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Les materiauxcomposites et leurcomportement auvieillissementhydrothermique :Analyse des interphasesin-situ
91
CHAPITRE I - VIEILLISSEMENT HYDROTHERMIQUE DECOMPOSITES UNIDIRECTIONNELS
I. MATERIAUX COMPOSITES UNIDIRECTIONNELS UTILISESCette partie est consacrée à la caractérisation du vieillissement humide des interphases
in-situ. Dans cette optique, il est nécessaire dans un premier temps d’étudier les phénomènes
de sorption afin de déceler d’éventuels phénomènes spécifiques aux composites, en particulier
une diffusion préférentielle au sein des zones interfaciales. Il conviendra également de
déterminer le temps d’exposition nécessaire pour atteindre l’équilibre et situer ainsi la
caractérisation et l’évolution des propriétés interfaciales après vieillissement hydrothermique.
Fibres Matrice Plaque Vf± 0,11%
Tα (10Hz)(°C)
Vp
± 0,5%1200 Tex MDEA 1 57,7 175 5,1
1200 Tex MDEA 2 58,7 170 4,5
1200 Tex MTHPA 3 60,5 130 3,0
1200 Tex MTHPA 4 58,1 130 1,0
2400 Tex MDEA 5 62,2 170 3,3
2400 Tex MDEA 6 62,3 176 2,1
2400 Tex MTHPA 7 58,4 137 0,6
2400 Tex MTHPA 8 63,2 137 0,6
Tableau 1 – Paramètres structuraux initiaux des composites unidirectionnels : Vf, fractionvolumique de fibres, Tα, température de relaxation mécanique déterminée par analysemécanique dynamique à 10 Hz, Vp, fraction volumique de porosité
La réalisation de composites unidirectionnels par enroulement filamentaire n’a pas été
possible pour tous les types de fibres. Les fibres vierges et traitées γ-APS sont en effet
difficilement utilisables de part la configuration de stockage (bobine, dévidage par l’intérieur),
mais également pour des problèmes de mouillabilité et d’imprégnation. Quatre systèmes
correspondant aux deux types de résines et de fibres ensimées P122 ont donc été retenus. Les
paramètres de mise en œuvre sont présentés en annexe II.1 (p. A-10). La matrice des
composites ainsi réalisés, dont les propriétés sont présentées dans le Tableau 1, ne présente
pas d’exothermie résiduelle lors d’une montée en température par analyse DSC, indiquant un
état de cuisson maximal. Les techniques utilisées pour la caractérisation initiale sont
également présentées en annexe II.2 (p. A-10). La fraction volumique de fibres est un
92
paramètre difficile à contrôler, et varie suivant les systèmes de 58 à 63%. Les valeurs de la
température de transition vitreuse varient peu dans chacune des deux familles, ce qui valide la
mise en œuvre des composites. La porosité est en moyenne plus élevée pour les systèmes à
durcisseur amine, en raison de la viscosité plus élevée du mélange réactif. Le contrôle de
paramètres relatifs à l’enroulement filamentaire a néanmoins permis de réduire la porosité de
ces systèmes (plaques 7,8 par rapport à 1,2). Le diamètre des fibres joue peut-être également
un rôle, puisque la fraction volumique de porosité est en moyenne plus élevée pour les
composites à fibres 1200 Tex.
Nous attirons l’attention sur la « gestion » des plaques : certains essais mécaniques,
notamment la traction hors-axes, nécessitent de grandes quantités de matériau. La
caractérisation mécanique des différents systèmes n’a donc pas pu être réalisée sur les mêmes
plaques que les mesures par ultrasons et les cinétiques de sorption. Cet aléa expérimental
complique l’interprétation des données puisque les paramètres structuraux (fraction
volumique de fibres, porosité) varient d’une plaque à l’autre.
II. CINETIQUE DE SORPTION D’EAULes cinétiques de sorption des différents composites ont été réalisées en immersion à
60°C suivant le même protocole expérimental que les matrices seules. La Figure 1 présente
les courbes de sorption ramenées à la fraction de matrice. La sorption est fickéenne au cours
des premières étapes du vieillissement.
Fibres Durcisseur D (109cm2s-1) M (%) M*(%)
Vp
(%)Vf
(%)
MDEA 26 1,77 ± 0,07 - - -Matrice seule
Matrice seule MTHPA 37 0,96 ± 0,04 - - -
P122 1200 Tex MDEA 8,8 0,55 ± 0,08 2,53 4,5 58,7
P122 2400 Tex MDEA 5,9 0,41 ± 0,03 2,11 3,3 62,2
P122 1200 Tex MTHPA 4,3 0,28 ± 0,02 1,14 1,0 58,1
P122 2400 Tex MTHPA 6,5 0,24 ± 0,02 0,96 0,6 58,4
Tableau 2 - Paramètres de sorption des matrices polyépoxyde et composites en immersion à60°C déterminés à 50 h1/2 – D diffusivité, M prise de masse à l’équilibre, M* prise de masse àl’équilibre des composites unidirectionnels ramenée à la quantité de matrice
93
Les valeurs des paramètres de sorption calculées à 50 h1/2 sont regroupées dans le
Tableau 2. Comme attendu, la diffusivité de l’eau est plus faible au sein du composite : les
fibres constituent une barrière contre la pénétration de l’eau. Les coefficients de diffusion des
composites à durcisseur anhydride sont plus faibles que ceux de leurs homologues à
durcisseur amine alors que l’on observe la tendance inverse sur la matrice seule et que les
fractions volumiques de fibres devraient conduire au résultat inverse. Conformément aux
prises d’eau des réseaux sans renfort, les composites à matrice amine absorbent plus d’eau
que leur homologues à durcisseur anhydride.
