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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? Comprendre l’imbrication des inégalités Naila Kabeer Institut d'études du développement

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voieà la justice sociale ? Comprendre

l’imbrication des inégalitésNaila Kabeer

Institut d'études du développement

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Remerciements 2

Liste des abréviations 2

Liste des figures, tableaux et encadrés 3

Avant-propos 6

Résumé analytique 7

1 Introduction : les valeurs fondamentales de la Déclaration du Millénaire 13

2 Inégalités imbriquées et exclusion sociale 162.1 Pertinence pour l’agenda des OMD 162.2 Histoire et géographie régionales de l'exclusion sociale 17

3 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale 203.1 Progrès par rapport aux OMD en Amérique latine 213.2 Exclusion sociale et OMD en Amérique latine 213.3 Progrès en direction des OMD enregistrés en Asie 253.4 Exclusion sociale et OMD en Asie 273.5 Progrès en direction des OMD en Afrique subsaharienne 303.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31

4 La dynamique d’imbrication des inégalités : les raisons de la persistance de l’exclusion sociale 354.1 La dynamique culturelle de l’exclusion 354.2 La dynamique économique de l’exclusion : l’inégalité des biens 374.3 La dynamique économique de l’exclusion : des moyens de

subsistance désavantagés 394.4 La dynamique de l’exclusion dans la prestation des services : accès et qualité 414.5 La dynamique politique de l’exclusion 43

5 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances 455.1 États réactifs, citoyens actifs : vers un nouveau contrat social 455.2 Consolider les politiques d’information pour combattre l’exclusion 485.3 Politiques macroéconomiques et redistribution de la croissance 495.4 Des politiques budgétaires progressistes 515.5 Politiques juridiques et discrimination positive 525.6 Réforme foncière 545.7 Promotion des moyens d’existence, d’un travail décent et de l’accès au crédit 565.8 Investissement dans les infrastructures et le développement régional 585.9 Étendre les services de base à tous les groupes 595.10 Une protection sociale inclusive 63

6 Conclusion : principaux sujets de préoccupation et principes 66

Informations complémentaires 70

Notes 71

Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 1

Table des matières

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Copyrights © 2010Programme de développement des Nations Unies1 UN Plaza, New York, NY 10017, USATous droits réservés. Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée dans un système derecherche documentaire, ou communiquée, sous unequelconque forme ou par un quelconque moyen,électronique, mécanique, de photocopie, d’enregistrementou autre, sans une autorisation préalable.L’analyse et les recommandations de politiquescontenues dans ce rapport ne reflètent pasnécessairement les vues du Fonds pour la réalisation des OMD ou du Programme des Nations Unies pour le développement. Le rapport est une publicationindépendante produite à la demande du Fonds pour laréalisation des OMD. Il est le fruit d’un effort collaboratifavec l’Institut d'études de développement de Sussex.ISBN: 978 1 85864 947 1

L’auteurNaila Kabeer est professeur à la School of Orientaland African Studies de l’Université de Londres,où elle enseigne la problématique du genre dansle développement.

RemerciementsNous tenons à remercier le professeur Jo Beall(University of Cape Town/London School ofEconomics), le professeur Ashwini Deshpande(Delhi School of Economics, University of Delhi) et le professeur Edward Telles (PrincetonUniversity), dont les documents de référence ontenrichi ce rapport au niveau régional. Tous nosremerciements vont également à Gabriele Koehleret au professeur Hilary Standing pour leursapports sur des thèmes importants, ainsi qu’àSelim Jahan du PNUD et à Minar Pimple de laCampagne du Millénaire des Nations Unies pourleurs commentaires. D’excellentes contributionsont été également reçues de l’équipe de recherchecomposée de Peroline Ainsworth (coordinateur dela recherche), Luisa Natali, Karin Seyfert, DevikaLal, Harsh Malhotra, Line Falkenberg Ollestad etSmriti Sharma. Nous avons également bénéficié des

commentaires extrêmement utiles et constructifsde notre groupe de lecture composé du Dr SarahCook (UNRISD), de Jan Vandemoortele (ex-fonctionnaire des Nations Unies et aujourd’huichercheur et auteur indépendant), Kevin Watkins(UNESCO) et Alexander Cobham (Christian Aid).Nous adressons des remerciements toutparticuliers à Layla Saad du Fonds pour laréalisation des OMD pour son rôle dans lasupervision de ce projet et pour sa très utilecontribution pendant toute son exécution. Nousexprimons également notre gratitude à KathrynO’Neill pour son travail éditorial et BarbaraCheney pour la conception graphique du rapport.

Page de couverture : Kuala Lumpur, Malaisie, lestours jumelles Petronas et le luxueux hôtel Radissondressés à l’arrière de taudis du centre ville. Photographie : Mark Henley/Panos Pictures

Liste des abréviations

ALENA Accord de libre-échange nord-américainAPD Aide publique au développementASS Afrique subsaharienneBAsD Banque asiatique de développementBID Banque interaméricaine de développement CEPALC Commission économique pour l'Amérique latine

et les CaraïbesDMPH Dépense mensuelle par habitantEDS Enquête démographique et de santéIDH Indice de développement humainINDISCO Programme interrégional d'appui aux populations

autochtones et tribales par le développement d'organisations de type coopératif et associatif

LAC Région Amérique latine et CaraïbesMGF Mutilations génitales fémininesOCDE Organisation de coopération et de développement

économiques ODI Overseas Development Institute

(l'institut britannique de développement étranger)OIT Organisation internationale du travail OMD Objectif du Millénaire pour le développementOMS Organisation mondiale de la santéONG Organisation non gouvernementaleONU CESAP Commission économique et sociale pour l'Asie et le

Pacifique des Nations UniesPDI Personne déplacée à l'intérieur de son propre paysPIB Produit intérieur brutPNB Produit national brutPPA Parité des pouvoirs d'achatUNESCO Organisation des Nations Unies pour l'éducation,

la science et la culture (United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization)

UNRISD Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social (United Nations Research Institute for Social Development)

2 Liste des abréviations

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 3

Liste des figuresFigure 3.1 Progrès globaux dans la réalisation des OMD 20

Figure 3.2 Ratio des taux de mortalité infantile des populations autochtone et non-autochtone, 2000-2002, quelques pays d’Amérique latine 22

Figure 3.3 Nombre moyen d’années d’études de la population autochtone des 17 à 22 ans dans quelques pays 22

Figure 3.4 Amérique latine (14 pays) : taux d’extrême pauvreté des populations autochtones et descendant d’Africains, en multiple du taux du reste de la population (seuil d’un dollar par jour) 23

Figure 3.5 Taux de mortalité des moins de cinq ans par quintile de richesse, et ratio du quintile le plus pauvre par rapport au plus riche 25

Figure 3.6 Népal : Tendances du taux d’incidence de la pauvreté par groupe social 25

Figure 3.7 Pourcentage de la population adulte qui n’a fait aucunes études, Vietnam 27

Figure 3.8 Chine rurale : distribution de la pauvreté entre les minorités ethniques et la majorité de la population, 2002 28

Figure 3.9 Région occidentale de la Chine rurale : répartition de la pauvreté entre les minorités ethniques et la majorité de la population, 2002 28

Figure 3.10 Malaisie : taux de mortalité infantile par groupe ethnique 1970–2006 29

Figure 3.11 Malaisie : tendances du taux d’incidence de la pauvreté (HCR) par appartenance ethnique 29

Figure 3.12 Prévalence de la malnutrition infantile par lieu de résidence, Nigéria 32

Figure 4.1 La pyramide des castes du Népal selon le Muluki Ain de 1854 35

Figure 4.2 Népal : indice composite d’autonomisation et d’inclusion par genre/caste/appartenance ethnique 36

Figure 4.3 Brésil : Niveaux de rémunération par genre, groupe ethnique et nombre d’années d’études, 1992 et 2002 38

Figure 4.4 Privation extrême d’éducation chez les pasteurs 40

Figure 4.5 Népal : Représentation parlementaire par groupe ethnique/caste et genre, 1959–99 42

Figure 5.1 Taux de mortalité maternelle dans quelques états du Mexique 62

Liste des tableaux Tableau 3.1 Progrès globaux absolus et relatifs dans la réalisation des OMD :

Les 20 pays les plus performants 20

Tableau 3.2 Couverture institutionnelle des municipalités où la population autochtone représente une majorité, une minorité ou une proportion modérée de la population. Bolivie, 2006 21

Tableau 3.3 Incidence de la pauvreté (OMD 1) par niveau de revenu des ménages par habitant dans quelques pays d’Amérique latine 22

Tableau 3.4 Taux de scolarisation au primaire dans quelques pays d’Amérique latine 23

Liste des figures, tableaux et encadrés

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4 Liste des figures, tableaux et encadrés

Tableau 3.5 Comparaison entre le nombre d’années d’études des groupes autochtones et non-autochtones en Bolivie 23

Tableau 3.6 Indicateurs d’éducation, Mexique, 2005 23

Tableau 3.7 Brésil : pourcentage de la population vivant en dessous du seuil d’extrême pauvreté, par appartenance raciale 24

Tableau 3.8 Brésil : distribution des 10 % les plus pauvres et 1 % le plus riche, par appartenance raciale (2005) 24

Tableau 3.9 Comparaison des taux de malnutrition infantile : Chine orientale et occidentale (%) 25

Tableau 3.10 Incidence de la pauvreté de différents groupes sociaux dans quelques États de l’Inde 26

Tableau 3.11 Inde: Taux de mortalité des moins de cinq ans dans différents groupes sociaux, 1992/1993 à 2005/2006 27

Tableau 3.12 Népal: taux de mortalité de la petite enfance, 2006 27

Tableau 3.13 Accès aux services publics au sein de différents groupes au Vietnam 28

Tableau 3.14 Nigéria : taux de mortalité juvénile par lieu de résidence 32

Tableau 3.15 Indicateurs socio-économiques pour quelques régions du Ghana (%) 32

Tableau 3.16 Afrique du Sud : niveau individuel de pauvreté par race et genre (seuil de pauvreté R515 par habitant et par mois) 33

Tableau 3.17 Estimations du revenu annuel personnel par habitant, par groupe racial en 2000 33

Tableau 3.18 Revenus personnels relatifs par habitant, par groupe racial (% du niveau des Blancs) 33

Tableau 3.19 Nigéria : États ayant les parts de pauvreté les plus élevées et les plus faibles en 2006 34

Tableau 4.1 Temps nécessaire pour atteindre l’établissement de santé le plus proche dans le Nord et le Sud du Ghana (% des personnes interrogées) 40

Tableau 5.1 Droits fonciers collectifs dans les nouvelles constitutions et codes agraires 56

Liste des encadrésEncadré 2.1 Inégalités imbriquées et persistance de l’exclusion sociale 19

Encadré 3.1 Couverture institutionnelle des accouchements en Bolivie 21

Encadré 3.2 Distribution du revenu et de l’extrême pauvreté au Brésil 24

Encadré 3.3 Pauvreté et inégalité sociale en Inde 26

Encadré 3.4 Inégalités au niveau de la santé des enfants en Inde et au Népal 27

Encadré 3.5 Égalités ethniques et spatiales imbriquées au Vietnam et en Chine 28

Encadré 3.6 L’imbrication des inégalités spatiales, ethniques et religieuses au Ghana et au Nigéria 32

Encadré 3.7 Situation de l’Afrique du Sud 33

Encadré 3.8 Inégalités ethniques dans la mortalité infantile en Afrique 34

Encadré 4.1 Le système des castes au Népal 35

Encadré 4.2 Raisons de la persistance de l’exclusion sociale : l’intériorisation des inégalités 37

Encadré 4.3 Exclusion sociale et crimes violents : la vie dans les favelas brésiliennes 37

Encadré 4.4 Le système Kamaiya au Népal 39

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 5

Encadré 4.5 Imbrication des inégalités ethniques, religieuses et politiques au Soudan 43

Encadré 5.1 Permettre à chacun de compter : la collecte de données sur les groupes exclus en Amérique latine 48

Encadré 5.2 Le droit à l’information en Inde 50

Encadré 5.3 Taxation progressive des hydrocarbures en Bolivie 52

Encadré 5.4 Utilisation de règles de transfert pondérées en fonction de l’équité pour une dépense atteignant mieux les groupes exclus 52

Encadré 5.5 Discrimination positive au Népal 53

Encadré 5.6 Discrimination positive en Malaisie 53

Encadré 5.7 Le combat contre le racisme institutionnalisé au Brésil 55

Encadré 5.8 Campagnes en faveur des droits fonciers en Inde 55

Encadré 5.9 Les travailleurs informels s’organisent pour revendiquer leurs droits 57

Encadré 5.10 Mobilisation autour de la santé maternelle au Mexique 61

Encadré 5.11 Réduire la mortalité maternelle au Mexique 62

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6 Avant-propos

En septembre 2010, dix ans après avoir signéla Déclaration du Millénaire et s’êtreengagés vis-à-vis des objectifs du Millénaire

pour le développement (OMD), les dirigeantsmondiaux vont se réunir pendant l’Assembléegénérale des Nations Unies pour faire le point surla façon dont ils ont honoré leurs promessesd’éradiquer l’extrême pauvreté et la faim, etd’assurer l’éducation primaire pour tous, la santé,et l’égalité des sexes. Les avancées réalisées parrapport à ces objectifs, ainsi que par rapport à laréduction de la mortalité infantile et maternelle et à l’arrêt de la propagation de maladies, sontindéniables. Certains des pays les plus pauvres dumonde ont enregistré des progrès remarquablesavec des ressources limitées, démontrant ainsi quela volonté politique est un des principaux facteurscontribuant au succès du développement. Ce rapport sur les OMD et la justice sociale

soutient que malgré ces avancées, l’attentionportée aux progrès dans leur ensemble etl’utilisation de moyennes nationales pourmesurer les performances des pays dissimulent en fait des réalisations inégales, marquées par deprofondes différences entre les groupes sociaux.Dans chaque pays de chaque région, despersonnes se voient refuser la chance de jouer un rôle actif dans le développement social etéconomique à cause de leur race, de leur origineethnique, de leur religion, de leur sexe, ou encoredu lieu où elles vivent. L’échéance de 2015 n’est plus très loin et ce

rapport arrive à un moment critique pour lesOMD. Il cherche à faire inscrire le défi del’inégalité sociale à l’agenda du Sommet 2010d’examen des OMD, et à démontrer que l’équitéest tout aussi importante que les progrès dans

leur ensemble si on veut pérenniser les OMD et s’attaquer aux causes profondes de l’insécuritéet de l’instabilité. Il démontre également que l’exclusion sociale

et les inégalités qui en résultent ne découlent passimplement du déni des droits sociaux etéconomiques de certaines personnes, mais sontaussi inextricablement liées au manque dereprésentation et de participation despopulations marginalisées. Il place ainsi les droitscivils et politiques au même niveau que les droitséconomiques et sociaux. Il affirme qu’encouragerla croissance des institutions démocratiques,telles que les médias et l’État de droit est essentielpour la lutte contre l’exclusion et le déni desdroits, de même que le renforcement de latransparence et de la redevabilité des États envers leurs citoyens.Ce rapport renouvelle l’appel à la justice sociale

lancé par le Sommet du Millénaire de l’an 2000. Il trace les grandes lignes de recommandations depolitiques et d’interventions qui pourraient êtreintégrées dans les plans d’action OMD pour 2010-2015, afin de s’attaquer aux inégalités pourque le développement bénéficie à tous les groupesde la société. Il exhorte les gouvernements, lescitoyens et les organisations de la société civile detous les pays, aussi bien riches que pauvres, à fairede l’exclusion et des inégalités sociales un thèmecentral du combat contre la pauvreté et de tous lesefforts entrepris pour réaliser les objectifs duMillénaire pour le développement.

Layla SaadConseiller en plaidoyer et communicationFonds pour la réalisation des OMD

Avant-propos

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 7

Au début du XXIe siècle, 189 dirigeants dumonde entier ont signé la Déclaration duMillénaire et se sont engagés à réaliser

pour 2015, les objectifs du Millénaire pour ledéveloppement (OMD), un ensemble de 8 ciblesliées à la réduction de l’extrême pauvreté et de lafaim ; l’enseignement primaire universel ; la promotion de l’égalité des sexes et del’autonomisation des femmes ; la réduction de lamortalité infantile ; l’amélioration de la santématernelle ; la lutte contre les principalesmaladies ; la préservation de l’environnement ; et la mise en place d’un partenariat mondial pour le développement. Cet engagement asolennellement appelé la communautéinternationale à agir pour libérer les hommes,femmes et enfants des conditions misérables et déshumanisantes de la pauvreté. CetteDéclaration était fondée sur un ensemble devaleurs fondamentales, telles que la liberté,l’égalité, la tolérance et la solidarité, quitraduisent un engagement profond à faire de la justice sociale le véritable guide de tous les efforts.Malheureusement, la dimension de justice

sociale s’est perdue au cours du processus detraduction de la Déclaration en un programmed’action axé sur les huit OMD et les cibles etindicateurs conçus pour suivre leur réalisation.Même si OMD reconnaissent les multiplesdimensions de la pauvreté, ils ne portent que trèspeu d’attention à l’inégalité ou à l’injustice sociale.

Ils sont largement formulés en termes de mesuredes progrès « moyens » par rapport aux objectifs.Ces mesures permettent certes d’identifier lesprogrès d’ensemble aux niveaux mondial etnational, mais ils n’indiquent aucunement si cesprogrès sont largement répartis et équitables.Le point de départ de ce rapport est le fait que

les inégalités sont importantes pour la réalisationdes OMD. Elles comptent au niveau macro-économique parce qu’elles freinent la conversion dela croissance en réduction de la pauvreté. Ellescomptent également pour l’ensemble de la société

parce qu’elles entraînent des tensions sociales, des crimes et des conflits, néfastes pour le bien-êtreet le progrès de l’être humain. De plus, ellesmaintiennent les couches les plus pauvres de lapopulation du monde à l’écart des taux « moyens»de progrès réalisés en direction des OMD. Ce rapport soutient que les couches socialement

exclues de la population pauvre sontsystématiquement tenues à l’écart ou laissées à latraîne des progrès réalisés dans leur pays. Leur statutd’exclus est le résultat d’une imbrication d’inégalitésmultiples. En plus des difficultés économiquesgénéralement associées à la pauvreté, les groupesexclus sont confrontés à une discriminationsupplémentaire, fondée sur des caractéristiquessocialement marginalisées, telles que la race, l’origineethnique, la caste, et parfois la religion ou la langue,avec le genre comme discriminant commun à tousces groupes. Les groupes socialement exclussouffrent également d’inégalités spatiales : ils sontsouvent concentrés dans des endroits peu favorables,comme des terres rurales éloignées et difficiles àcultiver, ou des taudis urbains surpeuplés. Les inégalités sociales, économiques et spatialescontribuent à leur tour à l’exclusion politique ; ces groupes n’ont généralement ni voix au chapitreni influence dans les décisions collectives quiaffectent leur vie.C’est l’imbrication de ces inégalités, et leur

renforcement mutuel, qui rend ces groupes plusdifficiles à atteindre que les autres couches de lapopulation pauvre. Elle les empêche de bénéficierde la même façon, si toutefois ils en bénéficient,des progrès réalisés par leur pays en direction desOMD. Elle donne à leur pauvreté un caractèredurable, s’étendant à leur vie entière, et souvent àplusieurs générations. Ce rapport rassemble des faits probants issus

de l’Amérique latine, de l’Asie du Sud et du Sud-Est, et de l’Afrique subsaharienne. Ils démontrentla relation entre l’exclusion sociale et les OMD, et en éclairent la dynamique sous-jacente. Le rapport se concentre particulièrement sur lespays pour lesquels on dispose de donnés sur lafaçon dont les groupes socialement exclus sesituent par rapport aux OMD relatifs à lapauvreté extrême, à l’éducation des enfants, et à la santé maternelle et infantile. Ces donnéessoutiennent la thèse principale de ce rapport, à savoir que l’imbrication persistante des

Résumé analytique

L’imbrication persistante des inégalités sape lesprogrès en direction des OMD et trahit la promessede justice sociale contenue dans la Déclaration du Millénaire

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8 Résumé analytique

inégalités sape les progrès en direction des OMDet trahit la promesse de justice sociale contenuedans la Déclaration du Millénaire.L’Amérique latine reste parmi les régions

du monde où les inégalités sont les plus fortes.Ces inégalités ont de fortes dimensionsethniques, raciales et spatiales. Dans la plupartdes pays, l’extrême pauvreté est beaucoup plusélevée parmi les populations autochtones ou dedescendance africaine qu’elle ne l’est dans lespopulations blanches ou métisses. En tant que région, l’Asie est en train de

réaliser l’objectif de réduction de l’extrêmepauvreté, principalement grâce auxextraordinaires performances de la Chine aucours des dernières années. Ces progrèss’accompagnent cependant d’un accroissementdes inégalités de revenus dans de nombreux paysde la région, y compris la Chine. Les donnéesmontrent également de façon claire que le déclinde la pauvreté est loin d’avoir été le même parmiles différents groupes sociaux : les minoritésethniques restent surreprésentées au sein descouches les plus pauvres. Les différences de castes et de religions se traduisent également par des résultats inégaux dans la santé,l’éducation et la pauvreté.Si, en tant que région, l’Afrique subsaharienne

est celle qui accuse le plus grand retard parrapport aux OMD, certains pays de la région n’en figurent pas moins parmi ceux quienregistrent les plus meilleures réussites au niveaudu développement, lorsque les progrès sontmesurés en termes absolus. Cependant, lesdonnées sur la situation des groupes socialementexclus par rapport aux OMD sont, à l’exception de l’Afrique du Sud, difficilement disponibles. Les données pour les pays couverts par ce rapportindiquent des variations spatiales, religieuses etethniques au niveau des progrès vers les OMD.Les faits relatifs au lien entre l’exclusion

sociale et les OMD examinés dans ce rapportpermettent de dégager deux conclusions générales.La première est que l’imbrication et lerenforcement mutuel des inégalités, qui mènent àl’exclusion sociale, aident à expliquer la persistancedans le temps de celle-ci ainsi que sa résistanceapparente aux forces du changement. La secondeest que ces inégalités ne sont pas immuables :même si les progrès en direction des OMD ont été extrêmement lents et inégaux au sein desgroupes exclus, des signes prouvent qu’ils ontnéanmoins eu lieu.Des leçons en matière de politiques peuvent

être tirées de ces conclusions. La compréhension de la dynamique de l’imbrication des inégalités quiperpétue l’exclusion sociale permet de reconnaître

les domaines où des politiques doivent être misesen œuvre et les causes profondes qu’elles doiventaborder pour accélérer les progrès en direction des OMD. La compréhension de la dynamique du changement, et du rôle des politiques dans lamatérialisation de celui-ci, permet de dégager desleçons sur ce qui fonctionne dans les différentscontextes et sur les adaptations à faire pourrésoudre des problèmes semblables dans d’autres contextes.La dynamique culturelle de l’exclusion

sociale – les systèmes de normes et croyances quidéterminent l’infériorité de certains groupes parrapport à d’autres – n’encourage pas seulementdes comportements discriminatoires vis-à-vis desgroupes jugés subalternes. Le rappel constant deleur infériorité érode la confiance en eux-mêmeset l’estime que se portent les membres de cesgroupes, qui finissent par ne plus croire à lapossibilité d’échapper à la pauvreté. L’abus dedrogues, la criminalité et des conflits sont souventles conséquences d’une telle frustration. La dynamique économique de l’exclusion

sociale opère à travers les inégalités dans ladistribution des actifs productifs et despossibilités de génération de revenus. Elle peutégalement passer par des normes explicites, telles que des restrictions légales sur la propriétéfoncière imposées à certains groupes sociaux, ou encore leur relégation dans des emploisprédéterminés, dont généralement personne ne veut. Elle peut également agir à travers descomportements discriminatoires des autres, qui empêchent les groupes exclus d’utiliser lesactifs dont ils disposent pour sortir de façondurable de la pauvreté.

Vietnam: femme d’une tribu montagnarde minoritaire, posant avec le maïs de son champ, sur la route de Dien BienPhu, non loin de la frontière du Laos. Des tanks et d’autresreliquats de la fameuse bataille de 1954 polluent encore larégion. Photographe : Chris Stowers/Panos Pictures

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 9

Les politiques sont une autre dimension de la dynamique de l’exclusion sociale. Ellesdéterminent la disponibilité, la capacitéfinancière et les conditions de prestations desservices de base, qui sont essentiels à laréalisation des OMD sociaux. Elles ont un aspectspatial très clair : les zones où vivent les groupesmarginalisés sont souvent les moins biendesservies par les services de base. L’accès à cesderniers est rendu encore plus difficile par descontraintes financières. Le fait a été démontré defaçon spectaculaire par la baisse de l’utilisationdes services de santé et d’éducation lorsqu’uneparticipation aux frais a été imposée dans lecadre de programmes d’ajustement structurel.La qualité et la pertinence des services est

également un problème. L’incapacité de laprestation des services de santé et d’éducation àrefléter les besoins, les priorités et les contraintesdes groupes marginalisés, le langage utilisé pourcommuniquer, le comportement vis-à-vis desmembres de ces groupes sont autant de carencesdans la qualité des services qui contribuent àexpliquer le rythme médiocre des progrès vers lesOMD de santé et d’éducation. La dynamique politique de l’exclusion sociale

dénie aux groupes socialement exclus la possibilitéde participer aux processus collectifs de décisionde leur communauté et de la société. Les processusdémocratiques officiels sont peu susceptibles desurmonter les exclusions historiquement installées,en particulier parce que ces groupes sont souventdes minorités dans leur société. Le refus d’accorderaux groupes socialement exclus un moyen de sefaire entendre et d’exercer une influence au niveau

politique a souvent été à l’origine de conflitsviolents, étant donné que ces groupes n’ont aucunautre moyen de s’exprimer. L’imbrication des dynamiques de l’exclusion

sociale et leur persistance dans le tempsindiquent qu’en restant fragmentaires, les effortsentrepris par les politiques liées aux OMD ontpeu de chance d’avoir un impact perceptible. Le rapport fait un certain nombre derecommandations générales en matière depolitiques pour la lutte contre les inégalités et l’exclusion sociale, et examine ensuite desexemples d’interventions plus spécifiques aux OMD qui ont fonctionné dans différents contextes. Au niveau le plus général, un contrat social

plus inclusif entre des États réactifs et descitoyens actifs constitue le cadre de gouvernancele plus favorable aux approches holistiquesnécessaires pour lutter contre l’exclusion sociale.En tant que fondement de la relation entre l’Étatet l’ensemble de ses citoyens, ce contrat doitinclure un engagement de transparence,redevabilité, participation démocratique etrespect des valeurs civiques. Cet engagement doitse matérialiser dans différentes interventions depolitiques visant l’exclusion sociale. Étant donné l’isolement des groupes

socialement exclus par rapport aux principauxcourants de la société, un préalable essentiel àleur participation à la construction d’un nouveaucontrat social est d’arriver à les organiser etmobiliser autour de besoins, intérêts et prioritésidentifiés par eux-mêmes. De telles organisationspeuvent constituer un volet particulier depolitiques plus générales prévoyant la mise en place de comités de citoyens, groupesd’utilisateurs de différentes natures et autresmécanismes de consultation populaire. Elles peuvent également être établies à partir de la base, par l’auto-organisation des groupesexclus ou grâce à l’appui d’intermédiaires de lasociété civile.

Une politique complète d’information estindispensable si on veut utiliser les OMD pourlutter contre l’exclusion sociale. Les pouvoirspublics doivent recueillir, avec le niveau dedésagrégation voulu, des données sur les citoyens, de manière à suivre les progrès (ou le manque de progrès) produits par lesefforts de développement. Ces données doiventêtre largement diffusées afin d’être soumises àune analyse critique et utilisées pour éclairer les futures orientations politiques ainsi que les activités de plaidoyer de la société civile. La politique d’information doit également veillerà ce que les groupes exclus soient mieux au

Garçon colombien de la région montagneuse de Paletaráaccoudé à sa fenêtre. La communauté a longuement combattupour ses droits à la terre et à des moyens d’existence.Photographe : Luis Alfonso Ortega Fernandez

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10 Résumé analytique

courant de leurs droits et avantages, et doncmieux armés pour les réclamer.Différents canaux d’information doivent

également être utilisés pour lutter contre lesattitudes et comportements discriminatoires au sein du grand public, et pour promouvoir des valeurs comme la tolérance, le respect et lasolidarité. Les médias peuvent être un alliépuissant dans la lutte contre la discrimination et doivent être mobilisés pour lever les barrières entre les groupes exclus et le reste de la société grâce à l’éducation, l’information et le divertissement.Il est évident que non seulement, les modèles

de croissance économique de ces dernières annéesn’ont pas toujours réduit les inégalitéséconomiques et l’exclusion sociale, mais qu’ils lesont en fait exacerbées. Les cadres macro-économiques qui encouragent une croissancelargement répartie et une expansion générale desopportunités ont plus de chance d’atteindre lescouches marginalisées de la société. Mais à elleseule, la croissance est peu susceptible desurmonter les barrières qui ont freiné ces groupes dans le passé.

Les modèles de croissance inclusifs doivent êtrecomplétés par des politiques assurant laredistribution, susceptibles d’être utilisées pouraborder directement l’imbrication des déterminantsde l’exclusion sociale. Les politiques fiscalesconstituent un instrument important pour laredistribution. En termes de mobilisation desrecettes intérieures, le potentiel de redistributiondes politiques fiscales dépend des secteurs, groupes et activités qui sont imposés, et ducaractère direct, indirect, progressif ou régressif dela taxation. Les politiques fiscales ontvraisemblablement une importance énorme pourla réalisation des OMD économiques, étant donnéqu’elles s’appuient directement sur les activités desubsistance. En ce qui concerne la dépense,l’allocation des budgets aux différents secteurs etservices, et la distribution des transferts etsubventions sociaux ont un impact direct sur lefinancement des services sociaux et des mesures de protection sociale les plus importantes pour lespopulations pauvres et les groupes exclus.

Une législation luttant contre la discriminationconstitue un signal important de l’engagementd’un État en faveur de la justice sociale et peutfournir aux groupes de défense des populationsexclues l’appui dont ils ont besoin pour agir.Cependant, lorsque les inégalités sociales sontprofondément enracinées, des actions plusmarquantes peuvent également être nécessaires.De nombreux pays ont cherché à prendre desmesures de discrimination positive en faveur des

groupes exclus afin de rompre avec les habitudesdu passé et de poser de nouveaux jalons pourl’avenir. Ces mesures peuvent prendre la forme deplaces réservées à des membres de groupes exclusdans les systèmes politiques, économiques etéducatifs, ou d’une reconnaissance explicite desdroits des groupes minoritaires.

L’exclusion économique a été abordée à traversune variété de moyens visant à renforcer la base deressources des groupes exclus. Les réformesfoncières et les programmes d’octroi des titresfonciers sont des moyens importants de transfert des actifs à des groupes exclus. Lesréglementations du travail fournissent uneprotection officielle contre l’exploitation destravailleurs vulnérables, mais elles ont plus dechance d’être respectées quand les travailleurssont suffisamment organisés pour exercer lapression nécessaire. Le microcrédit a permis derepousser certaines des limites des servicesfinanciers formels, mais ne s’est pas avéré efficacepour atteindre les plus marginalisés ou pour lesaider à sortir une fois pour toutes de la pauvreté.La prestation des services de microcrédit doit êtrecomplétée par d’autres services d’appui, tels quedes passerelles vers le secteur financier principal.

