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Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

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Le pays basque : sa population, sa langue, ses moeurs, sa littérature et sa musique

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LOISIRS D'UN ETRANGER

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CHALON-SUR-SAONE

IMPRIMERIE FRANÇAISE ET ORIENTALE E. BERTRAND

S, Ruè des Tonneliers, S

1901Tous droits réservés

Page 4: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Auteur d'un Essai d'une Bibliographie de la Langue basque,

et qui a tant fait pour les études basques

mon ami de trente ans;

WENTWORTH WEBSTER.

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J'ai réuni dans les pages suivantes quelques étudeset quelques notes pour distribuerà mes amis. Elles ontété écrites pour les Sociétés scientifiques et littérairesdu Sud-Ouest de la France, dont j'ai l'honneur d'êtremembre. Je les ai un peu revues, et j'y ai faitquelques additions provenant des livres et des docu-ments qui ont paru depuis la première publication.Ces _additions seront faciles à reconnaitre en regar-dant la date des livres et documents cités. Je ne fais

pas ce recueil des pièces disparates, parce que je leurcrois une importance scientifique, mais à cause desgrands changements qui sont survenus dans le paysbasque et dans les environs. Les touristes qui visitentces contrées pour la première fois sont portés à croire

que les Basques et le pays basque ont toujours ététels qu'ils le sont aujourd'hui. Bien au contraire,presque tout y a changé, et jamais les mutations n'ontété plus grandes que dans ces trente dernières annéeset pendant le second Empire. L'ancienne autonomieest tout à fait passée, mais l'honnêteté et la fiertéqu'elle a engendrées persistent toujours. Beaucoup de

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vieilles coutumes sont tombées en désuétude, beau-

coup ont disparu de vieux :monuments ont étédétruits, les routes surtout ont été transformées. Lesfeux de saint Jean, comme cérémonie religieuse, sontpresque négligés; autrefois, on les allumait devantchaque ferme et devant chaque maison à la campagne,on en faisait le tour avec prière. On n'allume guère àprésent le feu au carrefour le plus proche après

un décès, et les passants n'y disent plus le Pater~et ne jettent plus une pierre sur le tas à côté. Lescérémonies de mariage et d'enterrement ont peu à peuperdu leur couleur locale et sont devenues pareilles àcelles du reste de la France.Les vieilles danses basques,dont on se vantait autrefois, sont inconnues, saufdans la Soule. Même les grands jeux de pelote, quipassionnent les Basques, se sont beaucoup modifiés de-puis l'invention du chistera, et depuis l'existence d'uneécole de joueurs professionnels pour des prix d'argent.La maladie des châtaigniers a amené des changementsdans le régime de la propriété foncière. On laisse le

cidre pour le vin, et les vignes remplacent les vergers.Mais lés plus grandes modifications sont celles occa-sionnées par les changements et les améliorations desroutes et par le chemin de fer. Il n'y a guère une seule.route ni un seul chemin dans le pays basque qui n'aientpas été modifiés depuis que je connais le pays. C'esten ne tenant pas compte de ces changements que lestouristes se trompent le plus. Ils s'imaginent suivre

les traces de César ou de Charlemagne, des pèlerinsou des armées du moyen âge, ou même des troupes de

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la Révolution ou du premier Empire, lorsqu'ils par-courent une route qui n'existait pas il y a vingt outrente ans. Les cartes à consulter pour ces événementsantiques ne sont pas celles des. itinéraires de Joanneet de Bâdeker, ni les excellentes cartes publiées der-nièrement par le Ministère de l'intérieur. Jusqu'autemps de Charlemagne, il faut avoir recours aux Itiné-rairés d'Antonin pour le moyen âge, il faut étudierles routes des pèlerins et les chemins de Saint-Jacques;pour les guerres de la Révolution et du premierEmpire, les cartes de Cassini, autrement on s'expose às'égarer tout à fait et à faire entièrement fausseroute. On peut signaler les mêmes erreurs dans lesétudes sur les monuments et sur l'architecture. Je mesuis convaincu, par tout ce que j'ai vu quand jevisitais le pays .pour la première fois, que l'architec-ture et la construction romaines avaient été imitées etconservées, surtout pour les ponts et les chaussées,longtemps après le départ des anciens Romains. Maistous ces ponts sont tombés aujourd'hui, toutes lesvieilles routes ont été abandonnées ou remaniées. Demême pour les églises, toutes ou presque toutes ont étérestaurées. Les réparations et reconstructions, quel-quefois nécessaires, toujours louablesà un certain pointde vue, n'ont pas toutes été heureuses au point devue de l'archéologie. J'ai vu le style pur roman, des-cendant direct et légitime du gallo-romain, changéen une espèce d'arabe bâtard, par l'erreur d'un archi-tecte restaurateur; j'ai lu des descriptions enthou-siastes de fenêtres ogivales du XlIIo siècle que j'ai vu

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construire en plein XIXe siècle. Par conséquent, il'estdevenu beaucoup plus difficile aujourd'hui de déter-miner avec certitude l'âge d'un monument du paysqu'il n'était il y a trente ans. La vieille maisonbasque, cette union remarquable de la maison depierre avec la maison de bois (produit d'un paysoù la pierre et le bois abondaient également) avec lesdeux pentes du toit toujours inégales, ne se construitplus. Il faut en chercher les rares exemples intactsdans les villages et les endroits écartés. Je dis tout ceci

pour montrer qu'il ne faut pas toujours se fier aupremier Guide ou aux premières impressions de

voyage, si on veut posséder une connaissance exactedu pays. Quoique je ne sache pas le basque, et qu'unétranger ne puisse jamais connaître un pays commeun indigène, je crois n'avoir fait dans ces études aucuneaffirmation qui ne soit pas basée ou contrôléesur place,

sur le basque, le gascon, ou l'espagnol J'ai évitésoigneusement les traductions et les documents deseconde main J'ai beaucoup appris sur place des

paysans eux-mêmes.Il y- a dans ces pages, je le sais bien, un grand

défaut l'absence des références aux grandes collectionsdes lois, des conciles, des chroniques et des histoires,des livres volu~ineux des grands auteurs et des auto-rités, que je n'ai pas pu consulter. Je n'ai eu que leslivres de ma propre bibliothèque. Je n'ai pas eu les

moyens de me procurer les grands tomes qui font leluxe d'un savant. Il y a bien des répétitions. Lesmêmes faits sont racontés, les mêmes citations repro-

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duites devant des audiences diverses et dans des annéesdifférentes. Il y a aussi des différences dans les traduc-tions. Une traduction du gascon de Bayonne, ou de l'es-pagnol, n'est pas nécessaire en écrivant pour les Bayon-nais, ni du béarnais en écrivant pour la Société Ramondde Bagnères-de-Bigorre, et le grec et le latin n'ontpas besoin d'interprète pour les lecteurs de la Revuede Linguistique. Depuis longtemps, des infirmitésd'abord, et la vieillesse ensuite, m'ont empêché depoursuivre mes courses et mes recherches dans le pays,de sorte que dans ce recueil il n'y a rien de completnulle question n'est vidée. Ce livre n'est que le fruit de

mes loisirs; s'il peut rendre quelque plaisir à mes amis,ou servir à répandre l'intérêt du pays, voilà tout ce

que je désire. Quelques notes peuvent même paraitreun peu vulgaires, comme celle sur le serment solennel,et celle sur la formule Sator-Arepo. J'avoue queje ne peux pas expliquer celle-là; mais je crois quedans l'histoire, aussi bien que dans les sciences natu-relles, il est bon toujours de constater et d'enregistrerl'existenced'un fait; et pour celle-ci, qu'il faut signaler

une erreur aussi longtemps qu'elle persiste.Assez d'apologie. Comme je ne mets pas ce livre dans

le commerce, il me serapermis d'exprimer ma reconnais-

sance aux nombreux amis de tous les rangs de la sociétéet de toutes les opinions, qui m'ont si généreooementaidé dans mes recherches. Parmi tous les changementsque j'ai signalés ci-dessus, il y a une chose qui n'a paschangé le bon accueil, l'amabilité que j'ai reçus pen-dant mes premières années dans le pays basque, ne

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m'ont jamais fait défaut; ils n'ont fait qu'augmenteret qu'ajouter à ma dette de reconnaissance envers, età mon estime pour ce bon, fier et religieux peuplebasque, parmi lequel j'ai vécu tant d'années. Ontrouvera plus loin les noms de ceux à qui je dois leplus et ceux aussi de mes savants amis au delàdes Pyrénées, qui ont été mes guides et mes maitresdans l'histoire et l'archéologie d'Espagne. Je pensaisun moment ajouter une petite bibliographie à la finde chacun de ces articles, mais je me suis restreintaug indications données dans les notes et dans la listedes ouvrages cités. L'admirable Essai d'une Biblio-graphie de la Langue basque, par le professeur dis-tingué Julien Vinson, est une véritable mine de ren-seignements, et doit être dans les mains de tous'ceuxqui désireront savoir ce qui a été écrit sur Escuara etEscualdunac.

Outre les morceaux imprimés ici, deux de -mesétudes, revêtues d'une robe espagnole, ont paru dansle Boletin de la Real Academia de la HistoriaAltabiskar~co Cantua (vol. III, 139) et HebraiaantesPor°tu~ueses de San Juan de Lu,~ en 1619 (vol. XX,302), par la bonté du R. P. F. Fita, S. J.~ à qui j'ail'honneur d'être redevable de la traduction. J'ai écritaussi en anglais une foule d'articles éphémères sur le

pays dans les journaux et magazines anglais, publiésà Biarritz, à Saint-Jean-de-Luz, en Angleterre et surle continent.

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LOISIRS D'UN ÉTRANGER AU PAYS BASQUE

I

Tous les jours lascience ouvrede nouvelles voieset pénètrede sa lumière les recoins les plus obscurs; l'histoirede la terresedégagepeu à peu de l'inconnu. Hier encore, nous comptions

par dix mille siècles l'âge du monde habitable; aujourd'hùinotre horizon s'étend bien au delà du passé qu'on assignait àl'apparition de l'homme sur notre planète. Mais laissant decôté les vastes cycles astronomiques et ces grandes décou-vertes de lagéologie qui ont changé entièrement nos vues surla durée des temps primitifs, nous ne nous occuperons ici

que des siècles de l'humanité nous voulons à notre tourtâcher d'atteindre du regard les perspectives lointaines quedévoile progressivementl'étude de la paléontologie et de l'ar-chéologie préhistorique.

L'ère de Moïse, les commencements du royaume del'Égypte, les civilisationsde l'Assyrie, de l'Inde, de la Cbine,

1. La Noucelle Reocce. Tome X, 15 mai 1881.

LES BASQUES'

BASQUES ET IBÈRES

1

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l'époque de la première immigration des Celtes en Europe,voilà, pour les savants du dernier siècle, les périodes les plusreculées qui s'offrissent à leurs travaux historiques; leurs re-cherchesavaient forcément pour limites ce qui nous reste desécrivains grecs et romains. Aujourd'hui, par delà les languesactuelles de l'Inde, nous avons trouvé le sanscrit; et par delàl'hébreu, l'idiome assyrien, préçédé lui-même par le sumé-rien, la langue d'Accad. De notre vieille Europe, nous com-mençons à entrevoir quelques profils au milieu des brumesde l'aube, mais les plans ne se dessinent pas avec la mêmecertitude que pour l'antiquité orientale. Nous connaissonsquelque peu les habitants des maisonnettes lacustres; et,s'éloignant de plus en plus du nôtl'e, les âges successifs dufer, du bronze, de la pierre polie, du silex; mais on n'en sauraitencore établir la chronologie exacte: notre marche n'est pasassurée, le sol glisse et se dérobe sous nos pieds: Un seul faitest clairement acquis: avant l'immigration des Celtes enOrient, avant l'arrivée des Grecs et des Latins, avant les pre-mières colonies égyptiennes ou phéniciennes, il y avait déjàune Europe civilisée, d'une civilisation, il est vrai, distincteet différente de celle des nations aryennes dont le flot devaitla recouvrir; d'une civilisation inférieure, mais déjà fort au-dessus de la sauvagerie.

Ce monde antérieur a disparu, laissant à peine quelquestraces. Mais comme le géologue devine et reconstruit un con-tinentsubmergéau moyendesrares îlots, des roches s'élevantencore au-dessus des vagues, l'archéologue, des débris d'an-ciens peuples qui émergent çà et là du grand océan aryen,conjecture ce que fut la civilisationprimitive de l'Europe an-

téhistorique. Les vestiges, très clairsemés, en ont à peine étéétudiés jusqu'à maintenant, et malgré les récents efforts dela science, nous ne possédons ni les faits ni les dates quipourraient autoriser des conclusions bien définies. Pour

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l'Égypte, nous avons eu les hiéroglyphes; pour l'Inde,-lesanscrit et les Védas les cylindres et les briques aux carac-tères cunéiformes nous disent l'histoire de l'Assyrie. EnEurope, nous ne saurions encore déchiffrer d'une manièreinattaquable les inscriptionsgravées par ceuxqui furent peut-être contemporains des habitantsd'Acca,d etdesanciens Égyp-tiens. L'idiome étrusque est à peu près un myst~re; las letrasdesconocidas de la vieille Ibérie attendent toujours leurChampollion. Les documents écrits sont rares et de peud'étendue. Nous le savons par les auteurs classiques, ceslangues avaient une littérature, des lois écrites, des annales,des poèmes composés selon les règles de l'art métrique, mais

pas une citation directe n'en est venue jusqu'à nous; déjà dutemps de Strabon on ne l'aurait plus comprise. C'est donc il

d'autres moyens qu'il faut avoir recours, et pour juger de cequ'étaient l'Ibérie préaryenne et l'ancienne civilisation duSud-Ouest de l'Europe, nous n'avons qu'une ressourcel'étude de la langue et de l'anthropologiede la dernière épavequi nous en ,reste, le peuple Basque ou E~cualdunac.

Ce serait aujourd'hui perdl'e son temps que de rappeler lesspéculations étrangesde nos pères sur le caractère et l'origÍn~de la langue basque ou esetiara. Le problème est el peu prèsrésolu, grâce aux travaux de savants nombreux, entre les-quels nous citerons W. de Hunnboldt, MM. d'Abbadie,membre delinstitut, le chanoine Inchauspé, Van Eys, JulienVinson, Fr. Ribary, et surtout le princa L.-L. Bonaparte 1.

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Études grammaticales surla lacac~ue euslaarienne, par A.-Th. D'An-BA))IK et J.-Augustin CHAHO. 1-lai-is, 18:16.

Le Verbe basque, par l'abbé INCHAUSPÉ. Paris,1358.Essai de Grammaire de la langu~ basque, par W.-J. y AN Eys.

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Page 25: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

L'escuara, onlesaitmaintenant,appartient au secondgroupedes idiomes, celui des idiomes agglutinants. Sa place estmarquée entre les langues agglutinantes finno-ourales del'Europe septentrionale, et les langues incorporantes del'Amérique du Nord. On n'a pas encore déterminé s'il existeou non des rapports entre le basque et tel ou tel des idiomesparlés aujourd'hui dans l'Ibérie Caucasienne.

Inutile de le dire pour ceux qui ont la moindre teinturedes procédés de la philologie moderne on est arrivé à cetteconclusion par l'étude et la comparaisondes formes gramma-ticales de la langue, de celles du verbe surtout. Le vocabu-laire escuarien, comme celui de quelques autres idiomes ag-glutinants, s'est recruté ailleurs en grande partie; on y découvredes mots celtiques, grecs, latins, limousins, espagnols,français, des mots de presque toutes les langues parlées parles races avec lesquelles les Basques ont été en contact.

Cette facilité d'emprunt a trompé quelques-uns de nos pré-décesseurs eta nécessairement donné lieu à des théories ab-

Grammaire comparée des dialectes basques, par W.-J. vAN Eys.Paris,18i9.

Essai sur la langue basque, par François RIDARY, traduit du hon-grois avec desnotes complémentaires, par Julien VINSON. Paris, 18i7.

Le Venbe basque en tableau~, accompagné de notes grammaticalesselon les huit dialectes de l'euskara, parle prince L.-L. BONAPARTE.Londres, 1869.

Pour ceux qui ne veulent faire qu'une étude comparative de l'es-cuara, la traduction de l'Essaide RIDAHY, par le professeurJ. VINSON,est peut-étre le livre le plus utile. Mais le Verbe basque, du princeL.-L. BONAPARTH,est, et sera probablement longtemps, l'ouvrage ca.pital pour ceux qui veulent analy ser à fond la langue basque.

Gramatica de los cuatros dialectos literarios de la la Lcngua Eus-lzara, por D. Arturo Campion. Tolosa Guipuzcoa,1884.

Baskische Studien.1. Ueber die Entstehung der Besugsformen deaBaskischen Zeitccorts, von Hugo Schuchardt. Tempsky-Wien, 1893.The Basque Venbj'oundand de,/lned by E. S. Dodgson. Alençon 1895,et d'autres études et brochures du même auteur.

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surdes échafaudées sur un langagedonton elierchai t l'origine

et la parenté dans le vocabulaire, au lieu de s'adresser auxformes grammaticales.

Non toutefois qu'il faille négliger la première de ces études

le vocabulaire a pour nous des révélations précieuses. MaxMüller et beaucoup d'autres ont montré comment, des motsmêmes d'une langue, on peut déduire l'état de civilisation de

ceux qui en firent usage. Par l'analyse du sanscrit et desidiomes aryens, ils nous ont appris où en étaientnos ancêtresavant la grande émigration des plateaux de l'Asie Centrale:

ces peuples connaissaient l'agriculture, tout au moins l'agri-culture primitive des races nomades; ils possédaient des ins-truments aratoires; ils s'étaient déjà soumis 1 a plupart desanimauxdomestiques. L'état social était fix~; la famille cons-tituée les tribus, obéissant à des lois et à des chefs, avaiententre elles des rapports politiques. Par une semblable analysedu vocabulaire des Basques, nous arrivons aussi à des con-jectures plus ou moins fondées sur leur civilisation primitiveavant tout contact avec les races aryennes'.

Cette méthode prouverait que l'usage des métaux étaitignoré des premiers Escualdunac; presque tous les vocablesvéritablement basques, employés pour désigner les instru-ments tranchants, sont des composés où entré le mot aitz(pierre dure, silex) aizkor, hache aitzur, pioche; aizto,couteau', La semaine basque n'avait que trois jours: le pre-niier, celui du milieu et le dernier; astelen, astearte, asteaz-ken. Les termes collectifs et abstraits semblent être en grandepartie empruntes; beaucoup d'espèces d'arbres portent des

1. Voyez MAX MULLLR, Lectures on the Science ol'lan;luac~e, pre-mière série, p. 245. Londres, 1864; et Histoinc cles Basques ou Es-rccalclunccc pr·imitifs, par A. BAUDRlMùN'1'. Paris, 1867.

2. Cenendant comparez ascia, hacha, hache, axt, axe, batehet,ascona.

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noms particuliers, mais le terme générique ordinaire arbolavient évidemment du latin arbor. Ainsi du terme c,~rre~e, roi.laun, le Seigneur, apparaft dans le nom de Dieu, mais ons'en sert aussi pour s'adresser à un simple particulier. Enbasque, les mots père, mcre, frère, sc~ur, ont l'air incontes-tablemeut originaux. La plupart des animaux domestiquesont aussi des noms basques.

Mais, tout en admettant que l'idiome escuarien est agglu-tinant et remonte à une antiquité plus lointaineque celle d'au-

cune des langues inflexionnelles dé l'Europe, on peut encoredemander la preuve que les Escualdunac, ou ceux qui enparlaient autrefois l'idiome, ont habité notre Occident avantles tribus aryennes. Les langues agglutinantes sont probable.

ment antérieures aux langues inflexionnelles, par le tempsaussi bien que par l'ordre logique de leur développement;mais certains peuples appartenant à la première de ces èaté-gories, les Magyars et lesTurcsentre autres, ontenvahil'Eu-rope bien longtemps après les immigrants de race aryenne.

Pour constater la priorité d'occupation des Escualdunac,il ne suffitdonc pas de détarminer le caractère de leur langue;mais ici nous pouvons invoquer le témoignage des auteursgrecs et latins, et surtoutrecourir à l'étude des noms géogra-phiques pareux conservés. Les vestiges d'une langueancienne

ou perdue, personne ne le conteste, se retrouvent longtemps

encore dans la toponymie. Il suffit, pour le constater, de

compter les noms celtiques sur la carte de France, ou les

noms mexicainsou des Peaux-Houges sur celle d'Amérique.Or, les anciens écrivains s'accordent tous pour dire qu'enEspagne. les premiers habitantsconnus furent les Ibères, d'oùle nom Ibérie appliqué au pays; puis vinrent les tribusceltesqui, en plusieurs districts, se fusionnèrent avec leurs prédé-

cesseurs pour formerles peuplades celtibères. Si les Basquesactuels sont les représentants modernes de ce mélange, on

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doit trouver dans ce qui nous reste en Espagne des noms an-tiques de localités, quelques traces de la langue des Basquesd'aujourd'hui.Ces traces existent-elles? La réponse, déjà dif-ficile, a été encore compliquée par le zèle des discutants.

De la parfaite connaissance des conditions d'un problèmedépend évidemment la solution du problème; de même qu'unêtre vivant, un idiome a sa période de croissance, de matu-rité, de dépérissement. Il ne reste jamais absolument station-naire. Une langue parlée il y a quelques siècles ne sauraitêtre identique à celle qu'on parle aujourd'hui; on trouveratoujours quelque changement soit dans le vocabulaire,soit dans la syntaxe. C'est déjà beaucoup qu'on puisse lareconnaître dans son individualité. Le basque d'à présentet le langage de l'ancienne Ibérie ne peuvent donc pas êtreentièrement similaires; l'on devra s'estimer heureux d'y ren-contrer assez de matériaux communs pour en établir l'ana-l'ogie essentielle. En outre, cette toponymie ibérienne nous aété transmise par des étrangers qui ne savaient mot du lan-gage du pays. Strabon et Méla se plaignent amèrement tousdeux de l'impossibilitéd'exprimer par la prononciation latine

ou grecque les- noms de la géographie ibériennet. Doubleobs-tacle à notre recherche des mots de la langue basque actuellechez les écrivains classiques. Qu'on prenne, par exemple, surtrois cartes seulement,l'une française, l'autreanglaise, l'autreallemande, .les noms de certaines villes de l'Orient; à peinepourra-t-on arriver à s'y reconnattre. Aussi bien, cette diffi-culté même rendra-t-elle la preuve plus coucluante si onréussit à la constater sans équivoque, ne fût-ce que pourun nombre très restreint de noms!.

1. STRABON, III, 3, vu-x. Po~cPONtus MELA, Dc Situ onbis, III, 1.2. Voyez LAIiRAVIl3NDI, Discurso laistcirico sobre la Cantabria,1736.

HUmJOLD1' (W. von), Prr~fung der Untersuclam:~era cïber die Urbe-wohner Hispaniens, etc. Berlin, 1821; traduit en français par A. MAR..

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La toponymie escuarienne actuelle est en partie descrip-tive nous y avons des « Mendigorri », Rougemont, Redhilldes « Irriberri », Villeneuve, Neustadt, Newtown des

« Iluro », Dax, les Eaux-Bonnes, Watertown, etc., etc. Surla carte de l'ancienne Espagne et de la Gaule, nous trouvonsdeux « Afendieuleial », l'un parmi les IIergètes, l'autre enLusitanie; deux c<lliberris », l'un en Bétique, l'autre aujour-d'hui Elne; trois « Iluro », J'un Oloron, l'autre dans le Tar-raconensis, le troisième dans la Bétique, Nous avons aussi« Iria Flavia », la cité de l'impératrice Flavia, Flaviaville,tout comme les nombrcluses Georgetown, Charleston, Louis-v ille, Fayetteville des États-Unis. Qui peut douter que le nom« Iliberri » ne soit identique avec les « Irriberri » de notredépar tement des Basses-Pyrénéçs et de la Navarre espa-gnole ? Inutile d'entasser ici d'autres citations, on les trou-vera dans les ouvragesdéjà mentionnésde W. vôn Humboldt,de Luchaire, etc. Les objectioris de M. van Eys ne noussemblent pas fondées

En conséquence, nous croyons qu'au temps des écrivainsclassiques, l'Espagne était habitée par des peuples qui par-laient une langue analogue à l'escuara modernes. Un raison-nement semblable établirait qu'ils s'étendaient en outre sur

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1. Il y a deux terminaisons basques auxquelles « culeia pourraitse rattacher: ~orri, rouge, écrit;~ur en Bigur (930), Beygur fU86),Baigur (1186) pour Baigorry, et ~ora, haut.

Pour les noms descriptifs, la toponymie doit toujours être comparéeavecla topographie. Baigorry, Ibai-gorri, rivière rouge, est véritable-ment un fleuve rouge. Mendiculeia est une colJinerouge.lluro, Oloron,est à la jonction de deux beaux gaves, une ville de bonues eaux.

2. C'est aussi la conclusion de Hübner, Monun:enta Linguae Iba·ric.ae. Prolegomena, CXLI. Berolini, 1893.

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le Midi de la France jusqu'au parallèle de l'Adour, sur laSardaigne et sur quelques districts de la Sicile.

Au sujet des Turdetani de la Bétique, Strabon rapporte (III,c. l, 25) qu'ils avaient depuis six mille ans des ouvragesécrits, des annales, des lois, des poèmes composés suivantles règles métriques; les autres Ibères connaissaient aussil'écriture, mais ne se servaient pas des mêmes caractères ilsn'avaient ni le même dialecte ni la même prononciation.

De toute cette littérature, il ne nous reste rien des carac-tères alors employés nous avons quelques inscriptions surmétal et sur pierrre, beaucoup de monnaies recueillies surnombre de points en Espagne et dans le Midi de la France,et dont les légendes, « las letras desconocidas' » des Espa-gnols, n'ont pas encore livré leur secret. Jusqu'à présent, ila été impossible d'utiliser ces inscriptions pour des rappro-chements analogues à ceux qu'on a faits au moyen de latoponymie classique.Bien que quelques-uns datent du tempsde la domination romaine, bien que des chiffres inconnus setrouvent gravés en compagnie de lettres et de mots latins, etque certains caractères soient restés en usage dans l'écritureespagnole jusqu'au commencementdu moyen âge1, personnen'est arrivé à les lire d'une façon satisfaisante, personne n'ena encore reconstitué l'alphabet. Pas une inscription bilinguen'a été constatée. Le « texte » le plus étendu que l'on con-naisse, dit texte de Castellon de la Plana, trouvé en 1851, estgravé sur une lame de plomb de quarante-trois centimètreset demi de longueur sur quatre de largeur. Il consiste enquatre lignes de trente-quatre centimètres chacune, contenantvingt et un mots composés de cent cinquante-trois lettres par-faitement conservées. Il y en a d'autres sur pierre, mais plus

1. Ontoyafia de la lengua castellana, compuesta poi· la Real rlca-demia E,apan`~la. Madrid, 1815. Voyez les plaucbes à la fiu.

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courtes. Les monnaies ne sont pas rares'. En 1879, on en atrouvé à la fois près de dix-huit cents à Barcus près d'Oloron.Nombre de numismates, depuis Erro et Astarloa, se sont es-sayés à l'interprétationde ces pièces celtibériennes; on peutconsulter les ouvrages de MVI. de Saulcy, Lorichs, Heiss;

Boudard, Barry, et pour le « trésor »de Barcus, un mémoirede M. Taillebois, Bulletin de la Société de Borda (Dax, oc-tobre 1879). L'inscription de Castellou a été discutée dans labrochure du Hofrath GeorygePhillips ('Vien, 18'71) et dans unarticle du professeur A.-H. Sayce, du journal La Acadenzia

de Madrid, 15 avril 1877.Des essais d'interprétation de quelques-unes de ces ins-

criptions ont été faits par Prof. J. Campbell, Montreal, Ca-nada, et par M. V. Stempf. Voyez Reoue de Lin~zcistique,

t. XXX, avril 1897.Bulletin de la SociétéRamond, année 33,deuxième trimestre 1898. Mais l'ouvrage capital sur ces ins-criptions est Alontimenta Lin~uc~ Iberic~, edidit rEn~iliusHübner. Berolini, 1893:

De tous ces auteurs, pas un n'a réussi à imposer souverai-nement son opinion. Nous ne pensons pas qu'on ait raison de.traiter ces caractères comme appartenant à un seul idiome;ainsi que le disait Strabon, il en existait sans doute plusieurs

et fort différents. On finira par distinguer dans ces lettresdes formes anciennes et des formes comparativement mo-

l. Encore moins, il est vrai, que les contrefaçons.Pour les contrefaçons plu¡; ou moins vérifiées comme telles, voyez

Alois Heiss, Plat celtibérien en terre cuite déeouaert à Ségooie(A. Levy, Paris, 1888)..

Discursos leidos ante la Acaclemia de la Historia en la recepcionpublica del Senon D. Juan de Dios de la Rada y Delgado (Fortanet,Madrid, 1875).

Hûbner, Monurnenta Linguu.~ lbericcr.·, p. 167 et p. 207. XIX etCXLII. Addilamentum. Noucelles Ancleioes des rnissio~.s scient~ques,vol. III, p. 137 et 156-196. Une Mission archéologique en Eapa~ne(1891), par M. Arthur Engel (Paris, E. Leroux, 1892).

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dernes. Quant à la genèse même des caractères, elle noussemble très difficile à établir. Ils ne sont point ibériens ouoriginaux, mais ressemblent assez à ceux des alphabetskariens, cypriotes, à quelques autres de l'ancienne Asie-Mi-

neurel. Au point de vue de l'art, la gravure des monnaies

rappelle le style grec asiatique. Les cavaliers ont du mouve-~ment, les chevaux sont bien enlevés ils n'étaient point bar-bares, ceux qui frappaient de semblables pièces.

Le résultat de toutes ces recherches, on le voit, complique

encore le'problème; la solution nous échappe; mais une ins-piration de génie, l'heureuse trouvaille de quelque documentbilingue peuvent la dévoiler au premier jour. Le siècle qui alú les hiéroglyphesd'Egypte, les caractères assyriens et su-mériens, ne doit pas s'avouer vaincu devant « las letras des-conocidas » de l'ancienne Ibérie.

De la religion de ces peuples, nous savons fort peu dechose. Les idées préconçues de ceux qui s'en sont occupésont naturellement influé sur l'interprétation des faits. Lesinscriptions latines du pays basque mentionnent des dieuxinconnus, des dieux admis à l'hospitalité du Panthéon romain

sous des noms latinisés, mais il est bien difficile d'en déter-miner les attributs véritables. Le Père Fidel Fita a démontréqu'en Espagne plusieurs de ces divinités ont des appellationsà terminaisons conformesà la grammaire celtique, et qu'ellesfurent communes aux Celtes et aux Ibères~. Les Basquesavaient certainement une religion pré-chrétienne; mais Chahoet les autres ont faitun rêve, qui disent que ce culte était lemonothéismepur. Quelqu'il fût,les Escualdun s'yattachèrent

1. Voyez T%re Harianlr~cniptions, par A. H. SAYCE. Roy. Lit. Soc.Londres, 1873, où ou trouve uu tableau comparatif des alphabetskarien, corcydeu et celtibérfen.

2. Restos. dc~ la decliriacion céltica y celtiGérica en al~unas lapidas~·span`,olas, por el P. ¡"WKL F11'A. S. J. Madrid, 1878.

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avec une ténacité désespérée. Si tout le long de la route ro-maine qui coupait le pays basque par Saint-Jean-Pied-de-Port, Roncevaux, Pampelune, Vittoria, on éleva d'assezbonne heure des églises chrétiennes; si, au Vlo siècle, Pru-dentius chanta les martyrs de Calahorra suppliciés vers le11101, les missionnaires venus du nord de la France trouvaientencore l'idolâtrie chez les Basques du Labourd aux IXe etXe siècles i. Malheureusement, dans leur aversion légitimepour les religions païennes, ils dédaignèrent de s'informerde ces faux dieux, et nous sommes réduits à conjecturer,d'après d'autres données, ce que pouvait être la croyance desEscualdun d'autrefois. Le nom de Dieu en basque est « Jaun-goikoa », ou, par une abréviation très fréquente, « Jainkoa »,« Jinkoa », et signifie « le Seigneur d'en haut ». Mais leprinceL.-L. Bonaparte a constaté que, dans le dialecte de Roncal,la lune s'appelle « goiko », chose qui suggère au mot un sens

tout à fait différent « Jaungoikoa » ne serait alors qu'unraccourci de cc Jaungoikokoa », leSeigneur de la Lune, oupeut-être simplement « le Seigneur Lune' ». -A propos desCeltibères et de leurs voisins du nord, Strabon dit qué, toutesles nuits de la pleine lune, ils dansaient en l'honneur dequelque divinité sans nom. D'après le même géographe,les « Turdetani ,), appellation sous laquelle il comprendtous les Ibères de la Bétique', avaient 'to rfç 4jwcr?o'pou

1. PnuDENTIUS, Peri Stephcrnon, bymnus I.Jam ne credis, brula quondam Yasconuni genlililas,Quam sacrum crudelis error immolarit sanguinemCredis, ill Deum relalos Irosliarum spirHus?

2. Voyez les Vies des SS. Amandus, Adalbaldus, Rictrudis et Léode Bayonne, dans les Acta Sc~nctorum des Bollandistes.

3. Voyez une correspondanceentre le prince L.-L. Bonaparte et leprof. J. Vinson dans 7%e Acaclemy, vol. XI, pp. 186 seq., reproduitedans l~lélan~esdcLin!luistiqueetd'Antlanopolo~ie,parA.II0VL1,ACQUL,E. PICOT, J. VINSON, p. 209. Paris, 1880.

4. Voyez la Ilote de Casaubon, acl loc. STRADO, III, C. l, 30.

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tEpOV, r,v xx~oûac Aoüxep. ôo5ôcxv un temple à l'étoile dumatin qu'ils nomment « lumière douteuse ». Chose cu-rieuse, à une certaine époque de l'année, les bergersbasques la désignent encore la planète Vénus, « l'étoile aumilieu », arte i,~a~·ra, l'étoile entre la. nuit et le jour. SiliusItalicus nous ditdes Celtibères qu'ils exposaient aux vautoursles cadavres de leurs parents, afin. de leur faire ainsi gagnerle ciel'. Ces considérations semblent montrer que la religionprimitivedes Basques était le culte des éléments de la nature.La coutume de la « couvade » attribuée aux Basques n'estpas encore assez ~onstatée.

Voilà, en aussi peu de mots que possible, les rensei-gnements que nous donnent, sur l'origine des Basques, lalangue, la toponymie classique, la numismatique, les ins-criptions et les auteurs anciens. Pour pousser plus loin ces.re-cherches, il faut recourir à d'autres moyens et s'adresser auxsciences nouvelles de l'anthropologie et de l'archéologie pré-historique mais avant d'interroger la première, nous devonsêtre fixés sur les caractères physiques des Basques actuels.N'oublions pas ici combien de siècles ont passé depuis l'ap-parition de la race ibérienne sur le sol de l'Espagne; tout entenant que les Escualdun d'aujourd'hui en sont les descen-dants directs, il est impossible d'admettre que nos contemporainsne soient pas plus ou moins mélangés d'autres peuplesavec lesquels, depuis tant de milliers d'années, les Basquesont été en contact journalier. Le regretté docteur Broca acomparé des crânes tirés de trois endroits différents du littoraldu pays basque: Saint-Jean-de-Luz, Zaraus et Bilbao

1. Venere et Celtae sociati nomen Iberis.Bis pugn<1 cecidisse decus, corpusque cremariTale nefas cœlo credunt superisquo referri,Impastus carpat si membiu jacentia vultur.

Punicorum, Ill, 340.

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quelques-uns; assez bien caractérises, sont dolichocéphales,mais d'une dolichocéphaJie occipitale, non pas frontale

comme dans les crânes de la race dolichocéphale du nordde la France; l'angle ~acial est bon; certains exemples se-raient plutôt « opisthognathes que « prognathes »; les traitsdu visage sont fins et délicats, mais la contenance du crânen'est pas tout à fait en rapport avec la beàuté de forme dela partie antérieure. Tous ces caractères, à mon avis, on peutencore les observersur beaucoup d'Escualdunac, notammentdans les endroits écartés'

M. Broca avait dressé une carte sur laquelle, en blanc, engris et en noir.il'classaitles départementsde la France d'aprèsla couleur des cheveux, le teint, la stature de leurs habitants

1. Sccr les Caractérescles c·rcines bczsqucs, par M. le doeteur P. BnocA.Masson,1863.

Sur l'Ori~ine et la Répartitionde la lan,9ue basque, du mêmeauteur. Leroux, 1875.

El Pueblo Euskalduna. Estudio de Antropologia por D. F. deAranzadi y Unamuno. San Sebastian,1889.

La Race basque, Étude anthropolugique, par le Dr R. Collignon,dans La Tradit~on au pays basque. Paris, 24, rue Visconti, 1839.

La Race basque (conclusions et théories) par Georges Hervé, ex-trait de la Reoue de l'école d'Anthropologi~ de Paris, 15 juillet 1900(Paris, 1. AIC'an, 1900). Congrés lnternatioical des Études basquesdans la Reoue de Linguistique, p. 313-314, t.XXXIII, 15 octobre 1900(Paris, Maisonneuve).

« Dark hair and eyes are generally considered the necessary attri-butes of Spanish women; but in the mountainous districts of nor-thery Spain, where the ciejos Cl~nistianos, the old Gothie race, tookrefuge when their count"y was overrun by tbe Moors, blue eyes andfair tresses are not uncommon. At the same time there would belittlé danger of mistatking a Spanish blonje for one of any othercountry. The sandy locks and grey e)'e5 of northern Europe wouldill bear comparison with the golden hair and deep azure orbs of thefair Iberians. »

PeninQular Scenes and Sketches by the author of Ic '1 be S'tudent ofSalamanca,» W. Blackwood and Sons. Edinburg-Loudon,1849, in-12,p.248. Cap. Ramble through the Basque Provinces in 1836-8.

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et le nombre d'exemptions du service militaire. Il croyaitétablirque les progéniteurs dolichocéphales,bruns etde petitetaille, devaient appartenir à la race basque. Les vues del'illustre professeur, adoptées par nombre de savants,MM. Huxley et Boyd Dawkins entre autres, sont générale-ment admises aujourd'hui' mais ori peut le demander, lacarte même de M. Broca prouve-t-elle ce qu'il voudrait en.déduire ? Les départements à teinte.plus foncée n'y sont pasdans la région occupée par les Basques, mais bien dans leCentre et le Sud-Est. L'ancienne Gascogne, sauf pour lesLandes, où les conditions du sol sont tout à fait exception-nelles, n'est pas noire, mais grise; grises encore les gasses-Pyrénées, dont trois arrondissements, en tout ou en partie,sont occupés par les Escualdun. Une résidence de plusieursannées dans leur pays nous permet d'affirmer que, loin d'êtreplus bruns ou plus petits que les Béarnais, leurs ooisins, lesBasques offrent plus d'individus grands et blonds, les yeuxgris prédominant. Je voudrais savoir, du reste, comment,d'après un crâne antique, on peut déterminer la couleur duteint, des cheveux, de l'iris?

L'opinion du savant anthropologiste espagnol, F. Tubino,me parattrait plus fondée2. Il v oit dans les Basques et lesIbères les débris d'une race blonde, élancée, celle qui figuresur les monuments égyptiens, parmi les peuples de la Libyeoccidentale, et dont les représentants modernes se recon-naissent dans quelques tribus berbères et les montagnardsde la Sierra de Ronda, en Andalousie. Le P. F. Fita vientde découvrir à Santiago de Compostella un manuscrit du

1. F'arly Man in Britain, bu W. BOYD DAWKINS, London, 1880,cap. xi. Ces vues ont été récemment discutées par M. Rudler, à laréunion de la « British Associationà Swatisea. Septembre 1880.

2. Los Aborigenes Ibénicos Ó los Beréberes en la Peninsula, parFrancisco M. TUBINO. Madrid, 1876.

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XIIo siècle, où se trouve le premier vocabulaire basque

connu, et voici ce que l'auteur dit au sujet du peuple qui

en faisait usage cc Bascli facie candidio>·es Navarris appro-bantur. » Les Basques ont le teint plus clair que les Na-varrais 1

Qu'il y ait eu dans tout l'ouest de l'Europe une race pré-celtique et pré-aryenne, je l'admets volontiers que lesBasques ou Ibères fissent partie de cette race, j'en demeured'accord; mais autre chose est de conclure que de celle-ciproviennent les populations petites et brunes du centre et dunord 'de la France comme de la Grande-Bretagne. A l'heureprésente, l'Europe presque entière est habitée par les des-cendants des Aryens; mais si un jour ils sont remplacés pard'autres, ne pourrait-on pas dire tout aussi bien que lesEspagnols ou les Italiens devaient être, pour la stature,pour la couleur des yeux et des cheveux, identiques avec lesAnglais et les Allemands ? Je ne vois nulle preuve que lesIbères aient beaucoup dépassé, au Nord, la vallée del'Adour très certainement d'autres races pré-aryennesoccupaient simultanément l'Europe quelques-unes pou-vaient avoir la taille petite, le teint brun et les yeux noirs,caractères qui sont loin, je l'ai dit plus haut, de s'appliqueraujourd'hui à nos Basques de France ou d'Espagne~.

Je croyais, il y a peu d'années, que les monuments méga-lithiques, dolmens et menhirs, faisaient défaut dans le paysbasque plusieurs y ont été reconnus dernièrement. M. Tu-bino, considérant le grand nombre qu'en offre l'Algérie, a

1. La Ilust~acïon Catolica. Madrid, mayo, 14, 1880.2. M. V. DE ROCHAS (Les Panias ~le 1%nance et d'Espagne, Paris,18i6)

donne comme trait caractéristique du Basque les yeux et la peautoujours d'un teint clair, les cheveux blonds ou noirs, p. 138. Voyez,dans le même sens, le mémoire The (.'a!lots, by D. HACK TUKE, dansle journal de l'Anthropolo~ical Institute de la Grande-BretagneMai 1880.

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voulu voir dans les Ibères les constructeurs des mystérieuses

« pierres des fées n. C'est une hypothèse à examiner. L'ori-gine de ces monuments est fort contestée. M. Ferguson veutqu'ils soient du temps des Romains, voire même du chris-tianisme d'autres les attribuent aux Celtes. Ce qui nousmanque encore aujourd'hui, c'est l'étude consciencieuse etsuivie, au point de vue de l'archéologie préhistorique, desdeux versants pyrénéens du pays basque, de leurs vastes etnombreuses cavernes, de leurs tourbières, de leurs minesabandonnées, des débris épars çà et là sur leurs montagneset dans leurs forêts. Les poteries, les haches polies, les silexqu'on a déjà découverts ne diffèrent en rien de ceux qu'ontrouve ailleurs'. Les dolmens, qui ont parfois des nomsbasques, n'ont pas été examinés à fond; les crânes mêmesqu'on a pu étudier proviennent tous des confins du terri-toire. On le voit, il y a encore beaucoup à faire.

II

BASQUES

Le pays basque français et « las Provincias Vascongadas »n'ont pas les beautés grandioses des Alpes et des Pyrénéesorientales et centrales. En hiver, leur climat ne sauraitlutter avec celui du midi de l'Espagne, de l'Italie, de l'Al-gérie ou de l'Égypte; et, pendant la courte période de l'été,les touristes leur préféreront toujours les hauts plateaux dela Suisse, les mers du Nord, les « highlands» de l'Écosse

ou de la Norwège. Mais où trouver une contrée où, toute

1. Pour la province d'Alava, le lecteur peut consulter un ouvragequi vient d'être publié à Barcelone, Los Euslaanos en Alaca, Gui-puâcoa y Vi~caya, par D. LADISLAO DE VELASCO FERNANDEZ DE LA

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l'année, on puisse aussi doucement se laisser vivre ? Lesgrands froids n'y sont jamais à craindre; jamais les chaleursn'y deviennent insupportables. Sur les côtes, les brises dularge entretiennent une fraîcheur délicieuse. Dans les terres,le relief très accidenté du pays tempère l'ardeur du soleil, etses montagnes massives lui font un abri contre les ventsglacés qui balayent le plateau de Castille pendant la mau-vaise saison.

Tel climat, tel pays. Il ne faut pas demander les neiges,les glaciers étincelants des Alpes, leurs précipices vertigi-

neux plongeant à pic dans l'abime, les cascades vaporeuses.Mais les montagnes sont juste assez hautes pour encadrerdans la plus charmante proportion les vallées qui s'étendentà leurs pieds. La mer qui brise ses vagues sur le littoral, est

une des plus belles du monde. Elle n'offre pas les teintessombres et ternes des eaux de la Manche ou du Nord, elle

est claire et bleue comme le ciel q ui se reflète dans ses pro-fondeurs. Les rivières du pays basque, petites et presqueinutiles à la navigation, ne le cèdent en rien, pour leur grâcepittoresque, à celles des autres contrées. Le voyageur qui enveut suivre les bords, souvent perdus au fond de quelquevallée, loin des routes et des villages, les voit, tantôt endor-mant leurs eaux transparentes dans des gouffres verts etprofonds, au pied de falaises verticales, tantôt rejaillissant

en écume perlée sur les rochers qui s'opposent à leur pas-sage elles filent comme une flèche le long d'une étroitecluse pour s'épancher ensuite doucement sur les prairiesriantes et parmi les bosquets de jeunes. chênes, afin d'ychercher un repos qu'elles ne connaltront plus une fois

confondues dans les flots du tumultueux Océan. C'est uneterre de prédilection pour l'artiste elle abonde en sites

« bocagers » et charmants. L'architecture de ses vieillesfermes et de ses « châteaux» rustiques est d'un style plus

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original que partout ailleurs dans la France. Les maisons

ressemblent, d'assez loin, aux chalets de la Suisse, mais le

plan en a l'air moins convenu. De petites murailles s'ados-

sent à des contreforts énormes; les toits surplombent; rare-ment les deux pentes sont égales. A l'étage supérieur unelarge galerie est toujours ouverte au soleil. Quel contraste

avec la monotonie des hameaux et des bourgs du Nord

Une commune basque se compose en général d'habitations

isolées, éparses sur le coteau. Souvent on est obligé de

demander où se trouve le village, le centre de toutes cesmaisons clairsemées. Il n'y a guère de contrées plus « syl-vaines » que l'intérieur du pays basque il n'y a guère de

stations maritimes plus jolies que celles qui s'échelonnent

sur ses rivages, de Biarritz à Bilbao. Elles rivalisent de

grâce et de beauté.Les Basques espagnols et français ne sont plus que les

débris d'une nation, « un peuple qui s'en va ». Les anciens

auteurs nous montrent les Vascons et les Vaccœi s'étendantà l'Est et au Sud beaucoup plus loin qu'aujourd'hui. Leursarrière-neveux n'occupent en France qu'une partie des trois

arrondissements de Bayonne, de Mauléon et d'Oloron. EnEspagne, ils peuplent plusieurs cantons de la Navarre, toutle Guipuzcoa, la majeure partie de la Viscaye et le nordd'Alava; ces trois dernières provinces, les « provinces Vas-

congades » ont été depuis longtemps réunies à la monar~;hie

espagnole, mais avec une langue, une administration inté-rieure, des meeurs bien différentes. En France, la ligne de dé-marcâtion entre ceux qui parlent l'euskara et le béarnais est

encore bien tranchée~ On signale telle maison comme étantdepuis des siècles la borne où s'arréte l'idiome des Escual-dun. Il n'existe guère de zone intermédiaire où les deux

1. Élisée RECLUS, Recue des Derca~-Mondes.

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fugues s'emploient indifféremment, ou par une partie seu-leJl1ent des gens du pays. Il n'en est plus ainsi en Espagne.Une luge bande frontière existe où l'un et l'autre idiomesont égahment usités. Sur certains points avancés où lebasque régnait seul, il y a cinquante ans, personne ne lecomprendrait aujourd'hui. De ce côté des Pyrénées, la géné-ration actuelle verra s'accomplir le même changement tousles enfants apprennent le français à l'école, et il est mainte-nant très rare de parcourir un village, fût-ce des plus éloi-p;nés, sans y trouver quelqu'un qui puisse vous répondre.Ici, les passions politiques ne sont pas intéresséesà conserverla langue euskarienne; elle disparaitra du sol encore plusvite qu'au delà des monts. Les habitants de la Soule et duLabourd aiment le basque comme leur-« parler» maternelil a des nuances que le français ne saurait rendre. Partoutoù il règne, ils se savent en famille c'est une langue à euxque l'étranger ne comprend pas. Mais ces raisons de senti-ment ne tiendront guère devant les exigences de l'adminis-tration, les nécessités d'un commerce plus facile avec lespopulations avoisinantes et les besoins matériels de la vieactuelle.

On compte en Europe six cent mille personnes qui parlentl'escuara; sur ce nombre, cent vingt à cent quarante millehabitent la France, et quatre cent cinquante mille l'Espagne.Des milliers d'émigrés basques se sont établis dans l'Amé-rique du Sud, et sont généralement répartis entre les Répu-bliques Argentine et Orientale'. Mais la langue, comme lanation elle-même, n'est plus qu'un débris de ce qui fut-jadis,et.ce débris lui-même se partage en huit dialectes princi-paux le labourdin, le souletin, le bas-navarrais oriental,le bas-navarrais occidental en France en Espagne, le bas-

1. Stanford, Londres, 1863.

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navarrais du Nord, le bas-navarrais du Sud, le guipuzcoanet le vizcayan. Le prince L.-L. Bonaparte en a fait dresserd'admirables cartes géographiques où il délimite leurs sous-dialectes mêmes 1

La population basque est une des plus belles de l'Europe.Quoique son langage indique probablement une origine nonaryenne, elle ne le cède en rien pour la majesté du port etla régularité des traits, aux plus beaux types de la race indo-européenne. J'ai déjà parlé des caractères physiques descrânes basques. Les Escualdun sont en général de taillemoyenne, plutôt grands que petits, sveltes, élancés, vigou-

reux, d'une agilité surprenante. A la course, à la danse, ilsn'ont pas de rivaux. Il n'y a guère de meilleurs marcheurs.Ils s'adonnent aux exercices athlétiques, et souvent la forcemusculaire des femmes est bien au delà de ce qu'on. pourraitattendre de la délicate élégance de leur corps. L'amusementfavori des Basques est le jeu de paume, donton connaittrois variétés distinctes; la balle est beaucoup plus lourde

que celle dont on se sert ,dans les autres pays, et demande

non moins de vigueur que de souplesse pour être lancée àla distance requise. Il faut les voir à un de leurs grands jeuxde « pelote à la longue », surtout quand la lutte prend uncaractère international et a lieu de Basques français àBasques espagnols. D'autres fois, on s'amuse à jeter le plusloin possible une grosse barre de fer (la palenka), puis vientle saut, l'escrime au bâton ferré (le makilla).

De même que chez les anciens Grecs, la danse est tenueen haute estime et pratiquée avec un sérieux remarquable,par les hommes surtout. Ce n'est plus une simple distrac-

1. Deux journaux basques, l'Eskccal-Hemia, sous la direction deM Laurent H. Londaïts. el Hait~a, sous la rédaction de M. J. Ses-cosse, sont publiés à Buenos-Aires. Un autre, California-o Eccskal-Hem·ia, réUacteur, J.-D. Goytino, paraît à Los Angeles, Califoruia.

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tion, un amusement de jeunesse, mais un exercice viril, unjuste sujet d'orgueil pour ceux qui y excellent. Tous les passont réglés, les gestes déterminés d'av ance. Villages et can-tons se disputent la gloire de posséder les meilleurs danseurs.A la fin d'une pastorale, j'expliquerai ce mot tôut àl'heure, les acteurs mettent à l'enchère et vendent àbeaux deniers comptants le droit aux représentants des com-munes voisines de paraitre les premiers sur l'estrade pour ycommencer le saut basque, la danse favorite des Escualdunfrançais, avec celle des « Satans et une variété de la jotaaragonaise. Les Basques espagnols préfèrent l'E.~pafa Danaa,

la danse à l'épée, l'Aurrescu ou zorzico, et d'autres branlessolennels en usage aux fêtes locales. Les danses, les plusanciennes, le saut basque et l'E.apata Dan~a, par exemple,sont exécutées par des hommes. Les femmes ne figurent quedans celles dont l'origine est plus récente 1.

Mais tout passionné qu'il est pour les exercices du corps,le Basque, même ne sachant ni lire ni écrire, même réduit à

sa seule langue maternelle, n'est point abandonné à unecomplète ignorance. Il a ses goûts littéraires et artistiques,et si les rimes imprimées sont pour lui lettre close. il est àla fois poète et rhapsode; il improvise dt3S vers, il sait par

1. Guipuacoaco Dant~a, por D. Juan Ignacio de Iztueta. Donostian,1824, et Euscaldun anciiza anciitaco, por D. Juan Ignacio de Iztueta.Donostian, 1826. Il y a des critiques de ces deux livres avec le texteet traductions anglaises de poésies basques dans The Foreign Reciewand Continental MiscellanJ, vol. II, p. 338, et vol. IV, p. 198 (Lon-don, Black and Young, 1828). Ces articles furent probablement écritspar George Borrow, auteur du The Bible in Spain, The Zincali, etc.Un des morceaux y fut publié pour la première fois.

Corograf~a de_Guipci~coa,par R. P. Manuelde Larramendi, pp. 195,244. Barcelona, 1882.

Biarrita. Entre les Pyré>tées et l'Océan, Augustin Chaho, 2 vol.in.12. Bayonne, s. d.

La Tradition au Pays Basque, p. 265. Paris, 1899.

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coeur des chansons sans fin; sa mémoire est fournie decontes et de légendes. Bien plus, le pays basque est une des

rares contrées où le théâtre populaire du moyen âge s'estcontinué sans interruption jusqu'à nos jours. La Bretagne

ne le connait presque plus. Tous les dix ans, en Bavière,

on représente le (i Passionspiel » devant un immense audi-toire d'étrangers, mais le drame de l'Ober-Ammergau estplutôt une œuvre de. dévotion, une cérémonie religieusequ'un divertissement populaire. Au contraire, dans les vil-lages de la Soule, le théâtre est la plus goûtée de toutes lesdistractions. Les « pastorales » ou mieux les « tragédies

D

se jouent chaque année aux grandes fêtes du printemps etde l'été. Rien de plus primitif que la scène. Construite à ciel

ouv ert, sur la grande place, elle ne se compose que deplanches assujetties sur dés barriques dressées au fond, unrideau de toile à droite, l'entrée des « bons » (les bleus) àgauche, celle des « méchants (les rouges) un pantin debois représente « l'idole des païens » deux ou trois musi-ciens du pays forment l'orchestre. Les pièces tirées de laBible et des Vies des Saints, ou bien des contes et légendesde la littérature populaire française, ont été mises en verspar l'instituteur ou le poète de l'endroit. Mais, et c'est encela que consiste souvent toute l'originalité du drame euska-rien, l'on a toujours eu soin d'y intercaler un chœur de

« Satans », plus un « Roi des Turcs » avec ses affidés.Toute la pièce, récitée sur le même ton, accompagnée d'unemusique lente et solennelle pour les bons, de plus en plusprécipitée pour les méchants, se termine invariablement parl'air et danse des Satans«, qui tiennent le rôle principaldans toute la pastorale basque. La tragédie compte de troismille à sept mille lignes rimées, et parfois ne demande pasmoins de neuf heures pour être jouée tout entière. En cestemps dégénérés, il est vrai, on y fait d'assez larges cou-

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pures. Les rôles sont nombreux, rarement moins de douze,et peuvent aller jusqu'à la soixantaine. Mais commentdécrire l'hétéroclite mélange des éléments divers qui entrentdans"le costume des acteurs ? Les uniformes fanés, emprun-tés au douanier ou au gendarme en retraite, la défroque dulycéen, ou l'habit officiel du sous-préfet contrastent avec laculotte de velours, la jupe à 1-'avant-dernière mode de Paris;la couronne de clinquant rouge, surmontée de plumes et defleurs artificielles, fabriquée par la couturière de l'endroit,étincelle a~près du chapeau. à claque. Le costume desSatans, fait d'après les anciens usages du pays, est toujoursfort joli. Aux coins de l'estrade, quatre gardiens improvisés,armés de vieux fusils à pierre, maintiennent l'ordre dansl'assistance, et tirent de grands coups de feu quand un hérostombe ou qu'une bataille a lieu. Les épées ou les cannes quiles remplacent s'entre-choquent dans les combats en mar-quant l'air joué par l'orchestre. Un drap blanc, roulé sur uncoin de la scène et étendu à la hâte sur le plancher aumoment des très nombreuses catastrophes d'une tragédie,sert à recevoir les morts et à préserver de la poussière lesbeaux uniformes prêtés pour l'occasion.

Tous les morceaux sont appris par coeur, souvent par des

gens qui ne savent pas lire, et la tâche de les leur loger dansla cervelle occupe en hiver les veillées de la ferme. A la re-présentation, les deux sexes ne sont jamais mêlés. Générale-ment, la tragédie est jouée par des hommes seuls, parfois pardes jeunes filles. Comme partout, avant le XVIIe siècle, lesrôles de femmes sont remplis, et d'une façon admirable, pardes jeunes garçons. Les fillettes ne réussissentpas aussi bien,armées du sabre des ,héros.

Les Basques célèbrent le carnaval par des mascarades oucharivaris, sorte de pantomime,de procession dramatique oltles hommes- représentent divers animaux bu caractères

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typiques du pays. On y conserve, avec leur musique propre,des danses traditionnelles, des danses qui demandent la force

et l'adresse desjarretsfameuxducanton. Les plusrenomméessont la dansedu cheval (zabalçain) et la dansede l'ours (hartza)

la première vaut la peine d'être vue.Après les pastorales et les mascaradesviennent les concours

poétiques, où non seulement on donne un prix au meilleurdp.s poèmes composés d'avance par les rivaux, mais où lescoplaçari (improvisateurs) luttent à qui mieux ou plus vitetrouvera des vers sur un thème donné. Leur langue se prêtemerveilleusement à toutesortede rimes, on en entasse parfoisjusqu'à vingt ou trente sur la même finale. Voilà tout ce qui;

avec quelques livres de dévotion et les prônes de l'Église,constituait autrefois la vie littéraire des Basques et donnaitsatisfaction à leurs goûts intellectuels.

Aujourd'hui l'enseignement régulier se répand de plus enplus, et les Escualdun entrent dans le grand courant de lascience européenne. Les enfants basques ont l'esprit vif etouvert ils apprennent av ec une facilité surprenante pour-tant ils ne dépassent guère une certaine limite. On trouve

assez de noms vizcayens parmi les poètes et les dramaturgesde l'Espagne, mais excepté Ercilla, l'auteur de l'Ar·aucanie,

aucun ne marche en tête de ses contemporains de même

pour les divers branches de la science, la navigation surtout.Ils font des marins actifs, intelligents,intrépides. Le BasqueEl Cano fut le seul survivant des officiers de Magellan, lepremier à achever le tour du monde « Primus me cireuin-dedisti, » sur un globe, sont les armoiries de sa famille. Trèsbraves, bon soldats, ils ont rarement le génie militaire ilsfournissent d'admirables officiers aux flottes de la France etde l'Espagne, et aux,armées des brigadiers excellents, maispas un d'entre eux n'a emporté d'assaut le commandement

suprême. Le maréchal Harispe, Zumalacarreguy dans la pre-

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mière guerre carHste, l'amiral Jauréguiberry dans la cam-pagne de 18i0-1, sont presque les seuls qui se soient fait

une réputation européenne..Il est rtéanmoins deux grands faits, ou pour mieux dire

deux grandes institutions à porter à l'actif des Basques parla première, ils se sont rattachés au mouvement général, ilsont exercé et exercent encore une influence majeure dansla seconde, ils ont montré un génie pratique vraiment dignede tous les suffrages, je veux parler du jésuitisme et del'administrationlocale de leurs « fueros ».

Sous quelque aspect qu'on l'envisage, le jésuitisme resteratoujours un produit essentiel de l'esprit basque. Ignace de

Loyola et François Xavier furent par excellence des typesbasques. Le second possédait au plus haut degré le charmepersonnelqui se rencontre si souvent chez les jeunes hommes.du pays. Le mysticisme du premier, sa puissance d'absorp-tion dans l'idée, sont encore communs parmi eux. Le seulcaractère quelque peu distinctif de leur poésie est l'emploifréquent de l'allégorie, une grande propension à présenter lesidées abstraites sous des formes concrètes, trait principaldes « Exercices spirituels » de Loyola. « Qui dit basque,dit catholique, » est un proverbe déjà ancienchez eux.Quoique le plus précieux joyau de leur littérature soit leNouveau Testament traduit par le protestant Liçarrague etimprimé en 1571 à la Rochelle, sous les auspices de Jeanned'Albret, il n'en est pas moins vrai qu'ils se cramponnent àla religion catholique romaine, avec la même ténacité qu'ilss'attachaient autrefois au culte païen. A eux, par Loyola etJ," François Xavier, revient l'honneurd'avoir conçu et orga-nisé la contre-réformation en Europe et prolongé ainsi deplusieurs siècles l'existence de la papauté. Mais, tout dévouésqu'ils sont à ce qu'ils croient la vérité religieuse, les Basques

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sont rarement bigots, et dans le domaine politique, ils n'ontjamais courbé la tête sous le joug du clergé t.

Non moins intéressant à étudier est le'développement de

leurs « fueros » ou droits particuliers le régime civil et mu-nicipal qu'ils ont su conserver jusqu'à nos jours à traverstout le moyen âge et les temps plus modernes. Disons enpremier lieu que la supériorité des Basques est bien moinsdans l'excellence de leurs lois que dans leur façon de les

administrer.Le caractère des « fueros », les «fors », comme on les

appelait en deçà des montagnes, n'est pas du tout particulier

aux Escualdun. Dans les détails secondaires seulement, les

fueros basques diffèrent de ceux du Béarn, des « libertés etpriv~lèges » de la vallée d'Aspe, de « las comunidades de

Aragon » de « los concelleres y consejos » de Catalogne, etquelques-uns'des fueros de Castille.

De l'un ou l'autre côté des Pyrénées, ces libertés procèdentde deux sources bien différentes. L'une, celle des « fuerosgenerales » et de « fuero de albedrio », a pris naissance chez

les montagnards dans les nécessités de l'existence pastbrale

et des droits de pâture taJ,ldis que les libertés municipales,les fueros particuliers, sont certainement imités des anciensprivilèges des municipes latins. C'est là qu'on a pris les mé-thodes et les traditions q ue les Basques et les Navarrais ontsi heureusement développées pendant des siècles. Un de nosamis, mort l'année dernière, le savant M. Châteauneuf, s'estmême cru autorisé à conclure que la municipalitéde Bayonne,le nombre de ses officiers, le mode de leur nomination re-produisent exactement le « municipium » récemment dé-

couvert des villes romaines du midi de l'Espagne.Je ne prétends point que les Basques et les autres peuples

1. Voyez plus loin « Les Basques défendus par un Anglais, etc. ».

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des deux versants de la chaine aient eu conscience de cettegénéalogie de leurs droits en remontant aussi loin que pos-sible toutes les sources connues, nous sommes constammentarrêtés par l'appel aux « us et coutumes » sur lesquels on baseles lois écrites, eL auxquels celles-ci se conforment au moins

en principe. Ces us et coutumes, ainsi que le « common law »d'Angleterre, sont fort antérieurs au droit écrit et codifié.

Les fueros basques affirment toujours la liberté de pâturagede passage, de commerce, dans tout le territoire appartenantà la grande communauté. Ils insistent avec force sur l'indé-pendance personnelle, le droit de se défendre contre touthomme, roi ou seigneur, laïque ou ecclésiastique, pape ouempereur, qui voudrait empiéter sur ces droits ou libertés.Privilège fondamental commundans'l'origineà presque tousles fueros de ces contrées, mais que les Basques ont su con-server jusqu'au milieu du XIXe siècle.

Pour résister victorieusementaux attaques réitérées de lamonarchie espagnole et de l'absolutisme sous toutes sesformes, ils ont surtout maintenu qu'ils ne devaient aucunserviet militàire en temps de paix en temps de guerre seu-lement, ils l'accorderaient dans leur propre province. Audelà de certains endroits désignés sur la frontière, par exempleEl Arbol Malaio plantado en Luyando, en Vizcaya, ils nepouvaient être conduits en armes sans le consentement de lajunte et sans toucher par avance leur solde pour tout le tempsdu service requis'. Nulles troupes royales n'avaient la per-mission d'entrer dans le pays les recrues basques devaient

1.Le titre XXIV,cap.l,du Fuero de Guipuxcoaest ainsi conçu « Quede esta provincia ni de los limites de ella, para ninguna parte ni pornecesidad ninguna que se ofrezca, no salga ni pueda salir genteninguna por mar ni por tierra, por mandato del rey ni de otro uingunosiu primero le sea pagado 01 sueldo que hubiera de haber y fuereueccsario por la tal jornada. »

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être commandées par un Basque. Ces sauvegardes se re-trouvent, bien que sur une échelle plus restreinte, dans lesprivilèges ds la vallée d'Aspe.

Les Basques n'ont jamais reconnu au gouvernementcentral de l'Espagne le droit de lever taxe ou impôt sur,eux.Les « provincias Vascongadas » furentdes États indépendants

avec qui le ou les royaumes environnants faisaient union parconçorda~ ou « convenio », mais nullement une contréevaincue et soumise l'argent voté dans les juntes pour le roid'Espagne lui était présenté en don libre et gracieux, jamais

comme tribut obligatoire. Pour mieux garantir ce caractèrede donation, le vote qui en fixait le montant était toujours ledernier pris en considération dans les sessions de la juntesuprême griefs ouis et discutés, toutes affaires particulièresaux provinces terminées, délibérations prises sur ce qui con-cernait l'administration générale et municipale, on procédait.aux débats sur le cadeau à offrir au roi d'Espagne. Il suffit

d'avoir étudié quelque peu l'histoire des libertés parlemen-taires pour reconnattre ia sagesse d'une disposition semblableet les garanties qu'elle présentait contre les entreprises dupouvoir.

Ce ne fut pas seulement par 'les juntes et leurs délibéra-tions, par leurs coutumes écrites, que les Basques surentmaintenir leur indépendance. Une des lois fondamentalesassure le droit de tout individu à résister à tout officier du roion autre qui attenterait aux fueros, et même à le tuer aubesoin. Les trois provinces étaient tenues de fairecausecom-mune avec le défenseur ou le meurtrier, et la junte suprêmenommait une délégation spéciale pour veiller spécialementàcette clause. Dans le même but, ils écartaient du parlementles deux classes d'individus que l'expérience leur désignaitcomme les plus dangereux ennemis des libertés nationales

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les prêtres et les légistes1. Nul ecclésiastique ne pouvait êtreélu député et, quant aux avocats, on leur interdisait mêmependant toute la session, l'accès de la ville ou du village où

se réunissait la junte. Pour la discussion des questions lé-gales seulement,> un « letrado » était appelé chaque fois enqualité d' « asesor », mais sans droit de vote. L'inviolabilitéparlementaire couvrait tout député depuis son départ de chezlui jusqu'à son retour mais une amende de dix mille ducatsétait édictée contre les représentants qui proposeraientquelque mesure contraire aux dispositions fondamentalesdesfueros. Les séances avaient toujours lieu à huis clos, et onn'en publiait pas les rapports. Les votes se comptaient, nonpar tête de député, mais d'apres le nombre de maisons oude feux compris dans chaque circonscription. Les décisionsd'une assemblée ne pouvaient être annulées par les juntessubséquentes par respect pour la minorité, et lorsqu'il n'yavait pas entente virtuelle, on votait trois fois et à trois joursdifférents la même proposition elle n'avait force de loi quesi, dans ces trois occasions, elle réunissait la majorité.

Les provinces Vascongades avaient de bien autres privi-lèges. Toujours le commerce y fut absolument libre. De longssiècles avant l'ère de Cobden et 1'« Anti-Corn-Iaw League »,avant la prédication par les économistes de notre époque del'évangile du libre-échange, les Basques le pratiquaientdans

sa plus large acception. Point de douaneséchelonnéessur Je

littoral ou embusquées aux cols des Pyrénées le cours del'Èbre était la seule ligne où l'Espagne avait le droit de re-

1. Fueros de Guipúzcoa, titulo XXVI, cap. m « Que ningun con-cejo embie por su Procurador a la Junta a ningun Clerigoni el Cle-rigo 10 pueda ser en manera alguna. »

Titulo VI, cap. vn « Esta prohivido que los Letrados, 6 Abogadospueden asistÍr en las JuntasGenerales, y Particulares, ni en los Lu-gares donde se celebrall. »

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chercher la contrebande; encore ces ordonnances furent-elles

toujours le sujet de « convenios » spéciaux avec les pro-vinces. Le trafic intérieur et, pendant plusieurs siècles, avec

le Labourd en France, avait lieu sans restriction aucune. De

temps à autre, tel ou tel monarque espagnol essayait de

porter la main sur ces privilèges les Basques se montrèrent

intraitables et la corruption n'avait aucune prise sur eux.

Lettres et édits royaux restaient sans effet tant qu'ils n'étaient

pas visés par la junte suprême. Lorsque Ferdinand VII,

aidé par les Bourbons de France, violait impunément la

Constitution et courbait sous. le joug de l'absolutisme tout le

reste de la Péninsule, il n'osa toucher aux privilèges des

Basques. Certes, dans le cours des siècles, ces droits avaient

subi quelques modifications. Les trois provinces ne pou-vaient plus, comme le Guipuzcoa en 1483, comme la Vizcaye,

et même certaines villes, conclure des traités avec l'Angle-

terre ou d'autres puissances; mais les libertés les plus

essentielles, la plus complète autonomie, étaient encore

maintenues; toujours la franchise de commerce, toujours

l'exemption de toute taxe obligatoire, sauf en Guipuzcoa,

l'alcabala ou droit sur les ventes faites par les étrangers,

toujours, excepté pour la marine, l'immunité de service mi-

litaire en temps de paix. Au milieu d'une monarchieabsolue,

les provinces Vascongades formaientune sorte de république.

Ils demandent et exigent l'observance de leurs fueros ils les

font solennellement jurer par chaque nouveau souverain de

Castille.Le vieux nom respublica des municipes romains se con-

servait dans les bourgs et les villages des provinces 'basques

et de la Navarre. Voyez plus bas « le mot République dans

les Pyrénées-Occidentales ».Mais les fueros généraux, si absolus, si fermes contre

toute attaque du dehors, se trouvaient circonscrits et limités

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à l'intérieur du pays par un véritable dédale de franchises,privilèges, chartes et fueros locaux. Chaque ville, chaquevallée, chaque petite confédération de bourgs obscurs comme« las cinco villas » avait ses fors spéciaux, sa méthode par-ticulière d'administrer son budget, de répartir ses taxes; elleavait son mode d'élection aux charges municipales. L'exer-cice de ce dernier droit donnait lieu aux procédés les plusvariés et souvent les plus bizarres. Sur l'élection représen-tative à un ou deux degrés depuis le suffrage universel leplus étendu jusqu'à l'élection secondaire la plus compliquée,je ne vois guère de théorie que les Basques n'aient mise enpratique. Dans telle ville, on tire au sort un grand électeurqui choisit lui-même tous les officiers et employés munici-

paux ailleurs, les conseillers sortant nommaient leurs suc-cesseurs ailleurs, encore, on met dans un sac autant debillets ou de fèves qu'il y a d'éligibles; un enfant en tiretrois, quatre, cinq ou six, qui serviront à désigner les per-sonnes chargées d'élire la municipalité complète. Mais endépit de ce désordre apparent, de ces détails méticuleux,

souvent comiques ou même ridicules, on ne peut mécon-nattre que le pays basque n'ait été un des mieux administrésdu monde!, Toutes ces diversités, toutes ces complicationsfaisaient l'éducation du peuple chaque citoyen avait intérêtà s'instruire des devoirs publics, puisque, dès l'année sui-vante, le sort pouvait le porter à quelquefonction municipale.

1. Témoin la cérémonie du « Mctcleéte Vitortano ». Dans unepetite niche pratiquée dans un mur derrière l'église Saint-Miohel,était placé un couteau de bois, devant lequel les nouveaux élus ve-naient prêter serment en présencede toute la population et des autresconseillers municipaux. La formule portait que si le èandidat ne rem-plissait pas ses obligations, on lui couperait la tête avec un « macheteusemblable; puis le nouveau procurateur, précédé des officiers, detambours, de trompettes, baisait dévotement l'objet susdit. Histoniade la Legislacion de Espaiia,vol. II, p. 522, par MARICIIALAR y MAN-

RI(~UE (Madrid, 1868).

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Cette accoutumance pratique, cet usage continu du « self-

government », vaut, à notre avis, les bienfaits autrement

.prônés de la plus savante civilisation. Jamais le pays basque

n'a souffert de la plaie qui dévore le reste de la Péninsule,

et qu'un publiciste espagnol a si bien décrite ce mal énorme

d'empléomanie, ce vice social, politique et administratif,

dont les conséquences nous effrayeraient si nous pouvions les

suivre pas à pas dans leur développement.L'administration basque est sortie par deux fois victorieu-

sement de la plus grande épreuve qui la pût assaillir, celle

de la guerre civile; par deux fois, 'dans ce siècle, les « pro-

vinces )) ont été le théâtre de luttes acharnées, et dans ces

périlleuses circonstances, les autorités municipales aux-

quelles était confié le commissariat des armées de la région

ont toujours su remplir leur mandat. A la fin de chacune de

ces campagnes, et nonobstant les désastres inséparables de

telles luttes, non seulement les soldats n'avaient jamais souf-

fert du manque de provisions, mais la contrée possédait

autant de pièces de vin, autant de tètes de bétail qu'au com-

mencementde la guerre. Les résultats heureux des institutions

basques se lisent en caractères irrécusables sur la surface du

pays. Depuis des sièc les, déjà, le voyageur remarque la

bonne tenue des routes, la propreté des .auberges, le bien-

être général dans les provinces vascongades'. Malgré une

émigration considérable vers les États de rAmérique du Sud,

malgré la stérilité naturelle d'une grande partie du sol, la

population du Guipuzcoa, seule division entièrement basque,

est la troisième en densité de toutes celles de l'Espagne, et

nourrit 88 personnes par kilomètre carré; la Vizoaya, ha-

bitée presque partout par la race euskarienne, en compte 87.

1. Voyez surtout Introduccion â la Historia natural de Espaiea~

por BOWLBS, p. 206 et s. Madr.id, 1775.

3

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Elles ne sont dépassées que par Barcelone (108) et Ponte-vedra en Galice (100) La province de Madrid, en dépitdes 400.000 âmes de la métropole, n'en a que 77. Dansles provinces basques, les mendiants, cette plaie de l'Es-

pagne, ne vous arrêtent point à chaque pas tout y respirel'aisance, l'absence de misère au moins. L'hospitalité estdonnée d'une main généreuse, et au repas du soir, dans lesfermes du haut pays, on n-'a pas l'habitude de compter leshôtes. Le paysan basque n'aime pas à se montrer en haillons,

et si, comme dans tous les pays de montagnes, les enfants etles jeunes gens vont généralement nu-pieds, ils ajoutent, ledimanche, les « spartingues », ornées de « ligas » à la cein-

ture, au béret rouge ou bleu, au pantalon de velours. Lastatistique, il est vrai, constate que l'instruction est peu ré-pandue parmi les Basques espagnols lire et écrire sont

-encore des secrets pour le grand nombre, et l'on s'étonneraitde leur ignorance naïve des choses des autres pays. Maisl'homme « sans lettres » qui cultive son petit bien est toutautre que l'aveugle brute perdue dans les bas-fonds d'unegrande ville. Il connaît son pays comme pas un géographe;il pourrait en dire l'histoire naturelle, les produits, les tra-ditions, les légendes; dans les provinces basques il gardedans sa mémoire les principanx articles des chartes de seslibertés; il sait, souvent par expérience, les détails pratiquesde l'administration. « Jamais, » me disait un des hommesles plus savants de France, « je ne cause avec un paysansans en apprendrequelque chose d'un instituteur,persuadéqu'il sait tout, souvent je n'emporte rien. » Il 'ne faut pass'imaginer que les Basques négligent ou dédaignent l'ins-truction pour leurs enfants; ils saisissent avec avidité toutesles occasions que peuvent leur offrir des gens en lesquels ilsaient confiance. Les petits Euskariens sont de bons élèves,point lourds ou rebelles; -mais je l'ai déjà dit,.l'âge mûr ne

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répond pas tout à fait aux promesses de leur enfance; dumoins, ne sont-ils jamais au-dessous de la moyenne.

On s'est amusé de la prétention des Basques à être tousnés « hidalgos ». La noblesse des Escualdunac est, en effet,

privilège affirmé par un grand nombre de fueros généraux

et les bienfaits en furent réels et substantiels. Dans leursrapports comme concitoyens, la question avait peu d'impor-tance si certaines de leurs familles conservaientune grandeinfluence et recev aient une considération particulière, tousles Basques, devant la loi, se reconnaissaient égaux. ToutEuskarien avait droit de chasse et de pêche. Il était hommelibre, exempt de taxe, de gabelle, de corvée. Ne devant rien

à un seigneur, il ne contribuait au besoin du pays que dansla mesure qu'il s'imposait lui-même par ses représentants.

Comment les jurisconsultes espagnols pouvaient-ils dési-,

gner un tel individu ? Par quels mots pouvaient-ils le dé-

crire sans se trouver en contradiction manifeste avec tous les

principes du droit, non seulement de la Péninsule, mais de

la plus grande partie de l'Europe ? Le Basque était un-homme libre de fait et de loi; impossible de lui appliquer

une autre qualification. Mais le seul -homme ainsi libre,e'était le baron, le noble donc le Basque était baron, il était

noble, avec des privilèges plus grands, plus dignes que les

privilèges égoïstes de la caste supérieure du temps de la féo-dalité, car ils lui conféraient des devoirs politiques, admi-nistratifs, municipaux. La noblesse universelle des Basquesn'était nullement un apanage de famille, c'était une noblessenationale et de race. Pour en faire les preuves, pour cons-tater ses droits, il n'était pas besoin de généalogie remontant

à tel ou tel ancêtre à demi fabuleux; on ne demandait ni

charte, ni parchemin portant le scel d'un roi quelconque. Le

Basque pouvait ne pas posséder un pouce de terrain; à lui

seulement de montrer que, Basque, il était né sur le sol

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bàsque, de deux générations de parents basques. Par ce fait,

et devant la loi espagnole, il était hidalgo'. Au milieu de sesconcitoyens, simple Basque, libre comme eux tous, il devait

se tenir prêt à faire son devoir avec ses frères, à donner savie pour la constitution de son pays, pour ces fueros parlesquels il était homme libre..

Comment est-il arrivé que les partisans les plus outrés de

l'absolutisme pur, les défenseurs de la politique la plus re-tardataire, se soient recrutés au milieu d'un peuple possé-

dant des institutions si hautement libérales'? Il est difficile de

répondre en quelques lignes; mais ce phénomène nous paraitprovenir de deux causes l'une, lente et inév itable, en rap-port avec les progrès de la liberté dans le reste de la Pénin-

sule; l'autre, qui est l'histoire d'une série de déceptions et de

;mécomptes.. `

Jamais peuple n'a si vailhimment lutté pour un but plus

misérablement illusoire. Après mûr examen de leurs insti-

tutions et de la question en jeu, un homme distingué, cor-respondant d'un journal de l'Amérique du Nord, les appelait

« des républicains combattant pour le droit divin ». Ces

hommes, qui possédaient les libertés les plus larges qui

furent jamais, formaient l'entourage de don Carlos ils ser-vaient de soutien au plus tyrannique des absolutismes, à la

plus violente des réactions.Tout Basque était noble, homme.libre devant la loi. Aussi

longtemps qu'ailleurs en Espagne il y eut des classes privi-

légiées, ce privnège des Basques pouvait et devait subsister.

Le Basque avait raison de combattre jusqu'à la mort pourle maintien de ce magnifique droit de naissance. Mais

lorsque, dans la Péninsule entière, il n'y eut plus de classes

asservies, quand tout Espagnol fut déclaré libre, et que les

1. Cf. Nooiasima Recopilacion, lib. VI, tit. Il, ley 16.

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impôts votés par les représentants de la nation furent répartisentre tous les citoyens, ces privil0ges et ces droits n'avaientplus de raison d'être; ils devaient prandre fin chez lesBasques des trois provinces, comme -ils avaient déjà fait decè côté des Pyrénées. A partir de ce moment, les Vascon-gades ne pouvaient plus jouer que le rôle, non plus d'hommeslibres, mais de membres d'une caste favorisée ils devenaientles adversaires communs de la liberté, une exception bles-sante aux lois de la patrie.

Les Basques ont eu, ils ont eneore raison d'exiger toutesles garanties possibles contre la violation de leurs ancienneslibertés, d'agir avec toute réserve, de prendre toutes leursprécautions pour que le caractère probe., économe, essentiel-lement pratique de leur administration intérieure, ne soitpas noyé dans le système corrompu, négligent, coûteux dugouvernement espagnol. Malheureusement, on a greffé surcette question celle de la religion et celle de la dynastie. Atort' ou à raison, la plupart des Basques se sont laissé per-suader que l'existence des fueros est liée au maintien de lacouronne dans la descendance masculine, à la suprématie dudogme catholique romain et de l'unité du culte en Espagne.Le Basque est un catholique fervent les libéraux, on le luidit, ont pillé l'Église, chassé les moines, vendu les couvents,persécuté le clergé. Ennemis des croyances religieuses desBasques, ils ne sauraient être qu'hostiles à leurs institutionspolitiques et communales

Une des plus grandes fautes, et ils en ont commis beau-coup, des libéraux constitutionnels en Espagne, fut de nepas garantir les fueros basques immédiatementaprès la mortde Ferdinand VII. A cette époque, comme dans la premièrepériode de la Revolution française, la plupart des villes in-dustrielles des provinces basques,que la majorité deshautes classes, auraient facilement accepté les idées nou-

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velles' mais les libéraux hésitèrent, et Charles V, peut-être

pour la seule fois dans sa vie, sut montrer de l'énergie et dela prévoyance il se prononça hautement pour la conserva-tion des fueros. Le clergé, inutile de le dire, prenait parti

pour la monarchie absolue; c'en fut assez pour déterminerun soulèvement des Basques contre un gouvernement quisemblait vouloir saper des institutions si chères. Et pourtant,les grandes villes des provinces, Bilbao, Vittoria, San Se-bastian, Pampelune, ne se sont jamais entièrement dévouées

aux souteneurs du droit divin. « Fueristes, » elles le sonttoutes; carlistes, non. Leurs habitants sont aussi attachés

que les autres Basques à leurs anciens privilèges,' mais ils

ne veulent pas se déclarer les alliés des adversaires du droitcommun en Espagne; ils ne veulent pas imposer le despo-tisme qu'ils rejettent eux-mêmes.

Les « fueros » s'en vont. Si, au point de vue théorique, lachose ne peut être fort regrettée, elle nous paraît en toutpoint déplorable et dans la pratique, et dans l'état actuel dela vie civile espagnole. L'administration provinciale et mu-nicipale des Basques a été excellente même au temps oùl'Espagne accélérait le plus sa propre décadence, les pro-vinces vascongades faisaient exception au reste de la Pénin-sule.11 n'y avait pas de brigands, le pays était sîzr, le peuplesatisfait. L'administration espagnole, une des plus négli-gentes et des plus dispendieuses de l'Europe, va tout re-couvrir de sa boue, et personne ne peut voir sans douleur s'yengloutir la probité, la sagesse pratique des Euskariens.Quelle réglementation, si bien rédigée qu'elle soit, supplée-rait à l'éducation administrative, fruit de tant de siècles deprudence et d'honnétetél Il y a toute la différence du monde

1. Voyez pp. 2 et 32-37 de l'introduction de M. Canovas del Cas-tillo à los Vascongados, por Rodriguez FERRER. Madrid, 1873.

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entre les plumitifs mal payés, qui ne songent qu'au moyend'augmenter leur maigre salaire ou d'intriguer pour leuravancement, et des municipalités librement élues, quirendent compte aux hommes libres, leurs frères, de ce qu'ellesont fait pour le bien commun, suivant la tradition des an-cétres1 Le gouvernement actuel désire la prospérité desprovinces; il a'même nommé une Commission pour étudierles institutions basques et voir ce qui pourrait en passer danscelles du reste de l'Espagne. Notre souhait serait qu'on allâtde l'avant dans cette voie, et qu'au lieu d'introduire chez lesBasques les errements de la bureaucratie castillane, l'admi-nistration de la Péninsule s'inspirât désormais de la sagesse,de la probité, de l'économie pratiquées si longtemps par undes plus petits peuples du beau pays des Espagnes.

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NOTES SUR QUELQUES CONSTRUCTIONSDANS LE

DÉPARTEMENT DES BASSES-PYR$N$ES'

Les quelques notes ci-jointes sur des constructions qui setrouvent très fréquemment dans les parties montagneuses dudépartement des Basses-Pyrénées, n'ont, je l'avoue d'abord,

aucune valeur scientifique. Je ne veux constater ici quel'histoire de mes propres erreurs, avec la seule intention deprévenir les explorateurs, afin qu'ils ne tombent pas plustard dans les mêmes fautes.