0.0
0.5
1.0
1.5
2.0
2.5
3.0
0 20 40 60 80
Temps d'immersion (h1/2)
Pris
e de
mas
se (
%)
(a)
0.0
0.3
0.6
0.9
1.2
1.5
0 20 40 60 80
Temps d'immersion (h1/2)
Pris
e de
mas
se (
%)
(b)
Figure 1 – Cinétique de sorption (% par rapport à la matrice) des compositesunidirectionnels époxyde/amine (a) et époxyde/anhydride (b) : (▲) fibres 1200 Tex, (�) fibres2400 Tex et (z) matrice seule – Immersion dans l’eau à 60°C
94
Les prises de poids à l’équilibre ramenées à la quantité de matrice M* sont supérieures
à celles de la matrice (Figure 1), sauf pour le système DGEBA/MTHPA/P122 1200 Tex. Cet
écart à la loi des mélanges fibre/matrice est également observé par &+$7($80,12,6 ������ sur
composite DGEBA/DDM/fibres de verre R et augmente avec la température d’immersion.
Plusieurs interprétations peuvent être avancées pour expliquer cet écart :
- Bien qu’ayant été polymérisées selon les mêmes spécifications, la matrice seule et
la matrice au sein du composite subissent vraisemblablement des cycles
thermiques différents du fait de la présence de fibres de verre (conductivité
thermique du verre)
- Une diffusion préférentielle
(a) au niveau des zones interfaciales
(b) dans des fissures ou cavités crées lors du vieillissement
hydrothermique
(c) dans les porosités du composite issues des défauts de mouillage
L’hypothèse (a) est défendue par plusieurs auteurs �0$520 ����� ���� )$95( �����
:22 ���������� sur la base d’observations microscopiques avec ou sans décohésions fibre -
matrice. Cet argument est néanmoins fortement dépendant de la physico-chimie de
l’interphase (présence ou non d’un ensimage, agent de couplage). &+$7($80,12,6 ������ a
cependant montré en utilisant des échantillons de dimensions variables qu’il n’y avait pas de
diffusion préférentielle aux interphases DGEBA-DDM/fibres de verre R dans les premières
étapes du processus de sorption. Ceci a été attribué à la présence de l’agent de pontage γ-APS
dans l’ensimage des fibres qui conduit à une interphase résistante aux agressions
hydrothermiques.
L’hypothèse (b) est généralement avancée lors d’expositions dans des conditions
relativement sévères (immersion dans l’eau à 90°C pendant 500 jours (&+$7($80,12,6 �����
sur DGEBA/DDM/verre R) et se traduit par de fortes déviations aux lois de Fick.
L’hypothèse (c) est défendue par 7+20$6621 ������ et :22 (7 $/� ������� Ces derniers
concluent de la comparaison entre deux modèles décrivant l’évolution du coefficient de
diffusion avec la fraction volumique de fibre que les effets interfaciaux sont négligeables
devant ceux dus aux porosités. 7+20$6621 ������ a relié de manière directe la prise de masse
à l’équilibre de composite polyépoxyde/fibre de verre avec la fraction volumique de porosité.
95
Afin de valider une ou plusieurs des hypothèses décrites ci-dessus, nous proposons de
confronter les résultats obtenus avec le taux de porosité (hypothèse (c)) et la fraction de fibres
(hypothèse (a)). Nous écartons d’emblée l’hypothèse (b) puisqu’aucune déviation
significative à la loi de Fick n’est observée ici dans ces conditions relativement douces
d’exposition.
II.1. Ecart à la loi des mélanges : phénomènes interfaciaux ou porosité ?
La Figure 2 présente l’écart à la loi des mélanges M*-Mmat en fonction de la fraction
volumique de porosité et de la surface interfaciale. Cette dernière grandeur, dont le calcul est
présenté en annexe IV.4 (p. A-31), est représentative de la quantité d’ensimage et donc
d’interphase au sein du composite :
f
f
d
VS
4int =
avec Vf la fraction volumique de fibre et df le diamètre des fibres
80
100
120
140
0 0.2 0.4 0.6 0.8
Ecart à la loi des mélanges
Sur
face
inte
rfac
iale
(m
m2 /m
m3 ) (a)
0
1
2
3
4
5
6
0 0.2 0.4 0.6 0.8
Ecart à la loi des mélanges
Por
osité
(%
)
(b)
Figure 2 – Ecart à la loi des mélanges en fonction (a) de la surface interfaciale et (b) de lafraction volumique de porosité
96
Une corrélation significative peut être observée sur la Figure 2 entre la fraction
volumique de porosité et la prise de masse additionnelle. La relation linéaire passe par
l’origine, ainsi, lorsque la porosité est négligeable, la prise de masse correspond à celle de la
matrice seule. Rejoignant ainsi les conclusions de 7+20$6621 ������ et :22 (7 $/� �������
nous attribuons la diffusion préférentielle observée ici à la fraction volumique de porosité des
composites unidirectionnels. La diffusion au niveau des zones interfaciales peut être à priori
écartée, étant au moins négligeable devant celle des porosités.
Les composites à durcisseur anhydride présentent un taux de fibres identique, et leurs
cinétiques de sorption sont superposées jusqu’aux environs de 15 h1/2. La Figure 1 indique
donc que la diffusion préférentielle observée sur ces systèmes débute bien après les premiers
stades des processus de sorption et non dès le début de l’absorption. Le début de cette
diffusion préférentielle coïncide avec la fin de la partie linéaire de la courbe, pour une masse
d’eau absorbée correspondant à 60% de la prise de masse à l’équilibre environ. Cette étape
correspond à la rencontre des deux fronts de diffusion du solvant au centre de l’échantillon
�&5$1. �����. Ces phénomènes peuvent-ils expliquer les tendances observées sur les valeurs
de la diffusivité ?
