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Le médicament au centre Contribuer à rendre au médicament et aux produits de santé leur juste place au service des patients comme élément central de structuration de la santé publique, tel est mon objectif pendant mon année de présidence de l’Académie nationale de Pharmacie. Cette nécessité m’est apparue évidente tout au long de ces derniers mois, sinon de ces dernières années, tant j’ai été frappé par le dénigrement permanent, en particulier médiatique, de l’utilité de ces produits. En ligne avec sa mission d’expertise scientifique indépendante au service de la santé, l’Académie se doit de faciliter le retour de la confiance de nos concitoyens dans notre système de santé. Favoriser l’innovation, mettre en perspective les notions de bénéfice et de risques, mieux gérer le principe de précaution, favoriser la mise à disposition de la population d’une information scientifique fiable et compréhensible ; en un mot, contribuer à l’amélioration de la santé publique, telles sont nos ambitions. Nous y parviendrons grâce à la participation active de tous les membres de l’Académie que je voudrais ici remercier pour leur confiance et leur soutien. Médicaments et dopage, ruptures d’approvisionnement, meilleure régle- mentation des dispositifs médicaux, freins à l’innovation, coordination des soins, en particulier entre médecins et pharmaciens : autant de sujets d’actualité au pro- gramme de séances particulières et de recomman- dations spécifiques au cours de l’année 2013. Je m’attacherai aussi à poursuivre, comme mes prédécesseurs, les relations interacadémiques, avec nos traditionnelles séances commune. Dans ce monde troublé, enfin, j’aurai à cœur de favoriser nos relations internationales, en partageant davantage, notamment avec nos membres européens et étrangers, nos expé- riences réciproques, pour inventer et développer des solutions communes. 2013 : année du bicentenaire de la mort d’Augustin Parmentier, le premier Président de l’Académie natio- nale de Pharmacie, que nous célébrerons ensemble. 2013 : je vous souhaite à tous une année sereine et positive, et pour chacun d’entre vous joies, réussite et santé. Yves JUILLET, Président 2013 © cliché Société d’Histoire de la Pharmacie NUMÉRO 23 décembre 2012 www.acadpharm.org 4 avenue de l’Observatoire 75270 PARIS cedex 06 éditorial 2013 : l’année Parmentier Célébration du bicentenaire de la mort d’Antoine-Augustin Parmentier, pharmacien militaire, premier président, le 15 ther- midor An XI (3 août 1803), de la Société de Pharmacie de Paris, qui prendra plus tard le titre d’Académie nationale de pharmacie. bilan et perspectives Recommandations 2012 28 mars, « Qualité de l’air : de l’échelle locale à l’échelle planétaire. Compréhension-Implications », « Qualité des eaux et santé publique : limites des connaissances et nouveaux enjeux », avec l’Académie des Technologies 7 mai, • Médicaments génériques • Diplôme d’herboriste 16 mai, Promouvoir les médicaments pédiatriques 17 juillet, La formation des pharmaciens en éthique 19 septembre, • La première année commune des études de Santé (PACES) • La diabésité et les maladies cardio-cérébro-vasculaires 17 octobre, La vaccination : un acte individuel pour un bénéfice collectif 19 octobre, Avis sur la publication récente de G.E. Séralini et al. sur la toxicité d’un OGM, avec les Académies nationales d’Agriculture, de Médecine, des Sciences, des technologies, et Vétérinaire 30 octobre, Contribution aux Assises de l’Enseignement supérieur et de la Recherche 30 novembre, Résistance aux antibiotiques : une impasse thérapeutique ? Implications natio- nales et internationales, avec les Académies nationales d’Agriculture, de Médecine et Vétérinaire. 2013 : prochaines séances 23 janvier « L’actualité de la lutte contre le dopage » 6 février « Les médiateurs gazeux, NO, CO et H2S : physiologie, physiopathologie et thérapeutique » 20 mars « Ruptures d’approvisionnement des médicaments ». le bureau 2013 Président : Yves JUILLET Vice-président : Jean-Pierre FOUCHER Secrétaire général : Agnès ARTIGES Secrétaire général adjoint : Liliane GRANGEOT-KEROS Trésorier : Claude VIGNERON Trésorier adjoint : Yves ROCHÉ Secrétaire annuel : Bruno BONNEMAIN prix de la Pharmacie francophone Encourager l’harmonisation réglementaire des médicaments en Afrique Les deux lauréates 2012 sont directement engagées en faveur de la mise à disposition de médicaments de qualité au bénéfice de la population, dans un contexte de ressources limitées, dans leurs régions respectives de l’Afrique Francophone : l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et l’Organisation de Coordination pour la lutte contre les Endémies en Afrique Centrale (OCEAC). Safiatou OUTTARA (Burkina Faso), chargée du secrétariat de la Cellule pour l’harmonisation de la Réglementation et la coopération pharma- ceutique au sein de l’UEMOA. Émilienne Pola YSSIBI (Cameroun), expert en politiques et régle- mentations pharmaceutiques à la Direction de la Pharmacie et du Médicament au ministère de la Santé du Cameroun.

