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L’ESPACE EXTRA ATMOSPHERIQUE, ENJEU DU XXIè SIECLE ? Dualité civile et militaire de l’utilisation de l’espace Etude du cycle 2007-2008. Rapporteur : J – Christophe BECKENSTEINER 1

L’ESPACE EXTRA ATMOSPHERIQUE, ENJEU DU …ihedn-rl-ar14.org/documents/GT%20Stratos%20AR14%20jcb%20V4... · I-1-1 / Généralités : le conflit moderne et l’exploitation de l’espace

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L’ESPACE EXTRA ATMOSPHERIQUE,

ENJEU DU XXIè SIECLE ?

Dualité civile et militaire de l’utilisation de l’espace

Etude du cycle 2007-2008.

Rapporteur : J – Christophe BECKENSTEINER

1

Membres du Groupe de Travail

Président :

Claude BORDES, Directeur Général de société, auditeur de la 52è session, Toulouse 1978,

Rapporteur :

J -Christophe BECKENSTEINER, Avocat à la Cour, auditeur de la 160è session, Lyon 2005,

Membres :

Gilbert CHARTON, Responsable de projet, membre associé,

François COLLOD de CHANTEMERLE, Entrepreneur du bâtiment retraité, membre associé,

Avec le concours de :

Michel SALAGER, Commandant (EF) honoraire de la Police Nationale, membre associé,

Thierry URING, ingénieur Thalès, Délégué Général de l’Union des Industries Métallurgiques, Electriques et Connexes de l’Isère (UDIMEC 38).

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SOMMAIRE

L’ESPACE EXTRA ATMOSPHERIQUE, ................................................................................. 1 ENJEU DU XXIè SIECLE ? ........................................................................................................ 1

Membres du Groupe de Travail ................................................................................................ 2 SOMMAIRE ............................................................................................................................ 3 Introduction .............................................................................................................................. 4

1 / Historique ........................................................................................................................ 4 2 / Définitions ....................................................................................................................... 5 3 / Aspects juridiques ........................................................................................................... 5

I / Enjeux militaires, civils et duaux ......................................................................................... 7 I-1 / Militaire : enjeu de l’espace extra atmosphérique ......................................................... 7

I-1-1 / Généralités : le conflit moderne et l’exploitation de l’espace extra atmosphérique. .......................................................................................................................................... 7 I-1-2 / National : les besoins militaires dans le cadre de la politique de développement militaire français ............................................................................................................... 7 I-1-3 / International : les besoins militaires dans le cadre de son positionnement international en particulier par rapport aux Etats-Unis et aux autres Etats ........................ 8 I-1-4 / Européen : l’avenir du développement militaire français passe par l’Europe ......... 9

I-2 / Civil / la défense économique – le besoin d’indépendance ........................................... 9 I-2-1 / Généralités : le développement de l’espace sur le plan civil et commercial. .......... 9 I-2-2 / National: les entreprises françaises de l’espace et leurs contraintes, la nécessité de l’indépendance ................................................................................................................ 10 I-2-3 / International : les entreprises américaines et leurs liens avec la Défense américaine. La non dépendance et ses conséquences. ..................................................... 10 I-2-4 / Européen : le besoin de regroupement pour être compétitif ................................. 10

I-3 / Dualité civilo-militaire ................................................................................................ 11 I-3-1 / Généralités : La notion de développement commun civil et militaire. ................. 11 I-3-2 / National et européen: la notion de développement commun, civil et militaire. .... 11

1-3-2-1 / Apport et intérêts des programmes duaux au travers de la technologie et des techniques spatiales : ......................................................................................................... 11

1-3-2-2 / Dualité des besoins et des missions / par domaines : .................................. 11 1-3-2-3 / Dualité des marchés : .................................................................................. 12

1-3-2-3-1 : Militaire par rapport au civil ................................................................. 12 1-3-2-3-2 : Civil par rapport au militaire ................................................................ 12

I-3-3 / International : la supériorité des Etats-Unis dans le monde. ................................ 13 II / Perspectives pour une approche duale .............................................................................. 14

II-1 / La gestion de la dualité : quelles articulations ? Organisation politique pour favoriser une politique de développement dual ? ............................................................................... 15 II-2 / La gestion de la dualité par l’Etat et par les Etats européens : une mission à organiser ............................................................................................................................................ 16

II-2-1 : En France : ........................................................................................................ 16 II-2-2 : A l’échelle Européenne. ................................................................................... 17

Conclusion ............................................................................................................................. 19 Notes ...................................................................................................................................... 20 Bibliographie .......................................................................................................................... 24

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Introduction

1 / HistoriqueIl y a à peine quatre siècles, la Terre était supposée être plane et limitée par des mers inhospitalières, et l’Espace, centré sur la Terre, se limitait à la vue dans le ciel des étoiles et de sept planètes, dont le Soleil et la Lune.Puis Galilée (1564 – 1642) suggère que la Terre est sphérique et tourne sur elle-même, et n’est pas le centre mais seulement l’une des planètes du système solaire.Ce n’est que trois cents ans plus tard que commencera véritablement la conquête de l’Espace.En effet, le 4 octobre 1957, ce fut la réussite de Spoutnik, lancé par l’URSS, et ce n’est que quatre mois plus tard, le 31 janvier 1958 que les USA lancent Explorer au moyen d’une fusée Juno. A l’occasion de ce lancement le Sénateur Lyndon B. Johnson, futur Président des USA, devait déclarer, ce qui justifie la course à l’espace : « Il y a quelque chose de plus important que toutes les armes ultimes. C’est la position ultime – la position du contrôle total sur la Terre qui réside quelque part dans l’espace. (…) Qui gagne la position ultime gagne le contrôle, le contrôle total sur la Terre, pour la tyrannie ou au service de la liberté. » La Lune a été l’objet d’une conquête acharnée entre les USA et l’URSS entre 1959 et 1976. Dans un premier temps, c’est l’URSS qui marque les points ; les sondes automatiques Luna, en constante évolution, leur permettent de collectionner successivement tous les records (1).Toutefois, dès les années 1960, les américains affichent clairement leur objectif : déposer un Homme sur la Lune et multiplient les programmes préparatoires, avec la réalisation de l’objectif le 21 juillet 1969 (2).Cette course effrénée (10 millions de personnes y participeront aux USA en 17 ans, plus de 120 milliards $ y seront consacrés), finalement remportée au finish par les américains, permettra d’accomplir d’énormes progrès scientifiques dans des domaines très divers, tels que les télescopes, les fusées, l’électronique, la miniaturisation, etc.Aujourd’hui, l’accès à l’espace est une composante primordiale pour toute grande Nation.Alors que la maîtrise de l’espace n’est encore que tripartite (USA, Russie, Europe), les utilisations de l’espace furent d’abord à chaque fois spécifiquement militaires, même avec la disparition de la confrontation stratégique Est – Ouest :

- surveillance par les satellites de télédétection,- communication, contrôle, commandement- transit des missiles- protection contre les missiles adverses,

avant de devenir des usages civils permettant le développement de nouvelles technologies :

météorologie,télécommunicationstélédétection,positionnement (GPS, Galileo)exploration de l’espace, etc.

Nous avons choisi d’explorer cette dualité civile et militaire de l’utilisation des satellites et, après quelques définitions et un point sur les aspects juridiques, nous aborderons les enjeux militaires, civils et duaux et envisagerons les besoins à satisfaire, avant de conclure sur les perspectives de logique industrielle et de pilotage.

