12
Comme nous vous l’avions annoncé, voici le numéro spécial de la VEILLE, vous rapportant les travaux, du premier colloque interprofessionnel, qui s’est tenu le 14 décembre dernier, à SOPHIA- ANTIPOLIS. Cette journée fût d’abord le fruit d’une rencontre, d’un pari, un jour de janvier 2007, où nous plaisantions avec M e Frédéric PARENT, Notaire, sur la place réservée à nos communications réciproques dans les différentes publications. L’humour laissant la place à nos responsabilités réciproques, nous avons œuvré pour convaincre nos pairs de ce qu’il était nécessaire d’ouvrir nos professions l’une à l’autre et de travailler ensemble. Je remercie d’ailleurs, Monsieur le Bâtonnier, Michel FARAUD et les membres du Conseil de l’Ordre, comme la Chambre des Notaires des Alpes-Maritimes, d’avoir accepté de se lancer dans cette aventure. C’est presque naturellement, que ce colloque a vu le jour et les différentes réunions préparatrices des animateurs, resteront des moments forts, d’échanges et de débat. Je suis persuadée que cette journée représente l’aboutissement d’une collaboration concrète, réunissant nos compétences et ce pour un seul et même objectif : rendre plus lisible le droit sur le divorce et convenir d’une «méthodologie», pour que les rôles respectifs de l’avocat et du notaire, soient réaffirmés. Je tiens à remercier les chevilles ouvrières de ce colloque et tous les professionnels qui y ont participé. Plus particulièrement, je voudrais dire toute mon affection à M e Anne BERDAH, M e Benoît HERVET, M e Frédéric PARENT et M e Dominique FABIANI (pour ce qui est des notaires), comme à M e Agnès PROTON, M e Elisabeth GRANIER ZARRABI, M e Cécile LASSAU VIALE, M e Emmanuel VOISIN-MONCHO, M e Winni SCHREIBER BALDET, M e Nathalie DAON COUSSON, M e Laurence PARENT-MUSSARA, M e Karim BEN SEDRINE, tous ont réalisé un travail de qualité et d’ambition. Nous avons pu aussi échanger avec Monsieur le Président LAMEYRE, les magistrats concernés par la matière et les greffières, qui ont répondu à notre invitation. Je les remercie également pour leurs interventions. J’ai la conviction que cette journée a pu démontrer que le droit reste un lien indestructible entre les hommes et les femmes de bonne volonté. Il suffit d’observer le cliché photo- graphique, pour constater nos rires et sourires. D’ailleurs, un nouveau colloque aura lieu au mois d’octobre prochain, sur le régime de protection des majeurs, où là encore, nous œuvrerons tous ensemble. Certains trouveront dans ce numéro spécial, des idées, une façon de faire, mais aussi des pistes de réflexion, voire des critiques, car il ne faut pas s’arrêter à ce travail de synthèse. Bonne lecture ! N°7 - Avril 2008 - Numéro spécial COLLOQUE INTERPROFESSIONNEL AVOCATS-NOTAIRES Sommaire ATELIER N° 1 Liquidation et partage Karim BEN SEDRINE Elisabeth GRANIER-ZARRABI Maître Frédéric PARENT Laurence PARENT-MUSARRA ATELIER N° 2 l’article 255-10° du Code Civil Nathalie DAON-COUSSON Benoît HERVET Emmanuel VOISIN-MONCHO ATELIER N° 3 Consentement mutuel Anne BERDAH Dominique FABIANI Cécile LASSAU-VIALE Agnès PROTON Winni SCHREIBER-BALDET 2 4 8 Edito Les rôles respectifs de l’Avocat et du Notaire : recherche d’une efficacité Sylvie TRASTOUR Avocat au Barreau de Grasse Présidente de la Commission Communication

Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

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COLLOQUE INTERPROFESSIONNEL AVOCATS-NOTAIRES organise a SOPHIA-ANTIPOLIS (06) le 14 decembre 2007Les roles respectifs de l’Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce.

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Page 1: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

Comme nous vous l’avions annoncé,

voici le numéro spécial de la VEILLE,

vous rapportant les travaux, du premier

colloque interprofessionnel, qui s’est

tenu le 14 décembre dernier, à

SOPHIA- ANTIPOLIS.

Cette journée fût d’abord le fruit d’une

rencontre, d’un pari, un jour de janvier

2007, où nous plaisantions avec

Me Frédéric PARENT, Notaire, sur la

place réservée à nos communications

réciproques dans les différentes

publications.

L’humour laissant la place à nos

responsabilités réciproques, nous

avons œuvré pour convaincre nos pairs

de ce qu’il était nécessaire d’ouvrir nos

professions l’une à l’autre et de travailler

ensemble.

Je remercie d’ailleurs, Monsieur le

Bâtonnier, Michel FARAUD et les

membres du Conseil de l’Ordre,

comme la Chambre des Notaires des

Alpes-Maritimes, d’avoir accepté de se

lancer dans cette aventure.

C’est presque naturellement, que ce

colloque a vu le jour et les différentes

réunions préparatrices des animateurs,

resteront des moments forts,

d’échanges et de débat.

Je suis persuadée que cette journée

représente l’aboutissement d’une

collaboration concrète, réunissant nos

compétences et ce pour un seul et

même objectif : rendre plus lisible le

droit sur le divorce et convenir d’une

«méthodologie», pour que les rôles

respectifs de l’avocat et du notaire,

soient réaffirmés.

Je tiens à remercier les chevilles

ouvrières de ce colloque et tous les

professionnels qui y ont participé.

Plus particulièrement, je voudrais dire toute

mon affection à Me Anne BERDAH,

Me Benoît HERVET, Me Frédéric PARENT et

Me Dominique FABIANI (pour ce qui est des

notaires), comme à Me Agnès PROTON,

Me Elisabeth GRANIER ZARRABI,

Me Cécile LASSAU VIALE, Me Emmanuel

VOISIN-MONCHO, Me Winni SCHREIBER

BALDET, Me Nathalie DAON COUSSON,

Me Laurence PARENT-MUSSARA,

Me Karim BEN SEDRINE, tous ont réalisé

un travail de qualité et d’ambition.

Nous avons pu aussi échanger avec

Monsieur le Président LAMEYRE, les

magistrats concernés par la matière et

les greffières, qui ont répondu à notre

invitation.

Je les remercie également pour leurs

interventions. J’ai la conviction que cette

journée a pu démontrer que le droit reste

un lien indestructible entre les hommes

et les femmes de bonne volonté.

Il suffit d’observer le cliché photo-

graphique, pour constater nos rires et

sourires. D’ailleurs, un nouveau

colloque aura lieu au mois d’octobre

prochain, sur le régime de protection

des majeurs, où là encore, nous

œuvrerons tous ensemble.

Certains trouveront dans ce numéro

spécial, des idées, une façon de faire,

mais aussi des pistes de réflexion, voire

des critiques, car il ne faut pas s’arrêter

à ce travail de synthèse.

Bonne lecture !

N°7 - Avril 2008 - Numéro spécial

COLLOQUE INTERPROFESSIONNEL AVOCATS-NOTAIRES

S o m m a i r e

ATELIER N° 1Liquidation et partage

Karim BEN SEDRINE

Elisabeth GRANIER-ZARRABI

Maître Frédéric PARENT

Laurence PARENT-MUSARRA

ATELIER N° 2l’article 255-10° du Code Civil

Nathalie DAON-COUSSON

Benoît HERVET

Emmanuel VOISIN-MONCHO

ATELIER N° 3Consentement mutuel

Anne BERDAH

Dominique FABIANI

Cécile LASSAU-VIALE

Agnès PROTON

Winni SCHREIBER-BALDET

2

4

8

Edito

Les rôles respectifsde l’Avocat et du Notaire :recherche d’une efficacité

Sylvie TRASTOUR

Avocat au Barreau de Grasse

Présidente de la Commission Communication

Page 2: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

2

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

Cet atelier a été animé par MaîtreFrédéric PARENT,Notaire,MaîtreLaurence PARENT-MUSARRAet Maître Karim BEN SEDRINE,Avocats,à la suite du travail de pré-paration, auquel a également parti-cipé Maître Elisabeth GRANIER-ZARRABI.

Il s’agissait d’évoquer le rôle tradition-

nel de l'avocat et du notaire dans les

divorces contentieux ou pour altéra-

tion du lien conjugal - c’est-à-dire

après le jugement de divorce puisque

le partage ne peut intervenir qu'une

fois le lien matrimonial rompu.

L'article 1441 du code civil est trèsclair :

"la communauté se dissout :

1° par la mort d'un des époux ; 2° par

l'absence déclarée ; 3° par le divorce…"

Le partage de la communauté est

traité dans notre code dans le titre

consacré au divorce, dans celui

consacré aux régimes matrimoniaux

et dans le titre consacré aux succes-

sions.