Dans mes promenades sur les montagnes inférieures dupays basque, j'a~ été très souvent embarrassé en trouvant çàet là les restes de rudes constructions, en apparence trèsanciennes. J'ai demandé aux habitants et aux voisins cequ'elles pourraient être, sans jamais avoir reçu une réponsesatisfaisante. En leur état de plus grande dégradation, elles

ne se composaient que de cercles irréguliers de pierres cou-vertes de mousse, à moitié enterrées dans le sol, et s'élevantà peine au-dessus de l'herbe; seulement la présence d'autrespierres semblables qui gisaient tout autour faisait soupçonnerqu'il y avait eu autrefois une construction quelconque. J'airemarqué de tels cercles à côté du sentier de mulet, entraLarrau et Sainte-Engrace, au commencementde la dernièredescente vers l'ancienne caserne des douaniers. Ces cercles

1. Bulletin ds la Société des Sciences et Ants de Bayonne, 1882.

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sont ordinairement de trois ou quatre mètres en diamétre

ils sont formés de pierres sèches de toute qualité, de grès,calcaire, granit, de tout ce qui se trouve le plus sous la mainà l'endroit où ils sont placés. Quelquefois ces débris ont deux

ou trois rangées de pierres, et le tout est presque caché parmiles broussailles, ronces, genêts, etc. J'étais fort intrigué desavoir ce que cela pouvait être. Je crus d'abord que ces cons-tructions étaient les débris ou les restes de quelques habita-tions de l'homme d'une époque très éloignée, peut-être mêmepréhistorique; mais il n'y avait jamais traces 'de toiture, nide fenêtre, et très rarement de porte ou de plancher.

Un changement de résidence enfin m'a donné le moyend'en expliquer tout à fait le mystère. Comme il arrive trèssouvent dans des choses bien plus importantes, l'affaire estdes plus simples un fait m'a placé sur le bon chemin. Sare,

avec la commune de Vera, en Navarre, est depuis longtempsrenommé pour ses beaux châtaigniers et leurs produits.

Malheureusement pour ce pays-ci, ces beaux arbres ontété sujets, depuis quelques années, aux attaques d'une ma-ladie inconnue, et ils ont péri par milliers. Je n'étais pas de-puis longtemps à Sare, quand je découvris beaucoup deconstructions dont j'avais vu les restes et les débris ailleurs.Elles sont en tout état de conservation. Quelques-unesserventencore dans les châtaigneraies, d'autres sont encore debout,mais abandonnées, dans les endroits où les arbres ont com-plètement péri ou tout à fait disparu enfin chez quelques-

unes on ne voit que les assises des pierres. Deux d'entreelles, dont je vous envoie des esquisses bien imparfaites, setrouvent dans un des ravins ou petits vallons sur les flancsorientaux de Larrhun. L'une servait encore l'année passée;l'autre, comme on le.voit par les deux jeunes arbres qui ontpoussé au milieu, a été abandonnée depuis quelque temps.D'une autre, il ne reste en place que -quelques piérres. La

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seconde est remarquable par un rude portail et une portefaite de pierre losse elle est aussi pavée de dalles de pierresemblables. En général, ces cons tructions's'élèvent dur.cherou du sol même; quelquefois, surtout sur les pentés rapides,le sol est creusé et la construction se trouve à' moitié sousterre. Quelquefois on les voit q u ad rilatères, 'quelquefois con-formes à quelque rocher qui surplombe, ou à quelque autre

accident du sol qui puisse en rendre la construction plusfacile. Elles sont bâties de pierres brutes, non taillées, à, sec,en forme, pour la plupart, plus ou moins circulaires. Le murest haut d'un mètre et demi environ, le diamètre lé pluslong est de quatre mètres, rarement davantage.

Elles sont ordinairement assez éloignées les unes des

autres il est assez rare d'en trouver plus de deux à côtél'une de l'autre, qutiique j'en aie vu jusqu'à cinq ou sixrangées en ligne. Elles servent à emmagasiner les châtaignesà la saison de la récolte. Comme les. chàtaigneraies sontsouvent distantes des fermes, on y entasse le fruit et on lelaisse là dix ou quinze jours, jusqu'à ce qu'on trouve uneoccasion propice pour le transporter à la maison.

Voici tout ce que j'ai à dire. Les restes et les débris de

ces petites constructions qui se trouvent aujourd'hui dansles endroits où il n'y a pas eu de châtaignes de mémoired'homme, nous font croire que ces arbres furent autrefoisbeaucoup plus nombreux qu'ils ne le sont à présent, et mêmeà des éIévatiÓns plus grandes. Peut-étre aussi une maladiesemblable à celle qui sévit en ce moment les a détruits à uneépoque plus reculée. Aujourd'hui les arbres périssent parmilliers, et dans quelques années, en maint endroit, sur les

pentes de la montagne, dans les ravins et dans les vallonséloignés, il ne restera que ces constructions, ou leurs débris,

pour dire qu'il y avait autrefois des bosquets de châtaignierssuperbes. J'ai écrit ces quelques lignes seulement pour pré-

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venir d'autres personnes contre les apparences qui m'onttrompé, et pour leur épargner des recherches inutiles. Pardes bévues semblables on a pris les restes d'anciens pressoirsd'olives, les semans de Tripoli, pour des constructions mé-galithiques historiques 1. En Amérique Centrale, les vestigesdes premières églises bâties par les Espagnols ont figurécomme des reliques de villes mexicaines ou indiennes de laplus haute antiquité!.

1. Voyez dans Tlae Atlzenaeum de Londres, n', 3i20, 11 février 1899,p. 183, le compte rendu de la Société des Antiquaires du 6 janvier.

2. The Land of Poco Tiempo, by Charles F. Lummis, SampsonLow, London, 1893, cap. XI. sq.

P.-S. Tout dernièrement mon excellent voisin, M. J. B. Men-diboure, m'a prêté une brochure espagnole, Memoria sobre la enfer-meclad del castair,o, par D. J M. de Goicoeohea y Abzurâm, Bilbao,1900. J'y lis « La enfermedad de los castaflos, nueva y desconocidapara la'presente generaci6n. debe ser muy antigua a juzgar por nues-tros campesinos, los cuales estân unânimemente acordes eu decir quepor tradicifin han Ilegado a ellos noticias de una epidemia que atac6â los castafios, en virtud de la oual qued6 despoblada de los citadosârboIes toda la regi6n Vasco-Navarra (p. 10). Ya antes eu época masremota se habian perdido los castaflos, es decir, que bace siglo ymedio los n~turales de aquella zona decidn 10 que boy dicen nues-tros campesinos (p. 11). En Caceres en 1726 (p. 14). »

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SIMON DE MONTFORTET LE PARLEMENT ANGLAIS' 1 (t248-t265)

Simon de Montfort, fils cadet du célèbre Simon de Mont-fort, chef de la croisade contre les Albigeois, fut l'auteurd'une grande réforme dans le régime parlementaire en An-gleterre. Son œuvre a été appréciée très diversement 'par lesautorités les plus récentes. Les uns n'y voient qu'une simpleextension de la pratique crdinaire du Parlement anglais, unpas en avant qui aurait dû nécessairement se faire un peuplus tôt ou un peu plus tard 1 les autres voient dans cetétranger qui savait se faire chef du mouvementpopulaire auXIIIe siècle, presque un révolutionnaire moderne; ils pré-tendent que c'est à son initiative seule que l'on doit la consti-tution parlementaire actuelle en AngleteÍ're3

Que les uns ou les autres aient raison, et qu'il y ait ou detrop ou de moins dans ces diverses appréciations de la valeurdu fait de l'admission des bourgeois au Parlement anglais

1. Bulletin de la Société des Sciences et Arts de Bayonne. 1883.En Espagne, Boletin ~.le la Institution Libre Ensenansa. Madrid, 1883.Enanglais, The Antiquary. 1833.

2. Stubbs, Constittctional Hiatorl/ orEnr~land, II, 99-100. Creigh-ton, Life of Simon de Mont%rt. London, 18i? « We cannot creditEarl- Simon with working any great change in the English constitu-tion. P. 177.

3. Pauli, Simon de Montfort. Miss H. Martineau. Introduction.Eng. tram, London 1876. Preface. Prothero,LifeoJSimon de Montfort.London, 1877, pp. 293 2.

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par Simon de Montfort dans l'année 1265, c'est ce que je neme propose pas d'examiner ici. II est constant que dès l'année1213, sousJean sans Terre, quatre hommes discrets dechaquecomté furent cités au Parlement', que dans l'année 1226quatre chevaliers furent élus par chaque comté pour" dis-cuterla grande charte de 1215,,qu'en 1231 douze bourgeois dechaque bourg firent partie du « shiremoot» (conseil .généraldu département) et aussi en principe du « commune conci-lium » (l~ grand conseil) du royaume', qu'en 1254 deuxchevaliers de chaque comté furent choisis pour aller à Ports-mouth' voter une aide pour subvenir à la guerre que menaçaitde faire contre la Guyenne le roi de Castille', qu'en 1261'trois~;hevaliers furentmandésà un Parlement àWindsor; et qu'en-fin le 14 décembre 1264, Simon de Montfort, comte de Lei~

cester, au nom du roi Henri III, convoqua le'Parlementà seréunir à Westminster le 20 janvier1265; et entreles chevaliersde chaque comté que nous avons vus déjà présents, furentcités deux bourgeois de chaque ville ou bourg d'Angleterre8.

Je le répète, ce n'est pas la valeur exacte de' ce dernier fait

que je veux discuter devant vous, mais ce que je cherche à

1. Stubbs, Select Charters. Oxford, 18i0. Il Quatuor discretos homi-

nes de comitate tuo illuc venire facias ad nos. » P. 279.2. « Quatuor de legalioribus et discretioribus militibus.ex se ipsis

eligant. Select Charters, 348.3. «De quolibet burgo duodecim legales burgensesper totam balliam

tuam. » 349.4. « Quatuor legales et discretos milites de comitatibus praedictis

quos iideua comitatus ad hoc elegeriut » duos de uno comitatus et duosde alio. » P. 367.

5. Il Vocati sint tres militibusde singulis coinitatibus nostris. » SelectCliarters, p. 396.

6. « Item informa prædicta scribitur civibus Eboraci, civibus Liucol-niæ, et ceteris burgis Angliae, quod mittant in forma prædic~a, duos de

.discretioribus, legalioribus et probioribus tam civibus quam burgen-"sibus. Item in forma prædictamandatumest baroDibus et probis homi-nibus Quinque Portuum. » Select Charters,.406. 1

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constater, c'est que, dequelque valeur que soitce fait dans ledéveloppement des libertés constitutionnelles d'Angleterre,

son auteur, Simon de Montfort, dans ceci et dans tous sesautres procédés de réforme ou de révolte en Angleterre, nefâisait que suivre les mêmes procédés, en appliquant lesmêmes principes qu'il avait appris et dont il s'était déjà servi

en son gouvernement de Guyenne; que c'était ici sous sesrapports avec les libertés déjà anciennes du pays, des cou-tumes, fors et fueros, des villes et des bailliages du Midi, desPyrénées françaiseset espagnoles, des diverses races des Gas-

cons, des Basques,des Provençaux, des Catalans et des Espa-gnols qu'il avait appris en pratique ce qu'il apporta plustard en Angleterre et qu'il y appliqua avec tant d'éclat.

Et d'abord, un mot sur Simon de Montfort, fils cadet ducélèbre Simon de Montfort, vice-roi de Guyenne de 1248 jus-qu'en 1253, qui, sans terre ou possession quelconque, sut sefaire une telle situation qu'il épousa en 1238 la soeur deHenri I II, roi d'Angleterre; qu'en 1241 il fut demandé par lesbarons, citoyens et bourgeois de Jérusalem pour être régentdu royaume de Jérusalem jusqu'à la majorité du princeConrad' qu'en 1252 pendant son gouvernement de Guyenneil fut reçu par la noblesse de France comme un des gardiensdu royaumeaprès la mort de la reine Blanche. Il savait aussiconquérir l'amitié de son beau-frère Richard, ducde .Cor-nouailles, homme d'un caractère bien supérieur à son frèreHenri III. II fut l'ami intime des plus grands hommes del'Église de son temps, principalement de Robert Grostête,évêque de Lincoln, et d'Adam March, le moine fransciscain,et quoique vaincu et tué sur le champ de bataille, il fut vé-

1. M. S. Cotton. Vespas. F. J. cité par Pauli, p. 36. « Quil nos bauta bail mon Sire Simon de Montfort Comte de Leicestre jusqo alagede nostre seignor le Roi Conrad. » Et Simon de Montfort, Comte deLeicester, par Charles Bémont,.p. 13 et 50, Picard, Paris, 1884.

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néré comme saint par le menu peuple, et malgré le pape etla hiérarchie de l'Église, un office et deshymnesfurent com-posés et récités en son honneur, plus de deux cents miraclesfurent enregistrés sur son tombeau' Un tel homme n'a puêtre un intrigant vulgaire.

Mais que veulent donc dire les plaintes si amères que desseigneurs gascons et des, bourgeois de quelques villes deGuyenne portèrent contre lui, les accusations d'actes de vio-lence et d'oppression portée~ à sa charge devant les roisd'Angleterre et de Francè Je ne puis discuter, à fond cettequestion ici. S'il y avait des accusations, il ne manquaitpasnon plus des témoignages en sa faveur. Janvier 1250, sieurPhilippe, chapelain du comte Alphonse de Poitiers, visita laGuienne. « Sachiez, écrivait-il à son maitre, que il (Simon)tenoit la Gascogne en bon estat, et que tout lui obéissoit, nen'oséent rien entreprendre contre luj2. ) Les citoyens de Casteld'Uza firent dire au roi Henri que Simon étaitIe premiergou-verneur anglais qui voulait écouter leurs plaintes'.

Cette contradictiondansl'appréciation de l'œuvre de Simon

par ses contemporains, ses voisins et ses sujets, n'a rien de

surprenant. Je crois que tout cela dépend de l'incompatibilitédes intérêts des différentesclasses des habitantsde la Guyenne.

1. Prothero, Appendix n, pp. 371, and 379-380, Appendixm, 388 seq.En voici le dernier Onutio « Deus, qui beatum Symouem martyremtuum virtute constaucie in agone suo communisti, quique illi ad re-nouandum Britannie regDum milites inclitos associasti, tribue noseius precibus adiuvari qui celebri martyrio meruit consul11mari. Per,etc. »

2. Boutaric,SaintLouis et Alphonse de Poitiera,p. 73, cité par Ch.Bémont. Reoue laistor·ique, 2' année, m. Juillet-août 1877.

3. Pauli, p. 59, note. « Hanc veritatem et querelam ostendimusmultis ballivorum vestrorumqui nullum ibidem consilium posuerunt,donec per Dei gratiam Dominus Simon de Monte Forti, Comes Lei-cestrim, venitin Vasconiamcui hanc veritatem ostendimus et quere-lam.. Shirley, Royal Lettens, n, 58.

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Les intéréts .des bourgeois, des gros commerçants, des habi-tants des grandes villes maritimes et fluviales, et ceux desseigneurs, habitants et eultivateurs du haut pays furent toustout à fait opposés. Les lois économiques et commercialesfurent si mal comprises dans ce temps-là, que presque toutesles ordonnances et tous les règlements du commerce faitsavec les meilleures intentions, produisirent souvent un effet

tout à fait contraire à ce que voulaient leurs auteurs. Danschaque ville, presque dans chaque bailliage ou commune deGascogae,. il y avait alors deux partis; l'un commercial etmaritime, qui gagnaitsa vie et faisait fortune par le commérce

avec l'Angleterre, qui tenait surtout à l'exportation libre desvins, du cidre, et des prodltits de sa terre, et à l'importationlibre des articles d'Angleterre et des pays d'outremer; l'autreparti attaché par ses alliances et par ses intérêts à la noblessedu haut pays. Il y avait toujours lutte entre ces deux fac-tions. Les seigneurs etles propriétairesduhaut pays voulaientnaturellement envoyer les produits de leurs terres pour êtrevendus librementaux marchés des grandes villes maritimes

ou fluviales. Ils désiraient avoir leur part des avantages dontles bourgeois jouissaient pour leurcommerce d'outremer. Or,ceci était précisément ce que les bourgeois ne voulaient pasleur permettre. Ils voulaient à eux seuls le contrôle absolu,presque le monopole du marché; que les produits de leurspropres terres, de celles de la ville, de l'Église ou de la cathé-drale eussent toujours les prémices et la préférence sur lesautres. La saison, l'heure, le prix, furent tous signalésd'avance; les autres ne pouvaient vendre la marchandisequ'après que tous les produits des bourgeois fussent vendus.C'était à peu près la même chose pour l'importation. Lesbourgeois de Bordeaux, de Bayonne et d'autres villes avaientleur commerce avec l'Angleterre presque entièrement libre.mais pour vendreaux autres, il y avait des entraves de toute

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sorte, des droits de marché, de pesage, de contrôle', etc., etc.Les seigneurs et les habitants du haut pays suivirent natu-rellement deleur côté une politiquesemblable. Ilslevaientdesdroits sur les routes, sur le portage, le passage et les barragesdes rivières, des ponts, etc. Ils pillaient les marchands, rava-.geaient les terres de ceux qui voulaient accaparer à eux seulstous les bénéfices du commerce du pays i. De là, les que-relles éternelles des propriétaires des nasses de l'Adour,de la Nive et du Gave, etc., avec les bourgeois de Bayonne,les querelles des citoyens des villes supérieures de la Garonneet de la Dordogne avec la ville" de Bordeaux. Les seigneurset les habitants du haut pays pouvaient à peine vivre sans lecommerce des villes 3. Nul article de luxe et c'était -unsiècle d'un grand luxe, quoique d'un luxe grossier nepouvait être acheté que dans les grandesvilles. Les seigneurs

cherchaient toujours quelque appui dans ces villes mêmes.Ils essayaient ou par alliance ou par intérêt, d'obtenird'une partie des bourgeois ces faveurs recherchées. Dans

1. Voyez passim les excellentes«Études hfstoriques de MM. J. Ba-

lasque et d'E. Dulaurens sur la ville de Bayonne ». Bayonne, 1869.C'était peut-étre le privilège de vente libre sur lemarcbÓ de Bayonnequi attiràit plus tard les gens du Labourd au parti du roi de France,tandis que les bourgeois de Bayonnepréféraient la domination ou l'ad-ministration anglaise, Balasque et Dulareus, et les Coutunics de La-bount., Bordeaux, 1714 et 1760, dernier 'chapitre. Des franchises et li,-bertés du Pais et habitants de Labourd. Articles y, III.

2. Pour ce qu'étaient les pillnges des seigneurs voyez « 10 librede vita des Bergerac. Beryei~ar, sous les Anc~lai< par Émile La-broue, pp. 52-57. Sauveterre, 1879.

3. Les Anglais en Guyenne, par D. Brissaud. Paris, 1875, pp. 72-73. Acause de ceci, les seigneurs du haut pays se tournaient toujours versle roi d'Espagne 'aussi souvent qu'ils croyaient trouver un débit librede leurs vins dans ses domaines, et même ceux qui avaient l'babituded'envoyer leurs vins en Angleterre,quand le roi Henri détenaitleursdenrées.

4. Voyez Brissaud, Les An!~lais en Guyenne, pp. 125-126. Paris,

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tous les conseils municipaux, dans toutes les élections de laville, leur main se faisait sentir. Le plus grand de tous lesseigneurs, le' roi de France, fut toujours là prêt à appuyersourdementle parti national contre le parti anglais. Il y avaitnécessairementdans chaque ville ces deux factions. Dans lesvilles maritimes, le parti commercial fut ordinairement leplus fort. Les, rois d'Angleterre cherchaient à se faire aimer

par les bourgeois et par les marins, en leur donnant des pri-vilèges de toutes sortes. Néanmoins la minorité ne pouvaitêtre entièrement écrasée; elle était toujours là, une force na-tionale, qui pouvçlit devenir à toutinstant un danger menaçantpour l'Angleterre.-

A tous ces sujets de discordes il faut en ajouter un parti-culier à la période du gouvernement de Simon de Montfort.Lechef des seigneurs de Gascogneétait alors Gaston de Béarn,mais Gaston de Béarn était parent (cousin) 1 de la femmed'Henri III. Un des vi6es du gouvernement durant le longrègne d'Henri III fut sa prodigalité et sa faiblesse envers lesparents de son épouse. Ils avaient toujours accès auprès duroi et pouvaient porter à son oreille leurs griefs réels ou pré-tendus, sans rencontrer aucune des entraves de la justice.Ils savaient bien que le roi les prottgerait et leur donneraitraison, coûte que coûte, contre tout autre plaignant. Nul plusque Gaston ne porta plus loin le dédain du commerce, dutravail, de tout ce qu'il croyait hors du rôle d'un seigneur dece temps. Son penchant pour lé luxele rendait toujours néces-

1. Voici la généalogie.Premier mariage. Second mariage.

Alphonse Comte. -Garsende Guillaume demoiicade.de Provence

1 1

Raymond Bérenger IV Gaston VII de Béarn.

Aliénor, femme d'Henri 11[, roi d'Angleterre.

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sitaux il.avait toujours besoin d'argent; mais l'argent étaitl':ipanage.des villés et des mârchands. I~ chcrchait donc entoute occasiou à se saisir d'une partie. Il pillait leurs convoisil les harassait de droits de péage, il ravageait leurs terres.Enfin, il était toujours en révolte contre la justice.

Mais Simon de Montfort punit sévèreme~t les hobereauxet les pillards des marchands sur les grandes routes. Il pro-tégea le tl'atiqua~t et le laboureur contre tout lemonde. Dansla seule lettre que nous avons de sa main, il reconnait qu'ilfu1'haÏ des nobles, maisil déclare qué ce fut' parce qu'il' main'.

tenait les droits des pauvres contre eux. « l'or ce' q ùe' je suis

si mauvoleu de les grau-nz gens de la terre, por ce que je sos'.tien voz dreitures et de la povre gens contre aus i~ llne partagea pas la haine ou le mépris des seigneurs de' son

temps pour la bourgeoisieet envers le menu peuple c'était

'en Gaséogne qu'il apprit à se servir d'euxdans tous sesprojets ou Je réforme ou d'ambition. Quand il fut accusédevant Henri III par les seigneurs et par leurs affidés desgrandcs villes,il fitappel contre eux aux petites gens du pays;il demandaavec fierté ce qu'ils disaient de son gouvernement.Tous les griefs por~és contre lui venaient des seigneurs et deleurs dépendants.

.Certainement Simon de Montfortavait les défauts de sesqualités, et je ne veux pas- dire que son administration fûtsans faute. Il f utdur et de paroles et de fait; il fut un hommed'mi caractère absolu. Il voulait faire absolument ce qu'ilcroyait juste, et le faire faire aussi aux autres. Il gouvernaitla Gascogne en Anglais. En toute circonstance, il mettait. lesintérêts de l'Angleterre au-dessus des intérêtsde la province,s'il y avaitçonflit entre eux. Il ne fut pascomme ce magnifique

1. Cité par Pauli, p. 57 des « Royal Letters II, 52, 26 mars, 1250.Bémont,p.267..

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Gascon, Richard CŒur de Lion, qui resta gascon même surrle trône d'Angleterre. Il ne comprenait pas peut-être aussibien que Gaveston, le malheureux .favori d'1~~louard il, lesmeilleurs moyens de s'attacher les Gascons, et de.leùr faireaimer la suzeraineté anglaise, mais il voulait le bien du

pays.Dans sa première tournée en Guyenne, Simon alla "au x

quatre cours de Gascogne successivement jurer d'observer

« les bons fueros et les bonnes coutumes du pays' ». Il semontra alors tel qu'il devait être désormais. Protecteur'des

pauvres et des bourgeois contre le pillage et les exactions dela noblesse. Juge inflexible et sévère contre les malfaiteursde toute espèce. Apre et brusque en. parole, mais encore plusrude et énergique en action. Agissant rarement de sa propreautorité, mais cherchant toujours un appui dans les cours dejustice ou dans les conseils desvilles. A Dax, « le conte oibien quand il vint en pais les torz e, les dommages e dommes

morz e dautres choses assez que Monseigneur Gaston avoitfet sus cels Daix e en autres lieus assez sus le roi e sus lessuens' ». Mais il ne voulait pis juger ces malfaiteurs de sapropre autorité, il ordonna « que illurentmandé a la cort pouradrecer ce quil ne tenoient pas bien les establissemenz quiavoient esté fet par commune cort, e de prelaz, e de barons, ede chevaliers, e de borjois' ». Même dans les affaires crimi-nelles qui se rapportaient à de simples particuliers, il nevoulut jamais agir en despote. Quandune veuve portait plaintedevant lui de ce que son fils avait été tué par Bernaz deFrançois, maire de Dax,'il ne voulut pas juger la cause lui-même, mais « le conte assembla les preudes hommes de la

1. Bémont, Re~ue histonique p. 263.2. Réponses de Simon de Montfort. Balasque et Dulaureus, 11, 580.3. lLicl.

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vile et deu pais en tour e devant larceveske Daux e levesquede la vile et la cort tote pJenière de chevaliers et de borjois, fula vérité trovée ». Mais quand les seigneurs ne voulaientpas se présenter devant ces cours de justice, le comte agissaitsans hésitation. Lorsque le vicomte de la Soule, après sixsommations,négligeait dese présenter devantla cour de Saint-Sever pour répondre aux plaintes de ses vassaux contre lui1,Simon envoya promptementdes troupes qui l'assaillirentdanssa ville et château-fort de Mauléon, et l'obligea de se rendresous condition de fairejustice à ses plaignantsdevant le comteet de payer une amende de 10.000 sous Morlaas. Ces quatrecours de Gascogne, Bordeaux, Dâx, Saint-Sever et Bayonnefurent autant de parlements dans le pays. « Leur actions'exerçait non seulement en matière criminelle, mais en ma-tière politique aussi'. » La liste des signatures apposées en1262 à un jugement dans un procès qui avait duré depuis1251 donne une.idée de la maniere dont était composée, auXII Iesiècle,la cour de Gascogne. « A côté des premiers baronsde laprovince,on voit figurer les maires des principalesvilles,ceux de Bordeaux, de Bayonne, de Dax, de Saint-Émilionetde Bourg'. ». C'est ainsi que Simon avait déjà pris l'habitudedepuis 1248-1263 d'être assesseur, de 'prendre conseil, etd'agir en union avec de simples bourgeois sur des matièresdu plus grand intérêt pour le pays.

En 1236, les citoyens de Bordeaux sont cités comme « leschevaliers 'puissants ou bourgeois de Bordeaux » « Militespotentes vel burgen8es Burdegale s. ) « Les familles des Co-

l. Réponsesde Simonde Montfort, Balasque et Dulaurens, II, p. 581.2. Ibicl., p. 590 Nec ad aliquam curiam apud Sanctum Severum ac-

cedere vellet uec suis conquerenLibus jus facere, sed de veniendoadipsam curiam esset sexties vel amplius in derectu. »

3. Bémont, p. 263. Recu<: leistoi·iyue.4. MM. Delpit, wolteubuttel, mss., p. 134.5. ILicl., p. 68, note 3.

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lomb, des Calhau, des Solers, allaient de pair avec les plus

illustres de Guyenne. » Les chevaliers même, les damoiseaux

de la province briguaient l'honneur de s'enrôler parmi les ci-

toyens de Bordeaux, mais la constitution de 1261 établissait

qu'aucun chevalier ou damoisel ne pouvait devenir citoyen de

Bordeaux sans une permission spéciale du roi' Cette auto-

risation fut accordée à Amanieu de Bouglon, 1er mars 1324.

De plus, nous avons, 1256, Pierre de Bordeaux qui se pré-

tendait héritier de Saint-Paulin, et faisait ainsi remonter son

origine jusqu'à l'une des familles patriciennes de l'antique

Rome..Il énumérait parmi ses possessions, comme titre et

preuve, un ancien monument romain à Bordeaux, le palais

ou piliers de Tutelle'. Un gouverneur qui avait eu des re-lations avec de tels hommesne pouvait plus mépriser les gens

de commerce etla bourgeoisie comme des personnes infé-

rieures et indignes de s'associer avec la noblesse féodale.

Maintenant si nous regardons de plus près les actes de

Simon dans sa lutte contre le roi d'Angleterre, 1258-1265,

nous les trouverons presque tous calqués sur le modèle qu'il

avait suivi dans ses rapports avec les'cours et les municipa-

lités de Gascogne. Dans toutes ces transactions avec le pou-voir royal, dans tous ces accommodements, nous trouvons

les mêmes procédés, souvent bien compliqués, d'élection se-

condaire que nous rencontrons dans son administration en

Gascogne.Il y avait eu déjà en 1244, il est vrai, un projet de réforme

en Angleterre qui a, du reste, une grande ressemblance avec

1. Ibidem, nate, « sine domini licenciro speciali ». On trouve dans lacollection de Brequigny la permissionaccordée iL Amanieu de Bouglon

le 1er mars 1334. Rymer rapporte celles qui furent accordées à Bertrandde Got et à plusieurs autres barons.

2. MM. Delpit, Wolfenbuttelmss."p. 72, uote. « 7'iccletani cum platea

que est ante eam et cum hominibus feodatariis suis qui circum prro-dictam Tudelam morantur. »

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les projets adoptés plus tard par Simon de Montfort. Quatreconseillers devaient être élus par l'assentiment de tous pourveiller à l'exécution de la Grande Charte. Deux d'entre euxdevaient être toujours à la cour auprè-s du roi. Deux furent legrand justicier et le chancelier choisis par ce commun con-sentement de tout le royaume. Deux justices et deux baronsdevaient être aussi nommés, d'abord par l'élection générale,depuis par les quatre conservateurs'. Nous verrons plus tardcombien cette espéce d'élection secondaire fut pratiquée danstoute la Gascogne et parmi les Basques espagnols.

La part de Simon dans le plan du gouvernementétabli parles « Provisions d'Oxford » dans l'année 1258, n'est pas bienconstatée; mais le régime proposé en 1264 est certainement

en grande partie son œuvre. Il est intéressant de comparercette ébauche de gouvernement en Angleterre avec celle queSimon avait déjà mise en pratique en Gascogne. Nous lesmettons toutes les deux en regard.

ANGLETERRE, 1264

Forma regiminis dominiregis et regni.

Ad reformationem statusregni Angliæ eliganturet no-ruinentur tres discreti et fi

deles de regno, qui habeantauctoritatem et potestatem adomino rege eligendi seu no-minandi, vice domini regis,consiliarios novem tres adminus'alternatim seuvicissim

semper sint in curia pra~-sentes.

1. Stubbs, Constitutionat Hi.stoy qf England, 11, 63.

GASCOGNE, 25 MARS 1251

Traité avec Gaston deBéarn, 25 mai 1251.

Le tribunal sera composédes deux commissaires et de

quatre juges choisis par euxdans chacûne cour de Gas-cogne.

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Cart~e vero lib(1rtatumgene-ralium et forestæ, indigenis

a domino rege dudum con-cess~, cum laudabilibusregni consuetudinibuset diu-tiusapprobatis, in perpetuumùbserventur, et provideaturqualiter melius et fortius va-leant observaril.

Il est difficile de constater toujours les influences spéciales

qui ont conduit un individu à faire telle ou telle action, ou à

suivre telle ou telle ligne de conduite. Ce n'est pas seulement

dans des circonstances particulières, dans les faits isolés, queje cherche la preuve de mon thème. Les maximes du milieu

auquel nous vivons, le courant des opinions, les pratiques,

les habitudes de tout le monde agissent beau~;oup plus sur le

caractère que l'enseignement théorique. Une atmosphèresub-

tile, dont, à cause de sa pression constante et douce, nous ne

nous rendons aucun compte, amène à la fin de plus grandschan-

gements sur la santé que beaucoup d'accidents plus sensibles.

Je vous invite donc à parcourir à la hâte avec moi l'état po-

litique, les libertés, les privilèges, les lois commerciales etparticulières dont jouissaient à cette époque les populations

pyrénéennes. Le régime féodal n'y avait pas encore pénétré

avec toute sa force brutale, avec l'exaltation démesurée du

soldat, du chevalier et du baron 'son mépris du commerce et

des arts de la paix, son dédain des bourgeois de la ville et du

menu peuple. Le progrès de la féodalité fut encore retenu pardeux forces qui existaient depuis longtemps dans le pays.Les deux forces encore subsistantes, dont je parle, sont les

1. Stubbs, Select Charters, 404-5.2. Rymer cité par Bémotit. Reoue leistonigue; 258, et 13i~niolit, Sinion

!!e Mont"oi·t, p. 38 (Picard, Paris, 1884).

Il jugera selon les cou tu mes

particulièresà chaque cour etselon les statuts des cités etdes villes t.

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anciennes municipalités romaines et. les libertés généralesdans les hautes régions des Pyrénées.

Le régime municipaldans les provincesde l'ancienne Rome,la liberté de l'administration locale qu'elle laissait si souventaux populations soumises et aux habitants des provincesfurent encore conservés parmi les bourgeoisdes grandes villesdans tout le Midi de la France. Cette habitude d'administra-tion libre. n'avait pas été perdue par les citoyens à travers lesinvasions successives des hordes de Barbares. Si le Goth etle Franc de leur côté méprisaient la mollesse des hommes delà ville, les citoyens méprisaient également la rudesse, le bar-barisme, l'inaptitude de leurs conquérants. Il ne fut pas alorsainsi qu'il arriva plus tard. Le sang pur, la sangre azul desGoths et des Francs ne fut pas toujours le plus' respecté. Au'contraire, les plus grands de ces chefs briguaient les nomsde « patricius », de « consul

&, « d'imperator », de « basileus ».Les bourgeois qui datèrent leur descendance des patriciensromains, dédaignèrentàcetteépo(lUeles Barbares qui venaienton ne savait d'où, et qui étaient comme nés d'hier, presquealitantque les descendants de ces mêmes Barbares les mépri-saient plus tard. L'union d'une Basquaise avec un hommeduNord fut considérée alors comme une mésalliance po«r elleBeaucoup plus tard, les moines du Sud ne voulaient pashabiter le même couvent avec les moines de la race desFrancs 2. Les noms romains consul -« consulatus » furentportés avec fierté et furent longtemps chéris par les munici-palitésdes grandes villes du Sud. Nous avons vu un bourgeoisde Bordeaux faisant remonter sa généalogie à un patricienromain et mettanten preuve sa possession d'un palais romain.Les villes de Lectoure, de Monségur, de Bergerac, de Ca-dillac et beaucoup d'autres dans le gouvornement de Simon

1. Les Vies de sainte Rictrudiset de saint Amatidus dans les ActaS~xn.ctonum des Bollaudistes.

2. Je cite ici le mémoire de « La Réole » par Gauban, au XI' siècle,

Page 81: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

furent régies pardes eonstclulus et des consccls'. Les Basquesde leur côté n'oubliaient jamais que leur race était de beaucou pplus ancienne dans le pays que celle des Goths et des Francs

ou même des Romains.La configuration géographique du pays donnait aussi nais-

sance à des libertés d'une autre espèce. Il est presque unenécessité aux habitants des plaines dans les pays chauds deconduire leurs troupeaux dans les hautes montagnes pendantl'été. C'est aussi une nécessité de pouvoir défendre les trou-peaux et pendant le trajet et dans la montagne même. Lesbergers furent donc contraints par une nécessité impérieusede porter des armes, et pour leur propre défense et pour celledeleurs troupeaux. Il leur fallait visiter en paix tous les ansles mêmes endroits et y trouver ou y conquérir la paix et lasécurité'. D'ici viennent les privilèges accordés aux bergerset aux habitants des vallées supérieures des libertés quidatent de bien loin. Il est fait mention, si nous ne nous trom-pons pas, dans les auteurs classiques, des bergers de Ber-

gamo dans la haute Italie, qui amènent leurs troupeaux tousles ans pendant l'été dans la haute Engadine. Les privilègesde la vallée d'Aspe tels que nous les avons furent écrits aucommencement du XIVe siècle pour remplacer des docu-ments qui avaient été brûlés dans l'incendie de l'églisti deSaint-Jean-de-Laché et qui dataient de bien plus loin

1. A Lectoure, 1473. « Consules Leotorenses, pro nobiset successo-ribus nostris in consulatu. » Delpit,101, à Bergerac. La « charte de 1322parle de l'ancienneté dc son consulat » (B~~r~ei·acsous les ~ln~lais,par Émile Labroue, Sauv etèrre, 1879, p. 2). A Monségur « sont esleus

quatre consuls par les consuls de l'année précédente,appelezauecqueseulx les consulz des deutz aultres années précédentes, etc. ». Pnici-t<~ges ~le Monsé~un, par J.-li. Archu, Sauveterre, 1876, p. 2.

2. Les habitants de la vallée d'Aspe ont droit de chasse et portd'armes. « Ont droit d'entretenirles maisons de Portalet et de S.-Ju-liau pour l'usage de ladite vallée et service de Sa Majesté. »

3, « Ont droit pendant l'été d'entretenir des cor.ps de garde aux

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Beaucoup de documents constatant des privilèges des habi-tauts des Pyrénées dans leur anachronisme naïf, citent Char-lemagne comme leur auteur, ce qui veut dire seulementqu'ilsétaient d'une avtiquité immémoriale. De petits traités commecelui de la Pierre de Saint-Martin, près de Sainte-Engrace,montrent que les bergers de chaque c8tc~ des Pyrénées savaienttrès bien conserver ces privilèges d'eux-mômes, sans avoirrecours aux souverains de France ou d'Espagne t. Les for.>oufitei-os comme nous les possédons, écrits, sont promul-gués, vêtus, sous des formes de la législation féodale. Quantà la forme, ce sont des chartes, des privilèges octroyés p1r unseigneur quelconque. Au fond, ils ne sont souvent que lacopie des droits et des libertés bien antérieurs quelquefoismême, ce sont plutôt des conditions imposées au seigneurque des privilèges accordés pour la première fois par le sei-gneur à ses vassaux.

Nous en avons la preuve des deux côtés des Pyrénées en cefait que, dans plusieurs de ces transactions entre le seigneur

etles habitants, le seigneur est toujours obligédejurer d'abordde respecter les privilèges tes coutumes ou les fors ou fuerosdu pays avant de pouvoir entrerdans ses fonctions de seigneur.Les habitants ne lui devaient aucune fidélité ni aucun ser-vice, avantqu'il n'eût juré de maintenir leurs libertés. Ainsi,le seigneur de la vallée d'Aspe fut contraint de jurer auruisseau du Puy d'observer toutes les libertés de la vallée

avant d'y pénétrer. Dans les fueros generales des Basques,toutes les affaires du pays furent discutées, tous les griefs

frontières et aux ports pour empêoher les incursions des Espagnolset de n'être point obligé de laisser,50rLir la compagnie de ladite valléequ'à toute extrémité. » Lous Pri~iledges, etc. Pau, 1694.

1. Fueros d'Aran. Valle de los Pirineos, 1309 A. 1)., donnent le pou-voit' de faire la paix: ou la guerre avec leurs voisins sans le roi. Co-leccion de Fuenos y cartas pueblos de Espana poi· la Real Acaclemiade la Historia. Madrid, 1852.

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entendus et satisfaits avant qu'aucun message ou proposition

ou vote du seigneur pût être mis aux voix; et si quelque sub-vention lui fut accordée, c'était toujours la dernière proposi-tion votée, et gratuitement et de pur don. Le mss. Wolfen-buttel, que nous citons si souvent, nous a conservé dr~s faitsanalogues en Gascogne,. même postérieurs au gouvernementde Simon de Montfort: Les habitants de Sainte-Eulalie d'Am-barès « ne jurent fidélité à leur prévôt que lorsque celui-cileur a d'abord fait serment f ». A Bourg, en date 22 mars 1273.

« Lorsque le roi vient la première fois en Gascogne, il jure,

ou fait jurer par son sénéchal, de défendre la ville envers etcontre tous, de la préserver de toute injure et de garder sesfors et coutumes. En retour, les habitants lui prêtent sermentde fidélité 3. » A Issigeac, en 1268, nous avons ce fait constatédans les termes les plus remarquables « Sachent tous pré-sents et à venir, que les prud'hommes et membres de lacom-mune d'Issigeac, de leur propre et libre volonté, sans y êtrecontraints par fraude, par ruse ou par violence, mais suivantle droit et la vérité, reconnaissentet accordent à l'honorableet noble seigneur Édouard, fils aîné et héritier du noble roid'Angleterre, que de toute ancienneté, il a le droit à la foi età l'hommage de tous les habitants de la ville d'Issigeac, sanstoutefois la seigneurie et les droits du doyen et de l'église dumême lieu. Cet hommage doit être rendu de la mani~ru sui-vante: Quand le seigneur-roi ou ses lieutenants du duché deGuyenne requièrent les habitants de prêter leur serment, ildoit d'abord jurer de les défendre envers et contre tous, de

1. Delpit, 1~'olfeubuttel mss., p. 56.2. Ibid. v Dum dominus rex venit primo in Vasconia, juratur ab

eo, dum est sistens et coram senescallo suo, vel a seuescallo sùo, dumipse non. est praesens, qui pro tempore veniet, quod villam et jus cus-todiet et defendet et de se et de alio ab omni injuria, et quod ser-vabit foros et consuetudiues suas. No~ juramus ei et senescallo fideli-tatem.. » V. aussi pp: 73-73.

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mainteniretd'améliorerleursbonnescoutumeset desupprimerles mauvaises. Àprès quoi, les prud'hontmes lui jureront, »

etc.' Leur terme de service militaire fut aussi rigoureusementétabli quant à la durée, et quant à l'endroit. Le roi ne peutexiger d'autres redevances de la commune sans le consente-ment des prud'hommes. Mais le plus remarquable peut.être de tous les documents anciens et d6nt le langage est d'unerude fierté, est l'article 11 des anciennesCoutumes de Bayonne,1273: « Abans fon pobles que seinhor, et que los menutz poblesvolen vive de bona vite que eren trop meis que los autres, fenseinhor per contrestar et abate los fortz fazedors, et por farestar cascun plan dreyturi miausan, per que cadun podosviuer ab so que sa so es essauer los praubes ab lors paubre-

1. Delpit, Wolfenbuttel mss., 82-83. « Coneguda causa sia alspresents et als avendoris qui cesta presenta carta vieron et aviroti,que tuch li probome et 10 cominals de Yssijat et sengle del comitial,tuch et cadans per lor propria et agradable voluutat, non enduch perfrau, ni per bauzia, ni per degun costregnament, mas enseguen veritatdrechura, reconoisson et autreion à l'ondrat et noble senhor N. Au-doart, primer engendi-at et heriter del noble rei d'Augleterra,que il haper antiquitat, en la vila d'Eyssijat, sagrement de feutat et de feude.-meut et de totz homes, salvat et recongut la seighoria et la dreichuradel dega et del mostier del dict loc, et dedentz et deCorfl, en aitalmanieira que'1 seinhor reis avant dichzeti sa volentat et ses locstenentzel dUg'.1t de Aguiana caut requerra et questo sagrement ni 10 voldrataver dels avan-dichz prohomes en cominal, el ho lenentz son loc cumsobradiches, deu jurar à lor premeirament qu'ils los defendra de si etd'autrui do, tot dorauage, et las booas costumas que il ont et que ilauront lor gardet et lor amelhoret, à bona fe, à l'esgartde sa corlot deldega et del avandieh cominal et que las males lor oste et lor tholhade tot. Et en aprés, li-prohome deven li far 10 sagrament sobredich,que'l garderon son corps et sas gentz qui par lui esseron et sas drei-turas de tort et de forla, dedentz et defora, à lor poder, salvada etretenguda, totavia, et per tots locs, la sengnoria et la drethura deldegan êt del mostier sobredich, etc., etc. »

« El avautaichsenhor. ni home per lui, no lor pot demandar ni dcudeguna autra causa de drethúrage lnais aisso que sobradiches, si nonper lor voluntat. »

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tatz et los aricxs ab lors ariquesses et adaquero far et con-thinuar pcrpetuamentz a totz temps, los pobles se someten aseinhor e~ len den so que ed sa et edz sartiencon so que edz

san. En testimoniadge de le quoau cause le seinhor deuprumer jurar a son poble que 10 poble no fey a luys; et portetant 10 darder segrement que 10 poble fey au seinhor, que si10 seinhor qui fey 10 prumer segrement passe son segrementau poble, ja 10 poble no sera a luys tingut de segrement, perso quar assi 10 seinhor comet faucetat contre son poble (et no)

son poble contre luys1. » De l'autre côté des Pyrénées, leserment, si discuté des Aragonais à leur roi, est conçu dansdes termes encore plus énergiques, mais dont la portée ne va

pas plus loin 1. Plusieurs des fueros du Nord de l'Espagne

1. Balasqtie et Dulaurens, II, 595-6.PI'esque au même effet, et à peu près et la même époque, écrit Gil

de Zamora dans son « Liber de preconiis HispaDie »

« Constat siquidem quod eandem fidem debet dominus subdito, etmajorem quam subditus domino; sed si subditus ùomil1um suum ca-peret, vel eidem aliquid mali faceret, absque dubio proditor esset; itaet si dominus subditum iniustecapiat vel ab eo aliquid iniuste exhigatproculdulJio 'crimel1 prodicionis inourrit Maior est perdicio in domes-ticos quam in extraueos; in amicosquam in inimicos. Igitur cum sub-diti sint humiles amici, secundum Sapientem, maiorem prodicionemiDourrit qui in- eos exercet tirampnidemquam in alios. Domitiiquidemtemporales fidelitatem debebant pauperibus, eciam atitea quam eishomagium facerent, cum sint eorum proxinii et christianitatis fibulaconjuncti. Igitur cum fidelitas per homagium duplicetur, prodicioniscrimeu magis incurrunt domini, si ledunt vasallos suos post factumliomagium quos teueuturdefendere ac fovere, quam aute homagiumsibi factum.

» Reddatit igitur domini vassallis ea ad quem de foro et de jure etde regni consuetudine obligantnr, et.vassalli similiter reddant eis vec-tigalia et tributa, et alia que juxtt regni approbatam consuetudinempostulantur, etc. »

l3oleti. de la Real Acadeniia de la Historia, tomo V, p. nO-l71,Madrid, 1S8!.

2. Voyez: Discursos léidos en la recepcion pqblica deI excmo seiiorD. ADtODio Romero Ortiz. Janvier, 30, 1881. Madrid, 1881.

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constatent le même fait viz, et que les libertés accordéesfurentbien antérieures à la rédaction du document écrit. E. g., les

« fueros'de'l Valle de Aril.l1» 1309, comme ceux du Valled'Aspe citent « las leyes primitivas de este valle 1 ». On ytrouve « la costumbre antigua sobre la composicion à dinerodeJos homicidios y heridas 1 ». Les habitants de Deva enGuipuzooa -prétendent qu'ils viventet se gouvernent entre euxdans cette ville et dans les environs, quant aux personnesaussi bien ,que quant aux biens. A Lerida, les sources desfueros de 1228 sont « de instrumentis privilegiis et de dona-tionibus regiis, necnon de bannis, cotis, et statutis scriptis.

et non scriptis, et moribus et usaticis, etiam legibus goticiset romanis 1 ». Nous pourrons citer aussi de même les Fueros

de Medinaceli (Soria), 1124; ceux de Najera, 990; de Palen-zuela ( Palencia),1074,et d'autres~ Dans tous ces cas, commele remarquent très bien MM. Delpit, en parlant des hommeslibres du Bordelais o ici les formules féodales recouvrent uneorganisation plus ancienne. etc'est, selon nous, une différencede plus à noter entre le Nord et le Midi-de la France l, )) et onpourrait bien ajouter de toute la région pyrénéenne des deuxcôtés.

Il est.aussi évident.que les libertés municipales de cetteépoque dataient du temps l'ancien Empire romain. Pour neciter qu'un auteur, le Compendio razonado de Historiageneral, por D. Fernando de Castro, tomo III, p. 2623,l'auteur dit « La municipalité romaine conservée par leclergé et transmise de bonne heure au peuple avec des amé-liorations notables, commençait à faire de nos populationsdes quasi-républiques, sÎ'Jortes et si puissantes, qu'elles em-pêchaient en Espagne le développementen toute son étendu.e

1. Coleccion de Fueros y Carta3 .Puefilos tlp Espaiux por la RealAcadeinia de la Hisloria. Catalogo sub vocibus. Madrid, 1852.

DelpU, WoUenbuLtelmss., 55:

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du régime féodal' » Ces privilèges municipaux unis à"ceux

du clergé se sont maintenus en pleine vigueur beaucoup pluslongtemps au sud de la France que d,ansrEspagne, où laplupart des grandes villes furent déjà soumises aux Mauresdepuis'le V'IIIe siècle. La croisade -contre les Albigeois -futréellement presque autant une guerre de race que l'anta~o-nisme dé systèmes politiques irréconèiliablesou qu'une guerrede religion. Ce fut uné lutte du Nord teutonique contre leSud romain' de la France le dernier effort des « municipia »

et des citoyens libres de Se maintenir contre le féodalisme duNord contre les droits exagérés qui s'attachaient sous laféodalité à la possessiori du sol. Nous avons vu quequelquestràditions municipales survécurent à cette grande lutte~ Elles

rie furent pas toutes écrasées. Le nom du consul était. con-servé, les citoyens se vantaient de' leur .généaJogieromaine.Dans les campagnes et les.villes de Gascogne, surtoutautourde Bordeaux, il y avait, cb~p1edisent MM. Delpit, un restede l'ancienne populàtion romaine qui s'était maintenue libredans les campagnes et dàné quelques villes du Midi'. Ce

n'est pas une contradiction à ce fait que quelques-uns de ceshomme$ libres dans leur ignorance naïve font remonter l'ori-gine de leurs privilèges, à Charlemagne, comme les hommesde l'Entre-Deux-Mers, en 123â1, .'remontent leurs libertés à

i. o )~,1 muoicipio romano conservado por el clero y trasmitido tem-pranamente al puéblo con notables mejoras, comenzÓ baoer denuestr8s poblaoiones unas como republicas tam fuertes y poderosas,que impedieron en Espairia el desarroll0 en toda su extension del regi-meD 'feüd~l. » V. aussi Brissaud, p. 96. « Ou peut voir en eux (lemaire et les jurats de Bordeaux) les.vrais successeurs des delensorcades munioipes romains, cette magistrature d'indulgence et de charitéqu'avaient fait naUre au IV- siècle les excès du despotisme impérial.uLes Anglaia en (3ui/ennc, p. 96-91. Cf. Jackson's Dalmat%a, the Quar-nero and Istria, 3 vol. iu-8, vol. Il, Oxford,1887, vol. l, p. 15, 16, 19,116; vol. Il, 91-93. Guizot, Hist. civ. Jran~ liv. XVII.

2. Delpit, mss. Wolfenbu&tel, p. 55.

6

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~'époque où le roi Charleschassa les Sarrasins 1 », ou commeles citoyens de Bordeaux disaient, 20 mars. 1273 « Notrecité a observé ces usages depuis la première origine, et mêmedu temps des Sarrasins, à ce que nous croyons". »

Un grand argument pour notre thème se trouve dans lefait que les, terres appartenant aux villes anciennes furenttoutes allodiales et libres. « Ils ne doivent rien au roi ni à

personne qui vive 3, disent quelques allodiales de Bordeaux.'l~'ulle terre sans seigneurne fut pas du toutt la,règle dans lesprovinces du Midi.. « Ces provinces bC4:1.ucoup plus romaines

que celles du Nord,. conservèrent plus longtemps les tracesde l'ancienne civilisation, et.la persistance du droit romain-dans le Midi de la France n'a pas eu besoin d'être prouvée 5. »

« Dans les villes anciennes: dans les cités, la propriét~ allo-diale est la règle, tandis'que dans les villes nouvelles, dansles communes, c'est la propriété féodale 6..».Qant aux élections des bourgeois aux plus hautes cours

pour y traiter les affaires les plus importantes, nous avonsvu que Simon. les favorisa toujours, qu'il obligea les plusgrands seigneurs de comparaitre devant eux. En ceci, il nefaisait que suivre. l'exemple de son père- qui, au sommet du

1. Delpit, mss. WolfenbùtleJ, p. 50.2. Ibid., p. 41.3. Ibid., p. 43, note « Teuent in allodium liberum sub dominio

regis, ita. quod nlbil debeut iude facere sibi nec alicui alii viventi. ».4. Cf. Ensayo ~oLre lu Historia rlel Dereclio de Propiedad, porG. de

Azcarate, il. p. 93. Nladrid, 1880. Il La propiedad se deseDvolvi6 enJas unas con tan distiuto caracter que en las otras, que se llamÓ a lasdet Norte paises no alodiales y a las mediodias alodiales. Fué unprincipio que al ftnl'oncluyÓ por predominar en el Norte la famosa:Nulle terre sans.aei~neur, asi como en las del mediodia ala inversa,se. ,dijo No Izay seîznr sin titulo; maximas cuyo opuesto sentido estaaccusando bien clarametite la distinta coudicion de unas y otrascomarcas.. ))

5. Delpit, mss. \Volfenbutlel, p. 37..6. Ibid., p. 39. Voyez aussi Brissaud, p. 21..

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pouvoir, avait tenu un parlement à Pamiers en 1212, oùsiégeaient non seulement le clergé, les nobles, mais aussi desbourgeois 1. Cette ingérencedes bourgeois dans les plus hautesaffaires politiques ne fut pas rare dans la région pyrénéenneet dans, la Castille. Il suffit de citer les Cortès de Léon sousAlfonse IX, 1188: ,lIes décrets que le seigneur Alfonse, roide Léon et de Galicia, fit dans la cour de Léon avec l'arche-véque de Compostelle et avec tous les évêques, grands etcitoyens élus de son royaume. A Benevente, en 1202,furent. les évêques, mes vassaux, et plusieurs de chaquevillede mon royaume en pleine curie 3. En 1208, à Léon, se sontassis ,avec le roi, les évêques et les nobles, une multitude decitoyens envoyés par les villes'. En 1258, à Valladolid, lesarchevêques et les é,'êques, les ricos hombres des villes deCastille, et d'Extremadura et de la terre de Léon, assistèrent

avec le roi'. » Mais la première assemblée, la plus ancienned'un caractère purement législatif, composée des laiquesseulement, convoquée dans toute la Péninsule,fut celle réuniedans la ville de Barcelone en 1064; Elle fut cc5nvoquée parRaymond Bérenger le Vieux et la comtesse Almoyde, safemme, pour approuveret pour la promulgation des célèbresUsalici ou Usages de Barcelone, avec l'approbation et le

1. Pauli, p.~233.2. Cortes de los A nti~~uos Rcino3 de Leon f~ de Castilla. Icatroduc-

cion por Dou Manuel' Coliiieiro. Parte primera, pp. 18 et 142. Riva-deneyra, Madrid, 1883.

Cortes de los Anti~uos Reinos de Leon y de Castilla. Introduccionpor Don Manuel Colmeiro. Parte primera. Vol. l, p. 142, fol. Madrid,1883.

3. Cortes de los Antiguos Reinos de Leon y de CastillapuGlicadaspor la Real Academia de la Historia. Tomo primero; Rivadeneyra,Madrid, 1861, p. 43.

4. 46, 47, 49.5. 54, 55.

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conseil de ses prud'hommes Nous avons ensuite les Cortèsde Barcelonede 1192, « avec les hommes des villes et desprud'hommes et le peuple de tout le royaume 1 ». Le mêmefait se répète à Barcelone et à Lérida en 1214, à Villafranca

en 1218, à Tortosa en 1225, à Barcelone en 1228 et en 12513.Dans ces dernières Cortès les députés des villes mettent leurssignatures aux actes des Cortès après celles des nobles'. EnNavarre, quoique les Cortès ne furent convoquées d'une ma-nière régulière que plus tard, nous savons qu'aux réunionsextraordinaires de 1094 et de 1134 des représentants des villesassistèrent ensemble avec la noblesse'. Tous ces faits, au

moins dans léur sens général, doiventêtreconnus de Simon'deMontfort.

Il. est bien avéré qu'aux Juntas, Bilzaars, Cortes desBasques, tant que les 'provinces séparément, et dans l'assem-blée généralede toutes les provinces à Guernica, les bourgeoisassistèrent également avec les nobles que pour les fonctionsadministratives et politiques, tout Basque fut noble et pou-vait être élu à n'importe quelle fonction. Dans la valléed'Aspeoù les privilèges ont tant de ressemblance avec les fue-

ros basques, les habitants n'avaient pas seulement le ccdroit

de faire des deputez pour veiller avec les jurats aux affairesdes communautés ». Mais aussi ils « ont droit d'envoyerdeux deputez aux États ». Le souvenir des anciens,parlementsde la vallée est là encore vivant. On m'a montré l'endioit

1. Cortes dè los Antiguos Reinos de Ara~ôn y de Valencia i/ Prin-cipado de Cataluna, publicadas por la Real Academia da la Hiato-ria. Tomo l, primera parte (1064 al 1327). Madrid,1896. Prologo,

p. x~et~ 10.2. 68.3.'9()", 91, 102, 112, 137.4. 101, lil,119.5. Hi.qtoria dc Espana I/ de la Cioili3ac.iônEspaizola, por Rafael

Altamira y Crevea, tomo J, p. 481; Juan Gili, Barcelona, 1900.

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même de l'assemblée « lou Tilhabet » ou bosquet de Tilleuls,où il ne reste plus à présent un seul arbre. J'ai été aussi heu-

reux de voir au village d'Osse l'exemplaire même annoté de

sa main, des privilèges qui appartenaient au dernier juratd'Accous, avant la Révolution, Dominique Manandez,et quiconstate la pleine jouissance des libertés jusqu'en 1789 de« cette vallée qui fut anciennement une petite républiqueindépendante de toute suzeraineté t.

Il y a aussi un autre lien entre Simon de Montfort et leslibertés anciennes du sud de l'Europe. En 1238, l'annéemême de son mariage, il visita son beau-frère, Frédéric II,empereur d'Allemagne, en Sicile. Il y avait en Sicile à cetteépoque un parlement qui s'assemblait deux fois par an, marset août, dans lequel tous les États du royaume étaient repré-sentés. Non seulement les barons et les évêques y assistaient,mais aussi quatre députés des grandes villes, deux de cha-cune des petites y trouvaient place, Il est impossible de direpour combien fut l'exemple de son beau-frère dans les ré-formes postérieures de Simon de Montfort en Angleterre.

Il n'est pas nécessaire, je crois, d'insister ici sur les modestres divers de' fàil'e' des élections dans ces différents pays.L'élection secondairey jouait le plus grand rôle; mais il n'ya guère de mode d'élection depuis le suffrage universel jus-

1. « Arrest rendu sur la vériOéation du dénombrement des Droits,Biens; Privilègeset Libertés de la vallée d'Aspe, 28 septembre1693.

2. Milman Hi~tory of Latin Chr·istianity. Vol. VI, pp. 154-5. Lon-don, 1867. Cl'eightou, Life of Simon cle Mont1'or·t, p. 30. London, 1877.

Rdles Gascona. Vol. l, p. 210. ~590, p. Fr. Michel, 1885..Mandatum est omnibus baronibus et militibus quorum nomina

prescripta sunt, quod sint apud Eiurdegalam die Lune proxima pO!ltfeslum sancti Jacobi Apostoli ad tractandum cum Rege de negociisque Rex eis exponet. F. R. Apud Burdegalam, XV die Julii (1243).

Et mandatum est majori Baione quod, una cum ilijor probis homi-nibus ejusdem civitatis, sit ibidem eodem die. T. ut supra.

Eodem modo scribitur majori de Regula, Vasate.

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qu'à l'élection secondaire la plus' restreinte, ainsi que la no-mination par un seul individu qui n'ait été mise en pratiqueparmi les populations pyrénéennes, et surtout parmi lesBasques espagnols'. Nous en avons dès exemplesaussi dansles divers arbitrages, traités de paix, cours, etc., faits et tenuspar Simon de Montfort pendant son gouvernement en Gas-

cogne.Enfin, vous pouvez me demander quelle est la portée de

tout ceci'! 'Pourquoi vous ai-je fat,igné de tant de détailsennuyeux '? J'ai bien besoin, je l'avoue franchement, de toutela bienveillante indulgence que j'ai toujours trouvée parmi

vous. Le grand fait historique que je voudrais faire ressortirde cette étude est celui-ci la liberté constitutionnelle, laliberté qui respecte les droits d'autrui, tout autant qu'elle ré-clame ses propres droits pour elle-même. Cette libertén'est pas, comme on prétend trop souvent en Angleterre et

en A1lemagne, l'apanage exclusif des races teutoniques, et

que les races latines en sont incapables. Au contraire, les

races latines comme on les appelle très à tort; les races cel-tiques, basquesetautres, jouissaientde ces droits avant qu'ilsne fussent introduits parmi les Anglais et les Allemands.Nous avons vu que la haine et la distinction des couchessociales n'existaient guère dans le Midi, que les bourgeois etles classes moyennes furent toujours représentés dans toutesles cortès, juntas, assemblées,cours de toute la région. Ellesfurent longtemps gardées intactes, conservées même jusqu'ànos'jours dans quelques-unes des provinces du nord de l'Es-

1. Voyez la longue liste dans l'Historia cle la le~islaeion cleEs~air.ic par le marquis de Moiitesa y Cayetano Manriqne. Fuero deNavarra, Vizcayn, Guipuzcoa y Alava. Madrid, 1868. Pour l'Alava seul,pp.519-522 et passim. Aussi Diccionario Geograf eo-Historico cleERpana, por la Real Academia de la Historia. Secciou I. Navarra,Vizcaya, Alava y Guipuzcoa, II tomos. Madrid, 1802, passim.

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pagne. Les habitants de la vallée d'Aspe jusqu'à la Révolu~'tion, et les Basques jusqu'à nos jours, sous la forme d'unemonarchie, ont maintenu toutes les franchises et libertésd'une vraie République. Tout y était fait par' le peuple" et

pour le peuple, par tous et pour tous, non pou.r l'avantagedes classes supérieures seules. Il n'y avait certainementaucune région en Europe qui fût mieux administrée que lesprovinces basques. C'est le témoignage unanime de tout~

voyageur de n'importe quelle nation.Et qu'est-ce qui empéchait le développement et la con-

servation de ces libertés da.ns tout le Midi de la France?C'était, comme le disent très bien MM. Delpit, les racesgermaniqt\es du Nord qui ont détruit les libertés du Midi dela France. Et pour l'Angleterre, ce mémoire si court et siinsuffisant indique quelque chose qui lui soit propre, c'estque l'étranger Simon de Montfort, qui introduisait là la re-présentation parlementaire des bourgeois l'avait apprise, etl'avait connue d'abord en la pratiquant dans son gouverne-ment de Guyenne, en suivant les anciens fueros, coutumeset libertés du pays.

.Un écrivain espagnol, Don Narciso Pagés, dans la Reaisiacontemporanea, août 1882, a démontré que le régime muni-cipal romain en Espagne fut beaucoup 'plus libre qu'onne le croyait. Un écrivain anglais, M. G. F. Stokes, dansun article intitulé Home rule under the Roman Empire(le Gouvernement chez soi soqs l'Empire romain), a montréle même fait dans les provinces de l'Asie-Mineure. Il s'ex-prime ainsi « Est-ce une suggestion trop hasardée de de-mander si cés corps législatifs n'ont pas exercé une influenceimportante sur l'origine et le développement de nos parle-ments modernes 1 ? » Quoique je n'aie lu cet article que

1. Macmillana Maga~ino. November 1882. Home rule utider theRoman Empire by G. F. Stokes, p. 58.

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depuis la rédaction de ce mémoire,on peut le prendre commeune réponse ou au moins une réponse partielle à la demandede M. Stokes. M. Guizot, je crois, a prouvé que depuis lerescript de l'empereur Honorius, 418, ces libertés furenttoujours conservées parmi les grandes villes de l'ancie~neprovince, et les rapports de Simon de Montfort et son pèreavec ces villes et communes peuvent bien être le point decontact avec eux et la représentation des bourgeois dans leParlement anglais.

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QUELQUES NOTES ARCHÉOLOGIQUESSUR LES àâ(EURS ET LES INSTITUTIONS

DE LA RÉGION PYRÉNÉENNE'

Les études d'archéologie sont un des plus attrayants sujetsauxquels on puisse s'adonner. L'archéologie touche à desintérêts si variés, elle s'adresse à des goûts si divers, elle ades rapports avec tant de sciences Dans sa forme la plusancienne, l'archéologie préhistorique intéresse le géologueet le paléontologiste. Elle a des attraits pourles artistes danspresque tous les genres. Ils peuvent y deviner les commence-ments ety suivre les évolutions successives de leur art favori,depuis les esquisses gravées sur des fragments d'os ou depierre, par l'homme préhistorique, jusqu'aux superbes créa-tions de la Grèce antique et de la Renaissance italienne.L'architecte et l'ingénieur lui demandent -de leur expliquercommentles hommesd'autrefois, avec des outils si imparfaits,

avec si peu d'appareils mécaniques, avaient pu élever. etmettre en place les pierres énormes des dolmens et descromlechs. Comment a-t-on pu arriver à orienter avec tantd'exactitude les pyramides d'É~ypte, dessiner d'abord et à

exécuter ensuite, les proportions si précises et si délicatesqu'on observe sur les monumentsde l'Égypte, de fAssyrie et

1. Bulletin de la Société des sciences et arts de Bayonne, 1884,p.U7.. The Scoias Anglican Maga~ine. April et may 1886.

En espagnol dans le Bolotin de la losûtuoion libre de Enseiianza,Madrid.

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de l'Inde ? Le collectionneurde légendes, de contes, de folk-lore en un mot, est nécessairement archéologue. L'archéo-logie est reconnue à présent comme une des bases deIlistoire. Elle n'est plus seulement un délassement, un amu-semea.\ des curieux l'histoire en a continuellement besoin.On ne peut oomprendre à fond l'histoiredes peuples actuels etde notre siècle même, sans'la connaissance de 1eur.'origine,-de leurs institutions, "de leurs habitudes dans le passé, quel'archéologie seule peut enseigner. C'est'comme une contri-bution, quelque médiocre qu'elle soit, à l'étude de l'histoire,et surtout de l'histoire de nos populations, de nos institutionspyrénéennë~ que je irie permets d'offrir aujourd'hui cesquelques notes un peu décousues, que j'ai pu ramasserçàet lâ, commepar hasard, dans inés voyages et dansineslectures. .I

Le premier points,ur.lequel je voudrais appeler l'attentionde mes lecteurs: est le mode de jouissance de la propriété ter-ritoriale, l'occupation du sol. On trouve encore dans notre.région des traces non équivoques du mode le plus 'an~ie~ depossession et d'exploitation du sol,' ~elui de la communautéet du partage périodique par, sort entre tous les chefs de fa-mille. Dans quelques cantons du Nord de l'Espagne, le solest encore ainsi partagé. Les terrains de labour-y sont encore.considérés comme appartenant à la tribu ou à la commu-nauté~ et nullement comme possessions particulières descultivateurs. Dans le Sayago, une contrée du N.-E. de laprovince de Zamora, les chefs de famille (vecinos) ont encoreun droit collectif sur les terrains municipauxqui sont répartistous les ans par'le sort entre les habitants1. M. Gumersindo1.

1. Fernandez Duro, dans la Reoiata Contemponanea, t.,XXV,

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de Azcarate trouve les mêmes usages* dans le Riaito, pro-vince de Léon!. « La communauté primitive se conserve engrande partie dans un village (pueblo) de la.provincede Léon,Llanabés (municipalité de Rosa de Htiergano, canton judi-ciaire de Riaiio). D'après des notes que nous devons à l'ama-bilité de M. Aramburu, avocat distingué du pays, cette'popu=lation possède des terrains dont le profit est commûn;quoiqu'ils soient soumisàla législationordinaire. Les prairiesnaturellesy sont propriétésparticulières,etpeuvents'acquériret se vendre selon le droit civil mais les terrains de labour

se trouvent divisés, depuis un temps immémorial, en uncertain nombre de lots, qui se répartissent tous les dix ans,selon qu'augmente ou diminue le nombre des chefs de famille(ve~cinos). Ceux-ci les, partagent pàr le sort, entre eux~ etchacun prend la jouissance du lot qûi lui est échu. Si l'und'eux meurt pendant ces dix ans, un nouveau chef de famille,s'il y en a, reçoit son lot, et s'il n'y a pas de nouveau chef, saveuve lui succède;s'il ya et veuve et nouveau chef defainille,ils le partagent également. Les fils du défunt ne jouissent

qu'à défaut de la, veuve et d'un nouveau chef de famille, et~eulement jusqu'à l'époque d'un nouveau lotissement. Leterrain qui se cultive ainsi est de peu d'étendue et ne donnequ'environ trois,faneyas' à chaque chef de :famille. Tout yest réglé selon ce qu'on appelle leurs ordonnances (sus orde-

nanzas), et il n'apas été faitautrement de temps immémorial.)M. de Azcarate a trouvé un autre témoignage en faveur de

ces faits dans la Biographie (encore inéd~itéj de Dori Juan

4, février, 29, 1880, et dans le, Boletin de la Sociedad Geog~a~ca de

Madrid, vol. VIII, 4 avril 1880. Cette descriptio~de M. FernandezDuroest empruDtée' de l'auteur grec Diodtirus Siculus, V, 3~, 3.

1. « Ensayo sobre la historia del Derecho de Propiedad, y su estadoactual en Europa.» Vol. 111, p. 180. Note (Madrid, 1833).

2. « Los cinco sueldos » de los FU6rosde Navarre, et la vézindad.I,ib, III. T. XX, c. 1.

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Antonio Possé, curé de Llanabés en 1796'. Le curé Possé futenchanté de ses paroissiens et de leurs institutions. Il leuren fait les plus grands éloges. Aux détails racontés ci-dessusil ajoute que deux charrettes d'herbe furent distribuées àchaque habitant;.que le médecin, les bergers, le maréchal-ferrant, le pharmacien, les bulles, les cérémonies de )' Église

figuraient pour ainsi dire sur le budget de la communauté.Le sel, le blé et l'excédent des produits individuels (10 so-brante de propios) étaient partagés également entre tous, avecla plus grande exactitude. La prison communale était main-tenue en bon état, mais le curé n'y avait jamais vu entrerpersonne. Il n'y avait pas de différence appréciable entre laculture des terres communes distribuées, par le sort, et cellesdes prairies, ou des autres terres appartenant à des parti-culiers. Les premières étaient même mieux cultivées que lesterres des grands propriétaires voisins. En somme, le témoi-

gnage du curé est très favorable à l'excellence de ce régime

communal'.Dans la vallée de Trevejo (Cacéres) sur la frontière de

Portugal, il y a des villages où les habitants possèdent encommun une certaine quantité de terrain labourable, lequelest divisé en trois feuilles (hojas) destinées en successionl'une pour la culture., l'autre pour le pâturage,et la troisièmereste en friche. Tous les ans, les feuilles de culture et cellesqui sont en friche sont divisées en autant de parcelles qu'il ya de laboureur3 dans chaque village, et ils les 'tirent au sort,et ,chaque individu cultive la parcelle qui lui est échue parle sort'.

1. Boletin de la ln.etitucion libre de En.senacnxa,p.247, août, 3"1.1883..2. On trouve un régime analogue encore en pratique dans le nord

de l'Écosse' (Voyez le rapport de la Crotters Commission).3. De~Paho Municipal consuetudinarioen Eapana, varios articulos

par D. Joaquin Costa y otros, p. 12Õ.' Imprenta de la Recista daLegialacion, Madrid, 1885.

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Dans certains districts de la haute région (la 1l10ntaiia) de

las Asturias la culture de la terre est entièrement subor-donnée à l'élevage du bétail. Dans ce but, tous les pâturagessont en commun, et tous les règlements à son profit. Maisdans beaucoup de villages les voisins ont permission de cul-tiver une certaine portion des terres'pour trois ou quatre ans,afin que ces terres soient encore améliorées pour la pâtureaprès. Ces terrains sont distribués parmi les voisins pourun temps encore plus bref dans d'autres endroits. En CangasdeTineo, ces morceaux de terre (varas) se divisent en autantde portions qu'il y a de voisins à l'époque de la distribution.Lès voisins qui ne peuvent pas cultiver eux-mêmes leurportion la louent aux autres. De cette manière, ces.terrains

communaux tendent à devenir la propriété des indi~idust..Le régime communal des pâturages appartenant à la pa-

roisse ou à la communesubsiste encore dans maints endroitsdes Pyrénées. En voici une description, extraite d'un cha.pitre des « Coutumes générales, gardées et observées enpais eL bailliage de Labourd, et ressort d'icelui! ».

L'article le~ est ainsi formulé

« Des terres communes, herbages et pâturages, et dom-

mages donnés és héritages.

1

» En la terre de Labourt, chacune Parroisse a et posséde

ses terres communes et voisines, entre tous les Parroissiensd'icelle Parroisse par indivis, distinctes et séparées des autresParroisses, comme appert par bornes et limites.

1. 4ereaho Municipal consuetudinario en Espaiia, varios articulaspor D. Joaquin Costa y otros, pp. 17, 18. Imprenta de la Reoista deLegislacion, Madrid, 1885. `

6. A Bordeaux, chez Guillaume Bondé-Bob, 1714, p. 5, et les Cou-tumes ~énérales, c~arcldes et obsereées au Païs et Bailliage de.Labourtet Resâort d'icelui. A Bordeaux, chez J.-B. Lacornée, M.DCC.LX.

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» Chacun Parroissien, és terres communes de la Parroissed'où il est Parroissien, peut indifféremment tenir et pâturer

son bétail, gros et menu, de quelque qualité et nombre qu'ilsoit, et en tout temps, de jour et de nuit.

IV

» C hacun Parroissien peut prendre des arbres és boi s

communs de la Parroisse, pour sa provision de ligne, debois et fuste, pour bâtir en la Parroisse, et non pour vendre

ne tirer hors de ladite Parroisse. »

Des droits pareils ou analogues existaient dans toute larégion-pyrénéenne. Quelques-uns de ces pâturages étaient lapropriété, non d'une seule paroisse, mais d'une espèce deconfédération ou de république des paroisses de toute une

vallée, comme la république de la vallée d!Aspe', etc. Leurpossession par la communauté ou république de la vallée

ést constatée. par des codes légaux, par les fors ou fuerosdes deux côtés des Pyrénées. Elle est reconnue par la légis-

lation générale des deux royaumes. Ces droits collectifs, oucommunaux, de ces petites républiques ont donné lieu à des

guerres, à des -traités de paix, à des alliances, tout à fait

comme dans les grands États. La faculté de défendre à main

armée leurs pâturages, de faire ces traités, a été souvent re-conue par les rois d'Espagne, par ceux de Béarn et de Na-

varre et par les rois de France. Les Fueros de la vallée deAran (1309 après J.-C.) réservent expressément aux habitantsla faculté de faire la paix avec leurs voisins sans le consente-mentdu roi,. «Les privilèges dela vallée d'Aspe donnaient aux

1, Cf. le livre « Seguense lous Priviledges, etc. » A Pau, chezJérôme Dupaux, 1693. « Anciennement la dite vallée était une petiteRépublique, indépendantede toute souveraineté, etc. »

2. Coleccion cle Fueros y Cartas PucLlas de Espana, por la RealAcadcrrüa de Histonia, Madrid, 1852. Catalogo s~b. voce Aran.

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habitants le droit de défendre leurs pâturages et d'avoir destroupes armées à cet effet'. Le traité entre les gens dela valléede Barétous et ceux de la vallée de Roncal,et le tribut encorepayé par ceux-là à ceux-ci, sont bien connus'. Je ne crois

pas qu'il soit nécessaire d'insisterdavantage sur les faits bienétablis. Je férai remarquer seulement la différence entre cerégime et celui dont nous avons précédemment parlé. Danscelui-là c'étaient.les terrés labourables qui étaient partagées

en lots et distribuées par le sort, à:terme, entre les chefs defamille pendant la durée 'de la concession les lots apparte-.naient à l'individuqui en avait seul l'usufruit. Dans celui-ci,

ce sont les pâturages qui sont absolument communs aucunindividu n'a de droit personnel et exclusif sur aucune portiondu sol pendant un temps quelconque le tout est pour tou-jours commun et.indivis. C'est évidemment là 'un progrès,

une. étape distincte dans l'évolution politique des deux com-munautés. Le premier régime est celui de la tribu lé second

pourra devenir celui d'un petit État, d'une République,

comme on disait si-fièrement'.Outre les régimes où. la propriété est encore à l'état

« tribal n, si ce mot m'est permis, et celui où des terrains

sont conservés en communauté perpétuelle pour le bien

général de tous, nous trouvons encore aujourd'hui dans les.Pyrénées les restes d'un autre régime qui, dans l'ordre chro-.rfologique, se place entre les deux dont nous venons deparler. Je fais allusion à ce qu'on a nommé, en anglais,The Houae .Communitr~, communauté de la maison, ou dela famille. Ici chaque famille forme une espèce de commu-nauté régie par des lois ou.des. pactes spéciaux. La propriété

1. « Seguense lous Priviledges. » Passim.2. Cf. l'étude de M. A. Duboul, La ftec,ue cle3 Basses-Pyrénées et

des Landes,1« année,1883.3. Cf. les régimes analogue-; eucore eu pratique dans le nord de,1'Écosse..

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n'appartient à aucun membre de la famille; mais le chef, oulà conseil de famille, la dirige pour l'utilité de tous, sans yavoir lui-même un* droit absolu et individuel.

On trouve ce régime dans le Der·echo consuetudinariodelAlto Arag~n, un code de mœurs qui a été admirablementdécrit 'par Don Joaqûin Costa, professeur à 1'l nstitucion librede Ensenanza de Madrid 1.

'La base de ce régime est toujours la sanction légale donnée

au pacte de famille standu~n est chart~. Dans de trèslargés limites ce pacte se maintient non seulement contre lesfors ou fueros d'Aragon, mais aussi contre les lois géné-rales de l'Espagne.

Chaque, famille y constitué une communauté gouvernée-

par un chef élu, qui peut être le' père, un frère, une soeur, unoncle, un parent quelconque, ou même un étranger qui s'estjoint à la maison par adoption. Pour constituer une commu-nauté de ce genre, il faut une hereditas aoita, qui doit com-prendre au moins une maison, un champ ou une vigne, un~cour' et un jardin, le tout de cc cinco sueldos n, des barriquespour lé vin, des « tinajas n (jarres) pour l'huile. Tous cesobjets sont regardés comme indivis. Quand le chef de lafamille commence à vieillir, ordinairement il désigne sonsuccesseur parmi ses enfants, s'il y en a, parmi ses parents,ou parmi les enfants adoptifs de la maison. S'il meurt sansl'avoir fait, le conseil de famille, dont les membres sontsouvent nonimés par le contrat original'du. mariage du chefde la maison, se réunissent et choisissent celui ou celle qui,

par ses qualités, leur semble le plus apte à supporter lepoids de l'administration des biens de la communauté 1. En

1. Dereaho conauetudiraar·io del Alto Arapor:, por Joiquiu Costa.Madrid, 1880, tirage de 90 exemplaires. épuisé.

2. Costa, p. 45 « Es paoto que un bijo Ó bija del presente matri-monio, siendo apto an I() flsico y_en la moral, y no desmer60iéndolo

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général, c'est le fils ainé qui est ainsi désigné; ses frères lerespectent et lui obéissent. Les cadets ont le droit de demeurerdans la maison aussi longtemps qu'ils veulent y rester,et qu'ils y travaillent selon leurs forces. S'ils en sortent, ets'engagent ailleurs comme journaliers, s'ils font le com-merce dehors, etc., ils ont néanmoins toujours le droit d'yrentrer. Ils peuvent aussi y économiser leur gain, y formerun peculium à eux, dont l'origine est ordinairement unecertaine somme d'argent, des produits, ou bien un lopin deterre que leur a donné le chef ou le conseil de famille lors-qu'ils sont arrivés à un certain âge. Ce peculium se trouvesouvent fixé d'avance dans le contrat de mariage desparents Si les cadets ou cadettes se marient, ou vont s'éta-blir hors de la maison, ils reçoivent une dot, selon lesconditions de la maison, mais qui ne peut empiéter sur lapropriété foncière de la communauté. Si le produit de leur

por sus circunstancias, baya de ser y sea universal heredero de dichacasa y herencia de N. En el estado que entÓnces se hallare, aquel Ó

aquella que â sus padres juntos Ó al sobreviv iente de ellos pareciesebien elegir y nombrar, con los pactos que tengau par convenientepara si, los demas bijos y la dicha casa y caso de fallecer alllbospadres sin disponer, haran dicha eleccion y nombramiento de here-dero, cou iguales facultades, los parienles consauguinéos mas cer-cano·, dos de cada parte, y el cura que eotÓnces fuere de este lugarde J., juntos todos, ô la major parte de ellos. »

1. Costa, p. 7~ « A los hijos varones desde ahora para cuandollegueu a la edad de doce arios les seiialau la cantidad de cien realespara principio de cabal, cuya cantidad, con 10 que aumentare a sutiempo, les servira de parte a todo de dote segu'n las facultades de lacasa. »

Un autre pacto dit que l'héritier doit « alimentar y sostener â susdos hermanos Ramon y Maria, y eotregar al primero, cuando llegueâ la edad de doce arios, tres fallegas de trigo y otras tres de avenaÓ de cebada, las cuales sembrard en tierra de la casa por espacio dedos aîios, con cuyo trigo y 10 que de este modo se acrecentare empe-zara à bacer cabal, sirviendole de todo Ó parte de dote cuando tomareestado (ailleurs) », « se dard a tada uno (des cadets), una vaca y doscabices de trigo para principio de cabal if, à l'alge de quatorze ans.

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peculium dweou dépasse la dot qui leur est due~.J'excédent.appartient à la maison, et ils n'ont droit à rien réclamer. Ladot même n'est pas tout à fait aliénée; sa valeur est hypo-théquée sur les biens de la maison dans laquelle ils ou ellesvont entrer, et retourne à la communauté originelle si lescadets meurent sans enfants'. Pour éviter tous ces ennuis,ils se marient quelquefois dans la maison, y conservant lesmêmes pri~~iléges qu'auparavant, et les nouveaux épouxdeviennent membres du conseil de famille. Le conseil defamille intervient avec une autorité judiciaire et légale danstous les moments critiques de la vie de la communauté; sesdécisions sont sans appel. Le conseil comprend ordinaire-ment deux membres de chaque côté de la famille du' cOté dupère et du cOté de la mère, auquel se joint le curé ou toutautre prêtre, ou }'alcalde (lÍ1a~re), ou le juge de la paroisse.Toutes les affaires d'importance doivent être traitéès par ceconseil. Toute aliénation de propriété est nulle et illégalesans le consentement de tous les.associés et de leurs femmes.Tous également, veufs, veuves ou célibataires, ont droit deséjour, de nourriture et d'éducation dans la maison, selon là

rang qu'ils y occupent, pendant toute la durée de leur vie.Les oncles et les tantes célibataires qui demeurent dans-lamaison y prennent souvent une influence prépondérantedans la gestiori de ses affaires; ils sont en général les pluszélés à maintenir les intérêts indivis de toute la commu-nauté. Il y a aussi une autre classe de personnes qui peuventfaire partie de la communauté, los donados, les « adoptifs ».Ce sont ordinairement des veufs ou des célibataires, engénéral d'un certain âge, des bergers ou des journaliers qui

1. Cette condition se trouve dans plusieurs des fors ou fueros detous les deux côtés de la chaîne; cf. Bascle de l.agrèze, La Naaarre

fi·an.çaise, vol. II, ~45. Histoir·c du nroit dans les Pynénées, 1867,Imprimerie impériale, p. 217, Tourne-dot.

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se sont donnés à la maison, y ont versé leurs ~pargnes, ysont « adoptés », et ont droit d'y demeurer, en maladie et ensanté, en y recevant- tous les soins, jusqu'à ceux occasionnés

par la mort et l'enterrement avec la seule obligation detravailler pour le profit commun, sous les ordres du chef dela maison et de ses associés, aussi longtemps que leurs forces

le leur permettent. Les membres infirmes ou idiots de la fa-mille sont souvent mentionnésdans les chartes de la famille'.Il n'y avait pas grand avantage d'être le chef d'une maison

pauvre. Il y avait même souvent difficulté de pourvoir à cetemploi, et quand il n'y avait pas de chef capable dans unefamille, un étranger y était adopté expressément ad hoc.Quelquefois aussi, un héritier, ou un élu, se sentant inca-pable de diriger les affaires, abdiquait en faveur d'un de ses'frères, d'un oncle ou d'un parent quelconqtLe2.

Ce régime du Hoccse-Communitr~, communauté de lafamille, est aujourd'hui restreint, quant aux Pyrénées, auxparties montagneuseidu Haut-Aragon, entre les provinces

de Catalogne et de Navarre. Comme le remarque M Costa

(p. 16 de sa brochure) 3, ce système est absolument identique

avec ce~ qui existe encore aujourd'hui parmi les Slaves. de la

1. Par exemple « Y por cuanto la Isabel goza de poca de salud,hallândose demente â temporadas, convienen que an el caso de quepor el heredero que ahora imtituyen, y' por los que le sucedan, no

se le asista y atienda con todo 10 necesario y debida consideracion il

su estado, como sus padres desean,. etc. Ses plus proches parents,

avec le curé, interviendront et le maintiendront à la charge de lamaison, etc. Costa, p. 93.

2. Depuis que ces pages furent écrites, la situation va toujours demal en pire. Le Dereclac~ consccetuclinanio, le House-Communitr~ de

Alto Aragon sera bientôt une chose du passé. Voyez trois articles de

Don J. Costa Un problema de Derecho Aragonés, dans un journalde Zaragoza, La Derec%a, 19, 20, 21 do julio de 1892.

3. Et comme je l'ai constaté aussi en comparant le chapitre « East

European House Communities », dans l'ouvrage de Sir H. P. Maine,

« Dissertatious ou Early Law and Cust01l1 )), Murray, London, 1883.