Lettre observatoire23 3 - acadpharm · 2019. 10. 2. · 2013 : année du bicentenaire de la mort d’Augustin Parmentier, le premier Président de l’Académie natio-nale de Pharmacie,

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  • Le médicament au centre Contribuer à rendre au médicament et aux produits de santé leur juste place au service des patients comme élément central de structuration de la santé publique, tel est mon objectif pendant mon année de présidence de l’Académie nationale de Pharmacie. Cette nécessité m’est apparue évidente tout au long de ces derniers mois, sinon de ces dernières années, tant j’ai été frappé par le dénigrement permanent, en particulier médiatique, de l’utilité de ces produits. En ligne avec sa mission d’expertise scientifique indépendante au service de la santé, l’Académie se doit de faciliter le retour de la confiance de nos concitoyens dans notre système de santé. Favoriser l’innovation, mettre en perspective les notions de bénéfice et de risques, mieux gérer le principe de précaution, favoriser la mise à disposition de la population d’une information scientifique fiable et compréhensible ; en un mot, contribuer à l’amélioration de la santé publique, telles sont nos ambitions. Nous y parviendrons grâce à la participation active de tous les membres de l’Académie que je voudrais ici remercier pour leur confiance et leur soutien. Médicaments et dopage, ruptures d’approvisionnement, meilleure régle-mentation des dispositifs médicaux, freins à l’innovation, coordination des soins, en particulier entre médecins et pharmaciens : autant de sujets d’actualité au pro-gramme de séances particulières et de recomman-dations spécifiques au cours de l’année 2013.Je m’attacherai aussi à poursuivre, comme mes prédécesseurs, les relations interacadémiques, avec nos traditionnelles séances commune. Dans ce monde troublé, enfin, j’aurai à cœur de favoriser nos relations internationales, en partageant davantage, notamment avec nos membres européens et étrangers, nos expé-riences réciproques, pour inventer et développer des solutions communes. 2013 : année du bicentenaire de la mort d’Augustin Parmentier, le premier Président de l’Académie natio-nale de Pharmacie, que nous célébrerons ensemble. 2013 : je vous souhaite à tous une année sereine et positive, et pour chacun d’entre vous joies, réussite et santé.

