choses que tu ne sais pas, des chosesà apprendre, des questions à poser, la psychologue pourra t’aider, comprendre le pourquoidu comment. »

Tout comme le fait de recevoir une professionnelle visitant d’autres familles

« Elle nous dit : “si vous savez seulement combien de fois j’ai entendu ces histoires, maisvraiment les mêmes chaque fois”. Et ca m’a tellement soulagée parce que encore la veilleje pensais que je suis la plus malheureuse au monde et que peut-être c’est de ma faute parceque ca s’est passé de la même facon et que c’est très mauvais. »

« Parfois aussi comme on sait qu’elles vont chez d’autres familles, on pose des questions etelles nous répondent que chez les autres familles c’est pareil, c’est le même cas. C’est biende savoir que d’autres enfants font la même chose. »

Par ailleurs, certaines participantes ont évoqué une relation proche relevant de la dépendanceavec leur intervenante.

« J’avais du mal à me comporter, peut-être avoir comme le baby-blues, comme ca le truc,donc j’avais besoin d’elle un peu plus à côté de moi, tout le temps quoi. »

« Quand ca s’est arrêté, il y a eu un manque après. »

3.4. L’inscription de CAPEDP dans la routine des familles

Les participantes interrogées ont fait état de la facilité d’inscription de CAPEDP dans leurroutine quotidienne, notamment en raison de la capacité d’adaptation du rythme d’intervention àleurs contraintes comme à leurs besoins.

« C’est bien dosé. Comme je ne travaille pas, j’étais à la maison et [Intervenante] venaittoutes les deux semaines. Elle a voulu venir tous les 10 jours, mais je lui ai dit que deuxsemaines, c’était bien. Elle est venue comme ca jusqu’à ce que je reprenne une formation,et après elle est venue tous les mois. »

« Quand il y avait un souci et que je ne pouvais pas être là, j’appelais et ca a toujours étéreporté sans aucun problème. On arrivait toujours à s’arranger. »

« Ce sont les mamans qui décident du rythme. »

Le rythme, lorsqu’il était proposé de manière très régulière était percu par certaines partici-pantes comme trop important et justifiait une demande d’adaptation.

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Participante : « Au début une fois par semaine et après je travaillais, quand ma fille a eu 4,5 mois. Elle m’appelait pour savoir si j’étais disponible. . . Je trouvais que ca faisait beaucoup depasser une fois par semaine et elle m’a dit que si ca me dérangeait je pouvais lui dire et que ca nela dérangeait pas de ne passer qu’une fois toute les deux semaines. »

Animateur : « Ca faisait beaucoup par rapport à quoi ? »Participante : « Ben, après, on n’a plus rien à dire, quoi. »De même, la possibilité d’arrêter la participation au projet à n’importe quel moment faisait

figure d’élément important pour plusieurs femmes.Animateur : « C’était important de savoir que vous pouviez arrêter à n’importe quel moment ? »Participante : « Oui, très. C a rassure. Parce que c’est s’engager, quand même. »

3.5. Limites et recommandations

La grille d’entretien sollicitait systématiquement les personnes interrogées sur les limitespercues du projet et sur leurs éventuelles recommandations pour l’améliorer. Trois élémentsprincipaux ont été mis en évidence par l’analyse thématique : les limites liées aux intervenantes,l’absence de contacts sociaux au sein du projet, et la place insuffisante laissée aux pères.

Plusieurs participantes ont évoqué d’emblée le fait que CAPEDP ne leur a pas apporté debénéfices particuliers.

« C’était sympa. En fait, comme je le disais à mon intervenante, quand elle m’a demandéle bilan de tout ca, je lui ai dit qu’il ne fallait pas qu’elle le prenne mal, mais moi person-nellement, ca ne m’a rien apporté. »

« Pour moi c’était très intéressant de participer dans ce projet. Je ne peux pas dire que ca m’aapporté beaucoup d’aide parce que je n’ai pas posé des questions qui étaient très précisesou que je cherchais quelque chose de particulier. »

Certaines participantes ont ainsi évoqué les limites liées à l’inexpérience des intervenantes, ouau fait que celles-ci ne soient pas mères, tout en intervenant auprès d’elles en tant que nouvellesmères

