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L'HISTORIOGRAPHIE AFRICAINE EN AFRIQUE Catherine Coquery-Vidrovitch Armand Colin | « Revue Tiers Monde » 2013/4 n° 216 | pages 111 à 127 ISSN 1293-8882 ISBN 9782200928810 DOI 10.3917/rtm.216.0111 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-tiers-monde-2013-4-page-111.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Armand Colin. © Armand Colin. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © Armand Colin | Téléchargé le 20/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167) © Armand Colin | Téléchargé le 20/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167)

L'historiographie africaine en Afrique

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L'HISTORIOGRAPHIE AFRICAINE EN AFRIQUE

Catherine Coquery-Vidrovitch

Armand Colin | « Revue Tiers Monde »

2013/4 n° 216 | pages 111 à 127 ISSN 1293-8882ISBN 9782200928810DOI 10.3917/rtm.216.0111

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-tiers-monde-2013-4-page-111.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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L’ÉCRITURE DE L’HISTOIREDANS LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT

L’HISTORIOGRAPHIE AFRICAINE EN AFRIQUE

Catherine Coquery-Vidrovitch*

L’historiographie de langue anglaise a une génération d’avance sur la francophone. L’articleévoque les origines historiques de ce décalage et les écoles qui ont suivi : École d’Ibadan,de Dar es Salam, de Dakar. Les chercheurs des années 1980-2000 ont rédigé une masseformidable de mémoires (maîtrise, DEA, thèses), la plupart non publiés. Ils sont souvent factuelsmais riches d’informations. Les « africanistes » français ont exprimé de vives réserves sur descourants « afrocentristes » et le patrimonialisme stérilisant de certains « mandarins ». Ils ontnégligé l’essentiel : l’histoire africaine, depuis quatre décennies, est écrite majoritairementpar les historiens africains. La défiance envers leurs écrits n’est plus de mise. Malgré leursénormes difficultés matérielles, les historiens contemporains sont des historiens de valeuruniverselle.

Mots clés : Afrique, historiographie francophone, historiographie anglophone, histoire.

L’historiographie africaine a une histoire courte mais déjà riche et variée. Faute detemps et de connaissances, nous allons nous limiter ici à la littérature historiquede langue française et de langue anglaise, surtout en Afrique occidentale. Il estbon de rappeler que l’historiographie de langue anglaise a une bonne générationd’avance sur la francophone. Cela dit, les évolutions n’en ont pas été si différentes,même si l’un des résultats de la priorité anglophone est que, aujourd’hui, laproduction de langue anglaise est quantitativement beaucoup plus importante.

Nous allons dans un premier temps rappeler les origines de cette historio-graphie, rapidement car les débuts en sont déjà connus ; puis son évolution, ennous réservant d’insister sur la situation actuelle, en plein essor.

* Professeure émérite, Université Paris Diderot Paris-7, [email protected]

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LES ORIGINES

L’historiographie africaine a été, à ses débuts, redevable aux anciennesmétropoles. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale au moins, les sociétés africainesétaient présumées « sans histoire », parce que sans écriture (ce qui s’est révélé plustard partiellement inexact), les spécialistes confondant vivre l’histoire et écrirel’histoire. Tous les peuples ont toujours une histoire, et l’histoire des sociétésafricaines s’est avérée depuis lors aussi complexe et tourmentée que celle desautres continents ; mais il était de bon ton de réserver ces « peuples sans histoire »1

à d’autres que les historiens : les ethnologues (surtout à l’époque coloniale)puis les anthropologues, davantage attentifs aux faits sociaux universels, maislongtemps enfermés dans une vision duelle : tradition (supposée intangible etimmobile) et modernité (coloniale et occidentale il va sans dire). Il n’y avait,chez les Africains eux-mêmes, ni ethnologues ni anthropologues ou très peu(on ne cite guère que Jomo Kenyatta, le futur président tanzanien, qui publieson Ph.D. sur les Kikuyu en 19382), et de rares sociologues (le premier futen francophonie Harris Memel-Foté, qui soutint en 1986 une thèse d’Étatmagistrale sur l’esclavage dans les sociétés lagunaires ivoiriennes)3.

Néanmoins, les anglophones vont les premiers échapper à ce cercle vicieux.Dès 1947 (année de l’indépendance de l’Inde), deux chaires d’histoire del’Afrique sont créées par les Britanniques : l’une à Londres, confiée à unancien administrateur colonial, Roland Oliver, qui deviendra le président dela renommée School of Oriental and African Studies (SOAS) de l’Université deLondres qui a formé la première génération des jeunes historiens africains. Plusimportante encore fut la chaire créée la même année en Afrique occidentale,à l’Université de Legon en Gold Coast fondée en 1948. La chaire africainefut confiée au grand historien John Fage, qui devait fonder ensuite un centred’histoire africaine réputé à l’université de Birmingham.

