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Università degli Studi Roma Tre Dipartimento di Lingue, Letterature S. Miglierina Sorbonne Université UFR d’Études Italiennes e Culture straniere Letteratura del Seicento Le Paris des Italiens - dispensa - Mai 2018

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Università degli Studi Roma TreDipartimento di Lingue, Letterature

S. Miglierina Sorbonne UniversitéUFR d’Études Italiennes e Culture straniere

Letteratura del Seicento

Le Paris des Italiens

- dispensa -

Mai 2018

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INTRODUCTIONLA SCÈNE FRANÇAISE – RAPPEL

1 ­ CARTOGRAPHIE THÉÂTRALE

Paris, aujourd’huiNord

LE PARIS DES ITALIENS

(XVIIE­XVIIIE SIÈCLES)

Stéphane MiglierinaSorbonne Université

[email protected]

La déroute burlesque des Comédiens Italiens chassés de Paris en 1697, Bibli.‐Mus. Opéra de Paris

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Paris, en 1652 (plan Gomboust)

Nord

LES THÉÂTRES DES FRANÇAIS ET DES ITALIENS

La scène du Petit‐Bourbon en 1582

La Salle du Palais‐Royal (ici avec Louis XIII, Anne d’Autriche et Richelieu)

La Comédie‐Française,aujourd’hui

Eglise Saint‐Sauveur

Hôtel de Bourgogne

Emplacement de la dernière maison de Goldoni en 

1793

Église Saint‐Sauveur

Les Halles

Église Saint‐Eustache

Salle du Palais RoyalÉglise Saint‐Eustache

Hôtel de Bourgogne

Plan Gomboust, Paris, 1652, détails

Salle du Petit BourbonNord

Emplacement de la maison natale de Molière (1622)

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2 – LES TROUPES ITALIENNES À PARISLe théâtre de métier et les troupes itinérantes : 

l’exemple de la famille Andreini (XVIe/XVIIe siècles)

Giovan Battista Andreiniet la Compagnie des 

Fedeli

Hieronymus Francken (attr.), La Compagnie des Gelosi à Paris, 1590 environ.

Présence à Paris :

‐ sept. 1613 – juil. 1614 (invités par Marie de Medicis)

‐ janv. 1621 – avr. 1622, 

‐ dec. 1622 ‐ mars 1623, 

‐ 1624 ‐ juin 1625, 

‐1643 – 1647

Représentations : Hôtel de Bourgogne et Louvre

3. LE PREMIER THÉÂTRE FIXE DES ITALIENS À PARIS :LA COMÉDIE­ITALIENNE (HOTEL DE BOURGOGNE)

« La position de leur ancien Hôtel de Bourgogneétait très incommode pour le public, et encore pluspour les habitants du quartier ; j’en étais un, et j’aicouru des risques pour rentrer chez moi au momentde la défilée des voitures ».

Mémoires de C. Goldoni (III, 32)Plan et section du Théâtre de l’Hôtel de Bourgogne, découverts et publiés par John Golder

Tommaso Vicentini, dit Thomassin Anon., Scène de la Comédie­Italienne : Arlequin (Vicentini)

et Riccoboni, vers 1720.

4. DES PRATIQUES THÉÂTRALES DIFFÉRENTES

LES FRANÇAIS LES ITALIENS

Prépondérance de la figure de Prépondérance de la figure de

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5. LE RECUEIL D’EVARISTO GHERARDI :TRACES TEXTUELLES PROBLÉMATIQUES

a – des scènes laissées à l’interprétation des acteurs

QUELQUES EXEMPLES

ARLEQUIN [portant un costume mi‐hommemi‐femme] prend un pot de faïence, et feignant de la jeter àla Lingère, il le jette à la tête de Pasquariel. Après deux ou trois répétitions du même lazzi, Arlequin sort[...] ; et comme s'il voulait sauter sur la Lingère, il se tourne tantôt d'un côté et tantôt de l'autre : en sorteque Pasquariel qui le voit homme d'un côté et femme de l'autre, et qui les croit véritablement aux prises,s'empresse à les séparer et reçoit plusieurs coups. Après quoi Arlequin se retire en riant, et laissePasquariel par terre, qui dit, après s'être relevé : Voilà des gens bien animés l'un contre l'autre, et s'en va.

