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ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2014 - N°458 // 51 article reçu le 12 octobre, accepté le 15 octobre 2013. © 2013 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés. SUMMARY Next-generation sequencing in lung cancer: Main technologies, applications and current limitations in pathology Substantial advances have been made in understan- ding molecular and cellular mechanisms driving tumor initiation and progression in non–small-cell lung cancer (NSCLC). Over the last decade, these findings have led to the discovery of a variety of molecular targets and the development of targeted therapies. This approach is currently best exemplified by treating patients with NSCLC with first-line tyrosine kinase inhibitors when their cancers harbor gain-of-function hotspot mutations in the epidermal growth factor receptor (EGFR) gene or anaplastic lymphoma kinase ( ALK) gene rearrangements. As cancer is a complex disease driven by heritable or somatic mutations, new DNA sequencing technolo- gies will have a significant impact on the detection, management and treatment of cancer. Next-generation sequencing is enabling the catalogue the genomic landscape of thousands of cancer genomes. These discoveries will ultimately lead to a better understan- ding of disease pathogenesis, bridging to a new era of molecular pathology and personalised medicine. Many molecular pathology laboratories are now considering the sequencing platforms, methods and additional equipment required for making the transition to NGS. Here we review the current status of NGS technologies, challenges and applications with special consideration given to the development of clinical sequencing. Next generation sequencing – pathology – thoracic oncology. RÉSUMÉ Durant la dernière décennie, des progrès spectaculaires ont été menés dans la compréhension des mécanismes moléculaires et cellulaires gouvernant l’initiation et la progression tumorale des cancers broncho- pulmonaires non à petites cellules (CBNPC). En parallèle, des progrès thérapeutiques majeurs ont été réalisés avec la découverte de plu- sieurs cibles moléculaires et le développement des thérapies ciblées. Actuellement, ces approches sont parfaitement illustrées par le traite- ment des patients atteints de CBNPC avec des inhibiteurs de tyrosine kinase lorsque la tumeur présente une mutation activatrice sur le gène de l’ EGFR ou un réarrangement du gène ALK. La liste des biomar- queurs analysés en génétique somatique est amenée à s’accroître à court terme en raison du nombre croissant de thérapies ciblées en cours de développement. Des avancées technologiques récentes se traduisant par le dévelop- pement du séquençage de nouvelle génération (NGS) offrent la pos- sibilité d’interroger rapidement et de manière exhaustive le génome des CBNPC, même sur des biopsies de petite taille. C’est dans ce contexte que les pathologistes moléculaires doivent faire face au défi de déterminer comment sélectionner, interpréter et appliquer progres- sivement dans leur laboratoire ces nouvelles technologies de géno- mique. Cette revue rapporte l’état actuel des principales technologies de NGS, leurs applications et leurs limites actuelles, en particulier dans le cadre des CBNPC. Séquençage de nouvelle génération – pathologie – oncologie thoracique. Marius Ilie a,b, *, Élodie Long a , Véronique Hofman a,b , Virginie Lespinet b , Olivier Bordone b , Kevin Washetine a,b , Virginie Gavric-Tanga b , Paul Hofman a,b, * Les méthodes de séquençage de « nouvelle génération » (NGS) et le cancer broncho-pulmonaire : principales technologies, applications et limites actuelles en pathologie a Laboratoire de pathologie clinique et expérimentale Centre hospitalo-universitaire de Nice – Hôpital Pasteur 30, av. de la Voie Romaine – B.P. 69 06001 Nice cedex 01 b Biobanque/CRB Nice Centre hospitalo-universitaire de Nice – Hôpital Pasteur 30, av. de la Voie Romaine – B.P. 69 06001 Nice cedex 01 * Correspondance [email protected] [email protected] 1. Introduction Le cancer est une cause majeure de décès dans le monde, soit environ 13 % de la mortalité mondiale [1]. Il s’agit d’une maladie complexe aux facteurs multiples, génétiques, liés à l’environnement et au mode de vie [2]. Jusqu’à présent, sur les 22 000 gènes codant pour des protéines du génome humain, 350 gènes directement associés aux cancers

Les méthodes de séquençage de « nouvelle génération » (NGS) et le cancer broncho-pulmonaire: principales technologies, applications et limites actuelles en pathologie

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ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JANVIER 2014 - N°458 // 51

article reçu le 12 octobre, accepté le 15 octobre 2013.

© 2013 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés.