« La deuxième personne qui est venue, je trouvais qu’elle n’avait pas trop d’expérience. »

« En fait j’ai eu un souci c’est que quand je parle et que je m’emporte un peu je dis “tu”,mais c’est juste une expression : “tu vois”. Et ca au début elle m’a souvent pas tapé sur lesdoigts mais presque en me disant : “je veux qu’on se vouvoie”, qu’elle veut garder le côtéprofessionnel, et tout. . . »

« Je ne pouvais pas faire confiance à l’intervenante [. . .] parce que pour moi, en fait, elleavait mon âge et elle n’avait pas d’enfant. »

« J’avais un peu regretté de n’avoir pu moi-même être avec une intervenante qui avait étésoit mère récemment, soit au moins dans sa vie. . . »

Plusieurs participantes évoquent le défaut de compétences techniques des intervenantes

« Au début avec [Intervenante] j’ai eu quelques petits soucis parce qu’en fait, elle répondaitpas à mes questions. C’était un peu compliqué. En gros à la naissance on s’est vu vraimenttoutes les semaines, ou en tout cas tous les 9–10 jours. Et moi j’attendais un peu d’ellequ’elle soit là pour répondre à toutes mes petites questions du style : pendant que moi jen’avais pas confiance de faire prendre le bain à mon fils. Je ne savais pas comment le tenir,

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enfin j’avais vraiment une grosse frayeur de le faire glisser. C’était des petites questionscomme ca ou elle, elle savait pas me répondre directement. Sur l’allaitement aussi. J’aiallaité et j’allaite encore. Pareil sur l’allaitement, comme c’était pas sa spécialisation, ilfallait attendre la semaine d’après ou qu’elle m’appelle plus tard dans la semaine. Donc cac’était un peu. . . Bon après je sais qu’elle sait pas tout, on peut pas tout savoir. Mais ca,ca m’a un peu dérangée au début car je me suis demandée à quoi ca servait qu’elle soitlà en fait [. . .] Donc du coup il fallait absolument que j’attende d’avoir telle réponse à maquestion, alors j’oubliais la question après. Je lui reposais deux semaines après elle aussiavait oublié la réponse. À ce niveau-là, c’était un peu le bordel au début donc pendant unmoment je n’ai plus voulu la voir car je me suis dit que ca ne servait à rien. À part toutesces questions, j’avais franchement rien à lui dire. »

La longueur des interventions est parfois pointée comme une limite nécessitant une négociationavec l’intervenante :

« Des fois ca peut être long quand on est fatiguée et qu’on a l’enfant qui pleure et qui veutdormir aussi ca peut être long [. . .] Je lui demandais de raccourcir un peu. »

Plusieurs mères auraient souhaité rencontrer d’autres jeunes femmes dans la même situation :

« Mon fils ne va pas à la crèche donc je ne connais aucun jeune parent. Même des parents jen’en connais pas, à part mes tantes mes oncles, mais c’est pas pareil quoi. Voilà donc sur cecôté-là une rencontre ca aurait pu. . . Je me dis que j’aurais rencontré des amis forcément.Je ne cherche pas des amis à tout prix parents. Mais c’est juste intéressant de pouvoir parlerà des jeunes femmes comme nous qui ont eu un enfant comme nous. »

Certaines participantes ont noté la difficulté liée à l’arrêt du projet aux deux ans de l’enfant.Cette difficulté pouvait concerner l’arrêt de la relation, comme le fait que le projet ne continuepas jusqu’à l’entrée en maternelle des enfants.

« Trois ans c’est quand même court parce que après il n’y a pas de suivi. Du jour au lendemainse dire au revoir. . . C a y est c’est fini on ne verra plus la personne. . . »

« C’est juste histoire de se quitter. . . Parce que du jour au lendemain moi ca me paraîtcomplètement. . . j’y suis pas encore arrivée, j’appréhende beaucoup quoi. »

Enfin, la place insuffisante prévue pour l’intervention auprès des pères a été mentionnée commeune limite par certaines participantes, concernées par l’inclusion de leur conjoint dans ce projetd’intervention :