II.2. Discussion sur les valeurs de diffusivité
a) APPLICATION DES LOIS DE FICK AUX COMPOSITES A FIBRES LONGUES
De nombreuses études, portant notamment sur des composites à fibres de carbone,
montrent que les lois de Fick permettent souvent de décrire de façon satisfaisante les
cinétiques de sorption d’eau. Certaines difficultés apparaissent cependant lorsqu’il s’avère
nécessaire de prendre en compte les problèmes d’anisotropie qui passent par la détermination
des coefficients de diffusion parallèlement (Dl) et perpendiculairement (Dp) à la direction des
fibres. La démarche généralement adoptée consiste à calculer Dp et Dl à partir du coefficient
de diffusion Dm de la matrice et de la fraction volumique de fibre Vf. Cette approche est basée
sur des analogies thermiques et électriques et suppose un empilement régulier (cubique ou
hexagonal) des fibres au sein de la matrice. .21'2 ������ (7+$+1 ������ proposent ainsi les
relations suivantes pour un empilement cubique des fibres :
Equation 1 ml DD =
97
Equation 2( )
mm
f
p DV
VaD
−=
1
Où Dm représente la diffusivité de la matrice, Vf et Vm les fractions volumiques de
fibres et de matrice respectivement et π2=a . :22 ������ propose
π32=a pour un
empilement hexagonal.
La démarche consiste ensuite à interpréter les différences entre les valeurs
expérimentales et théoriques s’il y a lieu. Sur des composites verre/polyépoxyde, '(:,0,//(
������ évalue ainsi le rapport Dl/Dp à environ 5 fois celui prédit par les Equation 1 et 2.
.21'2 ������ souligne ainsi que les irrégularités d’empilement des fibres prises en compte
sous la forme d’un facteur de tortuosité peuvent induire des déviations significatives par
rapport à cette analyse. )$95( ������ évoque également l’effet des contraintes résiduelles au
voisinage des fibres qui ont pour effet de distendre le réseau, ce qui accélérerait la diffusion.
L’influence de la porosité sur les valeurs de la diffusivité a été abordée par :22 ������.
En comparant l’ajustement de deux modèles basés sur la prise en compte des interphases
d’une part, et des vides d’autre part, les auteurs concluent que les effets interfaciaux sont
négligeables devant ceux dus à la porosité. Nous proposons à présent une démarche similaire,
consistant à confronter les résultats expérimentaux avec les prévisions théoriques.
b) CONFRONTATION EXPERIENCE – THEORIE
La Figure 3 présente les valeurs de la diffusivité obtenues expérimentalement et par la
théorie (Equation 2). Le description est satisfaisante pour les systèmes époxyde/amine en
considérant un arrangement cubique. Par contre, une diffusivité inférieure est obtenue pour le
système à durcisseur anhydride et fibres 1200 Tex par rapport au système à fibres 2400 Tex et
les points sont loin de la courbe théorique. Les écarts généralement observés vont dans le
sens d’une diffusivité plus rapide que celle prévue par la théorie �0$520 ����� )$95( �����.
Comment expliquer cette différence ? Seul l’outil théorique reste utilisable à ce stade
de la démarche. Nous proposons ainsi deux approches. La détermination de D suppose
l’absence de flux capillaires aux interphases et de diffusion préférentielle dans les pores. Or la
98
diffusion préférentielle débute vers 15 h1/2 pour les systèmes époxyde/anhydride. Il est donc
possible de recalculer les coefficients de diffusion expérimentaux en remplissant l’hypothèse
d’absence de diffusion préférentielle, c’est-à-dire en prenant la pente des courbes de sorption
pour des temps inférieurs au début de ce phénomène (ce qui est généralement le cas) mais
également avec la valeur de M* qui serait obtenue en l’absence de diffusion préférentielle,
c’est-à-dire en considérant la matrice comme seul vecteur de diffusion.
0.0
0.1
0.2
0.3
0.4
0.5
0.6
0.7
0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8Fraction volumique de fibres (%)
Dc/D
m
Empilement cubique
Empilement hexagonal
Figure 3 – Confrontation des valeurs de la diffusivité expérimentale pour les systèmes àdurcisseur amine (●) et anhydride (▲) avec la théorie (Equation 2)
Fibres Matrice Dmatrice
Dcomp.Exp.
Dcomp
th.
Mcomp
th.
Mcomp.Exp.
Drecalc
Fractionvolumiquede fibres
P122 1200 Tex MDEA 26 8,8 8,5 0,38 0,55 17,9 58,7
P122 1200 Tex MTHPA 37 4,3 2,3 0,24 0,28 6,1 58,1
P122 2400 Tex MDEA 26 5,9 7,6 0,35 0,41 8,4 62,2
P122 2400 Tex MTHPA 37 6,5 12,2 0,24 0,24 6,5 58,4
Tableau 3 - Valeurs des coefficients de diffusion (109 cm2.s-1) théoriques et expérimentauxpour les différents types de composites à 50 h1/2
99
Les prédictions théoriques présentées dans le Tableau 3 sont cette fois plus proches
des valeurs expérimentales pour les systèmes à durcisseur anhydride. Les diffusivités
supérieures pour les composites à matrice époxyde/amine suggèrent que la diffusion
préférentielle pourrait avoir lieu dès le début des processus de sorption pour ces systèmes.
0.2
0.3
0.4
0 0.02 0.04 0.06 0.08
Fraction volumique de porosité (%)
Dc/
Dm
Dv = 5 Dm
Dv = Dm
Dv = 3 Dm
Dv = 3 Dm
Dv = Dm/2
Figure 4 – Prédictions des valeurs de diffusivité d’après :22 ������ pour une fractionvolumique de fibre de 58% (traits pleins) et 62% (pointillés) ; à droite, les valeurs de ladiffusivité de l’eau dans les pores Dv – Systèmes époxyde/amine 1200 Tex (●) et 2400 Tex(◆)
Cette différence de comportement est confirmée par la modélisation d’après :22
������ qui permet de prendre en compte la diffusion préférentielle due à la porosité. Ce modèle
suppose que la diffusion dans les pores démarre dès le début de la sorption. Cette dernière
hypothèse pourrait expliquer l’impossibilité d’ajustement de ce modèle avec les systèmes à
durcisseur anhydride. Les composites époxyde/amine conduisent à une diffusivité des porosité
de l’ordre de 1 à 4 fois celle de la matrice suivant les systèmes (Figure 4), alors que :22
������ obtient un facteur 15 pour des systèmes DGEBA – dinorbornene spiro ortho carbonate /
fibres de verre.