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péninsule des Balkans, en Turquie et en Autriche. Maisquoiqu'on ne le trouve pas ailleurs, ni en France ni enEspagne, ce régime a laissé ses traces, je le crois du moins,dans la législation des deux pays. On en trouve l'influencedans les fueros d'Aragon, et dans ceux de la Navarre fran-çaise ou espagnole'. Le conseil de famille du Code civilfrançais a probablement ses racines dans cet antique sys-tème. Le triste sort des cadets de la famille de ce côté desPyrénées me senible n'être qu'une dénaturalisation de cesystème sous l'influence du régime féodal. M.' Bascle deLagrèze remarque Il qu'à Barèges on « leur donne (c'est-à-dire'aux cadets) le nom d'esclaus, esclaves ils étaient, eneffet, presque les esclaves de l'atné, car ils ne pouvaientquitter la maison sans son autorisation et lui devaient toutleur travail ». Même en Navarre, « il faut que les enfantsnon mariés habitent sous son toit, ils ne peuvent ricnacquérir que pour la maison. C'est à elle que reviennent lesfruits du domaine, le produit du travail des enfants et leurcabail, ou capital 3 ). Dans 'Je Labourd, « les cadets n'étaientpas traités en esclaves comme dans le Lavedan ils pou-vaient prendre leur légitime et s'établir où ils voulaient' ».On pourrait encore, dans les Pyrénées, regarder la « mai-

son » à un autre point de vue, celui de 'ses rapports avec leculte classique des ancétres et des dieux du foyer, si biendécrit par Fustel de Coulanges dans son beau livre La Cité

1. Osse. Histoire de l'Église réformée de la Vallée d'Aspe, parAlfred Cadier (Grassart, Paris, 1892). « La maison et non la famille,Comme nous l'entendons aujourd'hui, formait comme la monadeprimitive du village, ) p. 67. B. H. Baden-Powel trouve la mêmechose dans l'Inde parmi les Kolarians, le houae-cona,mursion précèdele v illage, The Oni~in and Gnouala of Village Com'munitiss in India,p. 45 (Sonnenscbein Co, London, 1899).

2. Histoire du Droit, p. 185.3.. La Nacar·refrançaise, IJ 1 238.

4. Ibid., p. 240.

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antiqcce. Personnellement, je n'ai rencontré qu'un exemplede ce qu'on appelle en anglais le « Foundation-Sacrince »

le sacrifice d'un animal, ou même d'un homme, aux dieux

tutélaires de la maison, qui a consisté parfois en un ernmu.rement de la victime encore vivante'. C'était dans unemaison du XIVe siècle, à Borce, dans la vallée d'Aspe. En yfaisant des réparations, on trouva dans une niche, au milieud'un mur très épais, au centre de la maison, le squeletted'un coq, avec toutes ses plumes. On prétend que de telsfaits ne sont pas rares dans la région pyrénéenne.

Le vieux nom latin de ces dieux de la maison ou du foyer,lar, laree, se trouve conservé dans presque toutes les lan-gues. et tous les dialectes du Sud de la France, de l'Espagneet du Portugal. En portugais,c'est lar; en espagnol, nous enavons deux formes, la~·, la maison, le foyer, et llares, lacrémaillère; en catalan, c'est llar, le foyer; en provençal,lan, le foyer; dans le dialecte du Gers, lai~cr avec la mêmesignification. En béarnais-gascon, il apparaît sous troisformes distinctes, la, l'aa et lar. Dans l'Agenais, c'est la'.Dans les Coutumes de Bayonne (éditions diverses de 1273 à1623), le lar est la maison principale, l'hereditas avita, quine-peut être aliénée,. mais que l'aîné ou l'aînée des enfantsdoit toujours recevoir entière en héritage'. (Je n'ai pas putrouver de nom analogue en basque.)

1. En Écosse et dans le pays de Galles on pratiquaitceci « Some-times a human body was thus buried beneath the fondation stone;sometimes ooly that of an animal.) » Le'fait est presque universeldepuis les Hébrides jusqu'à l'ile de Bornéo. Cf. In The Hebni~lea,

par Miss Gordon Cumming, pp. 61-62. Loudon, 1883.2. J'accepte l'émendatioti de M. V. Lespy, Grarnmaü·e béannaise,

édit., pp. ~07-8. Paris, 1880.3. Cette loi du droit de primogéniture absolue se trouve non seu-

lement chez les Basques, mais parmi d'autres populations pyré-néennes. Le premier des « Articles de 'Coutume de tout temps

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Cette maison ancesh~ale des Pyrénées occidentales étaittout à fait distincte des autres biens réels ou personnels,acquis par mariage, par le commerce, ou par les produits dutravail. Comme sanctuaire, elle était inviolable'. Les fors-particuliers accordèrent à la maison, considérée comme unsanctuaire inviolable, le droit d'asile. Ils l'étendirent dupalais de l'infançon à des maisons de caballeros et de simpleshabitants de la ville. Selon le Fuero de Lequeitio, enBiscaye, aucun agent de police (merino ô sayon) ne pou-vait entrer dans la maison d'aucun habitant (algun poblador)contre son gré, sous peine d'être tué, et le meurtrier n'étaitpas coupable d'hoJJ1icide' ». Dans toute la Biscaye, « aucunmerülo ti sayon ne pouvait même approcher de la màisond'un Biscayen à la distance de douze pieds contre la volontédu maitre, sauf avec un notaire et sans armes, et pourle seul objet de voir les biens saisissables et d'en fairel'inventaire 1». Une loi tout à fait semblable fut promulguée

observés et pratiqués en la Vallée de Barège, sans mémoire ducontraire », est ainsi conçu

ccLe premier-né du mariage, soit mâle ou femelle, est héritier de

toute sorte de biens de quelle nature qu'ils soient, de souche etavitins, c'est.à-dire, sans aucune différence..possédés par les pères etmères, aïeuls et aïeules, ou autre en ligne supérieure et ascendante. »La Coutume de Barc,ge, par MI' M. G. N. avocat en Parlement,p. 36, et pour le Lavedan, p. 451 (à Toulouse, MDCCLX).

La même dispOsition se trouve dans les Fors et Coutumes d'Azun,LXXXV. Qua. prumer,ftlh o~ilha deu heretar.

A Sare, j'ai trouvé des filles aînées héritières au préjudice de leurspuînés dans les familles I~s plus considérables, comme les Haram-boure, les syndics du Labourd, les Itburbide, etc. Ce droit de l'aînéeà la succession au préjudice de ses frères est même constaté dansplusieura procès de famille que j'ai parcourus.

1. Lagréze, Naoarre fi·angaise, Il, 236. Histoire du Droit, p. 279.2. Historia de la Lec~islacioz civil de Espana, por el marqués de

Moutesa y Cayetauo Manrique. Fccero de Naoarr·a, etc., vol. If,2~ édit. Madrid, 1863, p. 581.

3. Ibid., p. 305.

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et jurée par Alphonse IX aux Cortés de Léon, en 1188'. Lelar· ne pouvait être ni aliéné ni divisé entre les enfants niles parents comme les autres biens 2. Lorsque par mariage,ou par d'autres moyens, une famille avait réuni plus d'unlar, le lar paternel devait être attribué au fils atné ou à lafille atnée, et les autres lai-8 pouvaient dans ce cas êtrealloués aux cadets'. Tous les enfants avaient droit d'y vivre,et ils ne pouvaient être dépossédés de ce droit, s'ils n'avaientpas acquis par mariage, ou par d'autres moyens, un autrelar, ou s'ils n'avaient pas été formellement rendus inca-pables d'hériter par des actions infâmes 3.

Nous avons maintenant, je le crois, constaté qu'il y avaitautrefois', et qu'il se trouve encore des vestiges de plusieursrégimes de propriété bien divers, dans la région dont nousnous occupons 10 la propriété communale'ou ir·ibuale, oùles terrains labourables sont partagés par le sort entre tousles habitants à des époques fixes 20 le régime où les pâtu-rages seuls sont eu commun et indivis; 30 le régime de la com-munauté de la maison, où la propriété n'est pas tout à faitindividuelle,mais appartient à la famille entière; 4° celui oùla'maison, lé lar, est commeune chose sacrée qui passe auxaînés ou atnées seulement, mais qui leur appartient en pleinepropriété; ce qui conduit, par transition, au régime actuelle-

ment général.Entre le régime communal ou tribual, celui de la commu-

nauté de la maison, et le régime moderne qui consiste dansla possession presque absolue de sa. propriété par l'individu,

t. Cortés cle los Antiguog reinos de Leon y de Castilla. Introduc.ciou por Don Manuel Colmeiro, parte I, p. 144. Madrid, 1883.

2.'Coutumes de Bayonne (1273). Balasque et Dulaurens, Étudeslcistoriquea oui- la oilll de liayonne, vol. Il, p. 622. Bayonne, 1865

et Coutumes de Bayonne, pp. 62-63. Bordeaux, 1623..

3. Cf. Fueros do Nacarre, lib. Il, tit. IV, cap. 8. Fueros d'Ara-gon, Lagréze, Naoarr·e, Il, 211.

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et la suprématie de la loi administrée par un pouvoir central,il intervient souvent une espèce de régime vicinal. L'individun.y est pas tout à fait libre et indépendant. Il pst assez librepeut-être quant à ses supérieurs; il n'a pas à souffrir deleur tyrannie ni de leurs exactions mais il est lié et mêmeentraY~ dans toutes les actions de sa vie par des devoirs etpar des obligatims ertvers ses égaux, s~s voisins: ses conci-toyens. Il ne peut pas quitter l'endroit de sa naissance pourhabiter ailleurs sans étre reçu et reconnu comme voisin oucitoyen dans cet endroit.

Voici la description d'un aecino, voisin, à la campagne, encontraste avec le bourgeois d'une ville. Quoique elle vienne delas Asturias, la description s'applique également aux voi-sins, bexis, Basques ou Béarnais « Pour les effets de la vielocale, ce ne sont seulement des voisins cieux qui ont cecaractère en regard de la loi municipale. Le voisin est celuiqui a le droit de couper, de paître, de bêcher, de clôturer, de-faire usage et profit des terrains communaux, pour y pattreson bétail; et comme tous ces droits avec leurs devoirs corr~-latifs sont inhérents à la propriété collective, l'acquisitionde la qualité de voisin ne dépend pas exclusivement de lavolonté d'un nouvel arrivé. Les ordonnances les plus an-ciennes demandent pour cela que l'étranger qui le sollicitesoit admis par l'assemblée générale des voisins, réunissantles qualités requises, lesquelles se rapportent principalementaux. moeurs du candidat. 11 doit aussi verser une petite

somme d'argent dans la caisse du village. »Sans cela, il ne jouirait pas pleinement de ses droits, il

n'aurait pas les mêmes privilèges que les autres il ne pour-rait y exercer aucun métier, il serait presque hors la loi,e.rlex. ~n outre, comme voisin, il a beaucoup de devoirs àremplir, et beaucoup de charges réciproques à supporteravec ses convoisins, qui sont pour lui et pour qui il est un

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fiador (fideijussor), un compurgateur, une caution, ungarant, presque un otage, un protecteur dans tous les événe~

ments de la vie'. Les voisins doi vent se servir réciproque-ment de témoins, non seulement devant la justice et dans lesaffaires civiles, mais aussi dans les affaires de la vie journa-lière, aux fiançailles, au mariage, à la rédaction d'un tes-tament, à son ouverture après la mort, à la veillée funèbre,à l'enterrement Y. Et tout ceci sous peine de punition oud'amende. Et ce n'était pas les hommes seulement quiavaient ces devoirs de voisins à accomplir, les femmes enavaient aussi, qui sont formellement constatés dans lesFueros, En Nava.rre, le Fuero les appelle chandras, echan-di-a.9, évidemment du basque etcheko-andrea, maitresse de

1. « Para los efectos de la vida local, ne son vecinos los que tieuenasa caracter con arreglo a la ley municipal. Fs vecino el que puedecortar, ro~ar, cacar, cerrar, usar y aprocechar los pastos de losterrenos comunes para sus ganados; y como todos esos derechos,con los deberes correlativos, van inhereutes ci la propiedad colectiva,no depende exclusivamentede la voluntad de los recién llegados eladquirir la cualidad de vecinos. Las ordenan2as de mâs antigua fecharoquieren que en junta general de vecinos se admita al Jor-dstero que10 solicite, coucurriendo circunstancias determinadas, que principal-mente se refleren ci la moralidad del caudidato"y pagando éste unapequeiia cantidad para los fondos del pueblo. » Derer.ho municipalconsuetudinariaen Espana. Varios articulos por D. J. Costa y otros.~Astur·iai, por D. Manuel Pedregal, p. 13.

Une autre définition d'un cecino, ou voisin, insiste sur une de cesfonctions les plus importantes, celle d'être caution, flador. « De comoes cecino. Todo ome que faze fuego en alguna vecindat e ovierepeynnos dalbarda Ó X puercos Ó ovejas Ó cabras Ó heredat ovierealguna en el lugar puede ser flador eu toda cosa. Fueros inéditosde Vigueira y de Val de Funes, ne 233, Boletin, de la Real Academiade la Historia, nov. 1900, p. 398 (Fortanet, Madrid).

2. Fueros de Nacanra, lib. III, tit. XXI, c. i. « De sepulturas.de casa deve yr ci la veylla Ó el echiaun Ó ela eobs7ndra, et si nonvenieren seyendo sano, deve colonia, etc. » Cf. aussi lib. V, tit. l, c. 2.Lagrêze, l3asse-Nacari·e, Il, p. 161 et p. 173. Cf. Larramendi, Côro-~ra/!a, de Cuipuxcoa, p. 115. Las Seroras. Barcelone, 1882..

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la maison; tous ces devoirs étaient encore plus obligatoiresdans les moeurs que dans les lois. J'ai à peine besoin derappeler combien de traces ce régime « voisinal a laisséespartout dans les Pyrénées. Les noms mêmes de oési, nésins.bé,ai, b~,aiau, bézial, etc., dans les patois, en sont un exemplesuffisant. Je laisse aussi de côté toute une partie, peut-étre laplus intéressante, celle qui se rapporte à l'organisation poli-tique je voudrais seulement signaler quelques vestigescurieux, conservés dans les moeurs actuelles.En recueillant les récits que j'ai publiés dans mes

(i Basque Legends n, j'ai remarqué souvent que l'actiondécisive, que le moment critique, coïncide avec l'acte deprendre du feu chez son voisin'. Ce droit est formellementétabli dans les fueros de Navarre. Dans le royaume deNavarre, il y a des endroits où le bois manque, où il y apeu de montagnes et de forêts. Cependant, quoique le boissoit rare, il faut toujours du feu. Le for ordonne que celui

qui a ses repas à apprêter devra avoir au moins trois tisons

au foyer, et que, si quelque voisin va chez Iti.i pour luidemander du feu, il doit venir avec un fragment de potcassé, où il posera un peu de paille brisée; s'il y a une cour,il laissera le pot à la porte de la maison. Puis, il ira au foyer,il soufflera sur les trois tisons, et prendra garde de leséteindre. Il posera de la cendre sur la paume de la main, etsur cette cendre des charbons allumés il les portera dans

son pot! sa maison. Et si par aventure, malgré ces précau-tions, un voisin refusait à un autre de lui donner du feu, ets'il était convaincu de ce fait, il payera 60 sols d'amende i.

1. Basque Le~nds, collected cbiefly in the Labourd, by Rev. W.Webster, with an Essay on thé Basque Language by M. Julien Vin-son. London, 1879. Cf. tale of Mahistruba, p. 103. La Sc~eur et sesSept Frèree, p. 189.

2. Ci. Lagrèze, Baese=Naoanre, Il, p. 88. Fueros, lib. III, tit. XIX,

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Même aujourd'hui, on ne refuse jamais du feu au voisindans le pays basque.

Dans la commune où j'écris ces lignes, la commune deSare, il reste encore des vestiges de ces droits et privilèges.Quand quelqu'un est gravement malade ou à l'agonie, c'estle voisin, marié ou célibataire, selon le sexe et l'état dumalade, celui ou celle qui habite la maison la plus proche ducôté de l'église de la maison du malade, qui doit aller cher-cher le prêtre, n'importe à quelle heure du jour ou de la nuit.Pour les mariages, la demoiselle d'honneur est toujoursaussi la fille non mariée de la maison la;plus proche du côtéde 1'~glise, et il en est de même du garçon d'honneur pourl'époux; aux enterrements,c'est toujours le « premiervoisin »

qui mène le deuil ce sont les voisins, ou les voisines, quiportent le corps au cimetière.

Rien ne nous fait voir combien était profond le sentimentdu voisinage et de ses devoirs réciproques dans les Pyrénées

que les vers du Père Amilia 'écrits en 1673 sur « L'injus-tisso faito al gassailhat inoucen de la mort del bestial'L'inj ustice faite au preneur en cheptel innocent de la mortdu bétail. » Le poème commence ainsi

L'amour que cadun a de sa propro naturoDe l'amour dot proutchen diu estre la mesuro.Qui jamai se bol mal, qui n'aimo pas soun cos,Et qui n'ai mo l'proutchen, qu'es un os de nostre os?

c. 7. « En quoal manera deve dar fuego un vezino â otro, et si nonfaz, que colonia ha. » Cf. aussi c. 8.

Le contraire arrivait dans le pays de Galles au moyeu âge. Là,

« prendre du feu dans une maison sans- permission fut une offensecontre le propriétaire, pour laquelle on lui doit payement, outre uneamende due au seigneur ». J. Rhys et D. Brymer-Jones, The WclsJ~

People, p. 237.3 (Fisher Uuwin,'Loudou, 1900).1. Le Tableu de la Bido del Parfait Crestia en Berses. Fait en

1673, pel P. Amilia (5° ediciu. Fouix, 1897).

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L'amour que chacun a de sa propre nature,De l'amour du prochain doit être la mesure.Qui n'aime pas son corps ? Qui ne se veut du bien ?Aimons l'os de notre os; tel est notre prochain.

La peine infligée autrefois au voisin qui voulait se sous-traire à ces obligations était terrible. Co n'était rien moins

que l'excommunication sociale. M. Bascle de Lagrèze leconstate en ces termes « Le titre de voisin pouvait seperdre. Celui qui refusait de se conformer à l'opinion' de lamajorité ou aux ordonnances locales était déchu de saqualité de aecino (voisin). Il était déclaré indigne. Nulsecours ne pouvait lui être porté, même quand on l'aurait vuassassiné par un étranger. Tous les voisins devaient faire levide autour de lui. Ses parents n'avaient pas le droit de levisiter quand il était malade, à moins qu'il ne donnât cau-tion de se soumettre. S'il refusait d'en donner, aucun parentni étranger ne pouvait aller le voir. Il ne pouvait obtenirqu'un prêtre à l'église pour se confess~r, un tamis qu'il em-pruntait pour passer la farine nécessaire à sa nourriture, etun peu de feu dans la main, selon le for. Hormis ces troischoses, en tout il devait étrè repoussé' ))

MM. J.-E. Dufourcet, président de la Société de Borda,Dax, et G. Camiade, secrétaire général, ont publié à la findes Bulletins de la Société, années 189t\-1899, un excellentttravail: L'A quitainehistorique et rnonumentale. LesAnciensusages gascons. Dans le Bulletin du quatrième trimestre,1898, pagination spéciale 120, M. Dufourcet donne unelongue et très intéressante description « du voisinage, loubéziaou ou bé.aiatge, 'l'ancien ~jus aicinitatis du Digeste, quii mpose aux habitants d'une maison des devoirs envers ceuxdes maisons les plus rapprochées et leur donne le droit

1. La,Jrèze, Lx Naoarne fi·ançaise, II, pp. 89-9J. Fuero3, lib. V,tit. XU, c.2. Por quoales cosas et de quoales cosas pueden los vezi-nos sac"ar a lur vezino de vezin dad.

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d'exiger de ceux-ci des services, réglés par usage, qu'ils sontobligés de leur rendre, même ce qui arrive souventlorsqu'ils sont brouillés avec eux. Ces droits et ces devoirsentre voisins existent bien, un peu partout même dans lesagglornérations urbaines, mais nulle part ils ne sont aussivariés et aussi bien réglés qu'en Gascogne ».

Un système tout à. fait semblable existe dans les villages

saxons de Transylvanie, où on trouve le besiatge, le 11'ach-

barschaj'l établi depuis des siècles i.Quant à la mention de l'ancien jus nicinitalis dans le

Digeste, je n'ai pu l'y trouver. J'ai écrit à M. Dufourcet,mais il ne pouvait m'en fournir le renvoi exact. Il y a biendans le Codex, lib. XI, tit. 54 à 56, mention du droit depréemption et d'autres privilèges du aicinus, qui semble indi-

quer qu'un tel ~ystème vicinal fut pratiqué même sous lalégislation byzantine. Dans la Lex Romana Visigothoruna,

et dans sa récension espagnole, le Fuero Juago, celui qui atrouvé un animal égaré doit dénoncer le fait « aut sacerdoti,

aut comiti, aut judici, aut senioribus, uut eliam in connentrc

publico aicinorunaY », ou comme, dit le Fccero « decirlo pala-.dinamente ante los vecinos 3 n. Nous voyons ici les voisinset le conseil du village et les anciens jouant le même rôle auVIe siècle qu'ils ont joué pendant tout le moyen âge et jus-qu'à la Révolution'.

Nous allons maintenant parler du mariage, et de la con-dition de la femme dans la société. Il y a dans les Pyrénées

1. L fe and Society in Eastérn Europe, by W. James Tucker,p. 406 et 420 !Sampson Low. London, 1886).

2. Leges Visiyothorum Antiquiorea, edidit K. Zeumer, lib. VIII,tit. V, (}. 6 (Haunoveriae et Lipsim, 1894).

3. Fuero Ju,~go, lib. VUI, tit. V, lex 6.4. La dernière étude et la plus complète sur le régime vicinal est

celle de M. A. R. Wbitewa~ The P~renean Neiglibour; or, theVicinal System in the Western P~renecs, dans The Archaeolo~iealJournal. Vol. L VJlr, n', 230, pp 182-198. London, 1901.

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des vestigesde cet état primitif du côté de la mère, où l'enfantn'est admis comme membre de la famille que sur la recon-naissance formelle du père. De cet état, la couoade, si elleexiste réellement, est un des plus curieux restes. Il y aaussidans cette région d'autres faits qui semblent indiquer unepériode pendant laquelle l'exogamie, c'est-à-dire l'enlève-ment des femmes d'une autre tribu, etia défense de se marierdans sa propretribu fut pratiquée d'autres faits démontrent

que l'obligation des devoirs matrimoniaux, également im-posée aux deux sexes, n'a été que très- tardivement adnÍise.

La preuve que la couvade existe encore chez les Basques

ne me parait pas faite. On en trouve une première mentionvague-chez Strabon, qui l'attribua aux Cantabres du Nordde l'Espagne'. Il ne serait pas facilede s'expliquer l'existencedu mot même, avec cette signification, s'il n'y avait pas euquelque fait qui y répondit. Zamacolal et Chaho-1, tous deuxBasques, en affirment l'existence jusqu'à leurs jours. M. E.Cordier' prétend aussi en avoir trouvé des exemples. MaisA. Chaho en parle comme existant en Biscaye, une province

1. Strabon, lib. III, IV, c. 17.

« The infant son was solemnly received into kindred by his fathel'.»Ti~c Welsh People. by J. Rhys and D. Brynmor-Jone8, p. 205.(Fisher UDwin. London, 1900).2. Zamacola, Historia de laa Naciones Bascas. Auch, 1818.

« Y enfin', que estas mugeres apenas parian se levantaban de lacama, mientresel marido se metia en ella con el chiquillo, como. lmcc

sun muy poco tiempo que sucedia en muchas regiones de la Cantab1'Ïa

porque era un deber de la naturaleza y unacostumbreentre los Bascos,

que el primer sudor ti abrigo que recibiera el niùô puese el de supadre, pera identiticarlo con los y e!;piritu de sus genitores.

3. A. Chabo, Voyage en Naoarre pendant l'insm·ecüon ~les

Basqcces, Bayonne, 1865, p. 384: « Il existe dans cette province desvallées dont la population rappelle par ses usages l'eufauce de la so-ciété les Bisk!1yennesy quittent le lit immédiatement après leurscouches et le montagnard prend la place de sa femme auprès dunouveau-né. »

4. De l'organisation de la /amillc; chez l,es Basques, par E. Cordier,pp. 13, 23, Paris. 1869.

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qu'apparemment il n'a jamais visitée, et il cite Strabon pourtoute référence. Quant à M. Cordier, il est bien difficilequ'un simple voyageur comme lui, ne sachant pas le basque,ait pu recueillir des témoignages précis sur. uné matière aussidélicate, et sur laquelle tous les médecins et toutes les sages-femmes du pays déclarent ne savoir rien. La communicationofficieusedu 15 novembre 1875, imprimée dans le Bulletinde la Société des sciences, lettres et arts de Pau, année1877.78, pp. 74-77, n'a rien de sérieux. C'est une plaisanteriefaite parM. Etchecopar, instituteur d'Ayherre, aux dépens dedeux de ses amis'

De l'exogamie, la loi que l'époux et l'épouse ne doiventjamais être de la même tribu, et comme conséquence queles femmes parlent souvent entre elles-mêmes une languedifférente de celle de leurs maris (usage très répandu parmiles tribus sauvages, et surtout en Australie), nous avons peut-être une trace dans un curieux fait linguistique observé parle prince L.-L. Bon~a,parte dans la vallée basque de Roncal,

en Navarre. Les Roncalais, entre eux, parlent espagnol;

avec les Roncalaises, ils parlent basque, ainsi que les Ron-calaises entre elles. On observe à peu près la même chose àOchagavia, en Salazar. Cet usage n'a pas lieu toutefois dans

1. Voyez le témoignage de M. l'abbé Haristoy, curé de Ciboure,rapporté,' dans Tlae Academr~,n° 1076, p. 568,llec. 19,1892. Mais surtoutla Rect~c:ation de M. Haristoy dans La Traclition au Pays Basque,p. 290 (Paris,1899). Pourdes sympathies physiquescurieuses entre deux:époux, voyez Tfce Acaclemc~, nU 615,p. 112, 616, p. 126, 617, p. 148,1884,et la causeriescientijique, «Col1vade et sympathie conjugale », parM. H. de Varigny, dans le Temps, 29 avril 1899. Le rédacteur d'uneédition (1816) des oeuvres du dramatiste anglais Middleton (1570-1627)

a une note sur un passage de sa comédie Wornen beuare'ofWomen. « lit allusion to a superstitious idea, that an affectionatehnsband had the toothache while his wife was breeding. » Act III;sc. 3, note 2. Mermaid edit., p. 355. Pour le contre, que la couvadeexistait réellement chez les Basques d'autrefois, voyez La Coucadecl:ex les Basques, par M. J. Voisin, Étucles de linguistique et cl'etlmo-·Iraphic. par A. Hovelacque et Julicn Vin!5on (Reinwalcl. Paris, 18?S),

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les localités roncalaises d'Uztaroz et d'Isaba, où les hommesentre eux se servent aussi bien du basque que du castillan'.J'apprends du savantéconomiste espagnol, D. G. de Azearate,qu'un usage contraire existe dans quelque canton de la pro-vince de Léon, en Espagne. On ne veut pas qu'un étrangercourtise une fille du village,. et s'il le fait, les jeunes gensl'arrêtent, et ne veulent point le relâcher que lorsqu'il aurapayé le priso, qui consiste en une certaine quantité de vin.

C'est seulement sous l'influence du christianismeet de lacivilisation moderne que les devoirs du mariage et la fidélitéconjugale sont devenus également obligatoires à l'homme età la femme. Il n'en fut pas ainsi aux temps primitifs dans lesPyrénées, ni même pendant une grande partie du moyenâge. Le fait est constaté par des documents légaux et irrécu-sables. Le fuero de Navarre prescrit que tout homme marié« qui a sa femme dans l'enceinte de la ville ne doit coucherqu'avec elle,' ». M. B. de Lagrèze ajoute ce commentaire«Ainsi les rois, comme Charles III le Ñoble, ne se faisaientaucune difficulté de profiter de l'absence de leur femme pouravoir d'une autre des enfants dont le for du pays ne blâmait

pas la naissance. Les particuliers agissâient à rinstar desrois'. ) »

Par la loi de « Las Siete Partidas » il est défendu au gou-verneur d'une province de se marier pendant le terme desa-gestion; mais il lui étaitpermisde prendre une barraganaou concubine légale'. La raison de cette loi singulière était

1. L.-L. Bonaparte, L~tudes sur les dialectes d'deacoa, etc., p. iii.Cité par le prof. Julien Vinson, dans l'avant-propos, p. XVIII, del'Esaai sur la lan;~uebaaquc, par François Ribar3 Vieweg, Paris,1877.

2. Lib. IV, tit. l, c. 3. « Como deve ombre iazer con su mujer.Todo ombre casado que a su muyller tiene en el término de la villa,non deve ia~er sino es con ey lla et deve iazer à menos de bragas. »

3. Lagrèze..La Nac~arre franraise, XXVIII e. ii, 169-70.4. E otrosi dezimos, q. omes y a que puede aver barragenas, e na

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la peur qu'un gouverneurde province ne devint trop puissant

en s'alliant 'avec les grandes familles de sa province. Cettehabitude de prendre une barra~ana est très répandue enEspagne'. C'était surtout comme une espèce de mariagepermis au ûlergé. Les voyageurs l'attestentl. On en parle.souvent dans les Cortés et dans les conciles d'Espagne~. LesBasques, prétend-on, avaient même fait des lois ordonnant àchaque prêtre d'avoir sa propre concubine, afin qu'il soitsatisfait avec elle, etqu'il ne s'adresse pas aux femmes ni auxfilles de ses paroissiens'. Une coutume analogueà l'existence

podrian rescebir mugeres legitimas. E estes son de los q. son Hama-dos en .latin presides provinciarü: q. quier tanto dezir en romàce,como adelantados de algunas tierra~. Ca tal ome como este, nô podria

rescibir mujer legitima a nueuo, en todo aquella tierra, onde fuesseadelantado en quanto durasse el tiempo deI adelantamièto. E podriay rescibir barragana, si nou ouviesse mujer légitima.

Las Siete Partidas. Quarta partida, tit. XI V, ley II, p. 41, col. 2,vol. II, fol. 1587.

1. Fuero de Nacarra, lib. Il, tit. IV, c. 22, et lib. III, tit. XX, c. I,et viii.

2. Viajes de Estrangeros pon Espai~c én el siglo XV, por D. J.Riaiio, Rozniital, 1465, parlant des curés basques « Los clerigosen elcampo tienen mujeres, y han aprendido mal de ellas. » Voyez plusbas Les Basques desjendus en 1788 par un Anglais, etc.

3. Cortésde los antiguosReinos de Leon y de Castilla. Introduccionpor Don Manuel Colmeiro, 11' partida, Madrid, 18ci3. Cortès de Leonsous Joan II, p. 346. te Que'los hijos que los clerigos hubiesen en susbarraganas no heredasen los bienes de sus padres, etc. »

Historia de la Legislacion, Marichalar y Manrique, vol. Il, p. 306.Carta de 1516, de Biscaye.

IlLos dichos cletigÓs estan metidos e obsti-

nados en pecados publicos, teniendo mancebas en pan é cuchillo de.sus' casas. »'

4. Chabo, Voyage en llTacarne, p. 103. « Saint Émilien venait re-procher aux chefs des Vascons leurs péchés', et la loi qui permettaitaux prêtres de la Biskaye d'entretenir une agape (berragana) oucbambrière (guelhari) » et p. 390 « La loi enjoignant aux prêtresd'épouser' une !~ueiari ou cbambrière. JJ Cf. Zamacola, cité parM. J. Vinsou, Études de istique et d'Fthnolog~ie, p. 202, Paris,1878. ~f'rI-l1 (,` W

`~'r'`,;y~

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des bsrragana était connue de ce côté des Pyrénées c'étaitla ~rcassipia, en Bigorre on peut consulter avec fruit à cesujet deux ouvrages de M. Bascle de Lagrèze, Histoire duDroit eÈarcs les Pyrénées, ch. iv, p. 371, imprimerie impé-riale, 1861.. et Les Massipia, Bordeaux, 1851. Le lecteur ytrouvera des contrats faits devant le notaire et constatantcette espèce de concubinage légal

Il est curieux de remarquer que, quoiqueles Basques aienttoujours été un peuple très religieux et très catholique', lemariage fut pendant longtemps chez eux une cérémoniecivile. Le for, comme dit M. de Lagrèze, « n'admet pas leprêtre pour la célébration du mariage, qui peut être valablesans aucune cérém,!)nie rèligieusel. » « Le for ne prescritpas 'l'intervention du prêtre pour la validité du mariage, ni

pour la constatation des naissances au des décès' ». « D'aprèsle fuero, le mariage n'est qu'un simple contrat'valable sansaucune intervention de la bénédiction prescrite par le for deRome' »

Dans les fueros, tant de IVavarre que d'Aragon, noustrouvons des traces de l'antique coutume de l'achat de lafemme. Le prix même de la femme dans les divers rangs dela société est établi dans le fuero d'Aragon (année 1247)s.Il y a aussi des traces du « Morgengabe ou le don du matin,le prix donné à la femme pour sa virginité perdue.. SelonM, de Lagrèze, des vestiges en subsistent encore denos jours6.Le simulacre. d'un combat pour la prise de possession de la

1. Cf. lib. IV. Codex Calixtinus. Recue de Linguistique, tome XV,,p. 13. Paris, janvier 1882. Fueros de Naourre, lib. III, tit.. XX, c. 5.

2. Lagrèze, Nacarv·e, n,50.3. Ibid., 161.4: Ibid:, 168,181.

5. D'une femme libre, 50 solidi ou davantage d'une vilaine, ennature. )

6. Lagrèze. Histoiredu Droit, p. 145.

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femme est encore ordinaire.,Les frères del'épouseoud'autresjeunes gens tirent toujours des coups de fusil sur le cortègede l'époux à son approche de la maison. En Espagne ceci sefait au milieu de haies et de cachettes, ce qui donne une plusgrande ressemblance à une escarmouche de guerre, et nousreporte au temps ou la femme était prise par son mari les

armes à la main.On croit généralement que le respect de la femme et son

élévation dans la société sont l'œuvre de la féodalité. Maisl'histoire des peuples pyrénéens semble indiquer tout le con-traire. Dans le régime communal de Llanabès (Léon), nousavons vu que la veuve hérite des lots de son feu mari'. Dansle Derecho consuetudinario del Alto Aragon, comme nousl'avons vu aussi, les femmes pouvaient hériter au même titreque les hommes dans les conseils de famille, une femme ouune fille pouvait même être choisie pour chef de famille~

L'enfant mâle, s'il n'était pas le premier-né, n'avait aucunavantage sur la fille, qui héritait si elle était l'atnée. Dans lesf ueros d'Aragon, en 1247, la part d'une veuve dans la distri-bution des biens de son mari était beaucoup plus avantageuseque celle d'un veuf en pareille circonstance. En 1348, losricos-hombres et los infanzones d'Aragon s'en plaignirent, etle fuero fut amendé à leur avantage. Chez les Basques, dansles provinces espagnoles, presque jusqu'à nos jours, la femme

et les filles ne s'asseyaient pas à table avec le mari ou le père;mais elles n'en étaient pas moins considérées dans la famille

pour cela;.la fille ainèet si elle était le premier enfant né,était la seule héritière et était appelée ainsi, et elle jouissait

des mêmes droits et du même 'respect qu'un fils ainé, quihéritait seul. J'ai même entendu l'ainéede mes filles appelée

en basque « Niademoiselle l'héritière» par nos voisins, et

1. Voyez supra; note 131

2. Vayc! supra; note 23,

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malgré,nous, on la traitait avec plus d'égards que ses soeurs.En Bigorre, dans les assemblées de la bésiau, les femmesvotaientavec les.hommes, et leurs protestations étaient enre-gistrées, même quand il n'y avait qu'une femme de sonopinion'. Une insulte, un acte de violence, commis devan't

une dame était -sévèrement. puni*. Il était permis de la corriger,mais aucune insulte, aucun acte violent n'était toléré, même

envers une servante. Dénouer les cheveux d'une femme quel-

conque était puni avec peine égale à celle infligée pour avoirtiré la barbe d'un homme'. Toutes ces coutumes sont anté-rieures à la chevalerie et à la féodalité, dont l'arrivée, dansles Pyrénées au moins, fut marquée par des accès de bruta-lité envers la femme 1. n faut avouer pourtant que dans lesFueros de Navarre il y a des brutalités encore plus -grandes

envers le beau sexe mais elles étaient pratiquées par desfemmes sur des femmes, et c'étaient elles qui y. présidaient5.La chevalerieet la féodalité- introduisirentpeut-êtrequelquesraffinements dans le langage et dans la politesse extérieure

envers les dames de la' noblesse mais la position légale etles égards dus à la femmeen général ne furent pas améliorés,bien'au contraire.

Je ne sais pas si j'abuse de la patience de mes lecteurs cequi me reste à dire est plus curieux qu'important. J'ai àsignaler deux ou trois usages des Basques relatifs aux enter-

1; Lagrèze, Histoire. du Droit, p. 69, et pièces just~eatioes,p. 494, etMonographie dcSaint-Sr:cin de Laoedan, p. 113, Paris, 1850.

2. Lagrèze, Naoarre, II, 363. Fueros de Nacar·re, lib. V, tit. 1. c. 2,3 aussi Fueros d'Arc~~on, 1247.

3. Lagrèze, Naoarre, II, 368, 9. Fueros de Naoarre, lib. V, tit. 1,

c. 9,10.4. Lagrèze, Histoire du Droit, pp. 342-3.5. Lagrèze, Naoarre, II. 173. Fucros de Naoarre, lib. IV, tit. 1.

c. 2. « Cdmo casa yfanzon â sutJja por escossa,et aquéprueva la devepooer. »

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rements. Onconserve encore dans quelquesendroits la vieillehabitude de porter le corps au cimetière sur une biè~e dé-

couverte, et de l'enterrer avec les habits mêmes qu'il portaitordinairement. L'usage d'allumer du feu au carrefourle plusproche à l'occasion d'un enterrement, et que chaque passanty dise un Pater à l'intention du .défunt, est beaucoup plusrépandu. Dans le Fuero de Navarre, nous trouvons la dé-fense d'ensevelir le corps avant quetoutes les .dettes du défuntaient été payées quelquefois 'on exposait le corps à la portede l'église même, comme pour implorer lacharitédes fidèles'.Le souvenir de ce fait se retrouve dans. plusieurs contes po-pulaires du pays3. A l'enterrement d'un chevalier,son coursieret ses armes étaient donnés au prêtre qui avait dit la messe'

ce qui me parait être une transition,en,tre la coutumebarbared'enterrer son coursier et ses armes avec 'un- chef, etl'habitude moderne de porter les armes d'un officier dans soncortège funèbre et d'y faire figurer son cheval. La coutumed'avoirdes pleureuses, et surtoutdes pleureusesde profession,

aux enterrements fut longtemps observée dans les Pyrénies,

comme cela se fait presque partout dans l'Orient'. Les au-rosts de la vallée d'Aspe sont bien connues j'ai vu des gens

1. Lagrèze,Nar,arr·e, Il, 2;)6. Fueros de Naoarre, lib. III, XVII, tit.7.2. Jean de Calais, Le Merle Blanc, etc., etc.3. Lagrèze, Naoarre, 11, 165..

4. Corogra,Jia de Guipuacoa, por el R. P. Mauuel de Larramendi,Barcelona,1882. Il Tambien fué muy comun el oficio ridiculo de las

,planideras, qúe se alquilaban y pagaban para que fuesen llorando ylamentandoseci gritos detras del difuDcto. » Hubo antiguamente enGuipuzcoa semejantes,que se llamabau aldiagrcilleac,erostariac, en

Vizoaya, p. 191.5. Cf. Poésies béarnaiYes, 2 vol. Vignancour, Pau, 18~2-186(1. Ri-

varès, Frédéric, Chansons et Airs populaires du Béarn, Pau, Véro-nés, 1868. Pierquin de Gembloux, HiatoireLittérair·e des Patois, p.198.

L'usage des aurostes a été abandouué à Osse depuis 1860, par l'in-fluence de M. Le Barthe, instituteur protestant. On en faisait usageà Lescun aussi.

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qui ont connu Marie Blanc, la dernière de ces pleureuses,et qui m'ont répété de ses chants encore inédits. Beaucoupd'écrivains parlent des danses religieuses qui se font devantle Saint-Sacrement dans la cathédrale de Séville comme d'unfait unique. Les danses religieuses dans les processions etdevant le Saint-Sacrementsont assez fréquentes,au contraire,de l'Aragon à la Biscaye, et surtout en Guipuzcoa, dans lavallée d'Azcoa'

Rien ne montre mieux l'antiquité du type de la législaturedes fueros, dont l'origine est ainsi reportée aux siècles pri-mitifs, quecette remarque le titre IX du livre VI des Fuerosde Naaarre ne consiste qu'en sept Fazanias, dont trois nesont ni plus ni moins que des contes de folk-lore. On ytrouve comment une femme condamnée à étre lapidée futdéfendue par des jeunes gens, comme Suzanne. « Fazaniad'un homme et d'un serpent Il » où le serpent parle et exposesa cause aussi bien que l'6omme: Dans mes Basques Le-~ends je dis, p. 42, « que j'étais d'abord tout à fait déroutéen' entendant raconter les contes d'animaux, tant les con-teurs étaient convaincus qu'il y avait un temps où les ani-

maux parlaient. » Les animaux eux-mêmes étaient traitéstout à fait comme les égaux de l'homme. Mais je ne comptaispas voir des faits analogues figurer gravement dans un codelégislatif comme ils figurent dans les Fueros de Naaarre et

1. Larramendi, Coi·ogra, jia, p. 201. « La danza de espadas es parafunciones mâs graves, verbi gracia, para las procesiones de Corpus y.su octava, para las otras que se bacen por San Juan y otros patronosde los lugares 6 advocacion de sus iglesias. Entran en la iglesiacon la procesion y dancean delaute de su Majestad patente, etc. »

Pourla danse religieuse à .lâca, voyez Voyage à Jaca, par DI, E.Casamayor-Dufaur,p. 24 (Oloron, 1894). Uans Eskualduna, 2 dé-cembre 1898, un vieux curé dit que vers 18:i5 on dansait encore àIboldy dans le pays basque le jour de la Fête-Dieu devant le Saint-Sacremeut..

2. Fuero~ de Nacarre, lib. VI, tit. IX, cap. 4, 6, 7.

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d'Aragon. Les animaux sont sérieusemeut regardés commemoralement coupables d'homicide, etc., avec des circons-tances atténuantes ou aggravantes, tout à fait comme s'ilsjouissaient de la raison, et s'ils étaient sous l'obligation de laresponsabilité morale. « La bête qui en tue une autre, esthomicide de cette bête' » est la loi générale; mais la bêtemontée et dirigée par unhomme n'est pas homicide si l'hommetombe et se tue. « Si un chien tue un autre chien, quand il

se trouve avec une chienne qui est en chaleur ou qui est sasœur, il ne doit pas d'amende. S'il le tue dans un autre cas,il doit l'amende selon la qu~,lité du chien, et s'il ne veut pasla payer, le chien doit être livré comme homicide fi. )) Il paraitpar les anciennes lois du pays de Galles, que les chats yétaient très estimés une jeuna chatte qui n'avait pas encoretué de souris était évaluée à deux deniers, mais quand elle

en avait tué une, elle en valait six, prix énorme pour cetemps-là. Celui qui tuait un chat devait donner à son maîtreautant de blé qu'il en fallait pour recouvrir complètement lecadavre suspendu par la queue et dont la tête touchait laterre. Nous trouvons à peu près la même peinedans les.Fuer.os de Naoarre et d'Aragon. « Quelle amende doit subircelui qui a volé un chat? Si un homme a volé un chat,

et que le vol soit prouvé, voici l'amende le maUre du chatprend une corde longue d'un empan, il l'attache au cou du

chat, puis il plante un clou pour y nouer l'autre bout de lacorde. Tout doit se faire sur une surface unie de neuf em-pans de circonférence. Le voleur, la main pleine de. farine de

mais (millet en Aragon), fratcbemenL moulue, doit répandrecette farine sur le chat jusqu'à ce qu'il soit complètement

1. Lagrèze,Naoarre, II, 391. Fueros de Naoarre, lib. V, tit. IV,c. 2, et c.14. Fueros d'Ara~on, lt'~7.

2. Lagrèze, Naoarre, II, 391. Fueros cle Nacarre, lib. V, tit. IV,c. 15 et c. 20.

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couvert. Telle est la peine, et la farine de mais sera partagéecomme les autres amendes. Si le voleur est trop pauvrepour pouvoir se procurer assez de farine, on lui attacheraau cou le chat, la tête en ,haut, placé sur les épaules nuesdu voleur, et le sayon repoussera la porte en frappant le chatpour qu'il morde et égratigne. Cela fait, le voleuren est quitte.Si dans le pays il n'y a pas de maïs, il faut payer vingt etun cahises de blé'. » Il y avait, comme dans tous les codes,

une grande différence de peine pour .un vol commisdans unepropriété close et dans un terrain ouvert. Pour déterminer si leterrain était clos ou non, les Navarrais mettaient un baudetd'un' côté de la limite, une ânesse en chaleur de l'autre,et on voyait s'ils pouvaient se rejoindre'

J'ai pris note aussi de quelques habitudes qui me semblentdater de l'époque de la.domination romaine dans le pays;mais auparavant j'ai. à signaler une coutume des Alavais quirappelle une coutume des anciens Irlandais. Quand un

1. Lagrèze, Naôarre, II, 382. Fueros de Nacanre, lib. V, tit. VU,c. xx. Fueros d'Aragon en latin dit que le voleur « Duci faciat abuno ostio civitatis usque ad aliud ». Ceci me semble aussi le sens duFuero de Nacarra en espagnol.

Ancient Lacvs and Institutions of Wa!es. Commis!iiouners of Re-cords. London,1841. Vol. I, p. 577. The Dimetian. Code XXXII, olcats.

The Worth of a cat-that is killed or 8to,len: its head is to be putdownwards upon a clean even fioor, with its tail lifted upwards, and

thus suspended, wbilst wheat is poured about it, until the tip of itstail be covered, and that is to be its worth if the corn cannot be had,a milch sheep, with her lamb and wool, is its value if it be a cat thatguards the king's barn.

The Gwentian Code XX. The law of a Cat: p. i29.Whoever shaH kill a cat that guards a houseand a-barn of the king,

or shall take it stealthily it is to be held w.ith its head to the ground,and its tail up, the ground being swept, and then clean wheat is tobe poured aboud it, until the tip.of its tail be hidden and that isits worth.

2. Lagrèze, Nacarre, Il, 3â4-5. Fueros de Naoarre, lib. VI, tit. l,c. 12. « Pongan una asna calient dentro.

»

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maire (sindico) était élu par les citoyens de la ville de Vito-ria, après avoir fait le serment ordinaire comme les autreseonseillers, il en faisait un autre, ct bien solennel, en dehorsde l'église de Saint-Michel"à l'endroitoù l'on gardait le cou-telas de Vitoria (el machete Vitoriano).Dans une petite niche,creusée dans le mur, derrière l'église, il y avait un coutelasde bois, sur lequel, en présence de tout le peuple et de tout leconseil, il jurait qu'il consentait à ce que la tête lui fût cou-pée avec un coutelas semblable, s'il venait à manquer à sesobligations, et quand il avait fini, il baisait le coutelas auxsons dela musique. Cette cérémonie terminée; le secrétairede la municipalité se levait; et lisait à haute voix les pou-voirs que la ville donnait au syndic pour le maintien de sesdroits et de ses privilèges 1 Un des derniers auteurs qui ontécrit sur les Celtes parle «. d'une dévotion nationale à l'épée(de bronze),une arme que les anciens Irlandais considéraientcomme inspirée, et capable entre autres choses de donner undémenti au parjure' ». On peut aussi comparer un passagede Tite-Live, lib. 1, c. 243.

1. Historia de la Legialacion, Mariohalar' y Manrique, vol. Il.p. 522, 2e édit. Madrid,1868.

2. Celtic Britain, by J. Rhys, London, S. Y. C. K. 1882, p. 258.A national devotion tothe sword, a weapon which the ancieut Irish

regarded as iuspired, and capable, among other things, of giving thelie to the perjurer. » Voyez aussi Hiatomical Papers relating to thedacobitePeriod, 1699-1750, edited by James Allardice. L.-L. D. 2 vol.Aberdeen. New Sualdin~ Club. Quoted from Edward Burt.

Report, 1724.

« This they take upon aDrawn Durck or Dagger,whicb they kiss in a solemnmanner, and the PenaltY'declared to be due to the saidOatb, is, to be, stabbed withtbe same Dagger. »

Letter XXIVThis oath they taka upona drawn dirk, whieh t6ey kissin a solemn manDer: consenting,if ever they prove perjured,to be stabbed with the sameweapon, or any other of thelike sort.

Quoted in TheAthenaeum. N° 3685, p. 753. Juue,l1, 1898.3. Cf. aussi lib. XXI, c. 45. Eaque ut rata scirent fore,

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A Saint-Jean-de-Luz, pendant la cérémonie nuptiale âl'église, les époux sont couverts d'un long poêle et se passentdes mains l'un de l'autre un grand pain. Ceci me parait être

une réminiscence de l'antique cérémonie de la confarreatio,l'un des trois modes antiques du mariage romain. Un de nosmeilleurs- légistes anglais, parlant des unions irrégulièresqui se généralisèrent sous les empereurs, ajoute « Ce futentre ces mariages purement nominaux, si de telles unionsméritent le nom de mariage, qu'une réaction éclata sous l'in-fluence du christianisme il est probable que le désir de re~prendre l'ancien rite de la confarreatio eut une grande in-tluence sur les doctrines de l'Église primitive'. 011 est curieux

de trouver ce rite conservé dans un coin de la France jusqu'à

nos jours mais il est encore plus curieux de pouvoir cons-tater que la pratique de l'augure persistait encore en 1611 àLogroiio, en Navarre, et cela parmi les pèlerins à Saint-Jacques. de Compostelle et dans une église chrétienne. Levoyageur polonais Jacques Sobieski, qui s'y rendait cetteannée-là, dit, en effet « Il y a une église dans cette ville il

l'entrée de laquelle on élève des poulets, ou pour mieux diredes chapons blancs, dont le poulailler est une cage de laiton,qui est dans un coin. Les voyageurs superstitieux, surtout

agnum Jæva manu dextero silicem retiuens, si 1aUeret, Jov em cæte-.rosque precatus deos, ita se mactarent quemadmodum ipse agnummaetasset, et secundum precationem caput saxo elisit.

1. It was agaiust this merely nominal marriage,if so transienfa con-nectiou deserve at all the name, that a violent reaction set in underCbristiauity: and it is probable that a desire to revert to the old con-farreal form had a material effect upon the teachings of the earlyChureb. Tha A.an Houaehold, by W.'H. Hearn, p. 471 (Long-mans, London, 1879/. Voyez aussi Fustel de Coulanges, La Citéantique, p. 45, 8e édit.1880, note 3, p. 46. Pline, HiBt. Nat., XVIII,:i!10 « In sacris nihil religiosiusconfarreationis vinculo erat, novæqueuuptæ farream praeferebant etc., p. 48. » On conçoit même qu'unetelle union fùt indissoluble, et que le divorce futpresque impossible. »

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les Français et nous autres Polonais, se pressent autour de

ces oiseaux, croyant qu'en mettant les miettes de pain aubout des bâtons de pèlerinage et en les introduisant dans lacage, si les poules ramassent les miettes et les mangent, onarrivera à' Compostella sans aucun accident mais si, aucontraire, elles refusent d'en manger, les pèlerins croientqu'ils mourront très certainement pendant le voyage'. »Selon le comte de Laborde, on élève et on conserve des oiesdans le cloltre (de l'église cathédrale de Barcelone). Unerente est affectéeà leur entretien. On dit que c'est une fonda-tion assez ancienne.

Je laisse de côté de nombreux faits semblables. Je vaisfinir par quelques mots sur la portée ethnologique des faitsprécités. Rien n'est plus vrai que cette observatio'n de M. Fr.Tubino par sa position géographique à l'extrémité de l'Eu-rope, et par le fait que le flot des peuples avançant sans cessevers l'Occident ne pouvait pas pousser plus loin, l'Espagneest devenue nécessairement le théâtre d'un véritable remousde peuples, le réceptable de presque toutes les races qui onttraversé l'Europe dans l'antiquité. Penser qu'à un momentdonné la Péninsulefut occupée par une seule race, une seulenation quelconque, c'est se tromper absolument 3. Dans notrepetite promenade à travers les siècles, nous avons rencontréles vestiges des races et des institutions les plus diverses. Ily a non seulementdes Ibères et des Celtibères, des Romains,des Goths, des Arabes, et surtout les races celtiques qui

1. Viages de Extrangeros por Eapanas y Portugal en los siglosXV, XVI, XVII. Coleccion de Javier Liske, Madrid, 1878, p. 242.

2. ltinérniru tlea~riptifde l'Espagne,par M. le C'·Al. de Laborde,tome 11, p. 45, note édit. (Paris, 1827). Voyez'aussi A Hand-book,orTra~ell,ers in Spain,.by R. Ford, 3t édit. vol. J. p. 414 (London,1855).

3. Los Berbères en la Peninsula, par 3. -M. Tubino, p. 86. Madrid,1876.

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forment encore aujourd'hui, je crois, la base des populationspyrénéennes mais nous y avons trouvé des institutionsidentiques avec celles des Slaves méridionaux. Dans cettepartie de l'Espagn~, au moins, entre la Catalogne et Sant-ander, on a beaucoup exagéré l'influenceet l'action des Goths.Les Celtes ont beaucoup influé sur la législation, les institu-tions et les moeurs mais il faudra encore bien des études

pour qu'on puisse débrouiller avec certitude le problèmeethnologique de la Péninsule. C'est par notre patience etnotrezèle que nos fils ou petits-fils y pourront arriver car lasolution définitive ne sera pas trouvée de nos jours.

Il y a encore une autre question plus pratique et d'uneplus grande importance actuelle. En observant les dive-régimesde la propriété agricole en usage sur les deux versants

des Pyrénées, je me suis souvent demandé quel en est lemeilleur. Depuis à peu près vingt ans j'ai interrogé presquetout le monde, propriétaires, fermiers, tenanciers, métayers,

paysans. La variété des conditions de la culture territorialeest beaucoup plus grande dans notre région qu'on ne le croitgénéralement. Mais je n'en trouve aucune qui ait une supé.riorité définitive et absolue sur les autres. J'ai toujours re-marqué que les personnes qui en savent le plus hésitent leplus à donner une réponsedéfinitive. Je doute que le paysanpropriétaire, dans la forte compétition d'aujourd'hui, puissevivre seulement .du produit de son morceau de terrain labou-rable, comme auparavant. Ce sont ses droits, ou privilègesde pacage, de fourrage, de coupe de bois, de châtaigneraies,

etic. etc., tous restes de l'ancien régime communal, quiseuls lui permettent de continuer la lutte avec succès. C'estaussi l'opinion des commissionnaires anglais dans leur rap-port sur la condition des paysans du Nord de l'Écosse.~`

Le rapport de la Commission nommée en 1883 par le

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Gouvernement britannique, pour étudier la condition desCroflers et Cotlars des Highlands et des Ues occidentales del'Écosse, révèle un état de choses très semblable à celui dontje parle ci-dessus mais avec cette,différence essentielle, queles vieillés coutumes et les anciens droits des petits cultiva-teurs du nord de l'Écosse, n'ont jamais été consignés dansaucun code légal, ni reconnus devant les tribunaux judi-ciaires de la nation. La Commission conseilla au Gouverne-ment de reconnaltre en partie les anciennes coutumes, et dedonner force de loi aux réclamations de la population et auxanciens droits des petits fermiers et des paysans, comme il

a été fait de tout temps dans la région pyrénéenne.Il est curieux de remarquer que souven les mêmes termes

sont employés dans les Pyrénées et parmi les insulaires dunord de l'Écosse. Le terme le plus usité par l'assemblée com-munale dans les Pyrénées est bé,~ial, besiau, etc. en languegallique, c'est nabac, que les commissionnaires traduisent

en anglais par neiJhbotcrliness, vecinage. Les assemblées setiennent en plein air, au Cnoc-na-Comhairleou au Clachna-Comhairle « colline ou pierre du conseil » tout à fait commele Bilzaar du 'Labourd, qui se réunissait dans le bois deCapitolo-harri. « pierre du Capitole », à Ustaritz, comme les

cours du Noyer, de l'Orme, etc., du Hoom d'Aucun, dansles Pyrénées gasconnes. Les mots empruntés au latin sontsouvent identiques baïle, maor (major, maire), conslable(connétable), dont l'office et les devoirs sont tout à fait sem-blables à ceux du cosliero de Navarre. Ces points de ressem-blance et d'autres qu'on pourrait signaler encore ne doivent

pas s'expliquercomme le résultat d'uneparenté entre les deuxpeuples, mais il convient plutÔt, croyons-nous, d'y voir la

preuve que des conditions analogues de civilisation donnentnaturellement naissance aux méme[ll coutumes, au mêmerégime général. à des mœurs semblables. Il faut se rappeler

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toutefois que dans la plus grande partie des Pyrénées, aussibien que dans les parties occidentales de l'Écosse, le fond dela population est d'origine celtique.

Pendant la Révolution française les propriétaires à plu-sieurs reprises faisaient des efforts pour accaparer ces droitsà eux seuls; mais ils furent déjoués par le bon sens des mu-nicipalités villageoises. Ainsi nods lisons sur les registres deSare, an VI, 24 messidor., « que chaque propriétaire oufermier aura droit à cinq têtes de menu bétail etunedes grossespar arpent, sans préjudice de la faculté accordée à tout indi-vidu non propriétaire ni fermier dans ce canton, mais chefde famille domicilié en icelui, de conduire au pacage com-munal six bêtes à laine, une vache avec son veau, conformé-ment à l'art. 14 de la susdite loi »

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LE MOT «RÉPUBLIQUE »

DANS .LES PYRÉNÉES OCCIDENTALES'

Le mot république est de vieille date dans nos contrées. Iln'a pas toujours servi à désigner une même organisation del'État.: Sa signification politique a été diverse, presque op-posée, et contraire, à différentes époques. Nous la trouvonssouventcommedésignationd'États politiques qui lie furent pas

érigés en républiques dans le sens qu'on donne ordinairementà ce mot de nos jours.

Dans les quelques observations que j'ose mettre sous vosyeux, et dont tout le premier je suis prêt à admettre l'insuffi-

sance, je ne puis, en aucune façon, songer à faire l'histoiredes républiquesdes Pyrénées-Occidentales. Il m'a été impos-sible de faire pour cela Jes recherchesnécessaires je ne pos-sède ni le savoir, ni la science, ni les ouvrages, ni les docu-ments les plus indispensables. Je n'ai fait usage que deslivres que je possède et des quelques notes et documents quini'ont été fournis par l'obligeancedemes amis~. Jelaisse aussi

presque complètement de côté les républiques municipales,les grandes villes du Midi, qui conservèrent si longtempsdans leuradministration et dans les noms mêmes de leurs ma-

1. Bulletin des sciences et des arts cie Bayomte, deuxièmesemestre1888, p. 157.

2. Parmi ces amis je dois énumérer la dernière et la présente mu-nicipalité'de Sare, et surtout M. Gustave Leremboure, son maire, etl'adjoint actuel M. Mendiboure, qui m'ont fourni de précieux papier9et dticumenta.

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gistrats unécholoiritaindelamajesté de la grande Républiquede Rome.

C'est un fait bien cQnstaté que les Romains donnaient le

nom de république aux ciaitates et municipia qui leur furentsoumis. Les inscriptions latines publiées par Hübner dansle vol. II du grand Corpus InscriptionumLatinarumnousmontrent un grand nombre de ces républiques en Espagne.Il y a la Respublica Ccrsaraugustana ( Saragosse). RespublicaIlerdensis(Lerida), RespublicaPompelonensis'(Pampelune),pour n'en citer que quelques-unes dansla région pyrénéenne.Les officiers, les simples citoyens s'honoraient du nom deleur république. Pour nommer ceux d'une seule ville ou ré-publique, Taraco (Tarragona), parmi les ins~riptions., entre4189 à 4 247, il y a une vingtaine de monument' funéraires

sur lesquels le plus grand éloge du citoyen défunt est qu'il arempli « tous les offices de sa république » Omnibus in re-

pubtica bene honoribus functus. Si je ne fais mention desgrandes.villes romaines du Midi de la France, c'est seule-ment parce ,que le fait vous est bien connu bien des petitesvilles du Midi ..conservèrentaussi fort longtemps cette appel-lation co~me Respublica Lactoratenaium (Lectoure) Dans

ces villes, ces républiques, nous trouvons une copie fidèle dela Rome républicaine, aussi bien que celle de la Rome im-périale. Il y a le senatus, le populus, le plebs, les consuls, lestribuns, aussi bien que les curiones, curatores, defensores etmagistrats de l'Empire.

Mais toutes ces villes restent un peu en dehors-de la limitede mon sujet. Aucune grande ville n'est située dans une gorge

1. Archiaes de la ailledo Lectoure, par P. Drouilhet.Auch, 1885, p. 4.Pour des faits semblables en Dalmatie, Dalireatia, the Quarnero andIQtrici by'I'. G. Jackson. 3vols. in-8·. Odord, Clarendon Press,1887,

pp. IX, 15, 16,19, 116, note. Vol. Il, 91-93. Saloma,« Deus noster, pro-pitiul!I esto Reipublicae Romana ».

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ou une vallée des Pyrénées, et encore moins sur un des pla-

teaux ou des sommets. Mais quoiqu'il n'y eût aucune villeconsidérable, aucun municipium rorrianum, il y avait unefoule de républiques; de républiques plus véritablement répu-bliques dans le sens de démocratie et d'autonomie, d'une ad-mjnistràtion plus libre, plus indépendante que celIJd'aucune

de ces grandes villes républicaines, qui nonobstant leur titre

et leurs fôrmesaâministratives, furent trop souvent écrasées,d'abord par la main de fer de l'Empire romain, et ensuite parcelle des conquérants barbares.

En commençant l'étude de cetteqqestiqn, on peut à peineretenir un sourire d'incrédulité en. entendant ce grand mot

/( république » affecté à des communa~tés si petites et si

pauvres, et dont le rôle a été si mince dans l'histoire despeuples. Car il ne s'agit pas ici de petits États comme ceuxdela Grèce antique, qui rachetaient lamodicitédeleurétendueet le petit nombre de leurs citoyens par la grandeur de leurstriomphes, si vastes et si beaux, dans lé monde littéraire etartistique. La Grrlce, quelque petite qu'elle fût, reste toujoursà la tête de la civilisation du monde antique. Mais ces petitsÉtats, cespauvresrépubliquespyrénéennes,quoiquel'étenduede leur dimension territoriale dépassât souvent celle des plusgrandes républiques de la Grèce, marquèrent à peine dansl'histoire même de la nation à laquelle elles se'rattachaient;sauf peut-être dans le cas des provinces basques espagnoles,elles n'ont contribué en rien au progrès de l'humanité'. Ellesnesont anoblies par aucun monument de l'artou delapoésie,et ont été lettres mortes au point de vue 'scientifique. Elles

1. Larrameudidans son chapitre « De los Estados y juntas generalesde Guipuscoa compare les j untas de Guipuscoaavec le conseil am-pbictyonique des Gre~s. Coroya/'ta de Cuipùa;oa, p. S3.3J (Bar-celonal, 1882, et San Sebastian, 1897. Vols 6.7 de la Biblioteca se.lecta de Au'ores' Vascongados).

8

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sont restées, pendant les siècles de leur existence,. à peu près

ce qu'elles étaient à leurorigine: des communautéde pasteurs,simples, sans grandes ambitions, sans littérature et sans art,parlant pour la plupart des idiomes qui ne sont jamais entrésdans le domaine de la littérature. Néanmoins, malgré oupeut-étre ,it cause de leur insignifiance, elles ont conservé

leurs libertés, leur indépendance, la libre gestion de leur ad-ministration intérieure, leur autonomie, longtemps après qued'autres communautés qui, beaucoup plus grandes et plusambitieuses, avaient déjà perdu les leurs. Même sous lagrande Révolution française et la législation modernequi ontdonné ou rendu la liberté perdue à tant d'autres communeset terres de France et d'Espagne, rien n'a été ajouté; aucontraire, il a été plutÔt attenté aux franchises et aux privi-lèges de ces patits États. Comme le dit M.. Pierre Barberen:

« Seul, le niveau révolutionnaire a tout. confondu dans lemême écrasement. Il ne lui a pas suffi des' privilèges sei-gneuriaux reniés par la noblesse elle-même dans la fameusenuit du 4 août, Tout y a passé, même ces privilèges popu-laires qui avaient parsemé la France féodale comme d'autantd'oasis à demi républicaines. où l'historien découvre, nonsans surprise, toutes les traditions de la véritable liberté' »

Le mot même « république » fut proclam6bienhautdansles Pyrénées-Occidentales aux 'siècles passés. Nous ytrouverons plus d'une fois des anomalies étranges« Dansquelques vallées, la féodalité et la démocratie semblaient.avoir passé un pacte ensemble, et la liberté populaire vivait

en bon accord avec le pôuvoir seigneurial'. » Même le droit

1. Reoue de Béarn, Nacarre et Landes, tome I, p. 479, Paris, 1883.2. Histoire du droit dans les Pyrénées, par M. J.-B., de Lagrêzé,

p. 76, Paris, 1867.Introctuccion â la historia natural y â la Geografia fisica de Es-

paiia,por D. Guillermo Bowles, Madrid, 1775, p. 294 Il Llaman,los

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divin des rois et l'absolutisme le plus pur a étésoutenu jusqu'àla mort par des républicains dans les Pyrénées. Avec la mé-moire des deux guerres carlistes, encore toutes fralches ettoutes récentes, on peut s'étonner d'apprendre que la qualifi-cation de république a été de longue date usitée et acceptée

par les provinces basques. Mais le fait est exact. Le mot ap-parait même dans les décrets et ordonnances des rois les plusdespotiques de l'Espagne.

Les ordonnances célèbres de Chincilla, faites entre les rois

Ferdinand et Isabelle" 24 mars 1489, furent les décrets lesplus opposés aux libertés de Biscaye qui, jusqu'alors,avaientété acceptés par cette province. Il reste cinq copies ou exem-plaires de ces ordonnancesoucapitulado: 10 aux archivesdeSimancas 20 une minute du sceau royal dans les mêmes ar-chives 3° deux exemplaires à Bilbao 40 un qui fut déposédans les archives dé Valladolid. Dans les deux premières,qu'on peut appeler royales,onlit regimiento:dans lés autres,celles de Bilbao et de Valladolid, on lit rréhublica'. Uri telfait ne peut pas être un simple accident de copiste ou de

Vizcainos Répriblicas à las distintas jurisdicciones de su Provincia,las quales, â excepcion de una Ciudad et pocas. Villas, se componende barriadas dispersas y casas solitarias que se han situado segun lacomodidad de los terrenos y de las aguas. »

1. Historia de la legislation r~ recilationesdeldern.clio cioil de Espan`a,

par Amalio Marichalar, marqués de Mootesa, y Gayetauo Maorique.Fuero de Nav&rra, etc., p. 294 sq. et p. 586 sq. 2& edicioo.Madrid, 1868.

Cf. S.-Jean-de-Lua, par Léonce Goyteche,1883, p. 55, note: « Ce pays,froutière de France et voisiu de l'Espagne, était républicain tout lemonde était maitre. »

« Le 30 de J unio de 1709 se da cuenta de una carta de la Provinciaconvocando a sus Republicas â una Junta particular, etc. » Archivode Zumaya. Euskal-Erria, 10 Junio 1893, p. 490.

Cvrogi·aPia o descripcion general de la muy noble y na u~ lealprocincia de Guipûxcoa, por el R. P. Manuel de Larramendi, S. J.128°. Barcelona, 1852, p. 99, 83, 89, passim. Fueros de Guipuzcoa,tit. IX, cap. 11.

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scribe quelconque, mais il fait voir, au contraire; une véri-table, distinction dans la manière de regarder le gouvernementde la province par les gens du roi et par les Basques eux-mêmes. Le R. P. Larramendi, jésuite, l'auteur du Diction-naire trilin,gue et d'El rmposible vencido, écrivant en 1756,n'hésite pas à donner le nom de république à la province deGuipuzcoa: « Guipuzcoa fué siempre républica de libre do-minio, » et aussi aux petites confédérations,hermandades, et'vallées de la province. « De tiempos antiguos hay una estre-cha union y hermandad entre todas las republicas de Gui-puzcoa para atender mejor al servicio de Dios, del rey, y àla conservacion dela provincia 1. » En Navarre, les rois eux=mêmes, dans leurs décrets, font constamment usage de cemot. Il revient sans cesse dans les délibérations des Cortéset même dans le serment du roi. Pour n'en donner qu'unexemple: dansJesCortèsde 1757, ledécretduroi Ferdinand VIdé Castille, I II de Navarre, est conçu dans ces termes.« Palaisde Pampelune, 10 juillet 1757. L'urgente nécessité de ré-pondre avec de prompts remèdes à la condition malheureusede plusieurs républiques, » etc. Il Et les Cortés lui répondent:« Que la création de nouveaux offices et gouvernements dansles républiques s'oppose aux lois3. » Dans les formules duserment de-, l'assemblée des Cortés de 1766, sous Carlos IIIde Castille et VI de Navarre, nous lisons « Que la coutumedôitétre observée, que les députés du Bras militaire, qui sontconcurremment employés par diverses républiques du Brasdes communes'. » Nous voyons par ces citations que le mot

1. Corografia, p. 91, et surtout p. 273.2. Quaderno de las leyea y agraoios reparados en lap Cortés del

an'o cie 1757, Pamplona, imprenta de D. M. A. Oomecb, 1758, p. 87.3. IGid., p. 93.4. ~Quaderno de las Cortès de 176~-1766. Pamplona, imprenta de

Pascal Ibaüez,17ti6, p. 7 « Que h~a de obser~arse la costumbre, de que

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r~publique fut donné par les rois d'Es'pagne.non seulement àchacune de ces provinces, mais aussi à quelques commu-nautés particulières de chacune d'elles.

Si on me demande quelles furent ces républiques particu-lières, je ne peux pas les énumérer toutes. Je crois que toutesles petites confédérations, hermandades (ante iglesias en Bis-caye), composées des habitants et des bourgs d'une vallée,toutes les associations de villes, « cinco villas'»), dont il y enayait plusieurs, et même, comme nous le verrons plus tard,de simples villes et paroisses, se donnaient officiellement cenom de république.

Nous avons parlé jusqu'ici du côté espagnol des Pyrénéesseulement. Existait-il donc des républiques sur le versantfrançais des Pyrénées? Il y en avait aussi bien de nom quede fait. Mais nous devons faire remarquer d'abord une dis-tinction entre les républiques des deux royaumes. Lesrépubliques espagnoles se rattachaient à de grandes fédé-rations de provinces en semi* indépendance' de la couronned'Espagne, ou bien elles faisaient partie d'anciens royaumesconstitutionnels qui avaient conservé une 'plus grande iodé.pendance à l'égard de la royauté que les autres provinces duCentre et du Midi de l'Espagne. Sauf pourla Basse-Navarreet le Béarn (à un certain degré), ce n'était pas le même casen France. Les districts dont nous allons parler furentaussi

los vocales del Biazo militar, que concurren empleados por varias re-publicas del Brazo de universidades. »

Dans le Fuerode Guipuzcoa le mot « Republicarevient constam-ment, soit pour la Province, soit pour les bourgs ou pour les vall~es

« Las Republicas ».« hela ordencon que han de votar las Republicas referidas en las

Juntas Generales, y ParLiculares. » Tit. IX, cap. Il, p. 111. Nuevarecopilacion de los Fueros de Guipuzcoa reimpresa en Tolosa perAn-dres de Gorosabel, afio de 1867.

Dans le Proemio la Proviuce de Guipuzcoa elle-méme se dit « tauIlustrissima Republica ».

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'Strictement incorporés dans' le royaume que le reste de laFrance. La conservation de quelques petites républiquespendant le moyen âge et jusqu'à la Révolution fut due prin-cipalement à leurposition stratégique et topographique. Par-tout, dans le royaume de Béarn, dans le comté de Foix etailleurs, partout où les vallées sont ouvertes par la nature,où il n'y-a pas des positions et des défilés exceptionnellement

propres à la défense, nous trouvons les abus et les oppres-sions on de la féodalité ou du despotisme royal, aussi fré-quents que dans le reste de la France. Ce n'est que dans lavallée d'Aspe, avec ses deux défilés presque inexpugnablesdé l'Escot et de l'Esquit, dans le petit plateau presque ina-bordable de Goust, au-dessus des Eaux-Chaudes, dans lesvallées de Luz et de Barèges,de Saint-Savinet de Cauterets,défendu par des gorges étroites à partir de Pierrefitte, quenous trouvons les habitants portant avec fierté le nom de ré-publique. J'avoue que je fus longtemps moi-même avant. depouvoir croire à la véracité de ces faits. Je croyais que cen'était là qu'une prétention romantique, qui ne reposait suraucun fondement sérieux d'histoire. Mais des études posté.

rieures m'ontfait voir ce qu'il y avait de réel dans ces appel-lations.Les vallées de Barétous et du Roncal ont fourni le sujet

d'une série d'articles par M. Axel Duboul, dans la Reane deBéarn et de Na~arre. L'auteur constate que' « les Baré-tonnais ont joui~ pendant des siècles, d'une véritable autono-mie administrative,commela plupart des populations établiessur les deux versants des Pyrénées-Occidentales. » Cette au-tonomie date au moins de 1221. Encore: « la vallée de Ron-cal formait une sorte de petite république indépendante ausein du royaume de Navarre et plus tard de l'Espagne 1.

1. Recue de Béarn, Navarre et Landes, tome I, p. 234.2. Ibid., p. 237.

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Affranchissement et exemption ,de tout imp6tet de tout servageà l'égard du suzerain, décentralisationabsolue dans sa propreadministration telles étaient les bases premières de son or-ganisation. Chaque ville avait son autonomie,et c'était seule-ment lorsqu'il y avait lieu d'examiner ou de discuter desquestions intéressant toute la vallée, que les représentantsdessept paroisses se réunissaient à Roncal, où furent déposéesles archives de ce petit État. » La vallée d'Aspe formaitaussiune confédération, avec les privilèges les plus étendus etavec d{!ux assemblées ou caphoulhs des jurats, une des as-semblées de la vallée supérieure qui se réunissait au delà dela Pène d'Esquit, près du village de Cette, et l'autre à l'égliseaujourd'hui détruitede Saint-Jean de Laché, au bord du gave,en face d'Accous. Les habitants avaient pleine consciencede leurs droits et de leur position vis-à-vis la couronne deFrance. Dans une déclarationgénéraledes libertés de la valléed'Aspe, faite à Pau en 1692, nous lisons « Anciennement,.la

dite vallée étoit une petite république indépendante de toutesouveraineté, elle se conduisoit par des lois et des cou-tumes qu'on n'a jamais empruntés (sic), non pas méme

depuis qu'elle s'est donnée' volontairement au seigneur deBéarn, etc. »

M. Bascle de Lagrèze, dans sa Monographie de Saint-Saain de Laoedan', et dans son Histoire du Droit dans les

1. Voyez le livre intitulé: Se;lucnselous PricileclJcs, I~i~anqueses etLiLertats dônnats et autreiats auas Vesins, blanans, Hczbitans delaMontai~ne et Vald'Aspe, par· lousSeir~neurs de Béa~·n, etc., etc. APau, chez JérÔme Dupoux, imprimeur et marchand librait-e, prochel'Horloge. QI'. M DC XCIV. Comme ans si: Chronique du Diocèse et clu

pays d'Oloron, par M. l'abbé Menjoulet, tO~lle l, p. ~2. et note (0t.o-ron, 1~4).

2. Monognaphie de Sai.itt-Saoü~ ds~ Laocdan, par Gusiave Basclede Lagrèze, Paris, Didron, 1850, p. 110-114 et notes; !-listoirc duDroit dans les Pyrénéca, p. 77.

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Prdrénées, nous donne la preuve que.les habitants des com-munes de la vallée de Cauterets se donnaient déjà le titre derépublicains au ~IVè siècle..Les amendes.et les.droits sei-gnèuriaux se partageaient en parties égales entre.I'abbé et larépublique. Àu point de vue religieux,, la communauté senommait Pascal; au point de vue politique, République.Si le viguier ne faisait pas son devoir « Pagara un escut petitaplicable la meitat au signor abbat ou ,son vi cari et l'autre à

la républica. ,» Ainsi, pour l'introduction des bestiaux dansles lieux défendus, l'amende allait de moitié à J'abbé « etl'autre meitat per .la reparation de la républica d'en loc ».Cette république avait aussi ses assemblées législatives ou-vertes à tous et à toutes, même à des femmes'.

En dehors des confédérations et communautés qui s'arro-geaient le nom de république. il y en avait beaucoup.:d'autresqui possédaientdes privilèges eijouissaient do libertéspresqueégales. M. Bascle de Lagrèze a imprimé, parmi les piècesjustificatives de son Histoire dcc Droit dan.s les Pyrénées,les fors et coutumes d'Azun, écrits le 2~ juin 1497, « à la re-questa de tot 10 poble d'Assun o la mayor. partida e la plus

sana, congregate aiustat en 10 loc al'eratlo Hoomd'A,ucrcnqn.

On y voit que le val d'Azun avait aussi sa « cortde parla-ment3 » avec des droits presque égaux..à ceux des valléesd'Aspe et de Roncal. Les fors et coutumes de Guiserix ontleurs trois consuls élus chaque année et un baile « tres cos-sos » « 10 baile» avec pleine juridiction; ces fors furent jurés

par Joannes de Labarthe, 5 juin 1405 mais ils sont évidem-ment antérieurs à cette date'.

1. Mono9raphis de Sxint-Saoin, p. 113, note; Hi.qtoire du Dnoitdans les Pyrénées, pièces justificatives, Vil, p. 494.

2. lbld., pièces justifjeat1ves, I, p. 453.3. Ibid., p. 431.4. Ibid., p. 455 et 467.

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On peut se demander en quoi les libertés et privilèges de

ces communautés pyrénéennes surpassaient ou différaient de

ceux octroyés par les seigneurs féodaux à d'autres commu-na~tés ou communes rurales. Il est bien connu qu'en pleineféodalité les vassaux, les habitants de bien de communes etde paroisses avaientle droitde seréunir,d'élire leurs propresofficiers, consuls, prud'hommes, jurats,' et que l'élection enfût libre et faite presque dans les mêmes conditions que nousles trouvons dans les républiques dont nous avons parlé. Lesconsuls et jurats avaient droit de justice et 'd'administrationinterne, et le seigneur faisait serment d'observertoutes ceslibertés et coutumes'. il n'est pas difficile de montrer que les

communautés dont il s'agit dans les Pyrénées-Occidentalesavaient des pouvoirsetdes attributions beaucoup plus étendus

que les plus libres des communes féodales. Nous verrons toutceci beaucoup mieux, je crois, si nous considérons les diversesattributions ou fonctions du gouvernement suprême; c'est-à.dire 1° le pouvoir armé, le droit de faire la paix et la

guerre 2° la législation et l'élection aux assemblées Iégisla-

tives, avec leurs droits de taxation, de douane, de frappermonnaie, etc. 3° la justice et'la police; 4° culte et éduca-

tion. Dans la manière dont ces communautésont exercé cespouvoirs -nous trouverons la réponse à notre question

Les provinces basques espagnoles et la Navarre avaientle plein droit de faire des levées de troupes. Les rois d'Es-

pagne n'y pouvaient faire aucune levée sans le consentementexprèsdes provinces. Ces troupes furent toujovrs commandées

par des habitants des provinces. Elles ne devaient pas sortir

des provinces avant que le subside ou payement des soldats

ne leur fût assuré pour trois mois.

1. Chartes de Coutumes inédites de la Gas ·ogne Toulousaine,publiées par M. Ed. Cabié, Auch, 1884. Coutumes de ~Dauar, A. D.

1253, p. 87-92. Cbuturnes de Thil et Breta~, A. D. 1246-1256, p. 78-79.

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Sur --1l~rsant français des Pyrénées, en temps de guerre,lè- Labourd tou=issai seulement un corps de mille hommesau toi pour la d~e du pays. Ces hommes étaient levés,leurs officiers élus par les-abbés et jurats de chaque paroisseet comrriulie; les abbés étaient chargés seulement de choisir« MR gens très propres » et qu'ils « préférerontceux qui ontservi1»..

Dans la déclaration du 28 septembre 1693, il est dit que« les habitans'» de la vallée d'Aspe ont le droit de faire la

garde de .la personne du souverain; ils ont le droit d'entrete-nir les maisons de l'ourtalet et de Sb.int-Julien pour l'usage

de ladite vallée.et pour le service de Sa Majesté; ils ont aussile droit de maintenir pendant l'été des corps vde garde aux'frontières et'ports, pour empécher les incursions~$ès Espa-

gnols et de n'être point obligés de laisser sortir la compagniede ladite vallée qu'à touteextrémité. Ils ont le droit de chasse

1. Inoentaire et description des prioilégeQ, reglemens, impositionssurchargea, autres acantures et titres qui regardent le ~eneral ethâGitan$ du pais de Labourd, après toutes les déeoucertea qu'on

en a pu faire, J'aits en l'année !Tl3. A Bayonne, chez P. Fauvet,1713jp. 7. Lettre~ du 2 sept. 1568, p. 35, mai 1674, 14 juin 1692,

Sur le versant espagnol des Pyrénées-Orientales nous trouvonsde bonne heure ces petits États autonomes. « Ils arrivèrent à consti-

tuer un véritable État politique indépendant, avec le nom de Princi-patHé de Catalogne, et ces territoires conservèrent pendant 10D6't~mps

avec plus ou moins d'extension, non seulement une législationpropre, distincte de celle en vigueur dans le comté de Bârcelone,mais un régime réellement autonome, comme Lerida, Tortosa et lavallée d'Aran. »

« Llegaron a coustituir un verdadero Eslado politico independientecon el nombre de Principaclo de Catalun'a, los cuales territorios con-servaron no ob3taute durante largo tiempJ, con mas Ó menos exten-sion, no solo una legislaci6n propia, distinta de la vigente en el Con-dado de Barcelona, sino uu régimeu verdaderam'3nto autonornico,

como l.erida, Tortosa, y el Valle de Aran. » Cortés de los antiguosReinos dc Arac~ôn, etc. -Observaciones preliminares, p. 3.,

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et de port d'armes dans toute saison. Ils ne pouvaient êtreobligés de loger aucuns autres gens de guerre'

Comme preuve que les provinces basques espagnoles,réunies et séparémént, avaient la faculté de faire des traitésde guerre et de paix avec leurs voisins et même avec l'An-gleterre, je n'ai qu'àvous renvoyer à la collection de Fccdera,Conae.ntions, LiEterc~, eto., de Rymer, publiée par le RecôrdOffice du Gouvernementbritannique au livre de D. Pablo deGorosabel Memoria sobre las guerras r~'iratados de Gui-pu,acoa en In,4lelerra en los siglos XI V y X V (Tolosa,1865).Ainsi que le disent.les sl~s Marichalar y Manrique « Quantà l'indépendance de las provincias vascongadas envers Cas-tille, cette indépendance est reconnue même dans les traitésinternationaux, comme on peut le voir par l'examen seul dela collection diplomatique de Rymer. » Ces auteurs citentencore le traité du 9 mars 1482 fait entre « la junta generalde Usarraga (Guipuzcoa) et l'Angleterrel » Même auXVIIIe siècle, pendant les guerres entre la France et l'Es-pagne dans les Pays-Bas, des traités de paix et d'amitiéfurent faits entre la province française de Labourd et cellesde Guipuzcoa y Vizcaya. avec complète indépendance desroyaumesde Castille et d'Aragon, qui continuèrent la guerre:Même dans le traité d'Utrecht, les intérêts des provincesfurent sauvegardés à côté de ceux du reste de l'Espagne3.

Si les autres petits États ou communautés n'avaient pas ledroit de faire des traités internationauxsans le consentementou l'intervention du souverain ou roi, ils avaient certaine-ment, et ils en usèrent largement pendant plusieurs siècles,le droitde faire des traités de paix, de commerce, des conven-

1. Seguense lous pnioileclges, p. 102-121. Cette déclaration de 1693n'est que le sommâire de tous les documents de date antérieure:

2. Histonia de la Legislacion, 1. c., p. 353.3. I bid., p 265.

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tions dé jouissance de biens communaux avec leurs voisins.Le Labourd et la ville de Bayonne les faisaient habituelle-

,ment avec les provinces basques. Bayonne était presque uneville corsaire, toujours en guerre: « elle bataillait sur terrecontre Gramont et sur mer un peu contre tout le. monde'. ))

.L'entrevue de l'Icle dés ~Fai~~zns avait eU un précédent troissiècles avant « Le premier dimanche-de carême, au milieudu pont de Fontarabie, les prud'hommes de Bayonne et Bia-ritz concertèrent un traité de paix avec Castro d'Urdiales,Santander et Laredo.. » Un autre traité fut fait en 1328 entreBayonne, Biarritz et Saint-Sébastien.

Le traité de paix de la vallée de Barétous et celle de Roncalen Espagne, dans le XIIIe ou XIV~ siècle, a fourni le sujetd'une série d'articles très 'intéressants par M. Axel Duboul,dans le tome 1er de'la Reoue de Béarn, Naaarre ei Landes.La mêmerevuea aussi publié quelquesmots de M. Labrouche

sur cet autre traité, bien plus curieux encore', entre le Lave-dan et la vallée d'Aspe, qui existait déjà au XIIè siècle, etdont le tribut stipulé fut payé jusqu'à la Révo]ution~. Il y abien peu de traités européens dont les conditions ont étégardées et respectées aussi longtemps que ceux de ces petitsÉtats pyrénéens. Les Facenia.c, dont nous parlerons plus endétail tout à l'heure, subsistent encore; elles sont les derniersvestiges de ce pouvoir de faire les traités entre les voisins desdeux versants des Pyrénées.