La concentration spatiale de nombreux groupes socialement exclus se prête bien à undéveloppement fondé sur des zones. Deséconomies d’échelle permettent d’abordersimultanément et de manière rentable différentsaspects du désavantage spatial. Ceux-cicomprennent le transport et les communications,l’eau et l’assainissement, l’infrastructure desservices sociaux, et la prestation des services.

Niger : Les Foulani sont un people nomade qui a migré à traverstout le continent africain. Beaucoup de Foulani du Niger viventcomme le faisaient leurs ancêtres, en maintenant leur culturetraditionnelle. Photographe : Giacomo Pirozzi/Panos Pictures

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 11

L’amélioration de la portée, de la qualité et de lapertinence des services sociaux de base est unecondition préalable essentielle pour la réalisationdes OMD sociaux. La suppression de laparticipation des utilisateurs aux frais, et lestransferts sociaux pour compenser les coûts ouoffrir des incitations à avoir recours aux services(éducation des enfants, soins de santé pour lesmères) sont des mécanismes puissants à cet égard.Le rapport donne différents exemples de la façond’améliorer la pertinence des services et de lesrendre plus conviviaux pour les hommes, femmeset enfants des groupes exclus, notamment enrecrutant et formant un personnel issu descommunautés exclues, en faisant appel à dupersonnel féminin dans les sociétés où existe uneségrégation des genres, en veillant à ce que lesservices soient prestés dans des langues comprisespar ceux qui en ont besoin, ou en utilisant desécoles et des cliniques mobiles. Ce que cesdifférentes options de politiques ont en communest le fait de chercher à aborder certains aspects dela dynamique sous-tendant l’exclusion sociale.

Les mesures de protection sociale ont pris uneimportance croissante dans la promotion desmoyens de subsistance, et par conséquent dansl’amélioration de la résilience des personnespauvres face aux crises. Les mesures qui se sontavérées les plus bénéfiques pour les groupes excluscomprennent les transferts conditionnels et nonconditionnels, souvent ciblés vers les enfants, les personnes âgées ou les couches les pluspauvres de la société. La conditionnalité associée àces transferts peut imposer des obligations detravail, encourager les femmes à utiliser lesservices des maternités, assurer la fréquentationscolaire et les examens médicaux chez l’enfant.Les transferts sociaux ont clairement un effet deredistribution, et lorsqu’ils sont transparents,réguliers et prévisibles, l’expérience a montréqu’ils ont aussi des impacts importants sur ledéveloppement, tels qu’une capacité accrue àparticiper au marché local de l’emploi, àaméliorer les connaissances et les compétences, à investir dans des actifs productifs, et à accéderau crédit – tout cela accompagné d’effetsmultiplicateurs sur l’économie locale.

Il existe aujourd’hui dans le monde entier,suffisamment d’éléments prouvant qu’il estpossible de s’attaquer à l’exclusion sociale àtravers les OMD, mais jamais en maintenant lestatut quo. Les progrès enregistrés par différentspays et l’analyse des politiques qui ont fonctionnépermettent d’identifier un certain nombre deprincipes clés pouvant servir de base à desstratégies plus larges de lutte contre l’exclusion.

L’importance d’un cadre fondé sur les droitsL’exclusion sociale consiste à dénier à certainsgroupes une identité individuelle et unecitoyenneté à part entière à cause de qui ils sont,de l’endroit où ils vivent, ou de ce à quoi ilscroient. Les efforts pour vaincre l’exclusiondoivent s’inscrire au sein d’une large structure dedroits, regroupant la Déclaration universelle desdroits de l’homme et les conventionsinternationales sur les droits civils et politiquesainsi que sur les droits sociaux, économiques etculturels. Ceux-ci constituent une baseinternationalement acceptée permettantd’aborder les violations des droits fondamentauxde ces groupes.

Développer la tolérance et la solidarité parmiles citoyensSi des États réactifs et des citoyens activementengagés sont essentiels à la mise en place d’unesociété plus démocratique, les relations entre lescitoyens sont au moins aussi importantes quecelle entre l’État et les citoyens. L’exclusion socialeest en partie perpétuée par la discrimination queles citoyens pratiquent les uns vis-à-vis desautres. Légiférer contre la pratique de ladiscrimination, tout en éduquant, en informantet en luttant contre les préjudices, constitue un aspect essentiel du développement d’une démocratie.

Trouver le bon équilibre entre égalité et différenceDes politiques générales ou universellespromouvant l’égalité des chances et desdispositions spéciales pour ceux qui ont étésystématiquement exclus dans le passé peuventfonctionner avec succès de concert. Les approchesuniversalistes sont essentielles pour ledéveloppement d’un sens de la solidarité socialeet de la citoyenneté, particulièrement critiquepour les groupes exclus. En même temps, le faitque c’est leur « différence » par rapport au restede la population pauvre qui est à l’origine duretard enregistré par ces groupes socialementexclus, ou de leur éviction des processus decroissance et de développement soulignel’importance de la pluralité et de la diversité dansles cadres universels.

Pas seulement améliorer, mais transformerIl est tout-à-fait possible de satisfaire les besoinsessentiels des groupes pauvres et marginaliséssans renforcer leur capacité à le faire eux-mêmes,et de maintenir ainsi intacte leur vulnérabilité àlong terme. Pour vaincre la résilience de

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12 Résumé analytique

l’exclusion sociale, il faut attaquer ses racines et adopter des approches intégrées et porteusesde changement.

L’exclusion basée sur l’appartenance à ungroupe requiert des solutions fondées sur les groupesÀ cet égard, il faut noter l’inadéquation despolitiques ciblant les individus ou les ménagesdans le cas des problèmes essentiellementcollectifs ou relatifs à des groupes. Des solutionsagissant au niveau individuel peuvent laisser lesgroupes marginalisés encore plus isolés etappauvris qu’avant. Le besoin d’approches pluscollectives constitue une nouvelle raisond’intégrer le concept de « différence » dans laconception des politiques.

Un nouveau contrat social pour un mondeinterconnecté : les États, les citoyens, et les huit OMDLes causes et conséquences des problèmes depauvreté et d’exclusion sociale ne sont paspurement nationales. Ceux-ci sont le produitd’inégalités structurelles au niveau mondial. Ce fait n’est pas correctement reconnu dans lesOMD. Tandis que les sept premiers OMDconcernent des objectifs à atteindre par les paysen développement, le huitième a trait auxrelations entre les pays développés et endéveloppement. Non seulement, il n’a pas réussi àrefléter la nature inégale de ces relations –manifeste dans l’aide, le commerce et la dette –mais il est également le seul OMD dépourvu decibles à atteindre ou d’indicateurs permettant desuivre un progrès de quelque forme que ce soit.

Il est extrêmement improbable que les pays endéveloppement soient capables d’arriver à lacroissance, la prospérité et la justice sociale sansqu’une plus grande attention ne soit portée à lacréation au niveau mondial d’une plus profondesolidarité et d’un authentique partenariat entreégaux. Celui-ci devrait constituer la plateformecentrale pour le successeur des OMD après 2015.Cependant, d’ici à 2015, les pays riches devraientaccorder la priorité à un certain nombred’actions destinées à accélérer le rythme des progrès :

l Honorer l’engagement d’accroître l’aidepublique au développement (APD) en lafaisant passer à 0,7 % du produit nationalbrut (PNB).

l Reconnaître et appuyer le rôle desorganisations de la société civile dans lamobilisation des groupes exclus, laredevabilité des pouvoirs publics et latransformation des relations de pouvoir.

l Fournir un appui à la mise en place d’un seuiluniversel de protection sociale permettant auxgroupes marginalisés de faire face au risque,d’investir dans leur avenir et de plaider eux-mêmes pour leur propre cause.

l Encourager des relations commerciales pluséquitables, portant une attention particulièreaux besoins des travailleurs pauvres del’économie informelle.

l Tenir les entreprises et le secteur privé pourredevables d’investissements socialementresponsables

l Renforcer la capacité des pouvoirs publics et leur engagement vis-à-vis du cadreinternational des droits de l’homme.

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 13

La Déclaration du Millénaire a été signée en2000 par 189 dirigeants mondiaux, au nomde la communauté internationale. Elle

constitue une promesse de coordonner etaccélérer les efforts en vue de « délivrer nossemblables – hommes, femmes et enfants – de lamisère, phénomène abject et déshumanisant »d’ici 2015.1 Elle s’appuie sur un ensemble devaleurs fondamentales telles que la liberté,l’égalité, la tolérance et la solidarité. Ensemble,elles expriment un ferme engagement envers lajustice sociale en tant que moteur spirituel de la Déclaration.

Malheureusement, cet engagement envers lajustice sociale n’a pas été traduit dans les huitObjectifs du Millénaire pour le développement(OMD), qui visaient à fournir un contenu applicableà la Déclaration, sous la forme d’un certain nombred'objectifs, cibles et indicateurs. L’agenda des OMD a été salué pour son approche intégrée etmultidimensionnelle de la réduction de la pauvreté,qui aborde la privation de revenu, les déficits decapacités humaines, et l’accès insuffisant aux servicesde base de santé et d’éducation. Sa principale limiteréside dans le fait qu’elle n’a pas adopté des mesuresconcrètes pour l'égalité et la justice sociale.

« Le traitement intégré de désavantagesmultiples – la dimension ‘plus que pauvre’ de l’exclusion sociale – est déjà un élémentmajeur de l’agenda du développement. LesObjectifs du Millénaire pour ledéveloppement montrent que la nécessité deréaliser des progrès dans tout un ensemble

de domaines est reconnue et que la pauvreté,bien que d’une importance cruciale, ne peutêtre abordée de manière isolée… »2

Les mesures utilisées pour suivre les progrès desOMD sont exprimées en termes de « moyennes »et de « proportions » nationales. Ainsi par exemple,deux des indicateurs mesurant l’état d’avancementde l’objectif visant l’extrême pauvreté (OMD 1)sont la réduction de moitié, entre 1990 et 2015, de la proportion de la population dont le revenuest inférieur à un dollar EU par jour, et de celle quisouffre de la faim. De tels indicateurs enregistrentles progrès globaux aux niveaux mondial, régionalet national mais n’indiquent pas si ces progrès ontété équitables. Seul un indicateur de l’OMD 1aborde l’inégalité : la part du revenu national allantau quintile le plus pauvre de la population. Mais ils’agit là de la mesure la moins utilisée dans lesrapports sur les OMD.³ L’OMD 3 portespécifiquement sur l’égalité des sexes (dansl’éducation, les emplois salariés et la participationpolitique) mais n’aborde pas spécifiquement lasituation des femmes les plus démunies dans lecadre des progrès globaux correspondant à ces indicateurs.

Introduction : les valeurs fondamentalesde la Déclaration du Millénaire 1

« Les hommes et les femmes ont le droit de vivre et d’éleverleurs enfants dans la dignité, à l’abri de la faim et sans craindrela violence, l’oppression ou l’injustice… » (Déclaration duMillénaire 2000, paragraphe 6). Photographe : Barbara Cheney

Justice sociale et Déclaration du Millénaire

« Les hommes et les femmes ont le droit de vivre etd'élever leurs enfants dans la dignité, à l'abri de la faim et sans craindre la violence, l'oppression ou l'injustice…L'égalité des droits et des chances des femmes et deshommes doit être assurée… Ceux qui souffrent ou quisont particulièrement défavorisés méritent une aide de lapart des privilégiés… Les êtres humains doivent serespecter mutuellement dans toute la diversité de leurscroyances, de leurs cultures et de leurs langues. Lesdifférences qui existent au sein des sociétés et entre lessociétés ne devraient pas être redoutées ni réprimées,mais vénérées en tant que bien précieux de l'humanité. »

(Déclaration du Millénaire 2000, paragraphe 6)

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14 Introduction : les valeurs fondamentales de la Déclaration du Millénaire

Ce rapport prend comme point de départ lenombre croissant de preuves démontrant quel’inégalité engendre des coûts pour la société.Elle impose des coûts au niveau macroéconomiquecar elle ralentit le rythme auquel un taux decroissance économique donné se traduit par uneréduction de la pauvreté.4 Elle crée également descoûts au niveau sociétal à cause de son impact entermes de tensions sociales, criminalité, violence et conflits, et des effets paralysants qui en résultent sur les investissements en capital tanthumain qu’économique.5

Les coûts de l’inégalité impliquent que lescouches les plus pauvres de la populationmondiale ne participent généralement pas auxtaux de progrès « moyens » des OMD. Ce rapportsoutient que la répartition du dénuement n’estpas un effet du hasard. Il touche au contraire defaçon disproportionnée certains groupesconfrontés à une discrimination fondée sur leuridentité sociale. Ces groupes étant plus difficiles à atteindre que le reste de la population pauvre,leur niveau de pauvreté perdure et freine lerythme des progrès des OMD.

« La pauvreté apparaît parfois lorsque lespersonnes ne disposent d’aucun accès auxressources existantes en raison de ce qu’ilssont, de ce qu’ils croient ou de l’endroit où ilsvivent. La discrimination peut engendrer lapauvreté, exactement de la même manière que la pauvreté peut mener à ladiscrimination… »6

Ce rapport vise à démontrer le bien-fondé decette assertion et à mieux comprendre lesprocessus qui perpétuent l’exclusion systématiquede certains groupes sociaux. Bien qu'il soit évidentque l'exclusion sociale existe aussi bien dans lespays riches de l'OCDE (Organisation decoopération et de développement économiques)que dans les économies en transition, nous nousconcentrons ici sur les régions en développement,et en particulier l’Amérique latine, l’Afriquesubsaharienne (ASS) et l’Asie du Sud/Sud-est. Les progrès accomplis en direction des OMD dansces régions et pays sont loin d’être uniformes.Certains pays ont réalisé plus d’avancées qued’autres et certains objectifs ont mieux progresséque les autres. Nous analyserons ici des exemplesde ces progrès afin d’en tirer des leçons pour lapromotion des OMD en tant que moyen d’arriverà la justice sociale.7

Malheureusement, les données sur la situationdes problèmes d'exclusion sociale associés àcertains groupes sont particulièrement peudisponibles. La plupart des rapports sur les OMDfont peu référence aux effets des inégalitésimbriquées. Une grande partie du débat abordédans ce rapport est donc nécessairementconditionnée par la disponibilité de ces données.Nous nous concentrerons en premier lieu sur lespays affichant des preuves évidentes descatégories d’inégalités qui nous intéressent. Nousporterons ensuite notre attention sur les payspour lesquels nous disposons de donnéesventilées montrant l’étendue de ces inégalités. Il ne s’agit pas nécessairement des paysprésentant les formes les plus prononcéesd'inégalité. En effet, certains des pays présentantles inégalités les plus importantes disposent detrès peu d’information en raison des conflits quis’y déroulent (ou s’y sont récemment déroulés).En troisième lieu, les pays disposant

d’informations ventilées ne couvrent pasnécessairement tous les OMD de manièreuniforme. C’est pourquoi nous nousconcentrerons essentiellement sur les OMD liés àla pauvreté monétaire, à la santé et à l’éducation,c’est-à-dire les objectifs les plus souvent abordésdans les données ventilées. Malgré ces restrictions,les pays sélectionnés sont suffisamment différentsles uns des autres et offrent des éléments probantssuffisamment solides sur les modèles d’exclusionpour pouvoir étayer la thèse clé de ce rapport : la persistance des inégalités imbriquées entrave lesprogrès vers les OMD et trahit la promesse de justicesociale contenue dans la Déclaration du Millénaire.

Deux petites filles mauritaniennes sourient timidement àl’objectif dans leur village natal de la région désertique peupeuplée située entre le Sénégal et la Mauritanie. Photographe : Layla Saad, Fonds pour la réalisation des OMD

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 15

« Les données relatives aux pays riches del’OCDE montrent que quel que soit le PNB(produit national brut) par habitant, desniveaux élevés d’inégalité au sein d’une société sont associés à des niveaux élevés decriminalité, violence, obésité, maladiementale, population carcérale, grossessesadolescentes et anxiété. En d’autres termes,l’égalité est bénéfique pour tous. »8

Le rapport est structuré de la manièresuivante : la Section 2 analyse le phénomène des inégalités imbriquées, les exclusions qui en

résultent et leur pertinence pour les OMD. La Section 3 identifie les modèles d’inégalité enAmérique latine, Afrique subsaharienne et Asiedu Sud/Sud-est, en relation avec les OMDsélectionnés. La Section 4 examine certains desfacteurs expliquant la persistance de cesinégalités, tandis que la Section 5 se concentre surles politiques et interventions permettantd’espérer un changement en profondeur. Enfin, la Section 6 expose certains principes générauxpour la promotion de l’égalité, notamment lesvaleurs de tolérance et de solidarité énoncéesdans la Déclaration du Millénaire.

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16 Inégalités imbriquées et exclusion sociale

2.1 Pertinence pour l’agenda des OMD« La diversité humaine n’est en rien unecomplication secondaire (à ignorer ou àintroduire ‘plus tard’) : c’est une raisonfondamentale de notre intérêt pour les inégalités »9

Comme le suggèrent les indicateurs clés mesurantles progrès en direction de l’OMD 1, la pauvreté aété généralement considérée en termes de misèreindividuelle. L’approche conventionnelle de mesurede la pauvreté est fondée sur les caractéristiqueséconomiques des personnes ou des ménages prisindividuellement, en particulier leurs revenus ourichesses. Le classement des ménages selon cescaractéristiques donne naissance à ce qui a étédécrit comme un modèle d'inégalité « vertical ».10

L’importance accordée dans l'OMD 1, à la part du revenu national détenue par les 20 % les pluspauvres de la population (le quintile le pluspauvre) dérive directement de ce modèle.De son côté, la littérature sur l’exclusion sociale

prend les désavantages liés aux groupes(ou inégalités « horizontales »11) comme point dedépart pour son examen des inégalités. Cesdésavantages résultent de hiérarchies sociales quidéfinissent certains groupes comme inférieurs àd’autres sur la base de leur identité. Ces hiérarchiessont le produit de normes et pratiques culturellesqui déprécient, stéréotypent, excluent, ridiculisentou rabaissent certains groupes sociaux en leurrefusant une personnalité à part entière et desdroits égaux à participer à la vie économique,sociale et politique de leur société.

« [L’exclusion sociale est] le processus parlequel des individus ou groupes sontentièrement ou partiellement exclus d’uneparticipation pleine et entière à la société dans laquelle ils vivent. »12

Les identités concernées peuvent être dedifférentes natures suivant les sociétés, mais lesformes de pauvreté les plus persistantes sont,dans la plupart des contextes, associées auxidentités liées à la naissance, telles que la race, la caste, l’appartenance ethnique, ainsi que lescroyances religieuses lorsqu'elles concernent uneminorité. Le genre traverse toutes ces identitéshéritées, de sorte que, quels que soient les

groupes, les femmes y sont la plupart du tempssubordonnées aux hommes. À la différence de laplupart des groupes socialement subordonnés, les femmes sont, elles, réparties de manièrerelativement équitable entre les différentes classeséconomiques, et le genre ne constitue donc pasen soi une marque de pauvreté. C’estl’imbrication du genre et des désavantageséconomiques et autres, qui exacerbe les inégalitésdont souffrent les femmes et les filles pauvres. L’inégalité basée sur l’identité se combine à

d’autres formes d’inégalités pour définirl'exclusion sociale. À cause de cette imbricationavec les inégalités économiques – les groupessocialement exclus sont confrontés à des obstaclesles empêchant d’avoir accès aux ressources etopportunités –, les personnes les plus susceptiblesd’être laissées-pour-compte dans le processusnational d’accomplissement des OMD seretrouvent de manière disproportionnée au sein des minorités ethniques et religieuses,

Inégalités imbriquées et exclusion sociale 2

Une bénévole des services sanitaires du village pèse un enfantsous la supervision d’une infirmière du district, dans la régionde Tigray en Éthiopie. Photographe : Sophie de Caen, Fonds pour la réalisation des OMD

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 17

des groupes souffrant de discrimination raciale, et des castes les plus basses. Dans la plupart descas, les femmes et les filles appartenant à cesgroupes sont encore plus défavorisées. À l’exclusion sociale, viennent souvent

s’ajouter des inégalités spatiales cantonnant lesgroupes culturellement dévalorisés etéconomiquement démunis dans des régionsphysiquement défavorisées. En milieu rural, lesdésavantages spatiaux sont généralement associésà l’éloignement, à la vulnérabilité écologique, aux faibles niveaux de productivité agricole, àune maigre assise financière et à une faibleintégration dans l’économie nationale. Dans leszones urbaines, ils sont associés à de médiocresconditions de logement et sanitaires, à desservices et à une infrastructure inadaptés et, trèsfréquemment, à des sous-cultures de criminalité,violence, dépendance à la drogue et misère.13

Finalement, l’exclusion sociale possède unedimension intertemporelle. Les inégalitésimbriquées, qui constituent l’exclusion sociale,ainsi que le désavantage cumulé qui en résulte,expliquent sa persistance au cours du temps (voir Encadré 2.1, page 19). L’exclusion socialerefuse aux groupes affectés les moyens « classiques» de sortir de la pauvreté, renforçant ainsi lesinégalités tout au long de la vie de leurs membres,et souvent sur plusieurs générations.

2.2 Histoire et géographie régionales del'exclusion sociale L’exclusion de certains groupes sur la base d'uneidentité socialement attribuée est souventprofondément enracinée dans l’histoire des pays.Dans certains, elle est étroitement liée auxpériodes de colonisation – souvent accompagnéesd’un génocide des populations autochtones – et à l’esclavage, aux guerres et conflits, ainsi qu’àdes pratiques discriminatoires qui ont perduréjusqu’à nos jours. Dans d’autres pays, elle est liéeà des rapports de supériorité-infériorité issus decroyances religieuses ou culturelles.En Amérique latine, la race et l’appartenance

ethnique, impliquant des catégories de blancs,autochtones, noirs et métisses, sont lesprincipales marques d'exclusion sociale.L’Amérique latine et les Caraïbes comptent plusde 50 millions d’autochtones et plus de 120millions d’individus de descendance africaine,soit environ 33 % de la population.14 Cesgroupes ne sont pas uniformément répartis ausein de la région. Par exemple, plus de 25 % de lapopulation de la Bolivie, du Guatemala, du Pérouet de l'Équateur sont autochtones, alors qu’auPanama, au Brésil, au Nicaragua et danspratiquement tous les pays des Caraïbes, plusd’un quart de la population est de descendance

Province du Yunnan, Chine : membres de la minorité ethnique des Bai, traditionnellement vêtus de bleu.Photographe : Jeremy Horner/Panos Pictures

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18 Inégalités imbriquées et exclusion sociale

africaine. Elle ne représente que 6 % en Uruguayet un taux négligeable en Argentine. L’exclusion sociale au sein des pays comporte

elle aussi une dimension spatiale.15 Dans tous lespays, à l’exception du Brésil, plus de 45 % de lapopulation autochtone ou de descendanceafricaine résident en zone rurale.16 Les groupesautochtones vivent généralement dans les régions les plus reculées et difficiles d’accès dupays, et ils sont souvent poussés en dehors deszones les plus productives par des groupes non-autochtones.17 Les afrodescendants viventprincipalement sur le littoral des océans Pacifiqueet Atlantique et de la mer des Caraïbes, ainsi quedans les zones urbaines. En Asie, l’exclusion sociale est basée sur

l’appartenance ethnique, les identités tribales etautochtones, voire la religion et la langue danscertains pays. Tout comme en Amérique latine, les minorités ethniques autochtones d’Asie sontsouvent localisées dans des zones reculées, et toutcomme en Amérique latine, cette situation n'est pas toujours le résultat d’une décision volontaire.Les chaînes de montagnes qui s’étendent del’Afghanistan au golf du Tonkin ont longtemps étéun refuge pour les communautés autochtones qui,pour diverses raisons, occupaient une positionmarginale par rapport aux majorités dominantesdes vallées et des plaines. Les groupes ethniques et autochtones

représentent environ 8 % de la population enChine, 10 % au Vietnam, 8 % en Inde et 37 % au Népal. On les trouve dans les régions les pluspauvres : zones rurales de l’ouest de la Chine,hautes terres généralement reculées des zonesmontagneuses du nord et du centre du Vietnam,régions vallonnées et boisées de l'Inde, duBangladesh et du Népal.En Inde, la concentration spatiale implique une

répartition inégale des minorités autochtones ouAdivasis entre les différents états. Plus de 80 % des

minorités autochtones se répartissent entre neufétats du centre et de l'ouest de l'Inde : Orissa,Madhya Pradesh, Chhattisgarh, Jharkhand,Maharashtra, Gujarat, Rajasthan, Andhra Pradeshet Bengale occidental. La majeure partie de lapartie restante réside dans le nord-est du pays. De population majoritairement hindoue,

l’Inde et le Népal se caractérisent également parune hiérarchie des castes qui remonte à des

siècles. Les castes sont étroitement liées à unehiérarchie professionnelle qui attribue les bassesbesognes et les occupations rituellement « impures » à la caste inférieure des «intouchables » ou Dalits. Ceux-ci représentent 17 % de la population indienne. Ils sontgénéralement plus dispersés au niveaugéographique que les groupes autochtones mêmesi 80 % vivent en milieu rural.18 La populationnépalaise comprend une majorité hindoue (58 % en 2001), des Janajatis (minoritésautochtones – 37 %), et des minorités religieuses,principalement musulmanes (environ 4 %).19

Environ 12 % de la population est composée de Dalits. L’Afrique subsaharienne abrite plus de 2 000

groupes ethniques distincts, caractérisés par unelangue, une culture et des traditions différentes, et parfois des croyances religieuses distinctes. La taille des groupes ethniques en Afrique varie deplusieurs millions de personnes à quelquescentaines de milliers, et ils sont souvent associés àun territoire spécifique. La plus grande partie de larégion souffre encore du démembrement ducontinent opéré par les puissances coloniales en1884, sans aucune considération pour lesdélimitations sociales, politiques, ethniques etlinguistiques existantes. À cause de sa géographiepolitique, la région, qui compte plus de pays quen’importe quelle autre dans le monde, a étélongtemps le théâtre de conflits armés régionauxet civils. L’environnement physique caractérisé parde longues distances et une faible densité depopulation accentue encore ces profondesdivisions historiques.

À l’exclusion sociale, viennent souvents’ajouter des inégalités spatiales cantonnantles groupes culturellement dévalorisés etéconomiquement démunis dans des régionsphysiquement défavorisées

Des femmes vendant des vêtements à Soweto, dans lapériphérie de Johannesburg. Photographe : Barbara Cheney

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 19

Dans des pays comme l’Afrique du Sud ou leZimbabwe, où les puissances coloniales ontmaintenu une forte présence, les inégalitésimbriquées ont une dimension éminemmentraciale. Les clivages sociaux associés àl’appartenance ethnique sont plus uniformément

répartis dans le sous-continent et souventrenforcés par l’emplacement géographique etl’éloignement des centres urbains. La religion ensoi ne constitue pas nécessairement un motifd'exclusion, tant qu'elle n’est pas combinée avecdes disparités ethniques ou régionales.

Encadré 2.1 Inégalités imbriquées et persistance de l’exclusion sociale

L’exclusion sociale est le produit d’inégalités imbriquées :

l La dévalorisation culturelle subie par certains groupes les amène à se considérer comme inférieurs à d’autres etporte atteinte à leur dignité et à la perception qu’ils ont d’eux-mêmes

l Leur position désavantagée dans la répartition des ressources, services et opportunités au sein de leur sociétél Leur localisation dans des lieux où leurs efforts ne peuvent produire que de faibles résultatsl Le refus de leur accorder toute représentation ou influence dans les décisions affectant leurs vies et

leurs communautésl L’interaction mutuelle entre ces inégalités entraîne leur persistance dans le temps.

Page 21: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

20 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

Une vue d’ensemble des progrès accomplisen direction des OMD montre que lemonde est plus proche de réaliser certains

objectifs que d’autres (voir Figure 3.1, page 20).Il est sur la bonne voie en ce qui concernel’extrême pauvreté, l’égalité des sexes dansl’enseignement primaire et secondaire, et l’accès àl’eau potable. Mais il lui reste encore du chemin àparcourir pour atteindre les objectifs et cibles liésaux taux d’achèvement universel des étudesprimaires, à l’accès à l’assainissement, et à laproportion des personnes qui souffrent de lafaim. Il est sérieusement en retard dansl’accomplissement des objectifs liés à la mortalitédes moins de 5 ans et la mortalité maternelle.20

Sur tous les OMD abordés dans ce rapport, il enest un pour lequel des progrès considérables ontété réalisés (OMD 1 : réduire l’extrême pauvretéet la faim), un autre pour lequel il reste encore duchemin à parcourir (OMD 2 : assurer l’éducationprimaire pour tous) et deux qui restent des défismajeurs (OMD 4 : réduire la mortalité infantile,et OMD 5 : améliorer la santé maternelle).Ce panorama mondial permet d’attirer

l’attention sur certaines des dimensions les plusréfractaires de la pauvreté à laquelle estconfrontée la communauté internationale. Uneimage plus désagrégée serait nécessaire pourdéterminer la situation des différents pays etgroupes socialement exclus qui les composent.

Comme nous l’avons déjà fait remarquer, uneévaluation des progrès « moyens » au niveaunational masque généralement des inégalitésconsidérables au niveau infranational. Il faut également noter que même si certains

pays présentent un retard dans la réalisation desOMD, ils n’en ont pas moins réalisé globalementdes progrès considérables en valeur absolue. C’estle cas en particulier de l’Afrique subsahariennepour laquelle un des thèmes récurrents desdébats sur les politiques est le fait qu’elle sera «hors programme » pour chacun des OMD d’ici 2015.21 La comparaison entre les progrèsd’ensemble en valeur absolue réalisés en directiondes OMD et les progrès relatifs par rapport auxcibles des OMD permet de mettre cet « afro-pessimisme » en perspective.22

l 11 pays africains figurent parmi les 20 paysayant réalisé les meilleures progrès d’ensembleen valeur absolue, mais 3 seulement y figurenten termes de progrès relatifs

l 6 pays d’Asie figurent parmi les 20 paysprésentant les meilleurs résultats en termes

Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale3

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◆ distance par rapport au but parcourue◆ distance à parcourir pour atteindre les objectifs en 2015

Figure 3.1 Progrès globaux dans la réalisationdes OMD

Source Banque mondiale (2010) Global MonitoringReport: The MDGs After the Crisis

Tableau 3.1 Progrès globaux absolus et relatifs dans la réalisation des OMD : Les 20 pays les plus performants

Les 20 meilleurs Les 20 meilleursProgrès absolus Progrès relatifs dans la

réalisation des OMD

Bénin ÉquateurMali ChineÉthiopie ThaïlandeGambie BrésilMalawi ÉgypteVietnam VietnamOuganda HondurasNépal BelizeInde NicaraguaCambodge ArménieBangladesh KazakhstanHonduras Sri LankaMauritanie CubaGhana MexiqueChine SalvadorBurkina Faso BéninRwanda ChiliNicaragua MalawiGuatemala GambieTogo Guatemala

Source ODI (2010)22

Page 22: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 21

de progrès en valeur absolue et 4 en termes de progrès relatifs

l 3 pays d’Amérique latine figurent parmi les 20 pays présentant les meilleurs résultats entermes de progrès en valeur absolue et 9 entermes de progrès relatifs.