100
II.3. Conclusion
Les cinétiques de sorption d’eau dans les composites unidirectionnels n’ont pas permis
de mettre en évidence de diffusion préférentielle aux interphases, mais le rôle prépondérant de
la fraction volumique de porosité. Celle-ci conduit à une prise de masse à l’équilibre
supérieure à celle prévue par la loi des mélanges fibre/matrice. La diffusion préférentielle ne
débute pas dans les premiers stades des processus de sorption pour les systèmes
époxyde/anhydride. Les tendances observées sur les valeurs de la diffusivité sont donc
délicates à interpréter. Rejoignant les conclusions de )$95( ������, le composite ne peut donc
être considéré comme un matériau homogène dans lequel seule la matrice contrôle le
processus de diffusion d’eau. Nous rappelons ici que la nature chimique des composants joue
un rôle prépondérant dans les phénomènes de sorption. Les interactions eau/réseau étudiées en
proche infrarouge sont plus fortes pour les réseaux à durcisseur amine. Ces tendances sont
également respectées pour les composites unidirectionnels et aucune différence significative
n’a pu être mise en évidence par rapport à l’étude proche infrarouge sur les interactions
eau/réseau présentée dans la première partie ce cet ouvrage.
101
CHAPITRE II - CARACTERISATION DU VIEILLISSEMENTHYDROTHERMIQUE DES INTERPHASES IN-SITU
L’étude des interphases au sein du composite sera abordée par le biais de
caractérisations mécaniques sollicitant préférentiellement l’interphase fibre/matrice. Cette
démarche sera appliquée dans le domaine élastique linéaire, mais également en considérant
les propriétés à rupture. Les estimations théoriques des différents modules utilisées au cours
de la discussion sont présentées en annexe IV.4 (p. A-32). Il conviendra d’apprécier l’aptitude
de l’approche mécanique à caractériser le vieillissement hydrothermique des interphases, et à
dégager l’influence de la nature des composants. Nous nous placerons dans l’hypothèse où le
module de la matrice est peu influencé par la sorption d’eau, comme cela a été montré au
cours de la première partie de ces travaux.
I. TECHNIQUES SOLLICITANT PREFERENTIELLEMENT L ’ INTERPHASE
I.1. Traction hors-axesCette technique consiste à appliquer
une contrainte uniaxiale dans une direction
différente de celle de l’axe des fibres. Le
composite undirectionnel est alors soumis
à un état de contrainte biaxial qui dépend
de l’angle θ entre la direction de
sollicitation et celle des fibres de renfort.
La déformation en cisaillement est
maximale pour un angle donné qui dépend
de la nature des composants du composite
�Figure 5�. $0'281, ������ et /$&5$03(
������ ont ainsi mis en évidence les
propriétés de divers types d’interphases sur
composites époxyde/fibre de verre pour un
angle de 10°. Les détails expérimentaux de
cette technique sont présentés en annexe
II.3 (p. A-11) (jauges d’extensométrie,
calcul des modules).
Figure 5 - Variation des déformations dansles axes du matériau en fonction de l’anglede sollicitation pour un compositeunidirectionnel d’après &+$0,6 ������
102
Les essais ont été réalisés pour un angle entre la direction de sollicitation et l’axe des
fibres de 10° et ont conduit à la détermination du module longitudinal E11 et de cisaillement
G12 à l’état sec et humide sur les mêmes lots de 3 échantillons par système.
I.2. Cisaillement interlaminaireCette méthode issue de la théorie des poutres �$)125 ����� consiste à appliquer à
vitesse constante un effort de flexion au centre de l’échantillon. Une telle sollicitation crée
simultanément un état de contrainte en traction/compression et en cisaillement le long de
l’axe neutre de l’échantillon. L’importance relative de ces deux composantes varie avec λ, le
rapport entre la distance entre appuis L et l’épaisseur h de l’échantillon, (Figure 6) et avec le
taux de fibres pour les matériaux composites �'(&+$5(17$< �����.
(a)
(b)
(L/h)c L/h
Figure 6 – A gauche : Influence du rapport L/h sur le mode de rupture en flexion ; A droite :Evolution des contraintes théoriques (a) en cisaillement et (b) en traction/compression dansune poutre en fonction du rapport L/h d’après 526(1+$)7 ������
La transition du mode de cisaillement (délaminage) au mode de traction/compression
se produit pour un taux de fibres donné, à une valeur critique de λ notée λc �'( &+$5(17$<
����� 526(1+$)7 �����. Les contraintes en cisaillement τr et en traction/compression σr
(Equation 3) atteignent alors simultanément leur valeur ultime (Figure 6). Il conviendra de se
placer à λ inférieur à λc afin d’analyser le comportement en cisaillement d’un composite.
Equation 3bh2
P3 fr
λ=σ etbh4
P3 cr =τ
103
Avec b,h largeur et épaisseur de l’échantillon, L distance entre appuis, Pc charge à rupture en
cisaillement, Pf charge à rupture en traction/compression.
L’approche de ),6&+(5 ������ nous a permis de déterminer par la méthode des
moindres carrés la valeur du module longitudinal et du module de cisaillement à partir des
modules apparents obtenus en faisant varier la distance entre appuis :
21311
111
λα
GEEapp
+=
La valeur de α, coefficient de cisaillement défini comme le rapport de la contrainte de
cisaillement au niveau de l’axe neutre et de la contrainte de cisaillement moyenne dans la
section de l’éprouvette, varie entre 1 et 1,5 suivant les auteurs. Pour 72/) (7 $/� ������, α est
égal à 1,2 pour un barreau rectangulaire. Toutefois, la valeur de α donnée par la théorie de
l’élasticité est la plus exacte :
( )21
21
110
1112
ν+ν+
=α
avec ν21 coefficient de Poisson du matériau dans le repère 1,2.
Les mesures de modules par ultrasons ont été effectuées en collaboration avec l’équipe
du Pr. Baboux (GEMPPM, INSA de Lyon).