Une des attributions les plus importantes d'un gouverne-ment quelconque, est le pouvoir de législation ou de faire des

1. Études leistoriques sur G,c ville cle Bayonne, parJule!i Balasque etEd. Dulaurens. Bayonne, 1875, tome III, p. 168.

2. Ibid., pièces justificatives, p.313-~16.3. Ibid., pièces jus~i8catives, p. 538-547.4. Cf. inter alia, Seyuense, etc., comme supna. Ce fait résulte du té-

moignage de Domiuique Manandas" jurat d'Aocous, qu'il paya pourla dernière fois en 1i89. Pièce M.S.

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lois pour le peuple. Dans tout État, républicain ou constitu-tionnel, ce pouvoir est exercé par le peuple lui-même, oudans des 'réunions de la nation entière, ou dans des assem-blées des représentants du peuple ou de la.nation, librementélus. Tous les États ou républiquesdes Pyrénées-Occidentalesavaient et exerçaient ce droit. Les provinces basques avaienttoutes les trois des juntas, des cortés ou des assemblées lé-gislatives particulières et générales. Navarre avait ses cortés

avec ses trois Ordres ou Bras, ecclésiastique,militaire et dutiers-état. Pour les représentants des assemblées ou juntesgénérales, le mode d'élection était, en Biscaye, le suffrageuniversel. Tous les voisins nés dans la province, ou proprié-taires, ont le droit de voter à l'élection'. Il en était de même

en Guipuzcoa.. En Navarre, le mode d'élection des représen.tants du peupleest plus difficile à constater; mais nous avons'la liste des villes et des vallées qui envoyaient des députés

aux cortés 37 pour la Navarre espagnole, sans compter lesvilles et vallées de la Navarre française'. Pour le Labourd,quoiqu'il soit évident qu'il y ait eu des asseJTIblées législa~tivés (bilzaars 1) au temps de la domination anglaise, je n'aipu trouver aucune description de la manière d'élire'les dé-putés. Les documents les plus anciens que j'ai pu consulterparlentdes habitants « Les habitants de Labourd ayantexposé (1321) quinze règlements et statuts faits par les habi-tants de Labourd (1341)3. » Il semble que les abbés et députésenvoyés au bilzaar 'furent librecrientélûspar chaque commu-nauté selon sa manière accoutumée c'était la même chose

pour les abbés et jurats des communautés particulières' elles-mêmes. Ce dernier droit est expressément reconnu dans lesG'outumesgénérales du Labourd, p 49, IV: « Les paroissiens

1. Historia de La Le9ialacion, p. 325.2. Quxderno de las Le~es, 1757.3. lncentaire et description des Prioihges, p. 3-4.

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de chaque paroisse d'icelui païs de Labourd peuvent entreeux s'assembler pour traiter de leurs besognes communes etde leur paroisse à chacune fois que besoyn sera, et peuventfaire et ordonner entre eux statuts et ordonnances parti-culières, pour entretenir et garder leurs bosèages, padoüenset pâturages, et ce, selon la loi vulgairement appelée la loide Saint-Benoft, et autrement pour procurer de leurs ne-goces loisibles, au profit commun ,d'entre eux et de la diteparoisse'. » Quoique les attributions du bilxaur du Labourd

ne fussent point si étendues que celles des juntas des pro-vinces espagnoles, elles étaient considérées et reconnues parle gouvernement suprême; l'élection y était libre et sansingérence des officiers royaux.

Dans la Basse-Navarre, ces pouvoirs restèrent toujours siimportants, que les habitants craignaient de déroger. Ils re-f usèrent d'envoyer des députés aux assemblées du Tiers-État

en 1643 et en 1651. En envoyant leurs députés aux États-Généraux, en 1789, ils les chargèrent'de déclarer « l'impos-sibilité où ils sont de renoncer à cette constitution et à cetteindépendance, et par conséquent de se déclarer men:bres desÉtats-Généraux de France, jusqu'à ce que les dits États-Gé-néraux se soient donné" une constitution aussi bonne oumeilleure que celle de la Navarre, qu'ils aient pris lesmoyens' convenables pour la rendre ferme et stablejamais i »~'

La vallée d'Aspe avait ses deux corps de jurats qui s'assem-blaient, comme nous l'avons dit, l'un à l'endroit appelé leTilhabé, l'autre à l'église de Saint-Jean-de-Laché; l'électiondes jurats et abbés qui composaient ces assemblées fut en-

1. Les Coutumes généi·ales du Labourd, Jean-Baptiste Lacornée,p. 49. Bordeaux, ,1770.

2. Histoire des Basques, par le vioomte de Belzunce. Bayonne,1847, III, p. 505-506.

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tièrement libre. D'autres vallées, comme celles de Luz,d'Azun, de Saint-Savin et de Cauterets, avaient aussi desassemblées, mais de tous les habitants, hommes ou femmes,qui étaient propriétaires. Ces assemblées tombèrent en dé-suétude longtemps avant la Révolution. Ici, nous devons

remarquer un fait c'est que, quoique dans beaucoup dedomaines féodaux et ailleurs il se fût trouvé des assembléesd'habitants pour élire leurs officiers municipaux, partout où leprincipederepréseotationn'avaitpas été admis,elles tombaientpromptement en désuétude, à causedes désordres inévitablesà des assemblées si nombreuses et des charges onéreuses, afin

que tout le monde, sans exception y assistât; là, au contraire,où, comme parmi les Basques et dans la vallée d'Aspe, leprincipe de représentation, avec n'importe quel systèmed'élection, depuis le plus restreint jusqu'au suffrage uni-versel ou le tirage au sort, partout ces assemblées locales ad-ministratives et législatives existaient jusqu'à la Révolution.

Le clou du pouvoir d'une assemblée populaire est lecontrôle de la taxation et des contributions. Si ceci est perdu,le reste s'en va ou devient tout à fait illusoire. Les petits États

ou Républiques des Pyrénées-Occidentales ont possédé cetteattribution et ont exercé librement ce contrôle. Dans les pro-vinces basques espagnoles, dans la Navarre espagnole etdans la Navarre française, ni le roi d'Espàgne ni le roi de

France n'avaient aucun droit ou pouvoir de se méler des

taxes ou des contributions. Toute taxe ou contribution étaitdonnée par les Juntas ou les Cortés comme don volontaire,

et elle ne pouvait jamais être exigée comme un droit, et cettecontribution fut votée seulement après l'audition et la répara-tion de tous les griefs du peuple envers le roi. Tout ceci estbien connu et admis par tout le monde, dans le cas des pro-vinces basques espagnoles. Il n'est donc pas nécessaire d'in-sister. La jalousie de ces provinces et de la Navarre sur l'in-

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terventionroya~esur ce point fut extrême. Il ne leur importaitpas du tout ce» qui s'était fait dans les autres provinces du

royaume, ni daup~, les matières ecclésiastiques, ni dans lesmatières civiles, Di dans celles que nous appelons aujour-d'hui'sociales et hygiéniques. Ainsi, nous trouvons que lesCortés de Navarra, en 1757; faisaient protestation contre uncarta-orden du vice-roi et de l'évêque, défendant de jouer descomédies dans la ville de Pampl-ona. comme il avait étéordonné dans les diocèses de Salamanca, Avila,' Cadiz, Gra-na.dà~ Vàlencia et autres; à la requête des évêques. Leroi leurdonne raison et retire le carta-orden comme portant préj udice

aux fueros'et lois de Navarre' Encore plus importante.

sous ce point de vue est'une loi dans ces mêmes Cortés. Unesource principale des contributions 'indirectes a toujoursexisté sur les alcools il y a aussi toujours un petit conflitentre l'État qui tire des- revenus de cette contribution et lamorale qui défend l'ivrognerie. Ehbiell, d'ans l'intérêt de lamorale, les Cortés,déNavarre, en 1757, ont défendu la venteen détail de l'aguardiente et autres, liqueurs alcooliques 1, etsiellèsont révoqué cette loi en 1766, ce ne fut nullement pour*des raisons économiques, mais seulement parce que l'expé-rience leur avait démontré son ineffiéacité complète 3. Il esttrès curieux de trouver cette expérience faite tout 'un siècleavant'que 1"èri en eût. tenté l'essai dàns les États-Unis del'Amérique du Nord, et dans la Grande-Bretagne, et toujoursavec le même résultat douteux..

De ce côté des Pyrénées, les taxes et les contributions-de cespetites républiques f ùrent payées par une somme fixe. Ainsi,dans le cahier -des vœux et i~stroctions d les Basques fran-

1: Quaderno de las lel/es del ano 1757. Ley XXVII.2. Quaderno de las leyes del ano 1~5i..Ley xxxv. Pièces justi8ca-:

tives, IV, p. 25.3.~ Qûaderno üalââleyes,delâno 1766. Leyxxx..

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çais pour leurs' députés aux' États-Gériéraux de 1789, lesLabourdins prétendent que « le contingent du pays aux sub-sides de l'État étoit resté borné jusques vers le milieu dudernier siècle, à un abonnement de 253 livres, appeléde sub-vention que depuis, son abonnement a été porté, en y com-prenant l'àncien, à plus de 60.000 livres 1 ». ,Aiilsi, pour larépartition de ces contributions, c'étaient les communesqui les payaient en bloc avant la Révolution, 'et non lesindividus séparément. Ceci' ressort de l'article 2, p. 28,du Cahier des Yc~ù~: « Par rapport' àla manière decontribuer aux impMs et.de se régler entre eux, pour l'admi-nistration intérieure dé leurs communautés respectiyes, leshabitants du Tiers-État du Labourd demanderont qu'on leur

conserve la constitution particulière que leur assignent lesarrêts du Conseil du 3 juin ~1660, du 10 février 1688, du17 juillet 1769'et du lermai 1772. Ils se trouvent assez bien de

ce régime, ils craindroient d'en changer!. » Parmi les piècesnotées dans l'Essui d'une Bibliographiedu départemen't desBasses-Pr~rénées, période rr3aolutionnaire, 1789=1800, parM. L. Soulice, je trouve un Mémoire pour la commune de

Saint-Jean-de-Luz,signé Leremboure, suppléant du Labourdet député extraordinâire de Saint-Jean-de-Luz, s. t., Paris,imp., nat. en 1810, 39 p., mémoire pour prouver que les bièns

communaux sont dans le Labourd une propriété indivise etégale entre tous les habitants, et que les contributions deSaint-Jean-de-Luz sont acquittées par le produit des biens

1. Cahiei· des oceum et instruçtions. Nouvelle édit., p. 14. Cazals,Bayonne,1874.

2. Ibid., p. 28.Cf. Essai 3ur la noblesse des Basques, par un ami de la nation

(8anadon)¡ Pau, Vignaucour, 1785, p. 201. « 11 (le Labourd) ne payeencore aujourd'hui qu'une très peûte taxe au roi et~ est regardécomme un pays franc et libre. »

9

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communaux.Je n'ai pas pu voir cette pièce, nonobstant tou'tes

-mes recherches, mais j'en trouve quelques fragments dansun discours du maire de Sare prononeé devant le conseilmunicipal le 20 fructidor an VIII (6 septembre 1800) « Il

,a rappelé l'heureux tems (sic) où l'émondage des bois de Sarefournissait à ses dépenses municipales. » Ces'bois n'étaient,qu'une partie des biens de la commune, qui consistaient enoutre en cinq moulins, forges, carrières, châtaignes, etc., etc-et dont les revenus auraient bien suffi à payer toutes lescontributions de la commune. Comme la Soule, la valléed'Aspe fut exempte de toute sorte de' contribution: Ils « ontdroit de faire des députés pour veiller, avec les jurâts, auxaffaires des communautés, d'établir des gardes ou des collec-teurs pour le recouvrement dé la taille, d'avoir des poids etmesures, d'être maltres des offices de procureur, syndic etsecrétaire JI. »

Quant à la douane et au libre commerce, quelques motssuffiront. La ligne de ladouane en Espagne commençait avecl'Èbre les 'provinces basques furent exemptes de toutdroit d'entrée ou de sortie. C'était à peu près la mêmechose pour le Labourd, la' Basse'Navarre, la Soule et lavallée d'Aspe'; le commerce y fut -entièrement libre pour laconsommation locale. Nous avons une preuve curieuse de cefait. Le chancelier Pierre de l'Ancre, en 1610, reproche sé-vèrement aux Basques et surtout'aux Basquaises leur'goûtpour le tabac. Vers 1770, le Gouvernement aurait vouluétendre la régie du tabac et les droits des fermiers sur leLabourd aussi bien que sur le reste de la France. La muni-cipalité, de Sare répond en défendant « aucun des habitansde la dite paroisse de loger aucun employé du Roy il est

1. Ms. registre de Sare de 20 fructidor an III au 1°~ mars 1806.2. Déclarationde 1692.

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même ordonné à ceux qui tiennent déjà logez (sic) de lesexpédier dès aujourd'hui, ou aux plus tard dans deux jours,

sous l'amende de trente livres ». Cette pièce est signée parle maire et parvingt-neufdes principaux habitants de Sare'.Le 4 mai 1773, apparut un « arrêt du Conseil d'État du roidonnant,droit aux fermiers du tabac, nonobstant l'arrest duConseil du 10 février 1688, « les (c'est-à-dire les habitants duLabourd) a formellement autorisés à faire le commerce detoutes espèces de marchandises pour leur consommation,auquel cas ils ne sont pas même tenus du droit de coutumede Bayonne' »

3° La justice etla police. Il est avéré que dans les provincesbasq ues espagnolesnul officierni sayon royaln'avait lemoindredroit d'y entrer, qu'il était permis à tout habitantde lui fairerésistance, et même de le tuer, si c'était nécessaire. Dans le

1. Ms. dans les archives de la mairie de Sare; ch. pièces justifica-tives, l, p. 1.

2. Imprimé, ibid., Il, p. 2.Cf. Cahier des Vœux des Basques Souletins 17'89 (tiers-état).Art. 2U~ dans le Bulletin de la Société cies sciences et arts da

Bayo~ane, 1882, p. 91, par M. J. Vinson.

ART. 20« Qu'il soit permis aux habitans de Soule de semer du tabac, cette

liberté leur ayant été interdite il y a environ soixante ans, contre leprivilège dont ils avaient éternellement joui jusqu'alors, à l'exempledu Pais de Ubourt, qui à la même époque reçut une pareilledéfense, et qui postérieurement aété réintégré dans sa pcemière fran-chise. »

« Si quelquefois le Fisc a sollicité ou extorqué des Déclarations oudispositions contraires à ces franchis~s, elles ont été révoquées etex-pliquées favorablement pour les Basques, et n'ont jusqu'à ce jourporté aucune atteiuteréelle à leurs privilèges et à leurs immunités. »Essai sur la Noblesse des Basques, p. 206.

« On se rappelle à quels excès se portèrent en 1750, les habitanset surtout les femmes de Hendaye, Ciburu, Saint-Jean-de-Luz, Ur-roing, etc., à l'occasion des droits imposés sur le tabac. » Essai sur laNoblesse des Basques, 247.

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Labourd, le bailli, qui est commis par le roi « a la premièreconnoissance de toutes matières et 'actions civiles et crimi-nelles, tant entre les habitants du dit païs que les étrangers,

comme juge ordinaire' ». Il m'est bien difficile de définirles attributions exactes du bailli, du syndic, du bilzaar et descommunàutés sur cette matière. A défaut de l'action du bailliet dans son absence, il est clair par plusieurs ordonnancespromulguées depuis 1341 que les habitants avaient le droitde rendre la justice et de faire la police eux-mêmes. L'électiondu syndic fut reconnue comme entièrement libre" mais jen'ai pu déterminer ce qu'étaient ses attributions en rapportavec celles de l'intendànt, du gouverneur et du bailli. Ledroit de pârter des armes en toute saison, et de faire la police

et défense de la frontière, est reconnu à tous les Basques etaux habitants de la vallée d'Aspe.

4° Quant à la législation civile, les lois d'héritages, de suc-cession, etc., il n'est pas nécessaire que je vous en dise unseul mot, les coutumes imprimées vous montrent suffisam-ment comment elles furent p~rticulières à chaque pays, di-

verses, et tout à, fait indépendantes les unes des autres. etdu reste du royaume mais il y a encore une fonctiondu gouvernement, celle du culte et de l'instruction, surlaquelle j'ai quelques observations à faire. Depuis la pre-mière 'mention des Basques dans le Codé~ Calixtinus, auXII6-,iècle, ils sont décrits comme un peuplevraimentreligieux,exact aux offices et très libéral en dons envers le clergé maisaussi comme un peuple qui ne voulut jamais permettre auclergé aucune ingérence dans la vie politique et civile.

Il y avaitdéfense à tout prêtre d'être élu député (proeurador)

aux Juntas. En Alava, une des qualités obligatoires pour les

1. Coutumés générales du Labourd, p. 1.2. Inoentaire, etc., p. 12.,

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députés, était d'appartenir à' l'état laïque' Les Fueros deGuipuzcoa, tit. XXVI, chap. iv, disent Que ningun Concejoembie su Procurador 1~ la JunEa â ningun Clerigo ni el Cle-~

rigo lo pueda ser en manera izl~una. Respecto de

no ser conforme a la calidad del Estado Ecclesiastico elintroducirse a goviernos de materias politicas, meramenteseculares, y ser conforme a Fuero, y Ordenanza confir-mada de esta Provincia, que los Clerigos de ella, ni de

ninguna otra parte pueden ser Procuradores de Junta, nide ningunos casos de ella. Ordenamos, y mandamos, queningunos Concejos, ni Vniversidades, non puedan embiar alas Juntas por sus Procuradores a ningunos Clerigos, so

pena de diez mil maravedis, é si los embiaren, que non seanrecibidos é otrosi, que non puèda ser Procurador ningunClerigo en las dichas Juntas, por ningunas personas, en nin-

gunos fechos, caso que sean civiles, é criminales. » A Tolosa(Guipuzcoa), « on annule la voix de tout électeur qüi a été

vu- causant avec un prêtrc à l'entrée du scrutin 2 ».

Encore plus rigoureuse fut la prohibition contre l'électiondes avocats ou hommes de loi pour députés. Il y avait unletrado qui assistait la Juntacommeconsultateur,mais sansaucune voix ni vote dans les délibérations. « Los abogados

no podian ser procuradores de junta. Las ordenanzas XII

y X V II (Alava) prohiben que los letrados sean procuradoresyentrenen lajunta 3.)) LesFuerosde Guipuzcoa ontplusieursprovisions contre l'élection d'un avocat pour député. Tit.VI,chap. c « Ordenamos y mandamos, que de aqui adelante, enlas Juntas no esté otro Letrado alguno, salvo el que estuviere

por Letrado de la Junta, salariado por ella; » et chap. VIl:

1. Mariohalar et Manrique, p. 530.2. Charles Bernadou, Les Fêtes de la Tradition au Pays basque,

p. 44-45. Bayonue, 1897.3. Marichalar et Manrique,p. 391 et 529.

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« Que ningunLetradoentreen Juntà General, ni Particularde la Provincia, e't encore chap. XIV: « Qui3 ningun Letradopueda ser Procurador de Junta General ni Particular. » Telsqu'ils sont décrits au XII' siècle par un voyageur du nord dela France, tels ils apparaissentdans les fueros, tels ils sontpeints' par'le jésuite Larràmendi au siècle passé'. Le patron-nage des églises fut presque toujours dans les mains laïques,dans celles du roi ou des nobles, ou du peuple, par éleùtion.Dans les quelques pièces manuscrites que j'ai pu consulter,appartenant à diverses paroisses, il y a tou jours cette espècede jàlousie envers la moindre extension des pouvoirs duclergé en' dehors des matières religieuses. Quant à l'édu-cation, Larramendi nous dit qu'il y avait une école de garçonsavec maîtres salariés dans tous les villages$.-Dans la valléed'Aspe nous trouvons, en 1571, un « arrest du Conseil d'Étatdu Béarn rendu en faveur d'habitans d'Osse, du 30 may 1571,qui leur maintient le droit de lever annuellement unepremicie consistenteen granadges, agnets, lanes et fromageset per acquets jouir, gaudir et emplegar tant à la reparationdeu temple, deudit entretenement deu meste d'escolles,qu'autres obres piées, charges et necessitats deudit locq 3 )).Le 10 mai 1573, ce droitest maintenu pour toute la vallée. Lesbraves gens d'Osse prétendent- « en tal dret et possessionIousdits vesin son despuix temps immemorials senhs jamesestar contredits. ) Laquelle prétention est un peu difficile àcroire. Néanmoins, nous avons ici l'instruction laïque enpleine activité au XVIe siècle.

Voilà bien assez de preuves que ces petits États avaientexercé presque toutes les ,fonctions, toutes les attributions

1. Larramendi, CorognaJia de guipu,~coa, p. 109. Cf. aupra s. c.,Cortés de Navarre.

2. Ibid., p. 79, et Diccionario Geografico-historico de Eepana,tomo 1. Madrid, 1802.

3. Seguense lous p~·iu iledges, et~ p. 82-83.

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d'un gouvernement indépendant et autonome. Mais on peutencore se demander si ces communautés avaient pleineconscience de leur républicanisme, si elles n'auraient pasété tout à fait étonnées de s'entendre appeler « républiques» »

3¡vant la Révolution ? Je vous ai déjà donné la preuve dansle cas de la province de Biscaye, où la substitution du motrrepublica dans les copies du capitulado de 1491, conservéesà Bilbaoet Valladolid, par celui de re,gimien~o dans les ar-chives de Simaneas, atteste pleinement l'appréciation de lasignification du mot et de tout ce qu'il exprime. J'ai cité des

passages relativementau Guipuzcoa nous avons vu le termeemployé par les rois d'Espagneet par les Cortés en Navarre.En France, nous avons vu que Saint- Sàvin et la vallée d'Aspes'appelaient des républiques. Belzunce cite une'ordonnancepolitique du pays d'Ostabaret, du 24 mars 1598, où on parledu bien et utilité de la république' Les faceries ou conven-tions réglant les droits de pacage, etc., des deux côtés de lafrontière, souvent font emploi de ce mot, v. g. une facerieentre Vera et Sare, du 22 septembre 1762, est faite entreambas republicas. Dans celle du 28 novembre 1782 et aussidans une autre faite la même année, entre Echalar et Sare,nous lisons « les faceries entre les deux républiquesarrêtées » encore, en 1798, entre Vera et Sare, la faceriaest faite « entre les deux dites républiques'. ))

Je crois qu'en voilà. assez pour vous convaincre qu'il yavait des républiquesavant la Révolutiondans les Pyrénées-Occidentales, républiques .et de mot et de t'ait, et que le motrépublique ne faisait nullement horreur à nos ancêtres. Lespouvoirs et les attributions que j'ai décrits comme exercés par

1. Belzunce, Hi.gtoire cles Basques, III, 495.2. Conservées dans les archives municipales de Sare. Pièces justi-

ficatives, III, p. 11.

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ces communautés montrent assez que le nom de républiquene fut pas un vain mot il existait, ainsi que je l'ai dit, et defait et de droit.

Cet état de choses a presque disparu. Cette indépendance,cette autonomie avait ses avantages, qui furent immensespour les communautés elles-mêmes, mais elles entrainaientquelques inconvénients envers la nation. C'est peut-étre enpartie grâce à ces inégalités, non seulement dans les ordresprivilégiés, mais aussi dans les provinces, les districts et les

communes entre elles, que la passion, la jalousie de l'égalitéest aujourd'hui beaucoup plus répandue en France quel'amour de la vraie liberté liberté pour ses adversaires poli-tiques aussi bien que pour soi-même.

Mais, en somme, on peut le dire, en France, au moinsdans une grande mesure (mais non-sans quelques réserves),le changement a été fait dans le sens que réclamaient les dé-putés de la Basse-Navarre; la France s'est enfin « donné uneConstitution aussi bonne ou meilleure que celle de ce-pays,et elle a pris les moyens convenables pour la rendre ferme etstable à jamais 1 ». En Espagne, le changement n'a pasété fait dans des conditions aussi ,favorables.; Une questiondynastique s'y est trouvée mêlée, et les libertés de ces répu-bliques ont été en grande partie écrasées par la force brutalede la guerre. Mais le ministre sous le gouvernement duquelces libertés furent en grande partie détruites, a lui-mêmeécrit « Loin de désirer que de telles institutions dispa-raissent là, je voudrais, si c'était possible, les communiquerau reste de l'Espagne. Les libertés locales des Basques,

comme toutes celles que l'histoire a engendrées et créées,profitent à ceux qui en jouissentet ne font de mal à personne;au moins, si on ne prend pour mal l'envie dont elles ins-

1. Belzunoe, l. c., vol. III, p. 505.

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pirent les autres f.) Malheureusement en Espagne, malgréla Constitution écrite, la mauvaise administration, la répar-tition inégale et malhonnête des impôts et des contributions,la corruption des employés et surtout des employés supé-rieurs, font un contraste frappant avec l'administrationprobe, honnête, économe, quoique bornée sous quelquesrapports, des provinces basques dans leur autonomie répu-blicaine. Là certainement le changement n'a pas été tout à

fait pour le bien-être des provinces. C'est à vous et non pasà moi, comme étranger, de dire si le changement sur le ver-sant français a été pour le bien, ou s'il n'y a pas quelque-chose à regretter dans l'autonomieperdue de ces républiquespyrénéennes. Enfin je crois que le mot république n'a jamaiscessé- de trouver un écho dans nos montagnesdepuis le tempsdes anciennes républiques ciailates ou municipia de

Rome jusqu'à aujourd'hui. A trois époques surtout il a sonnéplus haut dans la première moitié du XIIIe siècle, à l'èrede la Renaissance et à l'aurore de la grande Révolution,laquelle n'a pas autant devancé les institutions de ces répu-bliques des Pyrénées-Occidentalesque peuvent bien le croire

ceux qui n'ont pas étudié 'leur histoire.

1. Los Vasconc~aclo: por el m.. Sr D8 Miguel Rodriguez Ferrer,con una introduccion del axc.. SI D. A. Canovas del Castillo. Intro-duécion, XII (Madrid, 1873).

lePor decontado, que nada de 10 que a"abo de decir sobre los privile-

gios, se extiende à la 'autonomia local, al peculiar regimen adminis-trativo, al organismo interior, enfin, de ninguna de las tres ProvinciasVascongadas. Lajos de desear que desaparezcan de alli institucionessemejantes, ~uerrialas yo comunicar, si posible tuera, al resto deEspana. Las libertades focales de los Vascongados como todas lasque engendra y cria la historia, aprovecban ci los que los disfrutan,y ci nadie daiian, como no sea que se tome por dano la justa envidiaque en otros excitan. »

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Pièces Justificatives

Assemblée des habitants de la commune de Sare, en l'année1770, concernant les employés de la jerme du Roy

Aujourd'hui le huit du mois de septembre 1770, dans l'as-semblée générale des habitans de la présente paroisse,; lemaire abbé étant sieur Dominique Dithurbide et les jurats ses.collègues, il a été délibéré d'une voix unanime qu'il ne serapermis à aucun des habitants de la dite paroisse de loger

aucun employé de fermes du Roy; il est même ordonné à ceuxqui tiennent déjà logez de les expédier dès aujourd'huy ouau plus tard dans deux jours, sous l'amande de trente livées;la même amande sera appliquée par ceux qui logeront doré--navant et pour la validité de tous ce contenu ont cy signezavec moy. Ainsy signez

DITHURBIDE, maire abbé DUnUTY LAPHITZ DITHUn-

.131DE; LEHETCHIPY DORNALETCHE LADEVEZE; DET-

CHEVERRY;DITHURBIDE;MARTINENA DITHURBIDE

BARRENETCHE;BARNETCHEDITURBIDE; ELIÇALDE~

ÇUBULUBIA GARMENDIA; HlRlGOïTY DAGUERRE;

DITHURBIDE HAROSTEGUY Dop HIRIGOYEN JEANDop; ELIZECHE D'APE8ETCHEfils; BERTRAND DLT-

CHEVERRY SOBRE DUCASSOU LAHF.T'JuzoN.

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ARREST DU CONSE(L D'ETAT DU ROI

Qui déclare la ville de Bayonne et le pays de Labour nonexceptés de la vente e~clusine du tabac, et y ordonne l'e~é-cution des règlemens

DU 4 MAI 1773

EXTRAIT DES REGISTRES DU CONSEIL D'ÉTAT

Vu par le Roi en son conseil l'arrét rendu en celui lepremier janvier 1754, par lequel Sa Majesté auroit ordonné

que l'article XIV du titre premier de l'ordonnance du mois de

juillet 1681, les déclarations des 17 octobre 1726, l'r août

1721 et 4 mai 1i49, ensemble cinquante sentences, tant con-tradictoires que par défaut, rendues en élection des Lannes

contre différens particuliers du pays de Labour, seroient exé-

cutées selon leur forme le teneur; en conséquence, que les

dits particuliers et tous autres habitans du. pays de Labourseroient tenus de se conformer aux défenses portées par lesdits réglements et sentences, sauf et sans préjudice des voies

de droit contre les dits jugements, lesquels cependant seroient

exécutés par provision, et jusqu'à ce que par Sa Majesté il

eût été fait droit aux parties sur le fond de leurs contestations.

Le Mémoire de Fermiers généraux contenant que deux

questions divisoient alors les dits habitants et l'adjudicatairedes fermes l'une, principale, consistant à savoir si ces ha-

bitans étoient soumis à la vente exclusive du tabac l'autre,subsidiaire, portant sur les plantations de tabac dont ilss'étaient arrogéla tolérance etqu'on soutenoitdevoir leur étre

interdite, quand même ils pourroient se soustraire à la venteexclusive que les sentences dont iFs'agit avoient proscrit les

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dites plantations dans leur territoire et comme l'arrêt susdatté a d'un côté ordonné l'exécution provisoire de ces sen-tences, et de l'autre a remis à statuer sur le fond de l'ins-tance, il est resté à juger et le définitif du provisoire et laquestion principale, ou plutÔt que c'est à ce dernier point ques'est réduit le procès puisque s'il est vrai que les Labour-dains n'aient pas l'exemption de la vente exclusive, il est in-contestable qu'ils sont sans prétexte pour les plantations; quedans l'état de -résistance dans lequel ils se sont maintenusjusqu'à présent, et pour remédier autant qu'il étoit possible

aux versemens de faux tabacs qu'ils faisoient sur les lieux decette vente exclusive qui les avoisinoient, on a étendu sureux un droit de trente sols pour livre, imposé par la décla-ration du 4 mai 1749 sur tous les tabacs entrant dans leroyaume; mais que cette ressource, déjà reconnue impuis-sante à l'époque de l'arrêt de 1754, est devenue de plus enplus sans effet; en sorte que le soutien de la ferme du tabacexige une décision définitive.

Les Mémoires des maire; bayle, échevins etjurats de Saint-Jean-de-Lus et de Cibourre, des directeurs de la Chambre decommerce de Bayonne et du syndic général du pays de La-bour, expositifs que leur possession immémoriale de la liberttsdu commerce du tabac, possession que le fermier a lui-mêmeformellement avouée, suffiroient pour assurer leur privilège;qu'il est dit par la d~daratioa de 1749 1° que le droit de'trente sols se percevradanstouteslesprovincesdanslesquelles

sont tolérées les plantations et culture de tabac 2° que lesparoisses continueront 'ces cultures et plantations po ur l'usage

et la consommation de cha~une d'icelles seulement et pouren faire commerce avec l'étranger; qu'en combinant les deuxtextes du droit qu'il n'est permis d'attaquer ni de contester lapossession, et qu'on ne peut gréver autrement ces provincesqu'en les assujéti$sant ,au droit de trente sols; que de là ré-

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sulte deux conséquences en faveur du pays de Labour;. lapremière que l'arrêt qui l'a privé des plantations a été évi-demment surpris à la religion du Conseil la seconde, que ladéclaration de 1749, quant au-droit de trente sols, lui estabsolumentapplicable que, comme la perception de ce droitimplique contradiction avec la vente exclusive, avoir prouvé

que cette perception s'étend nécessairement à. ce pays, c'estavoir démontré qu'il ne peut être compris dans cette venteexclusive qu'ils doivent cependant observer à l'égard desplantations, qu'ils ne les réclament qu'ainsi et de la mêmemanière qu'elles ont été conservées aux autres provinces detolérance, c'est-à-dire hors les trois lieues des limites de laferme qu'à leur possession se réunissent au reste des titresauthentiques d'abord, l'arrêt du Conseil du 10 février 1688

les a formellement autorisés à faire le commerce de toutesespèces de marchandises pour-leurconsommation, auquel casils ne sont pas même tenus du droit de coutume de Bayonne,qui doit être seulement levé sur eux d'après l'arrêt duConseildu 16 septembre 1702 en second lieu, l'article uc de l'or-donnanee du mois de février 1687, titre premier, qui a dé-signé les provinces enfermées dans ré tendue de la ferme, n'adénommé ni Bayonne, ni le Labour qu'ils sont même tousdeux réputés étrangers effectifs au respect des droits, en sorteque la ferme du tabac ne peut les regarder. Enfin, le titrecommun des fermes de l'ordonnance de 1681 prête une nou-velle force à ces autorités, y étant énoncé, article n, que SaMajesté n'entend pas préjudicier aux privilèges et exemptionsde droits dont les villes, bourgs, paroisses auroient joui envertu des lettres de concession des Rois ses prédécesseurspourquoi concluoient à la maintenue' de leurs privilèges enco'nséquence tant à la faculté de planter hors les trois lieuesdes limites, que d'user du tabac étranger, comme aussi defaire commerce avec l'étranger tant de ce tabac que de

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celui du crû. Autre mémoire des fermiers généraux, parlequel ils observent que la déclaration de roi, du 27 septembre1674, qui a établi la vente exclusive d u tabac, et le bailpasséà Jean Le Breton, le 30 novembresuivant, contient la clause

expresse pour en jouir dans toute l'étendueduroyaume,payset terres de notre obéissance ce qui n'exclud rien qu'alors laFranche-Comté, l'Artois, le Haynault, le Cambrésis, laFlandre, l'Alzace et le pays de Labour étoient déjà réunis à

la couronne, savoir l'Alzace et l'Artois par le traité desPirennées de 1659; la Flandre en 1668, parle traité d'Aix-Ia-Chapelle la Franche-Comté, par la conquête qui en fut faitela même année enfin le pays de Labour dès 1450.; que con-séquemment cette nouvelle ferme devoit y être portée que la

guerre qui désoloit l'Europe et celle pour la succession

.d'Espagne, qui fut soutenue depuis 1701 jusqu'en 1714,empêchèrent les différens fermiers de faire aucuns éta-blissemens dans ces provinces, soit parce que, comme dansle Labour, qui étoit affranchi des autres droits des fermes,

,ces établissemens y auroient été onéreux que l'ordonnancedu mois de juillet 1681 etIa déclarationdu 17 sepiembre1703,

,renouvela les défenses à toutes personnes de faire le com-merce du tabac:dans l'étendue du royaume qu'elle défenditaussi à,tous sujets du roi de plànter ni ensemencer en tabac,exceptant cependant de cette prohibition quelques territoirescirconscrits dans les provinces de Langtiedoc, Gtiienne etLimousin, qui furent jugés favorables à cette espèce de cul-ture que l'arrêt du 29 décembre 1719, ayant converti leprivilège de la vente exclusive en un droit payable à l'entrée,il fut défendu à tous les sujets du roi, aux communautésséculières, ,et, régulières, même aux habitans compris dansl'exception ci-dessus, et à tous autres de quel état-et conditionsqú'ils fussent, d'ensemencer et cultiver aucuns tabacs dansleurs terres, jardins, vergers et autres lieux, à peine de mille

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li,'res d'amende que ce nouveau' droit, après avoir étéconfirmé par l'article XX de la déclaration du 17 octobre1720, fut abrogé par la déclaration du 1er août 1721, quirétablit la prohibition 'du commerce dans tout le royaume.Cette restriction, néanmoins, qu'elle ne frapperoit pas sur laFranche-Comté, l'Artois, le Heynault, le Cambrésis, laFlandre ét l'Alzace, ce qui fut déterminé, non comme uneexemption qui leur était acquise, mais par des raisons par-ticulières et par simple tolérance que des règlemens pos-térieurs ont même limitée qu'en partant de ce dernier ordredes choses qui se trouve rappeUé dans les différens baux, ilest sehsible que le pays de Labour, en tant que compris dansla disposition générale, n'a aucun prétexte pour motiver saprétention que ses privilèges, dont il se prévaut ne peuventle mettre dans un cas d'exception, attendu qu'ils n'ont nulrapport à la question; qu'il est vrai que l'arrêt du ~10 février1688 l'exempte des droits de coutume qui se perçoiv ent en laville de Bayonne sur les vins, bleds, brais, raisine, fruits etautres choses comestibles pour la nourriture et l'usage deshabitans, et du droit de foraine sur les bestiaux destinés àleur consommation mais qu'outre que cet arrêt n'a statué

que par provisionet jusqu'à ce qu'autrementil ait été ordonné,

il ne fait aucune mention du tabac qu'il ne s'expliqued'ailleur~ que sur un droit local qui n'est pas celui qui faitla matière de la contestation que l'arrêt du 16 septembre1702 n'est relatif qu'aux traités, attendu qu'il le décharge desdroits des tarifs de 1667 et 1699, et qu'il n'y a pas plus d'ar-

gument à en tirer pour la cause qu'il en est de même pourl'ordonnance de 1687, qui place en effet hors des cinq grosseçfermes le pays de Labour; que cette position et même celled'être à l'instar de l'étranger. effectif, ont au fond si peud'analogie avec la ferme du tabac, que Marseille, dont leterritoire est ~galement réputé étranger effectif en ce qpi

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concerne les droits, n'à pas moins reçu cette forme que lesprivilèges ainsi appréciés, la citation du titre commun desfermes est sans objet en ce qu'on ne peut préjudicier à uneexemption qui n.a jamais été octroyée qu'il est constant quela déclaration de 1749 ne se réfère qu'aux provinces où latolérance de la culture et du commerce avoit été consentie

par celle de 1721,d'où' il suit qu'elle. ne peut être déclaréecommune au pays de Labour que son assujétissement à lavente exclusive se justifie donc, et par l'analise du droit

commun, et par l'examen de ses titres particuliers qu'aureste, une dernière considération à faire connottre que leshabitans sont actuellement sans intérêt dans leur demande,c'est qu'au moyen de la nouvelle imposition de huit sols parlivre sur tous les droits des fermes, le droit de trente sols

monte aujourd'hui à quarante-deux sols; qu'en y joignantle prix d'achapt et la voiture, ce privilège, s'ils sont debonne foi, leur seroit onéreux, ce qui est un nouveau motif

pour arréter le cours du du mal.REQUEROIENT en conséquence, les fermiers généraux qu'il

plût à Sa Majesté sur ceux leur pouvoir Vu aussi la dé-claration du 27 septembre 1674, le'bail passéà Jean Le Bretonle 30 novembre suivant; l'article XIV de -l'ordonnance dumois de juillet 1681, la déclaration du 17 septembre 1703,l'arrêt du 29 décembre 1719, les déclarations du 17 octobre1720, ler août 1721 et 4 mai 1748, 1'article II du titre commundes fermes, les arrêts des 20 février1688 et 16 septembre 1702

et aulres pièces de l'instance; Ouï le rapport du sieur abbéTerray, conseillerordinaire, en son Conseil royal, contrÔleurgénéral dés finances

LE ROI EN SON CONSEIL, faisant droit sur l'instance; a or-donné et ordonne que les ordonnances, déclarations et tousautres règlements intervenus sur la vente exclusive du tabacdansleroyaume;ensemblesuccessivement les baux passés aux

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adjudicataires de cette ferme seront exécutés tant à Bayonneque dans tout le pays de Labour selon leur forme et teneuren conséquence, qu'à compter du jour de la signification duprésent arrêt qui sera faite, tant aux maire, abbé, bayle,échevins, jurats, directeurs de la Chambre de commerce quesyndic général du dit pays, les habitans ne pourront userd'autre tabac que celui de la ferme, sous les peines prononcéespar les règlements; ORDONNE aussi Sa Majesté que les négo-cians, marchandset habitans de Bayonne, Saint-Jean-de-Luset autres lieux du dit pays de Labour, qui auroient en ma-gasin de tabac étranger ou de celui du cru, seront tenusdans le mois de la dite signification de l'arrét, d'en faire desdéclarations exactes aux commis du dit fermier, et dans lesdeux mois suivans, de les renvoyer sous acquit-à-caution àl'étranger faute de quoi et soit que les dits tabacs aient oun'aient point été déclarés, ils demeurerontconfisqués, et lespropriétaires condamnés aux amendes portées par les règle-

mens FAIT aussi trés expresses inhibitions et défenses àtoutes personnes de quelqu'état, qualité et condition qu'ellessoient, de troubler les commis et employés des fermes dansl'exercice de leurs fonctions, sous les peines énoncées par ladéclaration du 27 juin 1716. Et seront sur le présent arrêttoutes lettres nécessaires expédiées'.

Fait au Conseil d'État du Roi, tenu à Versailles' le quatremai mil sept cent soixante-treize.

Collationné, signé DE VOUGUY.

1. Voyez les lettres patentes du roi données à Versailles, le4 juillet 1784.

« Exemption du privilège exclusive du tabac et du droit de trentesols par livre de tabac étranger. »

« La ville de Bayonne, celle de Saint-Jean-de-Luz, et toutel'étendue du pays de Labourd continueront d'être exempts de l'exer-cice du privilège exclusif de notre Ferme du tabac, etc. »

(Bulletin de la Société des scienceset arts de Bayvnne, p. 268, 1889).

10

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COPIE DES FACERIES CONTRACTÉES EN 1800AVEC LA VALLÉE DE BAZTAN

Assemblée générale du 25 septembre 1800

Dans le village d'Elisondo et en la maison commune decette noble vallée et universalité ou généralité de Baztan,le jour de la fête du glorieux archange Saint-Michel, le vingtet neuf septembre de l'an mil huit cent, se sont assemblés etabbouchés, comme ils ont usage et coutume, pour tenirassemblée générale, celle-ci étant une des quatre qui recon-noissent les ordonnances que cette vallée a obtenu d'autoritésupérieure pour son bon gouvernement, MM. les alcalde,jurats et députés des quatorze villages qui composent cettevallée qui sont nommément l'illustre seigneur Dn Joseph-Joachin-Gaston Iriarte, alcalde, juge, capitaine de guerred'icelui et de toute sa juridiction.

Elisondo. Séraphin de Bicondoa, jurat du villaged'Elisolido et pour les députés Martin-Joseph de Bicondoa

-Léon de Landa; Julien.-Baptiste de Meoguy etJean-Martind'Urrutia

Irurita. Martin Daicinena, jurat du village d'Irurita etpoursesdéputés Dn Pedro-JosephDuhalde; Martin d'AlemanJean-Joseph d'Aleman et Jean-Michel d'Arraztoa

A,apilcueta. Martin-Sebastien de Barneche, jurat duvillage d'Azpilcueta, et pour les députés François-XavierdeMigueltorena et André-Xavier de Larregui

Arrayofa. Jean-Gilbert d'Ythurralde, jurat du villaged'Arrayotz et pour les députés Jean de Garaicoéché et Jean-Martin de Inda

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Errazu. Antoine-Étienne Dithurburua, jurat du villaged'Errazu, et pour les députés' DnJoseph-ManueldeYrigoyen,Jean d'Iturriria, François d'Hiriarte et Martin-Thomas Di-turburua

Lecaro,a. Antoine Jaimenera, jurat du villagede Lecaroz

et pour les députés Jean-Pierre Iparrea et François de Gar-chitonna

Berroeta. Jean-Michel d'Iparrea, jurat du lieu de Ber-roeta et pour les députés François Gaztelu et Martin deYriarte

Orono, François d'Erreguerena, jurat du villaged'Oronoz et pour les députés Jean-Baptiste d'Yriart et Felizde Bertiz

Eluela. Manuel de Goyeneche, jurat du lieu d'Eluetaet pour les députés François-Xavier d'Amorena et Ignaced'Echenique

Ci~a. Jean-Michel de Mendiburu" jurat du village deCiga et pour les députés Martin-Manuel de Mendiburu etPierre-Mariano de Echeverria

Ari,~cun. -Jean-François d'Aguerreberé, juratdu villaged'Arizcun et pour les, "députés Jean-Joseph d'Echenique,Joseph d'Echenique, Joseph-Mathias de Barneche et Jean-Martin d'Iribarren

Anix. Jean-Pierre d'Urrutia, jurat du lieu dit Aniz et

pour son député Jean-Martin de JoanacorenaAlmandoz. Jean-Martin d'Echeandi, jurat du village

de Almandoz et pour les députés Dn Martin d'Echeverria etPierre-Joseph de Arrache.

Tous tels qu'ils sont dénommés alcaldes, jurats et députés,leur nombre classique étant rempli; les présens agissant etœuvrant par eux-mêmes et les absens par ceux à qui ils ontdonné leur procuration, conformémentà la loi de rato gratoésljudicatum, les certificats de leur autorisation étantproduits

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par moi notaire soussigné, de quoi je rends témoignage,s'étant-ainsi assemblés et réunis pour tenir l'une des as-semblées générales établies par les ordonnances pour traiter,résoudre et régler les cas et les affaires concernant le bongouvernement de cette vallée, ils ont résolu ce qui suit,l'attestant par moi, notaire soussigné et du nombre de ceuxattachés à icelle

Premièrement, monsieur l'alcalde a dit que les faceries(pactes) ou communicaiions de paccages avec le bourg deSare, faites par écrit pour dix ans expiré, M. l'alcalde de cedit lieu de Sare, dans la province de Labour en France, ademandé par une lettre à lui adressée leur renouvellementqu'il a répondu qu'il exposeroit son désir à cette assemblée,

comme il le fait réellementen invitant l'assemblée à délibérer

sur cette proposition. Enayant donc donné parfaite connois-

sance à tous ses membres, l'ayant longuement discutée, ilsont convenu que le renouvellement de l'écrit cy-dessus citéest de l'intérêt de l'une et de,l'autre communauté, et ont régléet déterminé que cette affaire se conclura dans les mêmesmodes antérieurs ou autres qu'on jugera être plus utiles ouavantageux, afin que Rareil effet s'ensuive par le présentacte et sa teneur en la forme laplus solennelle, légale efficaceet correspondante possible, ils confèrent tout leur pouvoirplein, général ou spécial, quel que soit nécessaire ou, puisserêtre, au déjà nommé Monsieur, Dn Joseph-Joaqu-in-GastonIriarte, alcalde, j juge capitainede guerre de cette vallée,,afinqu'en.son nom et représentation, prenant pour ses aides lespersonnes qu'il croira lui convenir, et de son choix, ils'abbouche avec les fondés de pouvoir que nommera le sus-cité bourg de Sare, traite avec eux le modeet les circonstances

sur lesquelles on arrêtera le nouvel accord et qu'apr~s être

convenu des divers points, qu'il en dresse l'acte écrit avectoute la solidité nécessaireet pour le temps jugé convenable.

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Fin. Après cela, cette assemblée finit et les MM. déjànommés m'ont obligé, moi notaire, à faire cet acte qu'ontsigné ceux dont les noms suivent et en foi de quoi, moi le,notaire:

JOSEPH-JOAQUIN DE IRIARTE JOSEPH-MANUEL DE IRI-

GOYEN; SÉRAPHIN DE BICONDOA; LÉON DE LANDA

FRANÇOIS-XAVIER DE MIGUELTORENA; PIERRE-

JOSEPHDuHALDE;MARTIN O'AICINENA; AN-1-OINE-

ESTEBAN DE ITURBURUA PIERRE-JOSEPH DE

ARREDA;JUAN-BAUTISTADEECHEVERRIA. Devantmoi JEAN-LUIS Dk MUTUBERRIA, notaire.

Nomination. Je certifie que cette copie est légalementconforme à son original qui se trouve dans le livre actueldes accords et délibérations de cette vallée et université deBaztan, et en foi que cela est ainsi, j'écris et je signe commej'ai coutume en témoignage de vérité

JEAN-LUIS DE MUTUBERRIA, notaire.

Dans le village d'Elisondo, le septième d'octobre de mil;huit cent, a paru en personne devant moi, notaire royal etles témoins soussignés, M. Dn Joseph-Joaquin-Gaston deIriarte, alcalde, juge, capitaine de guerre de cette noble vallée

et université de Baztan, ayant.son pouvoir spécial, lequel lui

a été conféré par l'acte précédent, a dit qu'un de ses pouvoirsconsiste à nommer des députés pour s'abboucher, traiter etarrêter avec lui les faceries ou l'acte écrit de communicationdes paccages et nomme en conséquence, Da Michel de GamioIrigoyen, teniente (ou lieutenant) d'alcalde, vecino du villaged'Aris'cun, Dn Joseph-Manuel de Irigoyen, de celui d'Errazu;Jean-Pierre et Martin de Zaldarriaga, frères vecinos desvillages d'Arrayoz et Lecaroz, auxquels il donne la mêmefaculté que lui donne l'instrument déjà cité pour traiter, in-

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te~venir et se réunir dans l'affaire dont il s'agit, et l'a ainsiarrêté étant témoins Jean-Joseph de Ech'enique et Joseph-Antoine d'Echevers, habitans de ce lieu, et ont tous sous cy-signés avec moi, notaire, afin qu'il en soit fait foi et qu'il enconste.

JOSEPH-JOAQUIN-GASTON DE IRIARTE JEAN-JoSEPH

DE ECHENIQUE; JOSSPH-ANTOINE D'ECHEVERS.

Devant moi JEAN-LUIS DE MUTUBERRIA, notaire.

Acle passé par écrit. En l'endroit de Mihuralar, sépa-ration des terres de Sare et de la vallée et université de Baz-

tan, le neuf octobre de mil huit cent, devantmoi, notaire royalet attaché à cette vallée et les témoins soussignés, se sontconstitués d'une part en leurs propres personnes MessieursJean Dop, lieutenant d'alcalde; Pierre ArozteguyArrozagaray,Pierre Lahetjuzan Argain Jean Dop l'ainé Pierre de Peru-gorria" propriétaire ancien de Leguria Joseph GoihecheChuriteguy et Martin de Arostegui Sorhoindo, tous fondésde pouvoirs du dit lieu de Sare, ses propriétaires et conseils,

pour arréterle présent acte et de l'autre les sieurs Dn JosephJoachin-Gaston de Hiriarte; alcalde,-juge, capitainedeguerreae la dite vallée de Batzant le Révérendissime Père maîtreDn Augustin de Sansberro, chanoine prémontré et vicaire duroyal monastère de Saint-Sauveurdu bourg d'Urdach; Dn An-

toine d'Arrospide, chanoine d'ycelui, agissant en son nomet ce représentant; Dn Michel de Gamio }rigoyen, lieutenantd'alcalde de la dite vallée; Don Joseph-Manuel d'IrigoyenJean-Pierre et Martin de Zaldarriaga, vecinos des lieux d'Er-razu, Arrayos et Lecarroz, munis de pouvoirs et députés dela dite vallée de Baztan Dn Martin de Iratceburu, lieute-nant d'alcalde du bourg d'Urdach Jean-~à.ptiste de Mihura;J ean- Michel de Alzualdé et Jean-François de Peruena,vecino et députés du lieu de Zugârramurdy.~Et tous étant as-

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semblés ont dit au nom de leurs comettansrespectifsque lesfaceries conclues en mil sept cent quatre-vingt-dix pour dix

ans, ayant expiré, se sont réunis, en se donnant mutuellementd'avance avis, pour traiter, discuter et prendre des détermi-nations sur la manière,conditions et circonstances d'après les-quelles on pourra les renouveller, afin que par ce moyen onpuisse obtenir les favorables effets que l'expérience a démontrérésulter pour les communautés qui sont voisines adjacentes.C'est pourquoi, usant des facultés respectives dont ils se trou-vent munis, après en avoir conféré et après avoir mûrement ré-fléchi et sans trouble, ils ont résolu de faire et d'arrêter un acteécrit des faceries et conventions pour le temps de dix annéesqui commencent au jour d'aujourd'hui et finiront en unpareil de l'an 1810, sous les qualités, circonstances et condi-tions qui sont contenues dans les chapitres suivants

1° Premièrement, on est convenu qne la vallée et univer-salité de Batzan, le bourgd'Urdax et ses propriétairesqui sontles dits monastères d'Urdach et le village de Zugarramurdyet leurs habitans, pourront pendant la durée de ces dixannées, depuis le douze du présent mois d'octobre jusqu'auvingt et deux mai inclusivement de chaque année, jouir desherbes et des eaux de soleil à soleil, y conduisant toute èspècede troupeau, du gros bétail comme du menu, dans les terresde la commune de Sare et réciproquement; les habitans deSare auront le même pouvoir dans les territoires de la ditevallée de Baztan, monastère d'Urdax et Zugarramurdy.

2° Item. On est convenu que pour éviter toute fraudedans la jouissancedes terres respectives, le troupeau à cornesde chaque communauté doit être marqué ou cautérisé avec lamarque à feu ou sur un de ses côtés ou sur une corne, afin

que la bête puisse être reconnue. Celles de Baztan auront ou lalettre de leur propre village ou celle de chaque propriétaireusitée jusqu'aujourd'hui. Celles du bourg ou monastère

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d'Urdax la lettre V. Cellesde Zugarramurdy la lettre Z. Cellesde Sare la lettre S ou celle dont se sert spécialement le pro-priétaire, etque le troupeau qui ne sera pas muni de pareille

marque pourra être saisi et sujet à la peine qu'on jugera àpropos d'infliger.

30 Item. On est convenu qùe le gros et menu bétail deBaztan ou des autres communautés qui se trouvera dans les

terres de Sare, hors le temps marqué dans le premier article,

pourra être saisi, assistant à la saisie ùn jurat de Sare, et.dela même manière les troupeaux de ce peuple pourront demême être saisis dans.les terres de Baztan, Urdax et Zugar-ramurdy dans le temps prohibé, assistant pareillement à lasaisie un jurat du même peuple sur le territoire duquel sefaira l'arrèstation. Toute saisie faite en toute autre forme seranulle les saisies après le coucher du soleil seront sujettes à-la même forme, et un religieux devra assister aux saisies quefera le monastère dans ses propriétés, sous peine de nu.llité.Les gardes-boisassermentés auront uniquementla faculté defaire des.saisies quand il y aura prohibition des pâturages,des glands, dans les communautés par qui ils sont commiset dans les endroits confiés à leurs soins.

4~ 1tem. On est convenu que la saisie de tout gros bétail

en temps qu'il n'y aura pas pâturage prohibé sera payée cinqsols pour chaque tête et du menu un sol par chaque tête eten temps de pâturage prohibé, pourvu que l'avis en soit donnéofficiellement, dix sols pour chaque -tête de gros bétail pourquelque, communauté que ce soit huit sols pour ceux etchaque des cochons, et six liards pour chaquetête à laine ouchèvre, étant en toute espèce libres les petits à lait.

5~ItPm. On est convenu que les'habitans de Sare pour-ront couper de la touie dans l'endroit que la vallée s'estréservée pour elle-même et non cédé au village de Zugarra-murdy dans l'acte de férme des fougères qui lui fut fait le

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trois du mois de juin mil sept cent quatre-vingt-cinq, passé'devant et par Jean Alexandre de Echevesté~ notaire.

Ils pourrontuser de cette faculté les deux premières annéeset trois dernières de ce pacte, et non pendant les cinq inter-médiaires, sous peine de payer quarante livres d'amende sion y contrevient, et chaque fois qu'on y contreviendra et quel'on prouvera la contravention.

Pareillement, il leur est défendu de travailler dans les en-droits que la vallée se réserve spécialement dans le dit même

espace, sous la même peine, et en outre sous peines des frais

que les poursuites pour la conviction pourroient occasionner.Il leurest seulementt accordé le pouvoir de couperde la fougèredans le temps p~rmis dans les endroits d'Olassurgaray, Zo-zarteaga et Fagadoy.

Pour profiter de la touie dans les deux premières et troisdernières années de ces faceries, ils doivent la couper sépa-rément ou mêlée depuis le deux septembre de chaque annéejusqu'au dernier jour de février inclusivement; ils encourrontla peine sus indiquée s'ils en coupent hors ce temps ou si onle leur prouve. Ils seront tenus d'enlever tout ce qu'ils aurontcoupé pendant tout le" cours du mois d'avril: sous peine de

trente livres d'amende. De même les habitans de Sare aurontla faculté de transporter de la pierre calcaire pour faire de lachaux et non pour autre destinée de la carrière qui se trouvesur Madariaga. Ils en pourront également extraire pour dixfours à chaux et non davantage de la carrière d'Alquerdy,enclavéedans le territoire cy-devant du monastère et aujour-d'hui du bourg d'Urdax.

6~ Item. On est convenu que dès qu'une saisie sera faite,

ceux de Baztan en donneront de suite avis au jurat de Sare,et celui-ci à son tour sera tenu de donner le même avis aujurat de l'un des trois peuples à qui appartiendrala bête saisie.De suite après l'avis, les. propriétaires du bétail saisi acçour-

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ront pour le réclamer dans l'espace de deux jours, sous peinede payer les frais de manutention et de garde outre la saisie.

70 Item. On admettra aux habitans de Sare, dans lespâturagesda printemps de Baztan, cent têtes de bêtes à cornesen chacune de œ&dix années et non davantage, à conditionqu'ils les agrégerontaux animaux en pâturage de la vallée,donnant au pâtre le prix convenable pour les garder et en enconvenant avec lui, s'obligeant d'envoyer pour le jour deSaint-Jean de juin de chaque année, individuelle du dittroupeau,,avec l'expression de ses propriétaires et du pâtre àla garde duquel il aura été commis, et cela par l'intermédiairede l'alcalde actuel ou 'futur de Sare et de celui actuel oufutur de Baztan, sous peine de saisie.

8~ Item. On est convenu que les habitans de Sare per-mettront à ceux de Zugarramurdy de couper de la fougère dansla partie de Madariaga pour venir au-devant de la nécessitéde plusieurs propriétaires des bordes immédiates (voisines),faisant la dite coupure dans'les endroits expliqués ou signalésdans ,les précédens écrits il est arrêté qu'ils ne commence-ront à y travailler que le vingt et deux septembre en avant.Les habitans de Zugarramurdy s'obligent de leur côté delaisser en compensation de cette.faveur couper de la fougèreà ceux de Sare dans les terres qu'ils tiennent affermées de lavallée de Baztan en vertu de l'écrit sus mentionné, à condi-tion que ceux de Sare ne pourront faire travailler à la dite

coupure plus de quatre hommes par chaque famille; cettecondition sera réciproque à ceux de Zugarramurdy qui nepourront travailler qu'avec quatre ouvriers par famille dansl'endroit de Sare sus dit. Ceci ne s'entend que pour la duréede l'afferme faite à ceux-de Zugarramurdyou pour la duréed'une continuationaccordée. Il y aura amendede cinq piastres(20) soit contre ceux qui commencent ces coupures avant le

temps convenu, soit contre ceux qui travaillent avec plus de

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quatre ouvriers, la même amende devant être infligée et pourchaque fois et pour chaque personne au-dessus de quatre. Lamême peineest prononcée contre ceux qui commencent avantjour. On devra travailler d'une ~anière continue et non ensautillant, commençantici et là un nouveau rang de fougère,et cela sous la même peine. Les habitans de Zugarramurdypourront se servir durant cette permission de l'eau qui leurvient de Sare pour leur moulin.

9° Item.. Que tout bétail à cornes qui aura contracté lacoutume d'écorcher les arbres sera retiré, en en donnant avisau jurat de la communauté d'où il proviendra, dans l'espacede huit jours, sous peine de cinq piastres d'amende pourchaque fois que la contravention sera découverte par quelle

que ce soit des communautés.100 Item. On est convenu que lorsque le terme de dix

ans sera écoulé, il suffira pour leur continuationqu'une com-munauté écrive à l'autre et demande que les mêmes faceriessoient continuées telles qu'elles sont arrêtées; si sur ces en-trefaites il ne se présente aucun nouvel obstacle, et si le ditobstacle a lieu, une communauté avertira l'autre afin qu'ellessoient convoquées au même endroit, afin de traiter, conférer

et établir une nouvelle convention.Le présent acte est arrêté avec ces clauses et devient obli-

gatoire en vertu des pouvoirs suscités, les contràctans s'ysoumettent etobligent leurs commettans, avec tousleurs biens,

rentes et expédiens, à ne point contrevenir à sa teneur, souspeine des frais et des dommages, pour quel effet ils se sou-mettent au nom de leurs commettans au bénéfice de la resti-tution in inte~rum, prévenus de cette disposition par moi,notaire, et pour que ce qui a. été arrêté ressorte sa plus grandesûrété et force, le sus nommé Dn Joseph-Manuel de-Irigoyen,vecino du lieu d'Erazu, a été présenté et donné par ceux deBaztan à ceux de Sarecomme hommede confianceet caution,

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pour les saisies qui pourroient être faites de part et d'autre.Ceux de Zugarramurdyprennent pourlesmêmes fins l'alcaldede Sare actuel etfutur, et ceux de Sare pareillement l'alcaldeactuel et futur de Zugarramurdy. ·

Les dits Hirigoyen et Dop et, les alcaldes actuels des ditspeuples étant présens et convaincus de l'effet de ce caution-nement ont dit qu'ils se constituent et se reconnaissent pourtels, s'obligeant effectivement en forme légale à tout ce queleurs commettans deviennent obligés, se soumettant à la loiprésente de fide juro rebus. Et les fondés de pouvoirs ont'reconnu l'obligation de les exempter de ce cautionnement et

.'de les indemniser personnellement de tout préjudice. Et pourâtre forcés àces heureux effets.ils ont donné toute faculté auxjuges et administrations de Sa Majesté qui pourront et de-'vront connoqtre de cette cause en forme de ~~e

judicaia, àl'autoritéde laquelle ils se soumettenten renonçant à la leur'propre, à leur vrai juge, domicile et à la loi, si conoeneril dejurisdiclioneomnium judicum. Prévenus et avertis de cettedisposition par moi notaire. De quoi je constate et donne foi,moi notaire, et l'ontainsi arrêté en étant témoinsJean-Josephde 'Echeniqùeet Martin-Joseph de Goyheneche, habitans deslieux d'Elisondo et Errazu,'et l'ont signé ceux dont suit lasignature avec moi notaire

,Dn AUGUSTIN DE SANSBERRO; J EAN-JOAQUIN- GASTON

DE '1 RIART,E; Dn ANTONIO DE ARROSPIDE; JUAN

Dop; Dop GARA T;, MICHEL DE GAMIO IRIGOYF.14;

HAROSTEGUl ARROSSAGARAY; LAHETJUSANj JO-SIrPH~MANUEL DE IRIGOYEN; MARTIN DE IRACE-

BURU~ HAROSTEGUl DI'~IiURBIDE~~ GOYHENECHE;

J UAN-FRANSCISCO DEPERURENA JUAN-MICHEL

DE ALUZALDE; J EAN- PEDRO DE ZALDARIAGAj JUAN-

.JOSEI'H DE ECHENIQUE. Devant JEAN-LUIS DE

~MUTUBERRIA~ notaire.

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Je certifie que la précédente copie est légalement conformeà son original qui est à mon pouvoir dans les registres, et enfoi que cela est ainsi, donnant la présente expédition à la de-mande du bourg de Sare, j'écris et je signe, comme j'ai cou-tume de le faire, dans le village d'Elisondo, le vingt du moisd'octobre de mil huit cent un.

En témoignage de vérité

JEAN-LUIS DE MUTUBERRIA, notaire.Pour copie.

Quaderno de las leJes y agraaios reparados h suplicacion delos tres Estados del Reyno de Naaarraen las Cortes delano de 1757, por la Majestad Real del Senor Re~y DonFernandoII de Naaarra y VI de Castilla, nuestro Senor

(En Pamplona en la imprenta de Don Miguel AntonioDomech, afio 1758, folio, pp. 246).

LEY XXXV (page 109)

Se prohibe la venta por la menrcda del aguardiente, r~ demaslicores ardientes

S. C. R. M.

Los tres Estados de este Reyno de Navarra que estamosj untos, y congregados en Cortés generales,por mandado deV. M. decimos que son muchos é imponderables los danos

que a la salud publica causa el desordenado uso del aguar-diente, mistela, y otros ardientes iicores pues la esperiencia

nos esta demostrandoque, propensos los hombres a este vicio,

mueren abrasados unos en su edad mas florida, y quedan

otros inutiles, y sin provecto para el trabajo de que se siguenmuchas y grandes ofensas a Dios, no poco deservicio a

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158 LES LOISIRS D'UN ÉTRANGER AU PAYS BASQUE

V. M. en la falta de gente; por 10 que haciendose por todosmodos preciso el temedio, occuriendo a. el

Suplicamosa. V. M. se sirve concederllos por ley

,1. Que de-adelante en ningunas ciudades, villas, valles Y*

lugares de este reyno, se pueda vender, dar, ni regalar parla menuda aguardiente,mistela, ni otros semejailtes ardienteslicores assi de este dicho Reyno, como fuera de él, pena decincuenta libras a. el que asi 10 diere, ti vendiere, aplicadas

por tercias partes a. la Camara, y fisco de V. M. juez' y de-.nunciante.

2. Que en la forma referida solo se puedan dar y venderpara remedios en las boticas, precediendo receta de Medico,Cirujano u Albeytar aprobado, quienes bajo la misma penano la puedàn dar, sin causa justa.

3. Que los boticarios para este efecto deban tener dichoslicores, y, 'siempre, que sin la -expresada receta los dieren, Ó

vendierèn, incurran en dicha penà. `

4. Que los alcaldes, regimiento~. juradosy diputados de losvalles zelen la observancia, y cumplimiento de todo 10 con-tenido en este pedimento, bajo la mencionada pena, y 10 con-trario sea caso de residencia; y que en los de contravenciondichos alcaldes, jurados y diputados ejecuten pena, sin em-bargo de apelacion asi là esperamos de la justificacion deM. que en ello, etc.

DECRETU

Pamplona dè Palacio, 13 de Junio de 1T57.

Hagase como el Reyno 10 pide en todos los capitulos, queexpresa, con que quede preservado el derecho de los acredorescensualistas, para que puedan usar de él, como les convenga,para la seguridad de 10s cènsos impuestos, sobre el expediente

Page 181: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

de estos licores en los lugares y valles donde se huviese for-~ado. El gran castellan de Amposta Frey Don Manuel deSada y Antillon.

LEY XXX (p. 68)

Se deroga la 35 de 1757, sobre la venta de aguardientey otros ardiente licores

(En Pamplona en la imprenta de Pascual Ibanez, impre-ser y mercader de libros. Ano 1766. folio, 278 pp.)

Los tres Estados de este Reyno de Navarra, que estamosjuntos, y congregados en Cortés generales, por orden deV. Ma jestad, decimos çue por la ley 35 de las ultimas quese celebraron en esta ciudad se probibiô la venta de aguar-diente, por la menuda, y se libraron otras providencias im-peditivas de los muchosy imponderables dafios que causa eldesordenado uso de ese, y otros ardientes licores, las cuales,no solo no han sido bastantes para el logro de tan impor-

tante fin, sino que ensenados de la experiencia comprende-

mos imposible su observancia de 10 que se siguen al publicomuchos y muy considerables perjuiciÓs; pues sobre verse(sic) fustrado el espiritu, y objeto de dicha ley quedan lasRepublicas privadas de los muchos alivios, que les ocasio-naba el producto de esos expedientes, y muchos aoreedoresCensalitas, sin la pronta y necesaria seguridad de sus capi-tales. Y para que el dano no sea tanto.

Suplicanios ci V. M. con el mayor respeto y veneracion sedigne derogar la precitada ley, y que las cosas queden en elestado que tenian antes de su promulgacion reintegrandoselas Republicas de los expedientes, que sobre la venta de di-chos licores tenian formados permanciendo como antes hipo-tecados à la seguridad do los censos, que sobre ellos huviere

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impuestos, que asi 10 esperamos de la suma justificacion deV. M. y en ello, etc.

DECRETO

Pamplona, y su Real Palacio a 31 de enero de 1766. Ha-

gase como el Reyno lo pide.

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LES FACERIESOU CON'VENTION8 INTERNATIONALES COM-

MUNALES DANS LES PAYS BASQUES'

En cédant à l'instance de notre excellent présidentd'écrire quelque chose sur les Basques ou sur les institu-tions basques pour la Société Ramond, je n'avais pas d'abordpleine conscience que j'entreprenais une tâche au-dessus de

.mes forces. Depuis lors, j'ai été malade et incapable de tra-vailler ensuite, en compulsant mes notes et en cherchantdes matériaux, j'ai éprouvé combien a été grande la pertede la bibliothèque de Bayonne, incendiée il y a deux ans.Il y avait tant de livres que j'avais lus là seulement, de do-

cuments que je savais y exister; j'avais cru que, par l'obli-

geance de ses bibliothécaires aussi savants qu'aimables,MM. Hiriart et E. Ducéré, je pouvais les y trouver. Ce n'estqu'en commençant d'écrire que j'ai compris combien mesressources'étaient restreintes,et qu'au lieu d'une riche biblio-thèque et des archives nombreuses, je n'avais guère que mabibiiothèque pæ-tlculière et mes vieilles notes pour m'aiderdans la tâche que j'avais entreprise si témérairement. J'aicherchéen vain dans les catalogues des bouquinistesquelqueslivres les plus indispensables Habent sua fata libellil--on les trouve rarement quand on en a le plus grand besoin.

Je vous prie donc d'excuser l'insuffisance complète de

1. Bulletin de la Société Ramond. Premier trimestre de 1892.

Page 184: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

oette étude,et de l'accepter seulement comme une marque debonne volonté.

Qu'es~8 que les faceries ou facerias? Le mot est devieille date,at e~t France et en Espagne. On le trouve estropiéde mille façons, et les e~plications en sont quelquefois assezcurieuses. Les faceriesou facerias,en France ou en Espagne,veulent dire ordinairement les conventions ou contrats pourl'usage et la jouissance des pacages, herbes, touyas, fougères,eaux, pierres à chaux, glandage, etc., faites entre deux pa-roisses ~ou communes limitrophes, soit dans l'intérieur dupays, ou, ce qui est de beaucoup le plus intéressant, é,,ntre

des paroisses limitrophes et voisines de la frontière.Ce qui donne aujourd'hui quelque intérêt et importance

aux faceries consiste dans le fait que ces conventions, sou--

vent internationales, furent conclues et réglées, changées ourenouvelées, sans la moindre intervention de l'autorité su-préme et centrale, ou de France ou d'Espagne. Que-mêmequand les gouvernements et les nations furent en guerre, lesfaceries ,subsistaie'nt toujours. Elles furent même sauvegar-

dées dans les grands traitéseuropéens, comme celui d' U trecbt,én 1713.

J'ai trouvé dans les archives de la mairie de Sare; la com-mune d'où j'éeris ces lignes, une note annexée à une fàcerie,faite entre Sare et la vallée de Baztan,le 25 septembre 1800,qui donne une assez bonne définition de ce dont il s'agit. Elleest en erreur seulement sur l'étymologie du mot

NOTE SUR LES FACERI~S

« te nom de' facerie vient de faça, qui, dans l'antique» langue ibéricnne ou cantabre, conservé dans l'idiome) basque, signifie ostentation, solennité, luxe. Les faceries

» ont été de tout temps regardées comme des transactions» saorées auxquélles aucune autorité quelconque n'y pouvoit

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» toucher, pasmêmeles transigeans; à moins d'une conven-» tion libre, réciproque spontanée des deux parties, comme» on peut s'en convaincre par leur teneur.

» C'est en constituant et établissant ces faceries que les ha-» bitans des communes exercent leur souverrainnité (sic)

)) légitime, exercice qui ne nuit point aux. droits souverains» des monarques re,epectifs, dont les intérêts généraux et» spéciaux n'y sont pas blessés, pas même ceux des com-» munes non contractantes. Ces faceries sont cependant sous» la surveillance paternelle des souverains qui ne manquentJ) pas de porter une attention scrupuleuse aux droits sacrés

» de leurs enfans, ainsi quand une commune manque à unedes clauses des faceries, on peut citer son maire,ou alcalde,

» ou chargetenant, indifféremment ou au tribunal, ou à l'ad-» ministration civile. »

L'étymologie donnée ci-dessus du mot facerie ou faceriaest évidemment fa'usse. Le mot n'est pas basque du tout. maiscertainement espagnoi' Le motfaceria, dans cette même si-gnification, se trouve dans le Fuero Vieio de Castilla (ley 14.tit. 3, lib. V) 2.El Fuero Viejo de Caslilla date du XIVe siècle,du règne de Don Pedro 1er. Mais ce fuero n'est guère qu'unecompilation des fueros municipaux et locaux antérieurs,dont plusieurs datent du XIIe ou peut-être du XIc siècle. Le

1. Faceria s. f. prov. Navarra la sociedad o comunidad depastos que para sus ganados se prestan entre si los pueblos conve-oiuos. Diccionario Enciclopédico de la Len,gua Espanola por DonN. J. Cuesta, Madrid, 1872.

2.« Esto es Fuero de CastiellaQue si dos viellas que son faceras,ean termino en uno, e nou es partido, si quisieren partirlo, devenpartirlo a piertega medida. »

Dans les archives d'lrun, il y a des « Autos de facerias y amojo-namiento entre Lesaca, Oyarzun é Irun de 1739.1828)), mais « lasordenanzas antiguas » avec Lesaca sont de 1560-1613. Indice de los~Documentos del Archico ~el Exçmo. Ayuntamiento de la oilla deIncin, por D. Serapio Múgica, p. 80. Irun, 1898.

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même mot évidemment, quoique estropié, se trouve, selonDralét, « dans une ordonnance de Louis XII, du dernierjan-vier 1515, et dans l'acte de passeries, du 22 avril 1613 0.« Par cette ordonnance, le roi de France, confirmant les

» traités, accords, conventions, surséances et abstinences de

» ~guerre, résultant des usages anciennement établis,-met en» liberté dix ou douze sujets du roi d'Aragon faits prison-

» niers par un officier français dans une foire tenue à Saint-))Béat, et pourvoit à la restitution de certaines sommes qui» avaient été exigées des habitants de la frontière.

» Par l'acte de passeries, des commissaires respective-

» ment nommés par les deux monarques, et assemblés sur» les frontières de l'Aragon, conviennent, entre autres

» choses

» 10 Qu'en temps de guerre, les habitans des montagnes et)) vallées françaises pourront commercer, communiquer avec» leurs voisins, les Espagnols, et faire l'échange de leurs

» marçhandises, comme en temps de paix. dans les lieux»' dont la désignation est donnée;

» 20 Que pareillement les habitans des pays espagnols

» pourront voyager et commercer dans les pays français;

» 3° Que, si quelque attentat particulier était commis, ce

» ne serait pas un motif pour rompre les communes conven-

» tions;» 40 Que les bestiaux desdits pays pourront pâturer dans

» toutes les parties des montagnes comme en temps de paix,

» et que, si les gens de guerre venoient à enlever les -bestiaux

» dans une vallée, les habitans seroient obligés de payer en-» tièrement ces bestiaux;

» 50 Que, s'il arrivoit que l'on fit des prisonniers, ils se-

» roient rendus à la première sommation, et que les per-)) sonnescoupablesde cette contraventionseroient punies par» les juges compétents

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» 60 Que ces accords ne pourront être rompus qu'après un) avertissement fait trente jours d'avance, pendant lequel» temps les habitans des deux pays devront retirer leurs

» marchandises, bestiauxet argent. »Je crois que ces faceries, passeries, conventions, commu-

nions, des avantages réciproques entre les paroisses et com-munes limitrophes sur les frontières des deux nations fran-çaise et.espagnole ont eu lieu tout le long de la chaine desPyrénéesf. Mais, comme j'ai déjà dit, nous pouvons constaterl'existence des faceries dans la Castille bien plus anciennesqu'aucune facerie actuellementexistante entre les communesde frontière, au moins à ma connaissance.

En commençant par la limite occidentale, il y a des con-ventions très importantes entre les communes françaisesd'Hendaye, Béhobie, Biriatou et les villes espagnoles Fonta-rabie, Irun et autres « Cinco Villas o, relatives à la pêche dusaumon dans la Bidassoa. Cette pêche fut autrefois d'une telleimportance qu'elle fut réglée par des traités internationaux de1464, de 1510, de 1683 et d'autres; mais, par ce fait même,elle est hors de notre sujet actuel.

A- Biriatou,cependant,nous avons vu une facerie faite avec

Deqeriptiondes Pyrénées, par M. Dralet, à Pari%, chez ArthurBertrand, 1813, t. Il, pp. 207. 208. Je regrette beaucoup de n'avoirconnaissance de cette ordonnance de Louis XII, et de l'acte de Pas-series, que par cette citation de Dralet. J'aurais bien voulu consuherles pièces originales.

« Quant aux vallées supérieures, telles que la vallée de Barèges, cesont de véritables petites républiques, concluant, sans intervenûon ducomte,,des paxel'Ïes ou traités de paix, uon seulement avec les val-lées voisines de Bigorre et de Béarn, mais encore avec les vallées e:-pagnoles de la Tena, de Brota, de Bielsa; Elles administrèrentelles-m~mec, et lorsque le comte veut pénétrer sur le territoire de la valléede Barèg",s, il est obligé pour sa sûreté d'exiger des otages.)) Géo-

graphie du Départementdes Hautes-Pi/rénées, par Adolphe Joanne,p. 41. Hachette, ¡.Jaris,l886..

Page 188: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

la commune de Vera, tout à fait pareille aux faceries dont

nous allons nous entretenir, et qui leur a même servi de

modèle. Je ne veux pas, néanmoins, m'y arrêter, parce quej'ai trouvé dans les archives municipales de la commune deSare toute une série de faceries, faites sowent en double, enfrançais et en espagnol, entre cette commune et les paroisseslimitrophes espagnoles de Vera, Echelar, et la vallée deBatzan, depuis 1er octobre 1748 jusqu'à l'heure actuelle

Naturellement la f~lCerie du 1 ~r octobre 1748 n'est pas lapremièreconvention de ce genre faite entre ces paroisses, seù-lement elle est la plus ancienne conservée dans nos archives.

Le. préambule dit« Grosse d'une acte, portant renouoellement des conven-

» tions d'entre lesdites communesde Sare et Bera sur l'usage)) des herbes et des eaux. »

Plus bas, dans la facerie elle-même, on donne comme lébut de la convention

« Dans la veüe de fortifier la bonne union et correspon-» dance dans laquelle les habitans desd.. deux paroisses

» viventensemble depuis un tems immémorial, elles se sont» assemblées ce jourau présent lieu pour conférer sur l'usage» des herbes, paccageet eaux desd deux paroisses, en sorte» que le résultantdesd.. conférences a été que les pactes,» conditions, limites, bornes, peines et amendes énoncées

» dans un contrat passé entre les sieùrs'alcalde, maire-abbé,

» jurats et députés desd. deux paroisses, le vingt-quatrième» jour du mois de septembre mil sept cent trente-un, devant

» Mes Duhalde et Hiribarren, notaires royaux, reservés pour) lesd. deux 'paroisses, seront exécutés pendant neuf ans» prochains et consécutifs. »

Les faceries de Sare sont faites respectivement entre Sareet la commune de Vera ou Bera, entre Sare et la communed'Echelar,et entre Sare et la vallée de Baztan, Vera et Eche-

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lar sont de simples villes, bourgs, communautés mais lavallée de Baztan est tout autre chose. Elle parait dans cesfaceries, non comme une seule paroisse, mais éomme unpetit État indépendant, avec une assemblée représentativecomposée de quatorze villages ou villes, qui constituent lafédération de la vallée, du monastère d'Urdax et de la com-mune de Zugarramurdi. Tous ces lieux avec les noms deleurs députés sont notés dans la facerie, avec le jour et le lieude l'assemblée qui donne les pouvoirs aux individus délégués

pour signer le contrat « En el Lugar de Eliiondo y dentro» de la Casa y Sala de Ayuntamiento de este valle y univer-

)) sidad de Baztan dia del Arcangel S. Miguel veinte y nuebe

» septembredel ano de mil sieteciento y ochenta se juntaron» y congregaron como uno de los destinados para la celebra-

» cion de las q uatro J untas generales de Fabla, según de la)) manera quels tienen de 'uso y costumbre para trabar re-» solber y determinar los casos y negocio tocantes al buen

» gobierno de este valle, etc. 1 »

Mais, quoique toutes les conditions et tous les articles dela facerie soient discJ.tés et déterminés dans cette assembléegénérale, la facerieelle-même était toujours faite, et la réuniondes délégués des deux côtés avait lieu toujours en plein air

sur la limite frontière. et à la borne traditionnelle entre les

communes contractantes. Ainsi les faceries entre Sare etVera furent conclues « au lieu appelé Lizunaga, limitropheentre les paroisses de Berha et de Sare, 8citués auxroyaumes d'Espagne et de France » entre Sare et Echelar,

« au lieu appelé Narbalax, confins d'entre la presente pa-roisse'de' Sare et de celle de la noble ville d'E.tchelar, en lahaute Navarre, au royaume d'Espagne )) entre Sare et laBaztan, « au lieu appelé Mihular, limitrofe d'entre la pré-

sente paroisse et la noble valée (sic) de Baztan ». Car une1. Voyez plus haut, le mot RépuGlique. Pièces jiesti jlccctices,

p.146.

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des raisons d'être de ces faceries était de fixer hors disputeles limites et les bornes des communes respectives, souventles limites y sont constatées avec les détails les plus minu-tieux. En quelques lieux d'Espagne, on pratiquait une mé-thode bien héroïque pour implanter la situation exacte de laborne dans la mémoire des jeunes assistants

«Para que todos los veci-

» nos tengan conocimiento

» de los lugares donde se» hallan los mojones y no se» les olvide, hay la costumbre» en algunos pueblos de ir â

» revisarlos de tantos en tan-» tosaiios,para 10 cual se reu-

» nen varios vecinos del pue-» bio con todos les chicos

» del mismo, y fraccionando

» se los hombres y niûos, va») un grupo à cada punto car-» dinal. Llegados al sitio, un» hombre busca el. mojÓn,

» que a; veces esta. entre la

)) maleza, dice a. los chicosdtinde esta los demis

)) hombres cogen a los mu-» chachos, diciendoles que» miren donde esta el mojÓn,

» y les dan un buen tirÓn de

» orejas. Con esta operaciÓn,

» jamas se, les olvida. Yo

» puedo decir que, siempre

» que pasaba por alli, me» acordaba, no solo del mo-

« Afin que tous les voisinsaient connaissance des en-droits où se trouvent les bor-nes, et ne les oublient pas,c'est l'habitude de certainsvillages d'aller leur faire vi-site de temps en temps, etpour cela les hommes du vil-lage se réunissent avec tousles gamins, et se séparant engroupes, ils s'en vont chaque

groupe vers chaque point car-dinal. Arrivés là, un hommecherche labornequi se trouve-quelquefois cachée par lesfougères, et montre aux ga-mins l'endroit les autreshommes saisissentlesenfantsèt leur disant de bien regar-der où est la borne, ils leurtirent fortement les oreillesDe cette façon, ils ne l'ou-blient jamais. Quant à moi,

*je peux dire que' toutes lesfois que j'ai 'passé par là, jeme suis rappelé non seule-

ment de la borne, mais de

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» j6n si que tambien del ti-

.» rôn de oreja. Para com-» pensarles de este pequeÍÍo

» dano, les convidan pan,» queso y vino del que paga» la taberna al municipio.

» Del termino proprio de

» cada pueblo, se ceden mu-» tuamente los municipios li-

» mitrofes una parte de el,

J) Hamada alcances, que sue-» le principiar a. mediados de

» Noviembre Ó San-Martin,» con el fin de que los gana-1) dos tengan mas extensitin

» -para pastar. ( Valle de Za-» manzos, Soria). Costa, op.» cit., p. 51. »

Comme on le voit, une commune pouvait avoir autant defaceries avec ses voisines qu'il y avait de communes limi-trophes qui confinaient avec une partie de son territoire.Ainsi Sare avait des faceries ou conventions avec les com-munes espagnoles de Vera, d'Echelar, dé la vallée de Baztan,du monastèred'Urdax, de Zugarramurdi, communes qui laconfinent à l'est et au sud, et aussi avec les communes fran-çaises d 'Ainhoa, Saint-Pée, Ascain, Urrugne à l'ouest et aunord. La durée de la facerie pouvait être de dix, neuf, sept oucinq ans. Ordinairement, elles furent faites pour la périodede dix ou de neuf ans. On portait une grande attention, lors-qu'une commune avait des faceries avec plusieurs communesvoisines;à ce que les termes de ces faceries ne s'écoulaient pastous à. la même date. Dans ce cas, les autres communes au-

mes oreilles aussi. Pour lesrécompenser de ce petit mal-heur, on les festoyait de pain,de fromage et de vin, aux dé-

pens de la municipalité.

Les municipalités limitro-phes se cèdent m1ltyellement

une partie de leur propre ter-ritoire, appelée alcances, dumilieu de novembre on deSaint-Martin, afin que lestroupeaux aient plus d'espace

pour pâturage. »

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raient pu s'entendre ensemble, et auraient pu imposer desobligations onéreuses à une seule commune par la menacede l'exclure tout à fait de l'usage de tous leurs pacages eteaux, etc. Mais ayant soin de tenir le terme de chaque faceriedistinct du terme des faœries des autres communes,on pouvaittoujours discuter en pleine liberté avec chaque communeindividuellement sans avoir égard aux autres.