(La Lingère du palais)

[Arlequin] fait un jeu très agréable. (Arlequin protée)

Après le lazzi italien, Arlequin lève sa Trompette en l'air. (Arlequin Empereur dans la lune)

Nota. Que dans cette Scène, partout où la phrase est suivie de petits points, cela est mis pour avertir qu'ences endroits Arlequin change de voix, et de geste. [...] Ceux qui ont vu cette scène, conviendront que c'estune des plus plaisante qu'on ait jamais joué sur le Théâtre Italien

(Arlequin empereur dans la lune)

Cette scène n'aurait point été imprimée, si d'autres que moi ne l'avaient déjà donnée au Public touttronquée. C'est une de ces Scènes Italiennes, dont le mérite est inséparable de l'action. Vous allez enjuger vous­même.

(Le Chevalier du soleil)

JUPITER ‐ D'où vient que Mercure est monté sur mon aigle ? N'a‐t‐il pas des ailes aux talons pour voler ?

ARLEQUIN [déguisé en Mercure] ‐ Hélas ! Seigneur Jupiter, mes ailes ne peuvent plus me servir, perchépassando per una strada, una servanta m'a vuidé un pot de chambre dessus, et me les a tellementmouillées, que se non fossi tombé per bonhor sur un tas de fumier, Mercurio si saria rotto il collo; e così hotrovà la vostra aquila dans l'Ecurie, attachée au ratelier, et je m'en suis servi per far tutte le commissionidont je suis chargé. […] Vraiment, vraiment, il est arrivé bien des fracas là‐haut depuis que vous en êtessorti. Vulcano, come Vosignoria sa, è malizioso come un diavolo.

D***, Arlequin mercure galant, in Gherardi, Théâtre Italien, 1700. 

b – Une  scène plurilingue

U di l t l théât f i it li t l’O éc. – Un dialogue entre les théâtres français, italiens et l’Opéra. 

COLOMBINE. Hé ne nous vantez pas toutes les magnificences de votre hôtel. Votre théâtre, environné d’unegrille de fer, ressemble plutôt à une prison, qu’à un lieu de plaisir. Est‐ce […] pour les empêcher de se jeterdans le Parterre, que vous mettez des gardes‐fous devant eux ? les Italiens donnent un champ libre sur lascène à tout le monde. […] Le Théâtre Italien est le centre de la liberté, la source de la joie, l’asile deschagrins domestiques, et quand on voit un homme à l’Hôtel de Bourgogne, on peut dire qu’il a laissé toutson chagrin chez lui.[plus loin]ARLEQUIN [habillé en comédien français]. Néron ! Voilà encore un plaisant farceur ! nous ne l’aurions jamaisreçu dans notre troupe [française] ; Il était trop cruel, et on n’est pas accoutumé à trouver de la cruautésur nos théâtres.LE PARTERRE. Si ce n’est à l’Opéra.

Charles Dufresny, Les Chinois,  in Evaristo Gherardi, Théâtre italien, 1700

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d. – Des scènes de parodie du théâtre français

LUCRÈCE [Colombine] – Puisque rien ne saurait arrêterApproche, et vois en moi l'action la plus rare,  [ta fureurDont jamais l'univers ait ouï parler. Barbare,Contre tes noirs desseins en vain j'ai combattu;Et bien, connais Lucrèce et tout sa vertu.Elle se poignarde, et laisse tomber son poignard sur un fauteuil. On l'emporte.TARQUIN [Arlequin] – Que vois‐je juste ciel ?MEZZETIN Bon c'est que pour rireMEZZETIN – Bon c est que pour rire

Charles Dufresny,  La Foire Saint­Germain, in EvaristoGherardi, Théâtre italien, vol.6, 1700

(Arlequin Protée)

6. LA HAINE DES ITALIENS ?LA FERMETURE DE LA COMÉDIE ITALIENNE

Que leur reproche‐t‐on ?