II. CARACTERISATION DE LA RESISTANCE HYDROTHERMIQUE DESINTERPHASES DANS LE DOMAINE LINEAIRE ELASTIQUE
II.1. Est-il possible de dégager l’influence de la nature des composants ?Les Figures 7 et 8 présentent les modules longitudinaux E11 et de cisaillement G12 des
différents systèmes. Le module longitudinal dépend essentiellement du taux de fibres ; les
valeurs obtenues par les essais mécaniques suivent bien cette tendance, mais sont néanmoins
supérieures à celles prévues par la loi des mélanges, l’écart augmentant avec la fraction
volumique de fibres. Les valeurs les plus proches de la théorie sont obtenues par
viscoélasticimétrie même si cette technique ne permet pas d’accéder à des valeurs absolues du
module (raideur de la machine non infinie). Les valeurs du module de cisaillement G12
obtenues en flexion sont faibles devant celles déterminées en traction hors-axes. Ceci est en
accord avec les travaux de la littérature (/$&5$03( �����.
Les résultats de traction hors-axes présentent cependant une dispersion plus
importante, probablement en raison de l’incertitude induite par l’angle entre l’axe des fibres et
celui formé par les jauges de déformation. Les incertitudes de mesures sur le module de
104
cisaillement sont ainsi de l’ordre de 16% pour une erreur de 1° sur la direction des fibres en
traction hors-axes, de 5% pour la flexion et de 3 à 5% pour les mesures ultrasonores.
35
45
55
65
75
57 59 61 63
Fraction volumique de fibres (%)
Mod
ule
long
itudi
nale
(G
Pa)
Figure 7 – Module longitudinal E11 déterminé en flexion (●), traction hors-axes (■), parultrasons (◆), par analyse mécanique dynamique en traction (▲) et par la loi des mélanges(trait rouge)
0
2
4
6
8
10
12
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
de c
isai
llem
ent G
12 (
GP
a)
0.4
0.6
0.8
1.0
1.2
Figure 8 - Module de cisaillement G12 déterminé par ultrasons (vert), flexion (rouge, axe dedroite), et par traction hors-axes (jaune)
Est-il possible à ce stade de dégager l’influence de la nature des composants sur les
propriétés interfaciales ?
Les composites à durcisseur anhydride présentent les modules de cisaillement et
module transverse (Figure 9) les plus élevés, conformément aux modules des matrices et à la
théorie �+$/3,1 �����. Celle-ci prévoit en effet une forte dépendance de G12 avec le module
de la matrice, mais ne prend pas en compte l’effet du diamètre des fibres, qui est lié à la
105
quantité d’ensimage et donc d’interphase au sein du composite. La Figure 8 montre que le
module de cisaillement le plus élevé déterminé par essais mécaniques pour une même matrice
est obtenu avec les composites à fibres de diamètre plus important 2400 Tex. Il convient
cependant de rester prudent, puisque ces composites présentent également la fraction
volumique de fibres la plus importante, et que le taux de porosité varie d’un composite à
l’autre.
2
5
8
11
14
17
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ules
E22
et G
23 (
GP
a)
Figure 9 – Module transverse E22 (rouge) et de cisaillement G23 (jaune) déterminés parultrasons
0
2
4
6
8
10
0.5 0.6 0.7 0.8
Fraction volumique de fibres (%)
Mod
ule
de c
isai
llem
ent (
GP
a) MTHPA
MDEA
Figure 10 – Evolution du module de cisaillement G12 en fonction de la fraction volumique defibres pour les composites à durcisseur amine (en noir) et anhydride (en rouge) d’après+$/3,1 ������ � Résultats expérimentaux : (●) flexion, (■) traction hors-axes et (◆) mesuresultrasonores
106
L’évolution théorique du module de cisaillement en fonction de la fraction volumique
de fibres est présentée sur la Figure 10. Nous nous sommes servi de cette relation pour
ramener les valeurs du module de cisaillement à taux de fibres équivalent afin de s’affranchir
de ce paramètre. Les résultats présentés dans le Tableau 4 montrent que l’influence du
diamètre est peu significative. Seules les valeurs de traction hors-axes se prononcent en faveur
d’une interphase plus forte pour les fibres de diamètre plus important. Il convient cependant
de rester prudent puisqu’il s’agit d’une extrapolation issue de la théorie.
G12 flexion(GPa)
G12 flexionEq. (GPa)
G12 THA(GPa)
G12 THAEq. (GPa)
G12 US(GPa)
G12 USEq. (GPa)
MDEA 1200 Tex 0,83 1,04 4,8 5,9 5,7 5,7MDEA 2400 Tex 1,04 1,04 7,3 7,3 5,8 5,4
MTHPA 1200 Tex 1,12 1,33 6,6 7,8 6,8 6,8MTHPA 2400 Tex 1,21 1,21 9,7 9,7 6,9 6,9
Tableau 4 – Module de cisaillement G12 extrapolé à fraction volumique de fibres équivalenteà l’aide de la relation d’ +$/3,1 ������
II.2. Influence du vieillissement hydrothermiqueL’évolution du module longitudinal après vieillissement hydrothermique est présentée
sur la Figure 11. La contribution essentielle est celle de la fraction volumique de fibres et les
variations obtenues sont peu représentatives. Rejoignant les conclusions de -21(6 (7 $/�
������, l’évolution du module longitudinal de composites unidirectionnels ne peut être utilisée
pour la caractérisation du vieillissement hydrothermique de ces matériaux.
La tendance concernant le module de cisaillement G12 obtenu par les différentes
techniques (Figure 12) et les modules de cisaillement G13 et transverse E22 déterminés par
ultrasons (Figure 13) va dans le sens d’une augmentation pour l’ensemble des systèmes. Cette
augmentation est néanmoins peu marquée pour le composite DGEBA/MDEA/1200 Tex.
Nous rappelons également que les mesures mécaniques et par ultrasons ont été réalisées sur
des plaques différentes, présentant notamment des fractions volumiques de fibres et de
porosité différentes. D’autre part, les mesures ultrasons effectuées à haute fréquence
correspondent à une mesure du module à une température inférieure aux températures de
relaxations α et β de la matrice et α de l’interphase. La technique la plus sensible est le
cisaillement interlaminaire (méthode de Fischer).