3.1 Progrès par rapport aux OMD en Amérique latine En tant que région, l’Amérique latine appartientà la catégorie « à revenu intermédiaire ».Historiquement, elle a été l’une des régions lesplus inégales au monde, son quintile le pluspauvre ne représentant qu’environ 3 % du revenurégional total.23 Les progrès sont cependantévidents. La pauvreté a chuté d’environ 44 à 33 %entre 2002 et 2008, tandis que l’extrême pauvretéest passée de 19 à 13 %.24 La plupart des pays dela région sont en bonne voie d’accomplirl’objectif de réduction de moitié de l’extrêmepauvreté d’ici 2015, mais certains des moinsdéveloppés accusent un retard considérable : la Bolivie, Haïti, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua et le Paraguay.Il y a lieu de faire preuve d’un optimisme

prudent en ce qui concerne l’équité des progrèsréalisés en direction des OMD, étant donné quedans 12 des 17 pays disposant de données à cesujet, on constate un déclin marqué de l’inégalitédes revenus entre 2000 et 2007.25 Ceux-cicomptent beaucoup des pays présentant unpourcentage élevé de groupes socialement exclus, tels que l’Équateur, le Brésil, la Bolivie et le Mexique.

3.2 Exclusion sociale et OMD en Amérique latineHistoriquement, l’Amérique latine a toujours étél’une des régions les plus inégales du monde… maison peut faire preuve d’un optimisme prudent en cequi concerne l’équité des progrès vers les OMD.

« Les concepts d’exclusion et d’inclusion socialesmettent en évidence le degré d’équité de larépartition des avantages du développement, des réseaux d’interaction sociale et de laparticipation politique… En Amérique latine,l’exclusion sociale se traduit très clairement par une répartition inégale et persistante desrevenus, qui engendre une pauvreté pire que ceque laisse supposer le niveau de développementde la région. »26

L’Amérique latine est l’une des rares régions endéveloppement à recueillir et analyser de manièresystématique des données relatives aux OMD,ventilées par appartenance ethnique, ce qui

permet de réaliser certaines comparaisons au seinde la région, à partir desquelles se profilentcertains schémas généraux :

l Bien que la pauvreté modérée et extrême aitreculé, l’extrême pauvreté reste plus élevéeparmi les populations autochtones et dedescendance africaine dans de nombreux pays(voir Tableau 3.3, page 22 et Figure 3.4,Page 22).

l L’identité ethnique reste associée à desinégalités dans la scolarisation à tous lesniveaux d’enseignement, même si on constateune certaine réduction des disparités ethniquesdans l’éducation primaire de nombreux pays(voir Tableau 3.4, page 23 et figure 3.4, page 23).L’expansion à grande échelle del’enseignement fondamental est l’un desfacteurs sous-tendant la diminution desinégalités de revenu dans la région.27

Dans certains pays cependant, les inégalitésfondées sur les groupes restent marquées (entre populations autochtones et nonautochtones en Bolivie, par exemple, voir Tableau 3.5, page 23).

l Les enfants autochtones présentent un risquede mortalité plus élevé que les nonautochtones (voir Figure 3.2, page 22). Selonles données les plus récentes des enquêtesdémographiques et de santé de la Bolivie,

Tableau 3.2 Couverture institutionnelle des municipalités où lapopulation autochtone représente une majorité, une minorité ouune proportion modérée de la population. Bolivie, 2006

Pourcentage d’ Minorité Présence Majorité accouchements autochtone autochtone autochtone dans un (moins de 33%) modérée (plus de 66%)établissement (33-66%) de santé

Aucun % Aucun % Aucun %

<50% 22 44,9 14 26,4 116 52,5≥50% <70% 11 22,4 19 35,8 58 26,2>70% 16 32,7 20 37,7 47 21,3

Source Adapté de UDAPE/CIMDM (2006) Progreso de losObjetivos de Desarrollo del Milenio, Cuarto Informe asociados alDesarrollo humano, La Paz, Programa de las Naciones Unidaspara el Desarrollo (PNUD)

Encadré 3.1 Couverture institutionnelle desaccouchements en Bolivie

D’après les estimations, la Bolivie possèderait l’un deratios de mortalité maternelle les plus élevés d’Amériquelatine, une haute proportion des accouchements n’ayantpas lieu dans une institution. Le Tableau 3.2 montre quemoins de la moitié des accouchements ont lieu dans unétablissement de santé dans 52,5 % des municipalitésclassées comme « à majorité autochtone ».

Page 23: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

22 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

Tableau 3.3 Incidence de la pauvreté (OMD 1) par niveau de revenu des ménages par habitant dans quelquespays d’Amérique latine Pays Année 1 dollar EU par jour Seuil officiel d’extrême pauvreté

Blancs Non-blancs Total Blancs Non-blancs Total

Bolivie 1997 14,8 45,3 28,7 27,8 57,5 41,32002 16,6 37,1 27,7 25,5 45,8 36,6

Brésil 1995 4,7 12,7 8,3 17,7 40,9 28,22002 5,1 10,6 7,6 17,7 38,0 27,0

Chili 2000 3,4 9,4 3,5 4,5 3,1 4,5Colombie 1999 15,2 24,1 16,2 20,5 31,0 21,7Équateur 1998 29,0 61,0 30,3 16,0 38,9 16,9Guatemala 2002 11,4 31,5 20,0 14,3 39,1 24,9Mexique 1992 10,7 53,3 12,8 Chiffres non disponibles

2002 12,3 40,9 13,9 14,5 47,9 16,4Nicaragua 1998 24,5 46,0 24,9 17,0 37,7 17,5

2001 15,0 35,0 15,8 14,5 33,9 15,2Panama 2002 9,3 54,7 12,4 19,2 74,4 23,0Paraguay 1995 2,7 24,3 11,8 4,8 24,5 13,1

2001 2,2 17,3 9,9 5,0 24,9 15,2Pérou 2001 14,6 26,9 19,5 18,7 33,5 24,6

Source Busso et coll. (2005)14

0

0.5

1.0

1.5

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22.6*50.3* 36.9*

75.9* 37.1*54.6*

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Figure 3.2 Ratio des taux de mortalité infantile despopulations autochtone et non-autochtone, 2000-2002,quelques pays d’Amérique latine

*Taux de mortalité infantile de la population autochtoneSource Del Popolo, F. et Oyarce, A. (2005) ‘América Latina,Población Indigena: Perfil Sociodemigráfico en el Marco de laConferencia Internacional sobre la Población y el Desarollo y delas Metas del Milenio’, Notas de Población no. 79, Santiago deChile: CELADE

Bolivie Pérou Colombie Guatemala0

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Moyenne par pays

Autochtones de sexe féminin

Pauvres, autochtonesde sexe féminin

Autochtones

Figure 3.3 Nombre moyen d’années d’études de lapopulation autochtone des 17 à 22 ans dansquelques pays

Source UNESCO (2010)107

de l’Équateur, du Guatemala, du Pérou et du Brésil,les enfants d’origine autochtone présentent aussi unrisque de malnutrition de 1,6 à 2,5 fois plus élevéque les enfants non autochtones.

l Les inégalités entre les sexes et les ethnies secombinent au statut économique pour maintenir lesfemmes autochtones issues des ménages à faiblerevenu, au bas de la hiérarchie en termes d’éducation(voir Figure 3.3, page 22) et de santé. La mortalité

maternelle est généralement plus élevée au sein descommunautés autochtones, notamment celles deszones reculées, où elle peut être deux à trois fois plus élevée que la moyenne nationale. À titre d’exemple, en Équateur en 2003, le tauxnational de mortalité maternelle s’élevait à 74,3 pour 100 000 naissances vivantes contre 250 pour 100 000 dans les communautés autochtones éloignées.28

Historiquement, l’Amérique latine a toujours étél’une des régions les plus inégales du monde.

Page 24: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 23

l Les inégalités spatiales se combinent avecl’appartenance ethnique.Le Tableau 3.6montre l’imbrication de l’inégalité spatiale,l’appartenance ethnique et l’éducation auMexique. Les états du Sud les plus pauvres(tels que le Chiapas, l’Oaxaca et le Guerrero),qui abritent environ 75 % des populationsautochtones du pays, affichent des niveauxd’éducation nettement moins élevés. Ilsprésentent en outre des taux de mortalitématernelle supérieurs à la moyenne

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Figure 3.4 Amérique latine (14 pays) : taux d’extrême pauvreté des populations autochtones et descendantd’Africains, en multiple du taux du reste de la population (seuil d’un dollar par jour)

Source Machinea J.L. ; Bárcena, A. et León, A. (2005) The Millennium Development Goals: A Latin American andCaribbean Perspective, Santiago, Chili : Comisión Económica para América Latina y el Caribe

Tableau 3.4 Taux de scolarisation au primaire dansquelques pays d’Amérique latine

Pays Année Blancs Non-blancs Total

Bolivie 1997 0.95 0.90 0.932002 0.95 0.93 0.94

Brésil 1995 0.93 0.87 0.902002 0.97 0.95 0.96

Chili 2000 0.99 0.98 0.99Colombie 1999 0.90 0.89 0.90Équateur 1998 0.92 0.87 0.92Guatemala 2002 0.88 0.77 0.83Mexique 1992 0.94 0.81 0.93

2002 0.97 0.98 0.97Nicaragua 1998 0.84 0.82 0.84

2001 0.89 0.81 0.89Panama 2002 0.98 0.85 0.96Paraguay 1995 0.92 0.86 0.89

2001 0.95 0.91 0.93Pérou 2001 0.96 0.97 0.97

Source Busso et coll. (2005)14

Tableau 3.5 Comparaison entre le nombre d’années d’étudesdes groupes autochtones et non-autochtones en Bolivie

Nombre moyen d’années d’études 2000 2007 (population 15+) (provisoire)

National 7.7 8.7Autochtones 6.0 7.2Non-autochtones 9.7 10.5

Source Données de l’Unidad de Análisis de Políticas Sociales y Económicas (UDAPE) www.udape.gov.bo/, consultées le 30juin 2010

Tableau 3.6 Indicateurs d’éducation, Mexique, 2005

Moins de 4 années d’études

(%)

Moyenne nationale 11

États désavantagés du SudChiapas 26Guerrero 19Michoacán 14Oaxaca 16Veracruz 20

Quelques États du Nord et du centre Baja California 6Distrito Federal 3Mexico 6

Données sur la population des 17 à 22 ansSource UNESCO (2010)107

Page 25: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

24 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

Tableau 3.7 Brésil : pourcentage de la population vivant endessous du seuil d’extrême pauvreté, par appartenance raciale

1993 2005

Descendants d’Africains 15 6Blancs 4.9 2.5

Tableau 3.8 Brésil : distribution des 10 % les plus pauvres et 1 % le plus riche, par appartenance raciale (2005)

10% les plus 1% le plus richepauvres

Blancs 26.5 88.4Descendants d’Africains 73.5 11.6

Source Adapté de l’IPEA (2007) Millennium DevelopmentGoals: National Monitoring Report/Coordination, Institute forApplied Economic Research and the Secretariat for StrategicPlanning and Investment

Encadré 3.2 Distribution du revenu et del’extrême pauvreté au Brésil

Le Brésil a enregistré une réduction abrupte de sonniveau d’extrême pauvreté au sein de la populationde descendance africaine entre 1993 et 2005. Celle-ci représente néanmoins encore 74 % des ménagesdu décile le plus pauvre (contre 27 % pour lapopulation blanche), et seulement 12 % du décilele plus riche (contre 88 % pour la populationblanche). L’imbrication des inégalités ethniques etspatiales est très marquée au Brésil : huit des dixétats les plus pauvres se trouvent au nord-est, oùse retrouve la plus forte concentrationd’afrodescendants, tandis que trois des quatreétats du sud-est font partie des cinq états les plusriches du pays. De plus, l’imbrication desinégalités liées à l’appartenance ethnique, au sexeet aux classes sociales se traduit par le fait que leshommes blancs ont généralement les salaires lesplus élevés, quel que soir leur niveau d’éducation,tandis que les femmes noires gagnent le moins(voir Figure 4.3, page 38). La race, le genre et lasituation géographique représentaient lesprincipaux facteurs déterminants de la pauvreté en 1981, et l’étaient toujours en 2001.

Ville de Mexico : Alfredo (26 ans) vend des bonbons à un carrefour animé pour soutenir sa famille. Il a quatre enfantset vit à Mansion Mazahua, un bâtiment colonial en ruine habité par 42 familles d’Indiens Mazahua. Obligésd’émigrer vers la ville pour pouvoir subsister, ils occupent dans des conditions précaires ce bâtiment endommagépar le tremblement de terre. Photographe : Aubrey Wade/Panos Pictures

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 25

nationale.29 Dans le Guerrero par exemple, ce taux s’élève à 128,2 décès pour 100 000naissances vivantes, soit près de cinq fois celuidu Nuevo León, l’état du Nord le plusdéveloppé (26,9 pour 100 000).30 Une baisseglobale des taux de mortalité maternelle acependant été enregistrée, à laquelle tous cesétats ont participé à l’exception du Guerrero,comme nous le verrons plus loin.

3.3 Progrès en direction des OMD enregistrésen Asie Le Rapport 2010 sur les Objectifs du Millénairepour le développement indique que la région Asie-Pacifique dans son ensemble est en bonne voied’atteindre l’objectif lié à l’extrême pauvreté,malgré les reculs causés par la crise économiquemondiale. Ces avancées sont principalement dues aux exceptionnels résultats de la Chine. De nombreux pays de la région ontconsidérablement réduit la pauvreté monétaireau niveau agrégé suite à une forte croissanceéconomique, mais certains ont enregistré uneforte aggravation de la disparité des revenus. La part du revenu national des 20 % les pluspauvres de la population de la région a chuté demanière abrupte. Entre 1990 et 2004, elle estpassée de 7,2 à 6,7 % en Asie du Sud, et de 7,1 à 4,5 % en Asie de l'Est. Sur 20 pays, 14 ont vuaugmenter leur coefficient de Gini, qui mesure ledegré d’inégalité d’un pays, contre 6 seulementqui l’ont vu descendre.L’aggravation des inégalités au sein de la région

a attiré l’attention sur la nécessité d’une croissanceinclusive. Le rapport 2007 de la Commissionéconomique et sociale pour l’Asie et le Pacifique

3.4

3.2

2.63.1

3.5

1.82.4

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2.01.7

2.11.9

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0 20 40 60 80 100%

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Népal

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Bangladesh

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Indonésie

Inde

Turquie

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Source ESCAP/ADB/PNUD (2007)31

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Népal Newar Caste moyenneTarai

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Musulmans Autres Janajatis descollines

Janajatis Tarai DalitsNéépaléép lal Newarewar aste moyennnemoyen Brahhmanes/mane Musuulmanslulman Auutresutres Janajatis de esa itis d de anajaatis Taraia itis Tar DalitslDaliits

◆ 1995/6 ◆ 2003/04

Figure 3.6 Népal : Tendances du taux d’incidence de la pauvreté par groupe social

Source Établi à partir des données 2005 du Bureau central des statistiques du Népal, cité dans le NepalHuman Development Report (2009)

Tableau 3.9 Comparaison des taux de malnutritioninfantile : Chine orientale et occidentale (%) Année Provinces Provinces

orientales occidentales

1992 Insuffisance pondérale, 15.1 21.4retard de croissance 33.6 42.7

1998 Insuffisance pondérale, 8.3 18.3retard de croissance 16.9 29.4

2000 Insuffisance pondérale, 9.1 19.9retard de croissance 14.2 27.6

2005 Insuffisance pondérale, 5.8 12.5retard de croissance 10.7 16.3

Source Ministère des Affaires étrangères, République de Chine etSystème des Nations Unies en Chine (2008) China's ProgressTowards the Millennium Development Goals: 2008 Report

Figure 3.5 Taux de mortalité des moins de cinq ans parquintile de richesse, et ratio du quintile le plus pauvre par rapport au plus riche

Page 27: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

26 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

Tableau 3.10 Incidence de la pauvreté de différents groupes sociaux dans quelques États de l’Inde

États Total Hindous Musulmans Tous les autresurbains Tous les Hindous SC/ST Autres Hindous

2004– 1993–4 2004– 1993–4 2004– 1993–4 2004– 1993–4 2004– 1993–4 2004– 1993–405 05 05 05 05 05

Toute l’Inde 29 33 27 31 46 51 22 26 44 47 16 23Bihar 42 34 38 31 70 52 33 26 57 46 4 29Assam 7 8 5 6 7 14 5 5 13 22 4 0Andhra Pradesh 34 38 32 37 48 47 27 35 49 49 22 26Gujarat 18 28 16 25 21 42 15 22 34 47 2 23Rajasthan 27 31 26 28 48 47 18 23 39 56 7 14Tamil Nadu 28 40 29 40 50 57 25 36 24 46 21 34Orissa 50 41 49 40 74 57 42 35 51 68 51 24

Source Gouvernement indien (2006) Social, Economic and Educational Status of the Muslim Community in India,rapport du Comité Sachar, http://zakatindia.org/Files/Sachar%20Report%20(Full).pdf, consulté le 15 août 2010

Encadré 3.3 Pauvreté et inégalité sociale en Inde

L’Inde est l’un des nombreux pays de la région qui ont enregistré une croissance économique accompagnée d’uneréduction de la pauvreté, mais aussi des inégalités persistantes, si pas croissantes. Comme le montre le Tableau 3.10,la pauvreté a reculé entre 1993 et 2004 dans tous les groupes sociaux, mais est restée systématiquement élevée chezles Dalits (caste répertoriée) et les Adivasis (tribu répertoriée), et dans une moindre mesure, chez la minoritémusulmane. La concentration géographique des Adivasis dans certains états indiens, tels que le Bihar et l’Orissa,entraîne une incidence de la pauvreté dans ces états nettement supérieure au niveau national de la pauvreté. Lesinégalités entre les castes, appartenances ethniques et situations géographiques se renforcent mutuellement et créentdes poches d’extrême pauvreté au sein de certains groupes : par exemple, les castes et tribus répertoriées vivant dansl’Orissa enregistrent une prévalence de la pauvreté de 74 contre 5 pour les « autres Hindous » (n’appartenant à aucunecaste ou tribu répertoriée) vivant dans l’état de l’Assam.

Jeunes garçons dalits chargeant des blocs de granit dans des concasseurs dans une carrière. Photographe : Mark Henley/Panos Pictures

Page 28: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 27

(UN ESCAP) sur les OMD a tenté d’examiner les progrès réalisés « au-delà des moyennesnationales ».31 La Figure 3.5 illustre les implicationspour la mortalité infantile de l’aggravation desinégalités de revenu. Elle montre le ratio des tauxde mortalité des moins de 5 ans entre les quintilesles plus riches et les plus pauvres pour un certainnombre de pays. Dans chacun d’eux, les 20 % lesplus pauvres subissent plus, et souvent beaucoupplus, que 20 % de la mortalité infantile.Cependant, le fait que le rapport de l’UN

ESCAP n’aborde que les inégalités liées auxrevenus, au genre et au rapport rural/urbainreflète la pénurie des donnés ventilées parappartenance ethnique.

3.4 Exclusion sociale et OMD en Asie « L’Asie a fait aujourd’hui de la croissanceinclusive un de ses objectifs de développementclés en raison de la rapide aggravation desinégalités de revenus et autres, qui suscitel’inquiétude croissante que les avantages de lacroissance spectaculaire du PIB asiatique nesoient pas équitablement répartis, ce quipourrait enrayer le processus de croissancelui-même… La croissance est inclusivelorsqu’elle offre une égalité des chances quimet l’accent à la fois sur la créationd’opportunités et sur la possibilité pour tousd’y accéder… ces dernières [les inégalités duesà des différences de conditions individuelles]reflètent souvent une exclusion socialeassociée à des défaillances du marché,institutionnelles et des politiques. »32

Tableau 3.11 Inde: Taux de mortalité des moins de cinq ans dansdifférents groupes sociaux, 1992/1993 à 2005/2006

Taux de mortalité des moins de cinq ansSC ST OBC Autres Total

1992/1993 149,1 135,2 NA 111,5 109,31998/1999 119,3 126,6 103,1 82,6 94,92005/2006 88,1 95,7 72,8 59,2 74,3

Source Enquête nationale sur la santé familiale, 1, 2 et 3, Inde

Tableau 3.12 Népal: taux de mortalité de la petite enfance, 2006

Caste/appartenance ethnique Mortalité Mortalité et identité régionale infantile des moins

de cinq ans

Brahmanes/Chhetris 59 76Autres castes Tarais/Madhesis 64 86Dalits 68 90Newars 36 43Janajatis 59 80Musulmans 68Tous les groupes des collines et montagnes 58 77

Tous les groupes Tarais/Madhesis 65 84Tout le Népal 55 68

Source Bennett, L.; Dahal D. et Govindasamy, P. (2008) Caste,Ethnic and Regional Identity in Nepal: Further Analysis of the2006 Nepal Demographic and Health Survey, Calverton,Maryland, USA: Macro International Inc.

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80Kinhs et Chinois Minorités ethniques• ◆

1993 1998 2002 2004 2006

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• •

Figure 3.7 Pourcentage de la population adulte quin’a fait aucunes études, Vietnam

Même si les résultats scolaires s’améliorent dans tous lesgroupes au Vietnam, l’écart persiste entre les Kinhs et lamajorité chinoise et les minorités ethniques Source Vietnam Development Report 2008: SocialProtection, rapport conjoint des donateurs présenté à la réunion du Groupe consultatif Vietnam, Hanoi, 6–7 décembre, 2007

Encadré 3.4 Inégalités au niveau de la santé desenfants en Inde et au Népal

En Inde, tous les groupes sociaux ont enregistré uneréduction de la mortalité des moins de cinq ans(Tableau 3.11). Mais les castes et tribus répertoriéesainsi que les « autres castes retardataires »continuent à accuser des taux plus élevés. Le fosséentre les tribus répertoriées et les « autres » s’estcreusé entre 1992 et 2006.

Les progrès constants du Népal dans la réductionde la mortalité des enfants de moins de cinq ans sesont accompagnés d’une aggravation des inégalités :le ratio des quintiles les plus pauvres par rapport auxplus riches est passé de 2,8 en 1997 à 3,4 en 2002.Seuls 23 % des enfants de la communautémajoritaire chinoise des Kinhs sont en insuffisancepondérale (« rachitiques ») contre 34 % de ceux desminorités ethniques des montagnes du Nord, et 45 %dans les hautes terres du centre et les régionscôtières.

Le Tableau 3.12 montre que les Newars (une casteautochtone) ont les taux de mortalité infantile les plusbas, suivis par les castes des Brahmanes/Chhetris.Les Dalits et les Janajatis enregistrent les taux demortalité infantile les plus élevés.

Page 29: Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ...mdgfund.org/sites/default/files/MDG report French Final_LR.pdf3.6 Exclusion sociale et OMD en Afrique subsaharienne 31 4

28 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

Encadré 3.5 Égalités ethniques et spatiales imbriquées au Vietnam et en Chine

Au Vietnam, les inégalités ethniques ont une dimension spatiale marquée. Les minorités ethniques doiventparcourir de plus grandes distances pour rejoindre l’école ou les marchés, sont plus éloignées des routespraticables en toute saison et bénéficient d’un accès plus restreint à l’eau potable et aux servicesd’assainissement. Cette situation explique en partie pourquoi les résultats scolaires et les indicateurs de santédemeurent plus bas chez les minorités ethniques, même s’ils se sont améliorés. Le désavantage lié àl’appartenance ethnique varie selon la situation géographique : les minorités ethniques vivant dans les basses-terres ont connu une rapide réduction de la pauvreté tandis que celles des hautes-terres du centre et des régionscôtières du sud et du centre-nord connaissent toujours une pauvreté extrême.

En Chine, les minorités ethniques, largement concentrées dans la région de l’Ouest, restent fortementdésavantagées ; elles représentaient 8,4 % de la population totale mais constituaient 46 % de celle vivant dansune extrême pauvreté en 2003. Il est probable que l’association entre ethnie et situation géographique entraînedes écarts de revenu. La Figure 3.9 montre qu’au sein de la région de l’Ouest, il n’existe aucune différencemarquante dans les taux de pauvreté des minorités et majorités ethniques. Cette situation contraste avec lesdistributions agrégées de la pauvreté présentées dans la Figure 3.8. Les résultats des régressions confirment queles différences dans la situation géographique, la taille des ménages, l’âge et le niveau d’instruction des chefs defamille, ainsi que l’appartenance à un groupe expliquent en grande partie les écarts de pauvreté entre ethnies.

Tableau 3.13 Accès aux services publics au sein de différents groupes au Vietnam

Durée de Durée de À moins de Accès à des Accès à un déplacement déplacement 2 km d’une sources d’eau assainissementvers l’école vers le route praticable améliorées améliorésecondaire marché en tout temps (% de la (% de la inférieure (minutes) (% de la population population(minutes) population)

2006Kinhs et Chinois 12 9 91 87 43Minorités ethniques 25 32 80 55 7Vietnam 15 13 90 82 38

Source Vietnam Development Report 2008: Social Protection, rapport conjoint des donateurs présentés à laréunion du Groupe consultatif Vietnam, Hanoi, 6–7 décembre, 2007

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Minorité à l’Ouest Majorité à l’Ouest•

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Revenu par habitant (yuans)

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◆◆

Figure 3.8 Chine rurale : distribution de la pauvreté entre les minorités ethniques et la majorité de lapopulation, 2002

Figure 3.9 Région occidentale de la Chine rurale :répartition de la pauvreté entre les minorités ethniques etla majorité de la population, 2002

Source Gustafsson, B. et Sai, D. (2009) ‘Temporary and Persistent Poverty among Ethnic Minorities and the Majority inRural China’, Review of Income and Wealth, Séries 55, edition spéciale 1: 588–606

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 29

Il n’existe pas de données systématiques sur lesinégalités basées sur l’identité ou les groupes,couvrant l’ensemble de la région du Sud et duSud-Est asiatique. Nous ne pouvons doncidentifier des tendances et modèles qu’à partir des données disponibles au niveau des pays.Soulignons que les pays d’Asie se caractérisent pardes expériences très diverses et parfois contrastées.Certaines observations générales méritentcependant d’être soulignées :

l Les inégalités liées aux castes, à l’appartenanceethnique et à la religion sont évidentes dansl’enseignement et la santé. En Inde, les Dalits(caste répertoriée) et les Adivasis (triburépertoriée) ont des niveaux d’éducation plusbas. Au Népal, malgré une amélioration des tauxglobaux d’alphabétisation (23 % en 1981 et 54 % en 2001), 52 % des Dalits des collines, 47% des Dalits Tarai (des plaines), 48 % desMusulmans et 30 % des Janajatis des collinesn’ont jamais été scolarisés, contre seulement 12 % dans les castes supérieures.33 Des modèlessimilaires peuvent être observés en ce quiconcerne les taux de mortalité infantile (voir Encadré 3.4, page 27).

l Une croissance économique rapide et laréduction des niveaux de pauvreté dans la régionn’ont pas atténué les inégalités. Dans certainspays, les inégalités entre groupes sociaux sesont creusées. Cela s’explique souvent par lefait que le rythme de la réduction de lapauvreté s’est avéré plus lent dans les groupessocialement exclus. En Inde, la pauvreté resteplus marquée parmi les Dalits et les Adivasismalgré une réduction générale de la pauvreté(voir Encadré 3.3, page 26). Le Népal aenregistré un accroissement très marqué desinégalités au cours de la dernière décennie. Laréduction globale de la pauvreté entre 1995 et2003 oscille entre 46 % dans la caste supérieuredes Brahmans/Chhetris, 10 % chez les Janajatisinstallés dans les collines et 6 % chez lesMusulmans (voir Figure 3.6, page 25). AuVietnam, la prévalence de la pauvreté au seindes minorités ethniques s'est réduite enmoyenne de 2,6 % par an durant la dernièredécennie, contre 3,4 % pour la communautéchinoise majoritaire des Kinhs. En Chine, unepersonne sur trois souffrait de la pauvreté en1990, mais grâce à un taux de croissancerapide, cette proportion est descendue à unepersonne sur dix.34 Cependant, cetteamélioration s’est accompagnée d’unaccroissement des inégalités de revenu, commele montre le passage du coefficient de Gini de35,5 en 1993 à 41,5 en 2005.35

l La situation géographique renforce les inégalitésliées à l’appartenance ethnique. Les donnéesdisponibles suggèrent que la situationgéographique de certains groupes sociaux est aucœur de leur incapacité à tirer profit de lacroissance et du développement économiques(voir Encadré 3.5, page 28 sur le Vietnam et laChine). La Chine a réussi à réduire de manièresubstantielle son taux de mortalité infantile de64 pour 100 000 naissances vivantes en 1996 à48 en 200536, mais celui-ci demeure nettementplus élevé dans les provinces rurales pluspauvres de l'Ouest du pays. De même, dans larégion de l’Ouest, 87 % des décès maternelssont enregistrés au sein des groupes ethniquesminoritaires37, ce qui peut en partie s’expliquerpar le fait que les femmes de ces groupes ont un

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BumiputerasIndienChinois

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Figure 3.10 Malaisie : taux de mortalité infantile pargroupe ethnique 1970–2006

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1985 1990 1995 2000 2005 2010

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BumiputerasIndienChinoisTous •

• ••

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Figure 3.11 Malaisie : tendances du taux d’incidence de lapauvreté (HCR) par appartenance ethnique

Source Département des statistiques de la Malaisie,www.statistics.gov.my

Source http://chengfansoon.com/ au 23 Mai 2010

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30 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

accès insuffisant aux services de santé. Lerythme de la réduction de la malnutritioninfantile entre 1992 et 2005 s’est égalementavéré plus lent dans les provinces de l’Ouest dela Chine, où subsistent de fortes disparités (voir Tableau 3.9, page 25).

Situation de la MalaisieLa situation de la Malaisie contredit la tendancegénérale à l’aggravation des inégalités sur lecontinent asiatique puisque le pays a réussi àatténuer les inégalités ethniques. D’après lesdonnées nationales, la pauvreté a diminué de 78 % entre 1990 et 2007. Sur la base d’un dollarEU par jour, l'incidence de la pauvreté estactuellement d'environ 2 %. La pauvreté atoujours été plus élevée au sein de la majoritéethnique des Bumiputeras (« fils de la terre ») et même si tel est toujours le cas aujourd’hui, elle adiminué plus rapidement au sein de ce groupe(voir Figure 3.11, page 25). En conséquence, lesécarts entre les taux de pauvreté des Bumiputeras,des groupes d’origine indienne et d’originechinoise se sont atténués. Le coefficient de Gini dela Malaisie a baissé de 49 à 38 entre 1984 et 2004,tandis que la part du revenu national du quintile leplus pauvre est passée de 4,5 % en 1992 à 6,4 % en2004.La Malaisie a également réalisés des progrès

au niveau des autres indicateurs de

développement humain.38 Les taux de mortalitéinfantile ont chuté entre 1970 et 2006 danschacun des groupes ethniques et les différencesethniques se sont atténuées (voir Figure 3.10,page 29). Les taux de mortalité infantile desBumiputeras demeurent néanmoins plus élevés.