J.‐A. Watteau, Départ des Comédiens Italiens en 1697, grav. L. Jacob

Frontispice du Nouveau Théâtre Italien, Paris, Coustelier, 1718, vol.1

7. LA NOUVELLE COMÉDIE­ITALIENNEET L’HÉRITAGE DES ITALIENS

DANS LES TEXTES FRANÇAIS DU XVIIIE S.

Due coppie di innamorati, Riccoboni (Lelio), la moglieElena Balletti (Flaminia), Giuseppe Balletti (Mario,secondo innamorato), Rosa Zanetta Benozzi (Silvia,seconda amorosa); due vecchi nelle persone di PietroAlborghetti (Pantalone) e Francesco Materazzi(Dottore); una coppia di servi: Giovanni Bissoni(Scapino primo zanni) e Tommaso Antonio Vicentini(Arlecchino secondo zanni); una servetta MargheritaRusca (Violetta), moglie dell’Arlecchino; unoScaramuccia proveniente direttamente da Napoli,Giacomo Raguzzini. Infine una coppia di cantanti: iconiugi Ursula Astori, in arte la Cantarina, e FabioSticotti, quest’ultimo ingaggiato a stipendio percantare negli intermezzi.

Différentes listes de composition de la troupe des Italiens

tirés des registres (Bibli.‐Mus. Opéra)

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a. L’utilisation des personnages(ici par Marivaux)

Une  longue tradition de transmission technique

Une influence italienne dans l’écriture des Français au XVIIIe siècle :

b. La cristallisation des formes(Louis de Boissy définit Arlequin et synthétise le jeu des Italiens et des Français )

« Ce dehors, ces façons, ces riens inexprimables,Qui rendent tous les cœurs épris, Ces coups de tête inimitables Qui tachent d'attraper tous nos jeunes Marquis, Quand on les voit dans les coulissesDéployer leur talents aux yeux des Spectateurs, 

Elomire Hypocondre, frontispice, 1670, BNF,

« Scaramouche enseignant, Elomire étudiant »

Et jouant avec les Actrices,Chanter plus haut que les Acteurs [...] »  Un personnage décrivant Arlequin dans Momus

exilé ou le Je ne sais quoi de Boissy

L’ACTEUR FRANÇAIS. Applaudissez du moins à mes gestes choisis, Et de mon jeu muet sentez bien tout le prix. [...]Et du chapeau surtout admirez l'exercice.En trois temps je le mets et l'ôte fièrement,Puis ma Main avec grâce en décore mon flanc. [...]ARLEQUIN Campé de la manière, ô Prince sans égal !In ne vous manque plus, vraiment, qu'un piédestal.

Momus exilé ou le Je ne sais quoi de Boissy.c. Les vaudevilles :La reprise des airs de la Comédie‐Italienne pendant tout le XVIIIe siècle,et même le XIXe.

8. UN ITALIEN À PARIS :  CARLO GOLDONILettre au Marquis Francesco Albergati, Venise, le 5 septembre1761

« Goldoni va à Paris, et il partira, s’il plaît à Dieu, au prochain carême[…]. Mais, me direz‐vous, que vas‐tu faire à Paris ? Voici trois ans qu’acommencé par lettres la discussion avec le Théâtre‐Italien pour quej’aille le diriger, c’est‐à‐dire écrire là‐bas des textes dans le goût du pays[…] Le projet est pour deux ans : voyage aller et retour payé, et six millefrancs d’appointements par ans. […] Si je m’acquiers quelque mérite, jeresterai à des conditions très améliorées ; si je ne réussis pas, je m’enretournerai en Italie ; j’aurai vu Paris, j’aurai enrichi mon imaginationpour écrire des choses neuves en Italie, et surtout, j’aurai donné ungrand élan à mon édition […] ».

Lettre au Marquis FrancescoAlbergati, Paris, le 18 avril 1763

« […] je n’arriverai pas à obtenir ceque je désire, c’est‐à‐dire à voir à laComédie‐Italienne le théâtre rempli.[…] Les femmes, en France, necomprennent pas l’italien et quandles femmes ne vont pas au théâtre,les hommes s’y font rares. Il fautdonc que je m’arrange pour yamener ce sexe difficile ; pour cela, ilfaut l’intéresser, mais comment ?Avec de la nouveauté avec du

Lettre de C. Goldoni à Gabriel Cornet, Paris, le 6 septembre 1762

Le théâtre de la Comédie‐Italienne est très beau et il emploie dixacteurs italiens et dix français, tous à part entière, plus sixpensionnaires, huit musiciens et quarante danseurs .