« C a m’aurait bien plu de poser certaines questions avec la présence de mon conjoint commeca il aurait pu être au courant de choses qu’elle m’apprenait aussi. Même s’il va pas for-cement le faire après, mais juste que l’information passe dans sa tête aussi, ca a manquévachement quoi. Du coup lui il était mal à l’aise. Les premières fois, il restait, mais il étaitsuper mal à l’aise parce qu’il sentait bien qu’elle venait pour la mère et l’enfant. Du coup,il avait pas vraiment sa place et moi je savais pas trop comment faire non plus. »

3.6. Autres thématiques

Les entretiens ont finalement permis de faire émerger des thématiques supplémentaires. Plu-sieurs femmes ont ainsi évoqué les critères d’inclusion dans la recherche percus comme trop

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sélectifs : une question a été ajoutée dès le premier entretien à la grille d’entretien et concernait laperception des participantes des critères d’inclusion dans la recherche. Plusieurs participantes ontfait état de leur surprise initiale, tout en ayant compris l’intérêt de la recherche et de son aspect« sélectif » au cours de l’intervention.

« C’est le fait qu’elle ait précisé le “moins de 25 ans”. Je me rappelle qu’avec mon conjointon s’était vraiment dit c’est louche. Ils doivent nous prendre un peu peut être pour des. . .

pas des débiles mais presque dans le sens où le fait qu’on soit jeune on nous met dans lacase “cas soc”, jeunes qui ont déjà un enfant. Donc pour nous, on s’est dit “eux ils veulentnous surveiller. C’est bizarre comme étude” [. . .] En fait ca n’a rien à voir avec ce que jepensais. C’est juste qu’à moins de 25 ans, on est beaucoup moins au courant. »

Les relations avec les autres professionnels de santé :

« Je sais que je peux voir la psychiatre de la PMI. J’y allais au début que pour le petit, pesée,vaccin. Maintenant, j’y vais pour le petit et pour moi. »

« C’est vrai que la personne qui est venue à la maison m’a ramené la fois d’après l’adressed’un centre et le numéro de téléphone. J’ai appelé et j’ai trouvé un bon nutritionniste 100 %remboursé par la sécu. C’est des petits trucs comme ca. »

Des différences avec les services de PMI ou le corps médical ont également été soulignées :

« Quand j’ai des soucis comme ca je demande parfois des conseils à la PMI mais c’est biend’avoir une psychologue qui vient à la maison, car c’est plus approfondi que quand on a unrendez-vous à la PMI. »

« Alors parfois, je ne sais pas si c’est mieux de faire ce que la pédiatre dit ou de suivre lesconseils d’autres mamans ou d’une personne comme celle qui venait à la maison. Honnête-ment je préférerais écouter une personne comme celle qui vient à la maison que la pédiatre.J’en ai fait plusieurs, jamais ce n’était grave et quand je sortais de là-bas et que je rentraisà la maison, rien ne changeait. C’est vrai que quand votre collègue venait je lui posais desquestions et puis elle me disait de faire ci ou ca, j’ai essayé et c’était bien. »

La question de l’évaluation de l’intervention et de la présence de l’équipe d’évaluation a étéévoquée :

« Je vais toujours chercher un temps pour ca. Parce que moi j’ai besoin de ca, de dire, dem’évaluer de temps en temps. Enfin ca aide aussi, ca fait grandir mon enfant. »

« C’était curieux de les voir faire des choses avec ma fille. Mais j’ai trouvé qu’elle m’ademandé certaines questions, comme par exemple, elle m’a demandé est-ce que ma filletape les deux objets ensemble, quelque chose. C’est curieux, je disais non à la plupart desquestions mais le jour même, ou le lendemain ou deux jours après je trouvais qu’elle le fait.Soit parce qu’elle le faisait avant et je n’ai pas vu soit je me disais peut-être elle a entendule bruit. Mais c’était très souvent comme ca. »

Certaines participantes soulevant par ailleurs la lourdeur de ce processus d’évaluation.

« Je ne supportais pas le grand questionnaire. »

« Moi ce qui m’avait pas dérangé, mais ce qui était plus fatigant c’était quand j’étais enceintevers la fin quand elles étaient venues avec les questions. C a faisait pas mal de questions et

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j’étais fatiguée. Les questions sont trop longues, quand on est enceinte on est fatiguée à lafin »

L’intérêt porté par CAPEDP sur l’ensemble de la famille, ainsi que sur les participantes en tantque femme a été mis en valeur.