3.5 Progrès en direction des OMD en AfriquesubsaharienneL’Afrique subsaharienne enregistre les taux depauvreté les plus élevés du monde.39 Aprèsl’Amérique latine, elle est également la régioncomptant certains des pays les plus pauvres de laplanète.40 Les conflits régionaux, les séquelles del’ajustement structurel, le VIH et la pandémie deSIDA ont laissé de grands pans du continent pluspauvres que jamais, avec un taux de pauvreté parrapport à la population de 42 % pour l’ensemblede l’ASS, Afrique du Sud comprise.41 La part de lapopulation vivant dans une pauvreté extrême n’apas vraiment diminué depuis 1980, mais cetteconstatation gomme à la fois la détériorationprolongée des années 1980 et de la première moitiédes années 1990, et les améliorations observéesdepuis la fin des années 1990. Le pourcentage de lapopulation vivant dans la pauvreté a chutéd'environ 7 points entre 1996 et 2004.42

Les données agrégées par région masquent lesavancées significatives à échelle nationale.Comme mentionné précédemment, certains pays

Namibie : Ella, une blanchisseuse issue de la minorité ethnique des Hereros. Photographe : Barbara Cheney

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 31

d’ASS figurent parmi les pays ayant réalisé le plusde progrès en valeur absolue en direction desOMD. Si seul un pays figure parmi les 10 paysayant réalisé le plus de progrès en valeur relativepar rapport aux OMD au niveau mondial, six pays font partie des 10 premiers en termes de progrès absolus d’ensemble, ce qui s’esttraduit par de réels changements dans la vie demillions d’individus.La région affiche également les taux de mortalité

infantile les plus élevés au monde, en particulier enAfrique occidentale et centrale.43 Au sein de larégion, même si les taux de réduction ne diminuentpas suffisamment vite pour permettre d’atteindreles OMD d’ici 2015,44 celui de la période 2000 à2010 s’est amélioré par rapport à la période 1990 à 2000.45 La région possède également les ratios demortalité maternelle les plus élevés au monde, à savoir plus de la moitié des décès maternelsmondiaux. Nous ne disposons pas de suffisammentde données pour mesurer les progrès relatifs à cet indicateur.46

3.6 Exclusion sociale et OMD en Afriquesubsaharienne« La pauvreté massive et l’inégalité obscènesont les plaies de notre époque – une époqueoù le monde s'enorgueillit des formidablesavancées réalisées dans les sciences, latechnologie, l’industrie et l’accumulation derichesses. Au même titre que l'esclavage etl'apartheid, elles doivent être classées parmiles fléaux sociaux. » (Nelson Mandela,discours « Make Poverty History », TrafalgarSquare, Londres, 2005)

À l’exception notable de l’Afrique du Sud, les données sur la relation entre l’identitéethnique et la pauvreté en Afrique ne sont passystématiquement disponibles et sont rarementmises à jour. Dans certains pays, la région ou lasituation géographique sont utilisées comme desvariables de remplacement pour l’appartenanceethnique. Une certaine prudence est donc requiseau cours des débats sur les inégalités existantentre les groupes. Les données disponibles pourcertains pays suggèrent néanmoins que :

l L’appartenance ethnique a un effet sur lapauvreté, l’état de santé et les résultatsscolaires. Une étude menée dans les années1990 à partir de données de 11 pays d’ASS aconfirmé que les inégalités ethniques persistent,voire s’accentuent, au niveau de la mortalitéinfantile (voir Encadré 3.8, page 34).47 D'autresétudes ont révélé que l’ethnicité est liée à l’étatde santé et aux résultats scolaires dans uncertain nombre de contextes africains. Au

Kenya, les groupes ethniques moins dominants sontnettement en retard au niveau de la vaccinationet l’ethnicité stratifie radicalement les taux demortalité des moins de cinq ans. Parmi lesgroupes ethniques Mijikenda/Swahili parexemple, 27 % des accouchements sont réaliséspar du personnel soignant qualifié contre 71 %pour les Kikuyu.48 Au Nigéria, les taux demortalité infantile sont moins élevés chez lesIgbos et Yorubas. Cela peut être le résultat desniveaux d'études plus élevés des femmesyorubas et igbos, mais cela peut égalementindiquer que ces groupes puissants ont unaccès privilégié aux soins de santé, ou refléterdes pratiques culturelles et des croyances enmatière de santé infantile et maternelledifférentes au sein des groupes ethniques.49

l Les inégalités spatiales entre les régionsdéveloppées et moins développées au sein despays sont fondamentales pour les disparitésentre groupes sociaux et les renforcent. Lesdonnées se concentrent souvent sur lesdifférences régionales, qui chevauchentfréquemment les identités ethniques etreligieuses. Au Nigéria, les états du Nordmajoritairement peuplés de Hausa-Foulani ontdes niveaux de pauvreté plus élevés que lesétats du Sud, principalement habités par lesYorubas et Igbos (voir Tableau 3.19, page 34).Les taux de mortalité infantile sont aussiconsidérablement plus élevés dans les régionsdu Nord (voir Tableau 3.14, page 32)50 et lestaux de mortalité maternelle sont environ dixfois plus élevés dans le Nord que dans le Sudreflètent largement les différences d’accès auxsoins de santé : par exemple, dans le Nord-Ouest, seuls 25 % des femmes enceintes vonten clinique contre 85 % dans le Sud-Est.51 Àcause de l’interaction entre l’appartenanceethnique, le genre et la situation géographique, les femmes Hausa des ménages ruraux pauvresont les plus bas niveaux d’études. Au Ghana, la situation du Nord a toujours été plus difficileque celle du Sud. Le Tableau 3.15 montre qu’en1999, le taux de pauvreté dans l’extrême estétait environ trois fois plus élevé que dans larégion Ashanti, près de 17 fois plus élevé quedans le Grand Accra et deux fois supérieur à lamoyenne nationale. Les régions du Nordaffichaient également de très faibles tauxd’alphabétisation, de scolarisation au primaire,d’accès à l’électricité et aux soins de santé. Au Kenya, les régions du Nord-Est abritant lescommunautés Somali et Swahili(principalement pastorales) connaissent destaux de chômage beaucoup plus élevés que les

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32 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

autres provinces. Et alors que presque tous lesenfants de la province centrale vont à l’écoleprimaire, seul un enfant sur trois est scolarisédans la province du Nord-Est. Les tauxd’alphabétisation en Éthiopie varientconsidérablement d’une région à l’autre : dans les zones rurales, c’est le Tigray qui adéclaré posséder le taux d’alphabétisation leplus élevé (36 %) contre seulement 8 % dans larégion Somali.53

l Les conflits interethniques et régionauxpeuvent être alimentés et exacerbés par lesinégalités socioéconomiques. Lorsque desinégalités dans la richesse, l’accès aux servicesou le pouvoir politique coïncident avec desdifférentes entre groupes, l’appartenanceethnique peut devenir un vecteur demobilisation parfois violente des groupesdéfavorisés.54 En Côte d’Ivoire, la guerre civile,en partie alimentée par la marginalisationculturelle et politique des populations duNord majoritairement musulmanes, a conduità une forte chute de la croissance économiqueet à une aggravation des niveaux de pauvreté.La division Nord-Sud est amenée às'accentuer, en particulier depuis quel'éducation et les services de santé publiquesne sont plus fournis dans le Nord contrôlé par les rebelles.55 La question de l’exclusion et des conflits est traitée plus en détails dans la Section 4.5.

En général Urbains Ruraux Nord-Est Nord-Ouest Sud-Est Sud-Ouest Central

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En général Urbains Ruraux Nord Est Nord Ouest Sud Est Sud Ouest Central

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Figure 3.12 Prévalence de la malnutrition infantile par lieude résidence, Nigéria

Tableau 3.14 Nigéria : taux de mortalité juvénile par lieude résidence

Zone Mortalité juvénile

Centre Nord 62Nord-Est 126Nord-Ouest 139Sud-Est 64Sud-Sud 58Sud-Ouest 32

Estimations du nombre de décès pour 1 000 enfants de 12 à 59 mois. Source National Population Commission (NPC) [Nigeria]et ICF Macro (2009) Nigeria Demographic and Health Survey2008, Abuja, Nigeria: National Population Commission and ICF Macro

Tableau 3.15 Indicateurs socio-économiques pourquelques régions du Ghana (%)

Incidence de Alphabétisation : Accès aux la pauvreté % d’alphabétisés services de (1999) (1998) santé (1997)

Grand Accra 5 76 78Ashanti 28 64 43Nord 69 13 18Nord-Ouest 84 20 8Nord-Est 88 20 20National 40 51 37

Source Adapté de Langer et coll. (2007)51

Source Omilola, B. (2010) ‘Patterns and Trends of Child andMaternal Nutrition Inequalities in Nigeria’, IFPRI DiscussionPaper 00968

Encadré 3.6 L’imbrication des inégalités spatiales,ethniques et religieuses au Ghana et au Nigéria

L’importance de l’indigénisme dans la Fédération duNigéria, qui valorise le secteur public et les droitsciviques, a dissuadé les migrations internes dans lamesure où moins de 5 % des personnes issues desgroupes ethniques concentrés dans le Nord vivent dansle Sud. Les clivages ethniques et religieux tendent parconséquent à coïncider et à renforcer les divisionsgéographiques. Au Nigéria, la population des régionsmoins développées du Nord est majoritairementmusulmane et issue du groupe ethnique Hausa-Foulani.La population des régions plus riches du Sud est enlargement chrétienne, les Yorubas et Igbos étant lesprincipaux groupes ethniques.

Contrairement au Nigéria, le Ghana a des taux demigration interne élevés, qui ont entraîné un brassageimportant des groupes ethniques : 35 % des ethniesghanéennes du Nord vivent dans le Sud. Enconséquence, les données 2008 sur la répartition desrichesses indiquent un schéma d’inégalité beaucoupplus spatial qu’ethnique.

Source : Mancini (2009)49

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 33

Encadré 3.7 Situation de l’Afrique du Sud

L’Afrique du Sud constitue un cas extrême d’inégalités imbriquées en raison de son « passé tristement célèbred’inégalité, marqué par une empreinte raciale dominatrice ».58 Ironiquement, celui-ci explique pourquoi ce payspossède les données les plus détaillées de la région en matière d'inégalités imbriquées. La détermination dugouvernement postapartheid à suivre les progrès dans la lutte contre les inégalités permet de bénéficier dedonnées tenues à jour.

Le pays est en bonne voie d’atteindre tous les OMD et en a déjà accompli certains.59 En même temps, desinégalités profondément enracinées subsistent. Si la pauvreté a chuté durant la période postapartheid, elledemeure néanmoins élevée au sein des populations africaines et de couleur. L’inégalité des revenus, qui étaitdéjà substantielle, semble s'être creusée encore davantage, passant d'un ratio d'environ 66 en 1993 à 70 en2008.60 La majeure partie de la population africaine était, et demeure, au bas de la hiérarchie des revenus. Enfait, sa position s’est légèrement dégradée : les revenus des Africains représentaient 13,0 % de ceux des Blancsen 2008 contre 15,9 % en 1995.

L’impact du genre et de la race sur la pauvreté est illustré par les données de 1993, 2000 et 2008 (Tableau3.16). Alors que pour chacune de ces années, l’incidence et la part de la pauvreté étaient plus élevées parmi lesAfricains qu’au sein du reste de la population, tant l’incidence que la part de la pauvreté étaientsystématiquement plus élevées chez les femmes que les hommes africains. Un schéma similaire s’applique à lapopulation de couleur, quoique les écarts soient moins prononcés.

L’égalité des chances dans l’éducation est devenue un objectif majeur du gouvernement postapartheid et, en2006, plus de 98 % des enfants étaient scolarisés au primaire, une augmentation de 1 % par rapport à 2002.Cependant, les différences raciales persistent : par exemple, 86 % des élèves blancs de neuvième année en2002 avaient atteint la terminale (douzième année) en 2005, contre seulement 29 % des élèves africains et 42 %des élèves de couleur.61

Les taux de mortalité infantile et des enfants de moins de cinq ans sont passés de respectivement 45,4 à42,6 décès pour 1 000 naissances vivantes et de 59,4 à 57,6 % entre 1998 et 2003.62 Mais le risque de mortalitéinfantile est quatre fois plus élevé parmi les enfants africains que parmi les blancs, même après en tenantcompte des facteurs démographiques tels que l’âge de la mère et le rythme et le nombre des grossesses.63 Unediminution des taux de mortalité maternelle a également été observé entre 1998 et 2002, de 150 à 124 décèspour 100 000 naissances vivantes, même si ces chiffres restent élevés pour un pays à revenu intermédiaire telque l'Afrique du Sud.64

Tableau 3.16 Afrique du Sud : niveau individuel de pauvreté par race et genre (seuil de pauvreté R515 par habitant et par mois)

Population Incidence Part de la pauvreté1993 2000 2008 1993 2000 2008 1993 2000 2008

Femme africaine 0,40 0,41 0,42 0,72 0,66 0,68 0,51 0,50 0,52Homme africain 0,36 0,38 0,38 0,66 0,61 0,60 0,42 0,43 0,41Femme de couleur 0,04 0,05 0,05 0,32 0,32 0,36 0,02 0,03 0,03Homme de couleur 0,04 0,04 0,04 0,29 0,30 0,35 0,02 0,02 0,03Femme indienne/asiatique 0,01 0,01 0,01 0,12 0,11 0,11 0,00 0,00 0,00Homme indien/asiatique 0,01 0,01 0,01 0,12 0,09 0,19 0,00 0,00 0,00Femme blanche 0,06 0,05 0,05 0,05 0,06 0,04 0,01 0,01 0,00Homme blanc 0,06 0,05 0,04 0,06 0,08 0,03 0,01 0,01 0,00

Source Leibbrandt et coll. (2010)58

Tableau 3.17 Estimations du revenu annuel personnel par habitant, par groupe racial en 2000

Année Blancs Personnes Asiatiques Africains Moyennede couleur

Revenu par habitant en rands constants de 2000 :1917 13 069 2 875 2 894 1 184 3 9461936 19 212 3 000 4 443 1 462 5 3591956 30 494 5 158 6 668 2 627 8 5411975 49 877 9 688 12 687 4 289 12 6961995 48 387 9 668 23 424 6 525 12 5722000 56 179 12 911 23 025 8 926 16 2202008 75 297 16 567 51 457 9 790 17 475

Source Leibbrandt et coll. (2010)58

Tableau 3.18 Revenus personnels relatifs par habitant,par groupe racial (% du niveau des Blancs)

Année Blancs Personnes Asiatiques Africains Moyennede couleur

Revenus personnels relatifs par habitant (% du niveaudes Blancs):1917 100 22,0 22,1 9,1 30,21936 100 15,6 23,1 7,6 27,91956 100 16,9 21,9 8,6 28,01975 100 19,4 25,4 8,6 25,51995 100 20,0 48,4 13,5 26,02000 100 23,0 41,0 15,9 28,92008 100 22,0 60,0 13,0 23,2

Source Leibbrandt et coll. (2010)58

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Encadré 3.8 Inégalités ethniques dans la mortalitéinfantile en Afrique

Une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)utilisant des données d’enquêtes réalisées dans 11 paysd’Afrique (Côte d’Ivoire, Ghana, Kenya, Mali, Namibie,Niger, Ouganda, République centrafricaine, Rwanda,Sénégal et Zambie) a révélé que l’inégalité ethnique dans la mortalité infantile s’est accentuée en Afriquesubsaharienne au cours des années 1980 et 1990. À l’époque, le risque de mortalité des enfants des femmesashanti du Ghana était 20 % moins élevé que celui desautres enfants ghanéens. Au Niger, dont les niveaux demortalité infantile étaient les plus élevés du monde, letaux de mortalité des enfants de moins de cinq ans étaiten 1990, de 242 décès pour 1 000 à Djerma, contre 353dans le reste du pays. Une série d’autres inégalitéssocioéconomiques entre groupes ethniques a égalementété identifiée. Dans la plupart des pays, il existe de fortesdisparités entre groupes ethniques au niveau de lascolarisation. Au Ghana et en Ouganda, 84 % des femmesashanti et 95 % des femmes bagandas ont reçu une

certaine éducation, contre 60 % des autres femmes. Le lieu de résidence et les différences d’utilisation desservices de santé infantile semblent liés aux inégalités enmatière de mortalité infantile, et sont particulièrementmarquées entre les différents groupes ethniques en ce quiconcerne la vaccination. Ceci indique que, en plus despolitiques de réduction des disparités économiques entreles groupes ethniques, « les efforts en faveur de la surviedes enfants dans les pays d’Afrique devraient porter uneattention toute particulière aux groupes ethniquesdéfavorisés et aux zones dans lesquelles ils sontconcentrés ».56 Les données disponibles ne nouspermettent pas de déterminer si les efforts de la dernièredécennie ont réduit les inégalités ; cependant, laconclusion de l’étude est reprise dans un récent bulletin del’OMS qui souligne que, dans de nombreux cas, « les différences ethniques, éducatives et régionalesétaient plus prononcées que les disparités dans lesniveaux de richesse ».57

Source : Brockerhoff et Hewett (2000)47

Tableau 3.19 Nigéria : États ayant les parts de pauvreté les plus élevées et les plus faibles en 2006

10 États ayant l’incidence de la pauvreté la 10 États ayant l’incidence de la pauvreté plus élevée la plus faible

État Position géographique % État Position géographique %

Jigawa Nord 95,0 Bayelsa Sud 20,0Kebbi Nord-Ouest 89,7 Anambra Sud-ouest 20,1Kogi Centre 88,6 Abia Sud 22,3Bauchi Nord 86,3 Oyo Sud-ouest 24,1Kwara Ouest 85,2 Imo Sud 27,4Yobe Nord-Est 83,3 Rivers Sud 29,1Zamfara Nord-Ouest 80,9 Enugu Sud 31,1Gombe Nord-Est 77,0 Ogun Sud-ouest 31,7Sokoto Nord-Ouest 76,8 Osun Sud-ouest 32,4Adamawa Est 71,1 Edo Sud 33,1

Source Adapted from Langer et al. (2007)51

34 Inégalités imbriquées et OMD : la situation régionale

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De la discussion qui précède, deuxremarques générales peuvent être faitessur la relation entre les progrès en

directions des OMD et la justice sociale.Premièrement, les inégalités imbriquées et serenforçant mutuellement qui mènent àl’exclusion sociale sont profondément enracinéesdans l’histoire et les pratiques quotidiennes dessociétés, ce qui les rend remarquablementrésistantes au changement. Deuxièmement,malgré cette intransigeance apparente, ces inégalités ne sont en fait pas immuables. Le

changement est évident dans toutes les régions,même s’il est plus rapide dans certains contextesque dans d’autres, et plus directement lié àcertains OMD qu’à d’autres. Il devrait atténuertout pessimisme à l'égard des progrès futurs.

4.1 La dynamique culturelle de l’exclusion Les processus de dévalorisation culturelle sont lesmécanismes clés à travers lesquels l’exclusion socialese perpétue. Si les effets de l’exclusion peuventêtre silencieux et invisibles, ils n’en ont pas moinsun impact profond sur ceux qui la subissent. Ilspeuvent aussi être visibles et bruyants, avec desretombées négatives sur l’ensemble de la société.

La dévalorisation culturelle est parfois inscritedans la loi (voir Encadré 4.1, page 35 sur leNépal). Cependant, si des protections légales sontimportantes pour lutter contre l’exclusion sociale,elles ne suffisent généralement pas. LaConstitution indienne (1949), par exemple,reconnaît le besoin de contrer le désavantagehistorique dont souffrent les Dalits et les Adivasis. Néanmoins, les pratiques quotidiennesde discrimination continuent à saper la dignité et à restreindre le comportement de ces groupes exclus.

Au Népal, une tentative récente visant àmesurer à travers une série d’indicateurs,l’étendue de l’autonomisation et de l’inclusiondes différents groupes sociaux a montré que lescastes supérieures obtenaient des scores deux foisplus élevés que les Dalits en matière deconnaissances des droits et procédures, de confiance dans l’accès aux services, d’exercicedes droits, de réseaux sociaux et d’influencepolitique locale. Alors que 90 % des groupes descastes supérieures n’avaient jamais été confrontésà aucune restriction ou intimidation (les 10 %faisant exception étaient des femmes), 100 % desrépondants dalits avaient connu un certain degréde restriction d’accès aux espaces publics et 20 %déclaraient avoir été victimes de harcèlement,d’intimidation et de restrictions. De plus, lesfemmes des castes supérieures obtenaient demeilleurs scores que celles des groupes de Dalitset Janajatis. Sans surprise, les castes supérieuresobtenaient un score nettement plus élevé (46)pour l’indice composite formé à partir de cesindicateurs, que celui des Janajatis (36) et des

BrahmanesChhetri

Caste supérieure des Newars Tagadharis « Nés deux fois »

Matwalis « buveurs d'alcool » Ne peuvent être réduits en esclavage

Peuvent être réduits en esclavage

Pani Na Chaine ‘intouchables (eau)’Musulmans et étrangers

Acchuts « intouchable »

« Caste inférieure »

Janajatis hors caste/peuples autochtones

« Caste supérieure »

« Pure »

« Impures »

Dalits

Figure 4.1 La pyramide des castes du Népal selon le Muluki Ainde 1854

La partie du triangle montrant les différents groupes nereprésente pas la taille de la population. Les points rougesfoncés montrent les groupes de la caste hindoue.Source Banque mondiale/DfID (2006) Unequal Citizens: Gender,Caste and Ethnic Exclusion in Népal

La dynamique d’imbrication des inégalités : les raisons de la persistancede l’exclusion sociale

4

Encadré 4.1 Le système des castes au Népal

Au Népal, le Muluki Ain de 1854 (Code du pays) a officialisédans la loi le système des castes, octroyant aux différentsgroupes sociaux des privilèges et obligations différents selonleur position dans la hiérarchie des castes. Les caractéristiquesassociées à chaque groupe marquaient le respect – oul’absence de respect – accordé par la société. Les « purs »Brahmanes/ Chhetris occupaient le sommet de la pyramide descastes, juste au-dessus des Janajatis (populations autochtones),suivis par la caste inférieure des « impurs » Pani Na Chaine, ettout au bas de la pyramide, par les Dalits (intouchables).

La nouvelle constitution du Népal (1990) déclare tous lescitoyens égaux « quels que soient leur religion, race, genre,caste ou idéologie ». Mais les inégalités héritées continuentd’affecter la vie et les opportunités des groupes situés tout aubas de la hiérarchie.

Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 35

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36 La dynamique d’imbrication des inégalités : les raisons de la persistance de l’exclusion sociale

Dalits (25). La combinaison de la caste et dugenre plaçait les femmes dalits au bas de lahiérarchie sociale (Figure 4.2).

La caste et l’identité ethnique introduisaientune variation de 33 % dans les scores, et le sexeune variation de 7 %. Les décideurs politiquesseront particulièrement intéressés par le fait quedix ans d’éducation entraînaient uneaugmentation de 19 % des scores etl’appartenance à une association dedéveloppement local 5 %. Les autres facteurspositifs comprenaient les contacts avec un bureaulocal de développement des femmes, l’occupationd’un poste dans une association, et l’expositionaux médias.

Le « latinobaromètre » réalise des enquêtesrégulières dans 17 pays d'Amérique latine. Lecycle d’enquêtes de 2000 demandait quels étaientles groupes le plus discriminés au sein du paysdu répondant. La plupart des réponsespointaient trois groupes : les descendantsd’Africains, les populations autochtones et les «pauvres ». Les répondants des pays avec uneforte proportion de descendants d'Africains etd’autochtones – la Bolivie, le Brésil, l’Équateur, leGuatemala et le Panama – citaient généralementl’un de ces trois groupes. En Argentine et enUruguay, des pays où la composition ethniqueest plus homogène, les pauvres étaient perçuscomme le groupe le plus discriminé. Ce quenous apprennent ces réponses c’est que ceux quicroyaient que les groupes ethniques étaient lesplus discriminés, pensaient aussi que cettediscrimination s’exerçait dans tous les domainesde la vie quotidienne : au travail, à l’école, ausein des partis politiques et du système judiciaire(police et tribunaux).66

Dans certains pays, on peut observer lerenforcement mutuel largement documenté del’exclusion sociale et des addictions toxiques.Ainsi au Sri Lanka, les options limitées de progrèsdans la vie étaient données comme explication auniveau élevé d’alcoolisme des ouvriers desplantations majoritairement tamouls, une desconséquences « silencieuses » de l’exclusion.Celui-ci était à son tour considéré par lacommunauté ouvrière comme l’une des causesprincipales de la pauvreté, de l’endettement et dela stigmatisation sociale. En Afrique du Sud, lestaux d’alcoolisme et de toxicomanie plus élevésde la population de couleur (hommes et femmesconfondus) suggèrent que l'exclusion n’est pasvécue de la même manière par tous.67 Le rapportde 2003 sur les enquêtes démographiques et desanté (EDS) constatait que 9,1 % des adolescentesde couleur avaient rapporté des niveauxd’alcoolisme préoccupants durant les 12 derniers

mois, contre seulement 1,1 % des adolescentesnoires africaines. Le Cap-Occidental était signalépour son taux de syndrome d’alcoolisme fœtalparmi les plus élevés au monde. Cet alcoolismecontribue à expliquer les taux plus élevés demortalité infantile et juvénile de la population de couleur signalés dans le dernier rapport sur les EDS.68

Les inégalités imbriquées sont égalementsouvent associées à des taux plus élevés decriminalité et de violence liée à la drogue (voir Encadré 4.3, page 37). On estime que dansles villes colombiennes, les crimes avaient uneplus grande probabilité d’être le fait de personnesappartenant à des ménages ayant un revenu parpersonne inférieur à 80 % de la moyennenationale. Des enquêtes réalisées dans les villesd’Afrique du Sud montrent que ces schémas decriminalité varient en fonction de la classe socialeet de la race. Les quintiles les plus riches se disaitplus exposés à des crimes sans violence, alors quela population la plus pauvre et majoritairementnoire des bidonvilles et villages informels étaitplus souvent victime de crimes violents.69

La violence collective, les émeutes et la guerrecivile sont certaines des conséquences les plus

Les processus de dévalorisation culturelle sontles mécanismes clés à travers lesquelsl’exclusion sociale se perpétue

Figure 4.2 Népal : indice composite d’autonomisation etd’inclusion par genre/caste/appartenance ethnique

Source Bennett, L. et al. (2006) ‘Negotiating Social Change:Gender Caste and Ethnic Dimensions of Empowerment andSocial Inclusion in Rural Népal’, in R. Alsop, M. Bertelsen et J.Holland (eds), Empowerment in Practice: From Analysis toImplementation, Washington D.C. : Banque mondiale

Tous les groupes

Janajatis

Dalits

Tarais castesmoyennes

BCN

0.0 0.1 0.2 0.3Indice

0.4 0.5

◆ Hommes ◆ Femmes

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 37

extrêmes de l’exclusion sociale. Des études sur lesconflits menées dans différentes régions du globementionnent l’importance récurrente desdésavantages fondés sur les groupes en tant quefacteur déterminant.70 L’exclusion sociale nemène pas forcément à des conflits mais elleaugmente leurs chances de se produire. Unrapport des pouvoirs publics indiens sur larébellion naxalite, qui depuis de longues annéesaffecte 125 districts répartis sur 12 états, a mis enévidence que la majeure partie des sympathisantsdu mouvement appartiennent aux castes et tribusrépertoriées. Il a également révélé que si denombreux districts à forte concentration deDalits et Adivasis n’affichaient aucune présencenaxalite, les régions sous influence naxalitecomptaient généralement un pourcentage deDalits et Adivasis plus élevé que la moyenne. Laquestion de l’exclusion et des conflits sociaux estanalysée plus en détail dans la Section 4.5.

4.2 La dynamique économique de l’exclusion :l’inégalité des biensLa pauvreté des groupes socialement exclus estfréquemment le produit de pratiques et normesculturelles. Dans certains cas, les groupes exclus nesont pas autorisés à posséder ou à acquérir desterres, simplement à cause de qui ils sont. Cela alongtemps été le cas de la caste des « intouchables»en Inde et au Népal, et même aujourd’hui, lamajeure partie des individus appartenant à cescastes ne possèdent pas de terres.

Dans d’autres cas, l’appartenance ethniquedétermine la taille et la qualité des terres que lesindividus possèdent. Au Pérou et en Équateur parexemple, les terres détenues par les groupesautochtones étaient deux à huit fois plus petitesque celles des groupes non autochtones.71 Seuls13 % des terres irriguées de l’Équateurappartenaient à des exploitants agricolesautochtones. Au Vietnam, les minorités ethniquesdépendent fortement de l'agriculture et la plupartpossèdent quelques terres. Cependant, celles-cisont en pente et ne produisent qu’une récolte paran. La majorité Kinh a plus de chances deposséder des terres irriguées permettant descultures vivaces.

Les populations autochtones ont plus dechances d’être dépossédées de leurs terres, étantdonné que leurs systèmes fonciers coutumiers nesont pas forcément reconnus par la loi. La non-reconnaissance de leurs accords foncierscoutumiers a fortement contribué àl’appauvrissement des habitants des forêts et deshauts plateaux.72 En plus de leurs pouvoirsadministratifs, les départements des forêts onttraditionnellement détenus les pouvoirs de policeet judiciaires leur permettant d’imposer uncontrôle strict de l’État sur les terrains forestiers.Les habitants des forêts se sont en conséquencevu traiter comme des criminels ou des occupantsillégaux sur leurs propres terres. Dans certainspays, tels que la Thaïlande, les habitants desforêts ne sont pas reconnus comme des citoyens àpart entière.73

Dans certains pays, les populationsautochtones ont été dépossédées ou déplacées parde grandes entreprises minières, l’expansion desexploitations agricoles ou des projetsd’infrastructure dont elles ne pouvaient espéreraucun avantage.74

La plus grande pauvreté des groupes excluspeut ne pas être due seulement au fait deposséder moins de biens mais aussi aux plusfaibles rendements que ces avoirs. Une étudemenée en Inde 75 a analysé les taux de pauvretédes castes répertoriées, tribus répertoriées etautres, et a conclu que la moitié des différences

Encadré 4.3 Exclusion sociale et crimes violents : la viedans les favelas brésiliennes

Des études menées en 1969 et 2992 au sein des mêmes favelas (bidonvilles) de Rio de Janeiro ont montré qu'en 1969, ce que la population craignait le plus, c’était uneréinstallation forcée imposée par les services du logement dela dictature militaire. En 2002, leur pire crainte était de perdrela vie au cours de tirs croisés entre la police et les revendeursde drogue ou les bandes.

En 1969, 16 % des personnes interrogées déclaraientque le crime et la violence étaient ce qu'ils détestaient leplus dans la vie en ville ; en 2002, elles étaient 60 %. Mêmesi la population des favelas était et reste multiraciale, lesNoirs ont beaucoup moins de chances de les quitter : 50 %des Noirs interrogés en 1969 y vivaient encore en 2002,contre juste un tiers des Blancs.

Source : Perlman, J.E. (2004) « Marginality: From Myth toReality in the favelas of Rio de Janeiro, 1969–2002 », in A.Roy et N. AlSayyad (eds), Urban Informality: TransnationalPerspectives from the Middle East, Latin America, and SouthAsia, Lanham, MD: Lexington Book

Encadré 4.2 Raisons de la persistance de l’exclusionsociale : l’intériorisation des inégalités

Une expérience parlante menée en Inde a montré qu’à untest où un puzzle devait être réalisé contre paiement, lesenfants dalits scolarisés obtenaient des résultats similairesà ceux des autres castes lorsque les identités de castesétaient dissimulées. Leurs résultats étaient moins bonslorsque leur caste était révélée et l’étaient encore moinslorsque les enfants participant au jeu étaient séparés encastes.65 Si tant est qu’une telle constatation puisse êtregénéralisée, elle suggère que l’ « intériorisation » d’uneinfériorité imposée a un effet puissant sur la capacité desgroupes exclus à répondre aux opportunités économiques.