107
40
50
60
70
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
de lo
ngitu
dina
l (G
Pa)
(a)
35
45
55
65
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
de lo
ngitu
dina
l (G
Pa)
(b)
35
40
45
50
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
long
itudi
nal (
GP
a)
(c)
Figure 11 - Influence du vieillissement hydrothermique sur la valeur du module longitudinaldéterminé en flexion (a), traction hors-axes (b) et par ultrasons (c) – Etat initial (foncé) etaprès vieillissement 50 h1/2 en immersion à 60°C (clair)
108
0.0
0.5
1.0
1.5
2.0
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
de c
isai
llem
ent (
GP
a)
(a)
2
4
6
8
10
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
de c
isai
llem
ent (
GP
a)
(b)
3
4
5
6
7
8
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
de c
isai
llem
ent (
GP
a)
(c)
Figure 12 – Influence du vieillissement hydrothermique sur la valeur du module decisaillement G12 déterminé en flexion (a), traction hors-axes (b) et par ultrasons (c) – Etatinitial (foncé) et après vieillissement 50 h1/2 en immersion à 60°C (clair)
109
10
12
14
16
18
20
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
tran
sver
se E
22 (
GP
a)
(a)
4
5
6
7
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Mod
ule
de c
isai
llem
ent G
23 (
GP
a) (b)
Figure 13 - Influence du vieillissement hydrothermique sur la valeur (a) du module transverseE22 et (b) de cisaillement G23 déterminé par ultrasons – Etat initial (foncé) et aprèsvieillissement 50 h1/2 en immersion à 60°C (clair)
L’influence de la nature des composants est encore une fois délicate à dégager, les
différentes techniques semblant présenter des sensibilité spécifiques. Il est possible ici de
raisonner en valeur absolue des modules après vieillissement, mais également en terme de
leur évolution relative. Les mesures par ultrasons et la traction hors-axes mènent ainsi à des
modules supérieurs pour les systèmes époxyde/anhydride, alors que la flexion et la traction
hors-axes semble dégager l’influence du diamètre des fibres. L’augmentation du module G12
ainsi que sa valeur absolue sont en effet supérieures pour les fibres de diamètre élevé. La
Figure 14a présente ainsi l’évolution relative de G12 en fonction de la surface interfaciale.
Notons également que l’évolution des modules E22, G12 et G23 déterminés par mesures
ultrasonores suivent les mêmes tendances pour chaque système (Figure 14b).
110
0
20
40
60
80
80 90 100 110 120 130
Surface interfaciale (mm2/mm3)
Evo
lutio
n re
lativ
e de
G12
(%
) -
Fle
xion
-10
-6
-2
2
6
Evo
lutio
n re
lativ
e de
G12
(%
) -
Tra
ctio
n ho
rs a
xes
- U
S
(a)
-10
-6
-2
2
6
10
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Evo
lutio
n re
lativ
e (%
)
G13 E22 G12
(b)
Figure 14 – Evolution relative (a) du module de cisaillement G12 déterminé en flexion (●,traits rouge, axe de gauche), traction hors-axes (■, trait noir, axe de droite) et par ultrasons(◆, axe de droite) en fonction de la surface interfaciale et (b) des modules de cisaillement G12
et G13 et du module transverse E22 déterminés par ultrasons
Ainsi, si l’influence du diamètre des fibres reste peu significative sur les propriétés
mécaniques initiales des composites unidirectionnels, les évolutions observées après
vieillissement hydrothermique sont plus importantes lorsque la surface interfaciale est plus
faible (diamètre plus important). Il convient encore une fois de rester prudent, puisque les
concentrations de contraintes ne sont pas les mêmes. Dans les deux cas, les composites à
matrice époxyde / anhydride présentent des modules élastiques supérieurs avant et après
vieillissement.
111
II.3. Une post-condensation des interphases
L’évolution des modules observée dans cette étude n’est pas classique, et plutôt
surprenante à première vue. Peu d’auteurs se sont intéressés à cette grandeur dans la littérature
et les résultats vont dans le sens d’une diminution du module de flexion apparent après
vieillissement hydrothermique pour les systèmes polyépoxyde/fibres de verre �*+26+ �����.
L’étude du spectre de relaxation des composites unidirectionnels à différentes fréquences de
sollicitation en flexion ne nous a pas permis de mettre en évidence de manière nette et
reproductible une relaxation propre à l’interphase et une éventuelle modification de la nature
de ces zones après vieillissement. En considérant que les valeurs du module de la matrice ne
sont pas affectées par le vieillissement hydrothermique et le caractère hybride I/O de ces
zones, nous proposons d’attribuer les phénomènes observés à une post-condensation de
l’interphase au cours du vieillissement. Les résultats obtenus ici valideraient ainsi les
approches sur composés macroscopiques modèles des interphases fibre de verre – matrice
polyépoxyde �6(5,(5 ����� 6$/021 �����. 6(5,(5 ������ a ainsi montré que la condensation de
systèmes DGEBA/γ-APS au cours du vieillissement à 60°C et 98% HR conduit à une
augmentation de la valeur du module au plateau caoutchoutique de près de 100% (Tableau 5).
D’autre part, la condensation des interphases au sein de composites unidirectionnels pourrait
avoir lieu dans les premières étapes du vieillissement uniquement. Nous appuyons cet
argument par des mesures de traction hors-axes effectuées après 75 h1/2 de vieillissement en
immersion à 60°C qui ne montrent pas de variation significative par rapport aux évolutions
présentées ici. Ceci est également à relier aux travaux de 6$/021 ������ sur composés
modèles qui montrent que l’hydrolyse/condensation des interphases est un phénomène
équilibré.