2 / DéfinitionsOù se situe l’espace extra atmosphérique, thème de l’étude ?A cause de la gravité de la Terre, l’atmosphère vue du sol est nécessairement stratifiée horizontalement.M.C. Kelley distingue, à partir du sol, différentes couches en fonction de la température de gaz neutre et classe ainsi la troposphère jusqu’à environ 10 Km d’altitude où la température décroît rapidement. Au-dessus, dans la stratosphère, la température commence à augmenter par l’effet de l’absorption des rayons ultraviolets du Soleil par l’ozone jusqu’à environ 50 Km (la stratopause) où cet effet se termine.Puis, le refroidissement radiatif crée un minimum de température vers environ 80 Km (la mésosphère). Au-dessus de la mésopause, la température recommence à augmenter rapidement, du fait du rayonnement ultraviolet du Soleil, c’est la thermosphère. (3)Comme le rapporte Christian Malis (4), l’analyse du milieu spatial doit être faite en fonction de ses propriétés spécifiques. Il convient de s’affranchir de la tendance à considérer l’espace comme une simple extension de la 3è dimension, c'est-à-dire du milieu aérien, optique dans laquelle l’espace ne serait que la partie supérieure de l’enveloppe atmosphérique dont l’Homme a acquis la maîtrise au cours du XX è siècle, mais n’en serait pas réellement différent en nature. La conscience de sa spécificité commande une conceptualisation stratégique pertinente et féconde. Le Laboratoire de Stratégie de l’Armement a publié une synthèse de travaux sur l’Espace et la dualité civile et militaire qui précisent cette dualité par domaines (5).La coopération entre organismes publics se concrétise par l’assistance à maîtrise d’ouvrage et par l’expertise technique du CNES au profit de la DGA. La DGA et le CNES vont prochainement signer un accord portant sur la préparation du futur, qui mettra en évidence l’importance de la dualité. Une équipe de représentants de la Défense, a été placée auprès du président du CNES pour favoriser une meilleure prise en compte des besoins militaires.

3 / Aspects juridiquesOutre le Traité d’interdiction partielle des essais nucléaires de 1963, qui a proscrit de tels essais dans l’espace, les règles juridiques internationales concernant l’utilisation de l’espace sont intégralement contenues dans le Traité (ONU) du 27 janvier 1967 « sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploitation et d’utilisation de l’espace extra atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes ». Son préambule souligne l’intérêt d’une exploration et d’une utilisation de l’espace extra atmosphérique à des fins pacifiques dans le cadre d’une large coopération internationale. L’article I précise d’ailleurs que « l’espace extra atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, peut être exploré et utilisé librement par tous les Etats, (…) toutes les régions des corps célestes devant être librement accessibles. Les recherches scientifiques sont libres dans l’espace extra atmosphérique, (…) et les Etats doivent faciliter et encourager la coopération internationale dans ces recherches. »Par-delà ces déclarations de principe, ce texte vise plus directement les activités militaires à l’article IV, dont le premier alinéa stipule que « les États parties au Traité

s’engagent à ne mettre sur orbite autour de la Terre aucun objet porteur d’armes nucléaires ou de tout autre type d’armes de destruction massive, à ne pas installer de telles armes sur des corps célestes et à ne pas placer de telles armes, de toute autre manière, dans l’espace extra atmosphérique ». Cet article ne prohibe donc pas les utilisations militaires de l’espace : seules les armes de destruction massive basées en orbite le sont. Au demeurant, les mécanismes de contrôle sont pour ainsi dire inexistants si l’on se réfère à l’article IX du Traité qui prévoit que « tout État ayant lieu de croire qu’une activité ou expérience envisagée par une autre partie au Traité dans l’espace extra atmosphérique […] causerait une gêne potentiellement nuisible aux activités poursuivies en matière d’exploration et d’utilisation pacifiques de l’espace […] peut demander que des consultations soient ouvertes au sujet de ladite activité ou expérience ». Les négociations sur le sujet menées dans le cadre de la Conférence du désarmement à Genève n’ont toutefois jamais permis de définir précisément la notion d’activités pacifiques, ce qui laisse largement ouverte la possibilité de développer et de déployer dans l’espace des armes offensives ou antisatellites. Aucune avancée diplomatique n’a pu être obtenue jusqu’à présent. Les autres points du Traité abordent le statut (« envoyés de l’humanité ») et le sauvetage des astronautes, leur retour sur Terre, la propriété et la restitution des objets lancés dans l’espace, la responsabilité des Etats lanceurs pour les dommages causés par les engins spatiaux et l’immatriculation des engins spatiaux.Enfin, une loi française « relative aux opérations spatiales »vient d’être promulguée le 3 juin 2008 (6); La Commission européenne a, pour sa part publié un Livre Blanc le 11 novembre 2003, intitulé « Espace : une nouvelle frontière européenne pour une Union en expansion - Plan d'action pour la mise en oeuvre d'une politique spatiale européenne », qui, s’il n’est pas à proprement parler une référence juridique, fait suite aux consultations menées sur la base du Livre Vert sur la politique spatiale publié en janvier 2003. (7).A l’invitation de la France, les ministres de l’Union européenne en charge de l’espace se réuniront fin juillet 2008 au centre spatial guyanais, à Kourou, pour y discuter ensemble de l'ambition spatiale que nous voudrons pour l'Union européenne.

I / Enjeux militaires, civils et duaux

I-1 / Militaire : enjeu de l’espace extra atmosphérique

I-1-1 / Généralités : le conflit moderne et l’exploitation de l’espace extra atmosphérique.

Dans le contexte international, les derniers conflits et en particulier la guerre d’Irak et celle du Kosovo ont mis en évidence l’évolution des moyens militaires nécessaires à l’engagement des forces. La principale évolution a été la prise en compte des outils modernes. Le champ de bataille est ainsi quadrillé grâce à des éléments aériens à haute altitude tels que les Awacs auxquels on peut ajouter entre autres les missions des drones. C’est ainsi que peuvent se dérouler les actions de surveillance, de reconnaissance, d’acquisition de cibles, d’évaluation des dommages, d’alerte avancée pour le départ des missiles, d’écoute des communications, de cartographie, de numérisation du terrain pour le guidage des missiles de croisière, plus simplement regroupés sous le dénominatif de guerre électronique. Le contrôle de ces outils modernes s’appuie sur l’utilisation de l’espace extra atmosphérique et de ses satellites qui représente aujourd’hui une position stratégique nécessaire pour observer, écouter, communiquer, distribuer des informations, paramètres fondamentaux pour la gestion des nouveaux conflits armés.Cette nouvelle vision du conflit image bien le concept fondamental de la pensée américaine: « Dominer le spectre de l’information est aujourd’hui aussi critique pour la conduite des opérations que jadis l’occupation du terrain ou le contrôle de l’espace maritime ou aérien ».

I-1-2 / National : les besoins militaires dans le cadre de la politique de développement militaire français

C’est ainsi que sur le plan militaire, pour la France, la maîtrise et l’utilisation de l’espace extra atmosphérique s’inscrivent en enjeux stratégiques. La maîtrise de l’espace est indispensable pour obtenir les informations nécessaires au renseignement, aux actions des forces, à la communication et au commandement. Une capacité supérieure d’action et de conduite des opérations sera ainsi disponible pour les « possédants ». Ces deux dernières caractéristiques, associées à l’efficacité et l’indépendance des moyens permettent d’acquérir une supériorité militaire qui représentera un différentiel décisif dans les cas d’engagements. La maîtrise de l’espace va se retrouver dans tous les paramètres stratégiques de l’action militaire tels que définis dans les objectifs initiaux du Livre Blanc de la Défense de 1994, confirmés et renforcés dans le Livre Blanc pour la Défense et la Sécurité de 2008 (non publié à la date de rédaction).

- Dissuasion: élément fondamental de la Défense française, elle repose sur des critères de crédibilité et d’efficacité et nécessite des capacités indissociables des informations fournies par les satellites : connaissance des systèmes adverses et leur localisation nécessaires à la constitution dossier d’objectifs ; cartographie et océanographie permettant la préparation des ordres ; propagation acoustique permettant la protection ou la mise en action des sous marins nucléaires lanceurs d’engins..