    Yves JUILLET,Président 2013

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    N U M É R O 2 3décembre 2012

    w w w. a c a d p h a r m . o r g 4 avenue de l’Observatoire 75270 PARIS cedex 06

    éditorial 2013 : l’année Parmentier Célébration du bicentenaire de la mort d’Antoine-Augustin Parmentier, pharmacien militaire, premier président, le 15 ther-midor An XI (3 août 1803), de la Société de Pharmacie de Paris, qui prendra plus tard le titre d’Académie nationale de pharmacie.

    bilan et perspectivesrecommandations 2012• 28 mars, « Qualité de l’air : de l’échelle locale à l’échelle planétaire. Compréhension-Implications », « Qualité des eaux et santé publique : limites des connaissances et nouveaux enjeux », avec l’Académie des Technologies • 7 mai, • Médicaments génériques • Diplôme d’herboriste • 16 mai, Promouvoir les médicaments pédiatriques • 17 juillet, La formation des pharmaciens en éthique • 19 septembre, • La première année commune des études de Santé (PACES) • La diabésité et les maladies cardio-cérébro-vasculaires • 17 octobre, La vaccination : un acte individuel pour un bénéfice collectif • 19 octobre, Avis sur la publication récente de G.E. Séralini et al. sur la toxicité d’un OGM, avec les Académies nationales d’Agriculture, de Médecine, des Sciences, des technologies, et Vétérinaire • 30 octobre, Contribution aux Assises de l’Enseignement supérieur et de la Recherche • 30 novembre, Résistance aux antibiotiques : une impasse thérapeutique ? Implications natio-nales et internationales, avec les Académies nationales d’Agriculture, de Médecine et Vétérinaire.

    2013 : prochaines séances• 23 janvier « L’actualité de la lutte contre le dopage » • 6 février « Les médiateurs gazeux, NO, CO et H2S : physiologie, physiopathologie et thérapeutique »• 20 mars « Ruptures d’approvisionnement des médicaments ».

    le bureau 2013Président : Yves JUILLETVice-président : Jean-Pierre FOUCHERSecrétaire général : Agnès ARTIGES Secrétaire général adjoint : Liliane GRANGEOT-KEROS Trésorier : Claude VIGNERON Trésorier adjoint : Yves ROCHÉ Secrétaire annuel : Bruno BONNEMAIN

    prix de la Pharmacie francophoneencourager l’harmonisation réglementaire des médicaments en AfriqueLes deux lauréates 2012 sont directement engagées en faveur de la mise à disposition de médicaments de qualité au bénéfice de la population, dans un contexte de ressources limitées, dans leurs régions respectives de l’Afrique Francophone : l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et l’Organisation de Coordination pour la lutte contre les Endémies en Afrique Centrale (OCEAC).

    Safiatou OUTTARA (Burkina Faso), chargée du secrétariat de la Cellule pour l’harmonisation de la Réglementation et la coopération pharma-ceutique au sein de l’UEMOA.

    Émilienne Pola YSSIBI (Cameroun), expert en politiques et régle-mentations pharmaceutiques à la Direction de la Pharmacie et du Médicament au ministère de la Santé du Cameroun.

  • la 4e section à l’écoute des patientsLe médicament est un acteur majeur de santé qui se doit d’être fiable, adapté à chaque patient, disponible, et accessible à tous. Notre section a pour mission d’alerter et de sensibiliser dans ce domaine les pouvoirs publics, les professionnels de santé, les industriels et les patients, et de faire des propositions. Les médicaments génériques doivent retrouver la confiance de tous, par l’intermédiaire des pharmaciens en particulier. C’est pourquoi, après une revue de la réglementation, de son application et de la littérature scientifique, l’Académie tient à réaffirmer que ces médicaments non seulement obéissent à une évaluation suffisamment stricte pour garantir une qualité, une efficacité et une sécurité équivalentes aux princeps, mais que les génériques doivent être développés à la fois pour faire des économies et soutenir l’innovation. L’optimisation de la substitution passe d’abord par un effort de pédagogie. Les médicaments pédiatriques doivent être adaptés à chaque âge de l’enfance, du prématuré à l’adolescent, ce qui impose, au-delà du principe actif, qui est le même pour l’adulte, de définir une posologie et une galénique différentes dans le cadre d’un développement suffisamment rigoureux pour garantir la sécurité sans tomber dans un excès de réglementation. La mise à disposition de formes pédiatriques pour des médications anciennes qui ont fait leurs preuves serait une première mesure utile. Les ruptures d’approvisionnement, enfin, représentent une perte de chance pour le patient. Les causes en sont multiples : arrêt d’une synthèse dans un pays étranger, problèmes de transport, qualité insuffisante du produit, délais de livraison, mauvaise estimation des stocks, recours systématique au flux tendu, répartition non contrôlée… Nous tâcherons de les identifier et de proposer des solutions lors d’une séance thématique sur le sujet début 2013.