SUMMARY

Next-generation sequencing in lung cancer:

Main technologies, applications and current

limitations in pathology

Substantial advances have been made in understan-ding molecular and cellular mechanisms driving tumor initiation and progression in non–small-cell lung cancer (NSCLC). Over the last decade, these findings have led to the discovery of a variety of molecular targets and the development of targeted therapies. This approach is currently best exemplified by treating patients with NSCLC with first-line tyrosine kinase inhibitors when their cancers harbor gain-of-function hotspot mutations in the epidermal growth factor receptor (EGFR) gene or anaplastic lymphoma kinase (ALK) gene rearrangements. As cancer is a complex disease driven by heritable or somatic mutations, new DNA sequencing technolo-gies will have a significant impact on the detection, management and treatment of cancer. Next-generation sequencing is enabling the catalogue the genomic landscape of thousands of cancer genomes. These discoveries will ultimately lead to a better understan-ding of disease pathogenesis, bridging to a new era of molecular pathology and personalised medicine. Many molecular pathology laboratories are now considering the sequencing platforms, methods and additional equipment required for making the transition to NGS. Here we review the current status of NGS technologies, challenges and applications with special consideration given to the development of clinical sequencing.

Next generation sequencing – pathology – thoracic oncology.

RÉSUMÉDurant la dernière décennie, des progrès spectaculaires ont été menés dans la compréhension des mécanismes moléculaires et cellulaires gouvernant l’initiation et la progression tumorale des cancers broncho-pulmonaires non à petites cellules (CBNPC). En parallèle, des progrès thérapeutiques majeurs ont été réalisés avec la découverte de plu-sieurs cibles moléculaires et le développement des thérapies ciblées. Actuellement, ces approches sont parfaitement illustrées par le traite-ment des patients atteints de CBNPC avec des inhibiteurs de tyrosine kinase lorsque la tumeur présente une mutation activatrice sur le gène de l’EGFR ou un réarrangement du gène ALK. La liste des biomar-queurs analysés en génétique somatique est amenée à s’accroître à court terme en raison du nombre croissant de thérapies ciblées en cours de développement.Des avancées technologiques récentes se traduisant par le dévelop-pement du séquençage de nouvelle génération (NGS) offrent la pos-sibilité d’interroger rapidement et de manière exhaustive le génome des CBNPC, même sur des biopsies de petite taille. C’est dans ce contexte que les pathologistes moléculaires doivent faire face au défi de déterminer comment sélectionner, interpréter et appliquer progres-sivement dans leur laboratoire ces nouvelles technologies de géno-mique. Cette revue rapporte l’état actuel des principales technologies de NGS, leurs applications et leurs limites actuelles, en particulier dans le cadre des CBNPC.

Séquençage de nouvelle génération – pathologie – oncologie thoracique.

Marius Iliea,b,*, Élodie Longa, Véronique Hofmana,b, Virginie Lespinetb, Olivier Bordoneb, Kevin Washetinea,b, Virginie Gavric-Tangab, Paul Hofmana,b,*

Les méthodes de séquençage de « nouvelle génération » (NGS) et le cancer broncho-pulmonaire : principales technologies, applications et limites actuelles en pathologie

a Laboratoire de pathologie clinique et expérimentaleCentre hospitalo-universitaire de Nice – Hôpital Pasteur30, av. de la Voie Romaine – B.P. 6906001 Nice cedex 01 b Biobanque/CRB NiceCentre hospitalo-universitaire de Nice – Hôpital Pasteur30, av. de la Voie Romaine – B.P. 6906001 Nice cedex 01

* [email protected]@chu-nice.fr

1. Introduction

Le cancer est une cause majeure de décès dans le monde, soit environ 13 % de la mortalité mondiale [1]. Il s’agit d’une maladie complexe aux facteurs multiples, génétiques, liés à l’environnement et au mode de vie [2]. Jusqu’à présent, sur les 22 000 gènes codant pour des protéines du génome humain, 350 gènes directement associés aux cancers