- Prévention : elle permet la mise à l’abri des surprises stratégiques. Ses applications proviennent des satellites de reconnaissance et fonde ses techniques sur l’image et l’écoute électromagnétique. Elle va permettre la localisation des sources d’émissions et ses évolutions. Elle identifiera les signes précurseurs de crise tels que les mouvements de troupes ou les travaux d’organisation de terrain permettant d’anticiper la prise de mesures appropriées.

- Projection / Intervention : elle correspond à la définition de la capacité d’engagement militaire. Elle va nécessiter la satisfaction d’une forte demande de télécommunications autorisant entre autres le guidage de munitions ou la surveillance des océans fondée sur l’imagerie et l’écoute permettant la liberté de navigation maritime.

- Protection : elle sera principalement fondée sur la capacité d’alerte. C’est ainsi que seront détectés les départs de missiles balistiques stratégiques ou tactiques. Un autre besoin fondamental sera celui de la surveillance nécessaire à la protection de nos capacités spatiales.

- Anticipation : c’est le point nouveau du Livre Blanc 2008 ; c’est dans cette fonction de connaissance / anticipation que se révèle la nécessité de la maîtrise de l’espace.

Une nation qui ne possède pas de moyens propres est tributaire des informations provenant d’autres pays. Ces informations peuvent ne pas être concordantes, incomplètes ou inaccessibles au moment où le besoin s’avère nécessaire. L’autonomie et l’indépendance sont des moyens nécessaires et fondamentaux.

I-1-3 / International : les besoins militaires dans le cadre de son positionnement international en particulier par rapport aux Etats-Unis et aux autres Etats

C’est dans le concept de la lutte est-ouest que se sont développées les premières utilisations de l’espace extra atmosphérique ; russes et américains y ont beaucoup travaillé en particulier pour le développement des missiles intercontinentaux. Aujourd’hui les choses ont changé, après la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’URSS, la domination américaine est devenue totale, mettant sous dépendance une bonne partie des pays du monde. L’espace est devenu une dimension centrale de leur doctrine militaire. Les Etats Unis considèrent l’espace comme vital à leurs intérêts. La part de leurs investissements militaires consacrée à l’espace atteint 90%. Ils peuvent aller jusqu’à dénier la liberté d’action de leurs adversaires en se dotant par exemple de technologies anti-satellites, en orbite ou au sol.Pour échapper à cette suprématie, l’utilisation de l’espace croît dans les apports spatiaux internationaux pour les opérations militaires, qui devient ainsi un champ de développement de puissance, voire d’affrontements. De nombreux Etats ont désormais des ambitions spatiales en développant une capacité technologique nécessaire à leur indépendance.La Russie depuis l’éclatement de l’URSS a perdu la suprématie que lui conférait à l’époque l’Union Soviétique, mais, après dix ans d’arrêt revient grâce au potentiel dû aux moyens de l’ancienne URSS. L’arsenalisation de l’espace est en cours ; à l’instar des Etats Unis, la Chine possède ses propres missiles anti-satellites.L’Etat qui n’a pas intégré la composante spatiale n’a plus sa place sur le plan international.

I-1-4 / Européen : l’avenir du développement militaire français passe par l’EuropeLa France seule ne peut aujourd’hui faire face seule à la « lutte » contre les Etats Unis pour assurer son indépendance. Ses choix et ses enjeux, la définition de sa politique ne peuvent se situer qu’au sein d’une politique de défense européenne.En effet, si la disproportion entre les Etats Unis et l’Europe au niveau des moyens spatiaux est bien réelle, l’Europe a su se doter d’un outil militaire conséquent et qui se renforce progressivement. Dans le domaine de l’observation de la Terre, la guerre du Golfe a souligné la dépendance trop importante vis à vis des moyens relatifs aux satellites des américains. C’est ce qui a incité la France, pour la filière optique avec le programme Hélios (90%) à progresser dans la résolution des images optiques, l’Allemagne et l’Italie se sont intéressés au développement des capacités de l’imagerie radar (Cosmos- SkyMed pour l’Italie, SAR-Lupe pour l’Allemagne) avec des accords de partage entre les trois pays.Dans le domaine des télécommunications, la coopération n’a pas abouti, entraînant l’échec et la dispersion des programmes. La France a ainsi mis sur orbite deux satellites Syracuse III, l’Allemagne deux satellites Satcom -BW, l’Italie deux satellites Sicral-1, le Royaume-Uni préférant continuer à travailler en tant qu’interlocuteur privilégié des Etats Unis. Toutefois un accord est en vue avec l’Italie avec le développement du satellite au nom symbolique Athéna Fidus (French Italian Dual Use Satellite).Par contre, l’absence de l’Europe est totale dans les autres domaines susceptibles d’applications militaires, en particulier dans ceux de l’observation de l’espace, du renseignement électromagnétique, de l’alerte avancée.De nouvelles nations veulent entrer en jeu et le rééquilibrage pose des problèmes majeurs sur la redistribution des compétences industrielles.

I-2 / Civil / la défense économique – le besoin d’indépendance

I-2-1 / Généralités : le développement de l’espace sur le plan civil et commercial.Les applications de l’espace se sont particulièrement développées dans le domaine civil et commercial. L’indépendance d’un pays ne se joue plus aujourd’hui uniquement sur ses moyens militaires, elle se joue sur le plan civil et commercial. Les applications liées à l’espace extra atmosphérique ont envahi notre vie. Les enjeux sont dans ce domaine également fondamentaux.C’est ainsi que l’on retrouve:

- le domaine de l’observation commerciale des images à très haute résolution, - le domaine des communications,- le domaine du renseignement auxquels sont liés les enjeux de la sécurité civile,

des douanes, des assurances, de la lutte contre trafics illicites, - le domaine de la navigation, qu’elle soit terrestre, aérienne ou maritime. Pour les

applications terrestres, les systèmes appropriés permettent de fournir aux conducteurs des indications de trajets sur cartes routières numérisées, des systèmes de guidage pour lignes de bus. Pour l’aéronautique civile elle fournit les éléments indispensables au guidage des aéronefs. Pour le secteur maritime, les informations essentielles relative à la météorologie, la synchronisation relative à la hauteur de la houle, à la température de l’eau,

- le domaine de la climatologie nécessaire au développement de l’agriculture,- le domaine des recherches scientifiques- le développement industriel.

I-2-2 / National: les entreprises françaises de l’espace et leurs contraintes, la nécessité de l’indépendance

La France est particulièrement bien placée dans le domaine spatial. Elle garde un certain leadership par rapport à certaines sociétés européennes mais aussi internationales dans les secteurs de l’aéronautique, de l’optique, des matériaux.Les deux principaux acteurs industriels de ce secteur sont respectivement :- Astrium (filiale d’Eads) - 13000 personnes en Europe- représente 50% de l’industrie spatiale française, 80% de celle de l’Allemagne, 90% de celle du Royaume Uni.- Thalès Alenia Space - 7200 salariés - Sa part française au chiffre d’affaires du secteur spatial atteint 2,15milliards d’euros sur 4.95 milliards soit 43%.

I-2-3 / International : les entreprises américaines et leurs liens avec la Défense américaine. La non dépendance et ses conséquences.

Les notions d’indépendance évoquées sur le plan militaire sont aussi vraies sur le plan économique. Tout comme dans le volet militaire, les Etats Unis sont le pays dominant, le développement de l’espace atteint 72% de leurs investissements. Ses entreprises rejoignent la compétitivité internationale dans les secteurs de pointe.Dans le domaine de la navigation par satellites, le GPS est la base commerciale dégradée de leur système militaire. Il représente un système essentiel à l’autonomie stratégique. Indépendance politique et industrielle sont une réponse aux problèmes de dépendance et de fiabilité. Outre les Etats Unis, acteur prédominant de la domination de l’espace sur la scène internationale, la Russie tente de revenir en reprenant le développement de son système Glonass qui, dans les années 80, était l’équivalent du GPS et tente de revenir en investissant de nouveaux crédits. L’Inde s'engage dans une politique de développement de satellites principalement dans le domaine des télécommunications mais aussi dans la météorologie et la science. La Chine occupe une place singulière par l’ampleur de ses programmes et par l’importance symbolique qui leur est accordée pour l’affirmation de la puissance de leur pays. Elle développe une gamme complète de lanceurs.