Les intérêts et même les matières dont les faceries traitentvariaient avec les différentes communes, selon le climat,l'élévation, le sol, les produits, et les besoins spéciaux dechaque commune. Une commune possédait de belles forêtsde chênes et de châtaigners, là le glandage était la principalerichesse mais elle manquait de' p~,tur,ges, ou de chaux, oude fougères, ou les cours d'eaux qui en arrosaient les prairiesou alimentaient les moulins avaient leurs sources dans unecommunequi aurait pu, ou les couper, ou les amoindrir, oules divertir. D'où résulte une grande variété dans les stipu-lations et dans les matières réglées dans les faceries. Oùil.yavait de grands pâturages, c'est le droit réciproque de pacageet la coupe de fougères, touyas, selon les lieux qui en fontl'exploitation plus utile pour l'une des communes que pour

l~autre, qui fournissent le sujet principal dé la convention.Dans une autre commune, ce serait la faculté de glandage

dans les forêts; cédée en échange'd*un droit de pacage, d'usagedes eaux, coupe de fougères; ou de tirer une certaine quan-tité de pierre calcaire ou de chaux de l'autre commune con-tractante. Dans ce cas, la commune forestière montre la plusgrande sollicitude pour la conservation de ses bois. Leschèvres y sont universellement interdites. Les bêtes à cornesn'y sont permises qu'à certaines époques de l'année, et si unebête est reconnue pour avoir la mauvaise habitude d'en-dommager les arbres avec ses cornes, on est ,obligé de retirercet animal. Les cochons.sont.surveillés.de.près. Les étrangers

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qui joûissent de la coupe de fougère sont obligés de prendresoin aux arbres et de mettre un petit monceau de fougère, unfalbat, autour du pied des jeunes arbres, d'entretenir les mursautour des pépinières réservées, et quelquefois même deplanter un certain nombre de jeunes arbres chaque année. Leglandage, la coupe de bois, la récolte des châtaignes avaientautrefois, avant la Révolution, une importance, pour les

communes, tout autrement 'grande; surtout dans le paysbasque et dans le Labourd, qu'ils n'ont à présent. A cetteépoque, les taxes et les contributions n'étaient pas payées pardes individus personnellement, mais par les communes, parles municipalités, en bloc, tout ensemble pour tous les habi-tants de la commune. A Sare, les biens affectés à cette fin

étaient les cinq moulins appartenant à la commune, 'les car-rières de gypse et de pierre, la récolte des châtaignes, maissurtout la vente et la coupe de bois ou la vente de charbon debois. La coupe de fougères et le droit de pacage furent cal-culés seulement pour subvenir aux dépenses des gardes et auxcharges nécessaires. Presque toutes les autres dépenses dela commune; l'entretien des routes, des ponts, des maisonscommunales, des écoles, les taxes et contributions, enfin

tout le budget fut défrayé par les moulins et les bois. Laseule dette sur le registre de la commune de Sare avantla Révolution fut de 7.400 livres, à 3% intérêt, dû à ThomasElissalOe, d'Urdacb, en Espagne, pour la fourniture de jeunes

chênes pour la replantation de la forêt. L'approvisionnementde charbon aux forges de Vera en Espagne fut un des prin-cipaux objets de commerce de la commune. Depuis les dé-vastations de la guerre, d'abord en 1793, ensuité dans les

guerres. de l'Empire, la, pauvreté, la mi,sère, l'incurie deshabitants ont laissé dépérir la plupart de ces bois. Larrhun,qui autrefois'fut couvert de hêtres jusqu'au sommet, n'aguère d'arbres à, présent. La maladie des châtaigniersmenace

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de consommer ce que l'incurie des hommes a si malheureu-sementcommencé.

Vous me pardonnerez si j'insiste sur ce fait des libresbudgets communaux dans le Labourd, dans tout le paysbasque, dans la vallée d'Aspe jusqu'à un certain degré, etprobablement dans d'autres endroits des Pyrénées. C'était.l'indépendance complète du budget communal de tout con-trôle de l'État'qui, seule, rendait possible cette action indé-pendante, « la souveraineté légitime » de ces communesdans leurs traités, conventions et faceries faites avec leursvoisines d'Espagne.; Elles négocient entre elles comme depetits États indépendants. Elles en ont toutes les allures.Elles ont leurs assemblées, leurs députés, leurs commis-saires elles font des lois particulières adhoc; elles ont leurpolice particuHère pour réprimer les offenses et les contra-ventions contre les faceries. Elles se donnent. des titresmagnifiques. C'est la noble ville d'Echelard (1754)1 les ré-publiques de Sare et d'Echelar (1782, 1791), les républiquesde Vera et de Sare, « Ambas republicas» (1762, 1782, 1791),

« la noble valle y universidad de Baztan, el real monasteriod'Urdax y lugar de Zugarramurdi(1780) ».

Pour garantir l'exécution des faceries, pour la levée desamendes et pour la punition des contrevenants, les deuxcommunes ou parties contractantes font des stipulations

expressès.« Afin que ci-dessus soit ponctuellement exécuté, lesd.

parties ont affecté et hipotéqué respectivement les biens et» revenus desd communautés qu'elles soumetent aux ri-» gueurs de la justice (Sare'et Vera, 1er octobre 1748). »

« Il a été de même convenu entre lesd. parties que chaque» particulier desd. deux communautés n'ayant.ni jurat avec» lui, aura le pouvoir et la faculté de pignorer lesd. bestiauxet de faire payer à leurs ~~ttr~s la susdite somme. pour

Page 195: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

» l'en-tretenementet exécution de tout ce dessus, lesd. parties

» faisant pour lesd. deux communautés ont respectivement

»)obligé les rentes et revenus des deux communautés et les

» ont tous soumis aux rigueursde la justice à qui la connais-

)) sance en appartiendra (Echelar et Sare, 19 octobre 1754). »

Parfois ce sont quelques-uns des principaux habitants de

chaque commune qui se font garantset cautions pour l'obser-

vance de la facerie, comme dans celle entre Urdax, Sare et

Baztan (19 décembre1763)

« Et pour plus d'asseurancedes dittes conventions, se sont

» présentés lesd. dom Pedro Joseph d'Etchenique et sieur

» Jean Dop Garat, lesquels sont volontairemententrés pleiges

» et cautions, le premier pour la paroisse de Sare et l'autre

1) pour lad. vallée de Baztan, à l'effet de l'exécution de tout

» le convenu. à la charge par lad. vallée de Baztan et lad.

» communauté de Sare d'indemniser leurs cautions respec-

» tives et chacun la sienne. Ji

Ailleurs', on fait des réserves expresses sur la juridiction

de leurs pays respectifs. Ainsi entre Sare et Echelar (1782):

(f Avec ces conditions posées, ont dit tous les constituans

» vouloir que ces faceries soient conclues selon l'étre et la

)) teneur de ces articles, les deux Républiques s'engagent

» réciproquement avec tous leurs' biens à leur observation et

)) accomplissement à peines des depens et dommages qui

» résulteraient des contraventions; et pour qu'ils soient

» orées (?) à leur entier accomplissement, ils ont consenti

» juridiction complète à tous les juges et justices de Sa

» Royale Majesté qui, de cette cause, pourront et devront

» connattreen forme de re judicata, à laquellejurisdiction ils

.1) se sont soumis-atont renoncé leur propre for, juge, juris-

» diction, et domicile et la loi Si conaenienle de jurisdic-

» lio~ee omnium judicccm, et l'ont ainsi arrêté et tenons.»

Cette liberté d'action, cette espèce d'autonomie et d'indé-

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pendance administrative dans la gérance de leurs affairesparticulières. fut fort goûtée des Basques avant la Révolution.Dans le « Cahier des Voeux et Instructions des Basquesfrançais pour leurs députés aux États-Généraux de 1789»,

nous lisons, sous la rubrique

« Demandesparticulières du Tiers-État du Labour·t.

)) 20 Par rapport à la manière de contribuer aux impôts,

» et de se régler entre eux pour l'administration intérieure

) de leurs communautés respectives, les habitants du Tiers-État--du*Labourt demanderontq u'on leur conserve la consti-» tution particulière que leur assignent les arrêts du Conseil,

o du 3 juin 1660, du 10 février 1688, du 17 juillet 1769 et» du ler mai 1772. Ils se trouvent assez bien de ce régime

)) ils craindront d'en e 'banger.» »

I1~ ne sera pas sans intérêt de constater dans ces faceries,autant qu'on peut le faire, les étapes successives de l'ingé-

rence de l'État, et les efforts du pouvoir central des deuxpays pour la subversion de cette autonomieet administrationlocale, et pour sa substitution en leur place.

Nous remarquons pour la première fois, en 1772, l'usagedu papier timbré pour les faceries. Dans la facerie du 29sep-tembre 1800, entre Sare et Baztan, on parle « du terri-toire cy-devant du monastère et aujourd'hui du bourgd'Urdax )). Le 1 octobre 1807, l'abbé du monastèred'Urdaxassiste, mais seulement comme aecino de la ville d'Urdax;on se plaint de l'interruption des faceries par les douanesles habitants de Sare sont obligés « d'obtenir l'approbationdes compétentes authorités supérieures )). En 1820, nous-avons pour la première fois les « alcaldes constitucionatesdel valle de Baztan y el alcaldede Urdax »). Ils parlent des dif-ficultés toujours croissantes qu'ilseprouvent dans l'exé-

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cution des faceries, et que des changements faits par lesdouanes soient la cause que les communantés n'ont plus lafaculté de remplir les stipulations de 1807.

j) Item, teniendo presentes» que en las aduanas tantos» Espanoles como Franceses» puede haber algunas muta-)f ciones y mayor rigor que en»

la dia que imposibilite èl

» cumplimientodelagarantia

» ofrecidarespectivamentepor

» los capÏtulQs tres y siete del» espresadoauto de 7 octobre» 1807, ocuriendo à ese peli-

~i gro y contingenciadis ponen

»que la communidad que se» hallase con esta imposibi-» lidad de dar cumplimiento» à su garantia haya de dar» parte à la demas de esta» faceria de esa causapor carta» de oficio, y del mismo modo

» seran obligados à contestar» à-ese aviso los que 10 re-» ciban, haciendolo dentro» de cuarenta yocho horas,

o y tan solo hasta preceder

» ese aviso y cumplir estas)) cuarenta y ocho horas du-

» rara la responsabilidad de

» dicha garantia quedando

» desde ese punto sin fuerza

» esa obligation para tratar

« Item, con sidérant quedansles douanes tant Espagnoles

que Françaises il peut y avoirquelques changementset plusde rigueur exercée qu'il n'y aaujourd'hui, lesquelles cir-constances peuvent rendreimpossible l'exécution de lagarantiestipuléeauxchapitrestrois et sept de l'acte susditdu 7 octobre 1807 pour faireface à ce danger, et le caséchéant, ils s'engagent. quela communauté qui se trouvedans l'impossibilitéde donnerexécution à la garantie doiveinformer de ce fait les autresparties intéressées de cettefacerie par lettre officielle,

et de même manière ceuxqui la reçoivent seront tenusde répondre à cet avis dansles quarante-huit heures, et«t

ainsi seulementjusqu'à l'envoi

de cetavis et à l'expiration des

quarante-huit heures durerala responsabilité de cette ga-rantie, laquelle depuis ce mo-ment reste sans force, jusqu'à

une autre convention sup-

Page 198: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

») de otro convenio pre-» viendo que si la presente» faceria se campliese sin

» novedad, deba seguir en» adelante 10 mismo hasta» que por alguno de los con-» gozantes se pide nuevo» arreglo Ó suspension. »

posant' toujours que si laprésente facerie procède sansnouveauté, elle doitcontinuerainsi par la suite, jusqu'à cequ'une des parties contrac-tantes en demande un nouvelarrangement, ou la cessa-tion. »

En 1847, le monastère d'Urdax a disparu entièrement, etl'universidad (mot espagnol qui, dans les Pyrénées, équivautpresque au tiers-état, mais avec une signification encore plusétendue) de Baztan aussi. Les droits du monastère suppriméappartiennent à Don Joaquin Fagoaga, qui en a acheté lapropriété. En 18R6, les faceries sont faites pour cinq ansseulement; elles ont besoin de l'autorisation du gouverneurde la province, en Espagne, et du sous-préfet et du préfet, enFrance.

« Les voisins (vecinos) de Sare et de'Vera se trouvent en)) tout sujets aux prescriptions et aux dispositions adminis-» tratives de la douane, des gardes forestiers et des autres» fonctionnaires de leurs gouvernements respectifs. ))

L'alcalde de Vera se plaint, dans une lettre, qu'onmé-connait en tout les faceries et qu'on n'en fait nul cas.

Le traité international de la délimitation des frontières du2 décembre 1856 a porté un grand coup à la persistance desfaceries

« Art. 13. En atencion à « Art. 13. Considérant que» que las facerias y comu- les faceries ou les compascuités

) nidad en el goce de partos perpétuellesde pâturagesentre)) que, sin término fijo parasu les frontaliers de l'un et de

» duraciÓn, existen entre los l'autre pays ont été souvent

')) fronterizos de uno y otro préjudiciables au repos et à

Page 199: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

»-Estado, han sido muy per- la: b6nne harmonie~ sur la»judiciales à ~su quietud y fr6ntiète, il est convenu que» buena intelligencia, se ha les contrats de ce ge nre'qui» convenido que quedarhin existaient autrefois bu qui

» por de ningun valor todos existent encore aujourd'hui,» los contratos de faceria y en vertu d'anciennes sen-)) ,comgascuidad por tiémpo tences ou. çonventions, de-» indeterminado existantes meurent abolis et de nulle»hoy en virtud de-antiguas valeur, à dater du 1e~ jan-»v sentencias ti cônvenios. vier qui suivra la mise à» Como unica exception de exécution du présentTraité.)) 10 estipulado en el p~rrafo» anterior, se cOllservaran)) ytendran por subsistentes,)) en ,atenciÓnasus circums-» tancias especiales, las dos1) facerias perpetuas que en»la actuaIid~d existen entre» los valles de Aezcoa en'». EspanayCisa y San-Juan-» de-Pié-de Puerto en Fran-» cia, conforme à la sen-»tencia arbitral de 13 de» Agosto de 1856 y sentencias) confirmat?rias posteriores» y entre Roncal en Espaiia» Baretous en Francia,» en virtud de la sentencÜi» arbitral de 1~75 y sus con-

6rmaciones. »

(C Art.17. Se ha convenido- Art. 17"Írestc?nv~Îl~' 'que

»que los ganadosespafioles y les troû~ièaûx de tou:ie'esp'èce~

12

Page 200: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

» francesès que pasen de un))' pais al otro en virtud de las» facerias subsistentespor elart. 13 se declaran subsis-

tentes. no adeudaran»dérechos 'en la Aduana ti

» registro del pais ,donde)) :penetren. »

« En la convencion adi-cional de 4 de Abril de 1859,

anne$o III, art. 14, reconoceà las municipaiidades fronte-rizas la facultad de pactar fa-cerias por tiempo determi-nado las partescontractanteshan convenido en conservarà los respectivos fronterizosel derecho q ue han tenidosiempre de celebrar entre si,

aunque por tiempo determi-nado, q ue no podra. excederde cinco anos, y con la precisaintervcnciÓn de las Autori-dades competentes, todos losçonvenios de -pastos u otros,que, puedan ser provechosos

aux múnicipalités frontalièresla faculté de faire des faceriespour un temps fixe; les par-tiés contractantes se sont con;"

venues pourconsacrer à leursfrontaliers respectifs le droitq u'ils ont toujours possédé'de

pactiser entre eux, quoiquepour un temps fixequi ne peutpas être au delà de cinq ans,et avec l'intervention précisedes autorités compétentes,toutes les conventionsde pâtu-rages ou d'autres~chosas, quipeuvent être utiles à leurs in-

français ou espagnols, quipasseraient d'un pays dansl'autre en vertu des deuxfaceries que l'art..13 main-tient dans toute leur valeur,ou par siIi(e des conventionsparticulières qui existent

aujourd'hui ou qui seraientpassées à l'avenir, dans laforme établie' par l'art. 14,entre les frontaliers des deuxpays, ne seront assujettis àaucun droit de domine à leurpassage à la frontière.

La convention addition-nelle du 4 août 1859" appen-dice III, art. 14, reconnait

Page 201: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

para ~sus intereses y buenas térêts et à leurs bonnes rela-r.elaciones de vecinidad'

f JI.tions de voisinage.

On voit 'que cet art. 14 du traité du 4 avril 1859 estpresque en ,pleine' contradiction avec Tart'. 13 du traité'de1856, qui prétend que les faceries « ont été souvent préjudi-'ciablès au repos et à la bonne harmonie sur la fro~tière » ou~

dans les, tefme~ encore plus durs de )'~spagnol,' « :han sidoïnu~y perjudiciales a su quietud v buena intélligencia o. Jenetrqtive.tr~cedansles archive's'de Sare d'aucune querelleavecses voisins d;spagne :ati: !ujèt des faceries (il y en â sur bien)d'.à~tres matières), mais tO\1t au contraire, que les faceriesfortifient la bonne union et correspondance dans laquelle'

les habitants des deux côtés vivent ensémble depuis'un temps'immémoriaf ». Les Espag-nols du Baztanen 1780, affirJ;llent

qu'elles sont (c. de mucba 'utilitad segun los buenos efee1os. que'seap experimentado de semejantes cOD;lbenios ».' w

C'est sous l'autorité et dans les termes des traités de 1856,1859, 1862, 1863, et s'ily en a d'autres subséquents, qnè lesfaceries se, font aujourd'hui, et pour cinq ans seulement.Leurimpôrtancé diminue totxjoti~i~s,et naturellement l'intér~t qu'onporte à leur conservation devient moindre aussi., Lés doua-niers, les gardes forestiers, les ponts et chaussées et les gen-darmes-sont ilt~j~urd'hui prépondérants sur la frontière. Lespetites républiques de Sare, de Vera et d'Echelar et la noble'vaIléè et universidad. de Baztan, autrefois.. si fière de sonassemblée et de'ses bourgs représentants, n'y sontpour rÍen..D~jà; 31 :août 1891, de nouvelles ~i~~ultés. sesont élevées entre le gouvernement espagnol et le pays de

1. Je regrette beaucoup de n'avoir vu.que le texte espagnol de cet'raité comme cité par Costa, et les extraits du Français, donnés parCènac-Moneaut Hisioi~c~ des Peupleset des,États p~/rénécns, vol. IV,p. 648, note. J'aurais bien voulu étudier toutes ces stipulationssur ceeconventions internationales.

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Ci2e, 'au sujèt dé ~fac~rié p~rpétuelle.:ré,s,~¡'yée 'd~nis lé' :~rai,t6

de 1856. Les faceries.'serorit bientôt une chose du pase». Leüiintérêt à présent est presque purement historique.

Mais je crois que c'est un des objets'pdncipaú¥desSociétés.comme la Société Ramond de tâcher de sauver de j'oubli cesrestes du passé, de les rechercher et de conserver pour l'his-'toire ce qui autrement pourrait tomber en oubli..Déjà c'est assez. difficile de trouver quelqu'un qui-ait, con~,

I;1aissance des faceries. La réponse générale, souvent'bien,~rronée, des habitants des communes. froniièresà une.de-mande, est

« II n'y en a pas ici nous n'en avons pas »tandis que, cependant, les faceries restent cachées dans lapoussière des armoires des archives municipales..Un délégué,de Sare m'a dit que, malgré tous ses efforts et toutes ses~xplications, il ne pouvait arriver à faire co~prendre,àun,ministre à' Paris ce que c'était qu'une facerie. Il.a quitté lehaut et ,savant fonctiônnairs évidemment sous l'impressionqu'il lui parlait de quelque chose de fantaisie ou de sa propreinvention.

II doit y avoir eu, j'en suis convaincu, des faceries ou desconventions analoâues entre les communes limitrophes toutle long de la frontière'. Et parmi ,elle!; il y a probable~en~des faceries bien plus anciennes que celles des archives deSare. Outre celles; que j'ai mentionnées ci-dessus, il y en,avait à Baig~rry .-et lés Aldudes en 1614, 'dans la vaÙé~;d'Aspe', à Urdos,~ aorce, etc. :Quelques-unes .de leurs stipu-lations seraient assez curieuses, car on m'a. dit sur placequ'autrefois la pêche du lac destaies appartenaità la F~a~c~

1. Voir la belle étude de M. Paul de Casteran': Traités internatio-naux de Lies et Paaséries conclus entre les hautes calléé~des Pyré-nées_ Centrales, datis la Reoue des Pyrénées, t. IX,1897, Sr livr.

Q: Osse. Hiatoire de l'Égliàc réformée de la callée ~d'ARpe, parAlfred Cadier, p. 72. Grassart, Paris, 1892.

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pour qua;tte ans, et la cinquième année seulement aux Espa-gnols..

Voici Je traité, conclule 4 mai dernier (1899), en notreville,entre la France et lEspagne, relativement à nos pacagespyrénéens, par M. Naboune, ministre plénipotentiaire, aunom du président de la République française, et D. Luis delArco y Mariategui, comte de Arcéntales, au nom de S. M.la reine d'Espagne

« Art. ~er. Les frontaliersqui, en vertu de contrats defacerie, jouissqnt du droit d'envoyer leurs troupeaux pal-tre

sur lé territoire de l'État voisin devront se pôurvoir d'unacquit-à-cautionà l'entrée des troupeaux en Fran~e, ou d'unepase quand ceux-ci entreront en Espagne.

Art.2 La délivrance de l'acquit-à-caution ou de la pasésera gratuite.

Art. 3. L'acquit-à-cautionou pase sera délivré aux fron-taliers sur la présentation préalable par eux d'un certificatqui constatera qu'ils envoient leurs troupeaux' pattre auterritoire de FÉtat voisin en vertu de contrats de facerie deforme rég~lière. Ce certificat émanera de l'alcalde ou dumaire de la commune à laquelle ils appartiennent, et il men-'tionnera la' date du contrat de facerie, comme aussi le lieu oùles troupeaux ont la faculté de paitre.

Art. 4. Les pasteurs conduisant des troupeaux devrontdéclarer aux bureaux de douanes qui auront fait l'inscriptionde leur bétail toutes les modifications qui auront pu avoirlieuy pendant la période du pacage, au sein des troupeauxautorisés à passer la frontière..

Art. 5.. Le présent accord entrera en vigueur, pour"l'Espagne.et pour la France, le 10r septembre prochain.

Fait double à Bayonne le 4 mai 1899' »

1. La Semaine de Bayonne, 3 juin 1899..

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On peut demander quel est' l'intérêt', môme historique,d'une étude des facèries? D'abord elles sont des restes,d'uneespèce d'administration locale; d'une autonomie,d'un.régimemunicipal, 'd'úne' « soùveraineté légitime », on peut presquedire, d'un. répúbIicanisnie pyrénéen; dont'le seul. survivantaujol{rcPhJ.!i est la soi-4isant 'Répu bIiqUé d'An"dÓrre.II estvrai que:le courant des. idées- politiques se dirigé présentdéplus en plus vers la centralisation de tous les pouvoirs en lesmains du gou,ernem~ntcentral; mais il est possibleque,dansun aatre siècle, la tendance pourrait être vers la. décentrali~saj.i 0 n', et ces exemplés. d'une libre' administration localepourraient alors posséder une certaine valeur.

Mais, outre ces c~nsidérationspolitiqm~s, il y en a d'autresqui peuvent inviter des Sociétés littéraires et scientifiquescomme la Société Ramond à l'étude sérieuse du texte des.faceries..On-y trouvera l'origine et l'explication de bien.desusages et des habitudes.qui nous semblent presque ridicules~ou, insensés aujourd'h'ui, mais qui furent sages et raison-nables autrefois..Par exemple, quand je ,yisik1.i ,pour la pre-mière fois les Pyrénées, je fus tout étonné de voir les bergers

presque toujours précéder leurs troupeaux, au lieu de -lessuivre, comme dans le Nord, et je présumais que les bergersdevaient être beaucoup plus doux', et tendres dans le traite-~ment de leu~s animaux. Mais les faceries en donnent la vé-ritable raison. Il y est expressément ,défendu au ;berger' de.marcher derrière son troupeau en allant aux pAtur~es, ou depousser ses bêtes devant lui vers. les meilleurs endroits. Ifdoit.être toujours en avant,'afin de permettre aux animauxde se répandre librement et sans contrainte.dans 1 es pacages.Ce n'est qu'en rentrant chez lui, le soir qu'il.lui fut permis depousser ses bêtes devant lui.

La question de la conservation des forêts est bien difficile.Elle fut néanmoins beaucoup moins impossible,quand,

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comme nous l'avons vu à Sare avant la Révolution, tous leshabitants avaient un intérêt direct dans leur conservation

car les forêts les défrayaient de leurs contributions per-sonnelles envers l'État.

Le texte des faceries pourrait fournir aussi des matériauximportants pour la géographie et pour le philologue. On ytrouve les noms ancienset véritables de beaucoup d'endroits,qu'on chercherait en vain ailleurs. On y trouve avec exac-titude les limites de la frontière à différentes époques. On nevoit nulle part mieux le caractèreet les moeurs, la naïve fiertédes abbés-maires et des jurats des anciennes communes deFrance, et l'indépendance encore plus prononcée des alcaldes

et des délégués d'Espagne.J'ai été souvent'étonné, dans mes voyages à pied et en

étudiant les cartes, de la pauvreté des noms géographiquesde lieux dans le Béarn, en comparaison avec la richesse dela toponymie du pays basque, où chaque monticule, chaqueruisseau, chaque accident de terrain a son nom propre etpresque toujours descriptif. Mais, en ,Béarn, c'est tout autrechose les deux montagnes les plus remarquables ne portent

pas de noms propres et véritables le Pic-du-Midide Bigorreet le Pic-du-Midi d'Ossau. Parmi les rivières, vous avez legave,de Pau, le gave d'Oloron et onze autres gaves dans, ledépartement des Basses-Pyrénées,et autant ou plus de ga-barreto, ruis, ou arrius. Ces appellations ne sont pas et nepeuvent pas être les vrais noms. C'est tout à fait comme si

nous appelions la Seine le fleuve de Paris. ou le RhÔne le

fleuve de Lyon. Comment les habitants autour-et auprès despics, du Midi de tous les c8t~s auraient-ils pu désigner cesmontagnes par les noms de Pic-du-Midi '? II doit nécessai-

rement y avoir eu d'autres appellations. Ces noms faux nedoivent pas être bien anciens. Dans le pays basque, on parledes montagnes et on écrit à présent Pena Plata, la Rhune,

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les trois ou les q-ùi3.tre Couronnes, mais, dans'tous les rècitsdes "guerres' de t'Empire 'en 1813; 18141 ces mdntagnes

portent encore leurs.' vrais noms basques Aitzchubia-ouAitzchurria (dont PeÍÏa Plata n'est que là traduction espa-gnole); Larrhuri, et Haya ou Aya~ nom qui se retrouve dansle village Andaya (Hendaye) et avec le cap du Figuier toutà -fait au sud d'Espagne' sur la frontière du Portugal,Ayamonte. et Figuéreta. Les gaves existaient et coulaientlongtemps avant la fondationde Pau, ou d'Oloron, ou d'autres;villes, èt comment voulez-vous que des montagnards aientdonné les noms de ces villes' à ces fleuves ? Il y a évi-demmenttoute une sér.iedenoms perdus. De noms dans quellelangue parlée par quels peuples `? C'est un secret qui se tientcaché peùt-~tre dans les pagés des faceries, dans l'énnmé-rationides cours d'eaux, des limites,. dans la description SI

minutieuse des frontières des communes voisines.r~spère'que j'en-ai assez dit, nonobstantl'insuffisancepom-

plète de cette petite notice, pour engager quelques-uns denos collègues à une étude sérieuse' et approfondie de -ces fa=

ceries,' conventions, traités; contrats réciproques entre leshabitants des deux côtés de nos montagnes. C'est le but quqrayais en vue en écrivant ces lignes dont je suis le premierà:reconnattre les défauts' et les lacunes. Je crois qu'une étudecomplète de tous ces documents pourrait éclairer bien despoints qui restent obscurs dans l'histoire, la géographie, laphilologie et l'ethnologie'des-vallées 'et des inonts pyrénéens.

LISTE DES I' ACERIES DANS LES ARCHIVES MUNICIPALES DE SARF

1743 (ler octobre) -entre $are et, Bera, v

1754. (19 octobre)- Sare et Echelar.,175.8i(J8.~ep~mbre).. Sare çt Baztan.1762 (22._septembre) ~,are'e~ Vera.-

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1765 (13 décembre) entreSare, Urdax et Baztan.(16 octobre) Sare et Baztan.1772 (12 octobre) Sare et Vera.1780 (16 octobre) Sare, BaztanetMonasterio:d'Urdax.1782 (28 novembre) Sare et Vera.1782 (21 décembte) Saré et Echélar. =

1785 (3 août) Sare et, Baztan.¡

1791 (10 août) Sare et Echelar.An VI (4 floréal) Sare et Vera.'1798 (3 mai)1800 (16 septembre) et E.Chelar..1801 (29 septembre) ~are, Baztan et Urdax, y

1807 (12 octobre) Sare et Baztan.1816- Saint-Pée et Sare.1818 (20 octobre) Sare et Echelar.1820 (30 janvier) Sare et Baztan.1847 (13 octobre) ~Sare et Baztan.1886 (15 juin) Sare et 'Echelar.,1887 (2 octobre) S'are et'Baz41n.

Pièces justifcatives. Facèries entre Sareet- Yera-

END08SEMENT Vera Li,xunia~ay Septembre 22 ~.de. ~762.,Autlo de facerias para diez çinos celebrado entre' lasVillas. de Vera y Sara..

t.En él paraje (sic) llamado Lizuniaga, donde ~è dividettlas juridiciones de Bera y Sara, a veinte y dos de Septiernbre~de mil,setecientossesenta y dos ante mi el escribano Realy Testigos infrascritos fueron ,constituidos en'persona los:

seiiores alcaldes jurados, ydiputados dè, anibas las dichasvillas de Vera y Sara que nombradamente son de:parte de la,diche de. Vera"don.JI,1,an ,dichod.e~ara.()he,. ¡.\13¡P Esteveg

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de San Juanena, Francisco Andres de Huald e, Martin deIrasoqui, y Martin dicho de Iturria, alcalde y regidoresacompaùados de los diputados de ella y de la parte de ladicha vilà de,.Sara, dom Bernardo de Aramburu, Domingode Zubelbia, ,1`~ de Arroqui, Juan Dop, Pierres de San-Martin, y Pedro d&,1rigoiti" alcalde y jurados acompanadosde sus diputados, y dijeron sean Juntado hoy este mediantecombocacionreciproca como en puesto y lugar acostumbradosa. tratar, conferir, y deliberar, sobre las fazerias y goze ,reci.proco de'Yerbas y Aguas y Bellota para todos los ganadosgrandes y menores de ambas republicas y habiendo confa-bulado con madurez sobre todo ello conformado.en que lasfazerias se proroguen por tiempo de diez anos y deben prin-cipiar desde hoy este dia y se acabara en sèmejante dia delano que biene de mil siete de sesenta y dos sobre los capi-tulos siguientes..

1° Primeramen'teque haya de ser libre unicamente de elpasto de la Bellota para todo el ~;anado de cerda de ambasrepublicas y de sus indibiduos durante todo el ano dichotiempo de diez anos sin que pueda pretenderse por !1ingunade dichas republicas pribacion alguna por pretext~ de tenersu p erior, fruto de, Bellota de el que la otra (?) 'republica notener alguna pues en esta parte el riosgo y fortuna deveoons~derar iguales, dicho ganado de cerda ha de ser libre entodo el ano, y los demas ganados Bacuno, obejuno, cabrio yy pelo sean de retirar por los indibiduos de ambas republicasdesde e)dia tres de octubre de cada aÎÍo hasta el dia de San-Andres.

2° Item que para todo 10 demas ganado fuera de paraje delde cerda en tiempo dé Bellota y para este en todo el ano bayade ser. libre la fazeria en todos los referidos diez anos comoen él de Vera desde el pâraje llama~o beraco Cargalecubacorl'iendo.à la puente urdacoiz corriendo. al.Robre (roble) de

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Èrroiarri y de alli 'a Condendiaga y el ~ganado de Sara hadepoder correr desde el sel (silo, asilo) de Miadurir y de alli aOmborzuri y de alli a Legarecouriretay de alli por la miacade Zimiztaa la Cholade Otzando, y caso de hallarseen tiempode la Bellota endichos sitios en Io de unacomunidadGanad6

que no sea de cerda de la otra debera pagar por cada cabezade Ganado Bacuuo-ô de polo a siete soses de Francia, y porcada cabeza de Ganado menor un sos, y cada uno saliendo elganado de cerda fuera de dichos limites tenga de pena cuatrososès.

3° Item que desde los mojones respectibas de ambas repu-blicas no se puedan introdllcir con cuidado 10 demas ganadodigo ningun genero por que la libertad se entiende, para ~lganado que por es se extendiere.

4()Item. que no se podra ni por los de Vera en su territorio,ni por los de Sara en el suio, recojer Bellota suio, que ha de,quedar integra a Benefizio del Ganado de, Cerda [a.] todas lascuales-capitulas se obligan ambas partes como a Castigar con.pena de diez pesos a cualquierra que subiere a las Tcholas

con el ganado hasta el dia inmediato de San Juan Bautista"

y de todo requirieron a mi el escribano haga auto siendotestigos Francisco de Elsaurdia, Elarralde y Juan-Esteven deIrasoqui Jacagorri, vecinos de Vera, Martin Sorbet Felleri y,Juan de Iturbide Churtegui, vecinos de S~ra, y 6rrnaron el,

doblo auto testificado respectibamente de una sustancia porel notario Aramburu y por mi el escribano los que soribian yen fee de ello yo el dicho escribano Juan de I~arrache, Iri-varren Aramburu, Juan Esteven de Sanpiarrena, JQ\,1pi1~a,

Dop, 'Sobre Diturbide, San Martin José de Iturria, Juan Es-tevan de Irazoqui, Francisco de Elzaurdia, San Martin deLéguia, notario escribano.Certifico yo el i.ntraescrito, Escribano Real-y del Ayunta-

m iento de, dicha villa de Vera,.que el tr3:slad,o preceden.te

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CÇ)-d3 bien-y: gelmente con su original- qua lo;,testifi~Ó~r~rtinde:L,éguia,;~~CJ;ibilDO Real ya difunto cuyos registrosobran. a mi custodia,e.n,el, archibo de dicha villa En fe de 10

quaI signo y firmé' como acostumbro «:Vera, Iunio diez ypueve de mil ochocien.tos y ocho.

Fin testimonio de.Verdad.Juan Agus~in Egozoue, escribano Real.

ENDOSSEMENT; Du 12 octobre 1772. Conaentt.'ons entre lacommunauté de Sare et de Vera. Porcs seulement ( Papier

,timbré C.-N:, Pau, deux sols):

Le douzième jour du mois d'ôètobre mil sept cent soixante-douze, avant midy, au lieu' appelIé, Lissùhagûa, limitrophed'entre la noble ville de Vera en la Haute-Navarre,royaumed'Espagne, et la paroisse de Sare, pays de Labourt en France,par-devant moy, not:iire,roŸa~ soussigné, presens les témoinsbas nommés, ont comparu Juan Estevan de Garaicoetchea,Joseph Laurent de Etchenique, Martin Joseph -de Endara,Do~in~oIraçoquy, Francisco Iraçoquy, alcalde et jurats de

laditte ville de Vera, d'une part Michel Daguerre, 'sieurd'Issargarat, Miguel Harotzarena, Miguel Etcheverri, Betry.Harosteguy, Martin Duhart et Thomas d'Olha, maire-abbé'

et jurats de ladite paroisse,assistés de MeJeàn Noël Letechipydocteur en- médecinne ;sic), Dominique Dithurbide, PedroDetcbabe; sieur -Jean Dop, Betry Harosteguy et JoannesDarrayoaguérre;députés d'autre.Lesquellesparties pour maintenir l'union et la concorde qui

fait' l'àvanta~e commun desdits pays limitrophes et qui aregné entr'eux de tous les temps sous la 'foy des traités. etconventions, passés en 'différèntes épocques et notamment le22 septembre 1762, devant moy dit notaire, ont d'un communaccord., renouvéllé, confirment, et renouvellent par ces

presentes lesdits traités et conventions voulant qù~ils portent,

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leur plein et entier effet, pendant l'espace de dix années pro-chaines et consécutives" à commencer dès'.ce jourd'huy jus-c~ues.u. doruge octobre de l:ann.ée que l'on comptera 1782.Etanfconven"u' ent,ré les. parties que la défense concernant lesc~chons en temps de ~glandage bornée depuis le trois' octobrej'u'sg~ÙÜl]ÓUr de Saint=André par les conventions dudit jtiur22 1762 n'aûra lieu que jusqu'à' la Saint-Martin:Dvrant les conventions, et qu'à. l'égard, d~ làdéffense d'amasserdu gland in~éréedans lesdites conventions;les. contrevenans seront am~ndés de vingt sols pour chaque¡dBr"de contravention, scavoir 'ceux de Sare par les magistratsde laditte paroi~se sur la plainte que leur sera adressé de lapart des magistrats de Vera, sur la denonciation de l'un deleurs gardes jurés et egallement à Vera sur la plainte desmagistrats de Sare Laquelle amande sera pareillement en-courue et imposée dans les mêmes formes contre ceux quiseroient surpris à coupper de bois dans les forets communesdesdits pays limitrophes, et sera ladite amande dans les deux,cas cy-dessus prevus appliquée au profit du garde de Boisqui aura denoncé le contrevenant.

Et pour l'exécutionet la garantie des presentes conventionsà peine de tous depens, dommages et interets, lesdittes partiesont respectivementobligé et hypotequé tous les biens, renteset revenus desdites communautés et soumis aux rigueurs dela justice. Fait en presence de Laurense Irazabal et PeilloHaristeguy, habitans desdittes paroisses de Sare et Vera, té-moins qui ont signé à l'original avec ceux des parties quisçavent écrire, et moy de Sare..

Hiribarren. Notaire Royal.

L'écriture de la première de ces faceries est certainement du derniersiècle. La dernière phrase et la signature sont d'une écriture tout àfait différente; de sorte qu'il paraît que la pièce fut écrite en 1762,

mais qu'elle ne fut pas enregistrée et certifiée à Vera qu'en 1808.

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L'ACCORD FRANCO-ESPAGNOL

Il a été signé, le 4Lmai dernier, à Bayonne, par les présidentsdes deux délégatioD&" la commission des Pyrénées, unaccord interprétatif, des tra~té3 'de délimitationcorielus entrela France èt l'Espagne réglementant les conditions,dans les-quelles les troupeaux des deux pays.quivont pacager sur leterritoire de l'État voisin, en vertu de contrats de pâturage,sont admis à franchir la frontière.

Cet accord doit ~entrer en vigueur le premier septembreprochain1 (S~le, 17 mail899)<

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SUR QUELQUES INSCRIPTIONSDU PAYS BASQUE ET DES ENVIRONS'

Il m'est arrivé, comme d'ailleurs à bien des- étrangerspendant les premières semaines de leur arrivée dans un pays

nouveau, avec l'enthousiasme et l'excitation des découvertescontinuelles, vraies en réalité ou en apparence seulement,d'être porté à croire que j'étais le premier à découvrir ou à

apprécier à leur juste valeur beaucoup de belles choses. Nous

croyons facilementque ces objets, ces paysages,cette architec-

ture, ces inscriptions, ces moeurs sont aussi inconnus auxautres qu'ils nous l'étaienthier encore à nous.mêmes, et nous

nous empressons d'écrire tout d'un coup sur le pays un livre

ou au moins un mémoire qui, nous le croyons, dépassera

tout ce qu'on en a dit jusqu~à ce jour.I n utile de dire que tout cela n'est qu'un mirage du.grand

désert de notre ignorance. Peu à peu nous apprabQns à nousméfier de ces superbes conclusions. Ces beau,tés ou.de la na-ture ou de: l'art ont été vues et décrites par une foule de

curieux avant nous. Elles ont eu des admirateurs aussi en-ihousiastes et beaucoup plus éclairés que nous. Le livre que

nous croyons pouvoir écrire devient tous les jours de plus en

plus mince; le mémoire se restreintbientôt à de très ~inimes

1. Société dés Sciences et des Arts de Bayoune. 1895.Voyez aussi Inscriptions Basques, par E. S. Dodgson,.dans le

Boletin de la Real Academia de la Historia, tomos XYVII-XXVIII:Madrid, 1895-96.

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proportions. On est étonné d'abord de l'ignorance des indi-gènes"de leur absence complète d'appréciation des merveillesde leur pays on est presque tenté de les mépriser. Mais peuà peu, après plusieurs années de séjour, si, au lieu de nouscontenter d'une admiration banale, nous nous efforçons d'étu-dier un peu sérieusement ces objets, de rechercher l'histoirevéritable de l'art, de l'archéologie, des moeurs, de l'histoirenaturelle, scientifique ou politique du pays, alors nous cons-tatons avec surprise un complet revirementdans nos premièresidées. Au lieu de vouloir guider, nous suivons nous-mê~esd'autres~ guidës; nous .nou's confions à d'autres rnaitres.

-l~ous a;vioris 1 u peut;.être, quelques livres qui passent pourexacts, ,écrits dans notre idiome natif,' ou quelques ouvrageségalement classiques dans la'langue officielle du pays; nousavions- a:c'cepté' sans réservetoutes leurs c-onclusi ons. Nousn'avions que de la pitié pour les hommes du peuple qui nepeuvent qu'à grand'peine s'exprimer dans la langue officielle,qui 'parlent entre eux quelque idiome barbare, quelque patoissans'littérature' et sans livres. Mais, "petit iL petit, tout celaÕhangë.' Nous' soûpçonnons d'abord; 'et nos soupçons de~viennent 'ensuite jràpideiiient une certitu~e; que ce ne sont

pas toujours les indigènes de'la régioü qui ont tort, mais aucontraire, les ~crivai~s 'clàssiques, les littérateurs distingués,et surtout 1es ét'rangers; quelle que soitleur~âûtorité dans leurpropre paÿs. Alors nous tâchons au moins d'étudier, de lire,de comprendre un peu', enfin peut-étre de balbutier quelquesmots de ces idiornès: si rudes, qui nous ont paru d'abordunè quantité si facilement négligeable. Nous sommes enfindans la: bonné voje, si *nous' y ajoutons '1'étude des do*cu-'

mèiits, des .archives,des monuments si nous tâchons desaisir sur le 'vif les moeurs, les coutumes, 'les habitudes dupays ,cli~z .~es ç"ab1pagnard'~ eux-mêmes; si nous ne nouscontentons pas d'admettre comme parole d'Évangile tout ce

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que nous disent les guides, les'cochers, les garçons d'hôtelet toute la domesticité des villes d'eauz. bientôt tout serachangé. Le livre ou le mémoire que nous aurions écrit avecune confiance absolue, alors que nous savions seulementnotre propre langue et la langue officielle du pays, reste tou-jours à faire. Nous commençons à reconnaitre notre propreignorance, l'insuffisance complète de nos moyens au lieud'être des interprètes et des conducteurs pour les autres, nousavouons que nous avons et que nous aurons toujours besoinnous-mêmes d'in terprètes et de conducteurs., Jamais unétranger n'arrivera à connaître l'idiome d'un peuple commen'importe quel individu de ce peuple; il sera toujours ex-posé à, se tromper sur les mots, sur les choses, sur les inci-dents les plus ordinaires de la vie actuelle. Mais c'estquelque chose cependant d'avoir appris à pouvoir se' servirautant que possible de la langue, des documents, des mo-~

numents du pays même.Cette vérité générale doit- se traduire pour les études qui

intéressent le département des Basses-Pyrénées, d'abord parune méfiance profonde envers tout ce qui a été écrit,en fran-çais sans aucune connaissance des langues, des archives oudes .monuments du pays; ensuite par la résolution de' n'ac-cepter rien dont il. ne-se trouve des traces soit dans l'éuskara,soit dans les patois gascons du département.

A quel propos, me dira-t-on, cette dissertation critiquevient-elleouvrir une étude surles inscriptions du pays basqueet des alentours? Elle est plus utile qu'il ne parait. Les

pages suivantes. ne sont guère qu'une confession de mon in-capacité, et celles qui précèdent pourront, tout au moins, meservir d'excuse.

Le premier sujet qui m'a tenté quelques mois après monarrivée dans ce pays, fut d'écrire un mémoire sur les inscrip-tions arabes et l'influence des Arabes dans les Basses.-Pyré-

13

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nées. Je ne savais pas un seul mot d'arabe, mais un de mesamis intimes était l'un des premiers professeurs d'arabe del'Angleterre; je crus pouvoir, grâce à lui, me tirer aisémentd'affaire. Je me mis donc avec enthousiasme à copier, com-pulser, interpréter toutes les inscriptions, tous les monumentsplus ou moins arabes.

Il y en avait qui ~sautaient aux yeux Fuenterrabia, Fon-tarabie l'Atalar~e,. à Biarritz; le lac :l'louriscot les inscrip-tions d'Etsaut, dans la vallée d'Aspe; l'église de Sainte-En-~rdce, et maint autre exemple de l'architecture arabe. Toutcela dérivait évidemment des Maures ou des Arabes, d'Es-

pagne c'était ,accepté comme tel par tout le monde: Vox

populi, no~ Dei.Malheureusement, comme on le sait aujourd'hui, pas un

seul de.tous ces mots, pas une de ces inscriptions, aucun dé-tail de cette architecture, n'est vraiment arabe.

Le mot Fuenterrabia, Fontarabie, la fontaine des Arabes,n'a rien à faire ni avec fontaine, ni avec les Arabes. C'est unexemple de la façon étrange dont les Romains traduisaientparfois en latin les noms indigènes. Ils prenaient simplementle premier mot latin qui ressemblait au son du mot indigène,surtout s'il convenait à quelque détail topographiquede l'en-

droit. Ils ~croyaient arriver ainsi à une véritable interpréta-tion. Le nom basque de Fuenterrabia est Ondarrabia « lesdeux sables, les deux bancs de sable, entre deux bancs desable», qui répond très exactement à la situation.de la ville

vue d~ côté de la mer. Les Romains le voyaient; mais ilsvoyaient aussi tous les jours le torrent:de la marée descendreà la mer, en face de la ville; avec une rapidité vertigineuse..Ceci, sans doute, leur suggérait l'idée qu'Ondarrabia .étaitOnda-unda, rabi-rapi-dus; Ondarrabia devait donc être

fons rapidus, et, ce fons rapidu.y latin est devenu Fuenier-rabia, Fontat~abie.

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Il y a plus d'un exemple de ce curieux procédé de tra-duction.latine des mots indigènes. Le nom basque de Ron-cescalles, Ronceoaux, est rreada « les genévriers, lieuabondant en genévriers les latinistes en ont fait Roncida ~ouRuncida ,aallis, Ronciaals, Rence.3nals, des chansons degestes,. « la vallée des broussailles ».. Un autre exemple estcelui de Libredon, en Galice, originairement celtique:Llu~rdbr dun de llaordbr « chemin », et dun ou don « colline

ou forteresse », appellations conservéesencore dans les nomsg'allégos: Monte Burgo, Libredon et Castelo do caminho« château du chemin ». Les Romains en ont fait Liberumdonum, deux mots latins qui se rapprochent le plus par laprononcia~ion de Llwybr don, mais qui signifient « don,

gratuit », un.véritable non-sens de Liberum donum, lesEspagnols ont fait Libredon ces deux formes se rapportentnon à la signification des mots, mais seulement 'à la simi-litude des sons 1. Dans le plus ancien vocabulaire basqueconnu, les vingt mots cités dans le Codex cali~tinus duXIIe siècle, nous lisons Presbilerum (prétre); belaterra.Le brave pèlerin qui a écrit ces mots savait bien qu'on luiavait donné belaterra comme le mot basque signifiant« prétre », mais séduit' par le son latin' des syllabes, il nepeut pas s'àffranchir de l'idée qu'ils doivent avoir"' unesignifieation latine, et il ajoute cette naîveté cc'

Belaierrà,~

quod interpretatur pulcra terra, )) c'est;à-dire ce qui setraduit' « belle terre ». Voilà cé que les noms basques ou-celtiques, sont devenus dans les bouches romaines.

Mais l'~tàlar~é, au moins, est-il assurément arabe? carAlàlarda veut' dire en 8.rabe« une gúérite » Je'remarquaibientôt que les vieux Biarrots et les vieilles Biarrotes (C'était'

1. Becuerdos de un oiage à Santiago de Galicia, por el P. FidelFita y D. Aureliauo Feruaude·r.-Gûerra (Madrid, 1880), pp. 26, 69,75~ 58.

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à -une épôqûe où:il y avait encore dé vrais Biarrots, du tempsde I.arlebàt) prononçaient toujours et très distinctementla Tallad~, et jamais l'Atalage. Je trouve aussi le nom ainsiécrit la Tat4e, en 1619, dans un document cité parFrancisque (Les Races maudites, vol. II, p.l90); Jene sais pas trop f}O;qQ.e veut dire la. Talar~e, mais il y aévidemment la même-distinction à faire entre l'Atalar~e etla Talaye, qu"entre la Rhune, qui n'a aucun sens dansaucun idiomè, et Larrhun, q ui est la forme basque originale.Le nom du petit lac llTouriscot semble réellement s'atta-

cher au passage des Moriscos en 1610 mais il avait cer-tainementquelquenom antérieur, probablement basque, quia: été perdu. ~En tout cas, il n'a rien faire avec l'invasion:arabe du VIlle siècle. Il est curieux de constateraussiq,uelenom dè la :lVégresse, ou plutôt de la halte de la Négresse,près de 'la gare de Biarritz, n'a aucun rapport'avec le nom'du lac Mouriscul. Des vieillards m'ont plus d'une foisaffirmé sur, place que le nom provenait d'une véritablenégresse qui avait tenu l'auberge, qui était très aimée de saclientèle, et qui a légué son nom à la petite localité'.

Tous 'les itinéraires des Basses- Pyrénées, parlent desinsCl'iptions arabes d'Etsaut, dans la vallée d'Aspe. J'aivisité l'endroit'bien-des fois, mais je n'y ai jamais vu trace~

d'ins~ription arabe. Ce que j'y ai vu, c'est le monogrammedu' ,Christ dans sa 'forme grecque, les armoiries de la famille

de Lembeye, et les' Vaches de Béarn sculptées sur une vieilletour. Au village de Borce, de l'autre côté du gave, vis-à-visd'EtSàut, il y a beaucoup plusde restesdes XI ne et XVe siècles,mais rien d'arabe. A Tardet.S et à Licq, dans la vallée duSâisÓn,'il y avait, disàit-on, des inscriptions hébraïqués

1: Cf*. ~au§si L~sttrea labourdines par M. H. L. Fabre (Lasserre,Bavonne; 1869) p: 78 et note: M. Fabre donne le nom bâxque dûlac'Mouriscot, comme Lac d'Arrague. `

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dans ,les églises elles consistaient simplement 'dans lamention,en vieux frangais, de dons pour l'entretien de l'autelet pour l'éclairage de l'église.

Il en est à peu près de même pour l'architecture. Je n'aijamais pu constater des traces certaines d'architecture arabe.De la romane, du romantique, de l'ogivale, bien souventmais jamais d'arabe. Je crois que ce qui a peut-étre trompécertains écrivains ou archéologues, c'est.Ia ressemblal\ée surquelques détail de l'architecture arabe avec l'architectureromane ou romantique. Toutes les trois dérivent de l'ancienneachitecture latine. L'arabe -vient du romano-byzantin laromane,du gallo-romain;Ieromantique;dulombardo-romain.Il y -a parenté..entre elles, et une certaine similitude surquelques.points, mais la dérivation' historique-est. tOut à faitdistincte: Les architecteset les restaurateurs s'y sont trompésplus d'une fois. Pour celui qui voit pour la première foisl'église de Sain,te- EngrAce comme elle est à présent, c'est

,,un bâtiment moitié arabe. Pour ceux qui l'ont vue dans sonétat primitif il n'y a rien d'arabe,mais simplement du.roman.J'ai demandé à un architecte que j'ai rencontré par hasard à,

Mauléon, comment on avait pu se tromper à un tel point. Ilm'a répondu que l'inspecteur général avait voyagé beau-.

coup en Espagne qu'il était un admirateúr passionné de.l'Alhambra, et que depuis lors il voyait de l'arabe partout. Jen'ai pas besoin de fournir d'autres preuves- de cette maniede restauration maladroitedans les Basses-Pyrénées elleséclatent partout.

Enfin, nonobstant tant d'affirmations.contraires, je n'aipas trouvé des traces bien conservées, ni de la langue, ni desinscriptions, ni de l'architecture arabe dans le pays basquec'est pourquoi mon mémoire sur l'influence arabe dans ledépartement des Basses-Pyrénées n'a jamais été écrit,comme bien d'autres chefs-d'oeuvre morts avant de nattre.là

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Mais au lieu de chercher ce qu'il n'y a pas, recueillonsplutôt cé qu'il y a. Je n'ai pas la prétention de faire uneépigraphie des Basses-Pyrénées, pas même de cette partiedu' département que j'ai le plus visitée. Mes moyens etmon savoir sont tout à fait insuffisants. Mais en feuilletant,il y a quelques mois, dans un moment de loisir, mes vieux

carnets de voyage, j'ai trouvé des copies de quelques ins-

criptions relativement modernes, qui ne seront pas peut-étretout à fait dépourvues d'intérêt pour notre Société. Je lesrecopie ci-après, surtout parce que j'ai quelques raisons décroire que plusieurs de ces inscriptions se dégradent ou seperdent. Il y en a que j'avais vues autrefois et que j'ai re-cherchées en vain dans une récente visite. Il y en a d'autresque je n'ai pu réussir à copier exactement. J'espère que cettepublication excitera quelqu'un de mes collègues, plus jeune

et mieux doué que moi, à compléter cette petite collection.Je ne peux pas entamer la grande discussion sur l'au-

thenticitéde l'inscription de Hasparren. Elle a attiré l'atten-tion des plus gra~pd savants, et la cause n'est pas encoredécidée.

La dernière fois que j'ai passé auprès du pont d'Escot, àl'entrée de la vallée d'Aspe, j'ai encore fait une copie del'inscription gravée sur le rocher. J'y ai lu

L VALVERAIV.S CER H VIRBIS HANC VIAM RESTITVIT CAE

VALERIANVSAMICVS

Cette inscription peut bien être 'authentique, mais elle a-certainem~nt été retouchée par quelque lapidaire. Il m'a

»semblé même' qu'eIJeétait plus claire et plus lisible, ladernière,fois que je l'ai vue, qu'elle ne l'était autrefois. Il est'

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constaté dans les anciens itinéraires qu'une 'route romainepassait par là, tout le long de la vallée d'Aspe, et traversaitles Pyrénées à Somport (Summus Portus). En outre, noustrouvons encore un Valérianus dans la belle inscription con-servée dans la chapelle de la Madeleine d'Aranhe, prés deTardets. Sur la lecture de celle-ci il n'y a guère de doute.Les lettres sont de la plus belle époque, et le marbre est bienconservé

FANOHERAVSCORRTSEHE~SACRVMGt&V ALA V ALE

RIANVS

Pour l'interprétation des syllabes mystérieuses HERAUS-

CORRTSEHE, je n'ai aucune conjecture à faire mais nousavons ici un Valérianusfaisant une dédicace ou une offrandeà un dieu quelconque, et ce fait rend l'authenticité de l'ins-cription du pont d'Escot gravée par le même, ou par unautre Valérianus, plus probable.

Je laisse de côté les .inscriptions de l'église de Bielle, dontle regretté M. Paul Raymond a fait une excellente mono-graphie

Mais ce.n'est pas un mémoire classique que je voudraisfaire. Ce sont plutôt sur les inscriptions relativement trèsmodernes que je veux attirer votre attention sur les ins-criptions, devises pieuses ou naïves qu'on trouve aux frontonsdes vieilles maisons basques ou gasconnes usage presqueperdu aujourd'hui, mais dont il vaut la peine peut-être de

sauver de l'oubli les derniers vestiges.L'inscription la plus répandue, que j'ai copiée sur quatre

maisons différentes dans ,les environs de Saint-Jean-Pied-de-

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,Port,et de'Baïgorry,et qui existe', je-crois, dans bién'd'autresendroits, est celle=ci

Memorare nooissima tuaEt in ceternum non peccabis.

« Souyiens-toides dernières choses-Et tu ne commettras,pas de péch~: pour l'éternité. »

Comme souvent dans le nord de l'Espagne et dans lepays basque, le b est écrit a dans deux de ces inscriptionspeccavisau lieu de peccasis.

Une maison de Saint-Jean-Pied-de-Port portePost funera virtus aiait.

« La vertu vit après la mort. »

Une autre inscription perpétue la cherté des vivres en1799:0-

André Filerel'an 1799

Le frome~et,f°t à 15 ls.

Les inscriptions basques, contenant autre chose que lesnoms des propriétaires, sont.rares en voici une de 1671:

GVTIAREQVIN. DVÇVN. BASQVIA. ASQVI. DVÇVLA.JOANNES. DIRIBARNE.

« Si vous avez le dîner avec peu Que vous ayez 'assez.Joannes Iribarne. »

L'auberge de Bidarray, qui est au bout du pont, mêle lelatin et le basque

Anno Domini1744. Domus istaVocabitur Çubiburu.

« Cette maison,sera appelée Téte du Pont. »

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Il y a une longue inscription sur une maison près deLecumberri, que je n'ai pu copier entièrement. On a besoind'une échelle pour l'étudier à son aise. C'était évidemmentautrefois une maison religieuse ou un oratoire. Voici tout ceque j'ai pu ou cru y lire

Sta capelani anaxi a sancita fuit a C. Vill. Ermo-decuruch eta. anno domini 1611. C. V. S, summa

a principali sestertio septem IIII~t librarum minister hujusCapellani et tenebitur celebrare missam omnibus diebus etetiam instruere omnes qui illi a'ccesserint discendi causddoctrinam. `

.Les premières lignes parlent de la dédicace de la maisoncomme chapelle par un certain C. Vill Ermodecuruch et(son épouse ?) dans l'année 1611. Un certain fonds et sesrevenus sont affectés pour l'entretien d'un chapelain ou

ministre, qui est tenu à dire la 'messe tous les jours, et àinstruire tous ceux qui veulent apprendre la doctrine chr~-tienne. Malheureusement le bon latiniste a été tellementclassique dans l'énumération de ses monnaies qu'il est à peuprès impossible de constater dans l'équivalent de notreargent d'aujourd'huice qu'il voulait dire. Peut-être existe-t-ilquelque document sur cette donation dans les archives dudiocèse.

A Larrau, il y a une inscription dans le porche de l'église

Hoc hujus almce~Domus sr~nciputStructum estAbbate D~ Bor~erV° D..F'~d~ ~lbbotPrc~ JauregueianAnno infraposito~'lletro, Jan. D. Corton

Duq.1 r.

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cc Ce porche de cette Maison de Paix Fut construitPar l'abbé Dominique Boyer Vicaire Dom. Ferdinand,Abbot. Jauregain maire Dans l'année souscriteJean D. Corton, archevêque. Dvq. »

Un kilommee avant d'arriver à Sainte-Eng~âce, il y a âcôté du sentier une petite croix brisée avec quelques lettresd'une inscription, elle rappelle l'ancien lieu de pèlerinage

STA ENGRATIA ORAPRO [NOBIS] 174.

« Sainte-Engrâce, priez pour (nous). 174. »

Sur une maison de Tardets, ont lit encoret

IHSSIT NOMEN

DOMINI BENEDICTVM. A'T.1662

« Jesus » ou « Jesus hominum salvator. Jésus le sauveurdes hommes. Que le nom du Seigneur soit béni. »

Sur une maison à Mauléon

Lehen hala D'abord celaOrai hola A présent ceci

Gero, gero, bexala Après, après commè il peut-être (comme ça).

Sur la porte d'entrée du pensionnat Sainte-Marie, à Saint-Jean-de-Luz

Ici fait l'homme ce qu'il peut. EtFortune ce qu'elle veut. JeanDe Casavielheme fit faire en 1632.

Sur une maison dans la rue Saint-Jacques, presque enf ace

Gutirequin bakea La paix avec peuCerutik urre mea Dans le ciel une mine d'or.

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Sur unemaison de Cardresse

Aimes (sic) et crains Dieu de tout ton c~ur.1686.

Sur l'horloge d'Eygun, dans la vallée d'AspeSic umbra nita fugit.

« La vie fuit comme une ombre. »

Sur celle d'UrrugneVulnerant omnes, ultima necat.

« Tous (les moments ou coups) blessent, le dernier tue. »

Sur celle d'OssésOrhoit hilcea.

« Souviens-toi de la mort. »

A, Ascain, à l'entrée du verger de Joannes de Sossiondo,évêque de Bayonne

Le bon Dieu vous soit en aide. 1575.

Sur une maison de Saint-Pée-sur-Nivelle

Posl f âta resurc~o. 1815.

« Après la mort, je ressuscite. 1815. »

Saint-Jean-de-Luz se vante de l'inscription sur la maisonJoanoenea:.

L'Infante je reçus l'an mil six cent soi~antéOn m'appelle depuis le chasteau de l'Infante.

Mais Sare est tout aussi fier de son inscription basque dela même époque

Sarari balhorearen eta lec~altasunaren saria emana.Louis XI V. 1693.

« A la commune de Sare. Récompense du courage. et de.

la loyauté. Donné par Louis XIV. »

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Sur le cadran de l'église de Sare

Oren guciek dute ~ixon kolpaixen.

Askenekoakdu hobira e~ortxen..

« L'homme est 'vaincu par toutes les heures,» Mais la dernière le conduit au tombeau. »

Sur le chalet dans la vigne de M. J.-B. Men~~bouFe,à Sare:

Gaudèn Eskualdun Restons Basques.

A la mairie de Sare

Antonio Abbadiari A Antoine d'AbbadieEskual Herriaren du pays bas queOr~eoitxapena le souvenir.Agorrilaren. 19a'~?89i '19' août. 1897.

Incrustés dans les murs de la cour d'une métairie, sur lapropriété de Mme Delporte, prés de Saint~Jean-de~Ltiz,'iIy ales restes du support de la guillotine pendant la période ré-volutionnaire.Lesseules lettres visibles, sont:

VaLA TERRHESSES

TYRANNIE

Cela veut dire, je crois « fa(it) la terr(eur) (ric)hessestyrannie t » le reste est emmurré. Je n'ai trouvé nulle partaucune mentionde cetteinscription. Les archives de l'époque,~ûi existaient- dans la mairie de 'Saint-Jean,-de.:Luz, ont-étédétruites. C'estM. Vincent Barjonnet, ancien maire de Saint=~Jean-de-Luz, qui m'a signalé le premier l'existence de cette

1. Peut-être « La terreur chassela tyrannie.Voyez aussi Étudeshistoriques~et religieuses du -Diocèse de Bayonne. pi 9~ année,1895.

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inscription n'tenait de son père que les pierres de la guillo-tine avaientété ainsi employées dans cette métairie.

Au cap Figueras, près-de Fontarabie, le vieux fort portesur sa façade

Philipus II Hispcinat~'ntndiarurnq Rex

Ad repriménda piratumLatrocinia hoc ~SantermiCastellum extruere mandavitAnno Domini. MDXCVIII

Siendo Don Juan Velazquez Gener' de esta Provincia.

« Philippe II, roi des Espagnes et des Indes, ordonna deconstruire ce château de Santermi pour réprimer le brigan-dage des pirates, a. d. 1598. Don Juan Velazquez étant gé-néral de cette province.,u

Les pirates furent, je crois, des corsaires anglais, surtoutSir Francis, Drake~ qui avait saccagé La Corunaen 1589. Le

comte d'Essex, attaqua Cadix en 159ftMais, laissant ces souvenirs de guerre et de tristesse, reve-

nons.~ des compositions plus agréables et plus spirituelles

sur la maison du curé d'Aren,dans le val d'Azun, on lit:

Curialis Domus

lSEdes; Grex, Pastor, se per tria oincula~ nectùnt.

Grex sumptu, cura pastor, et arte domus.Hoc opus e.~t plebis, Pastoris cura recentis

Hcec meprima dédit, me ténet iste priôr.

1705

La maison, le. troupeau" le'pasteur, sont unis par trois;liens Le troupeau par la dépense, lè pasteur par son zèle,.

la maison par l'art. L'ouvrage est du peupie, le zèle d'un

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pasteur récent; Le troupeau le premier me donna, le pas-teur me possède le premier. »

I1 y a là un jeu de mots très difficiles à traduire. C'est lamaison qui est censée s'adresser au lecteur. Le peuple Hetroupeau) construisit la maison à ses frais, et la donna le pre-mier au curé, qui fut le premier (prior, le prieur), à l'ha-biter.

Au-dessus de la porte d'entrée du ppesbytère d'IbarolleAdichkidenxatlehenicHeltcen denean pobrericEtxaier nor gabe denichener nago aabalduricAux amis tout d'abord.Aux pauvres quand il s'en présente,AtlXennemis qui n'en a pas.A tous ceux-là je suis ouverte. »

A Ostabat, sur une maison cons~rQite'pa..r les. Prémontrés-Flamen técta reedificare labentia curat

Ad laudem Domini Darrigol ipse De~i.

« A la louange du Seigneur; Parrigol, lui-mêmeprêtrade Dieu,

Faitrestaurer cette maison écroulée.»'ditons aussi cette belle inscription béarnaise du château

de Castetis-

Sens bourroulh tau pravbe.

« Sans verrou pour le pauvre. »Mais nous avons presque aux portes de Bayonne toute une

série d'inscriptions de quelque latiniste de belle humeur,lesqnelles valent la peine d'être transcrites. Malheureuse-ment", je ne "les ai pas copiées toutes."

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Il y a, à Anglet, à la jonction des' routes, à moitié de ladistance entre Bayonne et Biarritz, à Saint-Jean, une au-berge en face sur la colline orientale, se dresse une tourhaute et mince, entourée d'un jardin anglais, avec fontaineet parc. A l'entrée de la tour, on lit cette adresse aux voya-geurs

Si quietus urbanusqueSta niator et intra

Si flagitium SocielatisVastator inimicus esses

Cilo procul e.sto.Sed r.ane,

Videt omnia DeusEt secretissima clelicta

Sc~pissim,e aperiunt leges.B. C. L.

« Si tu es tranquille et aimable arréte-toi, voyageur, etentre. Si tu as été un fléau de la société, son ennemi etson dévastateur, vite va-t'en loin. Mais souviens-toi

Dieu voit tout, et très souvent les lois découvrent lescrimes les plus secrets. B. C. L. »

Il y a, je crois, -deux autres inscriptions dans la tour, unesur l'escalier,l'autre sur le sommet je ne les ai pas,copiées.

A la fontaine, il y a deux inscriptions la première ditAmica oirtutis~ aqua;

Vinum et ebrietasScepissime vitiorum criminisque comites

~Von Clitum 3eraatorem suumAle~ander magnus occideritSi tanicim aquam bibisset.

« L'eau est l'amie de la vertu. Le vin et l'ivrogneriesont très souvent les compagnons des vices et du crime.

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Le grand Alexandre n'*aurait pas tué son serviteur Clituss'il n'avait bu que de l'eau ».

La dernière devise est plus sérieuse

Aquâ, etfide in doctrina ChristiHomines Christiani facti sunt.

« Par l'eau et par la foi en la doctrine du Christ,les hommes ont été faits chrétiens. »

Il y a encore d'autres vers dont j'ai négligé de prendrecopie, croyant pouvoir y revenir mais, comme il nous arrivesouvent, l'occasion ne s'est jamais renouvelée. Je ne saisrien de l'auteur de ces s morceaux je n'ai pu rien apprendrelà-dessus des métayers. II rst probablement connu de quel-qu'un de mes collègues en ce cas, je le prie d'y ajouter lenom ici, ou' en note. Peut-être,.comme l'endroit est si prèsde Bayonne et d'un accès si facile par letramway, quelqu'unde mes collègues pourrait-il visiter la propriété et copier toutce que j'ai omis..Mais c'est notre honoré présidept, M. Antoine d'Abbadie

qui nous a fait voir ce qu'un beau choix d'inscriptions et dedevises, d'écritures diverses, peut faire pour l'ornementationet l'agrement d~unemaison. Ila couvert les murs, les plafonds,les corniches, les cheminées et les tapisseries de son beauchâteau d'Abbâdia (l'ancien Arhgorri) de devises, d'ins-criptions, de vers, dans bien des langues, mais toutes ayantquelques rapports avec ses études favorites, ses voyages, sesancêtres, ses aspirations. 'Il y en a en latin, en grec, en arabe,en persan,en éthiopien, en erse (l'ancienirlandais), en anglais,en français et surtout en basque. Le choix de ces morceauxest remarquableautant par la beautédes sentiments exprimés,que par la -perfection de l'écri ture, surtout des caractèresorientaux.

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J'e copie les quelques inscriptions en basque et quelquesautres.

Sous le porche d'entrée, il y a cet appel hospitalier en erse(l'ancien irlandais)

~Cead mil failte. Cent mille fois le bienvenu.

En basque Es ikusi es ikasi. Pas de voir, pas d'apprendre.

A la bibliothèque sur les poutres du plafond.:

Ago Jaincoarequi Jainco dukek hirequi

« Reste avec Dieu (et) Dieu restera'avec toi. »

Erho bat aski da harricantombaten puzura egos-teco, bana sei suhur behar dira haren hantik itoiteco.

« Un fou est suffi sant pour jeter un bloc de pierredans un puits, il faut six sages pour l'en sortir.))

Sapar edoceinec du bere i,aala.

« N'importe quel buisson a son ombre. »

Jaincoac beta languile on isan~atinahi du landike

cc Dieu, quoique bonouvrier,veutcompagnondetravaiP.})»

Je copie, à cause de la belle traduction faite par une amie,de Mme d'Abbadie, la stance du Syren de Robert Buchanan,poète anglais, qui orne le salon

Ohl Melanchôlywaters softly flow 1

Oh Stars 1 shine softly dropping dewy balm 1

Oh Moon 1 walk on in sandals white as snow 1

Oh Winds, be calm, be calm 1

For 1 am tired with wanderingstoand fro,Yea, weary with tinrest to see and kIiow.

1. M. d'Abbadie se sert du s au lieu du x dans les mots basques,es pour ez, suhur pour zuhur, sapar pour zapar, isangati pourizangati.

14

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Oh charmed soundThat hoverestaround

Obi, l.oices of the night 1 sing low 1 sing low J

` Sing low J

o cou- doucement,coulez, onde attristée.ÉtoiIes'ndez vos rayons frais et doux.o lune, marche en paix sur ta route argentée.

0 vents, calmez-vous, calmez vous.Car je suis fatigué d'errer sur cette terreDe conn~itre, de voir, de chercher je suis las.

Bruits charmants que rien ne fait taire,Voix de la nuit et du mystère,Chantez plus bas, chantez plus bas.

C'est le cri du vieux yoyageur, du savant fatigué de savoirqui cherche le repos.

Les devises de' sa jeunesse étaient plus fières. Plus èire queparaître. In labore felicüas.~ Le bonheur dans le travail.Toutes les deux voix se confondent dans le mot, la vraie finde toute 'science, le soupir d'adoration, reproduit plusieursfois sur les murs de la belle chapelle humilitas 1 h *Umilitas t

humilitas Une maisonain,si ornée et enrichie devientquelquechose de plus qu'une demeure c'est un être qui nous parle,qui nous accueille, un souffle de l'âme du mattre qui y a passé.

J'ai à peu près vidé ma besace. Il y a encoredes inscriptionsd'un autre genre qui vaudraient peut-être la peine d'êtretranscrites.Ce sont les inscriptions sur les cloches des églises.II y en a une à Sare assez curieuse. La tradition veut qu'uncapitaine de navires de Sare aurait rencontré en pleine merun navire tout à fait abandonné. Sur le pont il y avait uneassez grosse cloche. Il en prit possessionet en fit don à l'églisede son village. Elle est.en bronze et porte cette légende

Guten afIshanJacob Martensen. Stockholm, 1781.

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Une cloche de la cathédrale de Vitoria, en Alava, porteaussi une inscription scandinave

GHEGOTEN INT JAEK. 1531

C'est du danois, si je ne me trompe.Ces faits rappellent la série de légendes inscrites antour

de ces grands plats de bronze dorés, flamands ou hollandais,dont on se sert dans le pays basque aux mariages, auxcollectes dans les églises, et à d'autres cèièmonies de fa-

mille.

J'en ai vu deux avec des légendes à peu près pareilles

ICH BART "GELVK ALZEIT

« Moi Bart heureux toujours. »

E. H. BART AL.ZEIT GELVCK

« E. H. Bart toujours heureux. »

Un autre porte

HILF GOT AVS NOT

« -Dieu aide dans la nécessité ».

A hezposition de Saint-Jean-de-Luz, août 1897. Àutour

des figures d'Adam, et d'Ève VREEST. GOLDT ONDERHOVLDT SYN GHEBODT.

Mais que veulent dire les lettres trois fois répétées sur la

marge de deux de ces plats?

RAIÉWISHNBI

Il y a quelques années ces plats étaient assez communs

ils sont, à présent,devenus rares dans le pays. Quelle en estl'origine'?Je seraistentéde supposer qu'ils viennent d'Anvers

et qu'ils da1ent du temps de la domination espagnole dans les

Pays-Bas. En trouve-t-on de semblables dans la Belgique ou

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dans la Hollande ? II y a dans le pays basque des famillesqui sont devenues basques françaises, ou espagnoles, commeles Dop, de Sare, et qui avaient émigré de la Hollande oude la Belgique à cette époque des Îamilles catholiques quicherchaient un pays où la croyance religieuse ne fût pasdivisée.

Pour conclure, je prie mes collègues de me pardonner deles avoir invités à un repas aussi maigre et si peu digne deleur attention. J'ai hésité longtemps à écrire ces lignes.J'èspérais toujours faire un travail plus complet, plus abon-dant mais les souffrances, la vieillesse et les infirniités dela vieillesse m'ôtent toute espérance d'en pouvoir faire da-vantage. C'est aux plus jeunes,aux mieux doués, de recueillirde nos mains tremblantes la tâche interrompue avec lesmoyens de communication plus faciles, la science plusétendue, la méthode de recherche plusassuréed'aujourd'hui,de compléter nos travaux, et de faire mieux que nousn'aurions pu le faire nous-mêmes.

P.-S. A propos de l'inscription latine d'Escot, M. l'abbéV. Dubarat fait cette remarque dans ses ,Études. hisiorigueset religieuses du diocèse de Bayonne (1re année, 5e livraison,juin 1892, p. 274):

CI On ignore généralementqu'un ouvrier espagnol fit sauter,en 1886, le rocher sur lequel était l'inscription romaine,pour le transformer en gravier. o

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LES PASTORALES BASQUES t

INTRODUCTION

Parmi les moeurs et coutumes conservées par les Basques,coutumes, qui sont perdues dans le reste de la France, il

n'y en a guère de plus intéressantes que les pastorales, latra~gédie, le drame basque, que l'on joue encore au prin-temps et en été, pendant les grands jours de fête, aprèsPâques, et vers la, Saint-Jean d'été, ou la Saint-Pierre. Il y a

aussi le char~iaari, que l'on danse au Carnaval, tout aussidigne d'attention et peut-être encore plus populaire.

Les pastorales basq ues, le Passionspiel d'Ober-Ammergau

en Bavière, quelques pièces religieuses en Espagne, lesmystères' bretons sont les derniers vestiges de ces grandsdrames du moyen âge qu'on appelait miracles, moralités,mystères, qui ont survécu jusqu'à notre siècle. La repré-sentation dramatique des grandes scènes bibliques ou évan-géliques commençait bientôt dans l'histoire du chris-tianisme. La plupart de ces anciens drames sont perdus.Nous possédons le Christus Patiens, l~ Christ souffrant,attribué à saint Grégoire de Nazianze (370-390 A. D.), mais

1. L'auteur a écrit quatre études sur les pastorales; en anglais.Macrreillan's Magaaine, jauuary. 1t363 Bulletin de la Société des

sciences et des arts de Bayonne, 1879; Bulletin de la SociétéRamond, 1893 La Ti~adition au Par~~ Basque, Paris, 1899. Les

pages qui suivent sont de la Société Ramond de 1893 avec quelquesadditions. Elles furent écrites d'abord pour servir comme introductionà une édition basque de la pastorale Sainte Hé~éne par M. E. S.Dodgson. Cet ouvrage n'a jamais paru.

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plus probablement l'ouvrage d'un autre Grégoire qui vécut

vers l'an 572. La ttadition de ces représentations dramatiquesparait avoir été conservée, dans les couvents, si on en peutjuger par les œuvres de Hrosvithe, abbesse de Gandersbeim(920-968). Nous retrouvons les traces de ces mystères presqueau même temps, en Angleterre, en Bretagne, en France et enProvence)', depuis le XIe siècle. En Espagne, à Elche, enValence, dans l~s montagnes de Malaga; on les écrivairen la-tin, en breton, en anglais, en langue romane. Les plus ancienssont probablement ceux qui furent composés en langueceltique dans la Bretagne, pays où l'usage s'en est conservépresque jusqu'à nos jours.

En Angleterre, on trouve de ces drames en langue celtiquedans la littérature du pays de Galles, et dans les restes decelle de Cornouailles, où on parlait jusqu'au dernier siècleun idiome celtique, aujourd'hui entièrement perdu.

Ces représentations dramatiques furent très populairespendant tout le moyen âge. Elles fournissaient un des plusgrands moyens d'instruction pour le peuple, et avec leschansons de gestes et les contes du folk-lore, elles for-maient la seule littérature vraiment populaire. D'abord, elles

se' jouaient presque exclusivement à l'époque des grandesfêtes de l'année chrétienne, à la Noël, à Pâques, -à laPentecôte mais depuis l'institution de la fête du CorpusC~risti, la Fête-Dieu, par Urbain IV, en 1264, cejour restaitspécialementconsacré auxgrandesreprésentationsreligieuses.Les nombreuses pièces, Loas et Autos de Calderon, etd'autresauteurs dramatiques espagnols en sont la preuve. On pourraitêtre tenté de croire que ces représentations dramatiques siintimement liées au catholicisme et à la vie du moyen âgeauraient cessé au moment de la Réformeet de la Renaissance,

1. J. Diez, Lu Poésie des Troubadours, traduction du baron F. deRoisin, p. 232 Paris, -1845.

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dont l'esprit était si contraire de celui des siècles antérieurs.Mais il n'en fut pas ainsi, immédiatement au moins: Lareprésentation la plus splendide dont la description nous estrestée fut celle du Mystère des Actes des ~4pôlres joué àBourges en 1536. « Elle ne remplit pas moins de quarantejournées, et fut mise en scène avec un luxe de costumes et dedécors qui surpassa tout ce qu'on avait vu jusque-là. 494

personnages y prirent part. » Le rédacteur de ce grandmystère fut un docteur de l'Église réformée, Jehan Cha-'ponneaul. « La tragédie de Saint Jacques, composée à lafin du XVIe siècle par Bernard Bardon de Brun, fut repré-sentée à Limoges pour la première fois, en juillet 1~96 $.

Mais l'art dramatique populaire du moyen âge n'était pasabsolument religieux. Il y avait aussi des pièces laïques etprofanes. Comme on sait, les religieux et le clergé furent lesprincipaux écrivains du moyen âge les laïques n'écrivaientguère de sorte que les pièces religieusesque l'on jouait ordi-nairement dans les couvents les jours des grandes solennités

de l'Église sont presque les seules qui nous ont été con-

1. Notice sur Jehan.Chaponneau, docaeur de l'Église réformée,

par Émile Picot, Paris, 1879.Le Myatére de la Passion, représenté à Angers, 12 août 14.~i6, fut

remanié dans la même façou par le DI, Jehati Michel. llllébute ainsi

« Cy commence le Mistère de la Passion de notre Saulveur JehusCrist, avecques les additions et corretiotis faites par très éloquent etscientifique Docteur maistre Jehau Michel. Lequel mistère futjQué àAugiers moulttriomphammeutet sumptueusemetit eu l'au mille quatrecens quatre vingtz et six, en la fin d'aoust. »

« La représentation dura quatre jours. Quatre-vingt-sept acteursparurent sur la scène pendant la première journée, ~cent dans laseooude,quatre-vitigtsdans latroisième,etcentcinq dans laquatrième,sans compter les figuraots juifs, diables, soldatset autres personnage.»

Jean Michel .de Pierreoioe et le Vlc~stère cle la Passion, parM. Achille Chereau p. 4-5, Paris, Techener, 18M.

2. Compte rendu du Congrès des Sociétés savantes dans le Temps,avril 1853.

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servées. Mais parmi les laïques, chez les jongleurs et lestroubadours', dans les halles des grandes villes, sur lesplaces des viJlages, dans les cours des châteaux des nobles,les pièces jouées ne furent pas toujours tirées de la Bible, desÉvangiles et de la Vie des saints il y avait des morceauxbien différents, quelquefois des plus libres, qui provoquaientle gros rire, et qui donnaient libre cours à la gaieté gauloise.En outre, l'hagiographie, la légende religieuse avaient unsérieux rival dans la grande légende celtique du roi Artus et"des chevaliers de la Table-Ronde, dans le cycle carolingienet dans toutes les histoires des chansons de gestes.

C'est un trait caractéristique des pastorales basquesqu'elles aussi (comme les mystères bretons) nous ont conservénon seulement des pièces tirées de l'Histoire sacrée, de laVie des saints, mais aussi de la grande Légende carolin-gienne, des chevaliers de la Table-Ronde, des Douze Pairsde France, et même aussi du gros rire rabelaisien de nosdevanciers.

Nous pouvons très bien comparer les pastorales basques

avec' les mystères ou tragédies bretons. Nous trouverons unegrande ressemblance entre eux. Les sujets sont les mêmes,l'exposition est presque identique le nombre des rôles, lalongueur de la pièce sont à peu près égaux. Comme litté-rature, je crois que les mystères bretons'sont supérieurs auxpastorales basques, mais dans la mise en scène., dans l'actiondu drame, dans la représentation, les Basques ont gardé partradition des traits du plus grand intérêt, qui remontent audelà du moyen âge, presque ¡Usqu'aux traditions de l'ancienthéâtre grec.

Comme le remarque M. L. Petit deJullevilIe, « mêmeilestcurieux d'observer que le théâtre au moyen âge, quoiqu'il

1. Espagne 'et Prooencc, par Eugène Baret, p. 32, Paris, 1857,

et Les TrouGadours, du même auteur, p. 34-37, Paris, 1867.

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ait péri sous les coups des disciples et des adorateurs del'antiquité, ressemblait bien plus au théâtre,des Grecs que lethéâtre classique (i.e. français) lui-même, qui l'a dépossédéet détruit au nom des Grecs. Le mystère ressemble au dramegrec au moins en ce point qu'il célèbre, lui aussi, l'histoiredes dieux et des demi-dieux, j'entends de la Divinité, dessaints, des martyrs, qu'adoraient ou honoraient le peuple etle temps dans lequel il florissait,où il afleuri La Renaissance

ne vit pas cela en prétendant suivre les pas,des Grecs, ellecréa ce que les Grecs n'eussent jamais admis, une littératured'imitation 1». Tout ceci est également vrai des pastoralesbasques. Par l'intervention des Satans ou des Turcs, toutepa~torale devient, quel qu'en soit le sujet accidentel, unépisode de la lutte éternelledu bien contre le mal, de la guerreentre Satan et le Bon Dieu, où la victoire reste toujours àcelui-ci, mais où l'autre, quoique toujours vaincu, ne se rendjamais.

Toute personne familière avec l'ancien théâtre grec nepeut assister à une pastorale basque sans se rappeler lethéâtred'Eschyle, de Sophocle, d'Euripide ou d'Aristophane.Toutes les scènes se passent en plein air. II y a ce mélangede musique, de danse et de chant, dont le divorce n'avait

pas encore eu lieu. Dans toutes les langues de l'Europemoderne les termes techniques de la poésie montrent encorequelle union étroite existait autrefois entre la musique, lapoésie et la danse. Le vers, versus, est le mouvement tournantque les acteurs basques font toujours à leur entrée les piedsmarquent littéralement la mesure, le nzèEre le chorus, lesSatans dans leur danse répétée font le tour,, la strophe, et leretour, l'anlisirophe; tous y sont indiqués non seulement parla voix qui déclame, mais aussi par la musique, par la

1. Les Myst~res, par L. Petit de Julleville. Vol. l, p. 12. 2 vol.( Hachette, Paris, 1880).

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marche, les pas, la danse des acteurs. Il y a, et ceci est peut-être le fait le plus curieux, un véritable chorus dans lespastorales ba3ques. Un choeur ou chorus est de rigueurdans toutes,l~ pastorales, comme dans toutes les pièces

grecques un chorc~ qui danse comme dansaient les chorusgrecs, qui chante d'unenlélodie bcaucoup plus complexe quecelle que suivent les autres acteurs. Mais ce chorus qui surl'ancien théâtre remplit toujours le rôle de juge, de mora-lisateur, de conseiller discret, dont le devoir était, comme, il

a été si bien dit d'Horace,

Ille bonis faveat, et consilietur amicis

Et regat iratos, et amet pacare tumentes.Ille dapes laudet mensæ brevis ille salubremJustitiam, legesque, et apertis otia portis;Ille tegat commissa, Deosque precetur et oretUt redeat miseris, abeat fortuna superbisl.

Ce beau rôle se trouve tout à fait interverti dans le chorusdes pastorales basques. Les Satans, le chœur qui danse, aulieu de favoriser les bons; les tourmente et leur fait toujoursopposition.