Source : Hoff et Pandey (2004)65

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38 La dynamique d’imbrication des inégalités : les raisons de la persistance de l’exclusion sociale

était attribuable à des caractéristiques desgroupes telles que l'éducation, la profession, la démographie et la situation géographique. Le reste pouvait être attribué aux effets de cescaractéristiques sur la probabilité de vivre dans lapauvreté. Une autre étude soulignait l’importance

de la situation géographique et de l’éducationdans la différentiation des rendements enfonction de l’identité ethnique, alors que, en cequi concerne les castes, c’était majoritairement lesécarts de rendements liés à l’éducation quisemblaient les plus importants.76

Figure 4.3 Brésil : Niveaux de rémunération par genre, groupe ethnique et nombre d’années d’études, 1992 et 2002

Source Machinea J.L.; Bárcena, A. et León, A. (2005) The Millennium Development Goals: A Latin American andCaribbean Perspective, Santiago du Chili : Nations Unies

Soudan, près de Gereida, Sud-Darfour : une famille nomade voyageant à dos de chameau. Onze mois plus tôt, leur village de Kulaykili a été attaqué et détruit par les milices janjawids. La population noire, majoritairement des exploitants agricoles,se sont enfuis et des nomades d’origine arabe s’y sont installés. Photographe : Sven Torfinn/Panos Pictures

500

0

1,000

1,500

2,000

2,500

3,000

3,500

0 à 3 4 à 7 8 à 10 11 à 14 15 à plus 0 à 3 4 à 7 8 à 10 11 à 14 15 à plus

Femmes blanches Femmes noires Hommes blancs Hommes noirs

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 39

4.3 La dynamique économique de l’exclusion :des moyens de subsistance désavantagés La nature des moyens de subsistance peutégalement être un facteur d’exclusion sociale et unebarrière à la réduction de l’extrême pauvreté. Dansde nombreuses régions du globe, des groupesautochtones conservent un mode de vie nomadeou semi-nomade considéré comme « inférieur »par le reste de la société. En Thaïlande par exemplela dépendance des Hmongs, Akhas, Lahus et Lisusvis-à-vis de l’agriculture itinérante dans les zonesforestières des hauts plateaux est perçue comme lapreuve d’un mode de vie « non civilisé » parrapport à la riziculture inondée sédentairepratiquée par les habitants des plaines. En Afriquede l’Est et dans la Corne de l’Afrique, les activitéspastorales de certains groupes ethniques ontlongtemps été la base de leur exclusion desprincipaux efforts de développement.

Dans d’autres cas, l’exclusion sociale estassociée à une affectation culturelle des emplois lesmoins rémunérés et les plus humiliants auxgroupes exclus. Le système hindou des castes del’Inde et du Népal assigne aux castes inférieures leramassage des matières de vidange et des ordures,le balayage, et d’autres emplois considérés commehumiliants, dégradants et sales.

Femmes et enfants autochtones colombiens réunis pour parler des questions de sécurité alimentaire, nutrition et santéau sein de leur communauté. Photographe : David Parra

Encadré 4.4 Le système Kamaiya au Népal

Le système Kamaiya est un système agricole de servitude pourdettes pratiqué dans les basses terres de l’Ouest du Népal. Ilconcerne presque exclusivement les Tharus, un groupeethnique appartenant à une caste inférieure. Un Kamaiyas’engage lui-même ainsi que sa famille à cultiver les terres d’unpropriétaire en échange d’un paiement annuel. Même si, enprincipe, le système est fondé sur un contrat volontaire, dans laréalité, le Kamaiya est souvent très dépendant du propriétaireterrien. Il vit dans une hutte sur les terres de celui-ci, quidevient ainsi de fait le propriétaire de son logement. Les dettesse transmettant de père en fils, certaines familles de Kamaiyasrestent liées à leur créancier pendant des générations. Ce quidifférencie ce système d'autres servitudes pour dettes, c’est lefait que si à la fin de la période contractuelle, le Kamaiya estdans l’incapacité de rembourser sa dette, le propriétaire peut lecéder à un autre propriétaire contre le remboursement de sadette. Cette transaction commerciale s’apparente à un systèmed’esclavage. Des études ont estimé qu’il existait quelque 15000 familles de Kamaiyas, dont 46 % sans-logis. En dehors desadultes, environ 13 000 enfants travaillaient sous ce régime. Le Népal a aboli le système Kamaiya en 2000, mais des milliersd’anciens travailleurs asservis pour dette vivent encore au jourle jour, sans moyens de subsistance pour eux et leurs familles.

Voir « Bonded Labour In Nepal », The South Asian, 18 avril 2005,en ligne depuis le 4 août 2010 surwww.thesouthasian.org/blog/archives/2005/bonded_labour_in_nepal.html

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40 La dynamique d’imbrication des inégalités : les raisons de la persistance de l’exclusion sociale

Plus généralement, une combinaison dediscrimination et de faible niveau d'études confineles groupes socialement exclus dans des emploismal rémunérés, soumis à des conditions de travailfondées sur l'exploitation des individus. AuVietnam, par exemple, les immigrants issus desminorités ethniques gagnent deux fois moins queles membres de la majorité Kinh, et ils ontbeaucoup moins de chances de signer un contrat detravail ou de bénéficier d'un soutien lors de larecherche d'un emploi. Au Pérou, les travailleursblancs ont plus de probabilités d’appartenir auxquintiles de rémunération horaire supérieur que lestravailleurs autochtones, et également d’occuper despostes de professionnels, techniciens et cadres. EnAfrique du Sud et au Brésil, les descendantsd’Africains et les populations autochtones ont lesplus hauts niveaux d’emploi informel. De plus, ausein de chaque catégorie professionnelle, les taux derémunération horaire sont les plus élevés chez lestravailleurs blancs et les moins élevés chez lestravailleurs noirs.78

L’interaction entre le genre et les inégalitésethniques cantonnent généralement les femmesdes minorités ethniques au bas de la hiérarchiedes revenus. Ainsi par exemple, les femmesautochtones et de descendance africaine enBolivie, au Brésil, au Guatemala et au Pérou ontplus de chances de toucher un salairecorrespondant au seuil de pauvreté (1 dollar EUde l’heure, ajusté à la parité de pouvoir d’achat)que les hommes de leur groupe ethnique ou queles hommes et femmes du reste de la population.Au Brésil, ce sont les femmes de descendance

africaine qui gagnent le moins, et les hommesblancs qui gagnent le plus, quel que soit leurniveau d’études (Figure 4.3).

Le manque d’accès aux services financiers oul’imposition de conditions usuraires constitueune contrainte majeure pour les groupes pauvreset exclus du monde entier. En Inde, au Pakistanet au Népal, la prévalence de la servitude pourdettes est représentatif des conditionsdéfavorables auxquelles ces groupes obtiennentdes prêts (voir Encadré 4.4, page 39 sur lesystème Kamaiya au Népal). Les castes inférieureset les groupes ethniques minoritaires sont écartésdu crédit de manière disproportionnée. De tellesformes d’endettement sont des mécanismes detransmission de la pauvreté entre les générations,étant donné que les enfants des travailleursasservis pour dettes le deviennent souvent eux-mêmes.79

En Amérique latine, seule une petite fractiondes ménages autochtones a accès au crédit formel

Moyenne par pays

Groupe de pasteurs

0 20 40 60 80 100

57

26

17 85

929

51

853960 88

53 96

94

68

91

80

7143

17

7

33

0 20 40 60 80 100

40

35

17 78

629

51

8361

60 90

42 8787

79

84

535041

30

9

38

Privation extrême d’éducation : population de17 à 22 ans ayant moins de 2 années d’études (%)

% non scolarisé à l’école primaire

Éthiopie:Afars et apparentés

mf

mf

mf

mf

mf

Kenya:Somalie

Ouganda: Karamojongs

Bénin:Peuls et apparentés

Nigéria:Foulanis

Sénégal:Poulars

Figure 4.4 Privation extrême d’éducation chez les pasteurs Pourcentage de la population âgée de 17 à 22 ans ayant moins de deux années d’études, et pourcentagedes enfants en âge d’école primaire non scolarisés, par genre et appartenance à des groupes de pasteurssélectionnés, données de la dernière année disponible

Source UNESCO (2010)107

Tableau 4.1 Temps nécessaire pour atteindrel’établissement de santé le plus proche dans le Nord et leSud du Ghana (% des personnes interrogées)

Temps nécessaire pour Moyenne Moyenne Moyenne atteindre l’établissement nationale Sud Nordde santé le plus proche

30 minutes ou moins :Rural 52,9 45,5 15,1Urbain 52,9 79,3 51,4

Source CCore Welfare Indicators Questionnaire (CWIQ) Survey,1997 Main Report, Service des statistiques du Ghana, AccraGhana, cité dans Langer et coll. (2007)51

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 41

(ou informel) ; les ménages non autochtones ontdeux à trois fois plus de chances d’y accéder. Lesdonnées du Pérou suggèrent que l’éducationaugmente la probabilité des populationsautochtones à obtenir un prêt, principalementgrâce à un meilleur accès à l’information. Mais lamajeure partie des autochtones ne sont pasinstruits. Dans les zones rurales de l’Équateur, des taux d’intérêt élevés dissuadent plusd’entrepreneurs autochtones que non autochtonesde demander un prêt – respectivement 36 et 23 %.De plus, les taux d’intérêt des crédits formels sontplus élevés pour les entrepreneurs et exploitantsagricoles autochtones.81 Au Vietnam, l’accès aucrédit formel varie peu en fonction du groupeethnique. Les minorités ethniques ont cependanttendance à avoir recours à de petits mécanismes deprêt (liés à des activités spécifiques) fournis par laBanque du Vietnam dans le cadre de politiquessociales, tandis que le groupe majoritaire sont plussusceptibles de bénéficier de prêts plus importantsfournis par la Banque du Vietnam pourl’agriculture et le développement rural.

4.4 La dynamique de l’exclusion dans laprestation des services : accès et qualitéPlus que tout autre groupe, les pauvres dépendentdes services publics de base pour satisfaire leursbesoins de santé et d’éducation. L’incapacité deces services à couvrir leurs besoins est l’un desfacteurs majeurs expliquant le rythme irrégulierdes progrès par rapport aux OMD. La répartitionspatiale inégale de ces services ainsi que leurscoûts, qualité et pertinence constituent certainsdes aspects de cette incapacité.

En Inde, la principale cause de la variation des prestations des médecins, infirmiers etenseignants d’État par habitant dans les districtsruraux est la religion et la caste ; plus lepourcentage de Dalits et de Musulmans est élevédans le district, moins il y a de services médicauxet éducatifs. Le Nigéria rapporte de fortesdisparités dans les soins prénataux entre le Nordet le Sud. Seuls 4 % des femmes du Nord-Estbénéficient de soins médicaux contre 52 % desfemmes au Sud-Ouest, et 8,4 % seulement desmères du Nord-Ouest accouchent dans uneinstallation médicale contre 73,9 % dans le Sud-Est. Les femmes du Nord invoquent le manqued’argent, la distance qui les sépare desinstallations, et la disponibilité incertaine desmédicaments comme les principales raisons aufait de ne pas accoucher dans une installationmédicale. Au Ghana également, il existe desdifférences entre le Nord et le Sud dansl’utilisation des établissements de santé, quoiquemoins prononcées : un enfant sur quatre de la

région Nord naît dans un hôpital contre quatreenfants sur cinq dans la région du Grand Accra.85

Au Vietnam, par rapport à la moyennenationale de 17 % en 2002, 33 % des femmes duNord-Est, 65 % de celles du Nord-Ouest et 40 %de celles des hauts plateaux du Centre ontaccouché sans l’assistance de personnel médicalqualifié. Ces chiffres s’expliquent principalementpar la réticence des femmes à demander l’aided’un personnel médical masculin et la difficultéde recruter des femmes pour travailler dans les régions montagneuses isolées, ainsi que par les contraintes financières et les distances à parcourir.

Les contraintes financières sont également unepréoccupation majeure pour les personnespauvres. L’imposition de frais d’utilisation desservices sociaux par un grand nombre de paysafricains dans le cadre des programmesd’ajustement structurel des années 1980 et 1990 aentraîné une chute de l’utilisation des serviceséducatifs et médicaux, tandis que dans le cas de lasanté, la fréquence des dépenses liées à descatastrophes s'est accrue.

Enfin, la qualité de la prestation des servicescompte elle aussi. Une étude sur la présence depersonnel qualifié lors de l’accouchement dansles zones rurales de Tanzanie a montré quel’appartenance ethnique, l’éducation et lasituation financière des ménages constituaientdes indicateurs importants de l’utilisation desservices. La position sociale, l’expérience passée,le fait de disposer ou non de droits, la pudeur etl’identité propre renforcent la préférence decertaines femmes pour l’accouchement àdomicile. Certaines ont été soignées d’unemanière inférieure aux normes ou renvoyées par des installations médicales et se sont senties humiliées.

« Les installations médicales étaient desespaces publics et ce qui s’y passait était connu de tous ; le statut social était amoindrilorsque la pauvreté était rendue publique.L’appartenance ethnique et la famille étaientégalement des caractéristiques faisant couriraux femmes le risque de ne pas êtrecorrectement soignées. La stigmatisation desPogoros et autres groupes (généralement pardes personnes issues de zones plus urbaines,telles que les prestataires de services)augmentait la probabilité d’un traitementinférieur aux normes.» (Spangler et coll. 2010:7)88

En Amérique latine, l’appartenance à ungroupe autochtone ou le fait de ne parler qu’une

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42 La dynamique d’imbrication des inégalités : les raisons de la persistance de l’exclusion sociale

langue autochtone constituent une barrière àl’accès aux services sanitaires dans au moins cinqpays de la région (Guatemala, Bolivie, Équateur,Paraguay et Pérou). En Colombie, les disparitésraciales et ethniques dans l’état de santé et l’accès aux services sanitaires s’expliquent

principalement par les différences de situationsocioéconomique, statut professionnel, typed'emploi et situation géographique. Au Brésil,l’utilisation des services de maternité est liée àl’éducation et aux ressources des ménages, ainsiqu'à la situation géographique. Les ménages des

10

0

20

30

40

50

60

70

1959

Bahuns-Chhetris Dalits Janajatis Newars Madhesis Femmes

1967 1978 1981 1986 1991 1994 1999

◆◆

◆◆

◆ ◆

••••••••

▼■

▼ ▼▼

✱ ✱ ✱ ✱ ✱

✱ ✖

✖✖ ✖

Pour

cent

age

■ ■ ■ ■ ■ ■ ■ ■

▼ ▼

▼▼

Figure 4.5 Népal : Représentation parlementaire par groupe ethnique/caste et genre, 1959–99

Source Lawoti, M. (2002) ‘Defining Minorities in Nepal’, Nepali Journal of Contemporary Studies 2.1: 20–52

Des enfants du delta du Saloum montrant leur prise. Les communautés de cette région sont fortementtributaires des riches ressources de la mer et de l’estuaire. Photographe : Sebastian

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 43

zones rurales et plus pauvres du Nord et duNord-Est sont moins susceptibles d’y avoirrecours. L’exclusion sociale procède donc del’interaction entre la race, la pauvreté et lasituation géographique.

En Asie du Sud, la religion et la castedéterminent l’utilisation des services de santématernelle et d’obstétrique, tout comme lasituation financière des ménages et l’éducationdes femmes.89 Des actes de discrimination enversles Dalits ont été signalés au sein des servicessanitaires publics, de même que des préjugés àl’encontre des minorités religieuses. Ils setraduisent par un refus de la part du personnelde santé, en particulier paramédical et infirmier,d'avoir un contact physique avec les Dalits et uneréticence à se rendre à leur domicile. À son tour,le comportement discriminatoire, aussi bien réelque supposé, du personnel sanitaire dissuade lesDalits de faire appel aux services sanitaires, enparticulier lorsque ceux-ci nécessitent un contactphysique comme dans l’accouchement.90

En Inde, les enseignants sont majoritairementissus des castes supérieures et amènent leurspréjugés de caste dans leurs classes. Les enfantsdalits sont utilisés comme garçons de course et sevoient assignés de basses besognes telles que lebalayage et le nettoyage des salles de classe. Destaux plus élevés d’absentéisme des enseignantssont signalés dans les zones où les enfants sontprincipalement dalits et issus de communautéstribales. Dans l’Ouest du Bengale par exemple,l’absentéisme des enseignants s’élevait à 75 %dans ces écoles contre 33 % dans les autres. Un tel traitement est particulièrementpréjudiciable aux enfants dalits qui sontvraisemblablement la première génération àbénéficier d’un enseignement.

En Afrique subsaharienne, le mode de viepastoral est étroitement associé à des groupesethniques spécifiques. Ceux-ci sont parmi les plusexclus des services éducatifs. Dans beaucoup de cas,les systèmes nationaux d’éducation n'ont pas réussià leur proposer des programmes adaptés, à leurfournir des manuels scolaires appropriés et àrépondre aux exigences du mode de vie pastoral, où les enfants se déplacent pendant de longuespériodes pour prendre soin des troupeaux.

Les programmes nationaux d'éducationpeuvent renforcer l’exclusion d’autres manièresencore. Les modèles éducatifs classiques reposentsur l’existence d’un élève parlant une langueunique et relevant d’une culture unique, au nomd’une idée d’homogénéité des croyances, cultureset langues. Au Mexique, les enfants autochtoness’en sortent moins bien dans le système scolaire,en particulier ceux issus des zones rurales

défavorisées.91 La situation des enfantsautochtones bilingues (parlant espagnol en plusde leur langue maternelle) est presque similaire àcelle des enfants non autochtones etconsidérablement meilleure que celle des enfantsautochtones ne parlant pas l’espagnol. Lesbarrières linguistiques agissent donc au sein dusystème scolaire d’une manière qui peut êtredifficiles à observer.

4.5 La dynamique politique de l’exclusion

Lorsque les inégalités entre groupes sontreproduites dans l’exercice du pouvoir politique etl’accès aux institutions publiques, elles sapent laconfiance des différentes couches de la populationdans la capacité de l’État à gouverner avec équité.Les groupes exclus sont souvent des minorités etles partis politiques se sentent souvent peu motivésà prendre en compte leurs intérêts.92 Lorsque lesperspectives économiques de ces groupes sontminées par un développement inégal, quandl’accès aux services essentiels connaît toujours desdifférences, et que les possibilités de représentationet d'influence politiques sont refusées, des griefscommencent à apparaître et se convertissentsouvent en conflit (voir Encadré 4.5, page 43 sur leSoudan). Les conflits entre ethnies ou groupessont presque toujours associés à des inégalitéspolitiques et fréquemment liés à des inégalitésdans l’éducation et les revenus.93

Au Mexique, le soulèvement zapatiste trouveses racines dans un long passé d’exploitation,d’exclusion et d’injustices envers les populationsautochtones, et il est ancré dans les inégalitésimbriquées subies par les populations autochtones

Encadré 4.5 Imbrication des inégalités ethniques,religieuses et politiques au Soudan

Au Soudan, les inégalités imbriquées sont à la base de lapauvreté et des faibles chances d’épanouissement.Environ 50 % de la population de la région Nord vit dansla pauvreté contre plus de 90 % de celle du Sud ; et 62 %des enfants du Nord sont scolarisés au primaire contre20 % dans le Sud. Dans le Sud, la mortalité maternelleest plus de trois fois supérieure à celle du Nord, Cettesituation a conduit à la plus longue guerre civile qu’aitconnu l’Afrique. Le prix en vies humaine de ce conflitentamé dans les premières années de l’indépendanceest estimé à 5 millions de personnes. Un accord de paixsigné en 2005 prévoyait des dispositions visant à luttercontre l’exclusion politique du Sud et les inégalitéssocioéconomiques entre le Nord et le Sud, mais lesgriefs fondamentaux n'ont jamais été abordés.

Source : Swearingen, M. (2010) « Group Inequality andConflict: Some Insights for Peacebuilding », Peace Brief28, Washington D.C.: United States Institute of Peace

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44 La dynamique d’imbrication des inégalités : les raisons de la persistance de l’exclusion sociale

en raison de leur identité ethnique, situationgéographique et pauvreté. Dans l’état du Chiapas,où a débuté le mouvement, la proportion de lapopulation autochtone était plus de trois foissupérieure à celle de l’ensemble du Mexique; lepourcentage des individus dont le salaire étaitinférieur au revenu minimum atteignait presquetrois fois celui du pays, tandis que la proportiondes individus bénéficiant d’un salaire élevéreprésentait moins de la moitié du taux national.94

L’analphabétisme au Chiapas atteignait le doubledu taux national, et la fréquentation scolaire ainsique les revenus de la population autochtoneétaient nettement inférieurs à ceux du reste de lapopulation de l’état. Cette population avait étéexclue des efforts de la réforme agraire et confinéesur des terres pauvres et écologiquementvulnérables. Pendant des années, la résistanceorganisée s’est heurtée au Chiapas à la répressionpolitique. À la suite d’une longue période dedétérioration de la situation, l’adoption del’Accord de libre-échange nord-américain(ALENA), dans le cadre de politiques néolibérales,a constitué un élan majeur pour le soulèvement.

Au Népal, la représentation des Brahmanes etChhetris au niveau des pouvoirs législatifs étaitd’environ 60 % pendant la période 1959-1999,incluant les dix premières années de ladémocratie multipartite du pays (voir Figure4.5, page 42). Les Dalits étaient pratiqueentièrement absents de ce droit pendant cettepériode, tandis que les femmes étaientfortement représentées, indépendamment deleur classe. Les postes de fonctionnaires étaienteux aussi attribués de manière disproportionnéeaux Brahmanes/Chhetris (83 %), et les castessupérieures occupaient quasiment tous lespostes dans le système judiciaire.95 La pauvreté,la caste et l’identité ethnique associées à uneexclusion politique persistante, même aprèsl’introduction de la démocratie, ont conduit àplusieurs années de conflit civil à la fin desannées 1990.

En Ouganda, les principales divisions

économiques, culturelles et politiques s’observententre la population parlant majoritairement lebantu du Centre-Sud et la population du Nordne parlant pas le bantu. Le Centre-Sud arégulièrement obtenu de meilleurs résultats queles zones périphériques du pays, en particulier leNord, et s’est taillé la part du lion dans lesressources publiques. Le Nord est nettement pluspauvre que le Centre-Sud ; les revenus moyens ysont globalement deux fois moins élevés et lesservices sociaux considérablement moins bons.Cependant, les groupes ethniques du Nordconstituent une minorité et ne peuvent s’assurerdu pouvoir qu’à travers des alliances, la fraudeélectorale ou la violence. C’est pourquoi, pendantles 25 premières années des 40 ans de conflitsviolents vécus par le pays, les troubles étaientprincipalement fomentés par les politiciens duNord au pouvoir, à l'encontre des élitesprivilégiées du Sud.96

Toutes les sociétés sortant d’un conflitsouffrent d’un affaiblissement de leurs ressources.Huit des dix pays présentant les indices dedéveloppement humain les plus bas et huit desdix pays enregistrant les PNB par habitant lesplus faibles avaient souffert de conflits civilsmajeurs au cours des dernières années, le rapportde cause à effet s’appliquant dans les deux sens.97

Ces pays sont également susceptibles de figureren bonne place parmi ceux affichant les plusgrands retards dans l’accomplissement des OMD, même s’ils sont aussi ceux pour lesquellesont dispose de peu de données pour évaluer leurs avancées.

Lorsque les inégalités entre groupes sontreproduites dans l’exercice du pouvoir politique etl’accès aux institutions publiques, elles sapent laconfiance des différentes couches de la populationdans la capacité de l’État à gouverner avec équité.

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 45

« Nous sommes résolus à faire du droit audéveloppement une réalité pour tous et à mettrel’humanité entière à l’abri du besoin. »(Déclaration du millénaire 2000, para. 11)

La Déclaration du Millénaire promettait la justice sociale, dans un monde où le droit audéveloppement serait une réalité pour tous. Mais cette promesse s’est envolée au moment oùles valeurs et principes de la Déclaration ont ététraduits en huit OMD et les cibles et indicateursqui les accompagnent. L’abandon de cetengagement explicite envers l’égalité, la toléranceet la solidarité dans la formulation de l’agendades OMD a entraîné une progression inégale desrésultats et a permis aux différences de subsisterentre les groupes sociaux. Tant que les OMD neseront pas adaptés aux réalités des inégalitésimbriquées et de l’exclusion sociale dans lesdifférentes régions, ils risquent non seulement dene pas conduire vers une société plus juste, maisaussi d’exacerber les égalités existantes.L’utilisation de moyennes nationales pourmesurer les progrès encourage la recherche de solutions de facilité – c’est-à-dire aider ceux qui ont le moins de difficultés à sortir de la pauvreté.98

La suite de cette section s’intéresse auxpolitiques et interventions qui ont fonctionnédans différents contextes afin de trouver des basespour l’élaboration d’approches plus justes desOMD. La première série de recommandationsporte sur l’environnement général des politiques.La première de ces recommandations concerne ladimension politique du changement, le chaînonmanquant des OMD. Elle souligne la nécessité denouveaux contrats sociaux entre les États et leurscitoyens afin de poser les bases de sociétés plusdémocratiques et plus inclusives. Des Étatsréactifs et redevables, d’une part, et des citoyensresponsables et actifs, d’autre part, sont au cœurde ces contrats. Ceux-ci ne voient pas le jour pardécret. Ils doivent être construits au fil du tempspar des interactions mutuelles entre l’État et lescitoyens. Les recommandations suivantess’adressent à ce processus interactif. Ellesdevraient contribuer à la fois à consolider lesrelations de redevabilité entre les États et lescitoyens et à ouvrir la voie à de nouvellespolitiques pour construire une sociétésocialement plus juste.

D’autres recommandations plus généralesabordent la nécessité d’une base de connaissanceet d’une information publique plus solides surl’exclusion sociale pour l’élaboration de réponsespolitiques bien fondées, ainsi que l’importancedes cadres macroéconomiques favorables pour lapoursuite de ces politiques. Ces recommandationsgénérales sont suivies par d’autres, plusspécifiques, portant sur les OMD relatifs à lapauvreté puis sur les OMD sociaux.

5.1 États réactifs, citoyens actifs : vers unnouveau contrat social

« Nous décidons par conséquent... de travaillerensemble à l’adoption dans tous les pays deprocessus politiques plus égalitaires, quipermettent la participation effective de tous lescitoyens à la vie politique. » (Déclaration du millénaire 2000, para. 25)

Alors que les OMD se concentrent sur ce que lesÉtats doivent faire (fournir des services éducatifset sanitaires, promouvoir les moyens desubsistance), les engagements politiques de laDéclaration du millénaire émettait un messageclair sur la manière de le faire : par des processuspolitiques plus égalitaires et une participationeffective.99 Là aussi, le message s’est perdu lorsque la Déclaration a été traduite en objectifsclés de développement.

L’importance accordée aux politiques est leproduit de la dynamique de pouvoir qui perpétue

Les OMD en tant qu’instrument de justicesociale : parvenir à l’égalité des chances 5

Zone de Karnali, au Népal : des enfants apprennent à écrire.Photographe : Peter Barker/Panos Pictures

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46 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

l’exclusion sociale dans le temps. Les groupessocialement exclus n’ont pas vraiment eu l’occasionde s’exprimer ni d’exercer une influence lors del’élaboration de politiques qui concernent pourtantleurs vies et leurs chances d’évoluer, et restent doncen marge des processus de développement. Pour que les OMD accomplissent leur promesse de politiques plus égalitaires, une attentionsystématique doit être portée à l’expansion del’espace démocratique afin de permettre uneinteraction entre l’État et ses citoyens les plus exclus.

Le rôle clé de l’ÉtatL’expérience a clairement montré que l’État a unrôle crucial à jouer dans la promotion des OMD en tant qu’instrument de justice sociale. Le secteurprivé a indubitablement une contributionimportante à apporter en raison de son rôlecentral en tant que moteur de la croissance.Toutefois, le profit étant sa motivation première,il y a peu de chance qu’il montre le chemin enmatière de promotion de la justice sociale. La société civile est également indispensable àcause de sa capacité à mobiliser contre l’injusticeet à demander des comptes à l’État et au secteurprivé. Cependant, elle aussi représente des

intérêts particuliers et ne peut parler au nom dela société toute entière. Aussi imparfait qu’il puisseêtre, l’État est la seule institution qui a pourmandat de répondre aux revendications de justicesociale de tous ses citoyens.

On peut citer de nombreux exemplescontemporains où des progrès dans latransformation de la société et le renversementd’inégalités historiques ont été pilotés par l’État,même si, dans la plupart des cas, la mobilisationdes citoyens a contribué à les inscrire à l’agenda.L’Afrique du Sud, la Chine et la Malaisie figurentparmi ces exemples. En Amérique latine, lasuppression d’inégalités de longue date estlargement le fait de gouvernements de gauche,dont certains étaient dirigés par des hommesissus des communautés ethniques minoritairesqui avaient elles-mêmes bénéficié de l’expansion de l’accès à l’éducation au cours des dernières décennies.100

Décentralisation et démocratisation desautorités locales

« Pour tirer avantage de l’engagement actif descitoyens dans le cadre des OMD, tant pour lesgens eux-mêmes qu’à travers une élaboration

« Nous décidons par conséquent... de travailler ensemble à l’adoption dans tous les pays de processuspolitiques plus égalitaires, qui permettent la participation effective de tous les citoyens à la vie politique. » (Déclaration du millénaire 2000, para. 25) Photographe : Barbara Cheney

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 47

plus efficace des politiques, certaines garantiesessentielles de redevabilité doivent être enplace. Elles comprennent une substantielleliberté d’information, des budgetstransparents, un processus participatifd’élaboration des politiques, et un ‘espace’politique permettant aux organisations de lasociété civile de fonctionner sans contraintesexcessives. Ces mesures peuvent garantir queles hommes et les femmes vivant dans lapauvreté, dont les opinions sont souventignorées, puissent orienter les plans de luttecontre la pauvreté dans les pays pauvres. »101

Certains des éléments de base nécessaires à laconstruction d’États plus réactifs ont été évoquésdans de la discussion précédente. Il s’agit, entre autres, de la liberté de la presse, du droit àl’information, ainsi que d’un processus debudgétisation et d’une décentralisation de la prise de décision transparents ou participatifs.Une attention croissante a été accordée à ladécentralisation, qui rapproche la prise de décisiondes groupes désavantagés et constitue uninstrument clé pour parvenir à une plus granderéactivité de l’État. En tant qu’organe degouvernement le plus proche du peuple, lespouvoirs publics locaux ont certainement lepotentiel de promouvoir des relations plusefficaces entre l’État et la société. Mais il n’existe a priori aucune raison pour que les types degouvernance plus localisés soient plusdémocratiques ou inclusifs que les autresniveaux.102 Les intérêts concurrents autour desressources locales et du pouvoir peuvent agiraussi bien comme moteurs d’exclusion qued’inclusion, et le pouvoir exercé au niveau local peut se révéler plus concentré, plus élitiste et parfois même plus impitoyable qu’au niveau central.103

La décentralisation est donc une mesure àrecommander avec prudence et ne doit pas êtreprésentée comme une panacée. Pour que ladécentralisation fonctionne de manière optimale,il faut un État central solide qui peut décentraliserles ressources et les responsabilités en touteconfiance, et des pouvoirs publics locaux travaillanten accord avec une société civile dynamique et bienorganisée, capable de s’engager efficacement auxcôtés des responsables de l’élaboration despolitiques. Elle doit donc s’accompagner d’effortsde démocratisation des pouvoirs publics locauxet reconnaître que pour des raisons politiques ettechniques, certains problèmes doivent continuerà être pris en charge à un niveau supérieur. Elle implique aussi des efforts de renforcement descapacités de toutes les couches de la société locale,

afin que celle-ci puisse participer aux processus de prise de décision à différents niveaux degouvernement et soit capable de demander descomptes aux pouvoirs publics.