    Jean-Loup PARIER, Président de la 4e section

    Depuis la loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999, le pharmacien a le droit de délivrer à la place de la spécialité prescrite un médicament générique. Ce droit de substitu-tion s’exerce dans le respect de la décision du prescripteur et dans des limites imposées : la spécialité substituée doit relever du même groupe générique que le produit prescrit • Le prescripteur ne doit pas s’y être expressément opposé • Cette substi-tution ne doit pas entrainer une dépense supplémentaire pour l’Assurance maladie à celle du générique le plus cher du même groupe • Le patient ne s’oppose pas à la substitution. Ce droit est devenu une quasi-obligation par diverses mesures destinées à réduire les dépenses de médicament pour la même efficacité thérapeutique : • signature d’une convention entre les pharmaciens et l’Assurance maladie fixant des objectifs de substitution et de possibles sanctions pour les pharmaciens éloignés de ces objectifs • Établissement de Tarif forfaitaire de responsabilité pour certain groupe de génériques fixant le prix de base de

    médicaments génériquesBioéquivalence et efficacité thérapeutique Un médicament générique doit avoir une efficacité clinique et une sécurité d’emploi équivalentes au princeps. Trois critères doivent être testés : la composition de la présentation pharmaceutique, le devenir dans l’organisme du principe actif et l’efficacité / sécurité clinique du générique.

    La détermination précise de la composition d’un médi-cament est un domaine bien maîtrisé grâce aux perfor-mances analytiques actuelles. La réglementation mise en place par les agences de santé permet de garantir une parfaite équivalence de la composition et du dosage du principe actif, ainsi que la qualité des excipients. C’est une étape indispensable, mais la garantie de cette équi-valence d’efficacité et de sécurité exige de démontrer aussi que le principe actif se diffuse dans l’organisme comme le princeps.

    Bioéquivalence : sécurité d’usageÀ taux sanguins similaires, l’activité thérapeutique est similaire : la bioéquivalence garantit en principe une effi-cacité et une sécurité d’usage équivalente. Mais, pour un même médicament, les concentrations sanguines varient d’une prise à l’autre et d’un sujet à l’autre ; il faut donc pra-tiquer plusieurs déterminations sur un nombre suffisant de sujets, selon des règles bien établies, pour formuler cette bio- équivalence. L’analyse statistique doit conclure que, dans l’absolu,

    la moyenne des taux sanguins à partir du générique n’est pas inférieure à 80 % ou supérieure à 125 % de la moyenne des taux sanguins à partir du princeps.À ce jour toutes les études cliniques de qualité (evi-dence-based) réalisées avec des médicaments géné-riques agréés par les agences du médicament, en Europe et aux États-Unis, ont démontré la justesse de cette approche et retrouvé l’équivalence d’efficacité et de sécurité entre génériques et princeps. Les seules études divergentes sont rares, méthodologiquement discutables, mais leur succès médiatique est, hélas incontestable. Concernant les cas individuels évoquant une non-équivalence thérapeutique, en dehors de rares cas spécifiques, on retrouve le plus souvent un non respect du bon usage, une non observance ou une interprétation invalidée par une analyse attentive.