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ont été identifiés [3]. Cependant, à partir d’études in vivo, on estime aujourd’hui que plus de 2 000 gènes pourraient jouer un rôle dans l’apparition ou le développement d’un cancer [3]. Le génome des cancers est constitué de mutations « ger-minales » spécifiques de chaque individu auxquelles s’ajoutent les mutations « acquises » ou « somatiques ». Au sein des mutations somatiques, on distingue les mutations « conductrices » (« driving mutations ») conférant aux cellules un potentiel de croissance et de survie, et les mutations « de passage » (« passenger mutations »). Une mutation « de passage » peut parfois devenir une mutation « conduc-trice » et induire la récidive d’un cancer, sous l’effet, par exemple, d’une modification du microenvironnement tumoral par une chimiothérapie [4]. La compréhension récente de nouveaux mécanismes moléculaires des cancers a permis l’identification de certaines mutations « conductrices » ou de « biomarqueurs » permettant une optimisation thérapeutique.Ainsi, au cours de la dernière décennie, d’importants progrès thérapeutiques ont été réalisés avec le développement et l’application de nouvelles approches thérapeutiques ciblant des voies de signalisation impliquées dans la croissance et la survie des cellules cancéreuses (thérapies ciblées) et adaptées en fonction des caractéristiques morpholo-giques et moléculaires de la tumeur (concept de thérapie « personnalisée » ou « stratifiée ») [5]. Un nombre croissant de molécules ciblant des voies de signalisation est actuel-lement disponible ou surtout en cours de développement pour la prise en charge des patients atteints d’un carcinome broncho-pulmonaire non à petites cellules (CBNPC) [6]. Il s’agit le plus souvent de petites molécules agissant à l’intérieur de la cellule cancéreuse (par exemple, les inhibi-teurs de tyrosine kinase ciblant les mutations activatrices du gène de l’EGFR ; le crizotinib pour la translocation du gène ALK, le dovitinib pour l’amplification du gène FGFR1) ou d’anticorps monoclonaux agissant à l’extérieur de la cellule cancéreuse (par exemple, le cétuximab pour l’EGFR et le bévacizumab pour le VEGF). L’efficacité de ces thé-rapies ciblées dépend directement de l’état d’activation/inactivation des voies de signalisation (et de leurs diverses molécules) dans les cellules tumorales ainsi que de l’affinité du médicament pour sa cible, influencés par la présence de certaines altérations génomiques [7, 8].Le cancer n’est pas une maladie mono-génique mais une combinaison d’altérations génétiques souvent très com-plexes, à laquelle s’ajoute une variabilité inter-individus [9]. Récemment, un degré supplémentaire de complexité liée à la notion d’hétérogénéité tumorale intra-patient a été décrite [10]. Cette diversité génétique prend tout son sens au regard de l’évolution clonale des mutations somatiques de la tumeur primitive jusqu’aux lésions métastatiques et d’une réponse variable aux thérapies ciblées, pouvant expliquer l’inefficacité des traitements chez certains patients [11, 12]. La caractérisation moléculaire des tumeurs avant traitement a apporté un grand bénéfice pour une meilleure prise en charge thérapeutique des patients (dans le cadre d’une médecine « stratifiée »). Actuellement, un panel res-treint de gènes est analysé de manière ciblée dans les laboratoires de pathologie moléculaire (LPM) pour une application « théranostique » [13]. La liste des biomarqueurs analysés en génétique somatique est amenée à s’ac-croître de manière très significative à court terme en raison

du nombre croissant de thérapies ciblées en cours de déve-loppement, et ce pour des groupes de patients définis en fonction des caractéristiques moléculaires tumorales [14]. Cette évolution conduit les LPM à adopter de nouvelles technologies. La mise au point d’un nouveau procédé de séquençage, qualifié de « massif parallèle », « ultra-profond » ou de « nouvelle génération » (« next generation sequencing » ou NGS), a permis de s’affranchir d’un certain nombre de biais existant dans les méthodes de séquençage clas-sique. Il devient alors possible de séquencer l’ensemble du génome humain en l’espace de quelques semaines [15].Cette revue décrit les principales technologies actuelles de NGS, leurs applications potentielles dans le cadre de la prise en charge de patients ayant un CBNPC et les limites actuelles d’une telle technologie.

2. Principales technologies de NGS

C’est en 2007 que la deuxième génération des appareils NGS a été développée. Les termes « deuxième » et « troi-sième génération » sont synonymes de l’évolution des technologies depuis la méthode de séquençage direct de Sanger dite de « première génération » [16].Trois technologies NGS à haut débit de « deuxième géné-ration » sont apparues de façon quasi simultanée : le pyro-séquençage (454 Life Sciences, Roche Diagnostics, Bâle, Suisse), le séquençage avec des terminateurs réversibles (HiSeq2000, Illumina/Solexa, Inc., San Diego, CA, USA) et le séquençage par ligation (SOLiD™, Life Technologies, Carlsbad, CA, USA) (figure 1) [17, 18]. Elles doivent leur succès à une analyse synchrone des séquences, syno-nyme d’une baisse des coûts, d’une rapidité accrue et d’une plus grande sensibilité. Là où la méthode de Sanger nécessite d’abord de générer différents brins d’ADN de longueurs différente associés à un fluorophore pour la lecture, ces méthodes reconstituent directement les brins d’ADN en déterminant quels éléments viennent d’être intégrés. Pour ce faire, ces technologies partent d’un simple brin d’ADN préalablement préparé mais utilisent par la suite des approches différentes que nous décri-vons ci-dessous [19].