Avec de la nouveauté, avec duspectacle et avec beaucoup defrançais ».

Lettre au Marquis Francesco Albergati, Paris, le 10 janvier 1764 et le 18 février 1764

« […] je suis content, mais si je pouvais, je partirais dès demain pour rentrer en Italie. Non que je n’aime pas Paris, mais il me semble que j’aiperdu ici mon propre centre, et il m’est bien difficile de continuer à plaire sans pouvoir me faire entendre par le dialogue, donc à coups desituations ou comiques, ou pathétiques, ou intéressantes. La chose est trop pénible et trop hasardeuse, et puis, la présomption de certainscomédiens que je ne puis pas utiliser ne laisse pas de me donner des inquiétudes. Ajoutez à cela que six mille francs par an à Paris ne suffisentpas pour vivre décemment et que je ne puis me résigner à ce que l’acteur le moins habile en gagne quinze mille quand je dois me contenter desix ».

« […] les comédiens sont partout des comédiens, c’est‐à‐dire qu’ils ne sont pas des saints. Certaines querelles intestines, et qui ne meregardent pas, sont cause qu’ils portent préjudice à leurs intérêts et qu’ils me font à moi le chagrin de ne pas pouvoir contenter le public. Tantpis pour eux ».

Portrait de Goldoni par Cochin, 1787

9. QUE RESTE­T­IL DES ITALIENS À PARIS ?

Une autre Comédie Italienne à Paris?L’hôtel de Bourgogne détruitpendant les travaux haussmanniensdu XIXe siècle

Rue de la Gaité, Mai 2016Ancien emplacement de l’Hôtel de Bourgogne, rue Mauconseil

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CONCLUSION :  LE MYTHE DE LA COMMEDIA DELL’ARTE

Clichés, redécouverte et réinterprétations…

• des spectacles et des déguisements de carnaval• souvent pour enfants

Même s’il est vrai que la saison théâtraleest historiquement le carnaval

• des spectacles toujours comiques• joués sur les places publiques (saltimbanques)• obscénité et grossièreté 

Jacques Callot, I Balli di Sfessania, 1622 

est, historiquement, le carnaval 

Même s’il est vrai que certaines représentationsd’époque insistent sur l’obscénité de certainespostures.

Des tentatives de reconstitution et de réinterprétation en Italie…

Arlequin, serviteur de deux maîtres,mise en scène Giorgio Strehler

Dario Fo, Le lazzo de la mouche

Et en France ? 

BIBLIOGRAPHIE ET CRÉDITS

Pour approfondir la réflexion : 

Goldoni avant la lettre : esperienze teatrali pregoldoniane (1650­1750) a cura di Javier Gutiérrez Carou, en particulier partie III « Le Théâtre Italien di Gherardi », VVeeninise,se, LLineadacqua,ineadacqua, 2016.2016.

ATTINGER, Gustave, L’Esprit de la Commedia dell’Arte dans le Théâtre Français, Paris‐Neuchâtel, Librairie Théâtrale, 1950.

DE LUCA, Emanuele, Il repertorio della Comédie­Italienne di Parigi (1716­1762), Paris, IRPMF, 2011

FERRONE, Siro, Attori mercanti corsari : la Commedia dell’Arte in Europa tra Cinque e Seicento, Turin, Einaudi, 2011.

GUARDENTI, Renzo, Gli Italiani a Parigi. La Comédie Italienne (1660­1697). Storia, pratica scenica, iconografia, Rome, Bulzoni, 1990.

Certains des documents ci‐dessus ont été fournis par Emanuele de Luca et Lucie Comparini. Leur utilisation scientifique est réservée à ce cours  : ils ne peuvent être exploités hors de ce contexte.

Les extraits des lettres de C. Goldoni ont été traduits par Ginette Herry.Aucune reproduction n’est autorisée sans accord préalable