I-2-4 / Européen : le besoin de regroupement pour être compétitifLe développement des compétences industrielles se développe en Europe. L’Espagne, l’Italie, l’Allemagne s’investissent dans le secteur spatial avec la mise en place de dépendances mutuelles consolidant la base industrielle et technologique européenne. Le Royaume Uni, s’appuyant sur sa relation privilégiée avec les Etats-Unis, se tient à part. Dans le domaine de la navigation par satellites, Galileo représente un élément fondamental, essentiel à l’autonomie stratégique de l’Europe. Développé conjointement par la France, l’Italie, l’Allemagne et l’Espagne, il représente un programme à vocation civile et commerciale concurrençant le GPS américain. Il permet une indépendance politique, industrielle, tout en répondant à des problèmes de fiabilité.Mais ces volontés multiples, concrétisées par l’explosion du recours aux satellites commerciaux, entraînent souvent des duplications industrielles, technologiques ou opérationnelles. Le désir de développement dans le secteur spatial multiplie les équipementiers, souvent en dessous de la taille critique, avec des duplications de compétences.Le regroupement redéfinira de nouvelles frontières européennes « spatiales » pour une Union en expansion.La France garde dans le domaine spatial européen un certain leadership par rapport à certaines sociétés européennes mais aussi internationales.

I-3 / Dualité civilo-militaire

I-3-1 / Généralités : La notion de développement commun civil et militaire.Espace, Europe, dualité et compétitivité sont aujourd’hui intimement liés.Ces propos ont été souvent repris par la ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie : « En ayant recours autant que possible à la coopération européenne et à la dualité, un effort national accru de 50 %, doublé d’un effort similaire au niveau européen permettra de franchir une première étape clé dans le cadre d’une politique spatiale européenne ambitieuse ».

I-3-2 / National et européen: la notion de développement commun, civil et militaire.

Cette compétitivité, indispensable pour relever l’ambition à jouer un rôle prédominant dans l’espace de demain, doit s’appuyer sur deux piliers majeurs qui sont la recherche de toute dualité des activités spatiales et donc recherche et mise en œuvre de toutes synergies entre les domaines civils et militaire d’une part, condition nécessaire mais non suffisante, mais aussi sur une recherche permanente de toutes coopérations structurées au niveau européen. Si aujourd’hui nous pouvons constater des avancées pour l’espace civil avec quelques approches européennes, force est de constater une approche nationale pour l’espace militaire. La dualité devient aujourd’hui synonyme de compétitivité car elle sous-tend l’idée d’une mise en commun et un partage de moyens que le militaire seul ne pourrait se payer.

1-3-2-1 / Apport et intérêts des programmes duaux au travers de la technologie et des techniques spatiales : Les technologies du spatial sont par nature duales, car il est évident que de nombreux points communs existent entre les différentes solutions qui peuvent être proposées pour les secteurs du militaire et ceux du civil. Les militaires qui ont permis d’acquérir pour les entreprises civiles les compétences nécessaires dans le domaine, par exemple, des lanceurs, pour la propulsion à propergol ainsi que sur les aspects systèmes satellites militaires, ont ainsi pu bénéficier des compétences acquises dans le cadre de programmes civils. A l’inverse, nous avons aujourd’hui de nombreux exemples tels que des plateformes identiques pour le programme Spot (civil) et Hélios (militaire). Certains programmes ont d’ailleurs été développés par le ministère de la Défense et le CNES. D’autres points communs existent également en matière de charge utile et d’instruments.

1-3-2-2 / Dualité des besoins et des missions / par domaines : - Observation de la terre par moyens optiques. L’apport de la dualité est ici significatif.- Observation de la Terre par moyens radar. Le besoin Défense existe mais l’expérience reste actuellement limitée sur le sujet en Europe et le marché civil n’existe pas encore. Si beaucoup reste à construire, on pourra utilement s’inspirer du retour d’expérience du programme franco– italien Cosmo- Skymed et du programme allemand Sar-Lupe.- En matière de télécommunications, la dualité est forte et certains satellites possèdent à la fois une charge mixte civile et militaire (cas de Syracuse 2). Les besoins Défense conservent néanmoins quelques spécificités, notamment dans le chiffrage et les bandes de fréquence. De nombreuses opportunités de rapprochement existent ici, tant le secteur civil que militaire ont un intérêt commun à la maîtrise des liaisons Internet à haut débit

par satellites (numérisation croissante et interopérabilité du champ de bataille, de même que le temps d’accès aux images).- Météorologie / Océanographie : De nombreuses synergies apparaissent également entre besoins civils et besoins de la Défense dans le domaine des connaissances météorologiques. C’est également le cas dans le domaine océanographique avec Poséidon et Jason. Concernant la navigation, les points de convergence entre besoins civils et militaires sont nombreux et la dualité se retrouve présente via Galileo, conçu dès le départ dans une coopération civilo - militaire exemplaire. Enfin la dualité des missions est présente également dans le domaine du secteur, on ne peut plus important, de l’observation, où des solutions de type Pléiade en France sont utilisées.- Surveillance de l’espace. Des besoins similaires peuvent apparaître pour civils et militaires en matière de trajectographie et une coopération reste envisageable et même souhaitable sur ce sujet qui ne manquera pas de devenir préoccupant à terme, actuellement avec la gestion des débris.- Les lanceurs. Même si les spécificités requises par le civil et le militaire sont différentes (sauf accès à l’orbite géostationnaire pour des satellites de 3 à 5 tonnes où les réponses aux besoins peuvent se recouper).- Autres domaines : Augmentation de l’espérance de vie en orbite basse, réduction de masse, utilisations d’équipements européens…

1-3-2-3 / Dualité des marchés : Il existe un effet de dualité entre les domaines institutionnels et civils (commerciaux) et on ne saurait contester l’intérêt que sont censés apporter les programmes institutionnels en matière de technologie aux programmes civils.

1-3-2-3-1 : Militaire par rapport au civilLe principal facteur de succès en terme de dualité du militaire au civil est la rencontre d’une technologie avec un produit et de facto du produit avec un marché. On pourra citer quelques succès qui, si importants qu’ils soient, restent toutefois peu nombreux (on citera l’application pyrotechnique dans les airbags de véhicules, de même que les découvertes dans le domaine des freins carbone de la Snecma avec d’importants débouchés dans les secteurs de l’aéronautique et plus récemment dans l’automobile). De nombreux développements sont également à citer sur les composites céramiques et systèmes de visualisation par cristaux liquides. Dans d’autres domaines on ne saurait toutefois passer sous silence les succès de Dassault dans la maîtrise des logiciels pour boîte noire et de conception par éléments finis. On signalera également dans cet ordre d’idée le domaine de l’infrarouge, à développer cependant dans les applications civiles.

1-3-2-3-2 : Civil par rapport au militaireLe vrai succès de la dualité se trouve de façon plus importante dans l’application de technologies civiles aux produits militaires, notamment à l’intérieur des grands groupes industriels qui regroupent les deux activités en leur sein. Ceci n’est pas sans risques, car le contexte technologique et les petites séries propres à l‘univers militaire, outre les lenteurs de décision, peuvent déconnecter les deux univers et la culture des nouveaux groupes, à tout le moins européens ; la pression qui pèsent sur leur dirigeants avec l’atteinte d’objectifs de rentabilité à court terme, peut faire craindre que des pans entiers de recherche et de production, jusqu’ici affectés à des fins militaires, se trouvent de facto abandonnés. Le développement qualitatif évident des services apportés par les plateformes spatiales rend indispensable la nécessité de consolidation du patrimoine

d’information des pays européens dont on peut donc bénéficier tant pour des fins militaires que civiles.