Notre intervention commune porte

uniquement sur le partage de la com-

munauté après un divorce contentieux

donc sur le rôle tout à fait traditionnel

de l'avocat et du notaire lorsque le lien

conjugal est rompu par un jugement

de divorce devenu définitif.

Il s'agit de s’occuper de l'après divor-

ce en partant du principe que toutes

les tentatives amiables ont échouées.

L'article 267 du code civil précise :

"A défaut d'un règlement convention-

nel par les époux , le juge , en pro-

nonçant le divorce , ordonne la liqui-

dation et le partage de leurs intérêts

patrimoniaux".

I-DESIGNATION DU NOTAIRE :

L’avocat, dispose donc un jugement

de divorce définitif et son rôle est

alors de demander à la Chambre des

Notaires de désigner un notaire : il

faut obligatoirement joindre au juge-

ment de divorce le certificat de non-

appel .En même temps l'avocat pro-

cède à la transcription à l'état civil du

divorce de son client.

La Chambre répond en quelques

jours - très rapidement donc - et

l'avocat prend contact avec le notaire

pour fixer la demande de provisions

et une date pour l'ouverture des opé-

rations de comptes liquidation et par-

tage de la communauté.

En général la partie la plus diligente

somme par huissier l'autre partie de

venir chez le notaire pour ouvrir les

opérations.

Dès que le CNA est obtenu, l’avocat

se doit donc d’écrire immédiatement

à la Chambre des Notaires , obtenir la

désignation d'un notaire et obtenir

une date pour l'ouverture des opéra-

tions à laquelle il va appeler l'adver-

saire par un acte d'huissier afin que

les opérations lui soient opposables.

A ce niveau en quelques semaines

tout peut être fait et le notaire « entre

en piste ».

Le problème que rencontre le notaire

est alors très simple : il a en main un

jugement de divorce - un outil – inex-

ploitable ou très difficilement car très

peu précis.

Le rôle de l'avocat sera donc doréna-

vant de tenter d'apporter au juge un

maximum d'informations pour obtenir

un jugement très précis permettant

au notaire d'aller plus vite car diffé-

rents problèmes auront déjà été

réglés dans le jugement et ne pour-

ront être remis en cause par les ex-

époux.

Dans un partage le notaire va étudier

l'actif et le passif de la communauté.

II-PROCES VERBAL D'OUVERTURE :

A/ ACTIF ( à fournir par l'avocat )

Demande de fichier FICOBA OEIL

L'avocat doit demander en cours de

procédure - par exemple au moment

des conclusions récapitulatives –

dans le cas de divorce de gens fortu-

nés soupçonnés d'avoir détourné

certaines sommes à leur conjoint au

cours des ans - l'interrogation du

fichier FICOBA ou ŒIL que seul le

juge peut accorder.

En effet le notaire n'obtiendra rien de

ces fichiers si le juge - dans le juge-

ment de divorce - n'a pas autorisé

cette demande.

Le notaire obtient tous les renseigne-

ments sur les Assurances et les Plans

d'Epargne Entreprise.

Il faut déterminer la valeur de tous les

immeubles et il serait bon dans cer-

tains cas de faire désigner dans le

jugement de divorce un expert comp-

table comme sapiteur et de faire pré-

ciser la date de la jouissance divise.

Rappelons que souvent des fonds de

commerce, des fonds artisanaux,

activité libérale et clientèle doivent

être évalués.

L'expertise immobilière peut être faite

par la Chambre des Notaires à la

demande du notaire désigné et sur

mandat des deux parties.

Il faut dès les conclusions et avant le

jugement prévoir les attributions pré-

férentielles si possible, cela simplifie et

accélère le travail du notaire.

De même pour les meubles meu-

blants.

Le jugement de divorce conten-

tieux ou pour altération du lien

conjugal doit devenir un outil

exploitable rapidement.

B/ PASSIF ( à fournir par l'avocat )

L'avocat ne doit pas oublier de préci-

ser dans ses conclusions qui, prend

en charge les impôts de l'année en

cours car il s'agit d'une obligation

solidaire et le jugement doit trancher.

Idem pour les crédits à la consomma-

tion, les crédits immobiliers et les frais

de justice et de partage.

Atelier n° 1Liquidation et partage

Page 3: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

3

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

Il faut faire constater dans nos

conclusions par le juge que l'un des

époux a remboursé le crédit immobi-

lier à partir de telle date ou bien les

impôts fonciers ou autres ( avec justi-

ficatifs bien sûr ) sinon l'autre conjoint

va contester et il y aura blocage.

L'article 267-1 du Code Civil préci-se :

"Si les opérations de liquidation et de

partage ne sont pas achevées dans

le délai d'un an après que le jugement

de divorce est passé en force de

chose jugée, le notaire transmet au

Tribunal un procès-verbal de difficul-

tés reprenant les déclarations respec-

tives des parties.

Au vu de celui-ci le Tribunal peut

accorder un délai supplémentaire

d'une durée maximale de six mois.

Si à l'expiration de ce délai, les opéra-

tions ne sont toujours pas achevées,

le notaire en informe le Tribunal. Il éta-

blit, si les changements intervenus le

rendent nécessaire, un nouveau pro-

cès-verbal.

Le Tribunal statue sur les contesta-

tions subsistant entre les parties et les

renvoie devant le notaire afin d'établir

l'état liquidatif."

Le notaire désigné va donc procéder

à un procès-verbal d'ouverture, il lais-

se 3 mois en général pour obtenir

toutes les informations sur le passif et

l'actif, l'état liquidatif est envoyé à tout

le monde.

Si tout le monde est d'accord, une

réunion est faite pour signature du

partage avec de nouvelles précisions

au besoin, à défaut, il sera rédigé un

PV de difficulté : il est préférable de

faire citer la partie adverse par huis-

sier.

III-PROCES VERBAL DE DIFFICULTE (notaire) :

A/ ASSIGNATION SUR LA DIFFICULTE (avocat)

Avec le PV de difficulté le rôle du

notaire s'achève provisoirement et

l'avocat le plus diligent doit assigner à

l'effet de faire statuer par jugement

sur la difficulté ou les difficultés ren-

contrées mais pas sur le partage.

L'avocat ne doit pas oublier dans son

assignation suite à la difficulté rencon-

trée de prévoir une astreinte (impor-

tante ou même dissuasive) suite à la

sommation d'avoir à comparaître

devant le notaire pour compléter le

partage : cela permet de terminer le

partage au plus vite.

B/ JUGEMENT SUR LA DIFFICULTE ET

PARTAGE ACHEVE (notaire) :

Le juge statue sur la ou les difficul-

tés et renvoie devant le notaire qui

va alors simplement compléter le

partage.

Pour résumer, des points

dégagés lors de l’atelier,

on retiendra :

1 DOCUMENTS A FOURNIR

Il est conseillé de prévoir dès l’ou-

verture du dossier une cote spé-

ciale regroupant les documents

destinés au notaire :

• l’ensemble des titres de propriété

• les successions reçues en cours

de mariage

• les relevés bancaires

• les tableaux d’amortissement

• les assurances-vie.

Il est précisé que le notaire ne

retiendra pas les petites factures «

futiles » ou d’un montant dérisoire,

ni les dépenses d’entretien. Il est

donc inutile de lui remettre ce type

de pièces.

2 DESIGNATION DU NOTAIRE :

La requête ou l’assignation en

divorce devront demander la dési-

gnation du notaire avec les préci-

sions suivantes :

• la possibilité d’interroger le fichier

FICOBA

• la fixation d’une provision pour le

notaire avec possibilité de

demander un complément

• le rappel que la partie qui ne

communique pas des pièces qui

lui seront réclamées s’expose à

un incident de communication

de pièces avec condamnation

sous astreinte

3 ENVOI DES PIECES :

Par souci de rapidité l’avocat

adressera directement ses pièces

au notaire dès sa désignation.

4 VALEUR LOCATIVE :

Il peut être demandé dans la dési-

gnation du notaire de l’art. 255 - 10 °

qu’il fournisse la valeur locative d’un

immeuble, notamment si la question

d’une indemnité d’occupation peut

se poser. Il est retenu en règle géné-

rale, une valeur locative annuelle de

5 % de la valeur du bien.

5 MIN :

Il est rappelé que les notaires ont à

leur disposition le fichier du Marché

Immobilier des Notaires qui permet

d’obtenir une estimation fiable des

immeubles.

6 FISCALITE :

Les notaires conseillent une

consultation préalable pour les

liquidations importantes, l’inciden-

ce fiscale pouvant amener à recon-

sidérer certains accords entre les

parties.