    Jean-Loup PARIERMédicaments génériques – Avis et recommandations, 2012.7.5

    http://www.acadpharm.org/dos_public/Avis_et_recommandations___mEdicaments_gEnEriques_2012.05.07_VF_SG_clair.pdf

    pour le pharmacien, la substitutionun droit, une quasi-obligation, une responsabilité éthique

    Le premier générique de l’Aspirin, en France,

    en 1908.

    la prise en charge du remboursement pour ce groupe • Suppression du tiers payant pour les patients n’acceptant pas la substitution. Ainsi, la substitution est un devoir éthique qui s’impose au pharmacien afin de réduire, à soin et sécurité constants, les dépenses de santé pour la collectivité. Le patient doit rester le seul décideur, au centre du dispositif. Dans certaines circonstances, en particulier pour les traitements chroniques, chez les sujets âgés et les sujets à risques, la substitution peut être délicate ; dans de très rares cas, elle peut être déconseillée. C’est au pharmacien d’optimiser la substitution pour favoriser le meilleur usage du médicament substitué, en échangeant avec le prescripteur et en informant au mieux le patient. Dans ce contexte, le Dossier Pharmaceutique est un outil essentiel pour éviter des redondances et les changements de génériques lors des traitements chroniques. C’est l’espoir de regagner la confiance de tous les acteurs de santé, dans l’intérêt des patients et de la collectivité, qui a guidé nos recommandations.

    Jean-Pierre MANGEOT

  • des médicaments mieux adaptés

    La rupture d’approvisionnement, d’abord vécue comme un traumatisme et une angoisse par les patients et les équipes de soins, pose aussi un véritable problème de santé publique.

    Depuis plusieurs années, on constate que certains médicaments ne sont plus disponibles, de quelques jours à plusieurs mois, et que le phénomène, qui a tendance à s’amplifier, touche des produits essentiels comme les anti-cancéreux, les anticoagulants ou les immunoglobulines, etc. D’autre part, dans la mesure où les traitements de longue durée sont plus fréquents, il est maintenant courant de manquer de médicaments pour des traitements complexes, ce qui ne manque pas d’inquiéter à la fois les pouvoirs publics, les professionnels de santé et les patients. À l’Académie, un groupe pluridis-ciplinaire, constitué sous l’égide de la 4e section, s’est mis au travail.

    un phénomène mondial Ces ruptures de stock sont observées au niveau mondial ; les causes en sont multiples et se retrouvent à tous les stades de la chaîne de fourniture du médicament (« Supply chain »), de la prévision des ventes jusqu’à la dispensation aux patients, en passant par les problèmes de qualité, la four-niture des matières premières chimiques ou des excipients, le rythme de la fabrication, la gestion des stocks, la distribution, etc. Elles varient aussi d’un pays à l’autre. Ainsi, aux États-Unis et au Canada, on estime que 43 % des ruptures d’approvisionnement sont imputables à des problèmes qualité mis en évidence par les inspections des autorités, en particulier pour les formes injectables. Dans certains cas, les industriels ne disposent que d’une source unique de fabrication de la substance active ou du médicament, ce qui fragilise la fourniture régulière de ces produits. Parfois, c’est la gestion de la fabrication et des stocks au niveau industriel et des grossistes répar-titeurs régionaux ou nationaux qui hypothèque la distribution du médica-ment. Enfin, quand il s’agit de produits anciens à faible marge, l’absence au comptoir s’explique tout simplement par leur faible rentabilité. Toutefois,

    médicaments pédiatriquesencore un effort100 millions de personnes en Europe ont moins de 18 ans, mais ces 20 % d’euro-péens ne bénéficient pas de médicaments adaptés... En pédiatrie, une grande partie des médicaments (de 11 à 80 %) restent actuellement prescrits en dehors du cadre de leur autorisation de mise sur le marché (AMM) sans que des essais cliniques spécifiques chez l’enfant aient été conduits, ce qui non seulement n’est pas éthique mais peut exposer à un risque potentiel d’inefficacité, de toxicité ou d’erreur d’administration. La mise sur le marché de dosages et de formes pharma-ceutiques adaptées à l’utilisation en pédiatrie reste plus que jamais d’actualité, et toutes les pistes pour améliorer l’efficacité et la sécurité doivent être explorées et soutenues.