« La PMI, c’est plus sur les enfants et CAPEDP il y a la maman et l’enfant. »

« [L’intervention était centrée] sur ma personne au début, ensuite centrée sur la maman etensuite que sur [enfant]. Mais jamais eu l’impression qu’on s’éloignait de moi quand ons’occupait de [enfant]. »

La thématique de la culture survient de manière très régulière dans les entretiens, couvrant deschamps différents relevant soit de l’attente par rapport au projet, soit d’un élément important dansla conduite des interventions.

« [Les supports écrits d’information sur le développement de l’enfant] je les ai trouvé assezneutres, oui. Juste comme une sorte d’information. Moi je trouvais beaucoup de généralités.Donc pour moi c’était comme un tout petit peu déployé de la culture francaise parce quec’est très différent des russes. »

« Pour moi, une des raisons de participer comme je suis étrangère, je me suis dit que capourrait m’aider à mieux comprendre la culture francaise. »

« Elle demandait comment ca s’était passé au niveau des examens, au niveau del’accouchement, sur ma culture aussi, car je suis sénégalaise. »

Enfin, quelques participantes ont également mentionné le fait que CAPEDP leur avait permisde développer des compétences d’aide pour les autres mères.

« Maintenant je peux parler de mes problèmes, j’ai la capacité par rapport aux autres d’aidermême si j’ai toujours été entreprenante. »

Animateur : « Est-ce qu’aujourd’hui, vous vous sentez capable d’aider d’autres femmes ? »Participante : « Oui, je me sens capable. Je le fais d’ailleurs. C’est comme un don, pour moi.

J’aime aider et rendre service. Quand il y a des problèmes par rapport aux enfants, à mes prochesj’essaie de leur expliquer. »

4. Discussion

Cette recherche visait à mettre en évidence le vécu de participantes à une recherche évaluatived’un programme de visites à domicile. Les résultats ont mis en valeur que de nombreux bénéficesétaient percus par les participantes (bénéfices de l’intervention : qualité de l’intervention en termesde guidance, de soutien psychologique, qualité de la relation avec les intervenantes, capacité àaider et être aidée et bénéfices par rapport au protocole : capacité à négocier le nombre de visites,souvent jugé trop lourd, possibilité de se rétracter), la relation proche et négociable avec uneintervenante privilégiée étant au centre des entretiens. Par ailleurs, des critiques étaient formulées,concernant principalement le manque d’expérience des intervenantes en termes de puériculture,le fait que les intervenantes n’étaient pas mères elles-mêmes, les difficultés liées à l’arrêt de larecherche, et la lourdeur pour certaines du protocole d’évaluation de la recherche. En termesde recommandations, les participantes ont souligné la nécessité d’ouvrir ces interventions sur le

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groupe social et d’offrir des opportunités de contact avec d’autres parents, et de laisser davantagede place aux pères et conjoints des femmes concernées.

L’interprétation des résultats doit être nuancée au regard :

• des limites liées au recrutement des participantes ;• de la fonction des animateurs de groupe et ;• de la variabilité du mode de recueil de données (entretiens individuels et entretiens de groupe).

Si l’ensemble des personnes incluses dans le groupe bénéficiant de l’intervention CAPEDP a étécontacté, seules 16 personnes, dont 14 ayant participé aux 27 mois du projet ont été rencontrées lorsdes entretiens. Le mode d’organisation des entretiens et leur localisation (au centre de recherche)ont sans doute participé à ce biais de recrutement, favorisant les participantes particulièrementengagées dans CAPEDP. Ces mères avaient recu 32 visites à leur domicile en moyenne contre18 en moyenne pour l’ensemble des participantes au projet (incluant celles ayant cessé le projetavant son terme) et 31 pour les familles ayant suivi l’ensemble du projet. Par ailleurs, le tauxd’attrition dans le groupe bénéficiant de l’intervention CAPEDP était de 56,6 % après 27 moisd’intervention, soulignant la particularité de l’échantillon ayant été rencontré dans le cadre decette recherche qualitative en termes de fidélité au projet.