Traitement hygrothermique Tα (°C) Ec (MPa)Etat initial 35 6,3
Vieilli 1h, 60°C et 98% HR 46 11
Tableau 5– Température de transition mécanique principale et module au plateaucaoutchoutique Ec à 11 Hz d’un composé DGEBA/γ-APS – Influence du traitementhygrothermique
112
III. INFLUENCE DE LA POST-CONDENSATION DES INTERPHASES SUR
LE COMPORTEMENT A RUPTURE DES COMPOSITESUNIDIRECTIONNELS
III.1. Modes de ruptureL’évolution des contraintes de cisaillement et de traction/compression à rupture en
fonction du rapport distance entre appuis sur épaisseur est présentée sur la Figure 15. La
transition entre les modes de rupture est délicate à déterminer avec précision pour nos
systèmes, notamment pour les composites à fibres 1200 Tex après vieillissement
hydrothermique. La nature de la fibre influe en effet sur le mode de rupture �'$1,(/6 �����
526(1+$)7 �����. En présence de fibres de verre, la transition du mode de cisaillement au
mode de traction/compression est beaucoup moins nette que dans le cas des fibres de carbone.
Les valeurs du rapport L/h critique sont regroupées dans le Tableau 6.
Système λc – Etat initial λc – Après vieillissementMDEA/1200 Tex 11 -
MTHPA/1200 Tex 11 -MDEA/2400 Tex 14 13
MTHPA/2400 Tex 14 12,5
Tableau 6 - Valeurs du rapport critique λc à l’état initial et après vieillissement en immersion50 h1/2 à 60°C
Le rapport critique λc augmente avec le diamètre des fibres, ce qui correspond à une
extension du domaine de sollicitation en cisaillement. Le taux de fibres joue également un
rôle sur le mode de rupture des composites. Pour des taux de fibres faibles (< 40%), la rupture
en traction est favorisée alors que pour des taux de fibres élevés (> 70%), le cisaillement
interlaminaire l’emporte �'$1,(/6 ����� &+5,7,$16(1 ����� pour une même valeur de λ. Pour
nos systèmes, les variations de la fraction volumique de fibres ne dépassent pas 5% et peuvent
être considérées comme négligeables compte-tenu de la précision sur la mesure de λc.
%28.+,/, (7 $/� ������ ont étudié l’effet de la vitesse de chargement sur le mode de rupture.
Le rôle prépondérant de la matrice a ainsi pu être mis en évidence : les composites
verre/polyester sont plus sensibles à la vitesse de chargement que les composites
verre/polyépoxyde. Ceci est expliqué par la plus grande ductilité de la matrice polyester. Pour
des valeurs intermédiaires du rapport L/h, la rupture se fait en traction si la vitesse est faible et
113
survient en cisaillement si la vitesse est élevée. La fragilité de la matrice augmente avec la
vitesse de chargement.
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MDEA/1200 Initial
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MTHPA/1200 Initial
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MDEA/2400 Initial
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MTHPA/2400 Initial
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MDEA/1200 Vieilli
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MTHPA/1200 Vieilli
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MDEA/2400 Vieilli
20
30
40
50
60
70
80
0 5 10 15 20 25λ
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
ci
saill
emen
t (M
Pa)
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Con
trai
nte
à ru
ptur
e en
tr
actio
n (G
Pa)
MTHPA/2400 Vieilli
Figure 15 – Evolution des contraintes à rupture en cisaillement (■) et entraction/compression (◆) en fonction du rapport distance entre appuis sur épaisseur pour lesdifférents systèmes à l’état initial et après immersion dans l’eau 50 h1/2 à 60°C
114
L’effet d’une augmentation du diamètre des fibres est donc similaire à celui d’une
augmentation de la vitesse de sollicitation et de la fraction volumique de fibres : pour un
rapport λ donné (12 par exemple), on assiste à une rupture en traction pour des diamètres
faibles (vitesse de sollicitation/taux de fibres faibles – surface interfaciale importante) alors
que celle-ci a lieu en cisaillement pour les diamètres plus élevés (vitesse de sollicitation/taux
de fibres élevés – surface interfaciale faible). Les composites à fibres 2400 Tex sont dans ce
sens plus fragiles, et présentent une surface interfaciale sollicitée plus faible à fraction
volumique de fibres équivalente. Les concentrations de contraintes ne sont pas les mêmes
dans les deux cas.
L’influence du vieillissement hydrothermique sur le rapport critique λc n’est pas
évidente à apprécier, en raison de l’imprécision qui pèse sur la mesure de celui-ci. La
plastification de la matrice peut avoir un effet similaire à la diminution de la vitesse de
sollicitation et conduire à une chute de λc. La post-condensation des zones interfaciales
conduisant à un matériau plus fragile pourrait avoir l’effet inverse.
III.2. Analyse quantitative des données à rupture
Nous disposons ainsi de 2 séries d’essais pour lesquelles la rupture a lieu en
cisaillement, pour λ de l’ordre de 5 et 9 respectivement. La variation des valeurs de λ est due
à la variation de l’épaisseur des plaques inhérente à la technique de mise en œuvre. Les
courbes force-flèche pour les différents systèmes à l’état initial et vieilli sont présentées sur la
Figure 16.
A l’état initial, le rapport L/h le plus faible conduit à un domaine de plasticité plus
important et plusieurs surfaces de délaminage peuvent être observées sur la face latérale de
l’échantillon. La rupture est fragile et a lieu par délaminages successifs sur la même surface
pour λ=9. Ces considérations sont appuyées par l’observation visuelle des échantillons après
test. Le vieillissement hydrothermique induit une augmentation du domaine de plasticité dans
les deux cas. Les ruptures sont dans l’ensemble plus nettes et plus fragiles pour les systèmes
époxyde/anhydride.