7 CONTENU DES ACCORDS :

Bien que ces solutions soient sou-

vent envisagées par les parties, les

notaires déconseillent formelle-

ment toute solution impliquant le

maintien d’une indivision entre elle

ou une donation de biens com-

muns aux enfants du couple.

Page 4: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

4

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

Titre liminaire :

Cet Atelier était le prolongement dela présentation générale, à la foispratique et théorique, faite parMaître HERVET et MaîtreDAON-COUSSON, le matin.

Les débats de cet Atelier ont étémenés par Maître Benoît HERVET,Notaire, Maître Nathalie DAON-COUS-SON, Avocat, et Maître EmmanuelVOISIN-MONCHO, Avocat.

Il convient de rappeler liminairement

que l’une des innovations majeures de

la loi n° 2004-493 du 26 mai 2004,

entrée en vigueur le 1er janvier 2005, a

été l’instauration d’une augmentation

des pouvoirs du Juge conciliateur

quant aux mesures qu’il peut ordonner.

A été notamment créé l’article 255-

10° du Code Civil, qui prévoit la pos-

sibilité pour le Juge conciliateur de

«désigner un Notaire en vue d’élabo-

rer un projet de liquidation du régime

matrimonial et de la formation des

lots à partager.»

Il convient de préciser qu’il avait été

envisagé que le Notaire pouvait, au

titre de l’article 255-10° du Code Civil,

être aussi concerné par l’article 255-

9°, qui a pour objet de «désigner tout

professionnel qualifié en vue de dres-

ser un inventaire estimatif ou de faire

des propositions quant au règlement

des intérêts pécuniaires des époux. »

Ce texte plus général, qui ne vise pas

expressément les Notaires, concerne

incontestablement ces derniers aussi.

Il a d’ailleurs été constaté dans la pra-

tique des missions qui incluaient à la

fois des éléments de l’article 255-9°

et de l’article 255-10°.

Malgré tout, il est apparu lors des

débats que les Notaires estimaient

que certains professionnels étaient

plus adaptés qu’eux pour ce type

de mission : Expert immobilier,

Commissaire-priseur, Expert-comp-

table, etc.

Il a été également rappelé que ce

type de mission était parfois confié à

des Avocats.

I – LA MISSION DU NOTAIRE

A – Sa désignation

1) La procédure :

L’article 255-10° du Code Civil est

dans une section concernant les

mesures provisoires qui peuvent être

fixées par le Juge conciliateur.

Se pose alors la question de savoir, si

une demande n’est pas faite devant

le Juge conciliateur, s’il est possible

qu’elle intervienne ultérieurement,

c’est-à-dire après l’Ordonnance de

Non-Conciliation, soit devant le Juge

de la Mise en Etat, soit devant le

Conseiller de la Mise en Etat (s’il y a

eu appel de l’O.N.C.).

Si l’on se réfère à l’article 771-4° du

Nouveau Code de Procédure Civile,

on constate :

«Lorsque la demande est présentée

postérieurement à sa désignation, le

Juge de la Mise en Etat est, jusqu'à

son dessaisissement, seul compé-

tent, à l'exclusion de toute autre for-

mation du tribunal, pour :

[…] 4. Ordonner toutes autres

mesures provisoires, même conser-

vatoires, à l'exception des saisies

conservatoires et des hypothèques et

nantissements provisoires, ainsi que

modifier ou compléter, en cas de sur-

venance d'un fait nouveau, les

mesures qui auraient déjà été ordon-

nées.»

La question est de savoir ce que l’on

peut entendre par survenance d’un

fait nouveau depuis l’Ordonnance de

Non-Conciliation.

Il est ressorti des débats de l’Atelier

que la possibilité de solliciter la dési-

gnation du Notaire, en vue d’élaborer

un projet de liquidation du régime

matrimonial et de la formation des

lots à partager, était en pratique

accordée au Juge de la Mise en Etat.

Sur la notion de fait nouveau, il est

ressorti des débats que c’est l’assi-

gnation qui intégrait obligatoirement

un projet liquidatif, qui pouvait ame-

ner l’une ou l’autre des parties à esti-

mer qu’il devenait nécessaire de dési-

gner un Notaire, ce qui n’était pas

obligatoirement évidente au stade de

la conciliation.

Malgré tout, si cette demande est

faite par Incident par le demandeur,

postérieurement à l’assignation qu’il a

lui-même fait délivrer, on pourrait lui

reprocher de ne pas avoir anticipé les

choses, et de ne s’être rendu comp-

te qu’en rédigeant l’exploit introductif

d’instance, qui doit inclure un projet

de liquidation, qu’il ne disposait pas

des éléments nécessaires et qu’un

Notaire devait être désigné.

Peut-on alors parler de survenance

d’un fait nouveau ?

Il sera intéressant de suivre la jurispru-

dence sur ce point.

2) Qui est désigné ?

Il s’agit d’un point fondamental.

Actuellement, la Chambre de la

Famille du Tribunal de Grande

Instance de GRASSE (visiblement

tout comme celles d’autres

Juridictions) désigne le Président de

la Chambre des Notaires.

Il est donc procédé, pour l’article

255-10° du Code Civil comme en

matière de jugement de divorce, dési-

gnant pour la liquidation des droits

matrimoniaux, le Président de la

Chambre des Notaires.

Or, le statut du Notaire commis par le

Juge du divorce n’a rien à voir avec

celui nommé dans le cadre de l’article

255-10° du Code Civil.

Il est apparu clairement, dans le cadre

des débats du matin, où étaient pré-

sents deux Juges de la Chambre de

la Famille, le Président du T.G.I. et une

Greffière de la Chambre de la Famille,

que dorénavant, cette pratique devait

changer.

En effet, le Notaire désigné dans le

cadre de l’article 255-10° a un statut

proche (ou équivalent) de celui de

l’Expert judiciaire.

Il est donc indispensable de désigner

un Notaire dûment nommé, et non le

Président de la Chambre avec un

pouvoir de délégation.

Ce point sera envisagé dans le cadre

de la nature exacte de la mission du

Atelier n° 2l’article 255-10° du Code Civil

Page 5: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

5

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

Notaire, telle qu’elle sera envisagée

infra.

S’est alors posée la question de

savoir quel Notaire pouvait être dési-

gné pour ce type de mission.

Il est clairement apparu, dans le cadre

des débats, qu’il s’agissait de mis-

sions particulièrement chronophages

et financièrement peu intéressantes.

De plus, certaines Etudes estiment ne

pas être structurées pour pouvoir

gérer ce type de dossiers, où le

Notaire doit agir dans le cadre de rap-

ports très contentieux.

Se posent aussi des problèmes

d’ordre financier, qui seront évoqués

infra.

La Chambre de la Famille de GRASSE

semble souhaiter une liste de Notaires

acceptant ce type de mission.

Certains Notaires indiquent qu’il s’agit

d’une méthode inadaptée, puisqu’ils

ont, du fait de leur statut d’Officiers

Ministériels, une mission de service

public.

Ce type de désignation, même si elle

n’est pas financièrement intéressan-

te, doit donc être menée par toutes

les Etudes, et non par certaines qui

se « sacrifieraient » pour les autres.

B - Le statut du Notaire désigné dans

le cadre de l’article 255-10° du Code

Civil : Expert ou pas ?

Il s’agit là du point fondamental, qui a

fait l’objet de débats très importants

dans la doctrine dès la publication de

la loi du 26 mai 2004, et encore plus

depuis sa mise en œuvre au 1er jan-

vier 2005.

Cela a été aussi le cœur des débats

de l’Atelier de l’après-midi.

Il convient de rappeler que dans la

doctrine, un certain nombre d’au-

teurs, y compris des Magistrats, ont

estimé que le Notaire n’était pas

Expert, mais restait avant tout un

Officier Ministériel.

Ce débat a dû être suffisamment

important pour qu’il entraîne la créa-

tion, par décret du 23 décembre

2006, de trois articles du Nouveau

Code de Procédure Civile, concer-

nant la désignation, la rémunération

et le déroulement de la mission, tant

des professionnels qualifiés de l’ar-

ticle 255-9° que du Notaire de l’article

255-10°.

On constate d’ailleurs que, si pour les

professionnels qualifiés, l’article

1136-1 du Nouveau Code de

Procédure Civile prévoit que «les

modalités de désignation et de rému-

nération, ainsi que le déroulement de

la mission du professionnel qualifié,

désigné en application du 9° de l’ar-

ticle 255 du Code Civil sont soumises

aux règles applicables en matière

d’expertise», la situation du Notaire

est différente.