I-3-3 / International : la supériorité des Etats-Unis dans le monde.La plupart des programmes américains sont financés avec l’aide du Département de la Défense. Si, pur la France et l’Europe, 60 à 65% du chiffre d’affaires de l’industrie spatiale est d’origine commerciale, pour les Etats Unis ces chiffres sont ramenés à seulement 15 à 20%. Cette proportion inquiétante pour les autres pays n’a non seulement une existence reconnue mais a tendance à s’amplifier.

II / Perspectives pour une approche dualeSi les atouts que présente la mise en œuvre d’une politique duale restent nombreux, parce que apportant cette compétitivité aujourd’hui indispensable dans un cadre de ressources financières disponibles limitées, il n’en demeure pas moins que, vu du coté des industriels, cette nécessité de rester compétitif, tout en conservant un niveau de compétences et de capacités ad hoc de recherche et développement, ne soit de plus en plus difficile à atteindre, étant donné la concurrence très forte à laquelle les entreprises concernées par les secteurs de la défense sont aujourd’hui exposées, notamment de la part d’industriels implantés dans les pays dollar au taux de change plus favorable. Pendant combien de temps les entreprises européennes devront elles supporter ce handicap et pourront-elles y faire face dans le temps seulement en imaginant des plans de compétitivité dont on sait par expérience qu’ils finissent par fragiliser, voire condamner, certaines activités à une disparition définitive ?Si nous voulons réagir face à une industrie américaine qui dispose non seulement d’une monnaie favorable mais également d’un développement basé, voire financé, au travers de contrats de défense, il nous apparaît que la réponse à ce déséquilibre passe par une recherche accrue de coopération structurée à l’échelon européen. Or, aujourd’hui, la plupart des programmes de défense sont essentiellement nationaux et un travail extrêmement important et structuré doit être conduit pour renverser cette tendance. Cette consolidation de la base industrielle et technologique européenne est essentielle. Dans son ensemble, l’industrie spatiale européenne se caractérise par une forte disparité entre grands groupes (nous avons vu l’émergence de deux grands groupes de dimension européenne et mondiale) et PME, ainsi que par des disparités de sites et du nombre d’employés sur le territoire européen. La France compte environ 13 000 actifs dans le secteur spatial, loin devant les autres pays et en particulier de l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni. Si les industriels ont déjà réalisé un important travail de restructuration à l’échelle européenne face à la pression des marchés, ces rationalisations devront se poursuivre en tenant compte au plus près des impératifs liés à la conduite de programmes duaux.Il appartiendra aux Etats de déterminer les besoins et capacités à détenir pour conduire lesdits programmes duaux, tant sur les plans nationaux qu’européens ; une analyse détaillée des compétences de recherche et de production disponibles sera nécessaire. C’est certainement sur cette base que s’établiront des programmes de coopérations multi pays et des programmes duaux. Dans cette démarche, nous attendons que la France, de par sa position actuelle (industrie spatiale, effectifs, compétences, centres de recherches…) par rapport à d’autres pays européens majeurs, conserve un rôle prééminent. Il nous apparaît illusoire que tout autre pays que la France soit en mesure de tirer la construction européenne au-delà du domaine civil, pour se rapprocher de celui non seulement de la Défense mais aussi des nécessités de la Sécurité. Pour aboutir à une politique spatiale de Défense européenne, la France doit en être un des pays moteurs en se concentrant sur le domaine de la dualité et des synergies entre monde civil et militaire. Dans cette perspective, la Sécurité deviendra un des points phare pour faire aboutir, s’il en était besoin, une véritable politique européenne. De plus en plus, les événements récents confirment que les implications en matière de Sécurité nationale de l’activité satellitaire sont évidentes et méritent désormais une plus grande attention.La comparaison entre la dépense publique européenne et américaine dans le domaine spatial fait apparaître un écart de 1 à 6 (respectivement 5 et 32 Mds de $ en 2006). Au

niveau des activités civiles institutionnelles, avec un écart qui se creuse de façon importante pour les dépenses militaires, les investissements européens s’élèvent à 900 M $ contre 18 Mds $ pour les investissements américains. Prenant acte de ce constat et de cette différence ainsi que de la situation de ressources limitées dans laquelle nous nous trouvons, nous sommes persuadés qu’à une menace globale et transversale, il faut trouver / imaginer un ensemble de réponses présentant autant de solutions de transversalité et de globalité. L’exploration de l’espace est fondamentale non seulement à cause de son importance stratégique, mais aussi parce qu’elle constitue une source d’innovation technologique permanente.

II-1 / La gestion de la dualité : quelles articulations ? Organisation politique pour favoriser une politique de développement dual ?

Une réponse globale et transversale passera par une harmonisation et un partage de nos outils tant civils que militaires, y compris technologiques. Nous serons d’autant plus forts que nous serons capables, comme dans toute activité industrielle civile, de regrouper nos ressources en ayant recours de façon permanente aux dernières innovations technologiques connues. Il conviendra, au niveau des organisations décisionnelles, de tendre à exploiter les pôles d’excellence technologiques, industriels et opérationnels disponibles sur les territoires français et /ou européen, dans un souci de recherche d’efficacité et de compétitivité de la base industrielle.L’organisation qui permettra de développer une prise en compte duale du développement devra prendre en compte non seulement la mise en œuvre spécifique d’applications à des fins exclusivement militaires (défense) mais devra être capable d’intégrer dans ses réflexions stratégiques l’évolution de nouvelles menaces liées notamment au terrorisme et donc aux applications destinées à protéger les populations et territoires (sécurité). Dans ce cadre, les programmes d’observation de la Terre revêtent une importance considérable et les récentes crises internationales sont là pour nous rappeler la nécessité de disposer de systèmes d’information en mesure de fournir un cadre de situation le plus fiable et complet possible, et c’est ici que les technologies et systèmes sont de plus en plus souvent duaux et peuvent faire l’objet d’échanges entre différents pays, aussi bien dans le partage des connaissances de base, que dans celui tout aussi important de l’exploitation des ressources disponibles si tant est que l’objectif à atteindre soit partagé par différents pays.Dans le domaine de la recherche, nous savons combien les financements sont et seront limités dans chaque pays européen pris indépendamment ; plus que jamais, chaque Etat soucieux de son avenir devra disposer d’une organisation (à minima nationale voire européenne, ou interne) amenant (ou obligeant ?) chacun à réfléchir à toutes les formes d’intégration possibles de sa recherche à caractère militaire au travers de toute initiative favorisant le partage des ressources et l’établissement de programmes duaux conjoints et donc une collaboration très étroite. Ceci obligera pour un Etat, à minima d’organiser et contrôler qu’une collaboration étroite et sans faille existe entre différents ministères responsables de la Recherche, Défense et Sécurité. Dans ce contexte, il appartiendra de s’assurer que l’administration militaire joue un rôle prééminent d’élément actif de planification, de promotion, et de gestion des activités spatiales relevant de son champ d’intérêt (8).On peut toutefois observer qu’aujourd’hui, même si le concept dual représente sur le papier une excellente solution, il n’existe pas de systèmes d’observation de la Terre dotés de cette capacité et nous avons avec Cosmo Skymed la représentation d’une vraie première application duale de l’observation de la Terre.

On ne peut que constater, voire regretter, que l’Europe spatiale militaire présente une situation contrastée qui résulte dans beaucoup de cas de décisions et de priorités politiques nationales (9).