Ils sont de nrais diahles; ils tentent et persécutent les pieuxséduisent les innocents et sont l'occasion de tout le mal, detous les crimes, de toutes les méchancetés, qui se présententau cours du drame. Pour bien comprendre leur rôleet la poésiede leur action, il faut se souvenir que, quoique visibles etbien en évidence sur la scène, ils sont censés y être invisibles,

1. Horaüi Op6fi.-a. De arte poeLica, ad Yisoues.

« These terms (basis, arsis, tbesis) show how c105ely the two arts ofdancing and singing were combined Dancing miR'bt be deflned aspoetry without word! The combination of poetry and dancing, ofwords and, gestures prot!uced a perlect imitation. o Tlae Attic Tlieatre,by A. E. Haigh, pp. 348 ét 251. 2' édit. Oxford, 1898.

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au moins pour leurs victimes ce qui est le cas presque tou-jours dans les scènes de tentation'

Aujourd'hui les pastorales ne sont représentées que dans)a Soule, c'est-à-dire dans la vallée du ~aison, au sudde Mauléon. Mais il n'y a pas longtemps qu'on les jouait enpatois, en plein pays béarnais. Les Doû.~e Pairs de France,tragédie tirée du Roman de Fierabras, fut jouée à Castets,dans le canton d'Arudy, en 1833'. J'ai entendu parler dedeux ou trois autres pastorales en patois, les unes plus an-ciennes3, les autres plus récentes.

Il y avait autrefois des représentations dramatiques dansle Labourd Dans la Navarre et dans le Guipuzcoa, lesdanses religieuses devant le saint-sacrement, le jour duCorpc~s Christi me semblent être les échos ou les restes desanciens mystères qu'on jouait presque partout ce jour-là. J'ailu dans l'Euskal-Erria, excellente revue basque-espagnole,

1. Nous avons entendu parfois affirmer que le mot Satan doit êtreplutôt Sautants, parce que les Satans sautent ou dansent toujourssur la scène. Pour quiconque a lu une seule pastorale cette explica-tion est inadmissible.

2. Voyez Eugène Baret, EspcacJne et Prooence, appendice.3. Ln Pastourale dea Paysaa, per moussu Foundeville. Poésies

béarnaises. deuxième volume. Vignancour. Pau, 1860.Eu béai-nais il y a la Pastoralc: ou Trage;~cüe ci'Artiyueloutan et

Les Enl'ants de Jxc:oG. Lescal', 1751, dernière élition, chez Ribaut,Pau, 1881. Voyez Études laistoriqu~s et religieuses du Dio~ése deBayonne, p. 548, 1897. pp. 118 et 557, 1898. J'ai aussi devant moi~'Vaiasance de Notre Seigneur Jésccs-Clanist en Créche, Pastorale, eu4 actes et 7 tableaux, par Pierre Bellot. Marseille, 1851. En 1834,Mgr l'évêque de Cambrai interdisaitla représentation de l'Adorationdes BcrcJers. Le drame de Sainte Félicité et des Marlaabéesfut joué àLimoges en 1848. Au village de Lagnes ( Vaucluse), on représentait, en1872, l'.4doration deq Bcryers. Il doit y avoir beaucoup d'autresreprésentations semblables dans les diverses provinces de la France.Études sur les Mystères au moyen aicJe, par Germain Bapst,pp. 59-60.Leroux, Paris, 1892.

..4. J. Michel, Le Pays Basque, p. 53.

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publiée à San-Sébastian, une belle description de ces dansesreligieuses lejour de l'inauguration du monastère de Loyola,

au XVIIe siècle. Larramendi en parle comme d'une chose

commune en 1756 1.Rien de plus joli que la mise en scène d'une pastorale

dans un village basque, pourvu que le temps soit beau. Carla pastorale se joue toujours en plein air, et le beau tempsest indispensable. J'ai vu des acteurs courageux s'efforcerde jouer sous des parapluies, mais l'orage avait toujours ledessus et mettait les acteurs en fuite. On ne peut danser surdes planches humides ce serahmêmedangereux, et lés beaux

habits, les cztorcrs, les plumes, le clinquant seraient dégradés

par la pluie, toute leur fralcheur disparaîtrait bien vite. Ilfaut donc s'arrêter.

La scène est des plus simples. Elle ne consiste qu'en desplanches ou des poutres clouées sur des barriques renversées.Ordinairement, si cela est possible, on l'appuie contre lepremier étage de quelque maison, -dontles.chambrespeuventservir de coulisses et de loges pour les acteurs. Au fond de lascène on étend de grands draps blancs, garnis çà et là debouquets de fleurs. Les acteurs se tiennent derrière ces 1rapslorsqu'ils ne sont pas sur la scène. Il y a, à gauche et à droite,deux entrées, affectées l'une aux bons, l'autre aux maccoai~

per·sonna~e,3. L'orchestre, où figure toujours un tar~cbourinbasque, consiste ordinairement en trois ou quatre ménétriersdu village jouani. de la flûte, du violon, de la trompette etdu tambour. Le seul instrument qui attire l'attention d'unétranger est le tambourin basque (soïnua ou tambourilla).C'est une espèce de guitare à six cordes, portée sur l'épauleet les genoux, et frappée d'utie petite baguette avec la maingauche, tandis que l'artiste joue du chalumeau (le chirola

1. Larremeudi, Coroyra,/ia cle Guipuacoa, p.201. Bàrcelona, 1882.

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tchürüla) avec la main droite. Le tambourin donne les notes

graves, presque comme le bourdon d'une corne'muse le chi-rola les notes sifflantes et aiguës.

Aux quatre angles de la salle se tiennent des gardes,habillés de pantalons blancs, blouse bleue, ceinture tricolore,armés d'un fusil qu'ils déchargent avec fracas quand unhéros tombe dans les combats très fréquents. Alors toutel'assis-tance féminine se lamente, et les jeunes filles surtout crient

ay, a~r~! ay, ar~! Mais d'abord on étend soigneusement sur lascène un drap blanc, afin que le mort ou le blessé ne dégrade

pas ses beaux habits. L'effet le plus inattendu est de voir lesfilles s'avancer et étendre avec le plus grand sérieux le drap

sur lequel le soldat doit mourir. Au-dessus de l'entrée de

gauche, celle qui est affectée aux mauvais personnages estsuspendueune espèce de mannequin o~ poupée, qu'on appelleMahomet, Jupiter, ou l'Idole. Les Satans et les Turcs luifont un salut, et l'adorent toutes les fois qu'ilspassent dessous.Souventaussi dans le cours de leur rôle ils lui adressent leursprières. (i Quelle que soit l'absurdité de ces récits. ils sontmoins extravagants que l'opinion, généralement répandue

au moyen âge, au moins parmi le vulgaire, d'après laquelle

« Mahom » était, avec Apollin, Jupiter et l'énig:natique Fer-

vagant, une des idolés qu'adoraiènt les Sarrasins 1. »

Les bons et les mauvais personnages se distinguent nonseulement par leurs entrée~ et sorties différentes, ils portenttoujours des vêtements de couleurs distinctes. Le bleu est lacouleur consacrée aux héros, aux saints, aux Français, àCharlemagne, aux douze pairs; le rouge est porté par les

Satans, les Turcs, les infidèles, les méchants et par les An-

glais. Sur le théâtre basque les sexes ne sont jamais mêlés.

Ou la pastorale est représentée entièrement par des hommes

1. La Littérature française du moyen âge, par Gaston Paris,

p. 220. Hachette, Paris, 1888.

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et des garçons, ou par des femmes et des filles seules. Quel-quefois on ajoute deux danseurs du sexe masculin, d'âgemûr, pour exécuter le rôle appelé des Satans, .r8le trop fati-

gant pour le, beau sexe. Les pastorales de femmes sont beau-

coup moins fréquentes que les pastorales d'hommes. Dans

ces dernières, les rôles féminins sont remplis par de jeunes

garçons habillés en femmes, et quelquefois ils s'en acquittenttadmirablement bien. Je me rappelle l'observation d'unedame française à propos d'un de ces darçons-demoiselles àLarrau « Jamais. jen'ai vu une Anglaise manier son éven-tail aussi bien que ce garçon-là. Elles s'échauffent et s'y~fatiguent toujours; mais; regardez.le. » Comme la pièce estjouée toujours en plein air, il- faut une- voix forte et de bons

poumons pour se faire,entendre la voix timbrée d'un garçony réussit bien mieux en général que la voix plus douce' des

femmes, qui,a beaucoup moins de portée. Il ne faut pas.ou-blier un personnage très important, le s~eur, qui se tientassis au fond' de la scène, manuscrit en main. Il est aussibien souvent le directeur du théâtre, et l'auteur ou le rédac-teur de la pièce.

La pastorale commence par une processionà cheval autourde la ville ou village'. Les.acteurs, qu'ils soient habitués ounon à monter à cheval, se ,font tous cavaliers pour ce jour-là,Ils sont vêtus de la liorée de leurs rôles respectifs. En avantmarche toujours le drapeaublanc, ou tricolore, suivi du hérosde la pièce, et de tous les bons. Les ~arçons-demoisellesnesont guère à leur aise comme amazones et leur monture estmenée par la bride. Sur quelque animal très paisible, souvent

1. « On faisait précéder la représentatiollduIl mystère» de ce que

l'on appelait une monstre, ou grande promenade à travers la ville,et dans laquelle chacun montrait, en paradant, le costume qu'il de-vait porterdans lal'eprésentation;) G. Bapst,~Étu~le sur les Mystèrosau moyen âge, p. 40 (Leroux, Paris, 1892).

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un mulet, vient l'évêque, mitre en tête, en soutane couleur

pourpre, et s'il y a dans la pièce un ange, il se cramponnederrière lui, se tenant avec ses deux bras autour de la tailledeMons~igneur. L'ange est représenté ordinairement par untout jeune enfant, habillé d'une tunique blanche et couronnéde fleurs blanches. J'en ai vu qui se sont acquittés de ce rôle

avec un sérieux admirable. Il est vrai que les anges neparlent pas beaucoup, mais la pose à mains jointes, tenantune petite croix et leur démarche si calme font merveille.Après les bons, « les bleus », viennent les mauvais, « les

rouges », précédés d'un drapeau rouge, et les Satans viennentles derniers. Par une petite échelle placée" au milieu, les

bons montent sur la scène avec aisance et dignité, mais il estde rigueur que les mauvais fassent plus de difficulté. Ils

rampent, se retirent, font de grands efforts, et après plusieursessais se trouvent enfin sur la scène ce sont les Satans qui

ont toujours le plus d'échecs. Lorsque tous y sont montés,celui des acteurs qui possède la voix la plus timbrée accom-pagné du porte-drapeau qui l'agite doucement au-dessus de

sa tête, s'avance au milieu de la scène, et débite le premier

sermon, lehen pheredikia, il récite un vers, au milieu, s'en

va à l'angle droit de la scène, en dit un autre, retourne aucentre, débite un autre vers, il va ensuite à l'angle gauche, etainsi de suite. Le sermon commence de cette façon « Peuple

admirable, que Dieu vous donne la patience, de nous écouter

avecattention,»ou: a Messieurset mesdames, mes chers frères

et' sœurs, bonjour vous souhaite votre serviteur. Voici, je

suis incapable de vous parler en deux mots c'est pourquoi

je vous prie de me porter votre attention' ». (Prologue de

1. Les prologues des Mystéres bretons commencent à peu près dela même façon. «( Réuuion de chrétiens, assemblée honorable, nousvous prions à deux genoux de nous écouter avec bienveillance. Il

Puis (après la monstre) l'on commençait la représentation par lalecture d'un prologue. Bapst, p. 41.

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Saint Julien d'Antioché). Il donne ensuite une analyse, oucompte rendu en vers, de la pièce qu'on va représenter. A

la fin il y a l'aaken pheredikia, le dernier sermon, remer-ciant l'assemblée, et ajoutant quelques vers de circonstance,ou improvisésàpropos des spectateursdistingués,s'il y en a.

Quant aùx'costumes, ils sont plus ou moins de tradition.Les bons, les héros, s'habillenten'préfets ou sous-préfets, ouen gendarmés,enbleu ou bleu foncé; ils portent souvent uneépée, mais toujours une grande canne qu'ils manient commeun sceptre. Les rois,qu'i~s 'soient chrétiens ou infidèles, portentdes casques ou couronnes merveilleux, faits de plumes et declinquants, avec un morceau dé miroir pour représenter undiamant énorme. Les mauvais personnages portent toujoursdes uniformes rouges, ,et quelquefois de grandes bottes. Lecostume des Satans est le plus joli de tous'. Ils ont quel-quefois des chapeaux,comme les rois infidèles, quelquefoisde gracieux bérets rouges, ou rouges avec cordons blancs, lajaquette courte rouge avec ceinture rouge, et pantalonsblancs, ou culotte peau de chamois avec bas blancs ils ontquelquefois de petits grelots attachés à la ceinture, ou àmi-jambe pour chaussure de spartingues ou sandales 'dechanyre avec rubans rouges, ou, dans ces derniers temps, desbottines brunes. Ils portent aussi une petite baguette de40 centimètres de longueur, terminée par des crochets,ornée de rubans entrelacés7 avec laquelle ils font leurs dia-bleries. Un petit coup de cet instrument suffit pour tuer lesvivants, pour ranimer les morts, pour métamorphoser les

personnages c'est le caducée de Mercure. Mais quoique lecostume des personnages mâles soit réglé plus ou moins parla tradition, il n'en est pas ainsi pour les ~arçons-demoisedles.Celles-ci sont affublées selon la dernière mode, ou ce qu'on

1. « Le diable était l'acteur populaire par excellence. Bapst,p. 37.

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icroit être>la. dernière mode'do'Paris'. J'en ai v u avec:des cri-noli.ne~ énormes sous l'Empire et' de presque toutes lesmodes qui se sont succédé depuis.

J'ai parlé de la musique. Il faut se souvenir que toutel'action est accompagnée par des airs.. Le récit ordinaire sese fait en récitatif ou monotone'Les' airs ordinaires sontécrits dans les manuscrits Sonnez champs, pour les bons,Sonnez inf~dèles, pourles mauvais. Les batailles se déroulent

au son d'un air qui se trouve dans la Clé, du Canéau..LesSatans dansent sur l'air de Bon ~Voi~age, cher Dumolet, etles Turcs font leur entrée au son de,l'air ~Tarie,.trempe tonpain, joué avec prestesse, allegro vivo'. Il y.a aussi des airsde circonstances particuliers à quelques rôles comme à ceuxdes anges, aux prières, aux .chan~s de grâces.

Lal~ngue des pastorales est toujours le basque maisdans' presque toutes il est intercalé un morceau comique, gé-néralement en béarnais, tournant en ridicule les -voisinsgascons des Souletins, plus rarement en français,

pour dérider les assistants fatigués du trop grand sérieux dudrame. Ces scènes comiques sont intercalées même dans lespièces bibliques la querelle' entre les bergers d'Abraham etde Loth est représenté comme une scène des plus grotesquesentre bergers, habillés en Béarnais, qui entrent en scène tri-cotant. M. Vinson a imprimé un morceau des plus libres,introduit dans l'Enfant Prodipue'. Comme les costumes etla mise en scène, l'action est èn grande partie réglée parla tradition. Les bleus marchent avec lenteur et dignité,

1. Le Folk-Lone du pcc~s Basque, par Juliell Vinson, p. XXXIII

« Les danses qui les accompagnaient furent des plus prestes et desplus vigoureuses dans la tragédie aussi bien que dans la comédie, »The Attic Theatre, par M. Haigh, p. 353, 2' édit., 1898, et note(Oxford, 1889).

2: Ibid., p. 335.15

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févêque avance avec solennité, l'ange effleure à peine lesplanches mais les rouges, les mauvais, surtout les rois

rouges, marchent à grands pas, se démènent, tempétent,frappent avec le pied les Satans sautent, dansent et sonten mouvement perpétuel. La pastorale laisse peu de place

pour montrer le talent original de l'auteur. S'il a une bonne

et forte voix, s'il porte bien son habillement, s'il ne s'écarte

pas de la tradition, voilà tout ce qu'on demande' Néanmoins,il y'a toujours moyen de se distinguer. On voit que quelques-

uns ont le sentiment de leur rôle et que d'autres ne l'ont pasdu tout. Une jeune fille, qu'on nommait l'Espagnole, se fai-sait remarqner par son intelligence dans la pastorale deSainte Hélène, à Garindein. Francisque Michel donne, aprèsM. Duvoisin, des détails touchants sur une fille quiétait devenue folle des émotions de son rôle de sainte Gene-vièvel. J'ai entendu parler d'une autre qui répétait avecenthousiasme jusqu'à l'extrêmevieillesse le rôle qu'elle avaitjoué.dans sa jeunesse. Un vieillard m'a raconté avec grandefierté pendant toute une après-midi ses souvenirs' de sonrôle de Satan, qu'il jouait encore presque enfant, et les soins

que ses parents avaient pris pour le lui enseigner3. L'effet

1. Le rôle du premier Satan, celui qui chante et, parle, répond auchorège dans les drames grecs. fi The part of the leader was aneztremely arduous one. While the dialogue was in progress, hehad to carry on conversations with the actors upon on the stage.At the same time his own dancing and mimetic gestures were sup-posed to be a conspicuous feature in the performance.u The AtticTheatne by A E: Haigh, p. 335, 2e édit. Oxford,1898. Voyez p. 218.

icChorus and actors were supposed to form one harmonious group,

and no doubt the chorus followed the events upon the stage witha keen appearance of interest, and expressed their sympathy with thedifferent characters by every kind of gesLure by play. » P. 354.

« Music a single flute or harp. « P. 357.2. Francisque Michel, Le Pays Basque, p. 48.3. «*Sans le sérieux avec lequel sont tennales rôles, sans l'émotion,

on pourrait même dire le recueillement de l'assistance, ces. représen-

Page 249: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

d'unepastorale ne dépend pas autant des efforts individuels'

des acteurs que de la disposition générale et de l'ensemble.

Rien de plus curieux que de regarder la scène hors de la

portée des voix et des bruits. La marche solennelle des bons,

les gestes outrés des mauvais, la danse des Satans, les

groupes au milieu de la scène produisent un effet bizarre

et fantastique. On voit par cela que les scènes des tragédies

grecques ont dû produire des impressions semblables, vues

de l'extrémité de l'amphithéâtre. Ces tableaux aiaants sont

peut-être l'origine de l'excellence de l'art de groupement de

la sculpture grecque'Pour jouer une pastorale complète, il faut au moins huit ou

dix'heures.La pastorale d'Astiage, roi de Perse, qu'on repré-

sentait à Ossas, le lundi de Pâques 1893, commença à huit

heures du matin et finit vers cinq heures du soir. Deux de

ces représentations, auxquellesj'ai assisté, à Larrau et à Tar-

detz, ont duré à peu près le même temps. A la fin d'une

pastorale, après l'Asken pheredikia et les improvisations

d'usage, on peut observer une coutume bien curieuse. On

met à l'enchère le droit de danser le premier Saut Basquesur

la scène. Le commissaire-priseurest un des acteurs; les en-chérisseurs. sont les garçons des:villages voisins, qui se sont

cotisés pour disputer ce droit à leurs rivaux Les offres

montent à vingt, trente, quarante, même cent francs et plus.

tations paraîtraient des fumisteries mais étant donné le caractère

religieux de ces my stères, ils sont d'un haut intérêt.E. Bapst, p. 63.

Ceci est bien vrai des pastorales basques.1. « Sur la scène longue et étroite les acteurs se tenaient en groupes

pittorésques et saisissants, et les actes qui se succédaient dans le

drame furent présentés aux spectateurs comme unesérie de tableaux

artistiques. Les représentationsde personnageset de scènes tragiques

consignées dans les oeuvres d'art, sont caractérisées par un repos et

une dignité qui rappellent lesobefs-d'œuvrede la sculpture greoque.» »

The Attic Theatre, p. 310,2' édit.,1898.

Page 250: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

A Ossas, les hommes de Tardetz ont acheté cette distinction

au prix de cinquante-sept francs.Quelle est la littérature des pastorales? Comment furent-

elles composées? De quelles sources proviennent-ellesordi-nairement, et quels en sont les auteurs? Nous ne pouvonsaller avec certitude au delà du milieu du XVIIIe siècle. Notremanuscrit le plus ancien ne va pas au delà de cette époque.Mais si on les compare aux mystères bretons, et surtout auChristus Patiens, la ressemblanceest évidente: Les person-nages du Christus Patiens sont Christus Theotokos, lasainte Vierge, Joseph Theologus,Congregatio Pontificum, leSanhédrin; le Chorus Virginum, le Semi-Chorus Virginum,Adolucentulus, le garçon, Magdalene, Nuntius le messager,Pilatus, Custodia la garde 1. Voici la liste des Pastoralesbasques que j'ai pu examiner, elle ne doit pas être complète.J'ajoute pour comparaison les noms de quelques mystèresbretons, tirés d'un Catalogue des manuscrits celtiques etbasques de la Bibliothèquenationale par M. H. Omont, etdes Derniers Bretons par Émile Souvestre.

1. Dans la tragédie de Sainte Tri~ne, il semble y avoir encore destraces d'un choeur de Satans Berit et Aatarot.

Les Derniers~Bretona, par Émile Souvestre. Vol. II, p. 83.

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PASTORALES BASQUES MYSTÈRES BRETONS

Tirées de la Biblet

N Abraham avec Sara et Agar. La création du monde

Josué de Moïse.. Jacob et ses frères.David. Joseph.Nabuchodonosor. N Pharaon.

N Judith et Holopherne. Moise.

N Prodiga,Samson.St Jean-Baptiste,St Pierre.St Jacques.St Étienne.

N La Naissance de Jésus.1,~ La Passion de Jésus.

La Résurrection de Jésus-Christ.

N L'Enfant prodigue.

St Jean Baptiste.St Pierre et St Paul.Du Jugement dernier.

De l'8agiographie

N St Alexis. Ste Anne.

Ste Agnès. St Antoine.

Ste Catherine. N Ste Barbe.St Claudieus et Ste Marsi- St Cognomerus ouComorre

missa. St Crépin et St Crépinien.

Destruction de Jérusalem. Destruction de Jérusalem.

Ste Engrace. St Eulogius, patron des

N Ste Eustache et Ste Eu- maçons..phémie. StGarand,St Denis,StClé-

Ste Geneviève. ment.

1. Le 17 novembre 1548, le Parlement de Paris lance un arrêt, quidéfend les représentations des mystères sacrés. G. Bapst, p. 58, p. 62.

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N Ste Hélène ou Élaine. St Guennolét.St Julien d'Antioche. St Guillaume, comte depoi.St Louis. tiers.St Martin. St Guiner.

N 8te Marguerite. N Ste Hélène.Ste Philippine.St Roch.Les Trois Martyrs, temps de

Dioclétien.

N St Laurent.St Louis.St Martin.Ste Nonne et son fils saint

Devy.Le PurgatoiredeStPatrice.Ste Trifine'.

Des Classiques

BASQUES

Œdipe.. Bacchus.Alexandre. Astiage3.

Dea Chansons de gestes, Romans de chevalerie,Contes de Folk-Lore

BAS9UES BRETONS

Antoine de Constantinople.Bajazet.Célestine de Savoie.

Charlemagne.Clovis..Charles VI.

La .Conquête de Charle-

magne.Charlemagne.Chedoni etHelenaRosalba.Les D.ouzePairs de France.

1. Pour une représentation du mystère de St Guennolé, avec gra-vures, voyez La France illustrée, 3 sept. 1898.

2. « Joué à Pluzunet, 22 et 23 avril. 1878 ». Voyez p. 228.3. Astiage, roi de Perse, fut joué à Ossas, 3 avril 1893. The

Monthly Packet, avril 1897.

Page 253: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Douze Pairs de France

N Geneviève de Brabant. N Geneviève de Brabant.Godefroi de Bouillon et la Godefroi de Bouillon et la

Délivrance de Jérusalem. Délivrance de Jérusalem.Jeanne d'Arc. N Huon de Bordeaux.Jean Callabit. N Orson et Valentin.Jean de Calais. N Pierre de Provence et la

N Jean de Paris. belle Maguelonne.Marie de Navarre. Le Prince Fadlala.Mustafa, le grand Turc.La princesseCachemire.La princesse de Cazmira.La princesse de Gamathie.

N Les Quatre Fils Aymon. N Les Quatre Fils Aymon'

N Richard sans Peur, duc de N Robert le Diable.Normandie.

Roland.Thamar Koulé-Khan.Thibaut.Warwick.

N Napoléon (1) Le Consulat.

L'homme battu par la femme.Pançart.

1. « Joué à Plouaret eu 1875. G. Bapst, p. 62. »Roland, joué à Roquiage. Sept.. 24, 1887.

Modernes

(2) L'Empire.(3) La Ste-Hélène.

Comédies Rabelaisiennes

Arlequin et Flaria.Amours d'un Vieillard.LaFilleauxcinq amoureux.Résurrection d'Arlequin.

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En lisant cette liste des pastorales basques, il~ ne faut pasconclure que les paysa~ns basques ont à présent, ou ont ja-mais eu une connaissance profonde de l'Écriture-Sainte,des

~Act~Sanctoruin, des livres classiques latins ou grecs, del'histoire, des chansons de gestes ou des romans de cheva-lerie. Toute cette érudition leur vient de seconde ou de troi-sième main. Elle leurarrive par ces petits livres de quatre oudix sous, que l'on colporte dans les foires et les marchés.Ces livres sont bien décrits dans l'Histoire des ~,iares popu-làires, ou de la Littérature de colportage, par' M. CharlesNisard (Paris, 1854). J'ai marqué avec N toutes les pasto-rales basques et tous les mystères bretons, dont les sujetssont tirés des livres analysés par M. C. Nisard. On en trou-vera beaùcoup d'autres dans la liste des livres de chevaleriede Brunet, imprimée p." 434-484,. du tome deùaiêm~ dumême ouvrage. Il est certain qu'à présent, et probablementdepuis longtemps, les pastorales basques et les' mystèresbretons ne sont que ces livres de colportage mis en vers eten dialogues, dramatisés tant bien que mal avec additiontoujours,d'un choeur de Satans, et presque toujours d'ùn roides Turcs pour les pastorales basques. J'ai eu l'aveu desauteurs, j'ai vu les exemplaires mêmes des livres dont ils sesont servis pour écrire leurs pastorales., Mais outre cela, il ya presque toujours quelque pastorale déjà écrite qui leur sertde modèle. M. Émile Picot nous dit dans sa Noticede JehanChaponneau, p. 2 « Toutes les fois qu'il s'agissait de jouerun mystère ancien, les acteurs chargeaient un poète expéri-menté d'en revoir le texte, d'y introduire la division par acteset par scènes, et d'y faire, s'il y avait lieu, les changementsnécessités par la différence des temps et de la langue. » Pré-cisémentlemême fait arrive aujourd'hui dans la Soule, quandon veut jouer unepastorale.. Les acteurs s'adressent àquelque poète connu, ou à l'instituteur, pour une copie ou

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une rédaction de la pastorale qu'ils désirent représenter. Ilse met à l'oeuvre, la refait, la raccourcit, l'allonge, la changeau gré de ses auditeurs ou de ses commanditaires, mais enconservanttoujours la tournure traditionnelle. Les noms dequelques-uns de ces auteurs ou rédacteurs nous sont par-venus J.-P. Irigarez, de Laguinge; J.-B. Busson, de Tar-detz Agie, de Tardetz; Goyheneix, d'Alcay Laxague, -deLichaus J.-P. Saffores, cordonnier de Tardetz, célébré parChahol, qui lui-même a ajouté à la tragédie d'Astiage,roi des Perses.

J'ai vu onze pastorales faites ou refaites par ce Saff ores.Quelques rédacteurs prennent leur rôle plus sérieusement.Dans ùn manuscrit de la pastorale, La Des~ruction deJérusalem par Vespasien, j'ai -trouvé écrit au premier pro-lo$ue

« La belle représentationprise sur la destruction de la ville

1. Biarrita -entre les Pyrénées et l'Océan, par Augustin Chaho,deuxième partie, p. 1:¿5. Bayonne, s. d.

14 Mars 1836~ Ap. à J.-P. Saffores.le cayer vient à perdre.le quelqu'un trouver. Il aurala bonté de rendre au sieur

J.-P Saffores, cordonnier de Tarde(zqui est un brave homme reconnuPar tout son pays. Et un hommecomme il faut pour manger

quelque tranche du jambon etdes oeufs frigit dans la poëlependant tout le temps de l'annéeà la place de Chardines (sic).

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de Jérusalem par Vespasien, Empereur Romain, l'année de

notresalut 70, contenant d'autres mystères, savoir le sujetprincipal tt le prophète Jésus, fils d'Anonas. »

Au commacement du second prologue

« L'auteur de œtte pièce a cru utile de donner au publicun exemple pour renouveler la mémoire sur la destruction etruine entière de la ville de Jérusalem, qui fut détruite parVespasien et Titus, Empereurs Romains, l'an de notre salut70, suivant quelques auteurs. Les spectateurs verront icicomment Dieu punit les hommes obstinés dans les crimes depéché. Le 17 Avril, par moy, Bissiger, professeur de tra-gerie à Esquioule. » D'autres écrivains sont Jacques Oihacrt

Larronde, d'Uhart-Mixe Jacques Oihenart, 182î; Oihenart,1770;. Arhex Salvador Baratchegaray Gratien Changard,de Saint-Palais Echebarne, de Charitte Pierre Fourcade,fils aîné, dit Holloton; Mécot, fils aîné, régent d'Ainharp etd'Ordiarp Larché de'Sauguis Bernard, de Larrau t. Ontrouve quelquefois de curieuses indications sur les manuscritsajoutées ou au commencement ou à la fin. Voici un jolispécimen de pédantisme scolaire à la fi Il du prologue deNabuchodonosor

Finis coronus topusRex, sol et justitie (sic)

Quelquefois le manuscrit lui-même marque la date d'unemanière irrécusable ainsi Saint Claudieus et Sainte-Mar-simissa fut écrit à Montory sur du papieravecdes comptes enassignats. Mais il y a un changement fait au dernier épiloguepheredikia de Prodiga quisignale Une altération profonde

survenue dans les mœurs et les temps entre les dates dedeux représentations. « Ceste pièce a été représentée par lejuenesse de Vensse, le jour le 20, auvoust 17'~0, plus cette

1. Lo Folk-Loredu Pays Basqc~e,~ par Julien Vinson; p. 20.

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.pièce a été représentée par le juenesse Darrast le jour le19 juin 1796. » En 1770, le-dernier vers de la pièce avantle asken pheredikia fut écrit ainsi.

Beusde discous horicJaunac, guitin liberti 1

Dugun te deon kantaOroc algarrequi 1

Laissons ces discoursMessieurs, divertissons-nous1

Chantons le Te DeumTous l'un avec l'autre.

En 1796, les mots te deon furent rayés, au-dessus on aécritd'abord nacioniren fabàri, célébrons la nation; mais commecette correction a paru insuffisante, on -l'a biffée et écrit

kaminola, la carmagnole et tout l'épilogue fut changé pourêtre d'accord avec ce changement des sentiments nationauxentre 1770et 1796. On -trouve ènmanuscrit plusieurs revisionsde la même pastorale. J'en ai vu deux d'Abraham, l'uneavec43 rôles, l'autre avec 30, j'ai eu connaissanceaussi de deuxautres, Sainte Hélène ou Élaine, une avait 44 rôles'et 5.460

vers, une autre 3;,500 vers seulement, il y en a au moins quatre;trois de la tragédie de Saint Louis, deux de Sainte Genevièvet,deux de Sainte Catherine, deux de Charlemagne, un parBissiger, d'Esquioule,'de 6.360 vers (22 mars 1835), l'auire

par J.-P. Saffores, 6.336vers (13avri11854).Il y ena aumoins

autant de récensions ou de rédactions différentes parmi lesmanuscrits des mystères bretons 1.

Une seule pastorale, à ce que je connais, a été impriméeenentier. C'est le ~S'aintJulien ~d'Antioche,dont cinquante exem-

1. M. Vinson dit que dans Sainte-Geneviève, il n'y a pas deSatan probablement parce que cette pièce fut toujours jouée pardes demoiselles, comme à Mauléon en 1846 et ailleurs. Le Folh-Lore du Pays Basque, page xvxxvi.

2. Dans les Pastorales, comme au théâtre grec, à cause des rôles,nombreux, « chaque acteur devait jouer plusieurs rôles successi-vement, et paraitre tantôt en homme, tantôt en femme. The AtticTheâtre, p. 305, 2' édit., 1898.

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'¡Haires numérotés ont été, imprimés à Bordeaux, chezVe Moquet, en 1891. Elle est publiée par les soins deM.Victor Stempf et de M. Julien Vinson. M. Vinson en a écritla préface il a donné aussi une traduction française dulehen et de l'asken. pheredikia. Des analyses plus ou moinsétendues de quelques pastorales se trouvent dans le Par~s

Basque de F. Michel, mais surtout dans les' ouvrages deM. Vinson le Folk-Lore du Pays Basque (Maisonneuve,Paris, 1883) ;'Mélanges de Linguistique et Anthropolopie,

-par Abel Hovelacque, Émile Picot et Julien Vinson (Leroux,,Paris, 1880) et dans la Revue de l'Histoire des Religions(Leroux, 1880).

Le, Théâtre de septembre 1899 a un article sur les pas-torales basques, par M. G. Herelle, illustré d'excellentesphotographies.

Les 'anachronismes les plus étonnants abondent dans lespastorales, les siècles les pIns' éloignés s'y coudoient, les

moeurs les plus diverses s'y trouvent unies. Des rois de Turcsspopposent à Abraham, Mlle Maneton et Mlle Catilie ha-bitent Sodome. En Saint Claudieus et -Saint Marsimissa,nous avons un empereur romain, Marcellus et Néron, lesducs de Bourbon, de Chartres et d'Orléans, Mustapha leGrand Turc, Jules pape, Baronius cardinal, Sophiste, etainsi de suite. L'introduction des Satans et des Turcs est derigueur, et rend ces anachronismes inévitables. Les noms

usuels des Satans, dont il y a deux ou trois pour chaque pas-torale sont Satan, roi d'enfer Astarot, Beelzabuth, Bul-

gifer (corruption de Lucifer) Brindamour, qui se-fait femme

.par occasion, Jupitcr,'Thira, Azkarat, Zenan, Ermithagno

1. Ces noms ne sont pas du tout aussi étranges que ceux duserment des Juifs dans le Fuero Générul de Navarre. Les malheureux.

furent oblig8s de jurer, entre beaucoup d'autres, par Algarizimor,Aruth, Athe, Nupi, Aggeura Saday, D~et, Elim, Caba, Orque,etc., etc.

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Une des pastorales les plus intéressantesest sans doute laSainte Hélène, ou Hellène ou Élaine, que la Société Ramond

a le dessin de publier. Il y en a plusieurs rédactions. La re-présentation à Garindein, près de Mauléon, 21 avril 1879,fut malheureusement interrompue par un orage. Les actricesétaient 'très gentiment habillées les filles qui jou'aient lesrôles des héros portaient des vestes bleues ou écarlates, desjupons blancs courts, avec. pantalons blancs et espardrillasblancs; l'ensemble était des plus jolis. Le texte et les tra-ductions de Sainte Hélène, qui suivent cette introductionimparfaite donneront comme exemple la meilleure idée de

ce que c'est qu'une pastorale. L'original fut calquée surl'Histoire de la belle Hélène de Constantinople, mère de

Saint Martin de Tour et de Saint Brice, son frère, in-12

mode, 70 pages, chez Pellerin, Épinal. La légende se trouveaussi racontée, p. 513-575, du Dictionnaire des Légendesdu Christianisme par M le comte de Douhet, collection

Migne, 1855.

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LISTE DES PERSONNAG~SDE.QUELQUES PASTORALES

Manuscrit en possessiQ~ deM. J. VINSON

( Les .personnages qui sont dist.ibctsdans les deux pastorales sonlsoudignés. )

Le Père Éternel.3 Anges Micbel, Rafaël, Ga-

briel.Abraham, Sara, Isaac, Agar,

Ismaël.Lot, Uxor, la femme de Lot.Tina, Mina, filles de Lot.Salamiel et Nahason, bergers

d'Abraham~Silaaet Milla, bergers de Lot.Melchisédec.E'scol, le compagnon d'Abra-

ham.Rapbaël,Arioch,

rois des TurcsThadal, rOIS des Turcs

Chodorlaomor,J

APPENDICE

ABRAHAM

43 rôles

Manuscrit de TARDETS

30 rôles

C reaecq.

Les, 3 anges.

Abraham,Sara,Isaac,Ismaël.Lot, Uxor.Él iéxer.

Corion, Gober.Pharaon.Abimélech.Bala.

Senab.Zuritte.Bersa.Semeber.

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Manuscrit en possession deM. J. VINSON

(Les personnages qui sont distinctsdans les deux pastorales sontsoulignés.1

Senaab, ¡Bara,Bersa, bons rois.Semeber,Bala,Pharaon, roi d'Égypte.Corion, courtisansdeGober, Pharaon.Astaroch,

soldats de laTelemar,sainte re-Cormeium, 1..

Zuzite,ligion.

Charog, géants.Chorre,

géants.

Cocor, ¡..Patar, habitants deMlle Maneton, Sodome.Mlle Catilie,

Sa;tans, Satan.Satans,

B U 1 gl .f er.

43 rdles

Manuscrit de TARDETS

30 rôles

Thelemar.Bara.Thadal.Arrioch.Raphaël.Chodorlaomer.Naason.Salamiel.Bathuel.Laban.Melchisédec.

SatanSatans,

B U 1 gl Of er,

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RICHARD, DUC DE NORMANDIE Clarica, 611e du roi; et sa nour-

34 rôles, 5.428 vers rice.Soldats.Gigante.

Représenté à Larrau, juin 1864 Satan.Brindamourqui se

Satans,change en demoi-

Richard Sans-Peur, duc de atans, selle pour épou-Normandie. ser Richard.

Marché, le compagnon de Bulgifer.Richard. Intermède en Basque mêléde

Charlemagne. Patois GasconAlençon. Ricolin.Roland. Petit-Jean.Olivier. Sebadina.Salomon, roi de Bretagne.Ogier, roi de Danemark.Comte de Gabas. JEAN DE CALAISTurpin, archevéque. 19 rôles, 5.280 versL'Ange.Domestiques.Ambassadeurs. Pierre Calais, père.Thierry. Jean de Calais, fils.Duc de Bourbon. Bourguignon, premier com-Amiral. pagnon.Hermite Labaye. Pilart, second compagnon.Sultan. Le roi de Portugal.Sarrasin. Lucila, fille du roi de Por-Mahoumé. tugal.Nartaburros. Duc de Medina del Campo.Danois. Julie, fille de Medina delAustraché. Campo

Astolphe, roi d'Angleterre. ,Duc de las Fouentas.

Page 263: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Beaudin, premier x"" (?)

Clarmont, second x'"` (.`t)

Clarice, la nourrice de LucilaBrena, le créancier.Bardana, son compagnon.Morouas, le voleur.Arlas, le voleur.Le roi Matamoro.Premier Satan.Second Satan.

67 Acteurs, 6.428 ners

Représenté en. août 1848

Manuscrit de MONTORY

Jacobe.Fernando.Pascalina.Diego.Issice.Eufrasi.Second.Judelica.Thessifon.Theodora.

SAINT JACQUES

en août 1849

-le 2 novembre 1860

Athanasa.Philipe..Gabriel, angeLien.V. Maria.Carles.George.Cipriano.Solido.Norto.Ostalersa.Abital.tJ ossiaz.

Samuel.Uxia.Lizias.Themorta.Herodes, roi.Robert.Tabor.TheodoriqRuban.Marocq.Soliman.Sedan.Mahoma.Sacalan.Frises

Alfonso, roi.Gracina.Marc-Antonia.Élisabeth.Segretaria.

Page 264: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Daraimia, roi.Carlos.Francisco.Johanes.Pierre.Betrina.Catrina.Alexis.Christina.Dominique.Antonio.Prevosta.Christerot.Serbieto

Isabelle, reigne (sic).Rodrigas.Feres

Athamar, roi.Caleran.Roda.Sesporat.Hemorgene.Satan.Jupiter.

19 Acleurs, 4.588 vers

Par Jn Bapte SAFFORES

L'Ange.

JOSUÉ DE moïse

(18 mars 1830)

Moïse.Josué.Ohine (?)

Aron.Leby.Achior.J udiq

Clarice.Tiburce.H oloph erne.Évariste.Darieus. ·

Lecimacur.Gaban

Demestris (sic).

Jerico.Gabaon.Domestris (sic).

Satan.

NABUCHODONOSOR

43 Personnages

Manuscrit de MONTORY

Uria.Jeremia.Baruq.L'Ange.Masias.Achap.

Page 265: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Hananias.Semijas.Sophonias~.Iruche.Achicam.Judy.Eletam.Elisama.Dalias.Natalia.Salina.Joakin.Sarrachin.Neregal.Le Roy.Semigran.Serreser, un Turc.Azarias

Misaël.Ananias.Daniel:Jeconias.Remaq, un Turc.Nabusardan.Sadoc.Faraon.Riolan.Maria.Helenus.Ribot.Abimélech.Sédécias.Jodolias.

SAINTE HELLÈNE

44 rôles, 5.460 vers

Manuscrit de MONTORY

Henri, roi d'AngleterreSofia, sa mère.Ministria.Godefroi.Léonor.Ferdinant.Antoine, roi.Hélène.Clarica.Loréant.Gilbert.Aita Santua.Benoit.Félix.Ainguria (l'ange)Léon.Larran.Amodis.Gtorioda:Coxinera.

Page 266: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Maria.Sabina.Ludivec.Bras.Liou.Archevecque.Felician.Sannet.Guillento.Glosister.Hilarion.Occupa.Brutor.Moradin.Gamams.Soudan.Milan.Roqùes..Gigante.Opulan.Solimero.Sitero..9 Jakilia (témoins).AzkaratZenan.Ermithagno.Satans (?)

Les noms soulignés ne sont

pas dans la SainteHélènejouée

à Garindein le 21 avril 1879.

Cette pastorale n'avait que3.500 vers environ.

Nous avons vu deux autres

st CLAUDIEUS & Ste MAR~ÙMISSA

33 rôles

manuscrits de Sainte Hélène,dans l'un le nom est écritÉlaine.

Manuscrit de MONTORY, écrit

sur du papier avec des

comptes en assignats.

Lebieus, ambassadeur, avecle drapeau blanc.

Honorin.Lucien.Romain, empereur.Due, de Bourbon.Duc de Chartres.Duc de Richelieu.Duc d'Orléans.Charles, roi de France.Sabein, évêque.Baronius, cardinal.Jules, pape.Et les trois Anges.Le prince Favieus, avec le

drapeau rouge.Tourdebran.Roquefort.Flentor.

Page 267: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Turgos.Balamon.Himère, fille d'honneur.Princesse Marsimissa.Marcellus, roi.Néron, roi.Claudieus, roi.Mustapha, le Grand Turc.Sophiste.Crepus.Miran.

Satails,

LES QUATRE FILS AYMON

22 rôles

Charlemagne, empereur.Turpin, archev~que.Oliberos.Oger.Nemas, duc de Bavière.Richard de Normandie.Ganelon

Roland.Ion, roi de Gascogne.Clera, sa soeur.Godart, son secrétaire.Aymon, duc de Dodosine.

Femme d'Aymon et mère des

4 fils.

Satan, roi d'enfer.Astarot.Beelzabuth.

Renaut.Alard.Guichard.Petit Richard.Maügis.Ripus, roi des Turcs

Satans,

Ce cahier appartient à Jn-peIRIGAREZ LAGUINGE, ce 15juin 18i 5.

LA TRAGÉDIE DE GODEFROI

29 rôles, 6.224 vers

Le présent cahier apartient(sic) au sieur BERNARD DE

LARRAU, ce 24 mars 1855.Représentée en 1853.

GodefroiReunon.Tancreda.Eustache.Guelfra.Solitaire.Olinda.Boudouen.Altamor

Satan.Astarot.Béelzebut.

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LES LOISIRS D'UN ÉTRANGER AU PAYS BASQUE

Rimbot.Dudon.Renaud.Agricalte.GuernandL'Ange.Alladin.Soliman.Emirein.

Arguand.Armida.Soffronie.Clorinda.Ismein.Orcus.Tessiferne.Saladin.Trois Satans

Nous avons vu aussi à Tardets les manuscrits de

La Vie de saint Roch, représentée à Tardets le 29 juin1839 (SAFFORES).

Tragédie de Saint Louis, roi de France, appartenant àJean-Baptiste SAFFORES, trois exemplaires.

Le Grand Turc (SAFFORES).

Jean de Paris, représenté en 1857.Saint Pierre (SAFFORES).

Saint Jean (SAFFORES), 1836.Les Trois Martyrs, temps de Diqclétien, représentés en

1857, 2 exemplaires.Ale~andre le Grand, représenté le 14 juin 1850 et à Alçay-

Behety, le 15 avril 1879 (SAFFORES).

Mustafa (SAFFORES).

Sainte Geneaièae, deux exemplaires, un in-folio, Pautrein-4~, joué le 7 juin 1849 par les demoiselles de Mauléon.

Tragédie d'Astiage, roi de Persa, appartenant à Jean-Baptiste SAFFORES, 14 mars 1836.

La Destruction de Jérusalem, par Vespasien, représentéele 27 avril 1827.

Sainte Ca.therine (SAFFORES), 2 exemplaires.Charlemagne,6.356 vers, Jean-BaptisteSAFFORES, 13 avril

1854, et un autre par BISSIGER, de Esquiule, 6.360 vers;22 mars 1835.

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Pançart (SAFFORES), 1835.Richard de Normandie« fait au lieu de Sauguis, en la

Soule, 4 aoust 1769, par Larchè du dit lieu. »Prodiga. « Ceste .pièce a ete representée par Le juenese

de Vensse Le jour Le 20, auvoust 1770 (sic) plus ceste piéce

a été representêe par le juenese Darrast Le jour Le 19 juin1796 » (sic).

On a ajouté les vers suivants de la même écriture que cettedernière date. Ils ont été biffés depuis, mais ils sont encorelisibles

Viba viba FrançiaViba viba naçioneaViba viba republikaEta asamblada guçia.

Viba Françiako generalacEta soldadouac oroÇientako loxa diraMunduko eresoma oro.Emigrantec eta apessecFrançieric jouan çirenianOusté çuen ginen çirelaSei hilabeten barnian.

Etçuen ouste FrançianHain soldado abilic baçelaOuste çien oro erhoricBurçaguiturençirela.

Citoyen çoure erosomalatPlaçer duçunin jouanen çiraKiristitu çirelakosUtçiren deiçugu houra.

AITA

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CondiçionerekiguerlaricGouri emanen estuçûlaEta kiristi leguia eresomanEta Erepublika eçariren duçula.

Eta hotz emaçie oraiGuitian eretiraEman nahi deiçiet ororiArdoa houn batetaric edatera.

Ces vers peuvent se traduire ainsi« Vive Vive la France! Vive!Vive la nation! Vive Vive

la Républiqueet toute l'AssembléeVivent tous les généraux et tous les soldats de la France1

tous les royaumes du monde ont peur de vous.Les émigrés et les prêtres, quand ils étaient partis de

France, pensaient qu'ils reviendraient dans l'espace de sixmois.

Ils ne pensaient pas qu'en France, il y avait tant desoldats habiles ils pensaient que les ayant tous tués, ils se-raient les maitres.

LE PÈRE

Citoyen, vous irez à votre royaume, s'il vous plait; puisque

vous êtes demeuré chrétien, vous laisserez celui-là,A la condition-que vous nenousferez pointlaguerre,et que

vous établirez dans votre royaume la loi chrétienne et laRépublique.

Et maintenant, applaudissez retirons-nous je veux vousdonner à tous à boire d'un bon vin. »

~dipa, fait à Garindein Le 26 may 1792 L'an de laLiberté. MECOT fils »..

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De la même écriture q ue la pièce même faite à Larrand (?)

en 1783.Sainte-Engrace. « An 13. Vende vieux style Oct. 1804. »

Cinq de ces pastorales savoir: La Destruction de Jéru-salem, par Bissiger, Sainte Élaine, S. Roch, Sainte Ge-neviève, Astiage, roi de Persa, ont été achetées par la villede Bayonne et se trouvent à présent (avec une copie deRichard de Normandie) dans la bibliothèque de la ville.Notre collègue M. Vinson possède, desoncôté, six pastoralesil a annoncé son intention d,'en offrir des copies à la biblio-thèque de Bayonne.

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LES ASSURANCES MUTUELLES DU BÉTAILET LE CHEPTEL

PARMI LES FERMIERS ET PAYSANSDU SUD-OUEST DE LA FRANCE ET DU NORD

DE L'ESPAGNE t

Depuis trop longtemps l'histoire s'est contentée de ne traiter

que de la politique, de la vie des empereurs et des rois, desprinces et des nobles elle ne raconte que les épisodes desgrandes guerres, des batailles meurtrières, des catastrophesfunestes ou d'autres grands événements, ainsi qu'on lesappelait. Elle laissait de côté presqueentièrement tout ce quiregardait la vie et le bonheur des peuples. Elle est mêmedevenue tellement coutumière de cette habitude erronée, quele dicton, qui n'est, à vrai dire, que le plus grand reproche,la satire la plus cruelle pour l'histoire telle qu'elle s'écritjusqu'à présent, s'est faitaccepter comme véritabledescription

de ce qu'elle devait être

« Heureux le peuple qui n'a pas d'histoire 1 »

S'il n'y avait que l'histoire qui ait ainsi négligé les faits oules institutions qui font le bonheur des peuples, on pourraitfacilemens'en passer. Malheureusement,ce n'est pas seule-

ment l'histoire, mais aussi la législation qui a trop souventnégligé ces mêmes faits. Trop souvent la législation, et je

ne parle pas ici de la législation d'un pays plutôt que d'un

1. La Société des sciences et des arts de Bayonne, 189.4; La Ré-

forme sociale, 16 août et 1, septembre 1894. Paris.

Page 274: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

autre, le même fait se montre presque également dans l'his-toire de la législation de l'Angleterre et surtout dans sesrapports avec l'Irlande, dans celle de l'Espagne, dans lalégislation de l'Allemagneaussi bien que dans celle de France,

dans tous les pays, trop souvent, au lieu de s'établir sur labase des faits qui font le bonheur des peuples, la législations'est établie sur des considérations tout à fait politiques,dynastiques, sur les privilèges d'une ou de deux classes de lanation, ou sur les théories abstraites qui n'ont aucun rapportni avec la vie, le bonheur, ni avec le besoin des peuples.C'est à cause de cela que la législatiôn est si souvent stérile,inefficace. Elle ne produit rien, elle n'a qu'une influencepurement négative, elle est impuissante en elle-même à fairele bien mais elle n'entrave pas moins le travail de ceux quipourraient le faire. La législationdoit avoir sa. base dans les

moeurs, les institutions, la vie d'un peuple. Elle doit êtrecomme le battement du pouls dans le corps humain, le signe,1-' expression*de la vie qui coule dans les veines d'un peuple.Il y a une vérité profonde dans ce vers du poète latin Quidleges sine moribus nanc~ proficiur~t'~ Les lois doiventavoir pour base. les mœur~, si elles ne veulent pas rester toutà fait inefficaces.

Au lieu de cela, si nous voulons pénétrer, un peu pro-fo~dément dans la vie des peuples, nous y trouvons avecsurprise des institutions, des coutumes, des habitudes, desinfluences qui ont agi depuis des siècles sur leur vie et surcelle de la communauté, sans avoir jamais été reconnues nimême écrites dans l'histoire ou dans la législation officielledu'pays.

J'ai eu l'occasion, dernièrement, d'écrire, pour la SociétéRamond, une petite étude sur les Fâce~·ies ou Facerias~ des

1. Honatii Opera.. Ode XXIV, lib. III, 24-30.

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Pyrénées, c'est-à-dire sur les conventions internationalespour la jouissance mutuelle des pâturages de la frontière.Je désire aujourd'hui attirer votre attention sur un autre faitpresque du même genre, mais beaucoup plus étendu et d'uneimportance encore plus grande, qui a joué un grand rôle dansl'agriculture du Sud-Ouest de la France, du Nord de l'Es-pagne, et probablement ailleurs. Je désire vous entretenirdes associations mutuelles pour l'assurance de la vie du bétailparmi les fermiers,-métayers, laboureurs et colons. Je seraiobligé, dans le cours de mes recherches, de direaussi quelquesmots sur une institution très connue dans ce pays-ci, lecheptel, dans ses rapports avec ces associations.

Je crois que ces deux institutions, le cheptel et les asso-ciations pour l'assurancemutuelle du bétail, sont intimementliées l'une avec l'autre. Là où l'on trouve l'une, on peutespérer trouver l'autre. Elles se complètent l'une l'autre.Cette règle n'est ni absolue ni universelle, mais elle peutnous aider beaucoup dans nos recherches.

Prenons d'abord'le cheptel, dont l'histoire est bien plusfacile à tracer.

Dans le grandDictionnairede Ducange, Glossarium medic~

et in~mc~ Latinitatis, sous la rubriquecatallum, nous lisons:

« Posséder par catallum, c'est-à-dire posséder à chate, vel àchaiel. Avoir la moitié. des produits ce qui se dit princi-palement des animaux dont la garde et la nourriture sontconfiées à un tiers, sous condition que, les accidents et lecapital à part, les bénéfices et les pertes soient partagés

également entre les contractants'. » L'exemple le plusancien, cité par Ducange, remonte à l'année 1382: ic Esse

1. Ad catallum tenere, nostris tenir à chate, vel à chatel. Admedietatem fructuum habere quod maxime dicitur de animalibus,qu~e alicui nutrienda et custodienda traduntur eo pacto ut, salvasorte seu capitali, questum et daranum- ex aequo contrabentes

~partiuntur.1

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ad idem catallu~rr, d'étre engagé dans la même affaire, oud'être engagé avec 'quelqu'un f. ». La citation en preuve estde l'année 1215.

Mais si nous tournons, au mot Gasalia, dans le même Dic-tionnaire, nous trouverons des exemples du bail à cheptelencore plus anciens. « Gasalia, Gasalha, Gazalha, mot-languedocien par lequel on signifie le contrat ou le pacted~avoir 'lès animaux à moitié, comme on dit parmi eux.Bailla en.. Gasailho est bailler le bétail à moitié 1. »L'exemple le plus ancien; cité par Ducange, est de l'année1247, plus d'un siècle avant que le mot catallum fût employédans ce sens.

MaisgrAce.au R. P. Fita et à d'autres autorités, nous avonstrouvé le mot dans des documents et chartes beaucoup plusanciens que ceux' cités par Ducange, et sur un espace de ter-ritoire beaucoup plus étendu que celui du Languedoc ouOccitanie. R. P. Fita cite un documentqui est la copie d'unecharte de l'église d'Iria, en Galicie, fait au VIlle siècle

« quam fecit Romanus cum suis gasalianis o Dans leschartes de l'églisede Valpuesta, province de Burgos, publiéesparm. L. Barrau Dihigo, nous avons sous la date2ldécembre,804: « cummeosgasalianes (sic ) mecumcomorantes ;)} en900

« Ecce nos gasalianes sugerimus )} au 28 juillet 939 « ad-tuos ~asalianes'. » Mention est faite de la ~a,aalhe dans lescoutumes de Sole (la Soule); de Saint-Sever, gazaille5, de

1. Esse ad idem oatallum, ejusdem negotiationis esse, vel So-cietatem cum aliquo habere.

2. Ducange, s. v.3. Monumentosantiguosde la Iglesia Compostelana, por el Sr Dr

Don A. Lopez Ferreiro y el R. P. Fidel Fita, S. J., p. 35-39 (Madrid,1883).

4. Chartes de l'Églr,'se de Y.alpuesta du IX° au XI, siècle, parL. Barreau-Dihigo, dans lal~eouehispanique. Ne, 23 et 24, p. 282, 305,319 (Picard, Paris, 1900).

5.LesCoutumesgénéralesetparticuli~resde France et des Gaules.

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Barèges, ~axaille'. Ces coutumes doivent remonterau moinsjusqu'aux XIIIe ou X1V° siécles. Lemotse trouve fréquemmentdans les Livres de Comptes des Frères Bonis, publiés parM. Édouard Forestié, sous les formes gazalha, gazalhana,guazalha, dans les années 1344 à 1353 t. Enfin dans le Ta-bleu de la Bido del Parfait Crestia en Berses, fait en 1673peI Amilia, canounge, il y a un chapitre en vers « L'injus-tissofaito al gasailhat inoucen de la mort del bestial. » Ainsipendant tout le cours du moyen âge, nous trouvons la ga-sailha, ou gazaillo, comme une institution en force depuisles frontières de Languedoc jusqu'à la Galicie et aux bords del'Océan, toute la région qu'embrassait le royaume des Visi-goths et des Suèves dans le sud de la France et le nord del'Espagne. Le savant Père F. Fita remarque l'affinité dumot gasailhe avec l'allemand gesells, gesellschafi, uncompagnon, une association4.

Nous avons dit plus haut que ces deux institutions, lecheptelet les associations pourl'assurancemutuelle du bétail,sont intimement liées l'une avec l'autre. Il y a. un lien pareilentre le cheptel et le métayage. Les deux mots sont biendifférents, mais en pratique nous trouvons les deux choses

Coutumes de Sole, tit. XX De Gasalhe. Coutumes de S.-Seoer·,tit. Ill, XIII gaaaille. Vol. II p. 687, 744. 2 vol. in-folio, Paris,1735. Voyez aussi les Commentaires M. S. de Bela sur le tit. XXdes Coutumes de la Soule, au château d'Abbadia, Hendaye (Basses-Pyrénées).

1. La Coutumede Barège, etc., par MI G. NU., p. 424 (Toulouse,1770).

2. Les Liores de Comptes des Frères Bonis, par E. Forestié, passim.Voir le Glossaire et table des matières, mots Gaaalha, Guaaalha( Auch et Paris, 1890 )

3. Le Tableu de la Bido delparPait~Crestia en Berses. Fait'en1673pel P. Amilia, canounge, p. 272, réimpression chez Poumies,Fouix, 1897.

4. Boletin de la Real Academid de la Historia. Tomo XXIV, p.172.Madrid, 1894.

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constamment conjointes.~ C'est le métàyer qui reç6it ordi-bairement'la bétail en cheptel. Dans l'histoire de la gazaille,les mots mêmes se confondent presque. Selon une Explica-tion de.la Coutume de Barège, 1760: « la gazaille est -untraité dp. société, qui se contracte entre deux personnes, dontl'une donne pour un certain tems à l'autre un certain nombrede bestiaux pour en avoir soin, les nourrir et éberger en bon'père. de 'famille, et les rendre au bailleur à la fin de la So-ciété, à la charge et condition que le croit d'iceux, ou le pro-duit en provenant, soit partagé par égale portion entre le

preneur et le bailleur. » Dans le Code civil, àrt. 1804 « Lebail à cheptel simple est un contrat par.lequèl on donne à un.autre des bestiaux à garder, nourrir et soigner; à conditionque'le preneur profitera de la ~oitiè du croit, et qu'il suppor-~tera aussi la moitié de la perte. » Le cheptel et la gazaille nesont alors que deux mots pour dénoter la même chose. Dansles exemples cités ci-dessus, les gasaliani du VIIIe siècle,les gasalianes de 804, 900, 939, sont évidemment des mé-tayers; Dans les Comptes des Frères Bonis, au XIVe siècle,le mot est le même pour le métayer et pour le cheptel,

.ce n'est que par le contexte que nous pouvons savoir duqueldes deux on veut parler. Nous avons des animaux mis encheptel chez les métayers cc bailem en gu~alha, » c( qui tende mi en guazalha 1 rossi bayart, le egua de pel liart. » Un

'cheval bai, une jument de robe gris pommelé, donnés encheptel. Mais nous avons aussi « Bernat Beeudel nostreguazalha; Marti Combas, En Guerat Combas, fraires, nostres:guazalhas., » .nos métayers. De sorte que l'association ducheptel et du métayer dans toute la région dont nous nous:occupons est si intime, quedepuis le VIlle siècle on les re-'présente souventpar le même mot.

Le mot usuel en Italie, au moyen âge, pour. le cheptel, futsocida ou soceda ou socila, des formes évidentes de socieias,

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esse in socedam. et veut dire presque la même chose que insocio dare, bailler à cheptel. Il fut strictement défendu auclergé de donner ou prêter des animaux in socedam, c'est-à-dire à cheptel. On le considéraitcommeune es péce d'usure 1.

Tournonsnotre attention maintenant sur la coutume del'assurance mutuellesur la vie du bétail. Don Joaquin Costa,écrivain espagnol, qui fait autorité sur ces matières, nousdit qu'elle n'est pas moderne, comme on pourrait être, tentéde le croire « Je la tiens comme un des restes du régimecommunal primitif dans sa transition au système de la pro-priété individuelle i. » Au courant de mes recherches sur cesassociations dans le pays basque, on m'a toujours 'affirméqu'elles étaient très anciennes parmi les Basques, qu'elles yexistaient depuis un temps immémorial. Mais tout le mondem'a aussi parlé d'une cessation, d'une suspension temporairede ces associations, à la fin du XVII 1° siècle'. La cause enfut une épizootie terrible, une maladie charbonneu~e quis'attaquait au gros bétail et frappait les animaux de mort

avec une rapidité qui tenait de celle de la foudre' ». Ceciarrivait dans les années 1772-1774. Presque tous les bœufs

et les vaches avaient succombé au fléau dans le pays basque

on n'en avait sauvé quelques-uns qu'en les isolant dans les

montagnesou les forêts. Malgré toutes les précautions prises

et la prohibition absolue de l'importation du bétail du La-bourd, la maladie s'était étendue non seulementen Guipuzcoa,mais en Navarre, Aragon, et dans la Montaiia. La gravitéexceptionnelle du mal est bien constatée. On ne peut donc

1. Ducange, sub voc. Socicla, soceda, soceafaritcs,societas L.2. Dereclao municipal consuetuclinario, por Don Joaquin Costa,

p. 87.3. Vie de M. Daguerre, par l'abbé C. Duvoisin, p. 339. Bayonne,

1861. Biblioteca del Basco~tlo, por D. A. Allende Salazar, n° 1441,

p. 384-85. Madrid, 1887. Indice chronoloc~ico de los Docurrtentos enGuipuacoa, p. 332.

17

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s'étonner si, sous un tel coup, toutes les Sociétés pour l'assu-rance du bétail dans le pays basque faisaient faillite; cen'était qu'après vingt ans qu'elles eommençaient à fonc-tionner de nouveau. M. Antoine d'Abbadie, notre présidentd'honneur, ~e dit que, quand il achetasapropriété d'Ara-~ôrri, il trouva dans les métairies des listes de tout le bétailmort ou malade, ou sauvé pendant cette pesté. La traditionde la maladie se trouve donc exacte, et alors nous pouvonsconclure que la tradition contemporaine de l'existence de cesaSl:'ociatiQns mutuelles, antérieures aux années 1772-1774,est exacte aussi.

.T'avoue que je ne peux pas vous donner des preuves aussiconcluantes de l'existence de ces associations 'dans lesépoques plusanciennes. Je ne possède ni les moyens ni la

faculté de compléter les recherches nécessaires pour établirce fait d'une manière irrécusable. D'autres plus heureux quemoi, qui peuvent consulter les documentsetles archives dumoyen âge et au delà, pourraient peut-être en' trouver destraces inéquivoques. Je feraiseulement une remarque sur les

noms populaires de ces Sociétés ou associations. A Hen-daye, on les appelle Iconfradiac; à.Sare, kofradiac dans lespays gascons, à 'l'entour du pays basque, confrérie~; dansles Landes, notre excellent collègue, M. P. Cuzacq, m'écritque §'associer à une de ces Sociétés s'appelle, en patois,se mettre à la frdr~rie. Il ajoute que « dans les Landes ilen a aussi existé de tout temps. »

Il faut noter ces noms, konfardiac, kofradiac, confrérie,frayrie. Les historiens et les écrivains sur le moyen àge ontconclu trop hâtivement que toutes les confréries dont onparle dans les archives et les documents étaient des confré-ries et des corporations exclusivement religieuses. Le mot,le nom, la désignation peuvent être empruntés à la religion,à la langue ecclésiastique il peut y avoir des actes et des

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devoirs religieuxprescrits aux associés toute la vie, alors, f ut

imprégnée de religion, mais l'institution elle-méme, son but,

sa raison d'~tre, n'est pas pour cela exclusivementreligieuse.Nous en avons la preuve dans les mots abbé, abat, en gasconet en basque, pour désigner le maire d'une commune ou pa-roisse avant la Révolution. Certainemen ces abats étaientdes personnageset fonctionnaires laïques, et non des religieux.Je suis donc bien amené à croire que sous les noms de con-fréries peuvent bien se cacher, non seulement des confréries

purement religieuses, mais aussi des associations du genrequi nous occupe. Ainsi, quand M. Forestié dit

« Dan presque toutes les petites villes et dans la plupartdes villages de notre région il existait, au moyen âge, desconfréries ou associations de charité mutuelle entre les. cul-

tivateurs. A Villenade, il y avait la confrérie de la Made-leine à Sain t- Pierre-Campredon, celle de Saint-Sébastien

à Montauban, Bonis a signalé neuf ou dix confréries. Ilsufht de voir fonctionner ces associations pour comprendre

combien était grande l'idée de la mutualitéchez nos aïeux t. »

Je me .demande s'il n'est pas possible que quelques-unes

de. ces confréries ne seraient pas semblables aux confréries

pour l'assurance mutuelle qui existent encore, et que les

paysans croient avoir existé depuis un temps immémorial

dans le pays.Mais vous me demanderez Comment se fait-il qu'ehes

aient échappé à la vigilance des chroniqueurs et des histo-

riens, qu'on n'en trouve ni les traces ni les statuts dans les

archiveS? La réponse est bien simple. La plupart de cesassociations .n'ont absolument ni statuts ni règles écrites. J'ai

vu tous les papiers de quelques secrétaires de ces co,fradiac.

Ils se composaient seulementd'un cahier de deux sous avec

1. La Vie rurale et l'Agric:cilture au XI V~ sicycle dans le Sud-Ouest

de la France, p. 32: Montauban, 1685,

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une liste des maisons qui faisaient partie de la confrérie, lenombre et la valeur des animaux assurés, et voilà tout. Il n'yavait aucun autre mot d'écrit. J'ai connu. l'existence et lerèglement d'autres par la dictée seulement. Il y en a d'autresdont j'ai trouvé les règlements et les statuts. Vous en trou-verez imprimés comme pièces justificatives. Mais le faitcaractéristique de ces associations est qu'elles se tenaient endehors des lois et de la vie officielle. Elles étaient des asso-ciations parfaitement libres et indépendantes. Rarement lessociétaires avaient recours à la loi ou aux tribunaux~ Nous

y trouvons cette caractéristique partout.Un écrivain cité par Don Joaquin Costa, dans son mé.

moire, Costumbres juridico-economicasdel Alto Aragon',décrit ainsi les associations pour l'assurance du bétail enGalice « Cette association d'assurance du bétail n'a aucunecaisse, ni dépôt, ni règlement, Iii administration, ni avoués, etpourtantlespayementsse font religieusementeUes fraudes,sont

impossibles. » De ces associationsen Aragon, J. Costa parleainsi « La société n'a pas d'administrateur,ni aucune autredépense que les indemnités qui sont l'objet de la société, et les

frai's d'un repas en commun le jour du patron titulaire de l'as-sociation (saint Antoine est le patron usuel). Elle fonctionne

de la manière laplus simple et primitive, sans aucune entrave,

sans que jamais, ou bien rarement, il y ait plainte ou questionportée devant les tribunaux, parce que tous sont intéressés à

payer ponctuellement leur quote-part en raison de leur réci-procité 2,. »

1. Reoista ~,general de legislacion jurisprudencia. Ano XXXIII,

tomo LXI V Marzo y abril 1884..2. La sociedad no tiene administrador ni hace gasto alguno fuera

de las indemnizaciones que constituyen.el objecto de la sociedad, si

se exceptua una comida el dia del patrono titular de la asociacion(que suele ser San Antonio). Funciona del modo mas sencillo y pri-mitivo, sin entorpecimiento alguno, sin que nunea o muy rara vez

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M. Cuzacq m'écrit de Tarnos (Landes), la janvier 1893

« Dans ma commune on ne passe guère d'actes notariés. On

se réunit, on transcrit les conditions sur un registre, etl'on nomme un syndic. C'est usage local, et lorsqu'il survientquelque difficulté, le juge de paix tranche le différend. »

Je donne comme pièces justificatives quelques actes etstatuts de ces associations faites devant un notaire et légalementenregistrées. mais elles sont peu nombreuses et presquetoutesde date récente. Il existe bien plus d'associations qui n'ontrien d'écrit, sauf les cahiers des secrétaires, -tout à fait libres

et indépendantes, sans avoir recours à la loi, dans les Landes,dans le bays basque, dans l'Aragon, dans les Asturies, etsurtout en Galice.

A .présent, regardons un peu plus près ce que sont ces as-sociations, sociétés, konfardiac,kofradiac, confréries, frayries,ainsi établies depuis si longtemps parmi les paysans, pourl'assurance mutuelle contre la perte ou sur la v ie du bétail.

La forme la plus simple, et qu'on peut supposer par cettemême raison la plus ancienne de ces associations, existe dansle Haut-Aragon Les payements ou indemnités ne sont pasfaits en argent, mais en travail, ou par obligation de prendrela chair de l'animal mort à un prix fixe, qu'elle ait valeur ounon.

Dans les propriétésminimesdu Haut-Aragon,les laboureursqui n'ont qu'un bœuf ou un mulet, un âne, qui, seuls, nepeuvent guère travailler la terred'eux-mêmes, s'associent avecd'autres pour avoir le travail beaucoup plus efficace de deux

ou de plusieurs bêtes ensemble. Le travail se fait surles terresde chaque sociétaire à tour de rôle. Il arrive souvent qu'un

haya que formular queja ni deducir demanda ante los tribunales,porque todos estan interesados en satisfacer puntualmente su criota,por el estimulo de la reciprocidad (Nota de Don Antonio SalgadoRodriguez). Derechoconsuetuclinariodel Alto Aragon, p. 212..

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des sociétaires est trop pauvre pour payer, ou ne possède pasassez de terres labourables pour avoir besoin de tant de jour-nées de travail que les autres alors il ne s'associe pas pouravoir droit à tout le travailque les bêtes pourraient luifournir:il prend seulement une partie du travail..La bête est divisée

comme en aciions: un voisin estcenséavoir droit à une jambe

ou à une demi-jambe, à deux, trois jambes, à la moitié ou àtout l'animal, et le nombre de jours de travail dû à chaqueassocié est calculé sur cette proportion. Celle-ci est, il mesemble, la forme la plus simpled'une associationmutuelle dubétail. C'est vrai qu'il n'y a pas assurance pour la vie, nicontre la perte du bétail; mais celle-ci parait tout de suite etcomme conséquence naturelle.

En Galice et en Aragon, les laboureurs pauvres, qui n'ontqp'une paire de boeufs s'associent souvent pour uneassurance mntuelle, mais partielle, contre les pertes. Sid'une paire de boeufs ou de vaches il en venait à mourir unpendant la saison du labourage des terres quand, à cause decela, le propriétaire de l'animal mort serait exposé de perdretout le produit de ses terres pour toute la saison, les sociétairess'obligent de labourer à tour de rôle les terres de l'individuqui aura subi la. perte, jusqu'à la récolte prochaine ou jus-qu'aux grands marchés de l'automne, où il pourrait renou-veler son attelage. On voit que, sous cette forme comme sousl'autre, l'argent ne joue aucun rôle t.

Nous arrivons maintenant à une méthode un peu pluscomplexe,~ qu'on dit relativement récente en Aragon,mais delongue date en Galice, et aussi dans quelques vallées des Py-h~nées. Les sociétaires sont associés expressémentpour sup-porter mutuellement les pertes occasionnés par les accidents,les maladies ou la; mort de leurs animaux. En général, cesassociations ne sont que pour les bêtes à cornes. Les animaux

L Cf. Piéces juQ~iR~ati.oes, ne 111, 2.

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admis dans la société doivent avoir au moins deux ans etn'être pas plus âgés que douze ans. Ils sont visités et examinés

par des syndics, par u n vétérinai reou par u n expertquelconque,

avant d'être admis dans la société. Quand un animal meurt,les sociétaires s'obligent d'en acheter la viande à un certainprix fixe, 2 ou 3 reales (50 c., 75 c.) le kilo de 2 1/2 livres.

L'argent ainsi perçu est payé au propriétaire de l'animal

mort. Il a aussi la peau et les abats. Le boucher est payé ou

par le propriétaire ou par lasociété. Le payement est fait aupropriétairedans la quinzaine~ depuis lemois de mai jusqu'à

novembre mais si l'accident arrive après novembre, le

payement n'est obligatoire qu'avant le 15 avril. Si l'animal

mort est un d'une paire de bœufs, tous les sociétaires sontobligés de fournir au propriétaire une journée de travail,outrele prix de la chair vendue'. La durée de l'association estd'une année, avec réunion générale en mai ou en septembre,

mais l'assurance reste valable pendant trois ou six mois de

plus, selon les conditions de l'association. La société se renou-velle tous les ans. En Galice, la valeur de la bête morte estestimée avec déduction du prix de la viande vendue ou par-ta.gée entre les sociétaires. Ce sont les. formes les plus simples

de ces associations.Voici maintenant le règlement et les statuts de quelques

associations actuelles. En général, l'association ou la confré-

rie est faite pour un temps limité, la durée est fixée de trois à

cinq ans, avec la faculté de se renouvelPr à la fin de cette

période. Cette durée semble bien courte pour une compagnie

d'assurances mais il faut se rappeler ce que dit le Code

français sur le cheptel « Art. 1815. S'il n'y a pas de tempsfixé par la convention sur la durée du cheptel. il est censé

fait pour trois ans. Nous parlerons plus tard des rapports

entre le cheptel et ces associations d'assurance mutuelle.

1. Cf Pièces jusiificalic~~s, ll° 1lI, i et 2.

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La durée donc de ces associations est courte leur valeurmonétaire, leurs fonds, leurs capitaux disponibles sont aussibien minimes si on les compare avec les grandes Compagniesfrançaises, anglaises, américaines d'assurances contre l'in-cendie ou sur la vie humaine mais en revanche elles sontbien plus nombreuses. Il Ÿ en a souvent quatre ou cinq dans lamême communeou paroisse. Ellesne réussissentpas toujours;il y en a beaucoup qui font faillite à cause de quelque défautde leurs statuts ou par la fraude de quelques-ulis de leurssociétaires. Mais on ne se découragepaspour cela. Les bienfaits

sont si évidents et si bien connus que, presque immédia-tement après la dissolution d'une confrérie, on en établit uneautre sur. un,=, base différente, en évitant'les fautes qui ont étéfatales à son prédécesseur. Par une longue expérience, cespaysans sont devenus si adroits à éviter la fraude, que lespremiers avocats ne peuvent pas les devanceren précautions.

Ci-après la liste. de' quelques konfardiac, kofradiac, con-fréries, frayries, dont j'ai constaté l'existence

A Sare, deux, dont l'une vient de cesser d'exister fautede membres

Une, composée de 46 maisons, valeurassurée, 34.690 fr.A Saint-Pée-sur-Nivelle, il y a trois ou quatre'kofradiacA Souraïde,une,10 métairies,valeurassurée, 30.000 fr.;A Saint-Étienne-de-Bayonne, 32 associés, valeur assurée,

25.000 fr.A Tarnos (Landes), 15 associés, valeur assurée(?);A Hendaye, trois konfardiac10 51 propriétaires, valeur assurée, 59.120 fr.2° 52 maisons, valeur assurée, 48.250 fr.30 28 maisons, valeur assurée, 23.650 fr.A Urrugne, cinq koufardiac10 150 écuries, valeur assurée, environ 120.000 fr.

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2° 89 écuries, valeur assurée, 47.000 fr.

3° 70 écuries, valeur assurée, 40.000 fr.40 45 écuries, valeur assurée, 40.000 fr.5040 écuries (pour les vaches bretonnes seulement, on n'y

reçoit-ni bœuf ni taureau), valeur assurée, 16.000 fr. 1

Mes renseignements d'Espagne ne me donnent ni le

nombre des sociétaires ni ia valeur assurée. En Galice, ondit qu'on les fait par paroisse. J'ai seulement las statuts d'uneSociété, à Benabarre (Aragon), signés par 32 membres.

Les statuts de presque toutes ces associations conservent,

en partie au moins, un-caractère religieux. Elles choisissentt

presque toutes un saint pour patron céleste. Tous les so-ciétaires vont ensemble entendre la messe le jour du saintpatron. Les saints patrons fav oris de ces confréries, parmila hiérarchie céleste, semblent être saint Blaise, San Blas

(3 février), saint Antoine (17 janvier), saint Martin (11 no-vembre). Dans quelques confréries il y a aussi une messe

pour le repos de l'âme des sociétaires défunts, et même pourleur femmes et pour leurs enfants qui ont fait leur premièrecommunion, décédés pendant la durée de la Société.

La base de l'estimation de la valeur d'un animal mortdiffére beaucoup dans les différentes confréries.

Comme nous l'avons déjà vu dans quelques associations,

le propriétaire de l'animal mort ne recevait que le prix de la

viande achetée à un prix fixé par les membres de l'asso-

ciation.

1. Mes renseignements sur ses associations m'ont été fournis

pour Sare, Saint-Pée et Souraïde, par M. J.-B. Mendiboure, adjointde Sare, par ,M. Aguirre et par les secrétaires des kofradiac pourSaint-Étienne-de-Bayonne, par le secrétaire (voyez Pièces justifi-cativesl pour Tarnos, par M. P. Cuzacq pour Hendaye et Urrugne,

par M. d'Abbadie, membre de l'Institut, et par son homme d'affaires.J'offre mes meilleurs remerciements il. tous ces Messieurs; sans leuraide bienveillante ce petit mémoire n'aurait pas pu être écrit.

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En d'autres confréries, on y ajoutait certaines journées detravail exécutées pour lui par les autres sociétaires.

En d'autres encore, la moitié seulement de la valeur dé-claree, quand ]!animal fut d'abord enregistré sur les cahiersde la confrérie, est payée à sa mort.

En d'autres, cètait les deux tiers de cette estimation quifurent versés au propriétaire.

En d'autres, il y avait une estimation fixe pour les animaux,selon leur âge, sexe, condition, etc. par exemple, en Galice,

une paire de bœufs fut estimée à 1.800, 1.600, 1.400, 1.200,et 600 reales une paire de vaches. ou génisses, à 1.800,1.200, 600, 400, 300, 200 les génisses et les bouvillonsdoivent avoir deux ans au moins.

En d'autres sociétés, la valeur payée était celle de l'animalmort, après une estimation des syndics ou experts de lasociété faite après lamort..

Enfin, en plusieurs associations, la valeur entière del'animal, comme enregistrée sur les livres de la Société lejour de sa réception, fut payée intégralement au propriétaire.

En général, on estime que le payement total de la valeurassurée ouvre trop largement la porte à la fraude. La ten-tation y est trop grande. Dansquelques confréries, on a tâchéd'obvier à la fraude par un choix rigoureux des sociétaires,les gens d'une probité connue et éprouvée étant seul admismais même cela ne réussit pas toujours.

Dans presque toutes les confréries il y a des délégués, syndics,jurats, majordomes, auxquels on ajoute quelquefois un expertqu un vétérinaire pour la visite, l'examen et l'estimation dechaque animal, avant de l'admettre sur les registres de laconfrérie. Tout, animal ayant dépassé la limite d'âge. ou qui

est malade, ou trop mal nourri, est exclu de la Société.Également, les propriétaires qui sont connus pour maltraiter

ou pour mal nourrir leurs animaux, n'y sont pas admis. Les

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conditions des écuries, etc., doivent être saines et sans dangerpour la santé des animaux. Tout sociétaire est aussi tenu àbien soigner, à bien nourrir, à ne pas maltraiter ses animaux,ni leur faire faire un travail excessif. La distance qu'on leurpermet de parcourir à partir de leur écurie est souvent cons-tatée, et certains genres de travaux sur les grandes routessont défendus, surtout pour les vaches. Quiconque enfreint

ces règles est, par le fait même, destitué et banni de la con-frérie. Il y a quelquefois une défense formelle de louer ouprêter les animaux à. un entrepreneur quelconque mais il

est permis d'aider un voisin dans ses travaux, sans gage.Dans quelquesSociétés,envuede l'hygiène, il est formellementtdéfendu de laisser coucher les bêtes dans une écurie étrangère,et surtout en allant ou retournantd'une foire ou d'un marché.

Règle générale contrairement à ce qui arrive avec lesgrandes Compagnies d'assurances sur la vie humaine oucontre l'incendie, il n'y a aucune cotisation annuelle nidroit d'entrée à payer par les sociétaires, sauf une sommeminime pour le vétérinaire ou pour la messe, ou pour le

dîner annuel. Ils s'obligent seulement à payer et verser,entre les mains des syndics ou du secrétaire, dans les huit ouquinze jours, leur part proportionnelle de lÏndemnité à

payer lorsqu'un accident arrive. Ce payement peut varierbeaucoup d'année en année une année, il n'y aura pas de

perte du tout, on nous a même cité des cas où une confrérien'a eu rien à payer penda nt les trois ou cinq ans de son exis-

tence une autre année, l'indemnité des pertes peut arriver àtrois pour cent seulement, ou monter même jusqu'à vingt

pour cent sur l'estimation totale. Chaque sociétaire est tenud'en payer sa proportion selon la valeur estimée de son bétail.Le calcul des sommes à payer est fait par les syndics ou parle secrétaire.

Quand un animal est malade, le propriétairedoit en donner

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avis sans délai aux syndics ou au vétérinaire. L'animalest visité par le vétérinaire et les syndics; s'il y a chance deguérisoncomplète, il est soigné par le vétérinaire aux dépens,quelquefois de la confrérie, quelquefois du propriétaire. Maissi les syndics et le vétérinaire décident qu'il serait mieux devendre l'animal tout de suite, le propriétaire est obligé de levendre; autrement il cesse, par le fait même, d'être socié-taire. En cas de vente, la confrérie paye au propriétaire ladifférence entre le prix de vente et la valeur estimée 'del'animal sur le registre de la société. Dans quelques confré-ries, on paye aussi les pertes arrivées aux animaux par desaccidents, tels que la perte d'une corne, d'un oeil, d'un pis devache, et surtout d'un avortement de vache, selon un tarifréglé d'avance par la Société. Il est presque toujours stipulési la peau d'un animal mort doit appartenir au propriétaire

ou à la ,confrérie.En général les syndics, députés ou experts, sont changés ou

élus tous les ans. Dans quelques confréries, ces charges sonttremplies par les sociétaires à tour de rôle. Ordinairement, levétérinaire est payé par la confrérie, qui reçoit à cet effet unecontribution spéciale de tous les sociétaires,en proportion dela valeur de leur bétail assuré. Cette contribution est fixée,dans une confrérie, à Sare, àO fr. 40 c. pour 0/0. Dansquelques confréries, on donne au vétérinaire 2 fr. 50 parmaison. Ailleurs, on lui donne 2 fr. par visite, et l'on aug-mente alors, selon la longueur du chemin qu'il a parcouru.On m'assure que l'emploide vétérinaire à une confrérie, dans

ces conditions, est recherché.Dans presque toutes les confréries .ou associations, on ne

peut donner sa démission ni se retirer de la confrérie sansavertissement préalable.ou à une date fixée généralement àtrois mois ou à la fin de l'année. Sans cet avertissement, le.démissionnaire est responsable;pour sa quote-part, des pertes

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pendant trois ou six mois, selon les statuts de la confrérie.Les détails peuvent varier considérablement,mais ceux-ci

sont, je crois, les principaux statuts, stipulations, règlements

communs à toutes ces confréries et associations. Ils peuventêtre mieux étudiés dans les pièces justificatives données à lafin de ce mémoire. Il y a toujours quelque différence dansles menus' détails pour prévenir la fraude, mais les grandsprincipes sont les mêmes dans toutes ces associations.