Par ailleurs, les deux chercheurs ayant interrogé ces participantes lors des entretiens individuelsou de groupe étaient tous deux engagés dans le comité de pilotage de la recherche, en tant quechef de projet de la recherche et co-responsable méthodologique. Le statut de ces animateurs asans doute été de nature à influencer la conduite des entretiens et la nature des réponses fournies.

Cependant, les résultats obtenus après catégorisation des verbatims font écho à différentesrecherches qualitatives portant sur des programmes similaires. Ainsi, dans une étude centréesur le programme Healthy Families America (HFA), Krysik et al., 2008 ont identifié auprèsdes participantes, des représentations semblables à celles de CAPEDP. Ces similarités portentnotamment sur la perception des intervenantes privilégiées comme des personnes compétentes ettrès proches (« une amie » ; « quelqu’un qui écoute » ; « quelqu’un qui m’aide avec mes enfants »),bien que les auteurs rapportent que près de la moitié des participantes aient exprimé des difficultésà entrer dans le programme (méfiance lors des premières visites notamment). Dans un programmeirlandais similaire à CAPEDP, les auteurs de Preparing for Life ont identifié que des parents suivislors du sixième mois de leur enfant témoignaient d’une relation avec leur intervenante de naturecomparable à celle décrite dans CAPEDP ou HFA (qualité de la relation de soutien, capacité desupport, de l’information fournie. . .), regrettant cependant l’absence de groupes de rencontresentre parents, à l’instar des éléments soulignés dans les résultats qualitatifs de CAPEDP (Doyle,2012). Dans ces deux études, les auteurs identifient également des résultats différents de ceuxobtenus auprès de l’échantillon CAPEDP, la plupart de ces résultats étant attribuables à la naturedifférente des projets et des objectifs poursuivis (notamment sur le projet de vie, ou encore l’aideau retour à l’emploi pour HFA).

Nos résultats soulignent les aspects positifs de l’expérience CAPEDP par les participantes àcette étude qualitative, et témoignent de la possible implantation d’un programme de visites àdomicile soutenu. Le sentiment global du projet est positif pour l’ensemble des participantes etle principe de la visite à domicile est bien accepté. Plusieurs participantes ont souhaité soulignerle fait que le programme de visites était parfois trop régulier et lourd, celui-ci pouvant cependantêtre négocié avec l’intervenante. Le suivi prolongé a été pointé comme un atout par les partici-pantes, en permettant aux psychologues d’assumer un rôle d’intervenantes privilégiées, suscitantun lien de confiance auprès de familles parfois vulnérables et, par leur présence régulière sur

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27 mois, de soutenir les familles sur différents registres thématiques (guidance parentale, soutienpsychologique, présence régulière et soutenante. . .). Cependant, l’arrêt aux deux ans de l’enfantest mentionné comme une limite, suggérant une possible dépendance des familles au programmede soutien et questionnant la pertinence de celui-ci en termes d’action préventive.

Les éléments fondamentaux de l’intervention (soutien psychologique, guidance parentale) ontété retrouvés dans le discours des participantes, de manière cohérente avec ce qui a pu être identifiédans le contenu des visites à domicile effectivement réalisées par les intervenantes (Saïas et al.,2012). Les participantes soulignent ainsi la spécificité du soutien psychologique et moral dansCAPEDP, complétant le soutien recu dans d’autres services de santé et notamment les servicesde Protection Maternelle et Infantile, davantage centrés pour les participantes sur la santé del’enfant. Les manques pointés par les mères interrogées, concernant principalement les compé-tences techniques des intervenantes sur le champ de la santé périnatale (allaitement notamment)et de la puériculture, questionnent la pertinence du recours à une intervenante-psychologue pri-vilégiée, sans que le protocole prévoie pourtant de recourir systématiquement aux compétencesd’une équipe pluridisciplinaire (nutritionnistes, éducateurs, infirmiers. . .), comme cela peut êtrele cas dans d’autres programmes similaires (e.g., Institut national de santé publique du Québec,2005). Ce constat questionne aussi l’intérêt d’un rapprochement entre des dispositifs semblablesà CAPEDP et les services de PMI, dont les missions légales s’articulent notamment autour durecours à de nombreux types de professionnels.