L’article 1136-2 du Nouveau Codede Procédure Civile prévoit :« Les modalités de désignation, ainsi

que le déroulement de la mission du

Notaire désigné en application du 10°

de l’article 255 du Code Civil sont

soumises aux dispositions des

articles 233 à 237, 239, 245, 264 à

267, 273, 275, 276 et 278 à 280 du

même Code, sans préjudice des

règles applicables à la profession.

Si le Notaire établit l’acte de partage,

il en fait rapport au Juge.»

Dans le cadre de l’Atelier, il a donc été

procédé à une étude, article par

article, des règles de l’expertise, dont

certaines s’appliquent au Notaire, et

d’autres pas.

En résumé, le Notaire est Expert pour

un certain nombre d’éléments

concernant sa mission.

Il doit notamment remplir personnel-

lement sa mission.

Sur ce point, s’est posée la question

du statut du Clerc habilité.

En effet, dans de nombreuses

Etudes, des Clercs habilités ou des

Notaires assistants gèrent le service

de droit de la famille, et sont donc

incontestablement les plus qualifiés

pour traiter ce type de dossiers.

Peuvent-ils être sapiteurs ?

La réponse est non, puisque l’article

278 du Nouveau Code de Procédure

Civile, qui s’applique aux Notaires

désignés dans ce cadre, prévoit que

«l'Expert peut prendre l'initiative de

recueillir l'avis d'un autre technicien,

mais seulement dans une spécialité

distincte de la sienne.»

Le Clerc habilité ou le Notaire assis-

tant ne peut donc pas être sapiteur.

En revanche, l’article 278-1 du

N.C.P.C., qui, lui, s’applique aussi,

prévoit que « l’Expert peut se faire

assister dans l’accomplissement de

sa mission, par la personne de son

choix, qui intervient sous son contrô-

le et sa responsabilité. »

Mais il est apparu indispensable à

tous les intervenants, qu’ils soient

Notaires ou Clercs habilités, que les

rendez-vous devaient être menés par

le Notaire désigné, éventuellement

assisté de son Clerc, et les actes

signés par-devant Notaire.

En revanche, les parties et/ou leurs

Avocats ne peuvent refuser, comme

cela a été visiblement le cas dans cer-

taines circonstances, au Clerc habilité

de discuter avec lui et de préparer les

rendez-vous avec ce dernier.

Le corollaire de cette mission person-

nelle que ne peut être désigné un

Notaire par le Président de la

Chambre des Notaires.

Une différence est apparue entre le

Notaire et l’Expert au sujet de l’article

240 du Nouveau Code de Procédure

Civile, qui ne s’applique pas au

Notaire désigné au titre de l’article

255-10° (alors qu’il s’applique au pro-

fessionnel qualifié de l’article 255-9°).

Or, l’article 240 rappelle que « le Juge

ne peut donner au technicien mission

de concilier les parties. »

Le Notaire conserve donc ce qui est

de la nature de sa profession, c’est-à-

dire le pouvoir de concilier les parties,

notamment sur le projet de partage

qu’il établit.

Il convient de rappeler que toute la

difficulté de la lecture de l’article

1136-2 du Nouveau Code de

Procédure Civile est que doivent être

conciliées les règles du Nouveau

Code de Procédure Civile concernant

les Experts judiciaires, mais aussi les

règles déontologiques des Notaires.

Le problème est apparu particulière-

ment délicat en ce qui concerne la

rémunération.

En effet, si l’on applique les règles de

l’expertise judiciaire, il convient de

procéder par consignation à la Régie,

avec un règlement éventuel de provi-

sions dans le cadre de l’article 280 du

Nouveau Code de Procédure Civile,

et en tout état de cause, une vérifica-

tion de l’état des diligences du

Notaires dans le cadre d’une

Ordonnance de taxe.

Or, les règles de rémunération, et

notamment l’article 248 du Nouveau

Code de Procédure Civile, qui interdit

au technicien de recevoir directement

d’une partie, sous quelque forme que

ce soit, une rémunération, ne sont

applicables au Notaire désigné dans

le cadre de l’article 255-10°.

La pratique notariale méconnaît tota-

Page 6: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

6

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

lement le système de la Régie et les

règles de l’expertise judiciaire.

En outre, il apparaît une contradiction

entre le fait pour l’Expert d’avancer

des frais et les règles de gestion des

Etudes notariales, qui doivent ne pas

avoir de compte débiteur.

Nous sommes clairement dans le

cadre d’une opposition entre les

règles déontologiques et les règles du

Nouveau Code de Procédure Civile.

Même si des provisions peuvent être

versées, elles nécessitent des

contacts avec le Tribunal, auxquels

les Etudes notariales ne sont pas

habituées.

Le débat a donc été extrêmement

dense sur ce sujet.

Il est apparu que, dans la pratique, les

Notaires estiment que les règles de la

consignation, de la notification de leur

mission par la régie, du versement de

provisions et de provisions complé-

mentaires étaient lourdes et peu

compatibles avec une mission faite

dans le cadre d’une procédure en

cours, qui continuait d’avancer.

Pour autant, il semblerait que le légis-

lateur ait voulu régler le problème,

puisque par décret du 16 mai 2006, il

a modifié le décret n° 78-262 du

8 mars 1978 portant fixation du tarif

des Notaires, en précisant :

«Le versement de la consignation et

la perception de la rémunération du

Notaire désigné en application du 10°

de l’article 255 du Code Civil sont

également soumis aux règles appli-

cables en matière d’expertise.

Lorsque le Notaire désigné par le

Juge en application du 10° de l’article

255 du Code Civil établit l’acte de

partage, l’émolument perçu en appli-

cation de la rubrique 63 E pour le

haut du tableau I du tarif s’impute sur

celui perçu au titre de la rédaction de

l’acte de partage.»

A la lecture de cette modification du

décret, il semblerait que les règles de

la rémunération de l’Expert judiciaire

s’imposent, alors que les articles du

Nouveau Code de Procédure Civile

concernant la rémunération de

l’Expert judiciaire ne sont pas appli-

cables au Notaire désigné dans le

cadre de l’article 255-10°.

La question est de savoir si cette

modification du tarif sur le décret

s’applique, au cas où le Notaire est

désigné, dans le cadre des règles de

l’expertise judiciaire, ou s’il impose

que le Notaire soit désigné dans le

cadre de ces règles.

Le souhait des Notaires est d’éviter

de passer par le système de la régie

et du contrôle du Juge chargé du

contrôle des expertises.

Ils précisent que cela alourdit le systè-

me, que cela est difficilement conci-

liable avec leur activité professionnel-

le et que cela n’a aucun intérêt pour

le justiciable, puisqu’ils sont soumis à

un tarif, et qu’il ne peut donc y avoir

aucun dérapage sur le plan financier.

La question nécessiterait d’être

débattue avec les Magistrats, afin de

savoir s’ils sont d’accord pour déro-

ger avec les règles de l’expertise judi-

ciaire, qui sembleraient ne pas s’im-

poser obligatoirement quant à la

rémunération de l’Expert-Notaire et

de permettre, ce qui est rendu pos-

sible par les règles du Nouveau Code

de Procédure Civile, qu’il soit dûment

provisionné, directement par les par-

ties, afin de pouvoir travailler rapide-

ment.

Ce point est apparu incontestable-

ment l’un des plus importants dans

les débats.

Il est en effet apparu clairement que la

mise en place d’un système de rému-

nération lourd, totalement méconnu

par la profession notariale, voire

incompatible avec leur mode de fonc-

tionnement, ne pourrait que rendre

encore plus difficile la désignation de

Notaires dans le cadre de l’article

255-10° du Code Civil.

C - Les pouvoirs du Notaire désigné

L’article 255-10° du Code Civil per-

met au Notaire désigné de disposer

d’un certain nombre de pouvoirs

importants.

En effet, l’article 259-3 du même Code

complète la mission en précisant :

« Les époux doivent se communiquer

et communiquer au Juge ainsi qu'aux

Experts et aux autres personnes dési-

gnées par lui en application des 9º et

10º de l'article 255, tous renseigne-

ments et documents utiles pour fixer

les prestations et pensions et liquider

le régime matrimonial.

Le Juge peut faire procéder à toutes

recherches utiles auprès des débi-

teurs ou de ceux qui détiennent des

valeurs pour le compte des époux

sans que le secret professionnel puis-

se être opposé. »

Les missions des Notaires désignés

au titre de l’article 255-10° leur per-

mettent d’ailleurs de saisir FICOBA,

mais aussi un organisme concernant

les transactions immobilières appelé

ŒIL (Observatoire des Evaluations

Immobilières Locales, tenu par la

Direction Générale des Impôts au

niveau départemental dans le cadre

des centres des impôts fonciers).

Il convient que les Avocats n’hésitent

pas à solliciter du Notaire l’usage de ce

pouvoir très important pour déterminer

la réalité du patrimoine à partager.