II-2 / La gestion de la dualité par l’Etat et par les Etats européens : une mission à organiser

L’exploitation de l’Espace est fondamentale, non seulement pour son caractère stratégique, mais aussi parce qu’elle sera source d’innovation et de développement technologique. Programmes militaires et commerciaux constituent deux aspects, voire deux piliers, sur lesquels le futur programme militaire doit être imaginé et construit, car ces deux marchés croissants s’interconnectent et nécessitent le support de l’un par l’autre. Il nous faut cependant prendre garde que les programmes commerciaux soient amenés à soutenir une demande durable pour soutenir les synergies de marché entre militaire et civil. S’il n’en était pas ainsi, il pourrait en résulter un déclin irrémédiable en Europe. Il appartient dès lors au domaine militaire de soutenir une politique budgétaire continue car l’idée que le secteur civil supporte et développe à lui seul une industrie, si tant est supposée stratégique, parait pure illusion.Au travers de ce qui précède, il apparaît évident qu’une démarche duale, civile et militaire, permettra de réduire les coûts de recherche et d’exploitation. Mais il est tout aussi évident que la complexité de la démarche posera aussi de sérieux problèmes de management et d’infrastructure spécifiques, tant pour les besoins civils que militaires. Une prise de conscience s’impose pour que l’ensemble des applications spatiales soient considérées comme duales et cette dimension de prise en compte de la valeur éminemment stratégique de l’Espace favorisera l’avènement d’un projet politique Européen.

II-2-1 : En France : À l’heure actuelle, trop d’initiatives dispersées peuvent nous faire douter qu’une véritable politique de la dualité existe en France, et ce malgré de nombreux discours des décideurs par le passé. La situation budgétaire traduit le soutien faible et insuffisant apporté par les politiques à l’effort spatial. De même le peu de débat ou de la simple mention du spatial dans nombre de déclarations politiques confirme, s’il en était besoin, l’intérêt secondaire de celui-ci. On pourrait dès lors penser que soit admis le principe de transfert vers des instances européennes, encore faut-il que ces dites instances fassent preuve de leur réelle motivation ! Cette mission reste à organiser car elle est au cœur de la compétitivité économique de demain contre les USA et aussi indispensable au maintien de la supériorité des armes françaises. Ainsi, si l’européanisation peut-être une opportunité, la France doit rester un des moteurs et cela consistera à protéger et maintenir (ce qui n’empêche pas un contrôle de leur activité) les centres d’expertises de premier plan dont nous pouvons être fiers, et garder notre force de proposition. Alors que l’Europe investit chaque année 6 fois moins que les Etats- Unis (5 Md € en Europe contre plus de 30 Md € pour les USA) la France garde des atouts certains face à ces enjeux. Comment donc imaginer la structure capable de promouvoir des systèmes militaires sensibles dans un cadre national (systèmes d’écoute, observation à très haute résolution) et de les optimiser par la mise en œuvre de la dualité ?Au-delà de certaines réserves, et notamment sur les problèmes de sécurité attachés aux risques, il faut s’orienter sur une véritable dynamique de création de valeur.

• Identifier les besoins et domaines militaires porteurs et informer les équipes de R&D civiles. La DGA devrait utilement remplir ce rôle d’interface entre nécessités militaires pour le futur et les représentants de l’industrie civile. Elle se verrait chargée d’une démarche prospective sur le long terme en ouvrant la démarche de recherche de dualité de façon la plus large possible à l’ensemble des acteurs confrontés à des besoins relativement proches de ceux de la défense, et notamment au ministère de l’Intérieur, sur des problématiques telles que déplacement des personnes, identification, renseignement, etc. Il nous apparaît important que la DGA ait une véritable compétence à préparer le futur avec une réelle capacité d’anticipation et de prospective sur les besoins de demain, tant civils que militaires.• Poursuivre les actions de normalisation par une présence / implication des militaires au sein des organismes civils et rapprocher ainsi qualification militaire et certification civile (avec pour seul objectif d’éviter des duplications inutiles et coûteuses).• Identifier les meilleurs centres d’expertise et d’essai. Le CNES, créé en 1961, dispose d’un excellent niveau de savoir-faire et ne souffre pas de comparaison avec d’autres grands centres tels ceux de la NASA, les centres de l’Agence spatiale allemande ou le Centre technique de l’ESA. Il a la capacité à discuter d’égal à égal avec l’industrie civile. Grâce au CNES et à une politique volontariste, la France jouit aujourd’hui d’une position de leader dans de nombreux domaines et il nous paraît important que la France maintienne à tout prix son expertise technologique au travers du CNES. C’est à ce seul prix qu’elle sera capable d’être force de proposition, même si les réalisations doivent se faire demain à l’échelle européenne. Etre capable de discuter d’égal à égal avec l’industrie reste une nécessité. D’autres structures proches de nous comme l’Agence spatiale italienne, bâtie sur un autre modèle et ne disposant pas de centre technique à forte expertise sur lequel elle pourrait s’appuyer, pourrait, par la difficulté à évaluer la qualité des propositions faites par des industriels, se trouver devant le fait accompli. La France a su ainsi saisir l’importance dans la mise en œuvre d’applications duales telles que Spot et Hélios. Aujourd’hui, et très récemment, le CNES a joué un rôle majeur dans la coopération franco-américaine de Jason sur le domaine de l’océanographie opérationnelle, de même que dans le programme franco-italien Orfeo d’optique radar. Cette volonté de disposer des équipes de recherche performantes nous permet, de peser, outre notre contribution financière, sur les décisions de l’Agence Spatiale Européenne. Mutualisation de moyens ne veut pas dire abandon.Pour privilégier les approches duales il faut avant tout disposer d’un catalogue de besoins et s’assurer que le contrôle étatique reste présent sur des produits / technologies qui ne sont pas politiquement neutres. A l’instar du Comité Inter Ministériel pour l’Energie Atomique, ne pourrait-on imaginer un Comité National de l’Espace ou Comité interministériel de l’Espace présidé par le Président de la République ?

II-2-2 : A l’échelle Européenne. Face aux menaces hégémoniques de domination des USA par des moyens de plus en plus offensifs (missile tueur de missile affaiblissant la politique de dissuasion d’autres puissances internationales ), face à des désirs de domination économique de nouveaux pays émergents (tels que la Chine et l’Inde, face au Japon et à la Russie qui ne se cantonneront pas à ne rien faire), disposer d’une vision architecturale spatiale face aux impératifs de défense et de sécurité est un des objectifs majeur pour l’Europe de demain. Devront donc se mettre en place les conditions politiques, technologiques et industrielles pour répondre à ce défi. Il appartiendra ensuite à chaque pays de se prononcer sur les

choix qui s’imposeront à lui entre développements nationaux ou européens (ou intra - pays européen ?), public et /ou privé, civil /militaire, sécurité / défense …Certains pays européens déjà présents dans le domaine spatial doivent se retrouver au sein d’Organisations capables d’exploiter toutes les synergies stratégiques et économiques des programmes duaux, valorisant ainsi au mieux les technologies duales, ce que la France ne peut pas accomplir seule.Dans ce domaine, l’Agence spatiale Européenne, qui revendique 40 années d’expérience, nous semble être l’Institution par excellence susceptible de proposer les contours et conduire la mise en œuvre de la politique européenne à partir d’expertises clairement identifiées en toute indépendance de jugement. Elle jouera le rôle éminent de maître d’œuvre en liaison avec les seuls grands pays spatiaux actuels de l’Union (et d’autres ?).L’Europe dispose également de l’Agence européenne de défense (AED) créée par le Conseil de l’Union européenne en juillet 2004, chargée d’élaborer une vision stratégique européenne et de s’assurer de la cohérence des politiques nationales (équipement et R&D).Ces deux organisations disposant de pouvoirs clairs nous semblent en capacité de proposer en travaillant de concert un calendrier de besoins listés en fonction de leur caractère d’urgence et de priorité. Parmi ces priorités nous pourrions identifier tout ce qui touche à l’écoute électronique, la protection contre le terrorisme, la gestion des crises en commun avec interopérabilité sur les champs d’action, sans oublier la protection des systèmes en réseau qui présentent un caractère de vulnérabilité non négligeable (systèmes bancaire pour le civil par exemple).Comme au plan national, le militaire sera présent dans ces instances car il restera capable de donner du sens à une sécurisation indépendamment d’attitudes ou de décisions qui pourraient trouver leur origine dans de « basses » considérations économiques. Les risques ne se limitent plus aujourd’hui à un conflit de domination par les armes mais aussi, de façon beaucoup plus insidieuse, à un conflit de domination économique.