Renforcer les capacités et l’action politiquedes groupes exclusL’État peut favoriser l’engagement actif des groupessocialement exclus. En 1996, le gouvernement duKérala a lancé la Campagne populaire pour uneplanification décentralisée. Elle visait à allouerdes ressources et une autorité importantes auxpanchâyat (conseils de village) et auxmunicipalités, et à charger les assemblées devillage et les comités citoyens de la planificationet de la budgétisation des dépenses consacrées audéveloppement local. Pendant les deux premièresannées de la campagne, près d’un ménage surquatre participait aux assemblées villageoises, et celles-ci continuent à attirer du monde.Beaucoup de citoyens ont suivi une formation àla planification et à la budgétisation.

De surcroît, grâce à une refonte des incitationsinstitutionnelles et à de nouveaux efforts demobilisation, la participation des femmes auxassemblées villageoises a atteint plus de 40 % –nettement plus que dans n’importe quelle autrerégion de l’Inde – tandis que la participation desDalits dépassait leur représentation dans lapopulation.104 Une grande enquête auprès derépondants clés a révélé que les « groupesdésavantagés » étaient les principaux bénéficiairesdes systèmes ciblés. Elle a aussi mis en évidencel’idée largement répandue que les représentantsélus étaient devenus plus réactifs aux besoins dela population locale.La capacité de participation à la vie politique

peut également être renforcée en faisant participerles communautés à la conception et à la gestion desprojets de développement de la communauté,intégrant des mécanismes pour atteindre lesgroupes exclus. Le programme indonésien dedéveloppement des kecamatans (districts) est unexemple d’une tentative réussie d’accroissementde l’action politique des groupes marginalisés àtravers le développement communautaire. Il alloue des fonds au niveau des sous-districts.Ceux-ci les octroient sur une base concurrentielleà des sous-projets présentés de manière formellepar des groupes de villageois (dont deux aumoins doivent être des femmes). Les procédures,institutions et normes sont largementdécentralisées, se concentrent sur la résolutionconjointe des problèmes, invitent à une largeparticipation et supervision du public, et interviennent de manière plus ou moinscontinue et institutionnalisée. Une étude récente

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48 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

a conclu que ce programme aidait les groupesmarginalisés à trouver des espaces et des moyensconstructifs pour résoudre les conflits, qu’ilssoient ou non liés au projet. Les résultats ne sontpas seulement des installations de base mais aussiun nouveau style de représentation des groupes. Enfin, la capacité d’action collective peut être

renforcé par le bas. La mobilisation des groupesmarginalisés a été encouragée à travers diverscanaux, notamment les mouvements sociaux, les ONG, les organisations confessionnelles, les groupes de femmes, et les syndicats, ainsi quepar l’auto-organisation des groupes en question.Divers exemples de ces efforts – ainsi que leurpertinence par rapport aux OMD – ont étéévoqués à différentes endroits de ce rapport. Bien que toutes ces organisations ne soient pasaussi inclusives ou efficaces les unes que les autres,beaucoup ont agi comme un puissant moteur enfaveur du changement et de la réduction desinégalités. En Inde, par exemple, des groupes de lasociété civile, en collaboration avec des partispolitiques progressistes, ont réussi à forcer legouvernement indien à reconnaître les droits àl’information, à l’alimentation et au travail. Ces

droits ont ensuite été utilisés par la société civilepour améliorer la mise en œuvre des politiquespubliques et pour tenir les prestataires de servicespour redevables (voir Encadré 5.2, page 50).

5.2 Consolider les politiques d’informationpour combattre l’exclusion

« Les stratégies [pour combattre l’exclusionsociale] dépendent des attitudes adoptées parla société dans son ensemble à l’égard de ceuxqu’elle exclut. Très souvent, la premièreréponse... est le déni et la dissimulation deleur existence... L’une des premièresconditions pour l’élaboration de stratégiess’attaquant à l’exclusion est... de la faireremonter à la surface, de la rendre visible et de la reconnaître. »105

La première étape du combat contre l’exclusionsociale consiste à reconnaître que le problème existe ; la deuxième est de réagir à cetteinformation. Tant que les pouvoirs publicsignorent qui est exclu des progrès vers les OMDet pourquoi, ils ne peuvent résoudre le problème.Ce rapport a souligné les difficultés rencontréespour obtenir des informations exactes etcohérentes sur les groupes exclus. Cette absencede données provient souvent de l’incapacité despouvoirs publics à reconnaître l’importance del’exclusion sociale. Parfois, elle peut être leproduit d’une politique délibérée de déni desinégalités, comme c’est le cas au Myanmar.

Il peut également y avoir d’autres raisons. Par exemple, le gouvernement rwandais d’aprèsle génocide a poursuivi une politique depromotion de l’unité et de la réconciliationnationales, en mettant l’accent sur les élémentsqui unissent les Rwandais et en contrôlant les

Bamako (Mali) : une réunion au Centre d’écoute, de soinsd’accompagnement et de conseils pour les personnes vivantavec le VIH (CESAC), la principale organisation travaillant auprès des malades du sida au Mali. Photographe : WilliamDaniels/Panos Pictures

Encadré 5.1 Permettre à chacun de compter : la collecte de données sur les groupes exclus enAmérique latine

Dans le cadre de son programme Everyone Counts (« Tout le monde compte »), la Banqueinteraméricaine de développement soutient desinitiatives régionales visant à introduire la race etl’appartenance ethnique dans les recensementsnationaux, les registres d’état civil et les enquêtesauprès des ménages. En collaboration avec laCommission économique pour l’Amérique latine et lesCaraïbes (CEPALC) et la Banque mondiale, elle a, en2001, lancé un programme pour l’amélioration desenquêtes et l’évaluation des conditions de vie enAmérique latine et dans les Caraïbes. Grâce à cesinitiatives, la plupart des pays de la région collectentaujourd’hui des données sur la population autochtoneet, 9 des 19 pays latino-américains récoltent desdonnées recensant les descendants d’Africains.

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 49

éventuels facteurs « de division », ce qui inclutl’interdiction de toute référence à l’appartenanceethnique. En conséquence, il est extrêmementdifficile de suivre les progrès vers les OMD parrapport aux populations hutus, tutsies et twas, ou de suivre l’impact différentiel des politiquessur ces groupes. Dans d’autres contextes, lesdonnées sont spécifiquement ventilées suivantl’appartenance ethnique ou la race, comme enAfrique du Sud, où le gouvernementpostapartheid continue de faire référence aux « groupes historiquement désavantagés » poursuivre spécifiquement les progrès des indicateurssociaux, économiques et politiques.

Les organismes internationaux et les Étatsdoivent améliorer leurs méthodes de collecte etventilation des données de manière à pouvoirvérifier si les groupes exclus bénéficient desprogrès effectués en direction des OMD. Leniveau de désagrégation est essentiel. Desindicateurs ajustés en fonction de l’équitépeuvent jouer un rôle important dans le suivi des progrès. Dans la mesure des progrès, lesmoyennes nationales accordent le même poids àtous les quintiles. L’ajustement des statistiquesnationales en fonction des disparités peut êtreeffectué en pondérant les valeurs liées auxquintiles de manière à accorder une plus grandeimportance aux progrès réalisés dans les quintilesinférieurs.106 Ce système peut être utilisé nonseulement pour les revenus mais également pourl’éducation, la santé et les autres OMD. Lerapport de l’UNESCO, Reaching the Marginalized,portant sur le niveau d’éducation des groupessocialement exclus, suit les progrès en se basantsur des indicateurs éducationnels ajustés enfonction de l’équité.107

Les données ventilées doivent ensuite êtreanalysées pour déterminer l’étendue et les causes del’inégalité, ainsi que l’impact des politiques sur lesgroupes exclus. Les données devraient égalementêtre communiquées aux structures concernées, y compris aux groupes de la société civile, pour leurpermettre de jouer leur rôle de lobbying. Parexemple, un récent rapport publié dans TheLancet appelait à réaliser une analyse plusdétaillée pour comprendre pourquoi un certainnombre de pays, notamment l’Égypte et leRwanda, ont rencontré un succès considérabledans la réduction de la mortalité maternelle –l’un des OMD qui s’avèrent les plus difficiles àatteindre.108 Sans une telle analyse, les autoritésauront du mal à faire des progrès au niveau decet OMD, et les groupes de la société civile neseront pas capables d’exercer des pressions enfaveur des changements politiques nécessaires.

Un plus large éventail de politiquesd’information sera nécessaire pour changer lescomportements et les perceptions du public. La plupart des discriminations associées àl’exclusion sociale sont générées et entretenuespar les préjugés et les idées préconçues du publicau sujet des groupes socialement exclus. La recherche et les statistiques, de même que lesystème éducatif, les médias et les campagnespubliques, peuvent contribuer à influencer lediscours public.

Les médias devraient être mobilisés pour leverles barrières entre les groupes socialement exclus etle reste de la société, à travers l’éducation,l’information et le divertissement. La liberté de lapresse est l’une des pierres angulaires de ladémocratie, et les médias jouent un rôle crucialdans la diffusion de l’information, la sensibilisationet la défense de politiques capables de susciter lechangement. Le pouvoir de la télévision par câbleet satellite a commencé à transformer les relationshommes-femmes en Asie du Sud, remettant enquestion le caractère acceptable de la violenceconjugale et la dévalorisation des femmes, etrenforçant leur capacité d’action.109

Les politiques d’information destinées auxgroupes exclus sont tout aussi importantes quecelles portant sur eux. La recherche sur les raisons pour lesquelles certains groupes sontsystématiquement incapables d’utiliser lesservices sociaux ou de revendiquer leurs droitsmet en lumière le manque d’information de cesgroupes sur la disponibilité de ces services et lesconditions d’accès. L’importance du droit àl’information est de plus en plus reconnue dans lalégislation de pays comme l’Inde et le Bangladesh,et dans des propositions de loi comme au Ghana.La connaissance des droits, avantages et règlesassociés à la prestation des services peut élever leniveau d’information des groupes exclus etrenforcer leur capacité à revendiquer ces droits etservices. Elle peut aussi avoir des résultatsbénéfiques. Ainsi par exemple, la campagnemédiatique thaïlandaise appelant au respect desfemmes et au recours à des pratiques sexuellesplus sûres, a indubitablement contribué à réduirel’incidence du sida au point que le pays peutaujourd’hui envisager un programme detraitement budgétairement abordable.110

5.3 Politiques macroéconomiques etredistribution de la croissance Le cadre macroéconomique national d’un paysdétermine le contexte dans lequel sontpoursuivies les politiques visant à réaliser lesOMD. Il influence le rythme et le schéma de lacroissance économique, ainsi que la répartition

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50 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

des ressources et des opportunités entre lesdifférents secteurs productifs et couches de lapopulation. La croissance économique peutconstituer un environnement favorablepermettant de promouvoir les OMD en tantqu’instrument pour atteindre la justice sociale,mais seulement si elle génère un niveau adéquatde ressources et d’opportunités et leurredistribution équitable.

Cependant, le cadre macroéconomiquenéolibéral, qui, ces dernières années, a défini lerythme et le modèle de la croissance dans laplupart des pays, n’a pas fait grand-chose pourremettre en question les inégalités responsables del’exclusion sociale. Il est donc indispensabled’accorder une plus grande attention à laredistribution. La redistribution peut se faire par lebiais de la croissance. Des schémas de croissance àlarge assise et axés sur l’emploi, apportant destransformations structurelles majeures àl’économie, fournissent les conditions favorablespour lutter contre l’exclusion sociale. Lesinvestissements dans la productivité agricoleaideront de grands pans de la population pauvremarginalisée dépendant de l’agriculture pour sasubsistance. Mais ils doivent s’accompagner d’un

Près de la moitié de la population péruvienne estd’origine autochtone, et vit en grande partie dans lapauvreté. Ces groupes disposent systématiquement d’unaccès moindre à la santé, à l’éducation et aux moyens desubsistance, ce qui les désavantage clairement parrapport aux populations non autochtones.Photographe : Jorge Villar Fernandez

Encadré 5.2 Le droit à l’information en Inde

En 1996, une campagne nationale pour le droit àl’information a été lancée en Inde, aiguillonnée par unréseau d’organisations militantes actives dans le domainedu développement local. En grande partie grâce à leursefforts, une loi d’envergure sur le droit à l’information estentrée en vigueur en 2005. Elle exige que toutes lesinstitutions publiques centrales, étatiques et localesrépondent aux demandes d’information du public. Elle est devenue un outil important pour garantir latransparence et la redevabilité des activités quotidiennesdes pouvoirs publics.111

Le droit à l’information et à l’action collective a été utilisépour garantir la bonne mise en œuvre des programmespublics visant à aider les personnes les plus vulnérables etprivées du droit de vote, notamment le Public DistributionSystem (PDS) à Delhi. Celui-ci fournit des produits de base –céréales, sucre et kérosène – à des prix abordables pour leshabitants pauvres et marginalisés de la ville. Officiellement,les détenteurs d’une carte PDS ont le droit d’aller réclamerchaque mois ces produits dans les points de vente PDS. Enpratique, beaucoup d’entre eux sont renvoyés des points devente, s’entendent dire qu’il ne reste plus de céréales oureçoivent moins que leur dû. Une plainte déposée par unehabitante d’un quartier à faible revenu, affirmant que depuistrois mois, elle ne recevait plus les céréales auxquelles elleavait droit, a incité une organisation locale, Parivartan, à recourir au droit à l’information pour enquêter sur lamanière dont opérait le PDS. L’examen des dossiers locauxdu PDS a révélé que 87 % du blé et 94 % du riz du PDSétaient vendus sur le marché libre. La plaignante elle-mêmeavait été enregistrée par le gérant du magasin comme ayantreçu l’entièreté de son quota, un empreinte de pouce tenantlieu de signature.Parivartan a mobilisé les médias et exhorté les habitantsdu quartier à faire usage de leur droit à l’information pourvérifier les dossiers de tous les magasins PDS de larégion. Plus de 300 personnes ont publiquement introduitune demande de consultation de leur dossier, malgré lesmenaces de violence et les pots-de-vin. Il en a résulté unchangement indéniable dans le comportement desgérants des magasins. En vertu de la loi sur le droit àl’information de 2005, Parivartan a poussé àl’institutionnalisation de l’examen public des dossiers duPDS. Cette campagne localisée de petite envergure montrela capacité du droit à l’information à ouvrir un dialogue etdes négociations permettant aux plus marginalisés defaire entendre leur voix et de réclamer des comptes.

Source : Pande, S. (2008) ‘The Right to Information andsocietal accountability: the case of the Delhi PDSCampaign’, IDS Bulletin 38

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 51

accroissement des possibilités d’emploi en dehorsde l’agriculture et de moyens permettant à cesgroupes d’en tirer avantage.

« Une croissance soutenue et équitable, baséesur un changement économique structureldynamique, est nécessaire pour progressersubstantiellement dans la réduction de lapauvreté. Elle permet également de faire desprogrès plus rapides vers les autres Objectifsdu Millénaire pour le développement. Si lacroissance économique est nécessaire, elle nesuffit néanmoins pas pour progresser dans laréduction de la pauvreté. »112

Même la croissance à large assise ne devraitpas suffire à elle seule à briser les cyclesd’inégalité historiquement établis. La croissancepro-pauvre doit être associée à des politiques deredistribution si l’on veut que les OMD bénéficientaux groupes exclus. L’expérience de l’Amériquelatine constitue un exemple d’une approchepolitique qui combine « la croissance avec uneredistribution prudente ».113 La Brésil a puréduire de manière significative des schémasd’inégalité historiquement établis, en dépit d’un niveau modéré de croissance, parce quel’État jour un rôle proactif dans les politiques de redistribution.114

« Les pays latino-américains qui ont réussi àréduire les inégalités ont continué à mettrel’accent sur des objectifs orthodoxes : stabilitémacroéconomique, prudence budgétaire etpréservation du libre-échange et des fluxfinanciers. Là où ils ont rompu avec l’orthodoxiepassée, c’est en ayant recours à la gestion destaux de change, à une plus grande mobilisationdes ressources nationales, à des politiques definances publiques neutres ou contracycliques et à un rôle actif de l’État dans le domaine despolitiques sociales et de l’emploi. »115

5.4 Des politiques budgétaires progressistesLes budgets des États constituent un instrumentde politique macroéconomique particulièrementpuissant pour garantir qu’une croissanceredistributive mène à des progrès vers les OMDplus importants et plus équitables. La fiscalité estparticulièrement importante pour combattre lesinégalités économiques, tandis que les dépensespubliques peuvent être utilisées pour corriger lesinégalités sociales.116 À la fois les niveaux et lacomposition de ces instruments déterminent leurefficacité. Les pays en développement neconsacrent en général pas suffisamment d’effortsà la mobilisation des recettes fiscales nationalespar rapport aux pays plus riches, et sont par

conséquent nettement plus dépendants d’unfinancement extérieur. Ils devraient en prioritérenforcer leur système fiscal, par exemple eninvestissant dans les capacités administratives, en supprimant les niches fiscales et en élargissantleur assiette d’imposition.

Du point de vue de la redistribution, lacomposition de la fiscalité a de l’importance.L’imposition directe des revenus, des bénéfices etdes gains en capital sont les plus prometteurs enmatière de redistribution économique et deréduction de la pauvreté. L’exonération de toutepropriété d’une valeur inférieure à un certainmontant ou l’utilisation d’un taux progressifd’imposition des revenus sont des moyensévidents de libérer le potentiel de redistribution.Les impôts indirects, tels que la taxe sur la valeurajoutée, peuvent être progressifs s’ils exemptentles produits de première nécessité, tels que lesdenrées alimentaires, et sont plus élevées sur lesarticles de luxe. Les taxes sur les carburantspeuvent être différentiés afin d’imposer des tauxplus élevés sur les carburants utilisés par lesriches. Là où les groupes socialement exclus sontgéographiquement concentrés, l’équilibrerégional de l’imposition peut être modifié.

Le niveau et la composition des dépensespubliques aura une influence particulière sur lesOMD sociaux. Si le niveau général de la dépensepublique représente la capacité de l’État à œuvreren faveur des OMD, c’est la composition de cettedépense qui fera la différence pour les groupessocialement exclus. Pour atteindre les groupessocialement exclus, la dépense devra être plus élevéeque pour le reste de la population. Des mécanismes budgétaires peuvent également

être élaborés afin de diriger les ressources vers lesgroupes et les régions exclus. L’Indonésie asupprimé une subvention du carburant quiprofitait aux mieux nantis pour financer unprogramme de transferts de fonds ciblés destinéaux pauvres. En 2006, au moment de la haussehistorique des cours du cuivre et de l’or, la Mongolie a introduit une taxe sur les bénéficesde cette manne afin de respecter ses engagementssociaux. Elle a toutefois été forcée de l’annuleraprès s’être heurtée à l’opposition inflexible descompagnies minières. La Bolivie à jusqu’ici euplus de succès avec sa taxe directe sur leshydrocarbures.

Les pouvoirs publics peuvent utiliser des règlesde transfert pondérées en fonction de l’équité pourmettre en place des schémas de dépense publiqueplus redistributifs. Des exemples de réussite dansce domaine nous viennent de l’Inde et du Brésil(voir Encadré 5.4, page 52).

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52 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

Les pouvoirs publics devraient réagirpositivement à l’élan croissant en faveur d’une plus grande transparence des processus budgétaires,facilitant l’analyse de la manière dont les dépensesaffectent les différents groupes sociaux. Parexemple, au cours des dix dernières années, desinitiatives encourageant une analyse budgétairetenant compte du genre ont vu le jour dans plusde 60 pays. Ce type d’analyse permet d’évaluer à quel point la gestion des finances publiques estsensible à la problématique du genre, et si lesengagements politiques en faveur de l’égalité dessexes s’accompagnent d’allocations de ressources.Une plus grande transparence des processus

budgétaires peut également être encouragée àtravers une plus large participation du public. La budgétisation participative vise à encouragerla citoyenneté active et à garantir ainsi une plusgrande équité des dépenses publiques et plus detransparence et de redevabilité de la part desautorités. Utilisé pour la première fois par le Partides travailleurs dans la ville brésilienne de PorteAlegre, la budgétisation participative permet auxcitoyens d’avoir leur mot à dire sur la manièredont les budgets municipaux sont dépensés. De nombreuses initiatives sont en cours dans lesrégions en développement, basées sur le principede la participation des citoyens aux décisionsd’allocation des finances publiques.

Des études ont révélé que, lorsqu’il est mis enœuvre efficacement, le processus de budgétisationparticipative peut renforcer le capital social, la confiance et la coopération mutuelle,118

encourager les communautés à prendreconscience de nouveaux moyens de combattre lapauvreté et les inégalités,119 promouvoir une plusgrande transparence et réduire le clientélisme,accélérer la redistribution des ressourcespubliques, et conduire à des investissementsciviques plus intelligents.

5.5 Politiques juridiques et discriminationpositive Les constitutions et les systèmes juridiques

constituent la structure la plus élevée où peut êtreinterdite la discrimination liée à la race, au sexe, à l’appartenance ethnique ou aux croyancesreligieuses. Toutefois, pour pouvoir être mise enpratique, l’égalité légale doit être soutenue par desdispositions explicites de mise en application. Un certain nombre de pays ont adopté despolitiques explicites de discrimination positivepour combattre les inégalités imbriquées. L’Inde est peut-être le pays qui réserve depuis le plus longtemps des quotas aux membres descommunautés tribales et dalits dansl’enseignement et la fonction publique, de mêmequ’aux femmes et à ces deux groupes dans lesautorités locales.120

D’autres pays ont opté pour la discriminationpositive pour répondre à la mobilisation socialedes groupes désavantagés, qui a souvent dégénéréen conflit. La constitution sud-africainepostapartheid établit un cadre robuste pour lapromotion de l’égalité, y compris des droitséconomiques et sociaux. Elle a aussi introduitdans les secteurs public et privé, unediscrimination positive qui accorde des prioritésà la race et au sexe. Dans le Népal post-conflit,une série de mesures de discrimination positiveont été prises pour veiller à ce que les exclusionsdu passé ne se reproduisent pas dans le présent.

La Malaisie est souvent considérée comme unpays où les politiques de discrimination positivesemblent avoir bien fonctionné (voir Encadré 5.6,page 53) et elle a connu, au fil du temps, un déclin

Encadré 5.3 Taxation progressive des hydrocarbures en Bolivie

La Bolivie a introduit un certain nombre de transferts fiscauxbasés sur une taxe directe sur les hydrocarbures. Deux d’entreeux donnent directement lieu à une redistribution. La premièreest le programme Juancito Pinto, qui cible les districtsprésentant un taux élevé d’abandon et un faible niveau defréquentation scolaire. L’autre apporte un revenu minimum desoutien. Le reste de ces recettes fiscales est consacré à dessubventions globales pour aux pouvoirs publics sous-nationaux et n’est pas particulièrement redistributif, puisqu’ilfavorise les régions productrices de gaz, mieux nanties.117

Encadré 5.4 Utilisation de règles de transfertpondérées en fonction de l’équité pour une dépenseatteignant mieux les groupes exclus

En Inde, jusqu’en 2007, la taille de la population desdistricts constituait le principal critère pour estimer lesbesoins. Aujourd’hui, une nouvelle formule a été adoptée,qui attache plus de poids aux indicateurs sociaux dans lesindices de besoin au niveau des districts. Alors qu’en2005/06, les différences dans la dépense d’éducation parenfant étaient négligeables entre les districts défavoriséset avancés, en 2008/09 les districts du quartile inférieurde l’indice de développement éducatif recevaient deuxfois plus par enfant que ceux du quartile supérieur.

Au Brésil, le pouvoir public fédéral fait appel à deuxleviers pour égaliser les dépenses sociales publiques. En premier lieu, il définit des normes réglementaires pourétablir les références nationales en matière de dépensepar habitant. Ces normes sont pondérées en fonction del’équité, favorisant les zones rurales par rapport aux zonesurbaines, et les minorités autochtones par rapport aureste de la population. En second lieu, les États dont lesrecettes fiscales sont inférieures au seuil prescrit peuventbénéficier d’un financement fédéral complémentaire. En 2008, neuf États des régions les plus pauvres du Nordet du Nord-Est ont bénéficié de ce financement.

Source : UNESCO (2010)107

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 53

systématique des disparités ethniques. Il fauttoutefois noter que son succès résulte à la fois dela poursuite de la discrimination positive et duchangement économique structurel.121 Si lacroissance avait été le seul objectif, seuls lesdétenteurs des ressources productives y auraientgagné, et les inégalités sociales auraient pus’accentuer, entraînant de nouveaux conflits. De même, si l’État s’était uniquement concentrésur la redistribution des richesses existantes,l’accent excessif placé sur les minorités auraientrendu la discrimination positive politiquement etéconomiquement impossible.

Dans le cas du Sri Lanka, le recours à ladiscrimination positive par une majoritéethnique économiquement désavantagée maispolitiquement dominante n’a pas porté ses fruits.Alors que les différences de revenu entre lescommunautés tamoule et cingalaise du Sri Lankaétaient peu importantes, la première bénéficiaitd’un accès privilégié à l’éducation et aux emploisde la fonction publique depuis la périodecoloniale. Le remplacement de l’anglais par lecingalais en tant que langue officielle, l’utilisationde quotas dans l’éducation et la mise en place depolitiques d’investissement régional ont atteintl’objectif de réduction des désavantages dontsouffraient les Cingalais, mais, le renversementbrutal des inégalités entre les groupes, a amenéles Tamouls du Sri Lanka à penser qu’ilsn’obtiendraient jamais une égalité de traitement.Le conflit a été attisé par le manque apparent derecours politique permettant de répondre auxgriefs des Tamouls.122

Les réformes constitutionnelles entreprises enAmérique latine dans les années 1980

répondaient à la pression croissante de lamobilisation de la société contre lesgouvernements militaires répressifs. La participation active d’organisationsautochtones et noires à ces mouvements a

favorisé une plus grande intégration de stratégiesantidiscriminatoires dans les campagnes desprincipaux partis politiques. Les réformesconstitutionnelles reconnaissaient la naturemultiethnique de ces sociétés et, dans certains cas, les droits particuliers despopulations autochtones.

La Colombie, Le Pérou et le Venezuela se sontdotés de quotas pour les minorités ethniques, enparticulier les populations autochtones.123

Au Brésil, plusieurs universités ont introduit desquotas pour les descendants d’Africains. Lesautorités locales, par exemple au Brésil et enUruguay, ont mis en place des départementsspéciaux pour les questions relatives auxdescendants d’Africains.124 Aucun des ces pays n’aétabli de quota politique pour les femmes issuesdes minorités ethniques, dont la représentationdans les organes législatifs continue d’êtreparticulièrement faible en Amérique latine.Néanmoins, tous les pays d’Amérique latine etdes Caraïbes ont aujourd’hui un ministère ou undépartement consacré à l’autonomisation desfemmes, et plusieurs ont un médiateur pour lesfemmes ou une personne au sein de cedépartement, spécifiquement affectée auxquestions de genre.125 Le Pérou a nommé unombudsman pour les droits humains, afin decontribuer à la mise en application des droits despopulations autochtones.

L’opportunité et l’utilité de la discriminationpositive font toujours l’objet de nombreuxdébats. Ces politiques peuvent se heurter àl’opposition acharnée des groupes anciennementprivilégiés, au point de déclencher des conflits. Et si elles ne sont pas limitées dans le temps, elles peuvent servir à renforcer la prégnance de

Encadré 5.6 Discrimination positive en Malaisie

Lorsque la Malaisie est devenue indépendante, la majoritébumiputera était gravement désavantagée sur le planéconomique par rapport à la minorité chinoise. Desinstitutions largement démocratiques donnèrent rapidementune solide majorité politique aux Bumiputeras. De gravesémeutes ethniques en 1969 ont entraîné l’adoption de laNouvelle politique économique, qui mettait fortementl’accent sur la réduction des déséquilibres économiques.Elle a introduit des quotas, des objectifs et la discriminationpositive en matière d’éducation, de propriété foncière,d’emploi dans les services publics et de propriété desentreprises cotées.

Encadré 5.5 Discrimination positive au Népal

Le Parlement intérimaire post-conflit du Népal a stipuléqu’environ un tiers des parlementaires devaient être desfemmes et que chaque groupe ethnique, de même que lacaste des Dalits jusqu’alors non représentée, devaientavoir une représentation proportionnelle à leur part dansla population totale. C’était la première fois que lareprésentation proportionnelle était introduite, avec des quotas d’inclusion des minorités aux côtés dusystème de scrutin majoritaire à un tour traditionnel(240 membres ont été élus par le système traditionnel etles 335 autres au travers du système de représentationproportionnelle). Les partis présentant des candidats auscrutin proportionnel étaient obligés de les grouper surdes listes fermées correspondant à leur part dans la lapopulation (la source étant le droit électoral). Combiné àla sélection de candidats issus de groupes minoritairessur la liste du Parti communiste du Népal (maoïste) pourle scrutin majoritaire à un tour, ce système a fait del’Assemblée constituante l’institution nationale la plusinclusive de l’histoire du Népal.

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54 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

l’identité dans la vie publique. En même temps,leurs partisans soulignent qu’une plus grandereprésentation dans la vie publique des groupeshistoriquement désavantagés n’aurait pu avoirlieu sans de telles actions. En Inde, où ladiscrimination positive existe depuis plusieursdécennies, les quotas ont réussi à créer une classemoyenne de Dalits, ce que ne connaît pas leNépal voisin.

5.6 Réforme foncièreLes OMD liés à l’extrême pauvreté et aux moyensde subsistance des populations pauvres exigentune action politique sur le front économique. Les pouvoirs publics doivent jouer un rôle actif dansla promotion d’une distribution plus équitable desactifs productifs en faveur des pauvres et des exclus– par exemple, en réformant le droit de propriété.La terre est essentielle dans les économiquesrurales car elle constitue une condition préalable à l’accès à l’eau, au droit de pacage, à la sécuritérésidentielle et à d’autres ressources. Il existe biensûr une limite naturelle à ce qu’il est possible deréaliser à travers une redistribution radicale desterres dans des pays densément peuplés comme

l’Inde. Cependant, même lorsque les terres nesont pas assez nombreuses pour que toutes lesparties de la population pauvre puissent enbénéficier, la réforme foncière peut atténuer lepouvoir de négociation monopolistique desgrands propriétaires. Comme la réforme foncièrepeut être un processus difficile et de longuehaleine, d’autres mesures doivent également être envisagées. La législation foncière devrait être revue pour

garantir des accords de location à long terme ainsique la résolution des litiges liés à l’interprétation età l’application des accords de location des terres. Là où l’État a vigoureusement mis en place uneprotection du locataire, comme au Bengale-Occidental, celle-ci a amené une augmentation dela productivité.126 Ailleurs, les groupes pauvres etmarginalisés ont dû s’engager dans des actionscollectives pour faire pression afin que leursrevendications soient reconnues.Les différents systèmes de propriété foncière

existant au sein des populations autochtones doiventégalement être reconnus. Ainsi par exemple, lanouvelle loi foncière du Vietnam prévoit despratiques d’allocation des terres qui tiennent

Mato Grosso (Brésil) : camp du Movimento dos Sem Terra (MST – le mouvement brésilien des travailleurs sans terre)sur l’exploitation agricole de Bordolandia, située entre les municipalités de Bom Jesus do Araguaia et de Serra NovaDourada. Photographe : Eduardo Martino/Panos Pictures

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 55

compte des systèmes d’utilisation communale des terres, ainsi que l’octroi de titres de propriétéconjoints afin d’inclure les femmes. Afin dereconnaître le lien entre l’identité autochtone et lesterres autochtones, le code foncier du Sarawakaccorde un statut spécial au régime fonciercoutumier des autochtones. Toutefois, lestentatives de l’État pour moderniser l’agriculture,qui ne prêtaient pas l’attention requise au contextelocal, ont eu pour effet d’empirer la situation desDayaks, la population autochtone du Sarawak.Pour aborder correctement le droit foncier, il fautdes directives de mise en œuvre qui garantissentune protection efficace des droits fonciers despopulations autochtones.