II – LA PORTEE DE L’ACTE ETABLI

Après avoir longuement envisagé le

problème de la mission du Notaire et

son statut, assimilable ou pas à celui

de l’Expert, a été discutée la nature

de l’acte qu’il allait établir.

Là encore, la question est de lier à

son statut controversé d’Expert judi-

ciaire.

Sommes-nous en l’état d’un acte

notarié ou d’un rapport d’expertise

judiciaire ?

Cette question est fondamentale

puisqu’un rapport d’expertise judiciai-

re peut être homologué par un Juge,

ce qui ne semble pas être le cas du

projet établi par le Notaire.

En effet, l’article 267 du Code Civil

indique :

« A défaut d'un règlement conven-

tionnel par les époux, le Juge, en pro-

nonçant le divorce, ordonne la liqui-

dation et le partage de leurs intérêts

patrimoniaux.

Il statue sur les demandes de main-

tien dans l'indivision ou d'attribution

préférentielle.

Il peut aussi accorder à l'un des

époux ou aux deux une avance sur sa

part de communauté ou de biens

indivis.

Si le projet de liquidation du régime

matrimonial établi par le notaire dési-

gné sur le fondement du 10º de l'ar-

ticle 255 contient des informations

suffisantes, le Juge, à la demande del'un ou l'autre des époux, statue surles désaccords persistant entre eux.»En conséquence, sauf à ce que les

parties se soient conciliées devant le

Notaire et aient accepté le projet de

partage, qui sera dans ce cas soumis

d’un commun accord à l’homologa-

tion du Juge, le Juge ne peut pas

homologuer le projet de partage.

Page 7: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

7

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

En cas de désaccord, il ne peut que

trancher des difficultés.

Il devra donc renvoyer les parties

devant le Notaire qui a établi cet acte.

En conséquence, le Notaire désigné

au titre de l’article 255-10° du Code

Civil établit un projet de partage, mais

doit aussi établir un document assimi-

lable à un rapport, dans lequel il

explique les difficultés auxquelles il

s’est heurté et dans lequel il reprend

les règles applicables pour arriver au

projet de partage qu’il soumet.

Ces points peuvent être précisés

dans le cadre d’un Procès-Verbal de

Difficulté, où l’on résume la position

de chacune des parties et de leur

Conseil, mais aussi où le Notaire

résume son travail et les méthodes

utilisées pour arriver à ce projet.

Avec ce document, le Juge dispose-

ra d’éléments nécessaires pour tran-

cher les difficultés.

Il ne pourra malgré tout pas aller jus-

qu’au bout, ce qui signifie que le Juge

du divorce ne pourra être le Juge de

la liquidation.

Il s’agit là d’une carence de la réforme

du divorce de 2004.

L’ensemble des parties à l’Atelier,

qu’elles soient Avocats ou Notaires,

ont appelé de leurs vœux une modifi-

cation législative sur ce point.

Le Juge du divorce renverra donc,

avec un certain nombre de difficultés

tranchées, le dossier devant le

Notaire, qui pourra soit établir un acte

signé par les deux parties, soit dres-

ser un Procès-Verbal de Difficulté, qui

devra partir devant le Juge de la liqui-

dation du régime matrimonial.

Il a été également rappelé dans le

débat l’importance du projet de par-

tage, non pour la liquidation du régi-

me matrimonial, mais pour la fixation

de la prestation compensatoire.

C’est là où la mission du Notaire et

celle du professionnel qualifié peuvent

faire doublon.

En effet, s’il apparaît, dans le cadre

de la liquidation du régime matrimo-

nial, que l’un des époux sera désa-

vantagé par l’autre, notamment par le

jeu des récompenses, cela peut

entraîner une compensation dans le

cadre de la prestation compensatoire.

Le projet de partage est donc sur ce

point très important.

A l’issue de nos travaux

nous aimerions émettre

les vœux suivants :

1. La désignation du Notaire de

l’article 225 al 10 doit être nomi-

native il ne faudrait donc cesser

de désigner le Président de la

Chambre des Notaires à Charge

pour lui de désigner qui il sou-

haite. Ce mode de désignation

nous paraît sujet à contestation

et à annulation des travaux réa-

lisés.

2. Il est nécessaire que le magistrat

mentionne la possibilité pour le

Notaire en charge de recourir

aux fichiers FICOBA et œil.

3. Il semble opportun que la consi-

gnation des frais soit fixée

autour de 3 000€ à prendre en

charge par moitié entre les

époux afin que le notaire dési-

gné puisse se faire remettre des

provisions indispensables à l’ou-

verture des opérations.

4. Il serait opportun d’établir une

charte de courtoisie pour les

convocations de s Avocats et

de proposer un délai de 10 jours

au moins avant le RDV

5. Dés la fixation de la date de la

convocation il conviendrait que

les avocats adressent au notaire

un courrier avec les pièces et

prétentions des époux

6. Il serait bon de rédiger un projet

de mission lorsque nous deman-

dons la désignation d’un notaire

comme lorsque nous deman-

dons la désignation d’un expert

Sans que cela ne soit exhaustifnous pourrions rédiger ainsi qu’ilsuit la mission du Notaire :

• Désigner Maître X en vue d’éla-

borer un projet de liquidation du

régime matrimonial et de forma-

tion des lots à partager

• Dire que le notaire devra :

- Recueillir toutes observations et

réclamations des parties, les

instruire et y répondre,

- Effectuer si nécessaire tout

transport sur les lieux

- Etablir les masses actives et

passives de la communauté

- Etablir la consistance des biens

immeubles composant la com-

munauté au jour de la présente

ordonnance

- Faire des propositions quant au

règlement des intérêts pécu-

niaires des époux

- Rechercher si les biens sont

partageables en nature , dans

l’affirmative composer des lots d

‘égale valeur en précisant le

montant des évaluations au jour

des opérations dans la négative

évaluer les biens

- Préciser le montant des indem-

nités d’occupations éventuelles

- Faire le compte entre les parties

en prenant en considération la

date de dissolution de la com-

munauté

- Fournir au Tribunal tous élé-

ments de nature à lui permettre

de faire le compte et de propo-

ser un partage en nature

• Dire que le Notaire ainsi désigné

disposera des pouvoirs de l’ar-

ticle 239-3 du code civil

- Et qu ‘il pourra se fera remettre

tous les relevés de comptes

documents bancaires comp-

tables et fiscaux (article 3 de la

Loi du 04.08.1962 ) et tous les

autres documents tant auprès

des parties que des tiers sans

que ces derniers puissent invo-

quer le bénéfice du secret pro-

fessionnel .

- Qu’il pourra accéder aux

fichiers FICOBA et ŒIL

• Dire que le notaire pourra s’ad-

joindre tout sapiteur de son choix

dont le concours serait nécessai-

re pour l’accomplissement de sa

mission

• Dire que le Notaire devra établir

un projet de partage et convo-

quer les parties pour signature

• Dire qu’à défaut d’accord il éta-

blira un PV de difficulté mais y

joindra impérativement son pro-

jet de partage pour qu’il soit sta-

tué si possible.

Page 8: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

8

La Veille - n°5 - Janvier 2008

Compte rendu des interventions :

Les travaux menés au cours de cetatelier faisaient suite à la présenta-tion générale de ce thème parMaître Dominique FABIANI,Notaire, et Maître Cécile VIALE-LASSAU,Avocat, lors de la séancemagistrale organisée en premièrepartie de ce colloque.

Mes Anne BERDAH et

Dominique FABIANI, Notaires

Mes Agnès PROTON et

Winni SCHREIBER-BALDET,Avocats

Ces « travaux pratiques » se sont arti-

culés autour des axes de réflexion

suivants :

I. LES DEMARCHES PRELIMINAIRES : gestion del’agenda et réunion des pièces préalables

Dans un souci de simplification, rapi-

dité et efficacité, il est tout d’abord

apparu indispensable, lorsque son

intervention était nécessaire, de saisir

le Notaire très en amont de la mise en

place de la procédure de divorce par

consentement mutuel, si possible

dès l’ouverture du dossier.