    des progrès et des blocagesDepuis 2007, le règlement n° 1901/2006 du Parlement européen et du Conseil de l’Union Européenne a pour vocation de rendre disponibles des médicaments pédiatriques adaptés et ajustés à la réalité des pratiques, aux besoins des patients et aux contraintes économiques. Depuis cinq ans, sur les 1 600 dépôts de dossiers de développement pédiatrique, une trentaine ont effectivement abouti à la mise à disposition de spécialités spécifiques, et le nombre d’enregistrements de nouvelles études cliniques pédiatriques est en constante augmentation avec environ 350 études par an depuis 2007. Malheureusement, sur les 15 dossiers déposés pour des médicaments plus anciens qui ne sont plus sous brevet, on ne compte que sept avis positifs, alors que ce sont cinquante médicaments qu’il faudrait adapter en priorité, comme en témoigne la liste publiée et mise à jour par l’Agence du Médicament Européenne (EMA) sur laquelle s’appuie la Commission de l’Union Européenne pour financer des projets de développement de médicaments pédiatriques.

    des mesures qui s’imposentLes besoins prioritaires en pédiatrie ne seront pas satisfaits tant que l’enregis-trement d’un plus grand nombre de médicaments et les extensions d’indi-cations en pédiatrie dépendront d’un règlement dont la mise en application nécessite des ajustements notamment au niveau des exigences requises et des délais de procédure pour permettre les investissements plus lourds, tenant compte des particularités de la population pédiatrique. Par exemple, il est indispensable de compléter le développement des médicaments destinés aux enfants par des études de pharmacocinétique par classes d’âge et des essais de palatabilité permettant de garantir une compliance au traitement des patients, ce qui implique un coût, et exige donc une évaluation spécifique. En attendant, en l’absence de spécialités disponibles adaptées, les pharma-ciens peuvent être contraints de réaliser des préparations magistrales ou hospitalières, qu’il serait souhaitable d’harmoniser à l’échelle européenne. À cet effet, le développement de monographies de contrôle qualité dans le cadre d’un formulaire européen pédiatrique doit être encouragé, de même que la centralisation et la sous-traitance des préparations d’intérêt prioritaire dont l’intérêt thérapeutique a été reconnu au niveau national. Enfin, il convien-drait de faciliter le recours à ces préparations par un approvisionnement en petites quantités des matières premières nécessaires.

    sécuriser le « hors AMM »La loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé prévoit la mise en place des recomman-dations temporaires d’utilisation (RTU). Ces dispositions particulières ont pour vocation d’assurer une sécurité d’utilisation des médicaments prescrits en dehors de leurs autorisations de mise sur le marché, ce qui concerne environ 28 % des prescriptions pédiatriques. Un système d’information et d’éducation sur le bon usage, une traçabilité des prescriptions ainsi qu’un suivi des patients traités permettraient de renforcer la sécurité de ce dispositif.

    An LEhttp://www.acadpharm.org/dos_public/Recommandations_mEdicaments_pEdiatriques_VF_2012.06.14.pdfdoc=1525&rub=19&zn=30

    le plus inquiétant, c’est la concentration de la production chimique des matières premières sur une seule source pour l’ensemble du monde. Si cette source, parfois très éloignée, est défaillante, la rupture de stock est inévitable.