Au regard des résultats de cette étude, des recommandations pour le développement d’actionsultérieures émergent : renforcement des compétences pluridisciplinaires dans le cadre d’un travailinstitutionnel, développement d’opportunités de rencontres entre parents, recours à des interve-nantes expérimentées. Enfin, plusieurs participantes s’étant exprimées sur la question des critèresd’inclusion de la recherche ont suggéré la nécessité de les élargir. Celles-ci jugent en effet que cer-taines familles, identifiées comme éligibles pour ce type d’interventions peuvent ne pas en avoirun réel besoin tandis que des familles non éligibles (notamment sur le critère d’âge) pourraientbénéficier des services de cette nature. Ce constat fait écho à la démarche adoptée dans le cadredes Services Intégrés pour la Périnatalité et la Petite Enfance au Québec, services à domicilecomparables à CAPEDP dans lesquels les critères d’inclusion ont été élargis suite aux étudesd’implantation, le critère d’âge (moins de 20 ans) ayant été supprimé des conditions d’éligibilité(Therrien et al., 2011).

5. Conclusion

Les résultats de cette étude qualitative soulignent l’intérêt d’un programme soutenu de visitesà domicile pour les participantes interrogées. Ils contribuent à mettre en évidence les élémentsnécessaires à la réussite de telles interventions (qualité d’un lien privilégié avec une intervenante,souplesse des dispositifs proposés, guidance parentale, soutien psychologique. . .) et autorisentégalement à penser des modalités d’amélioration de ces dispositifs par l’analyse des critiqueset recommandations des participantes. De futures recherches devront cependant investiguer lapossibilité d’implanter de tels programmes avec une intensité ajustée aux moyens des dispositifsde droit commun. Un des résultats principaux de cette recherche est la satisfaction des participantesd’avoir bénéficié d’un programme de 32 visites en moyenne sur 27 mois. Il semble évident que detelles actions ne peuvent à ce jour être déployées auprès de l’ensemble des familles en situationde vulnérabilité en exprimant la demande. Il apparaît ainsi nécessaire de tester la faisabilité etl’efficacité de programmes d’actions courts reposant sur la qualité d’un lien et sur les compétencestransversales d’intervenantes privilégiées.

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Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Remerciements

Les auteurs remercient également les 440 familles ayant participé au projet, les intervenanteset évaluatrices à domicile CAPEDP : Joan Augier, Amel Bouchouchi, Sandrine Désir, AnnaDufour, Cécile Glaude, Audrey Hauchecorne, Gaëlle Hoisnard, Virginie Hok, Alexandra Jouve,Anne Legge, Céline Ménard, Marion Milliex, Elodie Simon-Vernier, Alice Tabareau ; FrancineMesseguem et l’équipe du CMP Binet, l’équipe du Laboratoire de recherche de l’EPS Maison-Blanche, Véronique Laniesse et Alexandra Avonde pour leur gestion financière ; Estelle Marcaultpour l’implantation et le monitoring de la recherche ; Cécile Jourdain, Pierre Arwidson, BéatriceLamboy et Gérard Guillemot pour leur soutien et leur aide au développement de la recherche ;Nathalie Fontaine, George Tarabulsy et Michel Boivin pour leur aide au développement desoutils de l’intervention et de la recherche ; Gérard Guillemot pour son aide dans l’élaboration desréseaux de terrain ; Laure Angladette, Drina Candilis, Judith Fine, Alain Haddad, Joana Matos,Anne-Sophie Mintz, Marie-Odile Pérouse de Montclos, Diane Purper-Ouakil, Francoise Soupre,Susana Tereno, Bertrand Welniarz et Jaqueline Wendland pour leur supervision des intervenanteset évaluatrices.

Financement et promotionCAPEDP est financé par le Ministère de la santé dans le cadre du Programme hospitalier de

recherche clinique national (PHRC AOM 05056) et l’Institut national de prévention et d’éducationpour la santé (INPES). Le promoteur de la recherche est la Direction de la recherche clinique etdu développement de l’Assistance publique–Hôpitaux de Paris.

CAPEDP a recu l’autorisation du Comité de protection des personnes Île-de-France IV(2006/37) et de la CNIL (907255). Le numéro de déclaration Clinical Trial est NCT00392847.

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