Afin d’optimiser cette collaboration

Avocat / Notaire, il est également

apparu souhaitable que l’Avocatréunisse le maximum de pièces etrenseignements à transmettre au

Notaire, incluant :

- Etat-civil, situations familiale et

professionnelle :

• copie intégrale des actes d’état-civil :

acte de mariage, actes de naissance

époux et enfant(s)

• photocopie des cartes d’identités

des époux, du livret de famille (en ce

comprise la première page vierge

après mention du dernier enfant,

permettant d’établir a contrario

qu’aucun autre enfant n’est issu de

cette union)

• renseignements sur les professions

et adresses respectives des époux

• donations entre époux et éven-

tuelles dispositions testamentaires

• références Sécurité Sociale et

Caisse d’assurance maladie ; réfé-

rences mutuelle santé le cas

échéant

- Eléments d’actifs à liquider :

• titres de propriété des actifs immo-biliers1 (résidence principale et / ou

secondaire en France mais égale-

ment à l’étranger) ou mobiliers(acte de francisation d’un bateau,

cartes grises de véhicules)

• contrats de bail et conventions

diverses (ex. convention de place

de port / contrat d’amodiation,

convention d’indivision, conces-

sions funéraires…)

• Statuts de Sociétés Civiles et / ou

Commerciales et extraits Kbis

correspondants, comptes-courant

d’associés

• éléments relatifs aux fonds de com-

merce, aux clientèles civiles, aux

actifs professionnels

• déclarations des revenus des trois

dernières années

• descriptif et évaluation des meubles

meublants, œuvres d’art…

- Eléments de passif :

• avis d’imposition des trois dernières

années

• prêts hypothécaires et / ou à la

consommation en cours

• cautionnements, leasings de véhi-

cules, pension alimentaire et plus

généralement toute charge finan-

cière et matérielle assumée par les

parties.

A cet égard, il devra être conseillé aux

clients de liquider impérativement enamont tous les prêts à la consom-mation et de prévoir la négociation de

la désolidarisation du ou des prêtshypothécaires ou à la consomma-

tion2, ainsi que la clôture descomptes joints.

En tout état de cause, ces renseigne-

ments patrimoniaux seront néces-

saires pour compléter à terme ladéclaration sur l’honneur de l’article271 du Code Civil, qui devra être

jointe à la Convention si celle-ci pré-

voit une prestation compensatoire.

Enfin, il a été évoqué l’opportunité de

solliciter, dès l’ouverture du dossier et

en complément des pièces préa-

lables susvisées, une provision àl’ordre du Notaire d’un montant mini-

mum de 200 €3.

Cette provision pourra être jointe au

dossier préalable qui aura été consti-

tué à destination tant de l’Avocat que

du Notaire, et que l’Avocat transmet-

tra à ce dernier.

Elle pourra alternativement être ver-

sée par les clients, dûment prévenus,

directement au Notaire lors de l’en-

tretien « triangulaire » qu’il est forte-

ment conseillé d’organiser au plus tôt

en l’Etude du Notaire, en présence de

ce dernier, des clients ainsi que du ou

de leurs Conseils respectifs.

Il a également été insisté sur la néces-

sité d’évaluer le plus tôt possible, etde manière la plus exhaustive, l’en-veloppe du montant des frais, hono-raires et impôts (droits d’enregistre-

ment, taxe de publicité foncière…)

afin que les clients réunissent cette

somme en étant bien conscients

qu’ils en verseront la totalité lors de la

signature de la Convention notariée,

en ce incluse la totalité des droits

d’enregistrement dus.

II. ELABORATION DE LA CONVENTION ET DU PROJET LIQUIDATIF : la répartition des rôles

1/ La nécessité de recourir à des tiers

Dans le cadre de cette « démarche

qualité » ainsi conjointement menée

Atelier n° 3 Consentement mutuel

Page 9: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

9

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

par le Notaire et l’Avocat, il a été

observé que les difficultés d’ordre

matériel ou relationnel peuvent être

résolues en faisant également appel à

d’autres professionnels, savoir :

S’agissant des problèmes d’éva-

luation des éléments actifs et / ou

passifs :

• Les biens et droits immobiliers :

Il est ici suggéré de solliciter, dans

les cas nécessaires, la désignation

d’un Expert Evaluateur auprès du«MIN» (Marché Immobilier des

Notaires)

En effet, l’estimation faite par ce

professionnel sera davantage

objective et mieux renseignée que

celle proposée par de simples

agences immobilières.

Cette évaluation sera également

plus crédible vis-à-vis de

l’Administration fiscale dans l’hypo-

thèse d’un éventuel redressement.

Parallèlement, l’intervention de ce

professionnel sera par hypothèse

moins onéreuse que celle d’un

Expert Judiciaire inscrit près de la

Cour d’Appel.

Pour mémoire, il faut en moyenne

compter 450 € HT pour un apparte-

ment de taille moyenne et 680 € HT

pour une maison s’il est fait appel à

l’Evaluateur du MIN.

Certes, pour faire l’économie de

cette dépense, le Notaire peut éga-

lement proposer de consulter lesstatistiques notariales qui pourront

ainsi utilement compléter d’éven-

tuelles estimations immobilières par

des agences.

En conclusion, il est ici recommandé

de recourir à l’Expert Evaluateurauprès du MIN afin d’optimiser laprotection des parties, mais égale-

ment limiter la responsabilité desrédacteurs de la Convention.

• L’entreprise :

Le sort de l’entreprise libérale ou

commerciale sous forme sociale ou

en nom propre devra être réglé en

collaboration avec l’ExpertComptable, qu’il s’agisse des pro-

blèmes d’évaluation ou de fiscalité

consécutifs à la liquidation puis l’at-

tribution de cet actif.

S’agissant de clients étrangers

non francophones, il sera peut-être

nécessaire de faire appel à un

Traducteur, ainsi qu’à un correspon-dant professionnel étranger suscep-

tible de fournir un éventuel certificat de

coutume, voire toutes informations juri-

diques ou fiscales du pays concerné.

Quid de la possibilité d’adresser les

époux à un Médiateur familial lors-

qu’ils ne parviendraient pas à un

accord et que les Conseils ainsi que

le Notaire se trouveraient dans l’im-

passe ?

Cette solution n’a pas recueilli l’aval

des praticiens réunis dans le cadre de

cet atelier, lesquels ont suggéré

comme alternative de faire alorsintervenir un autre Notaire extérieurau dossier.

2/ La répartition de la rédaction

Il est essentiel, pour répondre auximpératifs procéduraux et auxdemandes des Magistrats, de distin-guer clairement le champ d’interven-tion des rédacteurs respectifs(Avocat / Notaire), savoir :

• Les effets personnels entre lesépoux ainsi que les effets à l’égarddes enfants devront être rédigés

par l’Avocat dans la Convention

sous seings privés annexée à la

requête4.

• Seule la liquidation du régimematrimonial, incluant le sort du ou

des biens immobiliers, sera formali-

sée par acte authentique.

En effet, les Magistrats insistent pour

que la Convention notariée n’aborde

pas les effets personnels ni les effets

à l’égard des enfants afin, le cas

échéant, de pouvoir modifier, jus-qu’au dernier moment, les accordsinitialement souscrits par les partiessur ces points5.

Effectivement, alors qu’il est bien évi-

demment impossible de toucher à

l’acte authentique, il est aisé de modi-

fier la Convention sous seings privés

lors de l’audience devant le JAF.

L’ajout et / ou les mentions à raturer

seront en ce cas simplement para-phés «en direct» par les parties etleurs Conseils. La convention ainsi

modifiée ou complétée sera remise

au Magistrat qui prononcera alors le

divorce sur « le siège ».

A défaut, l’affaire devra obligatoire-ment être renvoyée pour que le

Notaire dresse l’acte rectificatif com-plémentaire, ce qui ne manquera pas

d’entraîner des délais et des coûts

que les parties, ainsi que les profes-

sionnels concernés, auraient préféré

éviter (y compris le Notaire puisque

l’acte rectificatif sera par définition

peu rémunérateur).

En tant que de besoin, la convention

sous seings privés fera expressément

référence à la Convention authen-

tique annexée (= son expédition)

quant à la liquidation du régime matri-

monial incluant le sort des (du) biens

immobiliers et le paiement d’une

éventuelle prestation compensatoire

y afférente.

Pour mémoire, il sera toujours oppor-

tun de rappeler aux clients la nécessi-

té de procéder à une liquidation desrégimes de séparation de biens.

Il convient en effet de vérifier l’existen-

ce éventuelle de créances entreépoux, lesquelles s’évalueront alors

comme des récompenses en matière

de communauté.

Les Juridictions du fond ont à cet

égard rappelé systématiquement la

nécessité de procéder en ce cas à la

liquidation du régime de séparation

de biens.

Il convient en effet de distinguer les

opérations de partage de celles de

liquidation dans le cadre de laquelle

seront établis et liquidés les comptes

entre les époux.

Liquidation et partage sont donc des

notions qu’il convient de distinguer

clairement.

En l’absence d’indivision, il n’y aura

bien évidemment pas lieu à partage

mais il y aura tout de même matière à

liquidation, ce qu’il conviendra de

vérifier.

Toujours à propos de la rédaction, il

est apparu opportun d’insérer une

déclaration de sincérité et d’exhaus-tivité s’agissant des informationsexclusivement fournies par les par-ties en vue d’élaborer et formaliser

leur convention6.