2.1. Pyroséquencage (Roche 454)Avec cette méthode, l’ADN subit après fragmentation mécanique une étape d’amplification par PCR. Cette PCR est réalisée en émulsion, ce qui permet d’effectuer plusieurs millions de réactions indépendantes dans un seul tube. Le mélange obtenu est ensuite déposé sur une plaque sur laquelle la réaction de séquençage par synthèse est initiée base par base. La lecture de chaque nucléotide incorporé est révélée à l’aide d’une réac-tion chimio-luminescente et détectée par une caméra CCD. Le nucléotide inséré est alors dégradé afin de faire place à un nucléotide différent qui est à son tour potentiellement inséré dans la séquence complémen-taire Cette technologie permet d’obtenir aujourd’hui jusqu’à un million de séquences pouvant atteindre jusqu’à 400 paires de bases. Les erreurs de séquences détectées sont majoritairement des insertions/délétions dues aux régions homopolymères (répétitions identiques de la même base) [18, 20].

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sont fixées sur un support solide au lieu d’une plaque. La réaction de séquençage s’effectue ensuite par un système assez complexe de cycles de ligation et de clivage. Cette technique va permettre non seulement la lecture de la séquence mais inclut aussi un système de correction des erreurs d’incorporation. Grâce à cette méthode, il est possible de lire en parallèle jusqu’à un milliard et demi de séquences de 75 bases de long. Le système incorporé de correction d’erreurs associé à l’utilisation de la ligase rend cette technologie très fiable [18, 20].

2.4. Systèmes « simplifiés »Bien qu’impressionnantes en terme de production, ces technologies restent encore relativement onéreuses et demandent toujours une préparation minutieuse des échantillons d’ADN. Ces technologies permettant une exploration en profondeur d’un génome entier sont le plus souvent réservées à un secteur de recherche. De nouveaux dispositifs, plus petits, plus rapides, mais avec une moindre quantité de données obtenues sont de plus en plus répandus sous l’appellation générique de « séquenceurs de paillasse » tels le MiSeq d’Illu-mina, le 454 GS Junior de Roche ou l’Ion Torrent PGM de Life Technologies (figure 1) [21]. Ces avancées technologiques ont permis également d’accélérer

2.2. Séquençage à l’aide de terminateurs

réversibles (Illumina)Pour cette technique, l’amplification de l’échantillon à analyser ne s’effectue pas en solution mais sur un sup-port solide. La réaction de séquençage est alors réalisée directement sur le support où l’ADN a été amplifié. Elle se déroule position après position et après ajout d’un mélange contenant toutes les bases associées chacune à un fluorophore différent. L’extrémité de ces bases est protégée pour empêcher l’addition de bases supplémen-taires à chaque cycle d’incorporation. Un laser détecte les bases incorporées au fur et à mesure. Le clivage des fluorophores permet ensuite l’incorporation de la base suivante. La lecture est effectuée ainsi cycle après cycle. Cette méthode permet l’acquisition en parallèle de plus de 3 milliards de séquences de 150 paires de bases. Chaque position étant lue l’une après l’autre, les erreurs principales de cette technologie sont des erreurs de substitution d’une base par une autre [18, 20].

2.3. Séquençage par ligation

(Life Technologies)La première étape d’amplification de la méthode de séquençage de Life Technologies est identique à celle du pyroséquençage. Cependant, les séquences amplifiées

Figure 1 – Comparaison des principales plateformes « simplifiées » de NGS.

Société

Ion Torrent PGM MiSeq 454 GS Junior Plateforme

Méthode d’amplification

PCR en émulsion PCR en «pont» PCR en émulsion

Méthode de séquençage Pyroséquençage Ligation Synthèse

Durée de séquençage/run 10 heures 26 heures 2 heures

Capacité (Mb) séquençage/run 50 1500 10 – 1000

Taille moyenne amplicons (pb) 400 150 75

Coût ( )/run 800 550 370 – 700

Coût appareil + annexe (k )