Conclusion Disposer de structures publiques adaptées permettant une recherche systématique de solutions duales est une des clés du succès de la politique de développement spatial et un signal pour avancer vers une politique européenne. Mais il ne faudra pas oublier le facteur clé de succès : une volonté politique des Etats accompagnée de budgets adaptés (qui va payer, et avec quelle enveloppe contributive?).En terme de budget, environ 1Md € en Europe pour les spatial militaire dont 50% en France (DGA) alors que 2 Md € seraient a minima nécessaires pour répondre aux besoins immédiats. Qui va assurer l’effort budgétaire indispensable ? Ou faudra –t-il construire « à la carte » car on ne saurait accepter que certains Etats, prétextant leur faiblesse économique, s’abritent sous le chapeau européen et bénéficient de la protection assurée parce que financée par d’autres sans en être partie prenante ?Toutes ces initiatives de coopération européenne pour identifier et mettre en œuvre les possibilités de synergies entre civil et militaire ne devront pas se faire au détriment de tout contrôle des autorités publiques, en s’assurant notamment de la bonne utilisation des financements publiques dans un système gagnant - gagnant. D’autre part, faudra-t-il aller plus loin en matière de consolidation industrielle, sachant que nous disposons de deux grands groupes européens qui ont déjà beaucoup de difficultés à digérer leur fusion, à l’instar de Eads -Astrium créé en 2000, ou Thalès Alenia Space, et où des considérations où se mêlent politique et intérêts industriels sont autant d’obstacles à la formation de groupes européens. Un autre sujet qui domine certains secteurs du domaine industriel nous renvoie aux prises de contrôle de groupes européens par des fonds et / ou capitaux étrangers, prises de contrôle qui se sont multipliées ces dernières années, contrairement aux Etats-Unis qui restent plutôt fermés aux investissements étrangers. Quid alors de la confidentialité et de l’accès aux développements et, entre autres, à la vulnérabilité que nous aurons plus que jamais dans des attaques informatiques sur des moyens technologiques militaires fragilisés par une trop grande dépendance des réseaux et entreprises civiles propriétés d’investisseurs « mal intentionnés » ?Ne serait-il pas dès lors opportun que les Etats continuent d’être significativement présents dans le capital de ces groupes de façon à les / se protéger de toute « opération inamicale » ?

Telle est l’utilisation de l’espace extra atmosphérique, véritable enjeu du XXIè siècle.

Notes

(1): Premier impact d’un engin sur la Lune (Luna 2 – 1959), premier alunissage d’une sonde automatique (Luna 9 – 1966), premier prélèvement d’échantillons lunaires avec retour sur Terre (Luna 16 – 1970), premier dépôt d’un robot sur la Lune (Luna 17 / Lunokhod 1 – 1970), premier vol féminin (Valentina Terechkova – 1963), première sortie dans l’espace (Alexis Leonov – 1965).

(2): Mercury (1961 – 1963) : premier vol orbital d’Alan Shepard (3 semaines après Youri Gagarine) le 5 mai 1961 et première satellisation d’un homme (John Glenn le 20 février 1962) ;- Gemini (1965 – 1968), qui permettra de mettre au point les nouvelles capsules spatiales bi-places et les vols habités ;- Apollo enfin.

(3): In http://cdpp.cesr.fr

Les couches de l'atmosphère :

TroposphèreLa troposphère est la couche atmosphérique la plus proche du sol terrestre. Son épaisseur est variable: 7 kilomètres de hauteur au-dessus des pôles, 18 kilomètres au-dessus de l'équateur et environ 13 kilomètres, selon les saisons, dans la zone tempérée. C'est dans cette couche qu'on retrouve la plus grande partie des phénomènes météorologiques. Au fur et à mesure qu'on s'élève dans la troposphère la température décroît de façon régulière d'environ 6 degrés Celsius tous les 1000 mètres pour atteindre -56 oC à la tropopause (zone séparant la troposphère de la stratosphère). L'air près du sol est plus chaud qu'en altitude car la surface réchauffe cette couche d'air.

StratosphèreLa stratosphère est au-dessus de la troposphère. C'est dans la stratosphère qu'on trouve la couche d'ozone. Cette dernière est essentielle à la vie sur Terre, car elle absorbe la majorité des rayons solaires ultraviolets qui sont extrêmement nocifs pour tout être vivant. Cette absorption provoque un dégagement d'énergie sous forme de chaleur. C'est pourquoi la température augmente lorsqu'on s'élève dans la stratosphère. Les mouvements de l'air y sont beaucoup moindres. Il s'agit d'un environnement beaucoup plus calme. La stratopause sépare la stratosphère de la mésosphère.

MésosphèreLa mésosphère est au-dessus de la stratosphère. Dans cette couche, la température recommence à décroître avec l'altitude pour atteindre -80 oC à une altitude d'environ 80 km. Les poussières et particules qui proviennent de l'espace (les météores) s'enflamment lorsqu'elles entrent dans la mésosphère à cause de la friction de l'air. Ce phénomène nous apparaît sous la forme « d'étoiles filantes ».

Thermosphère La couche la plus haute est la thermosphère. Dans cette couche, la température augmente avec l'altitude et peut atteindre environ 100 degrés Celsius. La thermosphère atteint des milliers de kilomètres d'altitude et disparaît graduellement dans l'espace. La thermosphère est la région où près des pôles se forment les aurores boréales et australes. La pression y devient presque nulle et les molécules d'air sont très rares.La partie inférieure de la thermosphère est appelée l'ionosphère. L'ionosphère réfléchit les ondes courtes (ondes radio). Ces ondes, émises par un émetteur, rebondissent sur l'ionosphère et sont renvoyées vers la Terre. Si elles sont retournées avec un certain angle, elles peuvent faire presque le tour du globe. L'ionosphère permet donc de communiquer avec des régions très éloignées. La séparation entre la mésosphère de la thermosphère s'appelle la mésopose. La séparation entre la troposphère et la stratosphère porte le nom de Tropopause.

(4): Selon Christian Malis, (in : L’espace extra atmosphérique, enjeu stratégique et conflictualité de demain. Institut de stratégie comparée-2002), l’espace extra atmosphérique est :

- En hyper altitude : La couche atmosphérique commence à se raréfier jusqu’à disparaître vers 150 – 250 Km d’altitude ; Les avions de reconnaissance les plus performants ne volent guère au-delà de 20 Km, là où la raréfaction de l’air rend difficile la sustentation et la combustion pour les moteurs d’avion, mais où elle est déjà suffisamment dense pour freiner et détruire les systèmes spatiaux.

- Immense : On ne peut pas s’approprier l’espace, contrairement aux terres et aux océans.

- Hostile : Totalement inhospitalier pour l’Homme (absence d’atmosphère et de gravité, radiations importantes), ce fait explique que l’exploitation de l’espace est, pour l’essentiel, le fait de robots ; D’où une très grande rigidité et une nécessaire anticipation pour la manœuvre, programmée et contrôlée depuis le sol, ce qui suppose un très haut niveau de maîtrise technologique.

- Géocentré : C’est la propriété qui le rapproche le plus du milieu aérien : comme point haut, l’espace se prête naturellement aux fonctions d’observation et de surveillance, et potentiellement, de déplacement.