115
0
600
1200
1800
2400
3000
3600
0 0.3 0.6 0.9 1.2 1.5Flèche (mm)
For
ce (
N)
λ = 5,3INITIAL
0
500
1000
1500
2000
2500
3000
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3Flèche (mm)
For
ce (
N)
λ = 9INITIAL
0
500
1000
1500
2000
2500
3000
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3
Flèche (mm)
For
ce (
N)
λ = 9,9VIEILLI
Figure 16 – Courbes charge imposée – flèche obtenues lors d’un essai de flexion pour deuxrapports distance entre appuis sur épaisseur correspondant à une rupture en cisaillement –Influence du vieillissement en immersion 50 h ½ à 60°C : MDEA 1200 Tex (noir), MTHPA1200 Tex (vert), MDEA 2400 Tex (jaune), MTHPA 2400 Tex (rouge)
Nous avons donc choisi de présenter les données à rupture pour un rapport L/h de
l’ordre de 9, afin de s’affranchir des importants phénomènes de plasticité observés pour un
rapport distance entre appuis sur épaisseur plus faible. L’évolution des grandeurs à rupture
présentée sur la Figure 17 permet de dégager l’influence du type de matrice ; les systèmes
époxyde/anhydride présentent dans l’ensemble des caractéristiques meilleures. L’influence du
diamètre est plus délicate à apprécier ; les fibres 2400 Tex semblent toutefois conduire à de
meilleures propriétés. Les approches énergétique et en termes de contrainte sont en accord
satisfaisant pour un rapport L/h de l’ordre de 9, pour lequel la plasticité est réduite ; ceci n’est
plus vrai pour λ=5. La diminution de la contrainte à rupture en cisaillement n’excède pas 10%
dans tous les cas, ce qui est en accord avec les résultats de la littérature présentés au cours du
chapitre III de la première partie de ces travaux.
116
40
50
60
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Con
trai
nte
à ru
ptur
e (
MP
a)
(a)
20
30
40
50
MDEA/1200 MTHPA/1200 MDEA/2400 MTHPA/2400
Ene
rgie
à r
uptu
re (
kJ/m
2 ) (b)
Figure 17 - Contrainte (a) et énergie à rupture (b) en cisaillement à l’état sec (foncé) et aprèsvieillissement 50 h1/2 en immersion à 60°C (clair) pour un rapport distance entre appuis surépaisseur de l’ordre de 9
III.3. Analyse fractographiqueLa planche 2 présente les faciès de rupture des différents systèmes à l’état initial et
après vieillissement. La surface « nue » des fibres, ainsi que la présence d’empreintes laissées
par les fibres montre que la rupture se propage principalement à l’interface. Les faciès sont
néanmoins marqués par de nombreuses « lamelles » dans les zones riches en matrice, dont
l’observation est l’objet de la Planche 3. Elle sont issues de la formation de microfissures de
forme sigmoïdale dans la matrice �-25'$1 ����� %5$'/(< ����� planche 3f�� L’avancée du
front de fissure se fait par coalescence de ces microfissures et conduit à la formation des
lamelles observées. La formation des microfissures sigmoïdales résulte de la compétition
entre la résistance de la matrice en cisaillement et l’adhésion à l’interphase �0$'+8.$5 �����.
117
MDEA / 1200 Tex - Initial MDEA / 1200 Tex - Vieilli
MDEA / 2400 Tex - Initial MDEA / 2400 Tex - Vieilli
MTHPA / 1200 Tex - Initial MTHPA/ 1200 Tex - Vieilli
MTHPA / 2400 Tex - Initial MTHPA / 2400 Tex - Vieilli
Planche 2 - Faciès de rupture en cisaillement pour L/h de l’ordre de 9 – Influence duvieillissement en immersion dans l’eau 50 h1/2 à 60°C
118
(a) (b)
(c) (d)
(e) (f)
Planche 3 - Faciès de rupture en cisaillement pour L/h de l’ordre de 9 - Observation des“lamelles” dans les zones riches en matrice – Système époxyde/anhydride 1200 Tex - vue dehaut état initial (a) et de face état initial (b) et après vieillissement (c) - Système MDEA 1200Tex après vieillissement (d) – Système MDEA 2400 Tex après vieillissement (e) - Observationd’une microfissure sigmoïdale – système MDEA 2400 Tex après vieillissement (f)
119
Ce phénomène dissipatif associé à une forte adhésion est beaucoup plus important
pour les systèmes époxyde/anhydride et pour les fibres de diamètre faible dans une moindre
mesure. Les lamelles résultantes sont plus nombreuses et plus petites pour ces systèmes. Ceci
vient donc confirmer les tendances observées sur les valeurs des grandeurs à rupture quant à
l’influence du type de matrice. D’autre part, l’apparition de lamelles de taille importante pour
les systèmes époxyde/amine après vieillissement va dans le sens d’une capacité de transfert de
charge supérieure après vieillissement humide, tout comme l’augmentation du nombre de ces
lamelles pour les systèmes époxyde/anhydride. Cette évolution des faciès de rupture n’est pas
« classique », tout comme celle du module de cisaillement. Le vieillissement hydrothermique
conduit généralement à la disparition de ces lamelles après vieillissement humide, pour des
systèmes polyépoxyde – fibres de verre ('$9,(6 ����� et fibres de carbone (.$(/%/( �����
0$520 ����) et permet aux auteurs d’attribuer la chute des propriétés à la dégradation des
zones interfaciales (.$(/%/( ����� '$9,(6 �����. L’apparition/augmentation du nombre de
lamelles est cependant cohérente avec la post - condensation des zones interfaciales évoquée
précédemment. L’analyse fractographique est donc un outil capable de caractériser l’évolution
des propriétés des interphases tout en dégageant l’influence de la nature des composants.
IV. CONCLUSIONLa caractérisation mécanique des composites unidirectionnels a permis de dévoiler un
phénomène nouveau, prédit par les approches sur composés macroscopiques modèles, la post
- condensation des interphases au cours du vieillissement hydrothermique. Ce phénomène a
été mis en évidence à la fois dans le domaine linéaire élastique, par une augmentation des
modules de cisaillement G12, G13 et du module transverse E22, mais également par
l’observation des faciès de rupture des composites avant et après vieillissement. Ce
phénomène a lieu principalement au cours des premières étapes des processus de
vieillissement et semble présenter un caractère équilibré. Les composites unidirectionnels
testés présentent dans l’ensemble une bonne résistance au vieillissement hydrothermique,
puisque la chute de la contrainte à rupture après vieillissement en immersion à 60°C n’excède
pas 10% dans tous les cas. L’influence de la nature des composants reste toutefois délicate à
dégager par cette approche, en raison des paramètres structuraux inhérents aux composites
unidirectionnels. L’approche micromécanique devrait permettre de s’en affranchir.