80 + 20 100 60 + 15

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les processus de séquençage de l’ADN grâce notamment à une baisse exponentielle des coûts. Ainsi, différentes technologies ont été développées en s’affranchissant des fluorophores associés à de l’ADN modifié pour faire appel aux propriétés électriques de l’ADN, comme par exemple la technologie Ion Torrent (Life Technologies) [22]. Chaque base ajoutée lors du séquençage induit la libération d’un proton, la baisse du pH et donc une impulsion électrique grâce à un semi-conducteur dont l’intensité permettra la lecture de la séquence [22]. Les avantages de ces plateformes « simplifiées » sont mul-tiples. Leur utilisation sera pertinente probablement à court terme en pratique clinique en permettant un séquen-çage ciblé de gènes d’intérêt dans un temps compatible avec le compte rendu diagnostique. Elles sont beaucoup moins onéreuses (de 40 000 à 100 000 euros selon les appareils) et demandent des réactifs dont le coût n’est pas très élevé, tels que les nucléotides modifiés et les fluorophores. La précision de cette technologie est tou-tefois encore perfectible [20].Plus récemment, deux nouveaux appareils (GridION et MinION) utilisant une technologie de séquençage par nanopore (Oxford Nanopore Technologies) ont été déve-loppés [23, 24]. Ces nanopores ont la capacité d’émettre un signal électrique spécifique lorsqu’ils se trouvent au contact de certaines molécules. L’ADN présenté à ces nanopores imbriqués dans des membranes hybrides poly-mères-lipides, les traversent et, à son passage, émettent un signal électrique spécifique analysé par un séquenceur. La technique ne nécessite que peu ou pas de prépara-tion de l’ADN et ne connaît virtuellement pas de limite de longueur de lecture [25]. Ces systèmes sont de très petite taille : par exemple, le MinION est une unité de séquençage par nanopore à usage unique intégré dans une clef USB. Cependant, aucun de ces appareils n’est encore commercialisé et aucune séquence issue de cette technologie n’est disponible (http://www.biopsci.com/). De plus, même si l’idée de lire un brin d’ADN directement sans préparation ni amplification est séduisante, elle peut se révéler insuffisante en pratique si les échantillons sont en faible quantité, dégradés ou contaminés [26].

3. Applications potentielles

des technologies de NGS

3.1. Applications dans les laboratoires de pathologie moléculaireLa première application du NGS serait de remplacer les méthodes « traditionnelles » de séquençage (figure 2). Les altérations somatiques identifiées par NGS constituent « l’empreinte génétique » du cancer [27]. Ces altérations génétiques sont variables allant du changement d’un seul nucléotide aux modifications structurelles chromosomiques (insertions, suppressions, réarrangements), et aux varia-tions dans le nombre de copies. Cependant, un nombre limité de ces altérations génomiques sont actuellement « cliniquement significatives ». Avant l’apparition du NGS, chaque altération génomique nécessitait le développe-ment d’une méthode de détection spécifique [7]. L’analyse par NGS peut détecter l’effectif complet des altérations génomiques avec une haute sensibilité et une spécificité croissante [27]. Une mutation présente dans une minorité de cellules (< 10 %) de l’échantillon à analyser ne sera pas détectée par les techniques habituelles de séquençage [7]. En réduisant la couverture à une région restreinte du génome, le NGS a permis d’augmenter la profondeur de lecture et de découvrir plusieurs sous-populations clonales [21, 28, 29]. Le nombre d’échantillons à analyser peut être augmenté grâce à un procédé de code-barres moléculaire permettant ainsi de regrouper plusieurs dizaines d’échan-tillons dans la même expérimentation [30].Les gènes codants pour les protéines ne constituent que 2 % environ du génome humain. Pour cette raison et pour des économies de temps et d’argent ainsi que pour permettre la génération de données plus fiables, le NGS est actuellement principalement utilisé dans les labora-toires de génétique constitutionnelle pour le séquençage de « l’exome » humain [31]. Cependant, dans le cadre de la génétique somatique, des protocoles de séquençage ciblés sont désormais élaborés avec pour objectif d’ana-lyser pour chaque type de cancer un panel de gènes en un seul séquençage. Reste encore à déterminer s’il ne serait pas plus économique à court et moyen terme et plus pertinent sur le plan biologique, de procéder à un séquençage d’exome complet puis d’analyser unique-ment le groupe de gènes spécifique au cancer. Puisque la fonction de la grande majorité des gènes n’est pas encore connue à l’heure actuelle, un séquençage de l’exome pré-sente l’avantage qu’à la découverte de nouveaux gènes biologiquement et cliniquement essentiels, les données déjà rassemblées peuvent être étudiées dans un nouveau contexte, sans qu’il soit systématiquement nécessaire de procéder au séquençage rétrospectif. Néanmoins, l’avenir dira si la qualité et le traitement des très grandes quantités de données générées lors du séquençage de l’exome sont réellement préférables sur le plan clinique à l’analyse ciblée des groupes génétiques spécifiques de maladies [31].Dans ce contexte, l’Institut national du cancer (INCa) a pour objectif de préparer de manière très coordonnée et de façon progressive l’implémentation nationale du NGS à visée diagnostique sur les plateformes d’oncogé-nétique moléculaire, en réalisant initialement une phase

Figure 2 – L’implémentation du NGS à court terme

en pratique clinique.

Type de prélèvement

Altérations génomiques

Nombre de gènes

Délai

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pilote sur un nombre limité de laboratoires. L’analyse ciblée d’un panel de gènes constitue à court terme une approche adéquate pour une application diagnostique, que ce soit en génétique constitutionnelle ou somatique (l’analyse de l’exome, du génome complet ou le RNAseq est hors du champ du dernier appel à projets de l’INCa) (http://www.e-cancer.fr/aap/recherche/ngs2013).