Ces principes sont la mutualité, la coopération, l'intérêt de

tous les sociétaires d'observer et de garder avec fidélité les

règles de ces associations et de remplir leurs obligations

comme sociétaires. L'objet de ces associations est bien cons-taté dansles statuts (escr.itm·as)de quelques-unes des sociétés

en Galice. « Les laboureurs et propriétaires se constituentdans une société commune, coopérative, d'assurances mu-tuelles de bétail à cornes. L'objet est d'assurer, par ce moyend'association, le bétail à cornes que chacun tient ou puisse

tenir, et ceux d'autres voisins qui désirent faire la même

chose en se joignantà la même Société. Le seul objet de cetteSociété est le secours mutuel dans les malheurs qui arrivent

aux animaux assurés, qu'ils soient le résultat d'une maladie

naturelle ou d'un accident imprévu ou fortuit' »

Ces associations atteignent ce but sans dépenses, sans capi-

taux investis, sans frais d'administration, sans recours à la

loi ni aux tribunaux, quelquefois, comme nous l'avons vu,

sans écriture quelconque. Ce fait est digne .d'une attention

sérieuse.On est tenté d'abord, en regardant toutes ces petites sociétés,

avec leur peu de durée,, leurs changements perpétuels, leur

1. Costa, Etecista general de Legislacion y Ju~isprccdeneia,op. cit.,

pp. 274-76.2. Cette règle n'est pas absolue. Quelquefois les confréries sont

constituées pour un temps indéfini. Comme m'écrit un de mes cor-

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manque de consistance, de croire qu'il serait beaucoup plusavantageux de les réunir dans une ou deux grandes associa-tions, avec des capitaux investis, de leur donner ainsi unestabilité,une perpétuité, une sécurité qui leur manque si évi-demment à présent. Si une grande Société anonyme,avec res-ponsabilité limitée, se constituait,~ou si l'État pouvait établir

une seule association perpétuelle, ce serait un grand bienfait

pour les paysans et les petits propriétaires. Ces petites con-fréries échouent toujours'au moment où l'on a toujours le plusbesoin de leur secours., comme dans la grande maladie dubétail en- 1772-74; et ce sera toujours ainsi dans les mêmesconditions

Mais, en regardant de-plus près et au point de vue de lapratique, nous serons bien obligés d'avouer que les paysansont raison. Ils s'associent pour se garantir contre les pertes

qu'on peut dire normales, pas contre les pertessanormales; contre les accidents et les' maladies ordinaires,

pas contre les maladies extraordinaires. On leur reprochele peu de consistance, le peu de durée de ces asso-ciations mais c'est ce fait même, ce paradoxe, si vous levoulez, qui les a fait durer si longtemps et se perpétuer pen-dant des siècles. Ces changements, cette revision continuelle

n'ont pas donné le temps de produire des abus et des fraudescroissantes. Sitôtqu'un abus s'est déclaré, une fraude cons-tatée, on dissout la Société et on en fonde une autre en se pré-venant contre l'abus ou la fraude découverts. Le paysan, lepetit propriétaire, le métayer, le fermier, manque presquetoujours de capitaux,et ce qui lui fait presque toujours défaut,c'est de l'argent com ptant. Ces confréries, ces petites associa-tions lui donnentde l'assurancecontre les pertes sans réclamerson argent. Il n'a pas pour ainsi dire, de cotisation annuelle

respondants d'Hendaye « Elles continuent d'elles-mêmes, toujours,les mêmes confréries. »

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ni droit d'entrée à payer'. Il n'y a pas defrais d'administra-tion quelconques dans ces petites associations. Le sociétaireconnaît tous ses co-sociétaires, il a voix dans leur élection. Ilpeut exclure les gens reconnus pour malhonnêtes ou qui neprennent pas soin de leurs animaux. Si un confrère traitemal son bétail, on le chasse. Il est impossible de donner desgaranties tellement efficaces dans des associations plusgrandes. Si aù lieu d'une cinquantaine ou d'une centained'as-sociés, il y en avait des milliers; si au lieu d'une valeur es-timée de 30.000 à 150.000 fr., on avait affaire à des millions,nécessairement il y aurait alors des frais d'administration, unlocal spécial, des bureaux, etc. et tout cela demanderait unecotisation annuelle des sociétaires, pour faire face aux dé-

penses survenues. Il serait nécessaire aussi d'investir cesgrands capitaux d'une façon quelcqnque; et alors, risque deperte, de banqueroute, de tous les dangers qui hantent lesgrandes Sociétés financières et dont la faillite est un désastreimmense.

On peut répondre que ces confréries font souvent faillite.Il n'y a pas de garantie contre cela elles font de mauvaisesaffaires, des fautes, tout à faitcomrue les grandes associations,

et bien plus souvent soit. Mais cette banqueroute n'est pasun désastre. Il D'y a pas un krach financier, qui fait desvictimes innombrables, comme cela arriv e lorsqu'une desgrandes Sociétés f9,ncières fait défaut. Ici, les sociétaires neperdent que ce qu'ps avaient payé de trop, pour des pertes

exagérées, pendant deux, ou trois ans, et toujours quelqu'undes.sociétaires en a profité. Il n'y a pas de directeurs de l'ad-ministration, de financiers, qui peuvent être tentés de faireleur profit personnel de l'argent d'autrui. Les risques y sont

1. Dans quelques confréries un sociétaire nouveau paye 0 fr. 75 c.par bêle, en d'autres, 1 fr. 50 c. par bête assurée,comme droit d'entrée.

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minimes, et sauf dans les temps d'épidémiesexceptionnelles,l'assurance contre la perte reste valide.

II y a un autre bienfait que ces confréries fournissent au

paysan, au' petit propriétaire, au fermier. Elles rendentpossible le prêt ou le bail au cheptel avec sécurité contre lapèrte. Ce bienfait est considérable. Le petit propriétaire, lepetit fermier a presque toujours besoin d'emprunter. Ilpossède rarement assez de capitaux pour exploiter ses terresau maximum du profit. S'il empruntede l'argent, il est perdu.Tout le monde, à la campagne, est d'accord en cela. Si unpetit. propriétaire hypothèque ses terres, s'il emprunte del'argent avec les intérêts à payer, sa ruine n'est qu'unequestion detemps. S'il nelui arrive quelque accident heureux,

un legs, une dot, quelque chose qui lui permette de payer sadette indépendamment des produits et des profits de la ferme,il est ruiné. Je crois que, règle générale, le fait est exact. Maisles personnes mêmes qui m'ontaffirmé cela, me disent aussi:S'il emprunte du bétail en cheptel: alors il peut se tirerd'affaire. La différence est celle-ci si le paysan empruntede l'argent, il le dépense tout de suite s'il lui donn~ du ren-dement ou non, il a toujours les intérêts à. payer, et en argentcomptant, en bellespièces sonnantes. Cela ést toujoursdifficile

pour un paysan. Et l'argent, une fois dépensé, disparaît en.,4

tièrement. Il semble presque injuste à un paysan illettréd'être obligé de payer à perpétuité l'intérêt de capitaux quiont disparu depuis longtemps et qui ne lui rendent, à présent,aucun service. Mais s'il emprunte des animaux en cheptel,

sa situation n'est pas la même. D'abord, il n'y a pas d'argentà payer pour les intérêts seulement, les produits, le croit, lalaine, le lait des animaux mis en cheptel. Ceci est tout à faità son avantage. En outre, il y a presque toujours dans le bailà cheptel un article constatant que tout le fumier provenant

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du bétail sera employé sur la ferme t, de sorte que le fermierretire toujours quelque profit de son emprunt. Un autreavantage, non moins grand, est qu'il a toujours sa dettedevant ses yeux; il ne peùtpas l'oublier, il voitcontinuellementle bétail qu'il a reçu en cheptel. Quant à l'argent, il atoujours tentation d'emprunter plus qu'il ne lui faut; la ten-tation est beaucoup moindre de prendre en cheptel plusd'animaux qu'il ne puisse nourrir avee profit. On dit que, enpratique, le paysan paye souvent un intérêt plus grand pourle bétail que ce qu'il payerait pour l'argent. Je me rappelle uncas ou le prêteur, bailleur en cheptel, m'a dit qu'il a gagné9 pour 0/0 sur son bétail, sans compter l'assurance. Il estévident qu'on exploite souvent les paysans, même en leurprêtant à cheptel. Ainsi, au moyen âge, il fut expressémentdéfendu au clergé de prêter à cheptel'. Mais avec tous cesinconvénients, ce mode d'emprunt est moins préjudiciable

aux fermiers qu'un emprunt d'argent.Les avantages des confréries pour l'assurance mutuelle de

la vie du bétail sont indubitables sous ce point de vue. Plusla sécurité pour le créditeur est solide, moins doit être le tauxde l'intérêt que le débiteur doit payer pour ce qu'il emprunte.Les confréries, si elles étaient pl us générales etmieuxétablies,offriraient celte sécurité, une sécurité presque complète,lorsqu'elles fonctionneraient bien et qu'elles accompliraientleur raison d'être. C'est pourquoi je suis amené à croire à lacoexistence, à la presque contemporanéitéde ces associations

et du cheptel. Sous la rubrique caiallu~n, cheptel, noustrouvons dans Ducange la phrase « Esse ad idem catallum,

1. Code Napoléon, n° 1824, liv. III, tit. VIII, chap. iv, section iv.2. Voyez Ducauge, s. v. Socida. « Statuta Synodalia Alberici

Episcôpi Placentini ann. 1298, apud Petrum Mariam Campum: NullusClericus vel EcclesiasLica persona exerceat' usuras, vel natas (fortenantas) faciat, aut Socidas ad caput $alvum, » et ce qui suit.

18

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ejusdem negotiationisesse,velsocietatemcumaliquohabere; o

sous socida, socceda, autres mots pour désigner le cheptel,

nous trouvons « Soccedarius, qui in soccidam accipit, it.soccio; » sous le mot socieias, dans la même signification

que socida, in socio dare, donner à moitié. Dans tous cesmots, les rapports entre le cheptel et une Société mutuellesont très rapprochés. Il y a au moins une preuve négativedans le fait que, dans les pays comme la Grande- Br"etagne,où il n'y a pas de cheptel, il n'y-a pas non plus d'associations

pour l'assurance de la vie du bétail. Où manque l'un, l'autre

manque aussi.Il me faut avouer, cependant, qu'il y a des lacunes et des

exceptions que je ne puis pas expliquer. Quoique les con-fréries, comme nous l'avons vu, soient nombreuses, depuislongtemps, dans la plus grande partie du pays basque, ellesn'existent pas, et elles n'ont jamais existé, autant que je lesache, dans la Soule, quoique nous ayons mention de lagazaille, c'est-à-dire le cheptel, de très bonne heure, dans laSoule. Je ne puis pas m'expliquer ce fait.

Sous un autre aspect, l'existence de ces konfardiac, co-fradiac, confréries, frayries, pour l'assurance mutuelle dubétail et leur longue durée, est bien intéressante. Aujourd'hui,la tendance de la vie moderne est de demander tout à l'État.Il y a un manque de foi et d'énergie dans l'initiative indivi-duelle et dans les associations libres et indépendantes des in-dividus. Il y a recours constant à ce qu'on appelle « le so-cialisme de l'État» pour régler tout, les heures de travail, le

taux des salaires, les conditions hygiéniques, etc., etc., et lademande vient de l'ouvrier, des artisans des. grandes villes,de ce qu'on croit être la section la plus intelligente de laclasse travailleuse. Dans les confréries d'assurances mutuelles,dans les faceries, dans toute l'écomomie rurale, dans lesrèglements desuccession, dans leuradmi nistrationmunicipale,

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nous trouvons les paysans du Sud-Ouest de la France et duNord de l'Espagne surtout les Basques réglant ceschoses par eux-mêmes, sous une autonomie parfaite, non-seulement sans avoir recours à la loi et aux codes légaux,mais souvent sans écriture quelconque et sans frais d'admi-nistration. Cette méthode de ~elJ=r~onernrnent, de faire soi-même ses propres affaires, me semble digne de plus d'at-tention, de la part des historiens et des économistes, q u'ellen'a reçu jusqu-'ici.

Depuis que j'ai écrit les pages ci-dessus, j'ai appris que leprincipe de l'assurance mutuelle pour la vie humaine estpratiqué sur une vaste échelle parmi les ouvriers, paysans,fermiers, laboureurs dans le Canada, et dans les États-Unis

de l'Amérique du Nord. J'ai devant moi une petit brochureintitulée Constitution aitd B~-lacas of the Grand Lodgeof the Ancient Order of United Worlcmen of the Provinceof Ontario. Amended 1889. Incorporated August 11, 1879(la Constitution et les règlements de la grande Loge del'ancien Ordre des ouvriers unis dans la province d'Ontario,corrigé 1889, incorporé, 11 août 1879). On y voit des tracesencore subsistantes du caractère 'religieuxde ces associations.

Les membres doivenc être âgé de vingt et un ans et pasau delà de cinquante. Ils doivent aussi « croire qu'il y a lecréateuret le conservateurde l'Univers. » Quand ùne maladie

ou unaccident arrive, il est fait une levée sur les membres dela loge, pourvu que la maladie ne soit pas le résultat ni del'ivrognerie, ni du vice, ni d'immoralité quelconque,. Pourle cas de la mort, chaque membre est obligé à son entrée de

nommer la personne, aux personnes auxquelles l'assurancedoit être payée, il faut que ces personnes soient toujoursmembres de sa famille, ou des parents consanguins, ou desindividus dépendants, ou le défunt ou sa fiancée. De cettemanière. on ne peut faire aucun trafic de l'assurance à payer.

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Pièces' Justificatives

ASSURANCE DU BÉTAIL A SAINT-ÉTIENNE, BAYONNE

Par-devant Me Antoine-Robert-PierreDHIRIART, notaire à

Bayonne, assisté des témoins ci-après nommés

Ont comparu

10 Jean-Baptiste TAUZIAT,

20 Pierre LADEVÈZE;

30 Jean-Baptiste LAFFITE,

40 Jean DUPLEICH,

5° Félix DOMINGO, propre,6° Pierre DUBROCA,

7° Jean FRONQUA,

8° Autre Pierre DUBROCA,

90 JeanTouYA,10° Pierre PASCAL,

11° Jean LAFITTE,

12° Jean D'EzÈs,

Tous cultivateurs, demeurant et domiciliés à Bayonne,

section de Saint-Étienne.

Lesquels ont établi ainsi qu'il suit les statuts de la So-

ciété d'assurance mutuel le qu'ils ont forméeaux fins ci-après,

entre eux et tous ceux qui adhéreront aux présentes.

ARTICLE 1er. La Société a pour objet la garantiemutuelle,

entre les associés, des pertes que leur occasionneraient les

N~ 1

130 Jean-Baptiste GRAClET,

14° François GRACIET,

150 Bernard CAZAURAN,

16° Jean BOUSSEBAYLE.

17° Jean LISSALDg,

18° Pierre LABADIE,

19° Pierre L.~AFIT1'E,

200 Pierre LACONNE,

21 Pierre LALANNE,

22° Jean LAXAGUE,

23° Bernard BoURRAS,

24° Pierre MOULIAN~

STATUTS

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maladies, la mort ou les accidents qui pourraient atteindre lesanimaux dont ils se servent pour exploitation de leurs pro-priétés, métairies ou fermes respectives.

ART. 2. Cette Société porte la dénomination de SociétéPorl-La~ron.

ART. 3. La Société est administrée par un bureau com-posé de un syndic, un trésorier, un secrétaire et deuxexperts. Les membres du bureau sont élus par l'assembléegénérale-des sociétaires, le premier dimanche de novembre.Ils conservent et remplissent leurs fonctions pendantun an. Ilssont indéfiniment rééligibles.

ART. 4. Le premier dimanche de novembre de chaqueannée, il sera célébré, à l'intention de la Société, une messe àlaquelle tous les sociétaires seront tenus d'assister, sous peined'une amende de deux francs.

ART. 5. Le premierdimanche de chaque mois, de trois à.

quatre heures de l'après-midi, il sera procédéà l'appel dessociétaires. Chacun d'eux sera tenu, lors de ces réunionsmensuelles, de verser une cotisation qui s'élèvera à cinquantecentimes par cent francs du montant de l'estimation de sonbétail. Tout sociétaire qui ne répondrait pas à l'appel ou neferait pas parvenir le montant de sa cotisation au lieu indiqué

pour la réunion, sera passible d'une amende d'un franc.ART. 6. Tous les trois mois, le premier dimanche de

février, le premier lundi de mai, le premier iundi d'août etle premier dimanche de novembre, auront lieu les réunionstrimestrielles.

Aux mêmes époques, il sera fait une estimation du bétail

appartenant à chacun des sociétaires, par le soin du syndic etdes experts, qui se transporteront au domicile de chaquemembre de la Société et feront l'estimation dudit bétail, tête

par tête, maison par maison.ART. 7. Le bétail assuré sera inscrit sur un registre

Page 300: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

spécial et désigné par un numéro d'ordre. Le numéro serareproduit sur les cornes de chaq ue animal.

ART. 8. Tout sociétaire pourra acheter ou vendre dubétail. Mais le' nombre de têtes en sa possessiondevra toujoursrester égal au moins à celui pour lequel il figurera sur le

registre spécial dont il est parlé à l'article précédent. Ce

nombre sera susceptible d'être augmenté, mais il ne devrajamais subir de diminution.

ART. 9. A ucun membre ne pourra se retirer de la Sociétéqu'aux époques trimestrielles fixées en l'article sixième. S'il

se retirait dans l'intervalle; il demeurerait soumis, jusqu'àl'expiration du trimestre, à toutes les charges et obligationsde la Société. Le membre sortant ne pourra rien réclamer àla Société, à raison des versements qu'il aurait effectués

pendant qu'il en faisait partie, ni pour quelque autre causeque ce soit toutes sommes versées demeureront irrévoca-

blement acquises à la Société.ART. 10. Les admissionsdans la Société auront lieu aux

trimestres ci-dessus indiqués; chaque membre entrant seratenu de verser un franc cinquante centimes.

ART. 11. Tout sociPtaire qui perdra une ou plusieurstêtes de bétail, par suite de maladie ou d'accidents survenns

aux animaux, sera indemnisé de sa perte par la Société,d'après l'estimation faite par le syndic et les experts. En susdu montant de cette estimation, il lui sera alloué cinq francs.

Si pour le règlement d'un sinistre l'argent en caisse nesuffisait pas, la somme nécessaire sera parfaite par les so-ciétaires, chacun au prorata de la valeur estimative de sonbétail, telle qu'elle sera portée. sur le registre spécifié àl'article 7. Dans ce cas, le syndic sera tenu de prévenir lesmembres de la Société trois jours au moins à l'avance, afinde leur permettre de se procurer les fonds.

ART. 12. En cas de maladie d'un ou plusieurs animaux

Page 301: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

assurés, le sociétaire, maître de ces animaux, sera tenu d'enaviser immédiatement les membres du bureau, lesquels dé-signeront un vétérinaire de leur choix pour visiter et soignerle bétail atteint de la maladie.

ART. 13. Tous les médicaments ordonnés par le vété-rinaire seront payés par la Société. Les frais de visite duvétérinaire seront également à la charge de la Société.

ART. 14. Chaque fois qu'une vache aura vélé, le pro-priétaire devra en faire la déclaration au secrétaire les veauxne seront pas de quarante jours séparés de la vache.

ART. 15. Il sera alloué à titre d'indemnité pour unecorne perdue, trente francs pour une mamelle perdue, trentefrailes; pour un oeil perdu, vingt-cinq francs pour un avor-temt3nt, trente francs pour un fruit venu avant terme et néviable, quinze francs.

ART. 16. Il est expressément interdit aux sociétaires de

faire aucun charroi sur les routes communales et chemins

pour le transport de matériaux quelconques, soit pour unentrepreneur, soit pour un particulier mais ils pourraient

en faire pour un ami ou un voisin et pour eux-mêmes. Il estégalement interdit à tout sociétaire de prêter son bétail à quique ce soit, sinon qu'en présence d'un membre de la Société.Tout accident survenu dans les cas prohibitifs du présentarticle ne donnerai droit à aucune indemnité, et la Société,dans ces conditions, serait déchargée de toute.responsabilitévis-à-vis le sociétaire perdant.

ART. 17. Tout sociétaire qui ne donnerait pas àson bétailles soins nécessaires, qui ne lui fournirait pas une nourrituresuffisante ou lui ferait subir de mauvais traitements, seraexclu de la Société, de laquelle il ne pourra plus faire partie.

ART. 18. La présente Société est contractée pour un lapsde temps qui courra depuis ce jour jusqu'au premier di-manche du mois de novembre de l'an mil huit cent quatre-

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vingt-treize. A l'expiration de ce terme, elle sera dissoute deplein droit, à moins qu'il n'intervienneune prorogation. Maisni la mort ni la retraite d'un ou plusieurs de ses membresn'entrainel'3. sa dissolution. La Société pourra cependant êtredissoute avant le terme fixé pour sa durée, sur la demandedes deux tiersau moins de ses membres. Lors de la dissolution,

pour quelquecause que ce soit, la liquidation sera faite immé-diatement par le bureau alors en fonctions, et la répartitionde l'actif et du passif aura lieu entre les sociétaires confor-mément à leurs droits respectifs, tels qu'ils résulteront dela valeur estimative du bétail de chacun d'eux.

ART. 19. Nul ne sera admis dans la Société s'il n'habitele quartier de Saint-Étienne. Tout membre qui viendrait àquitter ce quartier cessera, par ce seul fait, de faire partie dela SQciété. Ului sera, dans ce cas, alloué une indemnité pro-portionnelle à la valeur estimative de son bétail, et eu égardau montant des fonds en caisse.

ART. 20. Les comparants s'obligent, chacun en ce quile concerne, à l'exécution de toutes les clauses et conditionsdes présentes. Toute personne qui entrera dans la Société

sera par ce seul fait, soumise àl'exécution des mêmes clauseset conditions.

Dont acte,

Fait et passé à Bayonne, section rurale de Saint-Étienne,maison dite Lacar~, l'an mil huit cent quatre-vingt-quatreetle dimanche premier juin, en présence des sieurs JosephBordenave, clerc d'avoué, et Armand Brueil, marchandtailleur, les deux domiciliés à Bayonne, témoins instrumen-taires à ce appelés, qui ont signé avec les comparants et le

notaire, à l'exeeption toutefois des sieurs Tauziat, Dubroca,

autre Dubroca, Fronqua, Pascal, Dezès, Cazauran, Lissalde,Labadie, Lalanne, Bourras et Moulian, lesquels ont indivi-

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duellement déclaré ne le savoir sur l'interpellation du ditnotaire le tout après lecture faite.

(Suioent les signatures).

Enregistré à Bayonne, le 7 juin 1884, fO 178, case 5. Reçu5 fr., décimes 1 fr. 25.

Signé Ch. DANTY.

La Société avait 32 membres valeur du bétail assuré,25.000 fr., le 29 septembre 1892.

N° 2

ACTE DU 13 MAI 1868

(Me FORESTIER, notaire à Saint-Martin-de-Seignanx)Société d'assurance mutuelle contre la perte du bétail entre

les colons habitant la commune de Tarnos. Syndic:Pierre LAVIE, ~érant de M. DHIRIART; experts Dutrez,à Hillique, et GRACIET, aux Tillots.

NAPOLÉON, par la grâce de Dieu et la volonté nationale,

empereur des Français, à tous présents et à venir, salutFaisons savoir que, par-devant t Pierre-Victor FORESTIER,

notaire à la résidence de Saint-Martin-de-Seignanx, cantondu même nom (Landes), ont comparu les sieurs

10 Jean DELAS, colon à l:ousse,2° Jean DUTREY, colon à Hillique,30 Bernard DICHARRY, colon à Trouquet,4° Martin CAMY, colon à'Garros,50 Pierre LANNEPOUDENS, colon à Lair~ne,60 Bernard GRACIET, colon à Saint-Antoine,

Métayers de M. DHIRIART, notaire70 Pierre CASAUX, colon aux Claous,go Jean LAYUS, colon à Beaudonicq,go Pierre LARRICQ, colon à Pt-Beaudonne,

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100 Paul SENHAUX, fermier à I3icari,110 Pierre CALMOUSSE, fermier à Guillemouton,12° Jean MONTAULIEU, colon à Louslaunau,130 Jean GRACIET, colon aux Tillots,140 Bernard BONTEMPS, colon à la Tuilerie,

Métayers et fermiers de M. CUZACQ

150 Jean BONTEMPS, à Lisbals, fermier de M. MEL-

SON, tous domiciliés à Tarnos (Landes)

Lesquels, voulant se garantir mutuellement des pertes queleur occasionneraient les maladies, la mort ou bien les acci-

dents qui pourraient a,tteindre les animaux dont ils se servent

pour l'exploitation de leurs métairies respectives, ont. à ceteffet, formé une Société sur les bases et les conditionssuivantes

ARTICLE 1er. Lorsqu'un des contractants perdra une ouplusieurs têtes de bétail, la perte sera supportée par tous les

contractants, proportionnellement au nombre d'animauxqu'ils auront fait entrer dans la Société.

'ART.2. Lorsqu'une tête de bétail sera atteinte de,'ma-ladie ou frappée d'accidents autres que celui ci-après spécifié,

le propriétaire sera tenu d'en faire immédiatement la décla-ration aux experts qui, en ce moment, estimeront l'animal,

sans toutefois tenir compte de la dépréciation occasionnée

par la maladie ou par l'accident. Il ne devra pas fairetravailler l'animal. S'il y a espoir de guérison, d'aprèsl'avis du vétérinaire, on pourra espérer pendant quinzejours.

Si l'animal n'est pas susceptible de guérison, il sera aban-donné à la Socié1é, qui en retirera le parti le plus avantageux.La perte sera répartie entre tous les contractants dans laproportion ci-dessus établie.

ART. 3. Si une tête debétail vient à être écornée de façon

Page 305: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

à ne pouvoir plus travailler, la Société devra au propriétaireune sommede trente francs.

ART. 4. Les remèdes nécessaires et employés pour laguérison de l'animal malade seront payés par la Sociétédansla proportion ci-dessus établie. Les frais de visite du vétéri-naire seront à la charge personnelle des parties.

ART. 5. Chacun des contractants devra préalablementfaire visiter et agréer par les experts, assistés de telle per-sonn'e que désignera le syndic, les animaux qu'il voudra faire

entrer dans la Société, et chaque fois qu'un des contractantséchangera une tête de bétail admise ou en acquerra une nou-velle, il devra la faire visiter et agréer par les experts le jourmême de l'échange ou de l'acquisition, ou le lendemain auplus tard. S'il n'était pas satisfait à cette condition, ou biensi 11aniufal n'était pas agréé, il est bien entendu que la pertequi pourrait survenir serait à la charge du sociétaire.

ART.6. Chacun des contractants sera libre de restreindre

ou d'augmenter le nombre de têtes de bétail qu'il aura fait en-trer dans la Société, sous condition de la proportion descharges ci-aprés établies.

ART.7 -Dès qu'il sera reconnu qu'une vache aura avorté,le fruit n'aurait-il que trois mois, la Société devra au pro-priétaire une indemnité de vingt-cinq francs il faudra quel'avorton paraisse. Chaque fois qu'une vache aura vêlé, lepropriétaire devra en faire la déclaration au syndic, quitiendra un registre ouvert à cet effet, et la Société sera res-ponsable des fruits pendant un mois à partir du jour de leurnaissance.

ART. 8. Lorsqu'une tête de bétail aura péri, le cuirsera vendu pour le compte de la Société. L'animal seraécorché par les experts, auxquels il sera alloué pour cetteopération une somme d'un franc cinquante centimes.

Art. 9. Les sociétaires devront payer en mainsdu syndic

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leur quote-part dans le courant de quinze jours après lamort de l'animal ou de l'accident donnant lieu à indem-nité.

ART. 10. Une visite générale du bétail aura lieu tousles trois mois, dans l'endroit désigné par le syndio. Celui quin'amènera pas son bétail le jour et l'heure convenus, sera misà l'amende d'un franc.

ART. 11. La Société étant constituée, celui des contrac-tants qui ne voudra plus en faire partie sera tenu de payer,dans la caisse de la Société, à titre d'indemnité, une sommede cinq francs.

ART. 12. Les contractants ci-dessus dénommés et qua-lifiés, qui entreront dans une autre colonie que celle qu'ilsexploitent aujourd'hui, ou bien qui changeraient de com-mune, pourront, s'ils le désirent, faire partie de la Société,

et dans ces deux cas ils ne payeront pas de frais desortie.

ART. 13. Un syndic et deux experts seront élus chaqueannée par les sociétaires, à la majorité des voix. Réunis enassemblée générale, ils ont nommé, pour cette année syndicle sieur Pierre Lavie, homme d'affaires de M. Dhiriart;experts, les sieurs Dutrey, côlon à Hillique, et Graciet, colon

aux Tillots, lesquels ont déclaré accepter les fonctions à.euxconfiées.

ART. 14. La présente Société aura une durée de sixannées à compter de ce jour, et à l'expiration de ce terme, elle

sera dissoute de plein droit. Mais dans aucun cas cette So-

ciété ne pourra être dissoute ni par la mort, ni par la retraited'un de ses membres.

ART.15. La Société étant constituée et après la clôturedes présentes, toute personne qui voudra en faire partie, soussoumission aux clauses et conditions ci-dessus, payera,à titrede droit d'entrée, une somme de cinq francs, laquelle sera

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versée dans la caisse de la Société, pour servir à ce que debesoin.

16. Déclarent vouloir faire entrer dans la Société

1° Jean DELAS, une paire de bœufs.20 Jean DUTREY, une paire de boeufs.3° Bernard DICIIARRY, une paire de boeufs.4° Martin CAMY, une paire de bœufs.5° Pierre LANNEPOUDENS, une paire de bœufs.6° Bernard GRACIET, trois têtes de bétail.70 Pierre CAZAUX, une paire de bœufs.8~ Jean LAYUS, une paire de bœufs.9° Pierre LARICQ, trois têtes de bétail.

100 Paul SENHAUX, une paire de boeufs.11~ Pierre CALMOUSSE, trois tètes de bétail.12° Jean MONTAULIEU, une paire de bœufs.13° Jean GRACIE'r~ quatre têtes de bétail.14° Bernard BONTEMPS, une paire de boeufs.150 Jean BONTEMPS, une paire de vaches.

C'est ainsi que les parties ont arrêté les clauses et condi-tions de la présente Société. Dont acte fait et passé à Tarnos,le, etc.

Cette pièce me fut communiquée par l'obligeance deM. Pierre Cuzacq, géomètreexpert, de Tarnos (Landes).

N° 3

Nous donnons ici les exemples les moins incomplets que

nous avons pu trouver en Espagne. Ils sont tirés de la Re-nistageneral de Legislationy Jurisprudencia, marzo y abril

1884, de l'article Cosiumbres juridico-economicas del Alto

Aragon, por Joaquin Costa.

1

Los abajos firmados, vecinos de Pilzan, como dueuos yposeedores de alguna ~anaderia de vacuno para aliviar y

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socorrer las desgraciasque puedan occurir y repararlos, en 10

possible, a los vecinos que firmen, otorgamos esta obHgaciÓn

con las condiciones.siguientesla En caso de morir de desgracia alguna cabeza de gan:~do

vacuna de la propiedad de los firmantes, Ó aunque sea mâ.s deunacabeza, estan obligados a tomarla carne, que se les repar-tira a cada uno conforme al nûmero de cabezas que posea dedos auos arriba de edad, hasta despacharla toda, à peseta porcarniéera,

211 Se ha de nombrar cada afio dosencargados administra-dores para pesar y repartirtoda la carne entre todos los sociosobligados.

3a La distribucion y reparto de la carne han de hacerlodentro de las veintecuatro horas de occurrido la desgracia ymuerte.

4a Los mismos administradores cuidaran de cobrar elimporte de la carne repartida, dentro de los primeros quincedias, pudiendo el dueno compeler al pago a los administra,.dores, asi como éstos a los deudores, parados dichos quincedias, aunque sea judicalmente.

5a Toda cabezade ganadovacuno que llegue a doce anos deedad queda excluida de este convenio y obligaciÓn, a no serque a pesar de esta edad haga buen servicio ci. su dueao ental caso se reuniran la mayoria de 'los socibs, y a plura-lidad de votos acordari 10 que convenga y proceda en jus-ticia.

6a Si hay alguna rabeza de ganado vacuno, aunque notenga los doce afios, pero que es floja y no presta buen ser-vicio ci. su dueno, éste debera venderla, y si no la vende, laSociedad puede reconocerla, y segun 10 que le parezca, ex-cluirla del servicio.

711 En caso de presumirla muerte_causada voluntariamentepor su dueno a. alguna cabeza de ganado vacuno de las

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comprendidas en esta obligaciÓn, justificado con pruebas detestigos ô juramento del causante, sera excluido de esto con-venio con inlirraa de costas y perjuicios al reo y sus com-plices.

8a En el caso de morir alguna cabeza de ganado de las q ueforman el par de labranza, se le dara al dueiio un jornal delabrar por cada socio, y si la muerte y desgracia ocurre desdela fiesta de Todos los Santos hasta la Virgen de marzo, co-brari la junta de cada socio desde este.dia, hasta el 15 deabril, si el tiempo 10 permite, y en Io restante deI auo, a losquince dias, tambien si el tiempo 10 permite.

ga No sera admitido ningun nuevo socio à este convenio sinacordarlo la Sociedad en mayoria de votos tampoco podrasalirse ningun socio hasta fin de aiio, que concluye el dia 8

de Nuestra Senora de Setiembre, en cuyo dia se puedenydeben renovar los administradores.

l0a La Sociedad, a pluralidad de votos, podra alterar, siconviene, todas y cada una de las condiciones que contieneesta obligaciÓn, pero una sola vez al ano y el dia que fije ô

sea, el 8 de setiembre citado.Asi Io otorgamos y nos obligamos mutua y reciprocamente

a cumplirlo, etc., en Pilzan, a 15 de julio de 1881.

Ir

LOS ESTATUTOS DE LA SOCIEDAD MUTUADE BENABARRE

Relacion de los socios que han convenido y pactos entreambos convenieron por si se desgracia de los mas bueyes delos bueyes de los abajo 6rmados,cuyo contrato principiara aregir el dia 14 del acta, y se nombral'a una comision del.

seno de la Sociedad, para que en el momento que enfermase

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un buey, el dueno del dé parte a la comision para que ésta sereunapara tratarde medicinarlo ô de degollarlo, y si murieseal campo Ó de otra enfermedad, se tase como si estuviesevivo, y se repartira. toda la carne entre les socioa, y el duenodel buey perdera la tercera parte, y la Sociedad pagara lasdos terceras partes, y el amo del buey se quedara obligado apagar los gastos del pontador y repartir la carne, si 10 paseocho dias para pagarlo y este 10 recogeran los socios nom-brados de la comision. y el que no pagase firmado que esté, y10 tuvieren queponer porjusticia, pagaria todos los gastosque se ocasionen, cada socio tomara carne por los bueyesquetenga al momento de morir el buey. Quedan obligadosa tomarcarne todos los socios hasta que dé parte que se ha. vendidolos bueyes, y para dos tresmeses,y todo socio queda obligadoa dar parte a la comision de la Sociedad que ha vendido losbueyes, y ha comprado otros, y la comision esta obligada a'

revisar dichos buyes que se hayan comprado, ytampoco seraadmitido a la Sociedad ninguno que haga un allo que tienebueyes hasta el primero domingo de mayo que. se reuna todala Sociedad. Benabarre, 1875-82. Lista de los socios pararepartir carne (Siguen 32 nombres).

Comme le remarque J. Costa, ce document est très malrédigé.

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DE QUELQUES TRA~TAUX SUR LE BASQUEFAITS PAR DES ÉTRANGERS

PENDANT LES ANNÉES 1892-94 1

Les années 189N-93-84 marqueront'dans les annales del'Escuara par un nombre d'ouvrages publiés en basque, etpar des études sur le basqueet sur les Basques. Il y a euautrefois des époques semblables de progrès dans la con-naissance du basq ue périodes marq uées par la publicationd'excellents travaux, par un souffle d'enthousiasme, par lacuriosité du monde savant arrêtée pour un instant sur laquestion basque. Ces époques ont été suivies par de longuesannées de négligence et de stérilité pendant lesquelles rien,

ou presque rien n'a été produit qui valût la considérationdes savants.

Les noms de Dechepare et de Leiçarrague remplissent à

eux seuls le XVIe siècle. Axular, Larramendi, à qui nouspouvons joindre le nom de Pierre d'Urte, illustrent le com-mencement du XVIIIe siècle. W. Von Humboldt et Astarloamarquent l'entrée du XIX~ mais ce n'est que trente ailSaprès que Chalio, Lécluse, d'Abbadie ont entrepris leurs tra-

vaux. Pourtantla vraie science, l'étude réellement scientifiquedu basque et la connaissance approfondie de l'escuara s'estinaugurée avec les noms du prince L.-L. Bonaparte, de 1I.lechanoine Inchauspe, de M. Julien Vinson, de M. W. J. Van

1. Bulletin de la Société des ceienr.es et ~les arts de Bayonne,1894.

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Eys et de leurs disciples, le capitaine Duvoisin, M. Gèze,Don Arturo Campion et autres. Ce groupe d'écrivains a plusfait pour la connaissance de l'escuara q ue tous ses devanciers.Pour la première fois, l'étude du basque est assise sur desfondements aussi solides que ceux des autres langues etest conforme à la science linguistique.

Mais comme il arrive toujours dans la marche ascendantede toute science véritable, un progrès déjà fait n'est qu'unéchelon vers'un progrès ultérieur. Le dernier mot n'est jamaisdit. Les matériaux ne sont jamais épuisés. On en trouvetoujours de nouveaux. On remanie les vieux débris que l'oncroyaitdenullevaleur, etilsdonnentdesproduitssuperbessousl'analyse plus exacte et sous les procédés de la sciencemoderne. C'est ainsi que les deux années qui se sont écouléesnous ont montré de nouvelles découvertes dans le basque, etce qui est peut-être de plus d'importance, elles nous ont donnéla publication de manuscrits basques ensevelis dans les bi-

bliothèques de l'étranger, et tout à fait inaccessibles auxsavants. II y a eu aussi la réimpression d'ouvrages rares etpresque introuvables, la collection et la publication d'ins-criptions et de légendes monétaires il a paru des étudesimportantes, analyses très profondes des formes gramma-ticales de la langue basque. Je parle seulement de ce qui aété fait à l'étranger ou par des étrangers.

Mais avant d'entrer en matière je tiens à décharger maconscience sur la témérité de mon entreprise. Je n'ai pas laprétention d'être un basquisant, ni de savoir l'escua~a., je nesuis qu'un amateur de basque, un bascophile qui aime le

pays, les traditions, et surtout le peuple basque, mais quin'a aucunement le droit de s'ériger en critique ou en juge des

travaux d'autres plus compétents que lui. Je ne suis que leursimple chroniqueur. Et même comme chroniqueur, je nepuis pas faire une histoire complète. Il y a bien des choses qui

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auront pu m'échapper. Je prie mes lecteurs de bien vouloirsuppléer mes défauts et de ne pas être trop sévères sur l'in-compétence de l'écrivain

Si quid noaisti rectius istis,Candidus imperti; si non, his cctere mecum.

PUBLICATION DE MANUSCRITS ET RÉIMPRESSIONS

En 1892, M. Julien Vinson, professeur à l'École desLangues orientales vivantes, à qui les lettres basques doiventtaat, et qui tient maintenant la place devenue vacante par la

mort du regretté prince L.-L. Bonaparte, M. Vinson a im-primé pour la première fois, avec préface de 16 pages, où il

nous dit, selon son habitude, tout cequ'on sait sur Pouvreau,1

ses manuscrits et sa vie, Les Petites CEunres Basques deSylvain Pouareacc (Châ.lon-sur-SaBne, chez L. Marceau, 5,

rue des Tonneliers). Ces petites œuvres ne sont que quelquesmots très superficiels sur la grammaire de la langue basque(pp. 1-9), ensuite deux pages (11-12 de fragments basques surun thème de Tacite. Vient encore un sermon pour la Pen-tecôte (?) en basque, sans traduction (pp. 12-24). Le reste dulivre (pp. 25-95) est rempli d'une traduction en basque d'untraité sur Les Prinilc9es de la 1l~~re de Dieu, avec l'original

en français au bas des pages. Le tout finit avec le Prior.'l~c~e

du Roi (3 pages). L'époque même de la v ie de Pouvreau(1614-1670-S0)donne de l'importance à ces écrits. Ces étudesont aussi cela de remarquable que Sylvain Pouvreau est lepremier des rares étrangers qui ont réussi à apprendre et àécrire l'escuara couramment et avec correction. Il y a donc

un certain à propos pour que ces petites oeuvres, laissées enmanuscrit, soient illiprimées après un oubli de deux siècles,

par un étranger aussi savant en langue basque que Pouvreaului-même.'

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Le livre qui attire ensuite notre attention est une réim-pression de la même époque que celle des manuscrits dePouvreau. Elle est due à l'enthousiamed'un savant voyageuranglais, M. Edward Spencer Dodgson. C'est la Capanagaren.Dotrinea, une traduction en basque, avec l'espagnol en face,de. l'E~position Brecce de la Doctrina Christiana, com-puesta por el P. M. Geronimo de Ripalda de la Companiade Jésus (Con licencia en Vilbao, por Juan de Azpiro, anode 1656). C'est une reproductionexacte de l'édition originale.Elle a la singularité d'avoir été fa~te par un Anglais à l'im-primerie du journal A Folha, en Vizeu, Portugal. Elle aexigé des soins infinis de la part du rédacteur pour arri-

ver à une si grande exactitude d'impression en pays si

étrangeraux lettres basqueset anglaises. A l'édition originale,M. Dodgson a ajouté une page (CLXIV) où le basque, lefrançais, le portugais, l'espagnol et le latin se cÔtoient assezbizarrement un Prologo en espagnol (pp. CLXV-VI), destinéd'abord à la Renista Euskalerria, de San Sebastian une.Version litéral, en espagnol, de la dédicace basque de Ca-

panaga (pp. CLxvlI-vm) un Index très utile des 500 formesdu verbe de Capanaga (pp. CLXIX-CLXXV), et quelques After-u~onds en anglais, où l'auteur donne pleine bride à sa verveoriginale. M. Dodgson a rendu un service incontestable auxlettres basques par cette réimpression du premier livre im-primé en basque de Vizcaya.

Nous nous'occuperons maintenant d'un savant allemandétabli depuis longtemps dans le commerce à Bordeaux, maisgrand amateur de la langue et desétudes basques, Herr VictorStempf. Nous parlerons plus tard de ses remarquablesétudes grammaticales à présent nous nous occuperons detrois réimpressions qu'il a fait faire chez F. Destouesse, 5,

rue Notre-Dame, Bordeaux.1. B. Dechepare, Lincdare Vasconcim Primitia? (Poésies

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Basques). Troisième réimpression, conforme à l'original de1545 (1893). La deuxième réimpressiondes poésies de B. De-

chepare fut faite à Bayonne, chez Cazals, en 1874, par lessoins de notre collègue, M. Julien Vinson.

2. Supplément des Proverbes Basques reccceillis parArnauld Oilcenarl. N°S 538-706, avec la traduction en fl'an-

çais. Nouvelle édition conforme à la première de 1657. Cet

ouvrage peut servir comme complément non seulement auxproverbes d'Oihenart, mais aussi aux .d ncien., l'rorcrbesBasques et Gascons, recueillis par Voltoire, qui furent aussi

réimprimés chez Ca7.als, à Bayonne, en 1873. Une autreédition de ce:) mêmes Proverbes fut imprimée à Bayonne en1892, après une copie faite sur l'original à Paris, par E. S.

Dodgson Arnauld Doyhenart et son supplément des Pro-verbes Basques, par l'abbé P. Haristoy, curé de Ciboure.Bayonne, Lamaignère, 1892.

Plus intéressante encore est la réimpression des Textesdes anciennes Danae~ Basqueschantées, recueillies par J J.de Iztueta, et publiées en 1826 à San Sebastian. L'histoiredes deux éditions (Donostian, 1824 et 1826) des DansesBasques Anciennes, publées par Iztueta, est assez curieuse.La censure s'exerçait alors il. San Sebastian et dans las Pro-~incias Vascongadas avec une rigueur extrême. C'était la

dernière périodedu règne de Fernando VI l, après la mort de

Riego, et de l'extinction temporaire de toute velléité de libé-

ralisme en Espagne. Bien des pièces recueillies par Iztuetafurent supprimées, d'autres furent tronquées ou expurgées

avec une pruderie méticuleuse. Heureusement un écrivain

anglais qui, ou personnellement,ou par ses amis, était enrelations avec Iztueta, a fait la critique de ces deux éditions

publiées à San Sebastian, dans Tlce F'oneiJn Rerieu~ and

Continental Miscellan~, vol. I1, art. m, pp. 338, et vol.1V,

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art. ix, p. 198 (London, Black and Young, 1828) 1. L'au-teur affirme qu'il a sous main toutes les pièces originalesde Iztueta. Il ne les imprime pas toutes. Il ne donne qu'unchoix de quelques-unes de ces pièces quiztueta fut obligé,

contre son gré de tronquer ou d'omettre. Comme il n'y a riendans ces morceaux qui peut choquer la modestie, je les copieici avec la traduction anglaise. Elles nous montrent au moins

ce qu'était la censure en Espagne sous le règne de Fer-nando VII.

Nere maite politaN ola cera bici ?

Zortci egun onetanEtzatiut icusi.

Uste det zabiltzala,Nigandic iguesi

Ezdirazu ematenAtsecabe guichi?

Guizonbat ardogabe When man neglects good drinkingDago erdi illa, He needs must know decline;

Marmar dabiltzat ripac His stomach, daily shrinking.Ardoaren billa; Demands congenial wine.

Banan eran ezquero But let him quaff till mellowArrenera guichi, Nay, ev'n one drop will do

Gui:wnic cbatarrenac The very simplesL fellow.Balio ditu bi. Is straight worth any two.

1. Quoique ces critiques nesoientpasmentionnées parmi ses autrescontributions dans l'index uibliograpl1ique du ,i~oreiya t>'c~eiccv, il n'ya guère de doute qu'elles ne soient dues à la plume du r.élèbreGeorge Borrow, missionnaire polyglotte, aventurier, l'auteur du Biblein Spain, etc., etc. Il était à Bayonne et dans la Navarre en 1826. Ilest à peu prés certaiu qu'il fut en prison à Pampeluile, mais pourune raison quelconque il a laissé cette partie de sa vie tout à faitdans l'ombre. Voyez Li/'e, V~'ritin~s and Correspondence ofGeorge Bomow, by Dr W. Kuapp. Vol. I,p.47, 124-5, vols. Murray,London, ISO!).

BACCHANALIAN ZORCICO

ZORCICO

My dearest rnaiden, say.How is it with thee now ?

Eight days' have passed away

Since 1 beheld that brow.Ahl t'is my sad belief

Tbat thou dostsbun my armsWhy overwhelm with grief

A captive to tby charms ?

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Eun ducatchoBatiitueti bada IiÏe

Orain bi tirteNere aitac emanie;

Erdiae maiteariNi ozean meanEta bertze erdiacEdan eta jau

Ez det orain batereOrrengatican maitea gana

Joan nin zan batereJoango ere bai,

Nere maite politac baldin badu. naiNola naico ez det bada nie.

Maitea, etorcea zuBaldin zeuretzaco izan bear nazu

Aza landere saltzeraMaitea, cinan etorcen.Beguiac arguiEta colore gorri.Naitazun andia cenidalaSillistu nueu eguia zala

Hanau guerozticatiJaquitidet baite nieBestegandic ixillicDituzala iduquiEehean gorderieAnima erratu biIllen janziarequinNazcatzeu nai", niItz eguitia zurequin.

LA CHANSON DES CI'sN1' DUCATS

A butidred ducats'l'wo years ago were mine

lialf went iu coul'tingAnd half in (ca'¡s and wine.

Yet now, that t aIl is spenlNo change is known in me

1 go, as lheu 1 went.My lovely maid to see,

This eve 1 souâhl fierbower,And I will seek it still.

So that my gentle flowerApprove her lovers' will

Oh 1 how should 1 denyTo see thee by my side

Thou constant, youtb. wheu I

? Am thine affianced bride ?

AZALANDARA

Thou camest, 1 remember weil.

Thy garden fruits and flowers to sell:Yeso laden from thy rural home,To town thou once wert wont to come:And, then, 1 thoughtthy love was mine.Now, o'er thy falsehood 1 repiue.Fortliough thine oyes'eiitt,aticiti~, ray,Still beamswith undiminished sway,Falseone 1 1 know thy faitbIe¡;;s wile,How thou canst 011 the rivals smile,Who deaths' uncheerful livery wear,And ail thy beautys'blisses share.Go, false and foolish maid, tis o' er,1'hy very thoughts atflict my soulNo more 1 stoop to thy coutrol.

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Naparroatic etorten da Tis from Navarra comes joyous wineArdo gorri gOl.oa. So flavorous and brigbt,Arrechec consolatTen dit Which soothes our hearts when t,hey

[repine,Neri biotz gaixoa.Bizieni ona baita gaztiz,Erozteco diruba baliz;Erango nuque asco altlizNaiz echera eramen zaldiz.Ardoric edan gabeNagoen egunaIruritzeu zait niriDala guciz illulla,Picharra ongui bete bediEta sarritan emanEdatera niriBiotza arquitzenzatMotel eta eri.

Sous le titre Zorcico Pordoi (1? n) Dant.~a, La Danse desBâtons, est donné le fragment bien connu BeotibarcoGudua, La bataille de Beolibar. On le trouve dans lePays I3aJque, de Francisque Michel, p. 243, et dans leCancioneno T âsco, de Manterola,segunda serie, tomo 1 I I, p. 7.Il est curieux de remarquer l'interprétation différente faitedes mots Gal,aleluco ecJzean par ces trois auteurs. Le premier"

en date, l'anglais, les traduit comme un nom propre Gaz-telu's cr,alls, les murs de Gaztelu; Michel dit dans la maisondu château fort Manterola a ser Castellanos, à être deCastille, avec cette note Designase â Castilla con el nombrede Gaztelu (tot homines, tot sententic~). On trouve aussi dans

NAPAReHO BDO NAVARRITO

And fills them with delight,It t remedies all ills that weigh

On. lire, but bard to thitilz,Unless we money have to pay,

No wine have we to drink.O. as 1 love could 1 but pour

Out wine, then could 1 drownAll thought, till I mistook the door

My neighbour's for my own.The day on whicb 1 drink no wille,

'rh~ sun no more I see,For howso'er bis beams may shine

'l'is dark as night to me.

My bowl is sad and dry 10 whenWilt thou be full, my bowl Y

Till then, ah me, 1 feel, till thenA gloom is on my soul.

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le Forei~n Revicu~ la seule pièce originale, en vers, connuede la plume d'Iztueta. C'est une chanson à~ sa femme,Concepcion Bengochea, avant leur mariage, écrite lorsqueIztueta était en prison. Le Fcrei~gn Reoicrr. n'en donne quecinq stancesouversets. Manterola, dans le Cancionero Vasco,

primera serie, tomo 1, p.40, y en ajoute encore cinq. Il nousdit, p. 38, que cette composition précieuse se pccbli~o pornez primera hacia, 1844. Il ignorait qu'elle avait déjà partidans une revue anglaiseen 1828. Parmi les pièces mentionnées

par Stempf dans sa réimpression, je remarque, p. xv ~1 ila

San Ygnacioren Marcha. Ce serait intéressant. de comparercette marche, les paroles, la manière de danser et la musiquerecueillies par Iztueta, avec la ll~arclze de San I~nar.io, im-primée par notre estimé collègue, 11~i. Charles Bernadou, àla page 187 de notre Btclletin de 1894. Il y a encore une étudeà faire sur les danses basques des deux côtés des Pyrénées,

et surtout sur les danses religieuses de tout le Nord de l'Es-

pagne. J'ai entendu autrefois-dire par plusieurs personnesâgées que ces danses religieuses se pratiquaient en leur jeu-nesse devant le Saint-Sacrement en Aragon M. le Dr E.Casamajor Dufaur, dans sa récente brochure, Vor~age à Jaca

(Oloron, 1894), nous raconte qu'il les a vues, cette année, à

la fête de sainte Orosie, à Jaca.Nous allons aborder à présent la publication basque la plus

importante qui ait été faite dans un pays étranger pendant cesdernièresannées. Je parle de l'impression d'une grande partiedes manuscrits basques conservés inédits depuis plus d'ùnsiècle et demi dans la bibliothèque du comte de Macclesfield,à Shirburn Cadtle, Oxfordshire, Angleterre. La publicationdu plus important de ces manuscrits, la traduction faite parPierre d'Urte. du livre de la Genese et d'une partie de celui del'E~ode, en basque labourdin, est due au zèle éclairé d'unenouvelle recrue des études basques, M. le Rév.! Llewelyn

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Thomas, vice-principal de Jésus Collège, Oxford.C'estlui quia fait la copie pour la presse du manuscrit de Pierre d'Urte,et qui a amené l'Université' d'Oxford à entreprendre les fraisde la publication. Le résultat de la publication est unbel in-4° qui peut servir presque comme modèle pourla manière dont ont doit reproduire un manuscrit unique.En comparant le texte imprimé avec le jac-sinaile dumanuscrit, nous voyons que nous avons tout ce qui est né-cessaire, mot pour mot, "ligne pour ligne, pour l'intelli-gence et la lecture du manuscrit lui-méme. Toutes lesfautes, toutes les lacunes de l'original, sont reproduites dansl'impression. En outre, M. Thomas a écrit une introductiondans laquelle il nous dit tout ce qu'on connaît (malheureu-sementc'estbien p~u de chose) sur l'histoire de ces manuscritset sur la vie de leur auteur, Pierre d'Urte, natif de Saint-Jean-de-Luz, et un des rares ministres protestants basques.

Les manuscrits furent écrits probablement vers l'année 1700,

ou peu après. A cette édition M. J. Vinson a ajouté un ex-cellent et très utile l'ocabulaire des formes nerbales, usitéespar Pierre d'Urte, avec une traduction littérale en françaisce vocabulaire a d'autant plus de valeur que Pierre d'Urte sesert des formes de tutoiement masculin et féminin, qui sontassez ~ares ailleurs. M. E. S. Dodgson y fait une'liste destraductions de la Bible en des parties séparées. Cette liste esttirée de l'Essai d'une Bibliothèque de la lar~~gue basgue, de~1. Vinson.

Les autres manuscrits de Pierre d'Urte comprennent uneGrammaire Cantabrique, c'est-à-dire basque, et un Dictio-nar·ium Latino-Cantabricum.Ce dernier n'est qu'un fragmentqui va depuis la lettre a jusqu'au mot commotus. La Gram-maire est plus importante. M. Vinson a donné une descriptiondétaillée de ces deux manuscrits dans la Reaue de I inyuis-tique, tome XXVI, fasc. 3, 15 juillet 1893, p. 255. Avec les

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manuscrits autographes de Pierre d'Urte il se conservait,dans la Bibliothèque de Shirburn Castle, une copie de la tra-duction biblique faite au commencement du siècle actuel parle Révd Samuel Greatheed, F. S. A. Cette copie a été d'une

grande utilité pour la transcription de l'original pour l'im-pression. M. Greatheed avait fait aussi la copie d'une dis-sertation en latin sur

le verbe basque que Pierre d'Urte avaitmis en tête de son Dictionnaire. A cette dissertation en latinM. Greatheed a ajouté Notes and observations on the Gram-

mar vf the Canlabrian or Basque Lan~~uaJe. Il est étonnant

que, quoique ces manuscrits de Pierre d'Urte aient toujours

été conservés ensemble dans la bibliothèque de ShirburnCastle, Greatheed n'ait pas eu connaissance de la GrammaireCantabrique, manuscrit de Pierre d'Urte. Ses notes ne sontfaites que sur la grammaire de Larramendi, El im~.osible

nencido, et ainsi elles ne nous apprennent rien de nouveau.Telles qu'elles sont, M. Vinson les a publiées dans la Reoue

de Linguistique, 15 juillet 1893. On y trouve aussi 14 pages

du vocabulaire tiré du manuscrit de la grammaire d'Urte.La grammaire a été imprimée par la Société Ramond,

debagnères de BigorredanssesBulletins,en grandepartie auxdépens du feu M. Antoine d'Abbadie, membre de l'Institut,pendant les années 1896-1900. La Société en a fait un tirage à

part de cent volumes qu'elle a mis dans le commerce. Les

vingt premières pages du Dicliomaaine Lalin-Basycce,

jusqu"au mot ablegare. 2. agortcen, ont paru dans le Bccl-

letin de la Société des sciences et des arts de Bayonne,1895.

OEUVREs GRAMMATICALES

Nous abordons à présent la partie certainement la plusdifficile et peut-être la plus importante de notre travail. M. leDr 1-lugo Schuchardt, membre de l'Académie impériale de

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Vienne, professeur de philologie à l'Université de Gratz, s'estdéjà fait remarquer par de savants écrits. surtout étymo-logiques, et par des critiques sur le basque. Mais l'ouvragequ'il a publié dans les Mémoires de l'Académie impériale deVienne, avec le titre Baskischc; Studien; I. Ueber die Ent-stehung der BeNu~sformen des BashischenZeilworts (Wien,1893), ne vise à rien moins que d'établirune nouvelle théoriedu verbe basque. M. le D1' Schuchardt rejette tous les éclair-cissements antérieurs du verbe basque, dont il fait une analyseminutieuse de tous les dialectes. Ses idées ont l'air de s'at-tacher un peu à celles émises par M. V. Stempfdans sa thèse

publiée à Bordeaux en 1890 La langue basque possède-t-elle, oui ou non, un verbe transitif,' La lecture du traité dusavant professeur de Gratz estdes plus difficiles. Sinous avonsbien saisi la pensée de ces deux auteurs, ils ne veulent pas dutout admettre que la forme pronominale objective enclavéedans le verbe basque soit un objet direct. L'un, M. Stempf,l'explique comme un ablatif après un verbe intransitif. Ils'ensuit que ce qu'on a pris pour un verbe actif ou transitifn'est, en réalité, qu'une forme passive ou intransitive. LeDrSchuchardt, si nous le comprenons bien, l'explique plutÔt

comme un aatinus ethicus, mihi, tibi, après un verbe réflexo-passif 1. Ces auteurs, tous deux s'accordent en ceci qu'il n'ya pas dans le basque une forme de verbe purement transitive

ou active, eL par conséquent, que tous les grammairiensantérieurs l'ont mal expliqué.

La théorie du Dr Schuchardt est vivement combattue parM.Vinson, surtout pourles formes de tutoiement~. La questionn'est pas encore vidée. Ce sera peut-être longtemps avant que

t. M. le Dr Schuchardt in'écrit que je n'ai pas saisi exactement cequ'il voulait, dire. 11 me. faut renvoyer mes lecteurs à l'ouvrageméme.

Rcoue clc Linguistique, tome XXVII, 15 avril 1894.

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301DE QUELQUES TRAVAUX sun LE BASQUE

la vraie théorie du verbe basque soit établie au jugementdessavan ts.

Outre cet ouvrage important, M. le Dr Schuchardt a im-primé plusieurs articles et critiques Germanische W~rterim Baslcischen, des critiques remarquables sur l'ouvrageitalien Delle relazioni Ira il Basco e l'antico r~i.~id, par leprof. Claudius Giacomino, et sur les Rhind Lectures et TheInscriptions and I,an~uape of the Northern Picts, par leprof. J. Rhys of Oxford, sans parler de ses écrits précé-den i,s.

Dans le progrès de toutes les sciences actuelles, les travauxles plus indispensables paraissent souvent dans les revuesscientifiques, dans les mémoires ou bulletinsdes Sociétéssavantes, même dans les publicationshebdomadaires ou dansles 6urnaux, avant d-'étre ramassés et publiés à part. Ce faitest exact surtout pour des recherches grammaticales, pourdes articles de critique et de bibliographie. Il y a notammentdeux revues publiées à l'étranger qui s'occupent' des re-cherches basques. L'une, l'Euslrara, de Berlin, est dédiéeexclusivement aux connaissances basques l'autre" d'uneportée bien plus étendue, la Rerue de Linguistique et dePhilologie c~mparée (Maisonneuve, Paris), si vaillammentdirigée par notre collègue, le professeur Julien Vinson, dontle nom revient à chaque instant en étudiant le basque.

Quoique un peu au delà de nos limites, je peux indiquerici la réimpression d'une traduction en basque souletin, faite

par le célèbre Augustin Chaho, des Preces Sancti Nersetis(Revue de Linç~tcistique, t. XXIV, fase. 4, p. 326). Nersés IVfut patriarche d'Arménie, 1098-1173. Outre beaucoup d'autres

écrits plus considérables, il a laissé un recueil de vingt-quatrecourtes prières ou 110llectes, Une édition de ces vingt-quatreprières ou oraisons en quatorze langues f ut t impriméeà Venise

en 1818, suivie d'une autre édition en vingt-quatre langues

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en 1832. Je ne sais pas si Chaho avait préparé sa traductionpour cette dernière édition.

Au t. XXV, fasc.1, 15 janvier 1892, il y a une nécrologiedu prince L.-L. Bonaparte, et un texte basque du XVe siècle.Le fascicule 2 nous donne un fragment d'une pastorale,SainteHélcne,avectraductionanglaiseparM.E. S. Dodgson,à qui nous devons la réimpression de Capanaga. La SociétéRamond, de Bagnères-de-Bigorre, annonce dès à présent lapublication de cette pastorale tout entière, avec traductionfrançaise et anglaise. J'ai écrit quelques mots sur les pas-torales pour y servir d'introduction. Au 30 rase., juillet 1892,

nous avons une traduction de sept strophes de la Chanson deRoland, en basque labourdin, par M. Harispe. Un autremorcéau de la même' chanson a été traduit en basque parM. E. S. Dodgson. Le t. XXVI, fasc. 1, commence avec detrès intéressantes Notes de Bibliographie basque, par.M. Vinson. Il donne un compte rendu de deux ouvragesT,'O~CCe de la Vierge (1658) et 1~13réoiaâ~·edesDévots (1664).La version basque de l'Office de la Vier·~e est due à la plumede M. Harizmendi, vicaire de Sare. Le Devoten Breviarioafut traduit par d'Argainaratz, vicaire de Ciboure, en 1664.Les -Sept Sainfes, célébrées aux heures canonicalf:'s pendanttla jOl1rnée~ sont toutes de famille royale, de sorte que je

suppose que l'original de ce bréviaire doit avoir été composé

pour quelques reine ou princesse. C'est une chose à re-chercher. Le fascicule 2, avril 1893, nous montre un vétéran.dans les études basque, M. le comte H. de Charency, qui y aécrit un. essai sur la I~an~uc basque et les idiomes del'Oural la fin de cet article se trouve dans le fascicule 3 de'juillet. Le même numéro contient la description des ma-nuscrits de Pierre d'Urte, par M. Vinson, et une note trèscurieuse sur la Versifi~ation basque de Bernard d'Eehepare;signée E. S. D. (Edward SpencerDodgson). L'auteur compare

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la mesure d'Echepare avec celle d'un poème grec, Les~L'~ploils de Basile Digénis Acritas, épopée byzantine. Lamesure s'appelle oer~s politiques depuis le X1~ siècle. Ontrouve des poèmes latins aussi bien que grecs -écrits danscette mesure. Un des ouvrages les plus utiles sur le basqueE:,

et surtout pour ceux qui en commencentl'étude,est le Glossarzu Dachepar Poesien, que M. V. Stempf publie de temps entemps dans les pages de cette revue depuis janvier 1887 àoctobre 1893. Quoique écrite en allemand, l'analyse gram-maticale y est faite avec une telle netteté et précision qu'ellepeut être suivie en grande partie même par ceux qui ne pos-sèdent pas l'allemand. C'est un grand auxiliaire à la con-naissance du basque.

L'Euskara, l'organe de l'Association basque de Berlin, estdédié entièrement aux études basques. La publication, sousla direction de M. Karl Hannemann et du Pastor Fh. Linsch-

mann commençait le 1er octobre, 1886 elle s'est terminée

avec le n~ 17, juillet 1, 1896, à la mort de M. Hannemann,

survenue 10 juin 1896. Ses contributeurs comprenaient

presque tous les meilleursbasquisants de l'Europe; MM. VanEys, Julien Vinson, Dr Schuchardt, E. S. Dodgson, le

comte de Charency, etc., etc.M. Vinson me parle, dans une lettre, d'une brochure,

Slaoo-Baskiscl~, par M. Topolowek, c'est un vocabulaireétymologique assez fantaisiste.

Nous devons faire mention ici de deux séries d'articles quitouchent par quelques côtés à la question basque. Ils ont parudans une publication trimensuelle espagnole, La Contro-aersia, de Madrid. La première série -a pour titre Anti-puèdades Ibericas, por M. Q. Elle se trouve dans les nos 171,

175, 179 de l'année 1891, et dans le n~ 184, février 1892, Il

y a aussi un chapitre supplémentaire La Seroidumbreadscripticin entue los Iberos, n0192, avril 1892. La deuxième

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série; Litoral Iberico del Mediterraneo en el siglo VI, V,

ante de J. C., commence avec le n° 201, et se poursuit dansles nos 210-214 de l'année 1892, dans ceux 257: février 1894,

et 281, octobre 1894.L'auteur, qui cache son nom sous les initiales M. Q., est

Don Joaquin Costa, avocat et juge bien connu pour ses écrits

sur le droit et les institutions du Nord de l'Espagne, et surtoutde sa province natale, l'Aragon. Quoique écrits avec uneportée plus grande, les susdits articles sont d'une réelle utilité

pour l'étude des origines des races ibériques 'et de quelques-unes des institutions basques qui se sont conservées presqueà nos jour.s~ M. Costa: excelle surtout dans l'application de larécente science de l'homme préhistorique, de ses mœurs etde ses institutions à l'interprétation des textes des anciensauteurs classiques, grecs et latins'

OUVRAGES SUR L'ANTRHOPOLOGIEET L'ETHNOLOGIE BASQUES

Parmi les publications qui traitent des relations ethno-graphiques entre les Basques et les anciens Ibères, la pre-miére place estdue désormais au Monccménla Lin~uc~ Iberiec~,par le professeur Dr Emilius Hübner (Berlin, Reimer, 1893).Il suffit d'énumérer quelques-uns des ouvrages précédentsdu savant professeur pour faire voir quels titres magnifiquesil offre il notre considération préalable, et pour montrercombien toute oeuvre de sa plume mérite la plus sérieuseattention. Le Dr, Hübnerest le rédacteur du tome II du grandCorpccs Inscr~iptionurr~ Latinarum (Berolini, MDCCCLIX~, quise rapporte à l'Espagne d'un ~.rupplémenl â cet 'ouvrage(1891); des Inscripliones Flispania~ Christianc~ (Berolini,MDCCCLIX). Il a écrit aussi, en espagnol, un excellent livre

1. sr Costa a depuis réuni plusieurs de ces études dans unvolumeintitulé Estuclios Ibenicva, l, Madrid, 1891.1895.

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La Arqueologia de Espana (Barcelona, 1888), et en- por-tugais, Noticias Archeolo~~icas de Portugal (Lisboa, 1871),

et une.foule d'autres écrits, surtout sur l'épigraphie latine.Sa dernière publication est le couronnement de toute unesérie d'ouvrages sur l'archéologie espagnole, qui sont tout àfait indispensables et, sauf pour la grandeur du format, ilssont'de véritables manuels qu'on devrait toujours avoir à lamain en étudiant l'ancienne I bérie.

C'est un grandavantage pour l'étudiantque celui de trouverréunies dans un seul tometoutes les inscriptionsen caractèresibériens exactement transcrites. Il n'est pas moins utiled'àvoir la distinction faite entre les inscriptionsauthentiques

et celles qui sont fausses, comme celles du plat celtibérien de

Ségovie1, ou suspectes, comme le sont celles qui se trouvent

sur les objets gravés par D. J. de Diosde la Rada y Delgado, à

la suite de son Discurso sobre lasAntiguedades del Cerro de

los S'anios$. Dans des Prolegomenade CXLIIIpages le profes-

seur Hübner décrit et résume tous les travaux antérieurs. Si

nous ne sommes pas pleinementd'accord avec lui dans sa mé-

thode d'expliquer les suffixes ibériens d'après la manière des

inflexions latines, nous pouvons au moins souscrireà sa con-clusion « Probavissenobis videmurlinguamIbericam unamfuisse per totam poeninsulam et in Galliæ regionibus adjacen-

tibus, quas olim Iberi habitaverunt, neque mixtam cum Cel-

tarum, qui regiones tantum aliquot Hispaniae occupaveruntvestigiàque lingumproprimreliqueruntin nominibus locorum,

deorum, hominum Celtibericis. »

M. V. Stempf de Bordeaux, a fait des essais de déchiffre-

1. Extrait dé la Gaaette archéologique de 1888. A. Lévy, Paris 1888.

2. Fortanet Madrid, 1875. Voyez Mônnmenta Lingucr' ILericu~,

p. cXLII.Additamentum; et Rapport sur une mission arcliéologigue enEspagne (1891) par M. Arthur Engel, pp. 137 et 158 seq., dans lesNouoelles Archioes des Missions scient~ques et littéraircs, t. III.E. Leroux, Paris, 1892.

20

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ment des plus importantes de ces inscriptions. La Revue deLi~~uislique, 15 avril 1897, donne un Essai de déch~remenlde l'tscriplion de Castellon, suivi des Obseraations par leprofesseQrl.Vinson.D'autresessais portentsur les inscriptionsde Calatayqd. de Luzaga, d'Acala et d'autres. M. Stempf,quoique avec une bien meilleure connaissance du basque,n'a pas été plus heureux que ses prédécesseurs dans l'inter-prétation des insoriptions ibériennes, elles attendent toujoursleur Champollion.

Si le professeur Dr E. Hübner a fait beaucoup pouréclaircir les relations entre Basques et Ibères, un autresavant, M. John Rhys, professeur des langues celtiques àl'Université d'Oxford, s'efforce d'établir les rapports entre lesIbères, les Basques, les Celtes, les Pictes et les peuples pri-mitifs du Nôrd-Ouest de l'Europe. La question est une desplus difficiles, bien qu'une des plus intéressantes pour l'eth-nologie de l'Europe Occidentale. On ne peut pas jeter les

yeux sur une ancienne carted'Espagnesans y remarquer desnoms celtiques, surtout dans le Nord et le Nord-Ouest, et auCentre le nom I~eltiberia occupe une grande étendue. Onespère toujours découvrir des rapports entre les langues cel-.tiques et les langues parlées par les habitants de ces pays.Mais nos espérances sont toujours déçues. Jusqu'à présentl'élément celtique dans le'basque, ou l'élément basque dansles langues celtiques est à découvrir. Les traces y sont biendifficiles à constater. M. le professeur Rhys s'est efforcé d'endéduire quelque chose dans sa brochure The Inscriptionsand Language of the Northern ~'icts. M. le Dr Schuchardten a fait une vive critique dans le Lilteraturblattfür germa-nische und romanische Philologie. Depuis lors notre savantprofesseur a étudiéle basque sur place, à Saint-Jean-de-Luz;nous attendons de plus importants résultats de sa plume.

Pour tous ceux qui ont étudié l'anthropologie basque au

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pays même, il a été impossible d'accepter les conclusions deM. le Dl' Broca sur les crânes basques avec la même foi parlaquelle elles ont été accueillies par des savants qui ne con-naissent pas la population basque de visu. Ce n'était pas lascience qui faisait défaut au savant professeur. Il a bien rai-sonné sur les matériaux qu'il avait devant lui. Mais il a étéindùit en erreur, en se fiant à des matériaux douteux et tout àfait insuffisants. Il est impossible, pour quiconque connaittantsoit peu le pays basque, et surtout Saint-Jean-de-Luz,avecses grandes variations de population, d'accepter pour unmoment que quarante-cinq crânes tirés au hasard de l'os-suaire de l'église soient tous basques. Il est même possible,

au contrair~1 qu'il n'y en ait pas un seul de race pure et sansmélange' M. R. Collignon a fait dernièrement une commu-nication à la S'oci~té d'anthropolo~ie, infirmant quelques-

unes des conclusions de M. le Dr Broca, et provoquant des

recherches nouvelles.. Autant que nous pouvons en juger pardes extraits et par des critiques, nous ne serions pas plusd'accord avec quelques-unes des opinions de M. Collignon

que nous ne le sommes avec celles du Dr Broca. Il ditCertains même (qui ?) avaient été dire que tous les Basquesétaient blonds, n'ayantpas remarquéque justement ils étaient

tous bruns. » La dernière assertion est presque aussi fausse

et hasardeuse que la première. Si partout la grande majoritédes Basques actuels sont bruns, il n'est pas moins vrai quelà où on trouve les conditions de localité les plus favorables

pour conserver le type le plus pur, plus on y trouvera desblonds. J'aiconstaté cefaitpartout. Onvoitla différenceentre

1. Les conclusions du DI, Broca sonttout à fait infirmées par les re-cherches plus complètes de Don F. de Aranzadi:y Unamono, ElPueblo Euskalduna. San Sebastian, 1889; du Dr R. Collignon dansles Mémoires de la Société d'antlirvpologie de Paris; de M. GeorgesHervé, dans' la Reoue de l'École d'anthropologie à Paris, 15 juillet1900, "Alcan, Paris.

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les classes supérieures et les paysans et laboureurs du pays.

Il est bien rare de trouver un Basque blond parmi les classessupérieures, parce que ces classes sont plus méléespar des ma-riages avec des Français, Gascons et Espagnols, tandis qu'iln'est pas du tout rare de trouver des têtes tout à fait blondesparmi les classes laborieuses et parmi les paysans, qui ontplus conservé la pureté de la race. M. Collignon trouve biendes traits dans les Basques qui rappellent les anciens Égyp-

tienset les Berbères. C'est la conclusion à laquelle est arrivéDon Francisco M. Tubino dans son ouvrage Los Abori~inesIbéricos Ó los Ber~eberes en la Peninsula (Madrid, 1876).

M. Collignon croit que les Basques français sont bien pluslibres de mélanges que les Basques espagnols,c'est l'opinionde beaucoup de basquisantsmais jene peuxpasêtre d'accord

avec lui lorsqu'il dit, avec Marca et d'autres, que les Basquessont venus en deçà des Pyrénées pour la première fois auVle e siècle. Il y avait sans doute à cette -époque un grandmouvement des tribus basques; c'est alors peut-étre que latribu des Vasconesaurait passé les Pyrénées, qu'ils s'établis-saient dans- la province à laquelle ils ont donné leur nom,Vasconie, Guasconie, Gascogne mais il me semble incon-testable que longtempsavant cette époque il y avait en deçàdes Pyrénées des peuples qui parlaient un idiome basquetout le long de la chaine, depuis Elne (Illiberis) jusqu'auLabourd (Lapurdens). L'épigraphie et la toponymie'de larégion sont d'accord sur ce point.

On vient de publier à Paris (chez Bouillon, Õ7, rue de Ri-chelieu), le premier fascicule d'une nouvelle série de travaux

sur le basque, qui s'annoncent sous le titre Archiaes de laTradition basque Publication de documents entreprise par

un groupe d'écriaains et d'artistes pour servir à l'histoirede la tradition. La première œuvre de cette Société nouvelle

est un numérospécimen de Cent Chataon$ populuïres basques

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recueillies 'et notées par M. Charles Bordes, maître de cha-pelle de Saint-Gervais, à Paris. La haute réputation deM. Bordes comme musicien nous assure que nous aurons

ici les chansons basques avec les airs véritables, comme onles chante parmi le peuple même. Les mots basques y sontdonnés avec traduction française, faite par la plume compé-

tente de M. le DI: Larrieu. M. Bordes note aussi l'origine de

ces mélodies, en fait l'histoire et trace leur descendance desanciensmodes grégoriens. Une étude scientifique de la mu-

sique populaire chez les Basques était bien à désirer, Nousremercions M. Bordes de remplir cette lacune dans la con-

naissance des choses basques.Je ne peux pas terminer ces pages sans mentionner ce qui

a été fait pour la bibliographiebasque pendant ces derni~resannées. L'Essai d'une Bibliographie de la langue basque,

par M. J. Vinson, est le manuel obligatoire pour toute per--

sonne qui désire connaitre ce qui a été imprimé en basque etsur le basque. C'est un livre admirable. Mais M. Vinsonl'intitule: L~'ssai d'une Bibliographie. Il était en effetimpossible pour un seul homme d'avoir la connaissanceexacte de tous les petits livres épars, tirés souvent à très

peu d'exemplaires par des éditeurs inconnus et qui ont étépubliés en basque. Il n'est pas étonnant que quelques-unsd'entre eux aient échappé à ses recherches'.M. E. S. Dodgson

a compulsé deux Supptémenls qui remplissent quelquesomissions et qui donnent une liste d'ouvrages parus depuisla Bibliographie de M. Vinson jusqu'à l'automne de 1892.

Le dernier de ces Sccppléments se trouve dans la Revue desBibliothèques, Il, pp. 216-227, décembre 1892.

La mort du regretté prince Louis-Lucien Bonaparte a

1. M. Vinsou y a joiut uu volume d'Additions et Correctionscitations et r~f~rences, ,journauss et reoues. Maisonneuve, Paris,1898.

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amené la publication d'un Attempt ut a Catalogue bf theLibrary ofthe late princeLouis LucienBonaparte, by VictorCollins (H. SotheraD. & Co, London, 1894): Les nos 639 à1357, pp. 33 à 67, contiennent la liste des ouvrages basquesou sur le basque, de la bibliothèque de ce grand bascophileet philologue. Quoique fait par une personne qui ne savait

pas un seul mot de basque, ce catalogue n'est pas sans utilité

comme accessoire à la Bibliographie basque.J'arrête ici ces notes beaucoup trop étendues. Néanmoins,

je crains d'avoir peut-être omis quelques ouvrages tout à faitaussi importants et aussi remarquables qu'aucun de ceux surlesquels j'ai attiré votre attention, tant a été grande la féconditéde la littérature basq ue étrangèrependant les années 1892-94.Je vous prie d'excuser mon ignorance. Bien des chosespeuvent facilement m'échapper dans ma retraite, à Sare, loindes livres, des grandes bibliothèques, du commerce dessavants et des Sociétés scientifiques. Enfin je tiens à constaterencore une fois que, dans les pages précédèntes, je n'ai parléque des étrangers qui ont écrit sur le basque. Rendre comptede la littérature indigène, tel n'a pas été mon dessein. Cettetâche est au-dessus de mes forces. Elle exige la plume d'unnatif pour la traiter comme il faut. Je serais bien heureux si

ce que j'ai écrit pouvait engager quelque Escualdun, ou dupays basque ou de la Provincias Vascongadas, ou de laNavarre, à faire un résumé des travaux littéraires des pro-vinces où l'on parle encore escuara.

P.-S. Depuis que j'ai écrit ces lignes j'ai reçu deuxarticles de M. le Dr Schuchardt. Le premier a paru dans leLitteraturblatt für germanischeand romanische Philologie,la second, bien plus important, est tiré du Zeitschrift für

romanische Philologie, il a pour titre Das Baskische Zeit-wort und Julien Vinson. Ces deux articles, surtout le dernier,sont d'une grande utilité pour l'intelligence de l'étude du

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savant professeur, dont j'ai fait mention ci-dessus, p. 300.

Bien des difficultés y sont éclaircies, et la question est net-

temént posée entre les deux plus grands maîtres de la théorie

du verbe basque.Tout dernièrement, le Dr H. Schuchardt a rendu un autre

grand service aux lettres basques, par la publication, avec

la collaboration de M. le pasteur Th. Linschmann, du

N. T. basquede Leiçarrague, sous cetitre Leiçarragas Bas-

kische Bücher non 1571 (lVeues ~'estarnent, Kalender und

ABC), im genauen Abdruck herausgegeben von Th. Linsch-

mann und H. Schuchardt, mit Unterstützung der Kais.

Academie der \Vissenschaf~en zu Wien (Strassburg, Verlag

von K. J Trübner, 1900). C'est un gros volume de cxx p.

d'introduction suivies de 459 p. du texte basque du N. T. etd'environ deux cents pages non numérotées d'indices et de

documents liturgiques en basque:

Il y.a une courte critique de Hübner~ s Nloraumenta

Lingûc~ Iberic~, dans une revue anglaise, The Classical

Reaier.a (octobre 1894, p. 357). L'auteur, M. R. S. Conway,

n'accepte pas complétement et sans réserve les conclusions

du savant professeur allemand. Une étude de beaucoup plus

d'importance, d'une partie de l'œuvre de Hübner se trouve

dans le Boletin de la Real Accidemia de la llisloria (octobre

1894, Madrid). Elle est due à la plume exercée de l'érudit

jésuite, R. P. F. Fita. Il y met à l'épreuve l'ouvrage de

Hübner pour l'explication des inscriptions ibériennes de

Fraga.Enfin, je viens de voir l'annonce d'un livre considérable

Die Vercaandtschafides Baskischen mit den Berbesprachen

Nord Africa's naehgeroiesen (L'affinité entre lé basque et la

langue des Berbères du Nord de l'Afrique démontrée), par

G. von der Gabelentz (Braunscbweig, Sauler, 18941.

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Note sur un passage de l'oainra~e d'Andrés de PoÇa: De laAntiguaLen~ua,Poblacionesy Comarcas de las Espanas,

en que de paso se tocan algunas cosas de la Cantabria.Bilbao.1587'.Dans ce livre curieux écrit moitié en latin, moitié en espa-

gnol, Andrés de Poça fait mention (fol. 39, 54, 64) de lacoutume qu'auraient eue les Basques de prêter un sermenttsolennel avec un pied découvert.

Les principaux passages où il parle de cette coutume sonten espagnol, fol. 39 (Je transcris en espagnol d'aujourd'huiles contractions de Poça):

« Los Pelasgos usaban este mismo habito de las abarcas, yde la lançay dardos, ylo del piè descalço,conque (segun fama)los senores de Viscaya juran los fueros y privilegiosdella. »

Capitulo xm (fol. 50) intitulé « En que sé trata de la an-tiquisima costumbre del un pié descalço, con que los Senoresde Viscaya tienen de costumbre de jurar los fueros, y liber-tades della. »

1. Pour plus de détailssur ce livre assez rare, voyez Essaid'une Bi-blc'ographie de la langue basque, par Julien Vinson (Maisonneuve,Paris, 1991), n° 5, p.46.

Tirage à part de la Reoue de Linguistique, 15 avril 1897. J. Maison-neuve, Paris.

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« Aunque sea bien notorio, que los gloriosos Reyes deCastilla y sus predecessores, senoresquehan sido de Viscaya,hayan tenido de costumbre de jurar sus fueros y privilegios

con un pié descalço so e-1 arbol que dizen de la villa Guèr-nica, creo que los mas ignoran de quien pudo ser introdu-cida esta costu'mbre, como seatan antigua, y Viscaya nuncahaya tenido quien escribiesse de sus cosas. Y asi 10 que acercade este uso se ofrece que rastreat, es, que los de la Atolia,naciones de Greoia, solian en otros tiempos ir a. la guerra,

~y a. los semejantes actos publicos a. este de la jurar con el unpié descalço, segun escribe Euripides en Meleagro. Seine-jante costumbre tuvieron los Ernicos, cuyo nombre paréce

que semeja al de la comarca Guernica en Viscaya. »

Poça cherche ensuite à identifier ces nations étoliennesavec les Pélasges dont parlent Macrobe et Virgile, Énéide,

liv. VII, 684-90(Hernica saxa colunt) quos dives Anagnia pascit,Quos Amasene pater: non illis omnibus armaNecclypei currusvesonant: pars maxima glandesLiventis plumbi spargit; pars spiculà gestatBina manu, fulvosque lupi de pelle galerosTegmen babent capiti; vestigia nuda sinistriInstituere pedis; crudus tegit altera pero.

Je fais grâce à nos lecteurs d'une dissertation de Poça surles Pélasges, mais il revient à son sujet (fol. 52)

« Pues volviendo a nuestro proposito del un pié descalço

(que segun habemos dicho fue costumbre de los Pelasgos)

haUaremos que dello escribe muy longo Macrobio en el libro

quinto, capitulo octavo, donde testifica qne en su Eral ya sehabia desusado en Italiaestacostumbremuchos siglos atras,

y aun alli refiere'que Aristoteles que fue trescientos anosantes del advenimientode nuestro RedemptorJesu Christo, re-

1. Macrobius floruit circa A. D. 395.

Page 336: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

prebende en el libro de los Poetas a. Euripides en quantodejo esctiptti q ue los dichos Pelasgos se descalçaban el piéizquierdo- (porque segun su opinion) se de'scalçaban elderecho y no et, izquierdo. »

Poça déduit de ces passages que la coutume doit être trèsancienne, qu'elle doit remonter à une haute antiquité, où lescoutumes des Cantabres et des Pélasges étaient identiques.11 répète deux fois ce qu'il n'avait pas dit auparavant, quecettecoutume de jurer avec le pied nu est conservée jusqu'à

présent (hasta ahora, que hoy diase platica con admiraciÓn).Ilcite ensuite deux monuments où lacoutume des Cantabresde combattre avec un pied nu est représentée. L'une de cessculptures, dit-il assez vaguement, est« esculpidaenalgunosmarinoles antiguos de Italia ». L'autre, il l'a vuelui~mèmedanslemonastèrede Saint-Augustin, dans la ville de Bruges

« dondeen un rico retablo estan pintados en la capilla de losVizcaynos un Rey por una parte, y los ,Vizcainos por otra,debajo de un arbol, elun piédescalçoconsus lances, azagayas,y machetes, asi como le suelen jurar quando 10 reciben porsu Rey y Senor, como en esta forma recibieron a. los reyesdon Henrique, y don Fernando el CatÓlico. »

Dans la partie de cet ouvrage écrite en latin nous lisons,fol. 64:

« Ab his ego Pelasgis, ut credo apud nos adhuc visitatum,ut Principes altero pede nudo provinciam tum ingrediantur,tum sub divo adantiquissimae cujusdam arboris umbram, li-bertatem cum omnibus suis privilegiis sacrosancto jure-ju-rando confirment: de quibus idem Maro in octavo'

Pars epicula gestatBina manu, f ulvosque lupi de pelle galerosTegmen habent capiti, vestigia nùda sinistrfInetitnére pedis, crudus tegit altera pero.

1. Ce doit être le livre VU, 687.

Page 337: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

» Sic enim in omni deliberatione publicaprodibant, testeEuripide in Meleagro, et Macrob., ubi Sat., cap.18, lib. V,

quamquam Aristot., libro de Poëlis dextrum non sinistrumpedem discalciari solitum contendat. »

Ces passages du .'lléléa~re d'Euripide et du LiberdePoëüsd'Aristote ne nous sontconnus que parlacitation deMacrobe.Cependant ces fragments manquent dans les premières édi-tions imprimées de Macrobe. quoiqueen général les citations

y soient toutesexactement reproduites dans l'édition princepsde Venise, 1472, dans celle de Paris,1524, et dans celle deLyon,1532, la place est restée vide surles pages. On les trouvedans l'édition de Lyon,1538, « multis in locis aucta », et je

suppose, dans toutes les éditions subséquentes. Il est tout à

fait probable que Poça a fait usage de l'édition de Lyon,1532, où le texte gree deces citations n'est pas imprimé. Nousles donnons ici d'après l'édition de Leipzig, l'i74.