    des solutions à plus ou moins long terme D’abord, il faut mieux comprendre, avec des exemples concrets, ce qui se passe sur le marché des médicaments et surtout mieux communiquer entre les acteurs concernés. Certains pays, comme la France, ont rendu obligatoire la déclaration de rupture d’approvisionnement. C’est une infor-mation importante, mais encore limitée faute de permettre d’anticiper les risques à long terme, parce qu’elle n’est pas partagée entre les acteurs du système de soins ni avec les patients qui restent réduits à en subir les conséquences.Deuxièmement, il convient d’étudier les moyens d’assurer la continuité d’approvisionnement des substances actives essentielles, et pas seulement à court terme. Il s’agit d’identifier les produits indispensables, et d’engager le dialogue avec les industriels pour améliorer la gestion du risque de rupture et les alternatives possibles en cas de ruptures prolongées. Les solutions sont multiples mais nécessitent un diagnostic et une concertation au cas par cas pour agir au bon endroit et au bon moment. Cette culture du dialogue, qui existe déjà aux États-Unis, en particulier entre les industriels et les auto-rités de santé, devrait être davantage privilégiée en Europe. Enfin, d’autres actions doivent être envisagées, afin d’accroître la flexibilité au niveau de la fabrication du produit fini, et d’obtenir de l’ensemble de la chaîne pharmaceutique une meilleure gestion des prévisions et des stocks.L’Académie nationale de Pharmacie, qui a mis la question sur la place publique, se doit de poursuivre son travail sur ce sujet et d’apporter des pistes d’amélioration et un encouragement au dialogue à tous les acteurs concernés, dans l’intérêt des patients.

    Bruno BONNEMAIN

    approvisionnement des médicamentsdes ruptures problématiques

  • Directeur de la rédaction : Agnès Artiges - Rédacteur en chef : Marie-Christine Belleville - Conception et Réalisation : Nicole Priollaud - Création graphique : Pastel Créations - Réalisation : Evelyne Simonin -

    Impression : Graphival - PEFC/10-31-1138 FCBA/07-00835 – Document imprimé sur du papier PEFC participant à la gestion durable des forêts - ISSN : 1955-8694 - Dépôt légal : décembre 2012

    carnet

    3 questions à Jean-Paul Chiron

    Antibiothérapie : un risque d’impasse thérapeutique ?1. La fin du miracle antibiotique ?L’augmentation de la prévalence de la résistance aux antibiotiques est un problème majeur de santé publique sachant que, dans une même bactérie, des gènes de résistance peuvent s’accumuler contre plus de huit classes d’antibiotiques et que les gènes de virulence peuvent y être associés. Avec la multiplication actuelle des échanges internationaux, les difficultés de traitement augmentent partout dans le monde et, en l’absence de réelle alternative thérapeutique, c’est l’impasse... 2. La fin des antibiotiques ?Utilement prescrits, les antibiotiques sont indispensables au traitement des infections bactériennes. En revanche, une antibiothérapie mal ciblée peut être dangereuse en induisant une résistance rendant inefficace tout traite-ment ou en empêchant la flore intestinale de remplir son rôle de barrière contre les bactéries pathogènes. En conséquence, une utilisation thérapeutique prudente, ciblée et raisonnée s’impose, tout en veillant à maîtriser l’absence d’antibiotiques ou de leur métabolites actifs dans l’environnement : rejets des stations d’épuration, effluents d’élevage, transferts vers la faune sauvage et les communautés bactériennes des écosystèmes. 3. La guerre est déclarée ?D’abord, mettre en application et rappeler à chaque fois que nécessaire les règles d’hygiène élémentaires et renforcer une politique vaccinale rigoureuse contre les infections bactériennes, y comprises les infec-tions nosocomiales. De plus : • Identifier et valider des alternatives thérapeutiques à l’antibiothérapie, telles que la phagothérapie, afin que les pouvoirs publics leur apporte le soutien financier nécessaire et un cadre réglementaire adapté • Mettre en place des actions de police sanitaire afin de pouvoir constater et sanc-tionner l’usage sans limites et non conformes à la réglementation des antibiotiques via Internet. C’est pourquoi les quatre académies s’engagent dans une veille inter-académique permanente de la résis-tance aux antibiotiques pour confronter les informations, aviser périodiquement les autorités, sensibiliser régulièrement le public et les professionnels de santé, contribuer à l’évaluation des résultats des plans mis en œuvre dans le cadre de politiques réactives, adaptées et hiérarchisées dans le temps.