3.2. NGS et cancer broncho-pulmonaireLes applications cliniques à venir du NGS en oncologie thoracique semblent donc nombreuses. Plusieurs années ont été consacrées à des analyses ciblées de mutations « conductrices » utiles à rechercher chez des patients atteints d’un CBNPC. L’implémentation à court terme des technologies de NGS en clinique permet d’envisager de rechercher simultanément chez plusieurs patients atteints de CBNPC les anomalies des gènes EGFR, KRAS, ALK, FGFR, HER2, ROS1, et MET, pour un coût équivalent à celui d’un test FISH [21]. Ceci est particulièrement intéres-sant dans le cadre des essais cliniques afin de sélection-ner parmi les dizaines de nouvelles molécules celles qui seront le plus appropriées à administrer pour un patient atteint d’un CBNPC. Dans cette dynamique, l’intégration des techniques NGS ouvre la voie aux essais de straté-gie [32]. Ces nouveaux essais comparent une stratégie classique avec pour bras de référence une thérapeutique choisie en fonction de critères classiques contre un bras expérimental ajoutant les données des techniques d’analyse haut débit. Le but de ce type d’essai est de déterminer si l’ensemble des patients est mieux pris en charge avec l’apport de ces nouvelles technologies par rapport à une prise en charge classique [32].L’utilisation des analyses NGS peut également avoir un rôle essentiel chez les patients atteints de CBNPC en phase évoluée afin de mieux comprendre les mécanismes de résistance aux thérapeutiques ciblées [33, 34].L’introduction du NGS a permis la découverte de nouvelles anomalies génomiques « conductrices » dans le cancer du poumon, conduisant à une meilleure compréhension de l’oncogenèse pulmonaire [35-37]. Récemment, l’analyse par une approche NGS du tissu tumoral apparié au tissu sain adjacent chez un patient non-fumeur atteint d’un adé-nocarcinome pulmonaire a conduit à la découverte d’un nouveau gène de fusion KIF5B-RET ayant une implication thérapeutique [38, 39]. Des études récentes ayant utilisé les approches de NGS dans les CBNPC montrent qu’en moyenne 100 à 200 anomalies génomiques sont présentes dans chaque échantillon tumoral, pouvant ainsi représenter autant de cibles thérapeutiques potentielles [14, 40, 41]. Les études publiées dans le domaine des discordances mutationnelles tumeur primitive/métastase ont initiale-ment été focalisées sur des analyses ciblées concernant certains biomarqueurs « théranostiques ». Les résultats n’ont pas permis de dégager de réponse claire sur l’impor-tance réelle en pratique clinique de ces approches [42]. Le développement des analyses moléculaires par NGS permet maintenant d’aborder la problématique avec une vision plus globale [42]. Une étude récente ayant analysé 15 « couples tumeur primitive/métastase » de CBNPC par séquençage haut débit a rapporté une forte conservation des altérations clés « conductrices » lors de la progression

métastatique avec un taux de concordance de 94 % alors que le niveau de concordance pour les altérations sup-posées non récurrentes dans le CBNPC était de 63 %. Ceci confirme l’instabilité génétique intratumorale dans une population fortement exposée au tabagisme [43]. Il est important de souligner qu’il s’agissait dans cette série de prélèvements réalisés à la première progression métastatique chez des patients n’ayant pas été traités au préalable par des thérapies ciblées. La forte conservation des altérations récurrentes dans le CBNPC entre tumeur primitive et métastase pourrait alors représenter l’histoire naturelle de la progression métastatique en l’absence d’une pression de sélection thérapeutique [43].Très souvent, le diagnostic histologique de CBNPC dans les stades avancés est réalisé sur des prélèvements cyto-logiques. Certaines études ont récemment démontré la faisabilité du NGS sur ce type d’échantillon biologique [44-46]. Les technologies NGS seraient même réalisables sur une cellule unique ou sur un faible nombre de cellules tumorales [47-49]. Plusieurs études récentes ont montré que les altérations génomiques des cancers peuvent être caractérisées sur les cellules tumorales circulantes ou l’ADN libre circulant dans le sang des patients par des approches de NGS [49-53].Le délai nécessaire pour générer les données mutation-nelles, leur analyse et leur interprétation sont d’importants paramètres à prendre en compte pour une prise en charge optimale des patients atteints de CBNPC. Idéalement, un résultat d’analyse moléculaire doit parvenir au pres-cripteur dans un délai de 2 à 3 semaines à compter de la date de la prescription (au mieux dans un délai inférieur à 10 jours). En pratique quotidienne de génétique soma-tique, la généralisation du NGS avec les séquenceurs « de paillasse » permettra certainement un raccourcissement des délais de réponse suite à la recherche des mutations somatiques [11].Les données générées par un profil moléculaire complet du génome tumoral grâce à des approches par NGS peuvent être utilisées pour un diagnostic moléculaire précis et la classification des sous-types de cancer du poumon [54]. Par exemple, le NGS a récemment démontré son utilité pour le diagnostic des métastases d’un cancer primitif inconnu, en orientant ensuite vers le site primitif [55]. L’approche par le NGS pourrait fournir un outil plus rapide pour déterminer l’évolution clinique des patients atteints d’un cancer, en donnant des indications sur la probabilité de survie, de récidive ou de réponse favorable au traitement [56, 57]. Au-delà des preuves expérimentales de faisabilité, des études plus larges de validation indépendante et multicen-trique sont et seront nécessaires afin de déterminer si la caractérisation génomique approfondie et la surveillance dynamique des clones tumoraux peuvent conduire à une meilleure prise en charge des patients atteints de cancer [9].