En Amérique latine, les groupes autochtonesont multiplié les actions pour demander lareconnaissance des territoires autochtones et deleurs droits fonciers collectifs. Un examen desnouvelles constitutions et codes agraires mis enplace dans un certain nombre de pays latino-américains depuis la fin des années 1980 indiquequ’ils ont obtenus des avancées considérables.127

Des programme de régularisation foncière enfaveur des populations autochtones ont été misen œuvre à travers la région, avec toutefois un

degré d’efficacité variable. Des programmes pour les communautés

rurales de descendants d’Africains, largementbasés sur la reconnaissance des droits collectifsdes communautés autochtones, ont également vule jour en Colombie, au Brésil et en Équateur.Depuis 1993, la Ley (loi) 70 reconnaît lescommunautés afro-colombiennes et vise à

protéger leurs territoires et à renforcer leursdroits. L’État brésilien reconnaît ces terres depuisla Constitution de 1988, mais dans les faits,l’octroi des titres de propriété et, donc, lareconnaissance et le soutien légal ont étésuspendus jusqu’en 2001, qui a vu les débuts de ladiscrimination positive.128 L’Équateur a voté uneloi similaire en 2004, accompagnée de politiqueset de stratégies pour le développement descommunautés afro-équatoriennes.129

L’Amérique latine a également effectué des

Encadré 5.8 Campagnes en faveur des droits fonciers en Inde

Ekta Parishad, une fédération d’organisations communautairesindiennes, a fait campagne en faveur des droits fonciers àtravers huit États de l’Inde. Elle était convaincue que l’octroi dedroits sur de petites parcelles de terrain aux personnes pauvressans terre est crucial pour briser le cycle de la pauvreté, étantdonné que cela réduirait leur dépendance vis-à-vis d’emploissalariés occasionnels. Malheureusement, même là où lespauvres avaient des droits légaux sur des terres, ils n’étaientpas à même de les réclamer.

En décembre 2005, des représentants de groupes sansterre, réunis en assemblée, se sont mis d’accord sur unensemble de revendications en matière de terres et de moyensde subsistance. Si le Gouvernement indien refusait de lessatisfaire pour octobre 2007, ils menaçaient de faire participer25 000 sans-terre à une marche (padyatra) jusqu’à Delhi pourfaire connaître leur situation critique.

Ils ont formulé trois demandes spécifiques pour mobiliser lapopulation en faveur de la mise en place de politiques foncièresplus équitables pour les groupes les plus vulnérables :

l Mise en place d’une autorité foncière nationale chargée dedéterminer clairement l’utilisation des terres en Inde,d’identifier les terres disponibles pour une redistribution etde renforcer les lois pro-pauvres

l Création de tribunaux pour résoudre rapidement les conflitsfonciers passés et futurs

l Établissement d’un système de guichet unique permettantaux agriculteurs de résoudre facilement et librement les problèmes fonciers, sans perte de temps, d’argent et d’énergie.

En octobre 2007, 25 000 sans-terre, parmi lesquels denombreux Adivasis et Dalits, se sont rassemblés et ont marchéensemble pour revendiquer leurs droits. Leur marche a durépresque un mois, sur près de 350 kilomètres, depuis Gwaliordans le Madhya Pradesh, jusqu’à Delhi. D’État en État, ils ontmis en lumière leur situation, suscitant l’intérêt du public et desmédias pour leur cause.

Confronté à l’attention et à la pression croissantes du public,le Gouvernement a accepté de discuter avec les représentantsdes sans-terre. Le Ministre du Développement rural s’estprésenté devant l’assemblée des sans-terre et a annoncé que legouvernement allait donner suite à leurs revendications. Unecommission nationale pour la réforme foncière a été créée pourélaborer les politiques. Elle est aujourd’hui présidée par lePremier ministre.

Source : Christian Aid (à paraître) 99

Encadré 5.7 Le combat contre le racismeinstitutionnalisé au Brésil

Au Brésil, le pouvoir croissant des groupes afro-brésiliens au sein du Parti des travailleurs a contribué àla promotion explicite de l’objectif d’égalité raciale. Au milieu des années 1990, la Président Cardoso apubliquement reconnu l’existence du racisme dans lepays, ouvrant la voie à des politiques publiquess’attaquant au problème.

Sous la direction de Lula da Silva, le Parti destravailleurs est arrivé au pouvoir en 2002, porté par sonprogramme « Brésil sans racisme ». Il affirmait que lespolitiques de promotion de l’égalité des chances et detraitement ne devraient pas être limitées à l’activité decertains organismes au sein de l’administration maisrelevaient de la responsabilité du gouvernement tout entier.

En 2003, un secrétariat spécial pour la promotion del’égalité raciale a été mis en place en tant qu’organeconsultatif auprès de la présidence, avec pour missionde promouvoir l’égalité raciale et de protéger les droitsdes groupes ethniques et raciaux.

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56 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

progrès considérables en ce qui concerne lareconnaissance légale des droits fonciers desfemmes. Elle a été rendue possible grâce à lacombinaison de la mobilisation des femmes elles-mêmes, de la transition démocratiqueintervenue dans de nombreux pays de la région,et de l’impulsion donnée par la Convention surl’élimination de toutes les formes dediscrimination à l’égard des femmes.

5.7 Promotion des moyens d’existence, d’untravail décent et de l’accès au créditL’OMD 1 – la réduction de la pauvreté – a étéamendé en 2005 pour inclure l’accès à un « emploi productif et décent », étant donné qu’ilsemble évident pour la plupart des gens que lapauvreté ne peut être structurellement combattuesans la création en parallèle de possibilités d’unemploi décent. La génération d’emplois durablesincombe en fin de compte au cadre politiquemacroéconomique. Toutefois, les gouvernementspeuvent agir pour rendre le fonctionnement desmarchés de l’emploi plus équitable, en imposant unsalaire minimum et des normes de base pour letravail dans tous les secteurs.

De nombreux pays se sont dotés d’une largeprotection civile contre la discrimination ainsique d’une législation du travail spécifique, maisleur mise en œuvre et leur application demeurentinsuffisantes.130 Les ministères et organes decontrôle compétents sont insuffisammentfinancés et ont un niveau d’expertise limité. Le recours à des poursuites civiles pour forcer lamise en application de la loi ou pour indemniserles victimes de discrimination reste peu répandudans la plupart des pays en développement, la plupart des personnes pauvres travaillant dansl’économie informelle, ce qui les tient en dehors

de la législation du travail et de tout recoursjudiciaire possible. Les organisations de travailleurs informels

constituent des modèles intéressants pourl’établissement d’un dialogue entre les employeurs,les travailleurs informels et les pouvoirs publics, ce que les syndicats plus traditionnels n’ont souventpas réussi à réaliser. Elles sont égalementparvenues à obtenir une protection légale de leurs membres, en dépit de leur statut informel.En Orissa (Inde), des organisations dedéveloppement ont travaillé aux côtés de groupestribaux démunis, contraints à la servitude pourrembourser leurs dettes, afin de les aider à profiterdes ressources offertes dans le cadre desprogrammes publics de réhabilitation et às’organiser pour négocier avec leurs propriétaires.Sankalp, dans l’Uttar Pradesh, aide l’organisationd’entraide des mineurs d’origine tribale àconstituer des coopératives de travailleurs et àintroduire des demandes de concession minière,en tant qu’instrument de lutte contre le travail desenfants et la servitude pour dette. Dans cesrégions, les efforts de mobilisation sociale ontaussi amené un plus grand nombre d’enfants àfréquenter l’école et des adultes à entreprendredes cours d’alphabétisation. Les organisationsd’entraide ont également encouragé ces groupes à s’impliquer plus activement dans la gestion des écoles locales afin de contrer l’absentéisme des enseignants.Il est essentiel de renforcer les compétences et la

productivité des groupes marginalisés pour les aiderà échapper à la pauvreté. La Banqueinteraméricaine de développement a financé desprogrammes de formation et d’emploi « axés surla demande » dans plusieurs pays latino-américains afin de corriger les mauvaises

Tableau 5.1 Droits fonciers collectifs dans les nouvelles constitutions et codes agraires

Reconnaissance des revendications Reconnaissance des Reconnaissance Possibilité de territoriales des populations autochtones terres collectives du droit privatisation des

Pays Constitution Code autochtones coutumier terres collectives

Bolivie 1994 1996 Oui Oui NonBrésil 1998 Non Non Non NonChili Non Oui (1993) Non Non Oui (1979); Non (1993)Colombie 1991 1994 Oui Oui NonCosta Rica Non – – – –Équateur 1998 1994 Oui Oui Oui (1994); Non (1998)Salvador Non – – – –Guatemala 1998 – Oui Oui NonHonduras Non 1992 Oui Non –Mexique 1992 – Oui Partiel Oui Nicaragua 1987 – Oui Oui NonPérou 1993 1995 Oui Oui Oui

Source Deere et León (2001)127

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 57

performances des jeunes « à faible revenu et àrisque élevé » sur le marché du travail. Cesprogrammes se présentent sous la forme decourts stages de formation orientés vers lescompétences et pratiques professionnelles debase, suivis par des stages internes permettantaux participants d’acquérir une précieuseexpérience dans un emploi du secteur formel. Les évaluations indiquent que, même si lesimpacts de ces programmes varient selon le pays,les femmes et les jeunes en ont tiré profit grâce àune probabilité accrue de trouver un emploi. Il yavait également des signes d’un impact favorableen termes de qualité de l’emploi parmi lespersonnes ayant trouvé un travail. On aégalement pu observer que la premièreexpérience professionnelle était très importantepour les performances professionnelles à longterme et le potentiel de rémunération.131

La conception et la portée des services devulgarisation agricole pourraient êtreconsidérablement améliorées afin de mieuxsatisfaire les besoins des agriculteurs autochtones.Les agricultrices en particulier sontinvariablement exclues de ces services.132

La recherche s’est prononcée en faveur d’une plus vaste prestation publique des services devulgarisation agricole mais elle suggère qu’uncertain degré de ciblage pourrait être nécessaire pouradapter les services aux besoins locaux.133 Le ciblagegéographique ne répondrait toutefois qu’à unepartie du problème si les services de vulgarisationétaient utilisés de manière disproportionnée parles groupes majoritaires vivant dans les régions où sont concentrées les minorités ethniques. Les interventions et programmes spécifiquesciblant les zones géographiques pauvres doivent être correctement adaptés aux problèmes et aux besoins des ménages issus desminorités ethniques.

Les initiatives de microfinance ont constitué desprogrès dans la prestation des services financiers auxpersonnes pauvres. De nombreuses organisationsnon gouvernementales et même des pouvoirspublics (par exemple en Inde) ont participé à desprogrammes de prêt destinés aux pauvres.

Toutefois, la majeure partie d’entre elles sontconcentrées en Asie. En Asie du Sud, les prêts àdes groupes semblables à ceux inventés par laGrameen Bank au Bangladesh, et le modèle degroupe d’entraide expérimenté en Inde, par MYRADA (Mysore Resettlement andDevelopment Agency – Agence de réinstallation etde développement de Mysore) et PRADAN(Professional Assistance for Development Action –Assistance professionnelle pour l’action en faveurdu développement) se sont effectivement révélés

plus efficaces pour atteindre les personnespauvres et les groupes exclus que les prêtsindividuels.134 Une étude menée en Inde a révéléque, dans le cadre des prêts à des groupes, les personnes pauvres constituaient 43 % desemprunteurs, contre seulement 15 % pour lesprêts individuels. Quelque 35 % de leursmembres étaient issus de groupes dalits etadivasis, contre 32 % pour les programmes deprêt individuel. Ils parviennent aussi nettementmieux à atteindre les femmes : 95 % contreseulement 35 % pour les programmes de prêt individuel.

Le type d’approche fondée sur les groupes qui est utilisé peut également faire une grande

Une fillette de la région de Quibdó, principalementpeuplée de descendants d’Africains, dans le départementdu Chocó en Colombie. Le programme sur la nutrition etla sécurité alimentaire du Fonds pour la réalisation desOMD travaille avec les écoles pour que les enfantssachent ce qu’est une alimentation équilibrée et y aientaccès. Photographe : David Parra

Encadré 5.9 Les travailleurs informels s’organisent pourrevendiquer leurs droits

En Inde, l’Association des travailleuses indépendantes (Self-Employed Women’s Association) travaille depuis lesannées 1970 aux côtés des femmes employées dans l’économieinformelle, tant comme salariées que comme indépendantes.Elle combine une approche syndicaliste lorsqu’il s’agitd’engager des négociations collectives au nom de sesadhérentes, avec une approche coopérative promouvant lesstratégies de subsistance.

Forte de plus de 700 000 adhérentes réparties dans uncertain nombre d’États indiens, elle fait pression sur legouvernement pour obtenir la reconnaissance légale des droitsde ses adhérentes, y compris à travers une loi leur accordant unsalaire minimum. Elle a joué un rôle important dans l’adoptionpar l’État de la loi sur la sécurité sociale pour le secteur nonorganisé. Elle est également active au niveau international et estl’un des membres fondateurs d’un réseau mondial detravailleuses, Women in Informal Employment: Globalizing andOrganizing (WIEGO – Les femmes dans l’emploi informel :mondialisation et organisation), qui collecte des données, mènedes recherches et défend, en leur nom, les droits de sesadhérentes. Elle a fait partie des forces vives qui ont poussé àl’adoption de la Convention sur le travail à domicile de l’OIT.

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58 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

différence au niveau des résultats. Des étudesmenées en Asie du Sud indiquent que lesorganisations qui se spécialisent dans uneapproche minimaliste de la microfinance font peupour autonomiser leurs clients, qui sont souventdes femmes, en termes de participation à leurcommunauté ou à la vie politique.135

Au Bangladesh, on a pu observer que les stratégiesde groupes axées sur l’épargne ont mieux réussi àavoir un impact sur la participationcommunautaire et politique que les approchestraditionnelles axées sur le crédit.136 Pour que lesclients puissent sortir de la pauvreté, il est importantd’associer la microfinance à une série de servicesauxiliaires, tels que la formation aux moyens desubsistance et l’accès au marché.

5.8 Investissement dans les infrastructures etle développement régionalLa concentration spatiale de la pauvreté et del’exclusion sociale n’a de sens que si certainesrégions d’un pays sont confrontées à descarences de développement imbriquées – entermes d’infrastructure, de services, de marchés– qui les distinguent du reste du pays. Il peuts’agir de régions rurales éloignées ou debidonvilles urbains. Les approches de groupesnationales, sectorielles ou ciblées sont peususceptibles d’avoir un impact sur leur situation.Une approche plus globale du développement deces régions est nécessaire pour s’attaquer auxcauses structurelles des désavantages ainsi qu’auxproblèmes immédiats. Cela peut comprendre lesroutes, les transports publics et les services auxparticuliers tels que l’eau, l’assainissement,l’électricité et les services sociaux.

L’approche basée sur le développement dezones est plus efficace car elle permet aux Étatsd’agir simultanément sur un certain nombred’inégalités et de profiter des synergies ainsiengendrées. Par exemple, la constructiond’infrastructures de transport ne contribue passeulement aux activités économiques et à laréduction de la pauvreté, elle améliore aussil’accès des femmes et des enfants aux écoles etaux services sanitaires. Une approche décentraliséeet une attention à la gouvernance locale sont deplus en plus importantes pour le développementbasé sur les zones, étant donné les limitationsévidentes des systèmes centralisés et partant duhaut vers le bas, de planification, budgétisation,mise en œuvre et administration.

Au Vietnam, le projet de développement de lacommunauté des montagnes du Nord est unprojet multisectoriel décentralisé qui vise àsoutenir 1 million d’habitants ruraux pauvres,dont 85 % issus de groupes ethniques

minoritaires, dans l’une des régions les pluspauvres du pays. Le projet a adopté une approcheparticipative pour la construction desinfrastructures et la mise en place des servicessociaux de la région : écoles, postes sanitairescommunaux, routes, amélioration del’approvisionnement en eau, nouveaux systèmesd’irrigation et services de vulgarisation agricole.Les évaluations de la première phase indiquentque le revenu moyen des ménages a plus quedoublé entre 2004 et 2007.137 Le projet estaujourd’hui entré dans sa deuxième phase.

La proposition de Projet de développementdes populations autochtones du Mexiqueconstitue un autre exemple de développementbasé sur des zones dirigé par des groupessocialement exclus. Il regroupe des sous-projetsdans les domaines de l’eau, de l’assainissement,de l’électrification et des routes rurales. De plus,la participation des populations autochtones seraintégrée dans le projet afin de « construire uncapital social » pour le développement.

Les groupes autochtones ont souvent étévictimes de réinstallations forcées, qui ontperturbé leur vie, pour laisser le champ libre à desprojets infrastructurels de grande envergure ausujet desquels ils ne sont jamais consultés et dontils sont peu susceptibles de tirer profit. Lespopulations autochtones constituent un casparticulier en matière de réinstallation en raisonde leur profond attachement à leurs terresancestrales. Dans beaucoup de cas, des projets pluspetits peuvent engendrer des rendements plusélevés. Néanmoins, les grands projetsinfrastructurels peuvent être mis en œuvre si leursavantages sont jugés plus importants que leurscoûts. Si la réinstallation est vraiment nécessaire,elle doit être organisée en consultation directe avecles personnes concernées et être planifiée demanière à améliorer leurs conditions de vie, leur sécurité physique, leur capacité productive etleurs revenus. Ces personnes doivent se voir offrirune part directe et proportionnelle des avantagesdu projet principal. Dans les projets d’irrigation,par exemple, ils pourraient recevoir encompensation des titres de propriété et un droitd’utilisation des terres irriguées. Dans certainspays, les groupes autochtones ont été formés à lagestion des forêts et à la fonction de gardesforestiers, et ils continuent de vivre dans la zone de protection de la forêt créée à l’occasion de laconstruction d’un complexe hydroélectrique.

5.9 Étendre les services de base à tous les groupes Le travail reste l’avoir le plus abondant desgroupes pauvres et socialement exclus.

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 59

L’investissement dans leur capital humain et leurscapacités humaines s’est avéré non seulement unmoyen de contribuer à leur survie et à leur bien-être, mais aussi une voie importante pouréchapper à la pauvreté et à l’exclusion sociale. Des tels investissements sont au cœur des OMD sociaux.

Assurer un accès physiquePour rendre les services sociaux plus inclusifs, il faudra agir sur les diverses contraintes quiexcluent les pauvres. L’accès physique aux services constitue le premier défi des politiques.Une bonne combinaison pour définir la forme etle type de services consisterait à amener lesservices jusqu’aux zones mal desservies et àvigoureusement mobiliser la demande. En Inde,le système de garantie éducative du MadhyaPradesh prévoit que l’État installera une écoleprimaire pour les enfants vivant dans des zonesoù aucune école ne se trouve à moins d’unkilomètre, dans les 90 jours suivant la réceptionde la demande d’une communauté. Lescommunautés remplissant les conditions requisesdoivent compter au moins 40 apprenants dans latranche d’âge des 6-14 ans, mais dans les zonestribales 25 apprenants suffisent. Les évaluationsindiquent que les zones tribales ont bénéficié demanière disproportionnée de cette disposition etqu’elles ont connu une forte réduction dunombre d’enfants non scolarisés.

En ce qui concerne les soins de santé, les Étatsdoivent trouver des moyens de mettre desprofessionnels qualifiés à la disposition desgroupes exclus, en particulier en milieu urbain.Gonoshasthya Kendra, une ONG du Bangladeshspécialisée dans la santé, a adopté le modèlechinois du « médecin aux pieds nus » pourformer du personnel paramédical féminin à laprestation de services médicaux de proximité auxpersonnes pauvres. Un succès incontestable a étéremporté au niveau de la réduction de lamortalité maternelle dans les zones ainsidesservies. En Indonésie, les médecins étaientastreints à un service obligatoire de cinq ans dansdes centres de santé, ou moins long dans leszones reculées, avant de pouvoir obtenir un postelucratif dans la fonction publique. Ce système apermis d’augmenter de 97 % en moyenne lenombre des médecins dans les centres de santéentre 1985 et 1994, avec des gains de plus de 200 % dans les zones rurales éloignées.

La Malaisie et le Sri Lanka ontsubstantiellement réduit leur taux de mortalitématernelle en assurant une large disponibilité enzone rurale, de sages-femmes professionnelles

compétentes et d’infirmières sages-femmeschargées de la supervision pour assister lesaccouchements à domicile ou dans les petitshôpitaux ruraux. En Afghanistan, des cliniquesitinérantes visitent les zones faiblement peupléespour dispenser des soins localement ou aider àtransporter les patients vers de meilleursétablissements, si besoin est. Au Bangladesh, desmoyens de transport ou des indemnités detransport sont utilisés pour permettre les visitesd’urgence à l’hôpital.

En Chine, la mortalité maternelle a fortementdiminué dans les provinces rurales plus pauvresde l’Ouest, suite à des interventions ciblées del’État.138 L’amélioration la plus remarquable a étéenregistrée au Yunnan, l’une des provinces lesplus pauvres et les plus reculées, où le taux demortalité maternelle est passé de 149 pour 100 000 naissances vivantes en 1989 à 101 en1998.139

Rendre les soins de santé abordablesL’accessibilité financière constitue le second défides politiques. A la lumière des conséquencesdésastreuses de l’imposition d’un ticketmodérateur, un certain nombre de pays africainsl’ont aujourd’hui aboli ou progressivementéliminé, et les remplaçant par des fonds communspour combler les pertes de revenus (par exemple,des systèmes de subventions publiques,d’assurance et de paiement anticipé). Il en arésulté une augmentation substantielle del’utilisation des services, en particulier par lespauvres. Ainsi par exemple, en Ouganda, lasuppression du ticket modérateur a entraîné uneaugmentation soudaine, massive et soutenue del’utilisation des services sanitaires.140 Des réactions

Inde, district de Jaipur au Rajasthan : dans le village de DhaniBagaria, une femme dalit applique une nouvelle couche de bouedevant sa maison, tandis qu’une jeune fille ramasse du bois dechauffe. Photographe : Mikkel Ostergaard/Panos Pictures

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60 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

tout aussi positives ont été signalées en relationavec l’abolition des droits scolaires au Kenya et auMalawi. La mise en commun des ressources estcapable de renforcer la solidarité au sein dusystème, permettant un certain degré desubvention croisée.

« Le prépaiement et la mise en communpermettent d’institutionnaliser la solidaritéentre les riches et les moins nantis, et entre lesmalades et les bien-portants. Ils lèvent lesobstacles à l’utilisation des services etréduisent le risque que les personnes pauvresaient à supporter des dépenses catastrophiqueslorsqu’elles sont malades. Enfin, ils constituentun moyen de réinvestir dans la disponibilité, la diversité et la qualité des services. »141

Des services adaptés et représentatifs L’accroissement de la demande de serviceséducatifs et sanitaires a attiré l’attention surl’importance de l’investissement dans la qualité etla pertinence des services, en particulier pour lesgroupes socialement exclus. Le recrutement et la

formation de prestataires de services issus de cescommunautés est un excellent moyen de signalerl’engagement de l’État en faveur de services plusinclusifs, tout en aidant à combler l’écart socialentre les services destinés à l’ensemble de lapopulation et aux groupes exclus. C’est aussi unmoyen d’impliquer les parents et d’obtenir lesoutien de la communauté. La Mongolie aexpérimenté la mise en place d’unités préscolairesutilisant les gers (un type de yourte) traditionnelscomme centres de formation pendant l’été. Lesenseignants sont des nomades, se déplaçant avecleur famille et leurs animaux d’élevage, en mêmetemps que les groupes de familles participant auxprogrammes d’éducation préscolaire. En Inde, leRural Litigation and Entitlement Kendra (RLEK),une organisation qui s’occupe des litiges et desdroits en milieu rural, a mis au point, encollaboration avec les Van Gujjars (des nomadesautochtones de la forêt) de l’Uttaranchal, uneapproche innovante où les enseignants locauxmigrent avec la communauté et suivent unprogramme scolaire culturellement adapté.

Dans les pays où la mobilité des femmes dans

Dans la région de Tigray au Nord de l’Éthiopie, un travailleur social collectant des données et des informations sur lasituation sanitaire de la communauté. Le rôle des travailleurs sociaux ruraux est crucial pour s’assurer que tous lescitoyens sont bien pris en compte dans les interventions nationales visant à réaliser les OMD. Photographe : Sophiede Caen, Fonds pour la réalisation des OMD

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 61

le domaine public est réduite, l’utilisationd’agents de santé communautaires de sexeféminin a permis de faire de grands progrès dansle domaine de la santé maternelle. Des initiativesau Pakistan, au Népal et au Bangladesh ontsensibilisé les femmes aux conditions de santé,aborder les tabous et créer une demande pour lesservices de santé reproductive, permettant auxfemme de revendiquer leurs droits en matière desanté. Au Népal, où les taux de mortalitématernelle et infantile étaient extrêmementélevés, les travailleuses de la santé ont joué unrôle essentiel dans l’amélioration des résultatssanitaires, grâce à leur proximité avec lacommunauté. Les services de santé dispensésdans la langue locale ou par des doctoresses ontégalement prouvé leur efficacité.

L’action publique et la mobilisationcommunautaire peuvent jouer un rôleimportant dans l’extension des services auxgroupes socialement exclus. Au Mexique, parexemple, la mobilisation de groupes de femmesconsacrés à la santé reproductive, encollaboration avec un institut de recherche quise concentrait sur l’analyse budgétaire, a permisla mise en évidence d’inégalités de longue datedans le soutien fédéral aux États les pluspauvres, où les taux de mortalité maternellesont les plus élevés. En Bolivie, en Inde et auNépal, la mobilisation communautaire à traversdes groupes participatifs de femmes a aidé àaméliorer l’issue des grossesses dans lescommunautés rurales pauvres. Les diversesinitiatives comprenaient la créationd’organisations de femmes, le développementdes capacités des femmes à identifier lesproblèmes et à déterminer leur priorité, et laformation de membres des communautés auxtechniques d’accouchement sans risque.

En Bolivie, la mobilisation communautaire aentraîné le déclin de la mortalité périnatale etl’augmentation de la part des femmesbénéficiant de soins prénataux et commençant àallaiter dès le premier jour suivant la naissance.Au Népal, la même approche a entraîné laréduction de la mortalité néonatale et a mêmeeu un impact plus général et statistiquementplus important sur le taux de mortalitématernelle. Dans le cas de l’Inde, où elle a étémenée dans deux États présentant une grandeproportion de groupes adivasis, l’interventionest associée à un déclin sensible du taux demortalité néonatale.

Étendre l’accès à l’éducationDans le domaine de l’éducation, l’augmentationdu nombre des enseignantes a remporté un

certain succès au Pakistan et en Afghanistan, toutl’accompagnement des filles sur le chemin del’école afin d’assurer leur sécurité physique maisaussi de satisfaire la conception conservatrice des« convenances ».142 Pour les filles plus âgées, lesinstallations sanitaires scolaires (y compris l’eaucourante et l’intimité) est un véritable problème.La présence de toilettes fermées peut aider à fairechanger d’avis les parents qui pensent que leursfilles ne doivent pas se rendre à l’école en périodede menstruation. Dans les communautés diviséesen castes, partager un robinet d’eau à l’école oudéjeuner ensemble peut aider à combattre lescomportements discriminatoires appris à l’écoleou au sein de la communauté.143

Encadré 5.10 Mobilisation autour de la santé maternelle au Mexique

Dans les années 1990, au Mexique, des groupes de femmes sesont ralliés à la cause de la mortalité maternelle, avec l’appuid’initiatives internationales. En 2001, l’État a lancé le programmeArranque Parejo en la Vida (APV - un départ équitable dans lavie), qui ciblait les femmes en âge de procréer et les enfants demoins de deux ans, dans le cadre de son engagement vis-à-visdes OMD. Le taux de mortalité maternelle est néanmoins restéélevé au sein des groupes autochtones.

En 2002, une évaluation de la politique de l’État relative à lasanté maternelle a été demandée à Fundar, un institut de recherchespécialisée dans l’analyse budgétaire. Il a formé une coalition avecun groupe assez diversifié d’organisations de femmes, dontcertaines spécialisées dans la santé reproductive et d’autres dans lesrelations avec les médias. Un partenaire important de l’organisationétait Kinal Antzetik (« terre des femmes » en langue maya).

Les recherches menées par la coalition ont révélé que les tauxde mortalité maternelle variaient fortement selon les États et queles fonds publics n’étaient pas dépensés dans les zones où lestaux étaient les plus élevés. Même après avoir mené avec succèsune campagne pour une plus grande allocation en faveur duprogramme APV dans le budget de 2003, ils ont trouvé d’énormesdifférences dans les dépenses entre les États. Par exemple, en2003, le Chiapas (avec un taux de mortalité maternelle de 93,2pour 100 000 naissances vivantes) n’avait reçu que 980 192pesos pour le programme APV, alors que le Nuevo Leónbénéficiait de 23 968 069 pesos avec un taux de 28,5.

De plus, les fonds alloués n’étaient pas tous dépensés : auChiapas, qui avait reçu sa plus forte allocation budgétaire en2003, seuls 45 % des ressources avaient été utilisés. La coalitions’est alors basée sur les conclusions de ses recherches pour fairecampagne en faveur d’améliorations des politiques, tandis lesrésultats étaient diffusés dans les médias et au cours de réunionspubliques.

Le succès de la campagne de la coalition tient, en partie, à sadimension internationale ; le fait que les Nations Unies se soientplusieurs fois engagées en faveur de la réduction de la mortalitéinfantile, et que le gouvernement mexicain ait signé plusieursconventions internationales, donnait à la cause une légitimité à lafois sociale et politique, et fournissait à la coalition un leviermoral face au gouvernement. Cette campagne a permis d’inscrirela question à l’ordre du jour politique et, en 2009 et 2010,plusieurs États ont pu constater un déclin sensible de leur taux demortalité maternelle (voir Encadré 5.11, page 62).

Source : Layton et al. (2007)29

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62 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

La nécessité de délivrer une éducationbilingue aux groupes minoritaires est aujourd’huide plus en plus reconnue. L’enseignement est audépart assuré dans leur langue maternelle, avantde passer progressivement à la langue principaledu pays. Les études suggèrent que la mise enœuvre d’un tel modèle éducatif peut améliorer

les performances des groupes dont la langue estminoritaire, augmenter le taux de scolarisation,améliorer les résultats des élèves, et réduire l’écartd’instruction entre les garçons et les filles, un ensemble de facteurs contribuant à favoriserl’apprentissage de la langue principale.