    Propos recueillis par Nicole PRIOLLAUD

    « Résistance aux antibiotiques : une impasse thérapeutique ? Implications nationales et internationales » Séance interacadémique – 21 novembre 2012 – Val de Grâce, Parishttp://www.acadpharm.org/dos_public/Recommandations_sEance_ATBR_VF_2012_11_30.pdf

    Veille scientifique. À l’initiative de Claude Monneret, président de la Commission Prospective scientifique et Programmation, l’Académie nationale de Pharmacie suit régulièrement pour vous l’actualité scientifique du médicament. www.acadpharm.orghttp://www.acadpharm.org/dos_public/LA_LETTRE_n-2_Commission_PSP_VF_du_2012.11.08.pdf

    palmarès 2012

    Prix de thèse • Sciences physico-chimiques, Ludovic Donati, Université Paris-Descartes : « L’unité ortho-bromobenzamide : étude de la réactivité en couplage organo- palladié et application ».• Sciences biologiques, Thomas Mathivet, Université Pierre et Marie Curie : « Rôle des récepteurs de guidage azonal Robo4 et UNCN5B dans l’endothélium vasculaire ».• Sciences du médicament, David Ollitrault, Université de Caen : « Décryptage des signalisations moléculaires contrôlant la différenciation des chondrocytes : retombées pour l’ingénierie tissulaire du cartilage ».• Santé publique et environnement, prix partagé Nébewia Griffette, Université Paris-Diderot : « Cristaux photoniques et polymères à empreintes moléculaires pour la détection optiques de polluants ». Bich-Tram Huynh, Université Paris-Descartes : « Paludisme pendant la grossesse en Afrique sub-saharienne : influence du calendrier d’administration du traitement préventif intermittent ».• Sciences pharmaceutiques (SFDP), Marie Herr-Breget, Université Paris Descartes : « Cadre / Mode de vie et symptomatologie respiratoire et allergique au cours des 18 premiers mois de vie : résultats de la cohorte de nouveau-nés Paris ».

    • Prix d’Histoire de la Pharmacie Maurice Bouvet et Henri Bonnemain (Société d’Histoire de la Pharmacie et Famille Bonnemain), prix partagéMarie Boureau, Université de Bordeaux : « Les pharmaciens, la vigne et le vin en France. Étude historique de 1800 à nos jours ». Patrick Bernier, Université de Poitiers : « L’illustration des pharmacopées en Europe du XVIe au XVIIIe siècle ».

    Le palmarès complet est consultable sur le site www.acadpharm.orghttp://www.acadpharm.org/dos_public/PalmarEs_2012__2012.11.07_V4_SG.pdf

    Nouveaux élus 07.11.2012MeMBres tituLAiresYongmin ZHANG (1re Section)Jean-Louis BEAUDEUX (3e Section)Alain PUISIEUX (3e Section)Luc CYNOBER (3e Section) (05.12.2012)

    MeMBres corresPondAnts nAtionAuxMarcel HIBERT (1re Section)Marc-André LEFEBVRE (1re Section) Alain MARSURA (1re Section) Sylvie MICHEL (2e Section) Frédéric DORANDEU (2e Section) Jean-Noël COLIN (4e Section)Françoise FALHUN (4e Section)Patricia MAILLERE (4e Section)Patricia RAFIDISON (4e Section) Bruno STRIGINI (4e Section)

    corresPondAnts euroPÉensCarmine CARDILLO (Italie)Emili ESTEVE SALA (Espagne)Juan M. IRACHE (Espagne)

    corresPondAnts À titre ÉtrAngerAhmet ARAMAN (Turquie)Mikhail UGRUMOV (Russie)

    MeMBres AssociÉsMaurice LEROY Jean MARTINEZ André-Laurent PARODI

    Distinctions ordre nAtionAL du MÉriteMarc GROGNET et Alain FEUILLU nommés chevaliers

    ordre des PALMes AcAdÉMiquesMichèle FATTAL GERMAN nommée chevalier