Toujours au plan rédactionnel, il est

également apparu nécessaire de pré-

voir des clauses de «garantie de pas-sif fiscal» ou plus exactement de

répartition de la prise en charge de

Page 10: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

10

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

l’impôt dans l’hypothèse d’un redres-

sement fiscal postérieur à la signature

de la Convention (ISF, IRPP, droits

d’enregistrement…).

III. LES CONVENTIONS A DECONSEILLER AUX CLIENTS

1/ Les conventions d’indivision sur tout

ou partie des actifs

Toute convention d’indivision sur les

immeubles doit faire l’objet d’un acte

notarié (cf. article 815-1 du Code Civil).

Il est toutefois fortement déconseillé

aux futurs ex-époux de conserver

ainsi des intérêts matériels et pécu-

niaires « conjoints »…

Ces derniers sont évidemment sus-

ceptibles de générer des discordes et

des litiges ultérieurs…

A ce stade, il y a lieu d’attirer l’atten-

tion des rédacteurs que les magis-

trats rejettent systématiquement une

convention de divorce dans laquelle

un époux, bien que non attributaire

d’un bien, restait solidaire du prêt

ayant servi à son financement.

Si malgré tout les époux insistaient

pour voir établir une telle indivision

conventionnelle sur tout ou partie des

actifs, il conviendra bien en amont de

prévoir en détail les modalités d’ad-

ministration mais également de sortie

de cette indivision (ex. les modalités

de répartition du prix en cas de vente

du bien indivis).

2/ La donation de biens communs aux

enfants du couple

Là encore, un tel acte de disposition

à titre gratuit est à déconseiller aux

futurs ex-époux (car ils risquent alors

de « se dépouiller » prématurément

d’un élément important de leur patri-

moine…).

Qui plus est, le nouvel article 924-4du Code Civil reprend en pratique les

entraves à la liberté de disposition

posées précédemment par l’ancien

article 930 du Code Civil (nécessité

de faire intervenir les cohéritiers réser-

vataires dans l’acte de vente consen-

ti par l’un d’eux, par hypothèse

donataire du bien objet de cette

transaction).

3/ La vente prématurée d’un bien

commun suivi du rachat individuel

d’un bien immobilier avantle prononcé du divorce

Une telle opération pour le moins pré-

maturée est à déconseiller, car elle est

assortie de risques très importants :

• en cas de prédécès de l’un des

époux avant le prononcé du divorce

• en cas de désaccord survenu entre

les époux postérieurement à cettetransaction mais antérieurementau prononcé du divorce (ex. point

de désaccord portant sur la fixationde la date de jouissance divise,

laquelle devra impérativement dans

ce cas être antérieure à l’acquisi-

tion individuelle effectuée par

l’époux commun en bien mais non

divorcé).

Même en cas d’accord, il sera évidem-

ment fortement déconseillé aux époux

engagés dans une procédure de divor-

ce d’acquérir un bien et de faire

remonter la date de jouissance divise

et donc les effets du divorce entre eux

à une date antérieure à l’acquisition.

Une telle convention n’est pas oppo-

sable aux tiers pour qui le bien ainsi

acquis sera considéré commun.

IV. LES ASPECTS FISCAUX

1/ La vente du bien commun

antérieurement au prononcé du

divorce et le partage des fonds

d’un compte commun

L’Administration fiscale est suscep-

tible de réclamer le droit de partage

sur la répartition et la distribution du

prix si la date du divorce est située à

proximité.

Attention et prudence, en ce qui

concerne les comptes existants entre

les époux qui auraient été partagés

même avant le dépôt de requête.

Les interrogations sont possibles à

l'aide du fichier FICOBA !

Les rédacteurs d’actes engagent leur

responsabilité professionnelle en cas

de fausse déclaration !

Pour cette raison il est impératif de

faire signer aux clients une clause de

conscience pour défaut de déclara-

tion de comptes des clients (le droit

de reprise pour l'Administration

Fiscale est de 10 ans, avec pénalité

de 0,40 % par mois = 4,80 % / an).

Attention par rapport à la formulation

de la déclaration sur l'honneur !

"Les clients déclarent avoir été mis au

courant des sanctions fiscales et

pénales encourues s'ils omettent de

déclarer un compte, un portefeuille ou

tout autre bien (se trouvant parfois à

l’étranger ) dans leur déclaration".

Le processus est le même pour les

meubles meublants et objets mobi-

liers partagés avant la signature de

l’acte notarié ; Il y a donc lieu d’indi-

quer au notaire la valeur des biens

déjà partagés pour que l’assiette des

droits d’enregistrement comprenne

ces meubles.

2/ La désolidarisation fiscale

Il a toujours été possible pour un des

époux de demander dans le cadre

d'une procédure gracieuse au

Trésorier Payeur Général la décharge

de responsabilité en invoquant la

mauvaise gestion de l’autre époux

mettant en péril le foyer et son patri-

moine.

La loi de finance 2008 prévoit désor-

mais pour les époux et partenairesliés par un pacte civil de solidaritél'instauration d’un dispositif légal de

décharge de responsabilité solidaire

en cas de divorce ou de séparation.

(CGI, art. 1691 bis nouveau; abroga-

tion des dispositions des articles

1685 et 1685 bis du CGI reprises

dans le nouvel article 1691 bis du

même code) ;

a) Ce nouvel article précise les dispo-

sitions relatives à la responsabilité

solidaire des époux et des parte-

naires de PACS.

Au cours de leur vie commune, les

époux et les partenaires liés par un

PACS sont solidairement tenus au

paiement :

- de l’impôt sur le revenu lorsqu’ils

font l’objet d’une imposition com-

mune

- de la taxe d’habitation lorsqu’ils

vivent sous le même toit

NB : la responsabilité solidaire au titre

de l’ISF reste régie par les disposi-

tions de l’article 1723 ter - 00 B.

Page 11: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

11

b) Le nouvel article 1691 bis du CGI

instaure, sauf cas de fraude et

sous certaines conditions, un nou-

veau régime de décharge de res-

ponsabilité solidaire en matière

d’impôt sur le revenu, de taxe

d’habitation et d’ISF.

Ce texte ne concerne, selon cer-

taines modalités, que les personnes

divorcées ou séparées.

La décharge de l’obligation de paie-

ment est accordée en cas de dis-

proportion marquée entre le mon-

tant de la dette fiscale et, à la date

de la demande, la situation financiè-

re et patrimoniale, nette de

charges, du demandeur.

Si cette décharge a été accordée,

informer le notaire pour qu'il le vise

dans l'acte authentique.

3/ La fiscalité de la prestation compensatoire

La fiscalité de la prestation compen-

satoire étant relativement complexe,

nous nous limitons ici à quelques

observations et les rédacteurs

d’actes devront rechercher selon

chaque cas à traiter les différentes

règles et dispositions applicables qui

varient ( cf. : Loi de Finance ).

Le régime fiscal d'imposition pour

celui qui la reçoit dépend de la forme

de la PC.

Rente : Impôts sur le revenu

Capital :- Bien de la communauté ( immeuble

commun, deniers communs ) 1,1 %

droit de partage - p.ex : résidence

principale !

- Bien indivis des époux séparés de

biens :

- Bien acquis pendant le mariage

= régime de la communauté - droit

de partage 1,1%;

- Bien acquis avant le mariage, régi-

me particulier - dation en paiement :

* Droit fixe de 125 € s'il s'agit de

numéraires

* Si immeuble = taxe de publicité :0,715 %

Il faut toujours faire le distinguo s’il

s’agit des deniers communs, alors

s’appliquera un droit de partage ou

d’un bien indivis ou acquis avant le

mariage ;

- Versement unique : 125 €

- Versement étalé en moins / égal de

12 mois : capital

- Versements étalés sur plus de 12

mois : régime fiscal applicable -

Rente - Imposition sur le revenu

comme en matière de pension ali-

mentaire;

La PC est taxable entre les mains de

celui qui la reçoit. L'administration fis-

cale a toutefois déclaré par une déci-

sion du 20.12.2005 si l'une des par-

ties bénéficie de l'aide juridictionnelle

les droits d'enregistrement sont exo-

nérés.

Si la PC est en nature, il faut impéra-

tivement déterminer une valeur du

bien sinon l'AF ne peut asseoir ses

droits (portefeuilles- titres).

Il est ici précisé que le régime fiscal au

niveau de l’impôt sur le revenu et des

droits d’enregistrement varie selon

qu’il s’agisse d’une rente ou d’un

capital et il est important de qualifier

expressément dans la convention

des versements de capital ou de

rente.