Macrobe (Saturnaliorum, lib. V, cap. 18, Lyon, 1532,

commentantVirgile, lib. VII, 690 (ut supra) dit":

« Hunc morem in !talia fuisse, utuno pede calceato,alteronudo iretur ad belluin, nusquam adhuc. quod sciam reperi

sed eam Grsecorumnonnullis consuetudinemfuisse, locupleti

auctore jam palam faciam. » Ensuite il cite la « tragedia quaeMeleager inscribitur »

T£Àœ¡.twv 8~ xpucoûv &£'Z'v 0 1ttÀ't1j~ F.7rt

DpM)À'l¡ ¡.tœ 6'l¡po~, ~3ô~pucc 8' ËO"te:~£v xâpx,

1:œÀœ¡.t t vœxoa¡.t')v 1tœ'tp loœ 't't¡ v £&ci¡.t1t£Àov.

KÓ1tp~8o~ 8~ ¡.tlO"l}¡.tœ, "Apxœ~ '9TaÀxv~, ~cûvaç

Kat 'tÓ;' Ëxouaœ, 1te:Àsx£w~ 8's 8iczo~ov

rtvuv Ë1tœÀÀ' 'Ayxœ10~ oi, Õ~ 8£O"tlou

n:d8£~ 'to Àœ£o'l 't,xv0c civap()uÀoL 7CO86q.

Tô 8' Év 1t£8iÀot~ wç ÈÀœTpl~ov y6vu6ç Õ~ 1t~atV AIrwxo .1; V6~toç.

Page 338: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

» Animadvertis diLig-entissi:Q1e verba Euripidis a Maronet 'servata'l Ait enim iile

To, loccèv Yxvoç cXVŒPbUÀOt 1tOÔOç

» Et eumdem pedum,nudum Virgilius quoque digit

Vestigia. nuda sinistri,Instituere pedis.

» lnquaquidemre, quo'nobis studiumnostrum magiscom-prÓbetur, non reticebimus rem paucissimis notam, reprehen-sum Euripedem" ab Aristotele, qui ignorantiam illud Euri-

-pidis fuisse contendit, Ætolos non laevum pedem haberenu-dum,.sed dextruté. Quod néaffirmempotius quam probem

Aristotelis verba ponam ex libro, quem de poetis secundosuprascripsit. In quo de Euripide loquens, ait

» T-oùç ô~ 9se~c6v x6pouç Tôv ~ÈV ŒptèrtepO\1 aô8a cpr~aiv Eûpc~rsf8~ç

H.Oe"tv ~xo~œ~ ŒVU1tÓôe'to", Àl'yet ~oûv 8'tt 'tO Àctto" txvoç ~axv &&p-

gulot 1tOÔOç, 'to 8' ~Y 1teôlÀotç wç É7~acpPE~ov Ydvu EXocev. wç Ô';¡ 1tŒV

,'to 1 IVM"IOV ËAoç 'ta 1ç 'At'twÀo 1ç 'C'V 0 (-lÈ'I Y&P 3cPc~ePôv Ù7rG888iVtat 'tOV

'ôè 8F.Etèv 8Fi Y&P o!(-lctt ~ôv i¡y01(-lEVOV F"xetv ~7~acpPôv,

&'ÀÀ' 1)Õ 'tov è(-l(-lEVOVU. »

Outre ces textes cités car Macrobe, il y a d'autres auteursclassiques qui parlent de cette coutume d'avoir une jambedécouverte. Thucydide, Historiae, lib. III, 22, en racontantle siège de Platée, dit des assi~gants;

« TRactv 81~ e:ÕCTtctÀE1c; Ts Tn 61tÀlaEt xœt "'tov âpca~epôv 7t48OC (-lÓ'IOV

67rO8E8S~tiVOt ciacpctÀe:lœc; ëve:xœ 'tiiç 1tpoç'tov m¡ÀÕv. »

Tite-Liveparlant des Samnités, liv. IX, chap. 40, dit « Etsinistrum crus ocrea tectum » Juvénal aussi, liv. II, ~S'at.,VI, 256-7 « Crurisque sinistri Dimidium tegmen. » On citeaussiVégèce, De Re mi~itari,1,20. Parmi les modernes, nous

Page 339: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

avons Sir Walter Scott dans le Lay of the Lâst Minstrel,canto IV,18, il dit des soldats mercenaires du Rhin

Each better knee was bared, to aidThe warriors in the escalade.

Nous trouvons,dans un autre ouvrage de Sir Walter Scott

encore un exemple à l'appui de notre thèse. Dans The Mo-nasterg, quand le héros Halbert Glendinning fait l'évocationde la Dame Blanche (the White Lady) «He cast the lèathernbrogue or buskin from his right foot, planted himself in afirm posture, unsheathed his sword, and, first looking aroundto collect his resolution, he bowed three times deliberatelytowards the holly tree, and as often to the little fountain. »Chap. x, à la fin. Et après, chap. XVII, la même évocation est'répétée avec les mêmes rites « He dréw his sword undidhis buskin from lzis foot, bowed three times with deliberationtowards the fountain, and as often towards the tree1. »

Quoique poète et romancier, W. Scott a l'habitude d'êtreexact dans ses descriptions de mœurs. Il aura dû emprunterces traits à quelque chroniqueur allemand ou à d'anciensdocuments. Dans les tableaux japonais, on voit souvent lesguerriers, avec armure complète d'ailleurs, escaladant lesmurs avec les pieds nus et se servant bien de leurs orteils.

A la nouvelle et joyeuse entrée de l'archevêque d'Auchdans sa ville épiscopalè~ le baron de Montaut, premier barond'Armagnac et de Fézensac, devait aller à sa rencontre sur lepont de la ville, la tête découverte, un pied et une jambe

nus, et le conduire sur son mulet jusqu'à Sainte-Marie, et

1. Cf. Green's, Short Histor~ of the English People (Macmillan, Lon-don, 1892). vol. l,p. 315, il y a une gravure représentant des soldats dupays de Galles avec un pied nu dans un cas c"est le-pied droit, dansdeux autres c'est le pied gauche qui est nu. Ces dessins sont d'unms. du XIII' siècle au PublicRécord O,~`ice. Je dois ce renseignementau Rev. A. Clark.

Page 340: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

ensuiteà la chaire et au trône dans la cathédrale, Monlezun

nous raconte lesentrées joyeuses de trois archevêquesd'Auch

le cardinal de Clermont-Lodève (octobre 15121); le cardinalde Tournon (21 décembre 1547 i) et Léonard de Trappes3(6 novembre 1597). Dans tous ces cas, le baron de Montautjoua son rôle. Quant au dernier, nous lisons: « Sur le pontils trouvèrent le jeune de Montaut-Voisins, conduit par lesieur de Miremontet suivi d'énviron quarantegentilshommestous ceints d'une écharpe verte et appuyés sur un bâtonblanc. Le baronoffrit au prélat les serv^ices que la maison deMontant devait aux archevêques à leur entrée. Le prélat luifit observer que le baron devait avoir, pour conduire l'arche-vêque, la tête'découverte, et un pied et une jambe nus Le ba-

ron prétendit, que, d'après les actes gardés dans son château, ilsuffisait qu'il mltà un de ses pieds une semelle de cuir attachéepar-dessus avec des lacets. La contestation fut asse.z longue.Le baron n'avait pas dans cette cérémonie, comme le voulait

Mgr de Trappes, un pied et moins encore une jambe upe;mais en revanche, ce que ne voulait point le jeune baron, ilavait la tête nue et à ses deux pieds la sandale espagnole.Á la fin, rarchevêq,ue se relâcha de ses prétentions. Il déclaraqù'ayant égard au ~eune âge du baron, au froid de la saison

èt àux boues occasionnées par-les pluies, il se contentait de cequi se faisait, sans toutefois vouloir rien préj uger, pour sessùccésseurs. »

~i,emarquez que ces incidents avaient lieu en 1512, 1547

et 1597. L'ouvrage de Poça fut publié en 1587.

Revenons maintenant au texte de Poça. Il dit, fol: 38, de

« los hombres Vizcaynos de la montana » qu'ils ont « las

1. Histoirede la Gascoigne, depuis les temps les plus reculés jusqu'à

nos jours, par l'abbé J.- J. Monlezun, 6 vol. et supplément in-8°,Aûch, 1849, vol.. V, 132.

2. Vol. VI. 418.3. Supplément, 618.

Page 341: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

piernas descubiertas, y en carnes hasta los muslos » fol. 39,il parle « del pié descalço con que (se~gcca J'ama) los Senoresde Vizcayajuran los fueros y privilegios d'ella n.

Remarq uez ici « segun fama », c'est-à-dire, comme on ledit. Il ne parait pas avoir jamais vu un seul seigneur prêterserment de cette façon. Mais fol. 50, il parle « de la antiqui-sima costumbre del un pié descalço. colt que los SeÎÍoresde Vizcaya lienen de costumbre de jurar los fueros) fol. 53,

il parle « del pié descalço, con que los Senores de Vizcaya sonrecibidos hasta ahora u. Il dit aussi que « dicha ceremonia de

que tratamos, se confirma don (sic, con ?) una fama publica'inmemorial antiquisima que oy dia dura en Vizoaya». Ilrapporte à l'appui de son dire deux sculptures, l'une en Italie,qu'il n'a pas vue, l'autre en la ville de Bruges, en Flandre,qu'il semble avoir vue, mais qui n'a aucun rapport certain

avec la Biscaye et les Basques.Il avoue « para esta historia no haya como no hay que yo

sepa autor autentico, salvo la inmemorial, y los indici os yadichos ».

Parlantdu tableau de Bruges, il ajoute « asi como le suelen

jurar quando le reciben por su Rey y Senor, como en estaforma recibieron ci, los Reyes don Henrique y don Fernando

el CatÓlico ».Il est intéressant de remarquer que, suivant D. Juan

E. Delmas, Guia hislôrico-descripliao del Viajero en el

Senorio de Viscaya (Bilbao, 1864, pp. 203-4), il y a encoreà Guernica un tableau représentant la prestation de sermentde Ferdinand le Catholique et

Encima del altar y sobre la,

gran puerta de ingreso del Salon, casi al par de esta galeria

de retratos, hay colocado un curiosisimo cuadro pintado al

Óleo que representa la jura de los fueros por el catôlico Rey

don Fernando V, rodeado de los hidalgos mas ilustres de

Vizcaya, de las damas, y del pueblo. »

Page 342: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

En note, p. 204" nous lisons « Este histÓrico y muy cu-rioso cuàdro fué hallado en LÓndres en una taberna, y 10

compro el capitan de un buque mercante que 10 regalÓ a supais asi que piso sus costas. »

Mais on na dit rien du pied ni du roi ni des nobles sanschaussure dans ce tableau. Nous connaissons plusieurs récilsde ce serment de Ferdinand le Catholique nulle part il n'est

fait mention- du pied déchaussé. J'ai examiné bien des fueros,des cartas-pueblas, pour les provinces basques et pour la Na-varre~ Nous avons d'es récits' très circonstanciés des sermentsprêtés par les rois de Navarre le jour de leur couronnement.

Il y en a aussi des seigneurs de Biscaye. Mais dans aucunrécit je n'ai trouvé trace d'une cérémonie qui aurait consisté

à retirer sa chaussure, et à prêter serment avec un pied nu,soit le pied droit, soit le pied gauche.

Andrés de Poça, il me semble, ne donne aucune preuvesuffisante àl'appui de ce qu'il affirme. Toute sadémonstration

repose sur des oui-dire, des racontars de gens âgés, et surle bruit public. Les citations de Virgile, d'Euripide, d'Aris-tote ne se rapportent pas à la même chose. Ils parlent tousd'une habitude de guerreou dechasse, qui n'a aucun rapportavec l'acte cérémonial d'un serment prêté nu-pied.- Maisquoique nous estimons qu'Andrés de Poça n'a pas du toutprouvé l'usage de cette cérémonie chez les Basques, c'estnéanmoins un fait réel et historique.

Oter ses chaussures en entrant dans une enceinte sacrée,c'est une coutume rituelle commune aux Juifs, aux Maho-métans et à beaucoup de races orientales. C'est d'abord unemarque de respect et d'humilité que de se mettre nu-piedsdevant Dieu, comme un esclave devant son mattre; c'est unhommage à la- pureté et â la sainteté d'ôter ses souliers ou

ses sandales avec toute la poussière et toutes les impuretésqu'ils ont ramassées dehors" et de faire son entrée propre et

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pur' daus le sanctuaire vénéré. « Solve calceamentum ode

pedibus tuis locus enim, in quo stas, terra sancta est »(E~ode, III~ 5) c'est un raisonnement compréhensible à toutle monde. Mais de là à une prescription formelle de'découvrirseulement, soit le pied gauche, soit le pied droit, il y a ungrand pas à faire.

Les Hébreux avaient coutume d'Ôter le soulier du frère oudu parent qui refusait de seo marier avec la veuve de son frèreou de son parent le plus proche, et de cracher à sa figure. Dececi nous avons un exemple bien connu dans le mariage deRuth et Booz, les aïeuls du roi David (Ruth, w, 7-8. Cf.Deut., xxv, 9-10). Mais dans ce cas, le (C

discalceatus » étaitflétri pour toujours. De sorte que ce souvenir ne vient pasrenforcerl'argumentationde Poça. Une veut pas certainementdire q ue le seigneurde Biscaye se déshonore.

Il parait, mais je ne sais si le fait est bien exact, quedans les rites maçonniques il y a des cérémonies où l'on seprésente un pied déchaussé, mais je ne crois pas que lesBasques seraient bien satisfaits d'apprendre que leurs sei-gneurs étaient sacrés suivant les rites maçonniques' Du-cange (Glossariuna, s. v. Jurare) fait mention de l'habitudequ'avaient les Juifs de Magdebourg, au' moyen àge, de jurerquod nudipes stet, pronuntiabiturque sibi juramentum n.Maisje n'en trouve aucune tracedans les serments très curieuxdes Juifs d'Espagne et de Navarre.

En somme, il serait peut-être intéressant de rechercherl'origine de cette coutume d'aller à la guerre ou à la chasseavec un pied nu, il le serait davantage encore de voir si

1. D'aprèsClavel, HistoirepittoresquedelaFranc-~llaçonneric, Paris,1841,p. 12 et ss., « le récipiendaire doit avoir le pied et le bras gauchedécouvert! ainsi que le genou droit; et le pied droit est chausséseulement d'une pantoufle. Cela ne se fait plus aujourd'hui, enFrance du moins. (J. V.I

21

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vraiment quelque part on prête serment de cette façon cesont là des questions de folk-lore. Mais au moins qu'il y enait des preuves plus concluantesque les allégations d'Andréde Poça rien n'est moins constaté que son existence chezles Basques de Biscaye ou d'ailleurs. Il faut jusqu'à plusample informé la classer parmi les légendes de la Couvade,d'Aitor, des Maitegarris, etc., etc., dues aux imaginationspoétiques de Chaho et autres fantaisistes.

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Il est si difficile de détruire une erreur qui a pris racine,il faut si longtemps pour persuader qu'on s'est trompé dans

une affaire très simple,' que j'invoque ce fait seul pourm'excuser d'entretenir la Société des sciences- et arts deBayonne d'une chose aussi absurde qu'un charme de sorcel-lerie.

J'ai acquis dernièrement un excellent livre, Ethnodénie del'Aquitaine primitive, par A. Castaing (Maisonneuve,Paris; 1885). J'y lis, p. 242-243

» Il existe à Rochemaure (Ardè"che), dans une chapelle

» Saint-Laurent, une inscription où se trouve-le mot Arei~o.

» En la signalant, M. Wescher (Mém. des Antiquaires» deFr., t. XXXV) faitobserver qu'il l'a retrouvée, avec sa» traduction, dans le Ms. 2511 du fonds grec, fl, 60. Je mets

» en regard le texté latin, la reprodùction et la traduction,

» grecquesS. A. T. 0. R.A. R. E. P. O.T. E. N. E. T.O. P. E. R. A.R. O. T. A. S.

SatorArepoTenetOpera

Rotas

Ho Speirôn4.rotronKrateiE rgaTroehôus. »

Ces mots grecs veulent dire « Celui q ui sèmeune charrue

l. B~tlletin de la Société des sciences et des arts de Bayonne, 1898.

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gouverne les œuvres les roues. » Ces mots pris ensemble,n'ont signification aucune. M. Castaing remarque

« Arepo signifierait donc la charrue ou le labourage. La» formea pu être légèrement modifiée, pour faciliter l'exécu-» tion de Ita~rostiche carré que forme le texte latin Are-» pennis, d'où vient Arpent, est un mot gaulois (Columella,»V, 1), et il indique l'idée de labourage. » ¿ML~ ({ r~v,

Au mois de mars 1882, j'ai reçu du folk-loriste cé~ébre,

Dr Reinhold Kohler, de Weimar, un tirage à part duVerhandlungen, de la Société d'anthropologie de Berlin,15'octobre 1881, sur le « Sator-Arepo Formel' p. Il y donnedes preuves de son antiquité, dès les temps des anciensRomains. On l'a trouvé écrit rudement sur les murs d'unemaison romaine à Cirencester, en Anghaerre il parait, àplusieurs reprises, au moyen âge, en Franceet en AUemagne.Comme nous l'avons vu, il a été traduit en grec dans unmanuscritde laBibliothèquenationale à Paris. Au XVIe siécle,on le cite dans un ouvrage médical comme un fébrifuge~xcellent dans la Thuringie, on le donne à avaler auxvaches prêtes a mettre bas il passait même l'Océan, et leslaboureurs du Brésil y apportaient grande foi comme remèdecontre la morsure des serpents. Mais qu'est-ce que c'est ?

D'où provient-il ? Quelle signification a le mot mystérieux'Arepo I'

Le Dr Reinhold Kohler termine son savant mémoire avecces mots

« Dans mon opinion, la question n'est pas éncore décidée,

» car si Sator, Tenet, Opera et Rotas sont des mots latins» connus, Arepo, au contraire, n'est pas latin, et il n'a pas» encore reçu une explication raisonnable. »

1. Voyez la revue anglaiso The Academy n8 518, p. 250, avri l'8, 1882.

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J'avais laissé la brochure ouverte sur ma table, sansaucune intention de m'en occuper sérieusement, lorsque, enla ramassant pour la placer dans ma bibliothèque, je fussaisi par le mot T. E. N E. T. Tiens me suis-je dit, cemot peut se lire le mémé en deux sens, de droite à gauche etde gauche à droite. Je me rappelais tout de suite les histoiresde la Messe noire et du Pater nosler dit au rebours par lessorcières. Je regardai. La solution était trouvée. Le Salor-Arepo Formel n'était que ces trois mots Salor, Opera,Tenet, lus alternativement de gauche à droite et de droite àgauche, et répétés. Tenet n'est pas écrit deux fois, parcequ'il n'est pas'nécessaire, on peut le lire également de droiteà gauche ou de gauche à droite, réciproquement l'acrostiche

est carré dans le même sens. Arepo n'est que le mot Upe~·a,

lu au rebours Rotas est Sator, lu au rebours.J'explique la raison, s'il y a aucune raison .d'être, de ces

formules de sorcellerie, tout simplement par ceci Si de ré-péter une prière ou un rite d'une façon doit plaire au bon

Dieu, de le répéter dans le sens contrairedoit nécessairementplaire à l'Esprit malin si on le répète des deux façons à lafois, alors on se recommande également à toutes les deux puis-

sances du bien et du mal. Car toute sorcellerie ou magie a

sesfondements dansle dualisme.Je suppose donc que les mots Salor, Opera Tenet, -le

semeur,ou le Créateur possède (ses) œuvres, forment unephrase tirée de quelque hymne ou rituel païen chanté comme

action de grâces pour les moissons. Le rituel d'une religion setransforme facilement en formules magiques de son succes-seur. « Une religion ne se retire jamais du cœur d'un hcimme

ou du sein d'un peuple, sans laisser derrière elle un longsillage de superstitions » (F. Monnier, Alczcin et Charle-

ma~qne p. 219; Paris, 1804). J'en trouve un exemple dans ceque des prêtres catholiques, en Angleterre, m'ont raconté. Il

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n'étaitpas rare qu'ils fussent accostés par des fermiers oulaboureurs protestants leur demandant de l'eau' magique(c'est-à-dire de l'eau bénite) pour guérir leur bétail malade.Par une équivoque sur le mot elle', en parlant d' une vachemalade, un digne prêtre fit une longue course, la nuit,pendant une forte tempête, à travers les landes de Yorkshire,pour se trouver introduit,avec force révérences, dans l'écurieoù gisait la bête malade.

La même chose se pratiquait dans les Pyrénées. Voyez lecurieux chapitre du P. Amilia: L'examen de las aupersticius

As fait de pa 'seignat o d'aigo benasidoPer gari toun bestial de pesto o de pepido ?

« As-tu fait (usage) de pain bénit ou d'eau bénitePourguérir ton bétail de la peste ou de la pépie ? »

(Le Tableu de la Bido p. 236).

Le passage que j'ai éité'de l'ouvrage de M. Castaing, quim'a servi de texte, nous montre aùssi comme il est facile dese tromper en étymologie, même avec des mots qui n'existentpas dutout..

Je vous demande pardon, Messieurs, de vous avoir entre-tenus de ces trivialités mais, comme je l'aidit au commence-ment, il vaut bien la peine de dénopcer les erreurs, toujoursrépétées, aussi longtemps qu'elles persistent.

1. En anglais les êtres humains sont masculins ou féminins, he oushe les bêtes, le plus souvent, sont neutres, it. Le bon prêtre secroyait mandé pourles derniers offices à quelque femme in e~tremis.

Page 349: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

LES BASQUES DÉFENDUS EN 1788

PAIR UN ANGLAIS CONTRE LES CALOMNIES

D'UN ESPAGNOL ËV~QUE ET CARDINAL

Notre collègue, M. le lieutenant-colonelW. Hill-James, a eu

l'obligeance de me prêter dernièrement deux volumes assez

rares, qui se rapportent à un épisode romantique de l'histoire

de l'Espagne. HIes a trouvés l'étè dernier chez un bouquiniste

d'Édimbourg. Ces deux tomes ont pour titre The Historg

of the reign of Peter the Cruel, King of Castille and Leon

(L'Histoire du règne de Pierre le Cruel, roi de Castille et de

Léoa~, by John Talbot Dillon Esquire 1 (deux volumes,

~London. Printed for VV. Richardson, 1788). Il y a une pré-

face de XXIX p. Aux p. xxn à xxv de cette préface se

trouve le passage dont je désire vous entretenir. L'auteur

vient de parler des sources de son histoire, des chroniqueset

des autorités dont il a fait usage. Il poursuit

« C'est tout à fait malgré moi que je me trouve placé dans

1. John Talbot Dillon, gentilhomme irlandais (1740-1805), a écrit

d'autres ouvrages, Trar,els through Spain 1 Londou, 1780) et Letters

fi-oin an En~lisli TraoeZler in Spain in 1778, etc. (London, 1780). 11

séjourna' longtemps en Espagne et fut lié avec beaucoup des litté-

rateurs de la cour de Carlos Ill, avec les deux frères Don A. et

i)on G. Maÿans et Siscar, avec Don Antonio Pous, et surtout avec

son compatriote, l'Irlandais D. Guillermo Bowles, l'auteur de l'Intro-

duccion a la Histori.~ ~r'~ttural ,y a la GeoOr·n~Ca Fisica de Espana,

Madrid, 1775. Comme Dillon, G. Bowles fait de grands éloges des

Biscayens. Voyez pp. 294, 203, 308 et 309 de son excellent livre.

Après avoir quitté l'Espagne, Dillon alla à la cour de Joseph Il, à

Vienne. Il fut créé baron du Saint-Empire romain en 1790, et

baronnet en 1801. 11 mourut à Dublin en 1805.

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la nécessité de faire une protestation contre la crédulité desemblables ,écrivains. Bien plus tard, dans le siècleplus civi-lisé de Ferdinand et d'Isabelle, un autre exemple nous a étéprésenté. L'évêque de Gérone a dédié à ces monarques sonHistoire d'Espaç~ne. Parlant des Biscayens, ce peuple géné-

reux et intègre! lequel sait unir la pratique de toute obligationreligieuse et morale avec celle des vertus sociales et civiquesl'évêque de Gérone les accuse positivementd'être encore dansla même condition où ils étaient au temps de Strabon, c'est-à-dire de n'avoir pas de Dieu de ce qu'ils professent lareligion de leurs lèvres seules, qu'ils n'en ont pas dans leurscoeurs que tous leurs prêtres sans exception ont des con-cubines, sans lesquelles on prétend qu'ils ne puissènt pasvivre, et qu'il était tout à fait nécessaire d'en avoir pour con-vertir leurs maris.

» Telles sont les expressions d'un évêque catholique à lafin du xve siècle. Il nous a même raconté la circonstance qui

lui causa un tel degré d'irritation, et qui développa en luil'extrême sévérité ou plutôt l'intolérance de ses opinions. On

ne peut avoir aucun doute sur le fait, car il en était témoinlui-même.

» Il parait que les Biscayens, qui habitent un pays rude,où la plus grande parcimonie et la frugalité sont nécessaires

pour cultiver leurs montagnes, avaient pris la résolution de

ne pas permettre qu'aucun évêque fit sa résidence parmi eux.Ils n'étaient pas capables de lui fournir les revenus néces-saires pour qu'il pût vivre dans le style magnifique de cesprélats selon les moeurs de Castille. Ceci avait été reconnu

comme un de leurs privilèges irrécusables. Or, lorsque en1477 le roi Ferdinand faisait une tournée dans la Biscaye, ilavait amené avec lui l'évêque de Pamplone. Mais aussitôt

que le roi fut entré dans le domaine de la seigneurie deBiscaye, on lui apprit qu'il était contraire à leurs privilèges

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de permettre aux évêques de venir officiellement dans leursterritoires. Sur quoi le roi généreux, le renvoya sur-le-champ.Le peuple, pour mieux exprimer son indignation de cetteviolation (de leurs privilèges), arracha le sol partout oùl'évêque avait passé, le brûla, le réduisit en cendres et lejeta à la mer. Si on faisait tOllt cela par superstition ou pourdiscréditer les choses divines, comme affirme l'évêque, ouseulement en défense de leurs droits civiques, je le laisse àdéciderà l'im partiali té de mes lecteurs 1. »

1. De Galitis vero Hispaniæ refert Strabo libro tertio de orbis situ,quod Gallecii Hispaniæ olim nullum habebant Deurn. Quod Biscaiæusque ad bæc tempora perdurat, quæ regio intra Galliciæ fines sitaest et licet ejusdem incolae Christianae religionis cultores appellenturabillis tamen nullum venerari colique Deum, certum est, solumqueChristianam religionem labiis profitentur Apud illos Presbyternullus recipitur non habens concubinam, arbitrantur enim neminémposse a carnalibuscontinere, quod quum non possent, dicunt necesseesse presbyteros ad parochianorum uxores converti.

Ad Biscaiæ regiotieni uullus ex iostitutione episcopus adire protest.Quinimmo horrendam rem narrabo quam ipse vidi. Quum enim subCaliguritano episcopo sint, ad illos tamen nec alius episcopus etiam,

pro sacramentalibus adire potest. Immo quum anno 1477 FerdinandusCastellæ rex inclitus in Biscaiam intrasset, adducens secum Pam-pilonensem episcopum, occurrentes provinciales dixerunt hoc essecontrarium suis legibus. Itaque ne tumultus fieret, episcopus ab regeremissu¡; est. Tantaque ex adventu episcopi se affectos molestiaostenderunt, quod ubicunque episcopus eorum solum calcasset, pro-sequeutes illius vestigia, ac erasa terra pulverem colligentes maximocoadunatum pulverem igue cremarunt, illiusque cineres in quamdamsuperstitiouern ac divini honoris ignominiam in mare projecerunt.

Johannis Episcopi Gerundeusis Pa~~alipomcnonHispanice libro II deGalitis. Don Juan Margarit (1421-1484), natif de Castell-Empurdau,Catalogne, évêque de Roussillon, 14j3-1162, évêque de Gérone,1462-1484, fait ~ardinal le 15 novembre 148~, eut une granderenomméeparmi les théologiens espagnols. On l'appelle ordinairement ElGerundense, du nom de son évêché, Gérone. Son ParalipomevonHisparaiar~ a eu deux éditions, à Granada en 1545, et dans la collection

Hispanice illustratce, d'Andreas Scholl, 4 vol. in-folio, Francofurti,1603-1608. L'érudit jésuite R. Il. F. Fita a fait d'El Get-undense y la~spana primitica le sujet de son savant discoursde réception devant

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Il y a dans ce récit deux choses bien distinctes l'une, lerapport de don Juan Margarit, évêque de Gérone, sur les

moeurs ecclésiastiques des Basques depuis les temps pri-mitifs l'autre, la narration d'un fait dont il a été lui-mêmetémoin en 1477.

Examinons ces deux points par ordre

I. Il est d'abord évident que l'honorable M. Dillon atout à fait mal traduit une des phrases latines de Don JuanMargarit Quod guarn non possent, dicunt necesse esse

presbr~teros ad parochianorum u~ores converti, ne peut pasdire « qu'il était tout à fait nécessaire d'en avoir pour pouvoirconvertir leurs maris » mais plutôt« puisqu'ils ne peuventpas le faire (i. e. vivre sans concubines), on dit qu'il est denécessité que' les prêtres se seraient tonrnés vers les femmesdeleurs paroissiens ».

Plusieurs auteurs, et à différentes époques, ont répété cetteaccusation contre les ecclésiastiques basques. On en a parléd'une manière générale au canon vn du concile de Val-ladolid, 2 août 1322. Un auteur anglais récent nous en parlede cette façon « Les actes de ce .concile nous sont encoreintéressants sous un autre point de vue. Ils nous présententle premier témoignage authentique d'une coutume qui s'estrépandue plus tard en d'autres endroits une coutume suivantlaquelle les paroissiens obligeaient leur curé de .prendre unecompagne, afin que la vertu de leurs familles soit à l'abri deleurs poursuites 1. Le canon vu du concile dit « Quia vero

la Real Academia de la Historia, 6 juillet 1879. Il y a joint, commeappendice, un ouvrage inédit du cardinal, le Templum Dei. Le caputXXIII a pour titre Quomodo imperialis, regia, seu seculanis potestasdependeat a Sacerdotio. On peut juger par cela comme la manièred'agir des Biscayens envers l'évêque de Pamplona dut paraître détes-table à un prélat qui professait de telles opinions.

1. An historical Sketch of sacerdotal Celibacr~ in the Christiao,Church, by Henry C. Lea, 2r édition, Boston, U. S. A.,1884, p. 310.

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nonnullilaïcorumclericos corn pellunt in sacris praeeipue ordi-nibus constitutos, ut aliquas mulieres in concubinas recipiant

et cum eis concubinio publice vivant contra decorem ordinis.clericalis, et sacrorum canonum institua nos iniquitatemhujusmodi detestantes excommunicationis sententiae ipsofacto decernimus subjacere q uemlibetcuj useurnq ue status autconditionis existat necnon universitatem seu communitatemquamlibet sententiainterdicti, qui seu quae personamquamvisecclesiasticam duxerit compellendam ad recipiendam in con-

cubinam mulierem quamcùrnque, sentencias vero pr~dictasin Synodis Episcopalibuset frequenter in Ecclesiis parochia-libus volumus et præcipimus publicari t. » Cette affaire

revient souventdans les conciles et dans les copiés espagnolsjusqu'en 1429 i. Rozmital, un voyageur de Bohême enEspagne en 1465, écrit des provinces basques, « Le clergé à

la campagne a des femmes, et ils en ont appris bien du mal 1. »

En 1477, nous avons l'affirmation de l'évêque de Gérone. En

1518, 16 avril, la reine Jeanne la Folle et son fils Charles-

Quint, dans une lettre insérée dans les Fueros de Biscaye,

se plaignent du clergé « Lesditz ecclésiastiques s'adonnent

et s'obstinent en péchés publiques,ayant dans leurs maisons et

à leur table des servantes, etc. 1 » En 1818, J.-A. de Zamacola

écrit « Les Biscayens primitifs, sans doute dès le temps

qu'ils se sont convertis à la religion chrétienne, se firent une

1. Collectio Maasima Conciliorum orrtnium Hispaniae. Tomu~ II,

p. 559-580. Romae, 1694.2. Voyez Lea, 301-312. Corlés de Leon y de Castilla, introduccion,

por Don Manuel Colmeiro, Cortés de Soria, 1380 p. 346. Madrid,1863.

3. « Los clerigos en el campo tieuen mujeres, y han aprendido mal

de ellas. »Viages por Eapanac. Traduoidos, anotados, por D. A.

Maria Fabié. Madrid, 1879.4. ci Los dichos clerigos estan metidos e obstinados en pecados pu-

blicos, teniendo mancebas a pan e cuchillo en sus casas, etc. e Historia

de la Legislatiorz de Espana, por A. Marichalar y Cayetano Man-

rique, vol. II, p. 306, 21 édition, Madrid, 1868.

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loi qui e'xistait il y a 'quelques années dans un vieux,fueroqui se trouvait dans une bibliothèque de Valladolid, parlequel il était prescrit que, comme les ministres du culte nepouvaient"pas se marier, on permettaità chacun d'euxd'avoirune barr·a~ana, puisqu'ils étaient hommes comme les autres,.et pour que les femmes soient à l'abri de leurs poursuites;mais bientôt les ecclésiastiques du pays faisaient disparaitre

des soupçons au moyen de' la vertu, du bon exemple et de laretenue avec lesquels_ ils se comportaient alors, et lesBiscayens même ont supprimé depuis cette loi de leurscodes et fueros dan5 les exemplaires et les copies qu'ils onttransmis à la postérité 1. » A. Chaho, dans son Voyage enNavarre, dit « Saint Émilien venait reprocheraux chefs desVascons leurs péchés et la loi qui permettait,aux prêtres dela Biskaye d'entretenir une agape (baragana),une chambrière(guelhari). Et la loi enjoignait aux prêtres d'épouser une·guelar·ié ou ehambrière, règlement sage qui eut pour effetd'entretenir la pureté des moeurs publiques 1. »

Je ne sais rien des reproches de saint Émilien dont parlé

1. fi: Los antiguos Biscaynos sin duda de los tiernpos. que abrazarou lareligion christiana, hicieron una ley, que aun éxistia pocos anos ha encierto fuero viejo que se hallaba en una biblioteca de Valladolid, por laque dispusieron que re!'pecto que los ministros de culto no podian sercasados, se permitiese à cada uno de ellos tener una Barragana (54)

puesto que erau bombres como los demas, para que las mujeresBizcaynas estuviesen libres de sus persuasiones:pero prontolos eccle-siastictis delà tierra desvanecieron esta ~ospechas, por medio de lavirtud, exemplo y moderacion con que se comportaronpor entonces,y los Bizcaynos mL4mos suprimierou despue.s esta ley de sus codigos y

fueros en las copias y las trastallos que ban pasados à la posteridad.o

(, 54 Barragana, concubina ô mujer para tod.o uso dentro de sucasa. »

Historiadc las Naciones Bascas de una y otra parte del PirineoSeptentrional, por D. J. A. de ~amacola, Deprat. Auch,1818, 3 vol.,II, p. 305.

2. Voyage enNaoarre pendant l'insurr·ection desBasques11830-1835).

par J. Augustin Cbaho. ~espès, BaYOl~ne, 1836, pp. 1~~ et 3W.

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Chaho mais je crois que tout ce qui provient de l'évêque deGérone', de Zainacola et de Chaho sur cette loi se rapporte

seulement au canon vn du concile de Valladolid en 1322. Lalettre de Charles-Quint nous montre l'usage subsistant jus-'

qu'en 1516 mais cette mauvaise habitude avait complète-ment disparu entre, l'année 1516. et l'année 1788, quandDillon écrivait.

Il. Regardons maintenant l'action des Biscayens enversl'évêque de Pamplone. Est-ce superstition et mépris des chosesdivines,comme dit l'évêq ue de Gérone ou est-ce le patriotismeet la défense de leurs privilèges, comme dit M. Dillon, qui

fut le motif de cette procédure si étrange des Biscayens ?

D'abord les Basques sont incontestablement une des popu-lations les plus religieuses de la France et de l'Espagne. EnFrance, ils sont comme les Bretons, mais avec moins depratiques superstitieuses. Qui dit Basque, dit catholique.Nous trouvons ce trait dans la première description que nousavons des Basques, celle du pèlerin Picard à Compostelle,auXIIe siècle. Le voyageur fut très prévenu contre les Basques,il ne les aimait pas. Néanmoins, il rend témoignage à leurgrande piété et à leurs habitudes religieuses'. Mais si lesBasques sont véritablement religieux, ils ne sont pas pour

1. «In decimis dandis legitimi; in oblationibus altariumapprobanturPer unumquemque enim diem ad eccle~iam Navarrusvadit; autpanis,aut vini, aut tritici, aut alicujus s~bstantie oblationem Deo facHo » Re-cuerdos de un oiaje a Santia;lo de Galicia, por el P. Fidel Fita yD. A. Fernandez Guerra, p. 58, col. 2, note 1. Madrid, 1880.

Pour les temps actuels, nous pouvons invoquer le témoignage in-contestable du R.P. Dom Pierdait, prieur de l'abbaye de Silos.Dans uneétude sur le Régime du conr:ouns dans les diocèses cl'Espagne, qui

a paru dans la Reoue du Clergé français, 1er décembre 1000. et15 février 1901, p. 625, note, il dit: « Cette décadence des pratiques

religieuses est beaucoup plus fréquente en Espagne qu'on ne le sup-pose. Les provinces basques et la Nav,arre seules sont fervel1t~s j lesCastilles conservent en général dans les campagnesla t~dition de la

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cela plqs dociles au clergé dans les matières civiles ou del'État. Feu M. G. Bascle de Lagrèze est un témoin irrécu-sable su.l' ce sujet. Il dit (c Nous remarquerons souvent que"le For, empreint d'un caractère profondément religieux,n'accorde pas cependant un grand rôle au clergé dans lesaffaires de l'État. » « Il n'admet pas le prêtre pour la eélé-bratjpn du mariage, qui peut être valable sans aucune céré-~oIJ.ie religieuse. Il semble séparer l'Église de l'État 1. » Ilne fut pas permis à un ecclésiastique d'être choisi député auxjr~~ies générales ou particulières. Le fuero de Guipuzcoa esttrès explicite sur ce chapitre, « Qu'aucune municipalitén'envoie comme député à la junte aucun prêtre, niqu'unprêtre puisse être député en aucune lI1anière. » « ~l n'est pasconvenable à ladignité de-l'état ecclésiastique de s'introduiredans le gouvernement des matières politiques, purement sé.culières, et selon le fuero et ordonnances établies de cette pro.vince, son clergé ni celui d'aucune autre part ne peut être dé-

communion pascale, reçue par tout le monde, niais rien de plus.Quand on atteint Madrid et Tolède, tout change, et l'indifférence reli-gieuse domine et devient .~xtrême eu certains points du Midi, der Andalousie en particulier. »

1. La Naoarre jrançaise, par M. G.-B. de Lagrèze, 2 vol. Paris,Imprimerie nationale, 1882, vol. II, chap. m, p. 50.

2. Titulo XXVI, cap. m « Que ningun Concejo embie por su Pro-curador Ii la junta Ii ningun Clerigo, ni el Clerigo 10 pueda ser en ma-nera alguna. »

« Respecto de no ser conforme Ii la caUdad del estado eclesias-tico el introducirse Ii goviernos de materias politicas, meramenteseculares, y ser conforme Ii la Fuero y Ordenanza confirmada deesta provincia, que los Clerigos de ella ni de ninguna otra parte pue-dan ser procuradores de Junta, ni de ningunos casos de ella. Ordena-mosymandamos que ninguaos Concejos ai Universidades no puedanembiar Ii las juntas por sus procuradores Ii ningunos clerigos, so penade diez mil maravedis, é si los embiaren, que non sean recibidos éotrosi, que non pueda ser procurador ningun Clerigo en las dichasJuntas, por ningunas personas, en ningunos fechos, caso que seanéiviles-6 criminales. » Fueros de Guipuxcoa, réimpression, 1867.

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puté de junta d'aucune manière,nous ordonnons et comman-dons qu'aucune municipalité ni commune ne puisse envoyeraux juntas pour leur député aucun prêtre, sous peine de10.000 maravédis, et s'il les envoyait, qu'ils ne soient pasreçus et encore qu'aucun prêtre ne peut être 'député danslesdites juntas pour n'importe quelles personnes, pourn'importe quelle cause, qu'elle soit civile ou criminelle. »

Notre collègue estimé, M. Charles Bernadou, dans sacharmante brochure Les fèles de la Tradition basque àSaint-Jean-de-Lu;a, 1897, a remarqué ce double (c caractèreéminemment religieux et démocratique » des Basques. « A

Tolosa, on annule la voix de tout électeur qui a été vucausant avec un prêtre à l'entrée du scrutin' »

Le célèbre Manuel de Larramendi, S J., auteur d'ElImposible cencido et du Diccionario trilingue, dans saCorografla de laprooincia de Guipûxcoa, dit « Aucun desévêques (c'est-à-dire de Pamplona et de Calahorra) ne pos-sède les di~nes ni aucune portion des dimes en Guipuzcoa.Ils n'ont le patronage d'aucune église. Le patronage deséglises de Guipuzcoa appartient au roi ou à des particuliers

mais en beaucoup d'endroits il appartient au peuple même

et aux habitants, et l'élection se fait par les voix de tous,selon l'antique coutume. » El Padre Larramendi déplore

beaucoup les grandes dépenses que les pauvres ecclésias-

tiques sont obligés de faire pour de longs voyages à Pam-

plone ou à Calahorra pour leur ordination, etc.' On voit par

1. Charles Bernadou, Lea jêtes de la tradition basque à Saint-Jean-de-Lua. Aoûtet septembre 1897,pp. 44-45, Bayonne, Lamaignère,1897.

2. « Ninguno de los obispos tiene diezmos ni parte de ellos enGuipuzcoa. El rey tiene aqui muchos patronatos de iglesias. Hayotros patrouatos diversos,que tienen caballeros paticulares. y en estaslos patronatos son los que dan y nombran â los beneticiosy curatos

y lo mismo es de los patronatos reales. El patronato en otrosmuchos pueblos esta incorporado en los mismos pueblos y sus vecinos

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ceci presque le même' état de choses subsistant en Guipuzcoa

vers 1750, époque où Larramendi écrivait sa Coro~rafia,qu'en 1477, en Biscaye, pendant le voyage du roi Ferdinand.

Dans les cortés de Navarre, en 1757, il y a un curieuxexemple de cette opposition à la puissance royale et épis-

copale. Selon les mandements des évêques de SalamafAca,Avila, Cadix, Granada, Valencia et autres diocèses, et àl'instance de leurs évêques, le roi avait expédié un carta-orden défendant la représentation des comédies dans la' villeet dans le diocèse de Pampelune.. Les cortés protestentcontre cet ordre comme contraire aux fitet-os et en demandentl'annulation. L'ordre fut de suite abrogé et déclaré nul pardécret. Pamplona, 7 octobre 1757 t. Il est évident que ce

y en ellos se conserva la disciplina antigua en la pro,ision de bene-1lcios y cpraLos que se danporvotos de todos. »Pp. 109-110. -« De notener Guipuzcoa. obispo aparte se multiplican gastos de los pobresclerigos en las largas jornadas ci Pamplona y Calaborra cuando vanci ordenarse,etc. » P. 112. Cor·ografta de laM. V. y M. L. Prooin^iade la Guipuzcoa, por et R. P. Manuel de Larramendi, S. J., obrainedita. Barcelona, 1882. Nous devons ce livre à la science du R. P.J. Fita, S J

Dans les archives de Zumaya (Guipuzcoa), il y a un exemple deces élections « En la Junta de 17 de diciembre de l¡Oi se procede ala elecoiÓn del seiior vicario y recayo à Don infatias Ignacio doEchave. » Eugkal-Err·ia, tomo XXVIII, p. 489. San-Sebastian, 1893.

Voyez aussi Diccionario geograJteo-historico de Espana, por lareal Academia de la Historia. SecciÓn I Navarra, Vizcaya, Alaba,Guipuzcoa. Tomos, l, Il (Madrid, 1802) s. v. Albistur, p. 57 t< Laiglesia parroquial. esta servida por un rector y 4 beneflciados. Esde provision de la villa. » Amasa, p. 57. Anorba, p. 79.

ccEl lugar

nombra al abad y éste los beneficiados. » Arama, p. 84. cc La parroquiala sirve un rector, cuya presentacion hacen los vecinos, » etc., etc.Même dans le pontifical actuel on trouve « un vieux souvenir destemps où les ministres étaient élus et présentés à l'évêque par les8déles ». R. P. Dom F. Cabrol, Le Lione de la Pr·iére~ antique,p. 438, Oudin, Paris~ 1900.1. « Se da por nula la carta-orden prohibiendo el uso de comedias

en esta ciudad y Obispado.» En manifesta infracci6n de ellas (las leyes citadas), el ano

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n'était pas la prohibition de la représentation des comédiesqui excitait l'opposition des Navarrais, mais plutôt l'ingérenced'évêques étrangers et du roi dans les affaires du payscontraire à leurs privilèges et fi~eros.

Quelle est donc l'explication de cette ligne de conduiteenvers leurs prêtres et envers leurs évêques, parmi unpeuplesi religieux qu'étaient les Basques ? L'explication se trouvedans la ténacité et l'opiniâtreté des Basques à conserver lesmoeurs et les vieilles habitudes de leurs ancêtres, lorsquetout le monde les avait abandonnées ailleurs. Cette action

conservatrice fut grandement aidée de l'isolement causé parleur langue et par le caractère physique de leur pays.S'ils ont contraint pendant longtemps leur clergé à uneespèce de demi-mariage, ce n'était pas du tout à causede leur relâchement moral, mais par une persistance dansune coutume del'Église. Commedit le jésuiteJ.-F. Masdeu

« Que le diacre, ou le prêtre ou l'évêque qui s'était marié

une fois pouvait vivre avec sa première femme, mais ne passe marier une seconde fois, celle-ci est dans cette matière laseule loi xpostolique et ancienne o C'est cette loi que les

passado de 1756 se dirigio una carta-orden. en la que se expressaba,que V. M. haviv resuelto, que asi en osta dicha ciudad como en suObispado, se prohibiesse la representaci6n de comedias, por comicosfar:;antes, según estaba malldado para los dioceses de Salamal1ca,Avila, Cadia, Granada, Valencia y otras, â instancias de sus pre-lados cuyo contexto no solo es contra-fuero, por 10 que vulnera lalibertad, que siempre ha havido en este reyno de admitirse a su vo-)ul1tad dichas represeaiacioues, con las justas precauciones. Supli-camos â V. M. ~e sirva dar por nula, y ninguna la carta-orden, comoopuesta â nuestros Fueros y Leyes, que se no se trayga en con.secuencia, etc. Decreto. Pamplona de Palacio, 7 de oclabre de 1757.

Damos por nuta y ninguna la carta-orden que citais, y queremos nose trayga en consecuencia, ni pare perjuicio â vuestros Fueros yLeyes, etc. » Quaderno de las Leyea y ~lc~raoios reparados del an'o

de 1757. Ley xxwt, p. 69, Pamplona, ano 1758.

1. « Que el diacono 6 el presbitero, 6 el obispo, que se hubiese

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Basques ont conservée pour leur clergé. Lorsque le mariagedu clergé fut absolumentdéfendu par l'Église, leurs femmes

sont ensuite considérées comme barraganas, concubines,etc.Mais le mariage du clergé se perpétuait plus longtemps

en Espagne que dans quelques autres pays, et naturellementil se conservait parmi les Basques et dans les provincesbasques plus' longtemps que dans le reste de l'Espagne, mais

sans qu'ils fussent, ou les Basques ou leur clergé, de moeursplus relâchéesqu'ailleurs mais plutôt le contraire.

C'est la même chose quant à leur attitude envers leursévêques et le clergé, Pour citer encore Masdeu « Primiti-vement, le clergé et le peuple ou la ville nommaient leur

propre évêque': » Il en était de même en France, commevous pouvez voir dans le bel ouvrage de P. Imbart de laTour, Les Élections episcopales dans l'Église de Francedu IXe au ~II° siècle (814-1150)'fême dans le Pontifical

actuel on trouve « un vieux souvenir des temps où les mi-nistres étaient élus et présentés à l'évêque par les fidèles 3 ».

Quand donc les évêques et le clergé furent élus par le

peuple, c'était pour remplir certains devoirs et certainescharges envers le peuple. Les électeurs avaient le droit de

casado antesuna sola vez, podia convivir con su primera muger, perono casarse con segunda, esta es en el asuuto la úDica ley apostolicay antigua. » Religion Esp.znola. Obra escrita en Roma por D. J

Francisco cie Masdeu, réimprimée dans la Revista de Ciencias his-toricas. Barcelona, tomo II, 1881, p. 216. Jusqu'en 1888 cette loi a étéconservée par les Syriens catholiques, avec approbation du pape.Voyez les décrets du concile national des Syriens catholiques célébréà Sciarfe en 1888, avec approbation de SS. Leo. PP. X III. Art. VII.De ecelibatu Presbyterorum et de Presbyteris conjugatis. Le Cano-niste comtenzporain, juillet-août 1900, pp. 422, 424, 452. (P. Lethiel-leux, Paris,1900.)

1. « Primitivamente cada clero y pueblo nombrada â su proprioObispo, » ibidem, p. 210.

2. Paris, Hachette et Cie, 1891.3. F. Cabrol, Le Livre de la Prière antique, p. 438. Oudin,

Paris, 1900.

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régler jusqu'à un certain point ce que seraient les fonctions,les droits et les devoirs du clergé élu envers le peuple et lepouvoir civil. Dans d'autres pays, le peuple a perdu de bonneheure son droit d'élection du clergé, et avec le droit d'élections'en allait nécessairement en grande partie le contrôle surles fonctions du clergé dans les matières civiles. Mais,

comme nous avons vu dans Larramendi, les Basques, en Gui-

puzcoa au moins, avaient conservé jusqu'au XVIIIe siècle.leur droit primitif d'élection, et avec cela ils maintenaientle clergé en dehors de toute ingérence dans les affaires poli-tiques et dans les juntas'. C'est cette action qui. causaitl'horreur et l'étonnement des ecclésiastiques et des évêquesétrangers, comme Don Juan Margarit, qui ne pouvaient pascomprendre du tout cette réunion de la religion et de la

démocratie, ou plutôt une liberté qui avait ses racines pro-fondes dans la conservation du passé.

Les Basques ont conservé jusqu'à la fin du siècle dernierbeaucoup d'autres pratiques de l'Église des premiers siècles,qui ont été perdues ou abandonnées ailleurs. La cérémonie demariage de l'église de Saint-Jean-de-Luz rappelle la confar-reatio adoptée par les premiers chrétiens comme la seulecérémonie nuptiale de Rome païenne, qui n'admettait pas ledivorce. Les seroras ou benoites des églises basques sont lesanciennes diaconesses. Les danses religieuses étaient en-

vogue en Guipuzcoa au temps de Larramendi, qui en a écrit

une chaude défense et apologie3 dans le pays basque, ellesfurent pratiquées à Iholdy et les environs jusqu'en 18301. Lafête du Cor~pus Christi, la Fête-Dieu, instituée par le papeUrbain I V en 1264, est encore appelée en basq ue phestaberria, la nouvelle fête, elle n'a pas d'autre nom en escc~ara.

1. Et même en 1802, selon le Diccionanio Geo~ra/ico-Historico deEspaiaa. Vol. l, II, passim.

2. Corogra/°ta de G uipuar,oâ, pp. 199-245.3. Eskualduna. Variétés. Le Manuscr·it du oieux.curé, 1 déco 1898.

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Par un document eonservé dans les archives, il parait queles habitants de Sare, jusqu'au XVIIIe siècle, avaient bienplus de confiance dans la puissance de l'excommunicationecclésiastique pour la découverte et la punition des voleursque dans la justice et dans la police. A la requête des tisse-rands qui avaient été volés d'une pièce de toile et d'autreschoses, l'official du diocèse de Bayonne lance un décret, parlequel, après récit.des circonstances, « sont admonestez tousceux ou celles qui savent quelque chose du contenu du pré-.sent monitoire, soit de certaine science ou l'avoir vu oui direou autrement de la reveler devant le publicateur six joursaprès lesd. publications et ceux ou celles qui sont coupablesdes cas ci-dessus énoncés de faire aux impetrans la répara-tion telle que de droit sous peine d'excommunication, donnéà Baione, sous sceau du seigneur Évêque, le dix-neuf dé-cembre mil sept cent soixante-cinq.

CAULDRONQUE, official. »

Ce monitoire fut publié « à haute et intelligible voix et enlangue vulgaire basque par le prône des Messes de paroissedes dimanches 22, 27 décembre 1765 et 5 janvier 1766, » parle curé, l'abbé F. Robin.

Il y a bien d'autres pratiques que je n'ai pas le temps d'énu-mérer'. Personne ne contestera cette action conservatrice des

Basques en matière de religion'.Il y a aussi à remarquer les étranges contradictions dans

l'histoire de l'Espagne. En 1477, nous sommes à la veille del'Inquisition. Le cardinal Ximénès (1437-1517) jette les fon-dements de l'absolutisme royal et théocratique en Espagne;Ignace de Loyola (1491-1566) et François de Xavier (1506-

1. Voyez les beaux livres de M. H. O'Shea, La Maison basque,Pau, 1887, et' La Tombe basque, Pau, 1889.

Page 363: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

1552), tous les deux Basques, vont préparer la contre-réfor-mation en Europe, et néanmoins le roi Ferdinand le Catho-lique n'ose pas amener avec lui dans sa suite l'évêque de

Pamplone dans sa tournée à travers la Biscaye 1

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SUR LA CARTE DE L'ÉTAT-MAJORDANS LES BASSES-PYRÉNÉES 1

AVANT-PROPOS

Depuis que cette petite note sur la carte de l'état-major desBasses-Pyrénées a paru en 1878 dans le Bulletin de le Sociétéde Borda de Dax, une nouvelle édition de cette carte à 1/100.000,

a été publiée par Je Minist~re de l'intérieur, chez Hachette, en1893. La carte nouvelle ne laisse rien à désirer. C'est admirable declarté et de précision. Toutes les erreurs signalées dans notremémoire sont corrigées. Le touriste, ou le cycliste, ou le monta-gnard peuvent suivre avec confiance et sans difficulté ses indica-tions. Je ne réimprime cette petite note que pour rappeler et pourconstater l'insigne honneur que mon cher et vénéré ami, M. An-toine d'Abbadie, membre si illustre de l'Institut, m'a fait en ajou-tant la lumière de sa science, â mes expériemes de touriste ,et depiéton..

Je ne suis ni mathématicien, ni astronome, ni géographe,ni même cartographe. Je sens donc combien il est témérairede critiquer une oeuvre capitale comme celle de la carte deFrance par l'état-major., Sans prétendre le moins du mondeà en faire la revue scientifique, je compte néanmoins sur l'in-dulgence du lecteur,en avouant tout d'abord que mes re-marques sont celles d'un touriste, qui aime pécher à la ligneetqui se promène le long des rivières en recourant maintes

1. Qulletin de la Société de Bomla W trimestre 1878).

Page 365: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

fois au compas et à la carte. Sansautre secours, j'ai parcourude cette façon le sud-est de la Suisse et le sud-ouest du Tyrol,où je pouvais à peine balbutier quelques mots de l'idiomelocal, et j'ai fait de la même manière plusieurs excursionsdans le reste de la Suisse, en Écosse et en Angleterre, où je

pouvais causer avec le premier'venu. Cette habitude m'adonné une certaineconfiancedans mes propres forces. Comp-

tant sur ma longue pratique et m'orientant par la boussole

et par la carte, j'ai eu recours bien rarement à un guide, ex-cepté pour les grandes ascensions de montagnes..

J'avoue toutefois que ma confiance dans les cartes a été ru-dement ébranlée par les courses que j'ai faites pendant vingt

ans dans les Pyrénées-Occidentales. Il m'a été impossible de

m'y promener tout seul avec la carte de l'état-major pourguide: je l'ai tenté bien souvent, mais toujours sans succès.

Plus d'une fois je n'ai pu découvrir, sur cette carte, uncroutebien connue que j'avais parcouruela veille oule matin même.

J'ai cru d'abord que cette incapacité venait de ma proprefaute, et j'ai hésité à en parler; mais, dernièrement, des

hommes d'une science incontestable m'ont avoué la même

incapacité. Dès le lendemain d'une promenade aux cabanes

des gardes forestiers dans laforêt d' 1 rat y, à Esterençuby surla Nive de Béhérobie, ni moi, ni l'ami qui m'avait indiqué la

route, et qui lui-même l'avait faite auparavant, ne pûmes

réussir à la suivre sur la carte. Ce seul fait m'autorise, je

crois, à faire quelques observations à ce sujet.

MONTAGNES

En premier lieu, je veux constater ce que, selon moi, untouristepédestre doit attendre d'une cartedans un pays monta-

gneux. Pour lui, leplus grand besoin c'est la clarté, la netteté

dans les détails, et l'absence de toute confusion. La hauteur

des montagnes doit être notée (ce qui a lieu en effet sur la

Page 366: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

carte de l'état-major), les hachures doiventindiqueràgrandstraits les formes des montagnes les plus remarquables et quiservent comme points de mire. Non seulement il n'est pasnécessaire, mais il est même inutile d'essayer de marquerchaque dépression sur une crête ou sur la pente d'une mon-tagne. Il suffit que les hauteurs relatives soient indiquées demanière à montrer si une montagne est au-dessus ou au-dessous de trois mille, de mille ou de cinq cents mètres, Nousdemandons une carte et non un tableau. Sous tous ces rap-ports, les feuilles publiées par l'état-major sont beaucouptrop chargées. On y a donné des détails qui sont, non seule-ment inutiles, mais même nuisibles dans une carte d'uneéchelle aussi restreinte. Ces détails ne sont insérés qu'auxdépens de choses bien autrement nécessaires enfin les ha-chures sont beaucoup trop noires.

RIVIÈRES

Après les montagnes, les cours d'eau sont les traits les plussaillants d'une carte. Sous ce rapport, nous trouvons peu àredire dans celle de l'état-major; les cours d'eau y sonttracés généralement avec exactitude. Il faut observer néan-moins que le débouché, vers la mer, du lac Moriscot, prèsBiarritz, n'est pas bien indiqué. En outre, il est parfois biendifficile de distinguer les cours d'eau des autres traits de lacarte.

ROUTES ET CHEMINS

C'est ici que je vois le plus à critiquer. En d'autres pays etdans les grandes cartes de l'état-major ou même de la li-brairie, j'ai toujours trouvé les routes nettement dessinées etdistinguées, de manière à ne pas s'y méprendre, en catégoriesde premier, de deuxième et de troisième ordre, à savoir: lesgrandes routes, les routes ordinaires, les chemins des mule-

Page 367: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

tiers et enfin les simples sentiers. Ces derniers ne doiventêtre indiqués que dans des cas exceptionnels. Dans la cartede l'état-major français, les routes nationales sont présentéesavec exactitude; les routes départementales le sont aussi enganéral, mais pas toujours. On n'y a marqué ni la route deS,aint-Pée-sur-Nivelle à Espelette, ni celle d'Amotz à Ainhoa.quoique cette dernière setrouvesurla carte de Cassini. Toutesdeux sont néanmoins de belles routes. Ces erreurs sontgrandes, mais nous en avons de plus importantes à signaler.N'est-il pas de première nécessité qu'une route soit tracée surla vraie riv e d'un cours d'eau `1 Notre carte viole néanmoinscette règle du bon sens. La route d'Arnéguy à Luzaide (Val-carlos) continué, d'après la carte, sur la rive droite de laNived'Arnéguy,bien qu'en réalité elle passesurla rive gauchepar le vieux pont qui est au centre du village, et bien que lacarte de'Cassini soit exacte quant à ce détail. Pour ce quiest des chemins ruraux ou même vicinaux, le hasard sembleavoir déeidé s'il fallait les indiquer ou les omettre. Avec lameilleure volonté, il m'a été impossible de découvrir la règlesuivie à cet égard. Par exemple, lacartenedonne ni lechemindirect de Sare à Ascain que les campagnards-appellent lavieille route et où l'on voit encore les pierres milliaires mar-quées en toises, ni la route qui, passant par Olhette, va d'As-cain à Saint-Jean-de-Luzen suivant larive gauche de la Ni-velle. Autour de Saint-Pée et d'Olha, les routes sont donnéescorrectementpar lacarte de Cassini, mais je ne parviens pas àles comprendre sur celle de l'état-major. Cette dernière estencombrée et surchargée de lignes qui ont probablement unesignification quelconque et dont la valeur scientifique a,peut-être, une grande importance, mais elles créent de gravesembarras dans l'usage pratique de cette carte. En effet, ceslignes sont toutes de la même force que celles qu'on supposedevoir indiquer les cheminsvicinaux ou les routes muletières.

Page 368: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Tout voyageur dans un pays montagneux connaît la grandeimportance de ces dernières, mais je défie le plus habile d'ensuivre même les plus importantes sur la carte de l'état-major..Par exemple, la vieille route muletière, connue depuis le

XIVe siècle et qui suit la rive gauche de la Nive à travers lesoi-disantPas de Roland, est si obscurément indiquée qu'au-cun étranger ne pourrait la trouver par la carte seule. Letouristeleplus inexpérimentésaitqu'il existe toujours quelqueroute de communication entre deux villages voisins commeentre un village et la grande route la moins éloignée. Eneffet, ces routes existentaussidans les Pyrénées, comme par-tout mais, si le voyageurcompte les trouver sur la carte del'état-major, il s'abuse étrangement. Cherchez par exempleles routes de communication entre Ahetze, Arbonne, et Bas-sussary,entre Saint-Pée,SouraideetEspelette,entreEspeletteet ltzatzou ou les chemins qui relient à la grande route Hen-daye, Macaye ou Mendionde. Voilà quelques exemples surbeaucoup d'autres que nous pourrions donner, et selon nous,ces fautes ne sont pas des plus légères.

PONTS, GUÉS, PASSAGES

Sur une bonne carte on s"attend toujours à trouver les pontsbien et clairement indiqués, ainsi que les routes qui y con-duisent et qui les traversent. Les gués et mêmeles passages,les plus considérablesd'entre eux au moins, doivent y trouverleurs places. Il est même très facile de lesindiquer.Or, levieuxpont d'Ascain sur laNivelle-estmal placé, et l'on a omis de

marquer l'ancien pont de pierre en aval de Saint-Pée. C'esttout le contraire à Olha il ne s'y trouve qu'un seul pont,mais la carte en donne deux. Elle n'indique ni le gué, ni lepont qui l'a remplacé, sur la route d'Amotz à Ainhoa, bien

qu~e gué soit très bien marqué dans la feuille surannée de

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347SUR LA CARTE DE L'ÉTAT-MAJOR

Cassini. Les deux ponts en bois (j'omets toujours les pontsrécents) entre Ascain et Ibarron font aussi défaut. La carteomet le pont en pierre sur la Nive de Baigorry à sa jonctionavec la Grande-Nive. Ce pont reprend une assez grande im-portance à cause de la route nouvelle et plus directe que l'onconstruit à Saint-Jean-Pied-de-Port. Un peu plus en amontil y avait aussi un autre pont, en pierre aussi, et com~Ie leprécédent, fort ancien; mais il est tombé vers l'année 1869.Aucun gUl~ ni passage n'est indiqué sur la Nive, ni même surla Bidassoa entre Enderlaza et l'Océan.

OBJETS SAILLANTS

Sur la carte d'une frontière où l'on parle plusieurs langueset dialectes, la nomenclature est si difficile et si délicateque je ne ferai à ce sujet aucun reproche aux cartographes.Il y a cependant une sorte de savoir faire, on dira même uneespèce de gros bon sens qui devrait être l'apanage de ces mes-sieurs et qui brille par son absence sur cette portion de carteque nous devons à l'état-major. Les mêmes objets n'ont pasla même valeur relative dans tous les pays. Tel peut être unobjectif essentiel dans un pays et rester sans importance dans

un autre. Ici il doit être omis là on décidera immédiatementqu'un détail du même genre doit être indiqué. Par exemple,dans un pays bien arrosé.ou le long d'une rivière, il seraitabsurde de noter chaque puits et chaque fontaine; mais dans

une région où l'eau est rare, lesdites sources sont d'une im-

portance extrême. C'est vers elles que les sentiers convergent,c'est à côté d'elles que la route passe. Ainsi le chemin demulets qui joint la vallée de Mendive à celle du Saison, enpassant par les montagnes, est déterminée par la fontained'Ahuski, où plusieurs milliersdetêtes de bétail vonts'abreuverdansles grandessécheresses. Quoique très fréquentés tous les

deux, ce chemin et cette fontaine n'ont pas été placés dans

Page 370: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

la carte. Autour du pic d'Anie où l'eau est rare, les indica-tions de route m'ont été toujours données par les sources c'estlà que les bergers se rendent de temps en temps, c'est là que10 touriste égaré peut espérer obtenir quelques indications

pour s'orienter. En d:autres endroits, un rocher isolé, ungroupe d'arbres remarquable, un tumulus, un inen~ir devientle véritable objectif du passant et doit être signalé sur la carte.Dans les Pyrénées, c'est plus souvent une chapelle ou unecroix, comme la belle croix Blanche sur le plateau entre lavallée de Bigorre et celle d'Argelès. Partout où se trouventdes objets saillants de ce genre, ils doivent être notés à leursplaces et inscrits clairement sur la carte. Une métairie isolée

ou même une cabane de bergers est souvent d'une grande im-portance dans les montagnes. D'un autre côté, il est inutileet même nuisible d'essayer l'indication de chaque maisonisolée dans une région bien peuplée. On doit se borner là àdonner avec clarté et précision le plus de routes qu'ilest pos-sible. C'est en ce point surtout que pèche la carte de l'état-major.

Aux critiques que nous venons de faire on peut répondre

que la réalisation de nos désirs ne serait utile qu'aux tou-ristes et à ceux qui font des excursions à pied, et enfin quela carte de l'état-major n'a pas été faite pour eux seuls. Jeme permettrai 'néanmoins de faire observer que les mêmesindications, qui éviteraient à un touriste cette confusion quile déroute, seraient aussi fort utiles à tout autre voyageur etmême à des officiers en temps de guerre. Ce n'est point lajalousie internationale ni l'esprit de critique à outrance quim'a fait écrire les remarques ci-dessus. Bien au contraire,le pays basque est pour moi une contrée de prédilection.

Ille terrarum mihi præter omnesAtigulus ridet.

(HORACE, Odes, II, 6).

Page 371: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

C'est dans l'espoir de rendre un service, bien'minime, il estvrai, au pays de France si beau et si hospitalier, que je mesuis permis d'appeler votre attention sur quelqueserreurs ouplutôt quelques lacunes qui pourraient être facilement cor-rigées dans une nouvelle édition. Elles sont dues plutôt augraveur qu'à un manque de science chez les officiers qui ontlevé cette grande carte.

Les notes excellentes de M. Webster pouvant faire croireà des lecteurs surperficiels que la grande carte de l'état-major ne mérite aucune créance, même pour des points fon-damentaux, il est bon d'ajouter quelques détails à ce sujet.

Les bases de cette carte ont été établies par plusieurs cen-taines de triangles dont chaque sommet a coûté un mois en-viron de patientes observations. Les intelligents et modestesofficiers qui ont mené à bonne fin cette immense entreprise

ne sauraientêtre mis en suspicion, car une erreur commise

dans la mesure d'un angle serait découverte aussitôt parl'impossibilité de raccorder cet angle avec tous ceux qui

l'avoisinent.Des critiques malveillants pourraient alléguer que cet

énorme travail n'a pas été contrôlé par des experts étrangers

à l'armée, parce qu'un grand nombre de bornes géodésiques

a été détruit, et surtout en raison de ce fait qu'un pareil con-trôle exige une assiduité fort pénible et l'usage d'instruments

spéciaux très coûteux. Un fait récent montre combien ce con-

trôle serait inutile la triangulation française s'est arrêtée surla frontière en y plaçant plusieurs montagnes ou signaux na-turels que les géodésiens espagnols viennent d'établir à leur

tour en partant du Sud d'après des mesures indépendantes.Or,leursmaillesnombreuses, construitesavecdesinstruments

Page 372: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

perfectionnés et bien supérieurs aux vieux appareilsfrançais,se sont trouvées en coïncidence parfaite avec les sommets desnôtres dans les Pyrénées-Orientales. La géodésie française

ne pouvait trouver une confirmation plus délicate ni pluséclatante.

Notre grande triangulation étant achevée, il restait à relevertous les détails par un immense travail de-topographie. Parmalheur, le gouvernement de "la Restauration avait aboli le

corps si utile des ingénieurs géographes et, comme on avaithàte dejouir d'une carte, on remplit le réseau géodésique

avec les détails du cadastre. Les autorités, fort peu savantesen géographie, qui ordonnèrent cette mesure ne réfléchirenttpas que la carte cadastrale était faite dans le but de mieuxrépartir l'impôt foncier, et qu'elle devait s'inquiéter médiocre

ment de ce qui ne donne rien au fisc, comme les ponts, lesfontaines et même les routes. Le but de cette carte étaitd'énumérer et de mesurer les surfaces contribuables. Ses au-teurs, qui n'étaient pas tous géomètres, étant payés selon lacontenance trouvée, ont souvent penché vers l'exagération.Dans la commune d'Audaux, ils ont même inventé un grandchamp qui n'existe pas encore, sinon dans la théorie du per-cepteur qui recueille l'impôt et qu'on aura ainsi de la peine àfaire rentrer dans son vrai domaine, celui de l'imagination.

Le cadastre a parfois des omissions qu'on pourrait appelerà la fois plus innocentes et plus graves. Egurrenia, près Hen-daye, isolé entre Ondarraltxou et la chapelle ruinée de Sainte-Anne, devrait être un trait saillant de la carte, parce que c'estla dernière maison au Sud-Ouest de la France. Le voisinagede l'Océan permettrait même d'inscrire son nom sur un carteà échelle plus petite que celle de l'état-major. Egurrenia setrouve sur les gravures faites pourle mariage de Louis XI V,

et à plus forte raison, sur la carte de Cassini. On sait queHendaye et ses environs furent ravagés en 1792 -par les Es-

Page 373: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

pagnols, et en 1814 par les Anglais sous Wellington. Quandon fit la carte du cadastre, il ne restait que les fondationsd'Egurrenia et son omission était alors explicable; mais cettemaison a été rebâtie depuis. Or, elle est omise sur la carte del'état-major parce que ses auteurs n'ont pas contrôlé le tra-vail du cadastre. Il serait aisé de citer plusieurs cas du mêmegenre.

M. Webster cite des faits matériels très faciles à constateret se borne à indiquer en passant une question très grave etdélicate, celle des noms de lieux. Doit-on donner l'appellationlocale ou le nom officiel, et écrire par Lekhuine (lieu bon) ouBonloc, traductionadmise, mais qui a l'inconvénientde ne pasêtre française `? Dans les cas de ce genre, ne faudrait-il pasajouter entre parenthèses le nom employé par les habitants dela localité? Cette région est basque, et quand on y écrit desmots basques, il serait bon de 'suivre un système uniforme.Au contraire, la carte m~t dans Ondarralt~ouun son basquex (entre cj~ et s) et une orthographefrançaise ou. Tout près dede làest Larroun (larr, pâturage; un, jadis hasn, bon), tandisque la montagne de 900 mètres qui domine ce pays, et quiporte le ~nème nom en réalité, est écrite La Rhime ou plutôtsans doute La Rhune avec l'orthographe fantastique deCassini, comme s'il s'agissait de deux mots français. Trompés

par cette manière d'écrire, des touristes parlaient devantnousde la grande et de la petite Rhune, ce q ui faisait rêver auxrunes ou écritures antiques de la Scandinavie. Sur le flancoriental de cette montagne, la carte de l'état-major inscritIlaldun, où le son espagnol de l'u doit être conservéet q uoique

cette même carte n'écrive pas l,arrun comme les Basques,mais bien l,arroun à la française. Il serait bon d'adopter encette matière un système quelconque, à la seule condition des'y conformer exactement. Quant à l'absencede tout système.la carte en donne une preuve non loin de là dans le mot

Page 374: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Fagadico, bien écrit avec le ko final qui marque un génitif,

et Faidr~ qu'on doit prononcer Fagadi. Il serait aussi oiseux

que facile de citer des termes mystérieux du même genre.Si nous en parlons, c'est pour appeler l'attention des his-

toriens et des archéologues sur un sujet de graves recherches,

car leurs travaux peuvent souffrir des fautes dans la nomen-clature du cadastre, et par suite, dans celle de la carte d'état-major. Il n'est pas impossible qu'on trouve des erreurs dumême genre dans les environs de Dax. En les relevant, et enjoignant les étymologies les plus probables des noms de lieux,ainsi que les appellations locales, nos collègues trouveraientmatière à un travail utile qui soulèverait plus d'une questionintéressante. Le bon goût devra décider s'il vaut mieux con-server sur la carte un nom dénaturé, mais officiel, ou bien s'ilconvient de rétablir le terme local avec sa vérité et ses vieuxsouvenirs.

La gravure d'une carte est aussi une question de bon goût.Dans une contrée montagneuse, où les détails de terrainabondent, on fait fausse route en voulant les reproduire touset en multipliant les hachures au point de rendre souvent les

noms de lieux illisibles. N'oublions pas qu'on lit bien rare-ment la carte d'une manière suivie on la consulte seulement,et la clarté est le premier besoin d'une étude de ce genre.Par malheur, nos graveurs se laissent mener par des idéespréconçuesd'élégancedans leurs lettres, ils en exagèrent les'

déliés qui sont plus faciles à tracer, et ils font renchérir ainsile prix des cartes au grand détriment de l'enseignement géo-

graphique. Leurs déliés, toujours trop fins, nuisent àla facilité

de la lecture et sontaussi les premiers traits qui disparaissentà la fi n d'un fort tirage. Telle planche qui fournit à peinedeuxmille exemplaires avant de rendre les noms méconnaissables,

en donnerait peut-étre le double et par conséquent à un prix

bien inférieur, si le délié de la lettre avait au moins la gros-

Page 375: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

353SUR LA CARTE DE.L ETAT-MAJOR.'·

seur. du plein. Un nom de lieu 'est souvent le reste précieuxd'un idiome disparu, et, vu son isolement, on nesaurait encertifier les lettres comme on le ferait dans un manuscrit da

genre différent, par le contexte d'une phrase ou par :la répé-tition de ce mot.

Malgré les défauts évidents de sa composition et le manqueabsolu de ces différences de niveau dont l'état-major s'estpréoccupé avec tant de raison, la carte de Cassini est, encore,

aujourd'hui, plus agréable à. consulter que celle qui l'asuivie. Il est triste d'avoir à constater que les graveurs du

siècle dernier comprenaient mieux le graxid besoin de clarté

dans la lecture, et qu'ici du moins, ce p.rogres, que pou?

sommes trop portés à voir partout, a pourtant. marché à

rebours.Les légendes d'une carte sont souvent très utiles et font

toujours le bonheur des gens curieux. Dans le blanc laisséforcément sur la feuille de Bayonne, on aurait pu donner les

règles de prononciation adoptées pour l'orthographe des nomsbasques et des termes gascons, la ligne de démarcation des

deux idiomes, et les noms différents que ceux-ci appliquent

parfois au même lieu. Ainsi on aurait pu dire dans cette

légende que les Basques disent Bayona pour Bayonne

Donibane Lohitzun pour Saint-Jean-de-Luz Miarrit,ae

(Órtolan) pour Biarritz; Larrekar~t~ pour la Pointe-Sainte-

Anne, etc.Terminonsen disant que si nous avous tant critiqué, ce qui

est toujours facile, nous n'oublions jamais ce dicton arabe

« Le mérite appartient à celui qui commence, quand même

son successeurferait mieux.» Nos officiers d'état-major n'ont

même pas besoin de s'abriter derrière ce proverbe toutes les

fois qu'il leur a été permis de faire des levés topographiques.

Il nous a été donné de voir quelques-unes de leurs minutes

où le relief du terrain a été renduavec une vérité si saisissante

23

Page 376: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

qu'il a fallu promener nos doigts sur le papier avantde croirequ'il était resté tout plat. La photographiepouvait seule répro=duire ce travail admirable les graveurs l'ont complétementgâté en leréduisant.

En tout cas, le premier aiguillon du progrès est la recon,jnaisseinae des erreurs et des imperfections dues à nos devan-ciers. Borda, qui par ses in v entions et son exemple a impriméun si vif essorà 1agéodésie, Borda, s'il pouvaitreparattredan~Sa patrie, nous dirait de bien constater le mal,' afin de mieuxtrouver le remède. Nous nous réfugions sous l'égide ~ie~songrand nom, afin qu'en nous voyant quelquepeu acharnés à~,

relever des fautes, on ne nous prenne pas pour des ingrats.

ANTOINE D'ABBA-D~F~(, lis titut)...}')~~l~l'lt~(~

Page 377: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

..oT">-c.

I N D EtINDEX

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r t. ,:}:j·.r~ c.

a~e.i

· n`:~ly 1 Y~.

Abbadia (inscriptions à), 208.(liste du bétail mort à),

258.Action de la Révolution, 114.Administration basque,.26, 33.Alcool (loi sùi~ 1'l-, 12,8, 157-160.Animaux responsables devant la

loi, 103.Anthropologiebasque% 1~, 304; 307.Arabe (1') dans les Basses-Pyré-

nées, 193-1~5..Architecture, 197A13Semblées:des.ValIées,119-127.Associationd'un animal, 261.Assurance du bétail; 261.

des ouvriers, 275.

Augure par des poulets et desoies, 106-107.

Au=osts, 101.Avocat,défense d'être député, 30,

133,134.

Bcarrac~ana, 96, 332.Bayonne, ville presque corsaire,

124.Basques, Méridionaux et Bar-

bares, 58..Basques et Celtes, 107, 301, 306.

et Berbères, 15, 107,.308, 311.

Bibliographie basque, 309-310. 336

_i vr··'11~~ .J;

Bihaar, 125, 126.Bordeaux (bourgeois nobles de),

55.

Cadrans solairés. ( inscriptionssur), 203,' :04.

Cahier du Labourd en 1789, 129,174.

Cahier de la Basse-Navarre, 126.Cartes de Cassini, 345, 350.

· du Ministère de l'inté-rieur, 342.

linguistiquedu Basque,21.Carliste (la question), 37, 136.Celtes et Basques, 107, 301, 306.Celtiberian ( inscriptions), 3, 9,

304-311.(Essais d'interpréta-

tion de), 10, 306.(plat), 10, 30;).

Centralisation et décentralisation,182..

G'haricari basque, 24.Censure (la) en Espagne, 293.294.Chat (le meurtre d'un), 103.Châtaigniers ( maladie des ) 43,

44.Christus paticns, 214, 228..Cloche trouvée en mer, 210.Comédies (défense de jouer), 128,

Page 378: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Conditions seil1blables, résultatssemblables, 109.

Confarreatio (mariage par), 106,339.

Confréries, 259.Consuls et villes consulaires, 53,

59.Contributions payées en bloc,

129, 130, 171.Cortés espagnoles, 67.Coutumes du Labourd, 50, 77,

125, 132.de la Soule, 254.

Couoade (la), 94.Crofter's Commission, 108-110.

Danses, 21, 22, 293.religieu~es, 102, 220, 297,..339.(enchère des), 227.

Décentralisation,182..Densité de.la population, 33.Description du pays basque,17-19.Démocratie et féodalité, 114.Démarcationdes communes, 168.

Dieu (nom de) en basque, 12.Députés (défense aux avocats etau clergé d'être), 30, 133, 334.

Éducation chez les Basques, 134.dans la vallée d'Aspe,

134.Élections provinciales, 30, 125,

126, 127.municipales, 32, 127.du clergé, 335.(prêtres et av ocats

aux), 133, 335.Emprunt d'argent et le cheptel,

272.Empléomanie, 33, 137;En'chère des danses, 227.Enterrements, 101.

Épée (le culte de l'), 32, 105.Épizootie de 1772, 257.Excommunication pour vol, 340.

sociale, 92.Exogamie, 95.

Facéries, 85, 146-157, 190.Fazanias, 102.Femme (position de la), 99-100.

chef de la maison, 80, 99.député et électeur, 100,

120.Féodalité et démocratie, 114.Fermeté religieuse des Basqües,

339.Feu (droit de prendre).. 90, 91.Foiéts (conservation des), 170.Foundàtion Sacrifice, 85.Fueros et fors, 27, 38.

Gasalia, 254.Gascoigne,invasiondesVascones,

305, 308.Grammairesbasques, 3, 4, 298-300.Guillotine à Saint-Jean-de-Luz,

204.

Hermandades, 116, 117.Hommage en Guyenne à pied et.

à jambes nus, 317.House Community, 79-83.

Ingérence de l'État, 174-181, 274.du clergé dans l'État,

132.Inscriptions sur les clocles, 210,

211.sur les plats, 10, 211,

305.Inviolabilité de la maison, 29, 86.

10.- des députés. 30.

Page 379: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

Jesuites, 26.Jeux athlétiques des Basques, 21.Jüstice et la police, 131, 340.

Konfracliac, 258.Lar (lel, 85.Lavedan (traité du), 124.L~gislation inefficace, pourquoi?

~52.Letras desconocidas, 3, 304.

(déchiffrement de), 10;306.

Libertés (deux sources princi-pales de), 27, 58, 59.

constitutionnelles,pointexclusivementteuto-

Libre commerce, 30, 130.

Manuscritset réimpressions, 291-311.

en Angleterre, 297.Mariage, 95 seq., 10ft

civil, 98.

par confar·reatio, 106,339.

du clergé, 337.Marins basques, 25.Municipalités libres, 61 seq.Monuments mégalithiques,16,17.Musique des Pastorales, 225.Mystères, 214, 215.

(liste de) bretons, 229.

Navarre(constitutionde laBasse-),126.

Noblesse des Basques, 35.

OEuvres grammaticales, 3, 4~ 299.Ur~lonnances cle Chincilla, 115.Orchestre basque, 220.

niques, 70-71.

Pastorales (liste des), 23, 229, 238.(auteurs des), 233-234.

Patronage des églises, 134, 335.Pleureuses et plaiiideras, '101.Primogéniture, 99.Privilègesde la vallée d'Aspe, 59,119.Propriété collective, 75.

pastorale, 77..J communale, 77, 129.

Religion des Ibères, 11-13.Représentation parlementaire en

Angleterre, 46.Républiques basques, 116, 136.

sous l'Empire ro-main, 112.

de Guipuzcoa, 116.de Navarra, 116.de la vallée d'Aspe,

119, 122, 127.de Saint-Savin,120.de Sare et de Vera,

135.

Saint-Savin (monastère et Répu-blique de), 119, 120.

Sare et Louis XIV, 130, 138, 203.Serment du seigneur au peuple,

60, 61.chez les Basques, 312.des Juifs en Navarre,

236, 321.des Juifs à Magdebourg,

321.

en Écosse, 105, 317.chez les francs. maçons,

321.Service militaire des Basques,

28, 121.Socida, 250-257.Sorcellerie et dualisme, 325.

et religion, 325.

Page 380: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

So~c~èllerie /l'eàu béüite en); 326,'

Tabac à Sare; 130, 138, 146.Tableau trouvéen Angleterre,320.

à Bruges, 314.Taxation (le droit de), 29, 127.

(le dernier vote de), 29.Théâtre grec, 217 seq.Toponymie ibérienne, classique,

basque, 8, 183, 195, 347, 351.Touristes (bévues de), 191.Traités (droit de :faire), 123, 124.

Traités des Barétons et ROD(~al,79, 118,' 124.

du Lavedan et de lavallée d'Aspe, 124.

entre Basques, Français,Espagnols, 123-124.

entre Basques etAnglais,123.

Vicinal (le régime), 88.Vocabulaire basque '(le premier),

Page 381: Les loisirs d'un étranger au Pays Basque (1901)

PRÉFACE. VLISTE DES OUVRAGES CITÉS VII

1. Les Basques. 1

II. Note sur quélques constructions dans le départementdes Basses.Pyrénées. 41

III. Simon de Montfort et le Parlement anglais (1248-1265) 45IV. Quelques notes archéologiques sur les moeurs et insti-

tutions de la région pyrénéenne 73

V Le mot « Républiquedans les Py rénées Occidentales. 111

Pièces justifloatives 138

VI. Les faceries ou conventions internationales commu-nales dans les paysbasques. 161

Pièces justifleatives 185

VII. Sur quelques inscriptions du paysbasque et ses environs 191

VIII. Les Pastoralesbasques. 213Appendice. 238

IX. Les assurances mutuelles du bétail et le cheptel parmiles fermiers et paysans du Sud. Ouest de la Franceet du Nord de l'Espagne. 251

Pièces justificatives 276

X. De quelques travaux sur le basque faits par des étran-

gers pendant les années 1892-1894. 289

XI. Le serment solennel chez les Basques. 312

XII. La formule magique « Sator-Arepon. 323

XIII. Les Basques défendus et 1788 par un Anglais contre327les calomnies d'un Espagnol, évêque et cardinal. 32T

XIV. Sur la carte de l'État.Major dans les B~~£tt'énées. 343

INDEX 355i·.Chalon-sur-Saône. Imprimerie frança18e"etorientaledl6 Hs R~D

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