Encadré 5.11 Réduire la mortalité maternelle au Mexique

La Figure 5.1 indique une réduction importante de lamortalité maternelle dans l’État du Chiapas, au Mexique,entre 2009 et 2010. Elle a été rendue possible grâce àplusieurs politiques menées au niveau de l’État :

Travailler avec des sages-femmes autochtonesAu Chiapas, 56 % des grossesses/accouchements sontpris en charge par des sages-femmes (principalementautochtones). La collaboration avec des sages-femmesautochtones s’est révélée cruciale pour réduire lamortalité maternelle : sans leur participation auxinterventions, il y a très peu de chance que les femmesautochtones fassent appel aux services de santé. l Un millier de sages-femmes parmi les plus actives ont

bénéficié d’une formation centrée sur divers aspects dela santé reproductive, tels que l’accouchement dans debonnes conditions d’hygiène et la détection des «signaux d’alarme ».

l Ces femmes ont également reçu une trousseobstétrique de base comprenant un stéthoscope, desgants et des ciseaux spéciaux pour couper le cordonombilical, ainsi qu’un téléphone mobile connectégratuitement à leur hôpital ou clinique le plus proche.

l Un nouvel « Hôpital des cultures » a été inauguré. Ilpropose des formations régulières alliantconnaissances scientifiques et savoir traditionnel.Cette initiative a amené les médecins à accepter et àutiliser la pratique autochtone traditionnelle del’accouchement vertical.

l 17 « Maisons de la maternité », employant aussi biendes sages-femmes autochtones que des médecins, ontété créées. Au lieu de retourner dans leur village,

les femmes peuvent y séjourner lorsque leuraccouchement approche affin de garantir qu’ellespuissent se rendre à hôpital en temps voulu.

Travailler avec les réseaux communautairesAu cours des cinq dernières années, des réseaux decomités sanitaires ont vu le jour avec la participation desmaires de 118 municipalités. Ces comités sont informésdes grossesses dans leur région.l Quelque 3 000 auxiliaires rurales de santé, élues par

leur communauté et pratiquant leur activité depuisplusieurs années, ont reçu une formation et unetrousse de santé. Elles identifient les femmes de lacommunauté qui sont enceintes et leur fournissent lesinformations dont elles ont besoin pour vivre unegrossesse sans risque.

l Elles entretiennent des relations avec les ONG localespour s’assurer que les informations et les conseilsdispensés sont cohérents.

Travailler avec les hôpitauxQuelque 50 % des admissions à hôpital concernent les soins obstétriques. Entre 2009 et 2010, plus de 150 millions de dollars ont été investis dans lesinfrastructures hospitalières.l 17 nouveaux hôpitaux ont été construits, équipés

chacun de 60 lits, dont certains sont réservés auxfemmes. Les hôpitaux seront épaulés par des cliniquesde plus petite taille, les Basicos Communitarios,qui traiteront et suivront les cas moins urgents.

l 138 centres de santé ont été ouverts à travers l’État, dotés chacun d’un médecin résident, du lundi au vendredi.

l Pour les transferts vers l’hôpital, les autorités de l’Étatont acheté une ambulance pour chaque municipalité.Des hélicoptères de l’État sont parfois utilisés pour lessauvetages d’urgence en milieu rural.

Travailler au niveau nationall Le Secrétariat à la Santé a travaillé en collaboration

avec le Système pour le développement intégral de lafamille afin de garantir que, dans les zonesautochtones, toutes les femmes reçoivent un colisnutritionnel contenant des vitamines, du fer etd’autres suppléments. Cette mesure a contribué àl’amélioration de la santé des nouveau-nés et à laréduction de la mortalité infantile.

l Il existe un consensus national à propos de « l’Accordsur les soins obstétriques d’urgence », qui obligetoutes les cliniques à prendre gratuitement en chargeles cas d’urgence relatifs à la grossesse, quelle quesoit la couverture d’assurance de la patiente.

l Cet accord est soutenu depuis 2009 par le programmenational « Grossesse et santé », qui permet auxfemmes d’accoucher gratuitement à hôpital si elles s’ysont rendues pour des soins prénataux.

Source Entretien avec le Secrétaire à la Santé de l’État mexicain du Chiapas (James Gómez Montes), 31 juillet 2010

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Vera Cruz Oaxaca État de Mexico Chiapas

◆ Taux de mortalité maternelle en 2008◆ Taux de mortalité maternelle en 2009

Figure 5.1 Taux de mortalité maternelle dansquelques états du Mexique

Source Subsecretaria de Prevencion de la Salud (2010)‘Strategia Integral para Acelerar la reduccion de laMortalidad Materna en Mexico’, présentation PowerPoint

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 63

L’État brésilien a voté une loi (10.639) surl’enseignement de l’histoire de l’Afrique et desAfro-brésiliens. Il a également lancé unprogramme national pour remplacer les anciensmanuels scolaires véhiculant des stéréotypesracistes par de nouveaux promouvant la diversitéde la société brésilienne. En Inde, l’inclusiond’exemples de Dalits célèbres dans les manuelsscolaires est progressivement reconnue comme unoutil contribuant à promouvoir la dignité de cettecaste et combattant les préjugés. En général, la communication en faveur du changement decomportement est un instrument en général sous-utilisé, qui peut pourtant avoir un grand impact,notamment dans les écoles, les institutionssanitaires et la fonction publique.

5.10 Une protection sociale inclusiveLa protection sociale s’est avérée un élémentcritique des politiques de développementrépondant aux crises financières récurrentes quiont accompagné le processus de mondialisation.Les politiques de protection sociale en faveur despersonnes pauvres comprennent les transfertssociaux (en espèces et en nature) ainsi que lesprogrammes de travaux publics, de repas scolaireet les systèmes d’assurance communautaire. Selonles estimations, plus de 150 millions de ménageset environ un demi-milliard de personnesbénéficient de ces politiques dans les pays pauvres.144

La littérature actuelle sur la protection socialesouligne son potentiel de redistribution et sasynergie avec les objectifs de développement.145

Ce potentiel de redistribution repose sur sacapacité à atteindre les groupes pauvres etmarginalisés, ainsi que sur les mécanismes conçuspour éviter le coulage et les coûts administratifsélevés. Bien pensées, les mesures de protectionsociale contribuent à rendre les efforts dedéveloppement plus inclusifs dans toute une sériede domaines. En effet, pour autant qu’ellesciblent adéquatement les personnes les pluspauvres, ces mesures sont susceptibles debénéficier aux groupes socialement exclus étantdonné que ceux-ci représentent une partdisproportionnée des pauvres.

Les systèmes ciblés peuvent atteindreefficacement les groupes socialement exclus.Tel est par exemple le cas du programme mexicainde transfert monétaire conditionnel,Oportunidades, où les femmes issues de ménages àfaible revenus bénéficient d’un transfert mensuelen espèces à condition que leurs enfants soientscolarisés et suivis par des centres de santé. Leprogramme étant correctement ciblé, il a profité en

très grande partie aux populations autochtones,même s’il n’atteint toujours pas certaines descommunautés autochtones les plus pauvres, qui enont le plus besoin tout en étant les plus difficiles àatteindre. Les enfants autochtones des familles oucommunautés bénéficiant de transferts sont toutaussi susceptibles de poursuivre leur scolarité queles autres enfants, et le programme a réussi àcombler l’écart entre les sexes et les différentesethnies dans le système éducatif.

Au Brésil, 21,7 % de familles descendantd’Africains (sur la base de l’appartenance racialedu bénéficiaire) reçoivent la Bolsa Familia(subvention familiale), contre 8,7 % de famillesblanches, ce qui reflète les différences raciales enmatière de pauvreté extrême.146 Les transfertsmonétaires non conditionnels, tels que lessubventions pour l’éducation des enfants enAfrique du Sud ou les pensions sociales au Brésil,en Afrique du Sud, en Namibie au Lesotho et auBotswana, ont également ciblé avec efficacité lesgroupes pauvres et exclus. La pension vieillessesud-africaine est considérée comme leprogramme social qui cible et atteint avec la plusgrande efficacité les groupes économiquementvulnérables et elle constitue la principale sourcede revenus pour les personnes âgées qui, sans elle,vivraient dans l’indigence la plus complète.

En Inde, le système national de garantie del’emploi, récemment entré vigueur, est unprogramme auto-ciblé comportant de solidesaspects inclusifs. Il stipule qu’un tiers des emploissoient réservés aux femmes et que des crèchessoient mises en place lorsque plus d’un nombredéterminé de femmes participent à un système. Ilprévoit également que certains projetsd’infrastructure soient utilisés pour promouvoirl’amélioration des terres et d’autres actifs desgroupes socialement marginalisés. Les premièresévaluations confirment un niveau élevé de

Enfants descendants d’Africains des zones côtières dudépartement du Chocó, en Colombie, où la mortalitéinfantile est deux fois plus élevée que la moyenne nationale,et où 60 % des enfants de 1 à 4 ans souffrent d’anémie. Le Chocó affiche les indicateurs sociaux les plus faibles etabrite des milliers de personnes déplacées à l’intérieur dupays suite au conflit national. Photographe : David Parra

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64 Les OMD en tant qu’instrument de justice sociale : parvenir à l’égalité des chances

participation des femmes, des Dalits et des Adivasis.Ce système fonctionne le mieux dans les zones oùdes organisations de la société civile sont capablesde mobiliser les groupes habilités à y participer.

Impacts favorables directs et retombéesLa littérature actuelle sur la protection sociale meten évidence non seulement la capacité desprogrammes bien conçus à toucher certains desgroupes les plus exclus, mais aussi leur potentielde génération d’une série d’effets favorablesdirects aux retombées multiples. Cet impact plus large sur le développement aide à compenser certaines des préoccupations relatives à l’accessibilité financière des politiquesde redistribution.

Par exemple, le recours aux travaux publicspour la construction d’infrastructures locales s’estrévélé porteur d’importants effets multiplicateurssur l’économie locale et l’accès aux servicessociaux. Les pensions octroyées aux personnesâgées en Afrique du Sud et en Namibie ont eupour conséquence indirecte d’améliorer lanutrition et l’éducation des enfants, ainsi que laparticipation des femmes issue des ménagesafricains à la population active.147 La régularité dupaiement des pensions a également facilité l’accèsau crédit et stimulé le commerce local.

Les programmes de protection sociale sontégalement susceptibles de prendre en charged’autres aspects de l’exclusion sociale. En Inde,dans l’Andhra Pradesh, la volonté de l’État des’engager, aux côtés de groupes d’entraideféminins, dans la gestion d’un programmenational de repas scolaires a permis à denombreuses femmes des castes inférieures detrouver un emploi salarié en tant que cuisinières,et à de nombreux enfants de ces même castes debénéficier du programme.

Dans les zones rurales du Malawi, unprogramme de transfert monétaire destiné auxfemmes et fonctionnant à l’aide de comptesbancaires a distribué aux bénéficiaires des cartesà puce contenant leurs informations personnelleset bancaires. Ce système a permis une certaineinclusion financière de milliers de famillesrurales, jusqu’alors exclues des services financiers.Les évaluations ont également révélé que lesfemmes qui recevaient des papiers d’identité oudes cartes à puce se sentaient fortementautonomisées par la reconnaissance légale que cesdocuments représentaient. Au cours de réunionsdes groupes de discussion, plusieurs femmes ontaffirmé avec ardeur que, avant le projet, elles avaient l’impression d’être inexistantes auxyeux de l’État, mais qu’en recevant leurs papiers

Un centre parascolaire dans le bidonville de Katatura, à Windhoek, en Namibie. Photographe : Barbara Cheney

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 65

elles avaient également obtenu une identité etque les autorités ne pouvaient plus les ignorer.148

De même, le potentiel de citoyenneté de laBolsa Familial149 est mis en évidence par lesopinions des femmes bénéficiaires issues d’un « Brésil pauvre, non blanc et disposant depossibilités limitées de mobilité sociale ». Pources femmes, les transferts constituaient leurpremier contact avec l’État. La nécessité d’obtenirdes documents légaux, tels qu’un acte denaissance ou une carte d’identité, pour pouvoirs’enregistrer et introduire une demande de Bolsa Familia, les a rendues conscientes de leurappartenance à une entité sociale plus larges’étendant au-delà de leur communautéimmédiate. Comme le fait remarquer l’un desresponsables du programme, cela a « provoquéune révolution, un renversement de la consciencede l’espace social auquel elles peuvent chercher à appartenir... ».150

La contribution que les systèmes de protectionsociale peuvent apporter à la cohésion sociale aégalement été analysée par des études destransferts monétaires dans le contexte post-conflitde la Colombie. La participation régulière desfemmes à diverses activités imposées par leprogramme (réunions, formations, visites decentres de santé) a contribué à créer la confiance

au sein de la communauté, comme le montre savolonté d’investir dans des biens publics quiprofiteront à tous ses membres.

Aujourd’hui, plusieurs États ontinstitutionnalisé la protection sociale en tant quedroit fondamental. Dans certains pays, tels que laThaïlande, le phénomène prend la forme d’uneprestation universelle : ce qui avait commencé entant que « système des 30 bahts » destiné àassurer l’accès aux soins de santé des travailleursinformels s’est transformé en couvertureuniverselle en 2002, après un processus de 27 années qui avait débuté par un systèmefinancièrement peu important, visant les pluspauvres. Ailleurs, il adopte une approche de « garantie sociale », cherchant à intégrer à laprestation des services un engagement en faveurde l’accès, de la qualité, d’une révision etparticipation continue, et de mesures derecours.152 Au Chili, le régime des garantiesexplicites en matière de santé est un exempled’approche conçue au sein d’un tel cadre.9

« Nous décidons par conséquent de respecter et de faire appliquer intégralement laDéclaration universelle des droits de l’homme...» (Déclaration du Millénaire de l’an 2000, paragraphe 25)

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66 Conclusion : principaux sujets de préoccupation et principes

Les

sociétés composées de diverses ethnies nepeuvent pas être des sociétés ethniquementdivisées. Les différences culturelles ou religieusesne mènent à l’exclusion ou au conflit que lorsques’exerce une discrimination systématique, c’est-à-dire lorsque des personnes se voient privées deressources, de reconnaissance et de possibilité dereprésentation en raison de leur identité, de leurcroyance ou de leur lieu de résidence. Lapersistance de pratiques discriminatoires établiesdans le passé et les conflits qu’elles génèrentpeuvent être à l’origine d’un profond sentimentd’impuissance et de désespoir. Cependant, ilexiste suffisamment d’exemples d’avancées, dont beaucoup sont mentionnées dans cerapport, pour démontrer qu’un progrès estpossible si nous tirons les leçons de l’histoire.Diverses mesures politiques et interventions ontpermis de faire évoluer les choses dans différentesrégions du monde. Ce constat nous a permisd’émettre un certain nombre derecommandations, préoccupations et principesclés pouvant servir de base au combat permanentcontre l’exclusion sociale.

Lutter contre l’exclusion sociale en s’appuyantsur les droits humainsL’exclusion sociale repose sur la négation del’individu en tant que personne à part entière etle refus de reconnaître la citoyenneté pleine etentière des groupes exclus. Le premier principeest par conséquent d’inscrire la lutte contrel’exclusion sociale dans le large cadre fourni parla Charte internationale des droits de l’homme.Celle-ci comprend la Déclaration universelle desdroits de l’Homme, ainsi que les deux pactes quien ont découlé, le Pacte international relatif auxdroits civils et politiques et le Pacte internationalrelatif aux droits économiques, sociaux etculturels. Bien qu’ils constituent un cadrenormatif très abstrait, ces textes réaffirmentl’importance et l’indivisibilité des droits civils,politiques, économiques, sociaux et culturels, et consacrent l’attachement à la dignité et auprincipe d’égalité des êtres humains qui justifientla lutte contre l’exclusion sociale.

La traduction de ces principes dans desmesures politiques concrètes fait intervenirdifférents éléments : la consécration

constitutionnelle des droits, l’utilisation de la loi,l’octroi de garanties sociales, le renforcement duprocessus démocratique d’intégration sociale, et le droit systématique à l’information et à latransparence. D’autres conventions relatives auxdroits de l’homme, en particulier la Conventionsur l’élimination de toutes les formes dediscrimination à l’égard des femmes, qui imposeaux États de rendre compte des progrès réalisésdans la promotion de l’égalité des sexes, viennentrenforcer la Déclaration universelle.

Impliquer les citoyens dans le changement Le deuxième principe découle des problèmes liés àla question de la citoyenneté. Une grande partie dela littérature tourne autour d’un modèle vertical decitoyenneté, c’est-à-dire un modèle privilégiant ladémocratisation des relations entre les États etleurs citoyens. De leur côté, les ouvrages consacrésà l’exclusion sociale mettent en évidence lanécessité de le compléter en y ajoutant ladimension horizontale de la citoyenneté, quisouligne le fait que les relations entre les citoyenssont au moins aussi importantes.153 L’État ne doitpas être seul à assumer la lutte contre les pratiquesdiscriminatoires. L’agenda du changement doitégalement se concentrer sur les citoyens eux-mêmes, en particulier ceux dont lescomportements et les préjugés tendent à perpétuerla discrimination dans la vie de tous les jours. Les principes de tolérance et de solidarité formulésdans la Déclaration du Millénaire sont, en d’autrestermes, essentiels à tout agenda ayant pour but depromouvoir l’égalité.

Trouver le juste équilibre entre l’égalité et lerespect des différences Le troisième principe concerne la difficulté detrouver un juste équilibre entre l’égalité et lerespect des différences. En d’autres termes, il s’agit de déterminer dans quelle mesure lespolitiques générales ou universelles visant àpromouvoir l’égalité des chances peuvents’accompagner de dispositions particulières enfaveur de ceux qui ont été systématiquementexclus dans le passé. Même si elles sont souventconsidérées comme incompatibles, ces deuxapproches fonctionnent, en fait, avec succèsquand elles sont combinées. Les approchesuniversalistes sont essentielles pour créer un

Conclusion : principaux sujets depréoccupation et principes6

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 67

sentiment de solidarité sociale et de citoyenneté,particulièrement important pour les groupesexclus. Une couverture universelle renforceégalement la volonté des groupes privilégiés decontribuer à la réussite des politiques, au-delà dece qu’ils peuvent en tirer pour eux-mêmes, etaugmente de ce fait les possibilités deredistribution à travers des subventions croiséesentre les catégories riches et pauvres.

En même temps, le fait que ce soit leur « différence » par rapport au reste de lapopulation pauvre qui a conduit les groupessocialement exclus à être tenus à l’écart ou laissésen dehors des processus de croissance et dedéveloppement suggère que l’« universalité » nedoit pas impliquer une « uniformité ». De

nombreuses raisons plaident pour l’intégrationdes notions de pluralité et de diversité dans lescadres universels de prestation des services.

Jusqu’à présent, les programmes ciblés ontgénéralement été utilisés pour compenser lesfaiblesses de la fourniture des services universelspar l’État plutôt que comme un moyen decombattre l’exclusion. La réalisation deprogrammes de « conception pensée pourl’inclusion » (inclusion by design)154 doit êtremûrement réfléchie et prévoir notammentl’intégration de mesures incitatives pour faciliter l’obtention des résultats recherchés. Les programmes ciblés peuvent finir parmarginaliser certains groupes, de la même façon que des mesures universelles mal mises

Femmes d’un village de la région désertique située entre la Mauritanie et le Sénégal dansant au rythme de la musique traditionnelle qui fait partie intégrante de leur culture. Photographe : Layla Saad, Fonds pour la réalisation des OMD

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68 Conclusion : principaux sujets de préoccupation et principes

en œuvre, lorsqu’ils s’appuient sur des pratiquesd’« étiquetage » renforçant la stigmatisation.155

En fin de compte, plus les groupes exclusparticipent à la conception des programmes et àla prise des décisions politiques qui affectentleurs vies, moins il est nécessaire de traiter leursproblèmes de façon isolée par rapport au reste de la population.

Réaliser des changements profondsLe quatrième principe préconise de privilégier lesmesures de transformation qui s’attaquent auxcauses profondes du problème, au lieu que de secontenter d’actions d’amélioration qui n’entraitent que les symptômes. S’il est tout-à-faitpossible de satisfaire les besoins élémentaires desgroupes pauvres et marginalisés sans renforcerleurs capacités à y subvenir par eux-mêmes, unetelle approche ne permet pas de diminuer leurvulnérabilité à long terme. Traiter les causes del’exclusion sociale implique de s’attaquer auxprocessus perpétuant un désavantage au fil desgénérations. Il y a lieu ici de rechercher desapproches diversifiées s’attaquant à différentesdimensions des désavantages.

L’exclusion basée sur les groupes exige desréponses collectivesLe cinquième principe résulte de l’inadéquationdes politiques qui ciblent les individus ou lesménages pour la résolution de problèmes qui seposent essentiellement à un niveau collectif etaffectent des groupes entiers. En fait, les solutionss’adressant aux individus peuvent laisser lesgroupes marginalisés encore plus pauvres etisolés. La nécessité d’approches plus collectivesamène à envisager une autre manière d’intégrer lanotion de « différence » dans la conception despolitiques. Ce rapport a fourni divers exemplessoulignant le pouvoir du nombre et l’importancede la solidarité.

Un nouveau contrat social dans un mondeinterconnecté : États, citoyens et gouvernance mondiale Les OMD ont donné un élan majeur à lacoordination nationale et internationale des effortsvisant à réduire la pauvreté et à promouvoir ledéveloppement humain. Ils ont contribué àintégrer la lutte contre la pauvreté dans lespolitiques, les plans et les programmes mis enœuvre dans les différentes régions du monde. Ils n’ont cependant pas permis de réaliserpleinement l’agenda de justice sociale énoncé dansla Déclaration du Millénaire. Ce rapport a étudiéles facteurs structurels qui sont à l’origined’inégalités profondément enracinées et

imbriquées, et de la persistance de l’exclusionsociale. Il a mis en évidence un certain nombred’options de stratégies politiques susceptibles decontribuer à faire des OMD un instrument dejustice sociale.

Ces options ne doivent pas être poursuivies defaçon isolée. La nature multidimensionnelle de lapauvreté et de l’exclusion sociale implique de lespoursuivre dans le cadre d’un agenda plus largede transformation sociale. Ce constat plaide enfaveur d’un nouveau contrat social entre les Étatset les citoyens. Le rapport a évoqué diversespolitiques et interventions pouvant inciter lesÉtats à se montrer plus réactifs et les citoyens àêtre plus actifs.

L’un des aspects non abordés par cette étudeconcerne le rôle de la communauté internationale,qui est également critique pour une réalisation plus équitable des OMD. Ni les causes, ni lesconséquences des problèmes de pauvreté etd’exclusion sociale ne s’arrêtent aux frontières despays. Elles résultent d’inégalités structurellesprésentes au niveau mondial. Mais cette réalitén’est pas prise en compte dans les OMD. Tandisque les sept premiers OMD sont des objectifs àatteindre dans les pays en développement, l’OMD 8 traite des relations entre pays développés et endéveloppement.156 Il concerne les partenariatsmondiaux : entre les États (y compris lesinstitutions multilatérales), le secteur desentreprises et les organisations mondiales de lasociété civile. Il a non seulement échoué à prendreen compte la nature inégale de ces relations (dont témoignent l’aide, le commerce et la dette),mais il est également le seul OMD à ne pas êtreaccompagné de cibles ou d’indicateurs permettantde contrôler les éventuels progrès réalisés. L’OMD8 a été critiqué pour son manque frappant declairvoyance et de détermination.157

Il est extrêmement improbable que les pays endéveloppement parviennent à la croissance, à laprospérité et à la justice sociale sans que davantaged’attention ne soit portée à la solidarité en tantqu’authentique partenariat entre égaux, au niveaumondial. Elle devrait être au cœur de l’agenda quisuccédera aux OMD après 2015. Cependant, d’ici

« La responsabilité de la gestion, à l’échelle mondiale,du développement économique et social, ainsi que desmenaces qui pèsent sur la paix et la sécuritéinternationales, doit être partagée entre toutes lesnations du monde et devrait être exercée dans un cadremultilatéral. Etant l’organisation la plus universelle et laplus représentative qui existe dans le monde,l’Organisation des Nations Unies a un rôle central à jouerà cet égard. »

(Déclaration du Millénaire, paragraphe 6)

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 69

là, les pays riches devraient accorder la priorité àun certain nombre de mesures visant à accélérer lerythme des progrès :

l Respecter l’engagement d’augmenter l’aidepublique au développement à 0,7 % de leur PIB.

l Reconnaître et soutenir le rôle desorganisations de la société civile dans lamobilisation des groupes exclus, la demandede comptes aux pouvoirs publics et latransformation des relations de pouvoir.

l Apporter leur soutien à la création d’un socleuniversel de protection sociale permettant auxgroupes marginalisés de faire face aux risqueset d’investir dans leur avenir.

l Promouvoir des relations commerciales plusjustes, en accordant une attention particulièreaux besoins des exploitants agricoles,commerçants et travailleurs pauvres, enparticulier ceux de l’économie informelle.

l Rendre les entreprises et le secteur privé responsables d’investissementssocialement responsables.

l Renforcer les capacités des pouvoirs publics etleur engagement envers le cadre internationaldes droits humains.

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70 Informations complémentaires

Information sur le projetCe rapport, financé par le Fonds pour laréalisation des OMD, a été produit par l’Instituteof Development Studies (Sussex) dans l’espoir quela mise en évidence des injustices systématiquesdont sont victimes des femmes, des hommes, desjeunes et des enfants partout dans le mondenous convainque de nous impliquer dans unelutte collective contre la pauvreté et uneréalisation plus équitable des Objectifs duMillénaire pour le développement. Il a étépréparé en vue du Sommet sur les OMDorganisé au cours de l’Assemblée générale desNations Unies en septembre 2010. Son objectifest d’inscrire l’exclusion sociale et l’inégalité àl’ordre du jour de ces réunions. Il propose unensemble de recommandations etd’interventions en matière de politiques que lesgouvernements des pays à faible revenu et àrevenu intermédiaire peuvent appliquer pourinclure le combat contre l’exclusion sociale etl’inégalité dans leurs efforts de réalisation desOMD. Ce rapport constitue à la fois unecontribution et un instrument de plaidoyerdestinés au Sommet 2010 et à ceux qui luisuccèderont jusqu’en 2015.

Informations complémentaires

Le Fonds pour la réalisation des OMD

Le Fonds des Nations Unies pour la réalisation des OMD aété créé en décembre 2006, grâce à une généreusecontribution du gouvernement espagnol, qui concrétisaitson engagement vis-à-vis de la réalisation de l’OMD 8 visantla mise en place d’un partenariat mondial pour ledéveloppement. Avec un investissement de près de 700millions de dollars EU dans 128 programmes entrepris dans49 pays, il est aujourd’hui le plus grand fonds mondialconsacré à la réalisation des OMD. Nous travaillons enétroite collaboration avec les autorités nationales, lescitoyens et des organisations de la société civile à laréduction de la pauvreté et des inégalités ainsi qu’àl’accélération des progrès vers les OMD. Le Fonds OMD estune initiative unique des Nations Unies, qui rassemble plusde 22 agences et programmes des NU prenant appui surleurs forces respectives pour réaliser des interventionsmultisectorielles efficaces, améliorant les conditions de viedes populations pauvres et marginalisées.

www.mdgfund.org Pour de plus amples informations, veuillez contacter :Layla SaadConseiller en plaidoyer et communication, Fonds pour laréalisation des OMD [email protected]

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Les OMD peuvent-ils ouvrir la voie à la justice sociale ? 71

1 Déclaration du Millénaire des Nations Unies, 8 septembre 2000, Assemblée générale des Nations Unies: para.11

2 Hobcraft, J. (2007) Child Development, the Life Course,and Social Exclusion: Are the Frameworks Used in the UKRelevant for Developing Countries?, document de travail 72:8 du Centre de recherche sur la pauvreté chronique

3 Vandemoortele, J. (2009) ‘The MDG Conundrum:Meeting the Targets Without Missing the Point’,Development Policy Review 27.4: 355–7 1

4 Département des affaires sociales des Nations Unies(2005) The Inequality Predicament. Report on the WorldSocial Situation, New York : Programme des NationsUnies pour le développement ; Son, H.H.et Kakwani, N.(2004) Economic Growth and Poverty Reduction: InitialConditions Matter, document de travail n° 2, Brasilia :Centre international pour l’action en faveur des pauvres; Birdsall, N. et Londono, J.L. (1997) ‘Asset InequalityMatters: An Assessment of the World Bank’s Approachto Poverty Reduction’, American Economic Review87.2: 32–3 7

5 Montalvo, R.G. et Reynal-Querol, M. (2005) ‘EthnicPolarization, Potential Conflict and Civil Wars’,American Economic Review 95.3: 796–816 ; Thorbecke,E. et Charumilind, C. (2002) ‘Economic Inequality and its Socioeconomic Impact’, World Development30.9: 1477–95

6 Comité des droits économiques, sociaux et culturels desNations Unies (2001) Prevention of armed conflict:report of the Secretary-General, A/55/985_S/2001/574,cité dans The Inequality Predicament du Départementéconomique et des affaires sociales des Nations Unies(2005). Rapport sur la situation sociale dans le monde2005, New York: Nations Unies: 17

7 Ou sont opposés à la publication des données : le Myanmar est un exemple frappant. Tout comme le Rwanda, où le gouvernement post-génocide apoursuivi une politique de promotion de l’unité et de la réconciliation nationale, en soulignant lesfacteurs unifiant les Rwandais et en contrôlant lesfacteurs susceptibles de semer la discorde. Ceci a inclus l’interdiction de toute référence à l’appartenance ethnique.

8 Wilkinson, R. et Pickett, K. (2010) The Spirit Level: WhyEquality is Better for Everyone, Londres : Penguin BooksLtd. Pour la discussion dans le contexte de l’OCDE, voirégalement UN ECE (2010) Draft Report on the MDGs inEurope and Central Asia

9 Sen, A. (1992) Inequality Rexamined, Oxford: OxfordUniversity Press: xi

10 Stewart, F. (2002) Horizontal Inequalities: A NeglectedDimension of Development, document de travail n° 81,Université d’Oxford, Queen Elizabeth House

11 Quoique les concepts d’exclusion sociale et d’inégalitéshorizontales aient beaucoup en commun, ils décriventdes phénomènes différents. Les inégalités horizontalestouchent les groupes aussi bien riches que pauvres, etune société multiethnique peut donc avoir des groupesethniques dominants et minoritaires appartenant auxcouches aussi bien riches que pauvres. D’autre part,l’exclusion sociale fait référence à l’imbrication de la

pauvreté avec les inégalités basées sur l’identité et lesdivers désavantages qui les accompagnent. Kabeer, N.(2000) ‘Social Exclusion, Poverty and Discrimination:Towards an Analytical Framework’, IDS Bulletin31.4: 83–97

12 Fondation européenne pour l’amélioration desconditions de vie et de travail (1995) Public WelfareServices and Social Exclusion: The Development ofConsumer Oriented Initiatives in the European Union,Dublin, la Fondation, cité dans A. De Haan et S.Maxwell (1998) ‘Poverty and Social Exclusion in Northand South’, IDS Bulletin 29.1: 1–9

13 Beall, J. (2002) ‘Globalisation and Social Exclusion inCities: Framing the Debate with Lessons from Africaand Asia’, Environment and Urbanisation 14.1: 41–51

14 Busso, M. ; Cicowiez, M. et Gasparini, L. (2005)‘Ethnicity and the Millennium Development Goals inLatin America’, Buenos Aires : Centro de EstudiosDistributivos, Laborales y Sociales (CEDLAS)

15 Busso et coll. (2005)16 Busso et coll. (2005)17 Patrinos, H. et Skoufias, E. (2007) Conférence édition:

Economic Opportunities Indigenous Peoples in LatinAmerica, Washington D.C. : Banque mondiale

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New York, NY USA 10017www.mdgfund.org