3.3. Applications pour la rechercheLe champ d’application du NGS en recherche fonda-mentale ou translationnelle est très vaste [18, 56, 58]. De nombreux articles ont été publiés dans ce domaine et le foisonnement des études en cours démontre l’engoue-ment du monde médico-scientifique pour ces approches. Il s’agit d’études génomiques [séquençage de novo massif

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L’utilisation de ces nouvelles technologies dans le cadre de l’activité diagnostique impose, et ceci dans un contexte d’évolution technologique rapide, d’assurer une qualité optimale des examens selon les normes internationales [60]. Hormis les problèmes techniques qui sont progressive-ment corrigés, notamment par les industriels, ces tech-nologies engendrent de nouvelles contraintes [21]. Elles vont entraîner des réorganisations profondes au sein des laboratoires et rendre indispensable l’acquisition de nou-velles compétences pour la préparation des échantillons et l’analyse des résultats. Le recours à la bio-informatique sera certainement indispensable pour l’analyse et la ges-tion des données issues du NGS. La quantité considérable d’informations rend difficile le traitement des données générées. L’interprétation de ces données, également parsemée d’erreurs potentielles, est encore délicate. Un séquençage complet de novo nécessite un « reséquen-çage » de la même séquence originelle à partir de différentes origines de lecture. La lecture d’une même base à partir de différents fragments correspond à la profondeur d’un séquençage. Si une expérience permet une profondeur de lecture de 30 ×, chaque base aura alors été séquencée en moyenne 30 fois. La couverture d’un séquençage corres-pond au pourcentage du génome (ou de la séquence ciblée) couverte par les fragments séquencés. Par exemple, si une expérience de séquençage a une couverture de 90 % du génome avec une profondeur de 30 × alors l’informa-tion résultante sera de plusieurs dizaines de millions de fragments de quelques dizaines ou centaines de bases à reconstituer tel un puzzle. Cette information doit être stockée dans des disques durs de capacité importante (de l’ordre du pétaoctet) et ne peut être traitée que par des équipes spécialisées de bio-informatique avec des capacités de calcul très importantes.Une autre limite est le coût de ces technologies. Le coût par base est très faible (un génome complet coûte quelques milliers d’euros) mais l’investissement de départ est rela-tivement important (séquenceur de plusieurs dizaines ou centaines de milliers d’euros, service de bio-informatique associé ayant des capacités de traitement et de stockage adaptées). Ceci est d’autant plus vrai qu’une équipe doit envisager de pouvoir aborder un même échantillon avec plusieurs techniques d’analyse du transcriptome et du protéome associés. Tout cela oriente vers une organisa-tion multi-institutionnelle associant plusieurs technolo-gies complémentaires et un service de bio-informatique commun, voire un système de « cloud computing » [6]. Les systèmes de « cloud computing » sont des technolo-gies correspondant à des réseaux informatiques déma-térialisés permettant à un utilisateur de pouvoir accéder et traiter ses données stockées physiquement à distance. Ce système bien que très séduisant ne doit pas faire oublier les problématiques de confidentialité et d’intégrité des données qu’il faudra ainsi parfaitement maîtriser.Le séquençage des premiers génomes complets a permis de redécouvrir la variabilité génétique inter individuelle. Le goulot d’étranglement résidera dans la capacité d’ana-lyse des données, et leur exploitation en pathologie clinique. Des millions de variants ponctuels ou d’insertions/délétions ont été ainsi découverts [62]. La question de la pertinence de ces polymorphismes se pose en oncologie thoracique.

de génome, « reséquençage » de génome pour analy-ser des variations comme les polymorphismes ou SNP, les insertions/délétions ou les translocations), d’études transcriptomiques (séquençage d’ARNm, de miARN), ou d’études épigénétiques (cartographie des sites de méthylation de l’ADN, cartographie des sites de fixation des protéines sur la chromatine).