Deux mesures fiscales nouvelles pour

inciter le débiteur d'une PC à payer

sur une période de 12 mois :

• Article 199 octodecies : les verse-

ments de sommes d'argent et l'at-

tribution de biens ou de droits en

exécution de la prestation compen-

satoire fixée dans la convention du

divorce ou dans le jugement de

divorce, sur une période au plus

égale à 12 mois à compter de la

date à laquelle le jugement est

devenu définitif, ouvre droit à une

réduction d'impôt sur le revenu

égale à 25% du montant des ver-

sements effectués, des biens et des

droits attribués, pour la valeur fixée

dans la convention homologuée ou

le jugement de divorce dans la limi-

te d'un plafond de 30.500 €, soit

une réduction de 7.625 €.

• Lorsque le capital est versé en une

seule fois :

- Actuellement il donne droit à une

réduction d'impôt ainsi qu'à la

perception d'un droit d'enregistre-

ment de 1,1 % si le bien est com-

mun ou indivis ou à la perception

de droits d'enregistrement appli-

cable aux mutations à titre gratuit

entre époux s'il s'agit de fonds ou

de biens propres à l'époux débi-

teur.

- Désormais quelque soit la forme

de la prestation compensatoire

numéraire ou nature il y aura droit

à réduction d'impôt.

Les mesures fiscales encouragent le

versement de la prestation compen-

satoire sous forme de capital.

• Le capital étant versé sur une pério-

de plus de 12 mois, le principe de

rente s'applique et le débiteur peut

le déduire de son revenu global.

• Le capital étant versé sur une pério-

de au plus égale à 12 mois, applica-

tion du principe de la rente, déduc-

tion comme PA ainsi que la réduc-

tion d'impôt sur le revenu égale à

25% dans la limite d'un plafond de

30.500 €.

Au cas où le versement du capital au

titre de la PC est supérieur à 12 mois

le montant de la rente est revalorisé

année par année.

Enfin, concernant l’ISF, lorsqu’un

époux reçoit à titre de prestation

compensatoire un usufruit sur un

bien immobilier il ne faut surtout pas

oublier d’informer l’usufruitier qu’il est

imposable à l’ISF sur la valeur de la

pleine propriété du bien qui fait l’objet

du démembrement (CGI art 885 G) et

corrélativement, le débiteur de la

prestation compensatoire n’est plus

imposable sur ce bien.

V. L’IMPACT DE LA

MONDIALISATION DE

L’ACTIVITE JURIDIQUE

Les praticiens du droit sont de plus

en plus souvent confrontés à des

litiges impliquant un ou plusieurs élé-ments d’extranéité, particulièrement

dans notre région (Côte d’Azur), tou-

chant les acteurs économiques bien

sûr, mais également notre clientèle

privée.

Ainsi, en Europe, l’application du prin-

cipe de la libre circulation des biens et

des services, ainsi que des per-

sonnes, a favorisé la mobilité descitoyens et des activités commer-ciales.

Page 12: Les roles respectifs de l'Avocat et du Notaire dans la procedure de divorce - Recherche d'une efficacite (avril 2008)

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La Veille n°7 - Spécial colloque - Avril 2008

Cette mobilité du sujet de droit et de

son activité économique appelle une

connaissance accrue de l’articulation

des textes applicables, qu’ils soient

nationaux (droit interne et règles

nationales de droit international privé),

communautaires (Règlements euro-

péens) ou conventionnels (Conventions

bilatérales ou multilatérales et Traités

internationaux).

Sous l’effet de cette mondialisation, le

sujet de droit peut se voir proposer

une mutation professionnelle tem-poraire à l’étranger mais également yformer un projet d’installationdurable dans des perspectives et

pour des raisons diverses…

La question se posera alors de la

liquidation d’un régime matrimonial«itinérant».

Ainsi, un contrat de mariage de sépa-

ration de biens entre deux ressortis-

sants français ne produira plus ses

effets escomptés si le couple s’instal-

le en Angleterre et vient à se séparer,

en raison du pouvoir souverain d’ap-

préciation du Juge anglais, lequel ne

se privera pas d’écarter les effets de

la convention s’il les estime inéqui-

tables !

De même, un contrat de mariage alle-

mand prévoyant, comme il est autori-

sé dans ce pays, le montant de ce qui

sera à verser en cas de divorce, se

verra contesté en France par le signa-

taire qui trouvera intérêt à ne pas l’ap-

pliquer…

L’imprévisibilité est donc un écueil

redoutable dans ces dossiers « inter-

nationaux ».

Il conviendra alors de faire appel à

des correspondants locaux .

Ces correspondants étrangers per-

mettront de vérifier par le biais de

consultations et de certificats de cou-

tume le droit applicable à chaquecas d’espèce (et de déterminer ainsi

la loi étrangère et / ou la loi française

applicables au fond).

Bien entendu, dans toutes ces hypo-

thèses, la compétence juridictionnelle

française devra avoir été préalable-

ment vérifiée (cf. problème d’éven-

tuelles litispendances).

Ainsi ont été évoquées, pour clôturer

cet atelier, des hypothèses présen-

tant un caractère d’extranéité mais

également de complexité avérées :

• attribution d’un bien immeuble à

l’étranger contre versement com-

pensatoire (soulte et / ou prestation

compensatoire) en France : quid de

la fiscalité applicable ainsi que des

évaluations du bien à l’étranger ?

A cet égard, il a été dûment vérifié

qu’à la suite de la dissolution du

mariage, il convient de procéder à

la liquidation et au partage des

biens acquis tant en France qu’à

l’étranger ; il sera en ce cas pos-

sible de liquider les intérêts des

époux en tenant compte de l’exis-tence d’un bien immeuble àl’étranger pour équilibrer lescomptes…

• la liquidation en France d’un régime

conventionnel ou légal étrangers, par

exemple une participation aux

acquêts allemande (sachant que ce

régime ne se liquide pas comme la

participation aux acquêts française) :

c’est la question de l’interférencedu régime matrimonial étrangersur une liquidation faite en France,par hypothèse en application de

cette loi et /ou de cette convention

étrangères.

Dans ces conditions, le devoir deconseil supposera ici que les profes-

sionnels consultés incitent leurs

clients, en cas de déménagement àl’étranger, à consulter localement

tout professionnel compétent afin de

vérifier si les situations juridiqueschoisies continueront d’y produireleurs effets (conventions matrimo-

niales, dispositions testamentaires…).

Notes

1) Il peut être utile de solliciter la production des quittances et / ou

du contrat d’assurance multirisque habitation, afin de vérifier le

montant du capital et des biens garantis (biens et droits immobi-

liers et mobiliers mais également œuvres d’art).

2) Il convient de rester vigilant à la question de « l’attribution des

dettes », lorsque celles-ci sont affectées distinctement à des élé-

ments d’actifs respectivement attribués à l’un ou l’autre des

époux…

3) Ceci afin de respecter la législation applicable prohibant les

comptes débiteurs au sein des comptabilités des Etudes

Notariales. Cette provision permettra alors de financer les investi-

gations et l’obtention des pièces préalables complémentaires

d’usage : états hypothécaires, extraits cadastraux, note d’urba-

nisme, renseignements RCS… Ces préconisations pratiques -

pragmatiques - sont là encore proposées dans un souci de rapi-

dité et d’efficacité, afin d’améliorer les prestations conjointes, au

bénéfice des clients communs.

4) Dans le cadre d’une procédure dite de « passerelle », il sera

opportun de faire figurer le numéro de l’Ordonnance de non-

conciliation sur la Convention sous seings privés annexée à la

requête déposée aux fins de divorce par consentement mutuel.

5) Idéalement, il conviendrait que l’enrôlement et l’audiencement

soient proches afin d’éviter les risques de changement dans les

situations respectives des parties, inhérents à un délai important

entre ces deux étapes.

N° 7 AVRIL 2008Spéc ia l Col loque

est une publication de l’Ordre des avocats au Barreau de Grasse et plus précisément du groupe de veille juridique.

Rédacteur en chef et coordinatrice :Maître Sylvie TRASTOUR

Les animateurs du Colloque :

Me Anne BERDAH, Me Benoît HERVET, Me Frédéric PARENT,

et Me Dominique FABIANI (pour ce qui est des notaires).

Me Agnès PROTON, Me Elisabeth GRANIER ZARRABI,

Me Cécile LASSAU VIALE, Me EMMANUEL VOISIN-MONCHO,

Me Winni SCHREIBER BALDET, Me Nathalie DAON COUSSON,

Me Laurence PARENT-MUSSARA et Me Karim BEN SEDRINE (pour les avocats).

Merci à Monsieur le Bâtonnier de l’Ordre, au Conseil de l’Ordre

et les membres de la Chambre des Notaires.

Vous pouvez retrouver La Veille sur notre intranetLes opinions émises dans ce numéro sont celles de

leurs auteurs qui les engagent donc à titre personnel.