- Vide (état de vacuité): Cette caractéristique essentielle donne à l’espace un de ses « valeurs ajoutées » les plus nettes par rapport au milieu aérien, où

l’atmosphère, source de frottements, crée des contraintes qu’on n’a toujours pas résolues à très grande vitesse : la vacuité permet en effet aux systèmes spatiaux une permanence de plusieurs années, cette permanence étant « mobile » en dessous de l’orbite géostationnaire.

(5): in : Cahiers du Centre des Hautes Etudes pour l’Armement (CHEAr) de novembre 2004 - L’observation de la terre par moyen optique : L’apport de la dualité est significatif dans le domaine de l’observation optique de la terre dans la mesure où à la dualité de certaines missions s’ajoute celle des plates-formes, des techniques, des charges utiles et des traitements sols. Les demandes gouvernementales pour des besoins de sécurité et de la défense représentent environ 70% du chiffre d’affaire d’un opérateur civil tel que SPOT image.

- L’observation de la terre par moyen radar : Le besoin défense existe mais l’expérience reste limitée sur le sujet en Europe et le marché civil n’existe pas encore. Tout reste à construite, en s’inspirant du retour d’expérience du programme italienne Cosmo - Skymed et du programme allemand Sar-Lupe.- Les télécommunications : La dualité est forte s’agissant des technologies, des plates-formes, des charges utiles et du partage des satellites (Syracuse - Télécom 1&2). Les besoins défense conservent néanmoins quelques spécificités notamment pour le chiffrage et les bandes de fréquences. Les philosophies diffèrent également pour le dimensionnement du segment sol : le civil semble pencher pour un seul segment de marché et l’utilisation d’un ou plusieurs satellites avec un récepteur unique produit en grande quantité. La défense semble vouloir privilégier la satisfaction d’un plus grand nombre d’utilisateurs (forces terrestres, aériennes, navales...) avec l’utilisation d’un seul satellite polyvalent assorti de nombreux récepteurs et d’un segment sol complexe. Pourtant des opportunités existent de rapprochement. Ainsi, tant le secteur civil que le secteur militaire doivent parvenir à maîtriser les liaisons Internet à haut débit par satellites. Les civils souhaitent contribuer à la réduction de la « fracture numérique » entre les différentes populations réparties sur le territoire tandis que les militaires cherchent une solution pour faire face à la numérisation croissante du champ de bataille (NCW ou opérations réseaux centrées). Par ailleurs, un besoin commun en satellites ou en charge utile relais émerge pour réduire le temps d’accès aux images pour les civils (GMES - sécurité civile) et les militaires.- La navigation : Le programme Galileo conçu dés le départ en prenant en compte les aspects duaux a donné lieu à une coopération civile - militaire exemplaire.- La surveillance de l’espace : Les besoins civils et militaires sont similaires pour l’identification et la trajectographie. Les performances attendues sont plus élevées pour le secteur civil (suivi des débris de la classe 10 cm) que pour le secteur militaire (suivi de satellites de classe 1m). - Les lanceurs : Une certaine dualité technique existe dans le domaine des lanceurs en dépit de nombreuses spécificités des besoins civils et des besoins militaires. Les besoins sont identiques pour l’accès à l’orbite géostationnaire pour des satellites de 3 à 5 tonnes. Par contre, les besoins diffèrent pour l’accès à l’orbite basse avec un intérêt marqué des militaires pour de petits satellites d’une à deux tonnes et une orientation civile vers une gamme plus étendue allant du microsatellite à l’ATV, de 150 kg à 20 tonnes et sans contrainte lourde du point de vue sécurité. Au niveau européen, l’ensemble des acteurs civils et militaires est actuellement confronté à la problématique du maintien des compétences dans le domaine des lanceurs.

- Autres domaines : - L’océanographie et la météorologie sont des domaines duaux. La Défense représente sur ces sujets un utilisateur comparable aux autres.

- Des sujets d’intérêts communs entre militaires et civils se dégagent sur l’augmentation de l’espérance de durée vie en orbite basse, la réduction de masse, l’utilisation d’équipements européens... etc.

(6): La loi n° 2008-518 du 3 juin 2008 (J.O. du 4 juin) traite notamment d’un régime d’autorisation des opérations spatiales menées depuis le territoire français ou par des ressortissants français. Ce dispositif, qui s’applique notamment aux lancements d’engins, permet à l’État de mieux contrôler les opérations qui seraient de nature à engager sa responsabilité au titre des traités internationaux.Elle prévoit ensuite, en cas de dommage causé aux tiers lors d’une opération autorisée, une répartition équitable de la charge indemnitaire entre l’État et l’opérateur spatial. Elle permet ainsi tout à la fois de garantir l’indemnisation des victimes, de sécuriser l’activité économique spatiale et de limiter la charge susceptible de peser sur les finances publiques. Dans un souci de sécurité des relations entre les acteurs du secteur spatial, la loi limite également les possibilités de recours entre participants à l’opération. Elle institue ainsi un régime de responsabilité adapté à ce secteur. Enfin, cette loi permet à l’État de mieux encadrer, pour des motifs de sécurité nationale et pour assurer le respect d’engagements internationaux, l’activité des exploitants primaires de données d’observation de la Terre d’origine spatiale.

(7): La Commission propose de mettre en oeuvre une politique spatiale européenne élargie qui viendrait appuyer les objectifs et les politiques de l'Union européenne ; elle fait valoir que les technologies et applications spatiales peuvent contribuer à la croissance économique, la création d'emplois et la compétitivité industrielle, la réussite de l'élargissement de l'Union, le développement durable, une sécurité et une défense renforcées pour tous, la lutte contre la pauvreté et l'aide au développement.Ce livre blanc contient trois chapitres, qui ont trait respectivement aux activités spécifiques mises en place à l'appui des politiques clés de l'Union européenne élargie, aux recommandations indispensables à la mise en oeuvre d'une politique spatiale, ainsi qu'aux changements nécessaires dans la gouvernance et le financement des activités spatiales européennes. Il compte sur la mobilisation de l'Agence spatiale européenne, des États membres de l'Union européenne avec leurs agences spatiales nationales et leurs centres de recherche nationaux, ainsi que sur l'industrie, pour réaliser les objectifs qu'il décrit.

(8) : Parmi les exemples de réussites on rappellera les réalisations franco-italienne avec capteur radar italien sur 4 satellites Cosmo Skymed et optique française sur 2 satellites Pléiades, confirmant cette nécessité d’ échanges de moyens satellitaires entre pays, concernant deux systèmes développés avec ses propres ressources nationales.

(9) : Par exemple, pour le seul domaine des télécommunications :Skynet (UK), Syracuse (France), X.Eur et Spainsat (Espagne), Sicral( Italie),

BW.Satcom (Allemagne).

Bibliographie

La dualité civil- militaire : des technologies duales aux systèmes, fonctions ou services duaux. Etude réalisée par la fondation pour le Recherche Stratégique. Les Cahiers du CHEAr, 10 novembre 2004.

La Défense et l’espace. Ariane d’Helios. Les petits guides de la défense. Documentation française, juin 2007.

Livre blanc : Espace: une nouvelle frontière européenne pour une Union en expansionPlan d'action pour la mise en oeuvre d'une politique spatiale européenne. Commission européenne, 11 novembre 2003.

Rapport d’information déposé le 5 février 2008 en application de l’article 145 du règlement par la commission de la défense nationale et des forces armées sur les enjeux stratégiques et industriels du secteur spatial et présenté par M. Serge Grouard et Mme Odile Saugues députés.

Rapport sur les grands domaines programmatiques de la politique spatiale du futur. Politique spatiale : l’audace ou le déclin ? Comment faire de l’Europe le leader mondial de l’espace ? Par M. Christian Cabal †, député, et M. Henri Revol, sénateur février 2007.

L’espace à l’horizon 2030 : Relever les défis de demain. L’Observateur de l’OCDE n°263, octobre 2007.