4. Limites du NGS

en pratique courante

Malgré l’escalade technologique et « l’ébullition » actuelle se produisant autour des applications potentielles du NGS, cette technologie doit encore faire face à plusieurs limitations pour un transfert définitif en pratique clinique quotidienne (tableau I). Les séquences générées étant assez courtes, elles peuvent en effet poser certains pro-blèmes sur de l’ADN tumoral souvent dégradé issu de prélèvements fixés au formol et inclus en paraffine. Des solutions mieux adaptées à ce type de prélèvements fixés sont en cours de développement [41, 59]. À leur tour, ces différentes solutions peuvent toutefois rajouter un niveau de complexité à l’étape de préparation des échantillons (code-barres, appâts) [41].Les variables pré analytiques qui peuvent affecter la préci-sion et l’intégrité de la séquence de l’ADN tumoral incluent l’hétérogénéité cellulaire, les méthodes d’extraction d’ADN, l’effet de lot de réactifs, le non-respect des différents pro-tocoles, la contamination croisée de nucléotides ou de code-barres [60]. Les plateformes de séquençage sont elles-mêmes une source intrinsèque de variabilité ayant un impact sur la reproductibilité technique, la précision, le taux d’erreur, la spécificité et la sensibilité [61].

Tableau I – Avantages et faiblesses actuelles du NGS

par rapport aux méthodes de séquençage « classique ».

Avantages

Très grande sensibilité analytique

Séquençage de l’exome/génome complet avec une large gamme d’altérations génomiques détectées (délétions, translocations, nombre de copies)

Adapté aux différents types de prélèvements (tissu tumoral fixe au formol, ADN libre circulant, cellules tumorales circulantes)

Découverte de nouveaux variants génétiques et une meilleure compréhension de l’oncogenèse et de la progression tumorale

Délai d’analyse et de réponse diminué

Limites actuelles

Nécessité d’un consentement spécifique incluant l’analyse mutationnelle somatique et germinale

Variabilité de performance des différentes plateformes de NGS

Coût par test élevéCoût des équipements modérément élevé

Expertise informatique pour l’interprétation et le traitement des données

Nécessité d’un fort investissement institutionnel en terme de capacité de stockage des données

Pertinence des nouveaux polymorphismes découverts

Veille éthique quant à l’utilisation des données constitutionnelles (mutations germinales)

Nécessité du marquage CE-IVD

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ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES

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La découverte de variants génétiques par les techniques de NGS ne permet pas de se passer des explorations fonction-nelles in vitro/in vivo afin d’identifier les mutations « conduc-trices », celles « de passage » et les « simples » polymor-phismes. Pour chaque individu, environ 20 000 variations de séquence sont en effet détectées lors du séquençage de l’exome, la plupart ne constituant que des polymorphismes apparemment bénins. Toute l’ambiguïté réside dans l’iden-tification des aberrations génomiques « conductrices ». La question concernant la transmission du résultat au clinicien prescripteur se pose avec la réflexion sur une transmission ou pas de l’intégralité des données génomiques issues des analyses de NGS. De plus, de nombreuses associations de patients redoutent que l’abondance d’informations générées puisse être « un poids trop lourd à porter » pour un individu. Les explications d’un spécialiste compétent concernant des découvertes fortuites éventuelles et le droit à l’ignorance doivent ainsi impérativement être mises en avant dans le cadre d’une telle analyse. La majorité des connaissances à haute valeur prédictive disponibles à ce jour se limitant à des maladies très rares, le risque qu’une profusion de découvertes fortuites prédictives soit révélée par un test génétique de ce type est, à l’heure actuelle, plutôt faible [31]. Néanmoins, ces analyses nécessiteront une veille éthique active quant à l’utilisation des données

constitutionnelles en particulier par le grand public au vu de la multiplication des sociétés privées de séquençage à travers le monde.

5. Conclusion

Les technologies de NGS ont permis des avancées majeures dans la recherche dans le domaine de l’oncologie thora-cique. Plus important, elles ont déjà démontré leur immense utilité pour la prise en charge des patients atteints de CBNPC dans des études de preuve de concept. Le plus grand défi du transfert de ces avancées technologiques pour une amélioration de l’offre de soin est de comprendre la pertinence biologique des aberrations génomiques détec-tées dans le contexte de l’évolution du cancer du poumon au fil du temps. Ce transfert nécessitera également une veille éthique très active quant à l’utilisation des données de génétique constitutionnelle obtenues. Malgré certains obstacles actuels, le NGS détient un potentiel exceptionnel pour faire avancer la médecine personnalisée ou stratifiée chez les patients atteints d’un CBNPC.

Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de

conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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