Ces deux centres furent fondamentaux. Ils furent les noyaux de formationdes historiens africains de la première génération, qui avaient commencé etsouvent soutenu leur Ph.D. avant les indépendances. Formés à l’école britanniquedans la grande tradition « oxbridge », ces fondateurs africains produisirent desœuvres à la fois classiques – par leur orthodoxie scientifique – et novatrices,car évidemment il s’y ajoutait d’emblée une connaissance intime de leur pays.Le tout premier fut un missionnaire nigerian, Samuel Johnson, dont l’Histoiredes Yoruba parut au début du XXe siècle. Les Pères fondateurs qui le suivirent,pionniers de l’histoire africaine à l’image de leurs maîtres britanniques, et dontplusieurs sont toujours en vie, formèrent à leur tour les principaux historiens

1. Titre (par dérision) de l’ouvrage d’Eric Wolf, People without History (1982).

2. Traduit en français en 1960 (Kenyatta, 1973).

3. Publiée en 2007 seulement (Memel-Foté, 2007).

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anglophones d’aujourd’hui. Ce sont eux qui donnèrent vie à l’« École d’Ibadan »où ils travaillèrent pendant assez longtemps sur un pied d’égalité avec descollègues britanniques dotés, comme eux, d’un Ph.D. soutenu en Grande-Bretagne, comme le Nigérian Keneth Dike qui soutint son Ph.D. à Londres dès1940 (Dike, 1956). C’est ainsi, par exemple, que le Britannique Michael Crowderdevint longtemps inséparable du Nigérian Ade Ajayi qui, à l’université d’Ibadandont il devint plus tard vice-chancelier, travailla sur l’histoire des Yoruba etdes missions religieuses (Ajayi, 1965 ; Ajayi, Smith, 1971). Saburi Buobakutravailla sur les Egba (1957), I. A. Akinjogbin travailla sur les Fon et le royaumed’Abomey à l’université d’Ife (1967), et je ne cite que les plus connus.

Car les Britanniques avaient laissé, à l’indépendance, une structure universitaireassez complète au Nigeria, et aussi au Ghana, où le grand maître fut, dans le mêmetemps, Albert Adu Bohaen. Celui-ci produisit des maîtres livres (Bohaen, 1964,1975 ; Bohaen, Webster, 1967). Il y eut aussi le Ghanéen Kwame Arhin (1979). Ilest bon de rappeler une historienne, la Gambienne Florence Mahoney, la premièreafricaine à obtenir son Ph.D., en 1963, à l’University of London (Mahoney, 1963).En Afrique orientale, il n’y avait pas encore, à proprement parler, d’université, maisl’Institut de recherches ethnologiques de Rhodésie et le collège de Kampala étaientdes centres afro-britanniques actifs. L’effort des historiens en Afrique orientales’est surtout concentré sur ce que l’on a dénommé l’« École de Dar es-Salam ». Yont travaillé de concert des historiens ou politologues ougandais ou kenyans etdes étrangers anticolonialistes, comme Walter Rodney, historien guyanais qui s’estrendu célèbre par un livre qui fit date, How Europe Underdeveloped Africa en1972 et traduit en français la même année sous le titre (Et l’Europe sous-développal’Afrique), de même que des historiens britanniques d’envergure, comme DavidBirmingham. Le pionnier et le maître en histoire africaine de l’Est fut le KenyanBethwell Allan Ogot, qui avait commencé sa formation au Makerere College del’Ouganda, et qui travailla aussi avec Roland Oliver. Son compatriote le politiste AliMazrui devint spécialiste de l’islam africain.

Au début des années 1970, presque tous ces pionniers avaient déjà soutenu leurPh.D., qui furent les premiers ouvrages d’histoire africaine que, jeune débutantefrancophone, je pratiquai assidûment, puisque la production historienne delangue française était encore balbutiante, issue en quasi-totalité de Français,historiens non professionnels. La plupart étaient d’anciens administrateursd’outre-mer reconvertis après l’indépendance (l’un des plus anciens fut ledocumentaliste Robert Cornevin).

Il n’y eut alors que deux thèses d’État françaises soutenues par les tout premiershistoriens francophones, tous deux Sénégalais. Le premier fut Abdoulaye Ly,formé au moule de l’université française dont seul le sujet révélait la radicalité dela pensée, puisque la thèse fut consacrée au trafic négrier du XVIIIe siècle, alorstrès peu étudié (1958). Le plus connu, mal accueilli en France, fut Cheikh Anta

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Diop, dont la thèse jugée agressive (1954) fut refusée dans un premier tempspar l’establishment parisien, avant de recevoir une mention médiocre en 1960 :il avait l’audace de rappeler que l’Égypte, bel et bien située sur le continentafricain, n’était pas seulement blanche et méditerranéenne. Ce constat reconnuaujourd’hui fit alors scandale dans le milieu des égyptologues français ; uneconférence de confrontation fut même organisée au Caire en 1974, qui pratiquadiplomatiquement une sorte de jugement de Salomon (rapport publié in extensodans le tome II de l’Histoire générale de l’Afrique).

Cette Histoire générale fut une œuvre magistrale en huit volumes, écrite enmajorité par des historiens africains. Sa construction, qui s’étala sur prèsde quarante ans (Unesco, 1964-1999), reflète les efforts de ces premièresgénérations et leur collaboration avec leurs homologues occidentaux. Malgréles progrès de la recherche ces 30 dernières années, elle reste très valable, bienque malheureusement mal diffusée et peu connue. L’Unesco l’a mise en ligne etvient de l’éditer en CD-Rom : plusieurs des historiens africains cités ci-dessusfurent directeurs de l’un des volumes. Un nouveau programme Unesco mis enroute en 2009 prévoit un neuvième volume de réactualisation jusqu’au tempsprésent, avec une attention particulière portée aux historiens de la diaspora. Letravail des commissions et les rencontres du comité scientifique internationalpanafricain présidé par l’historien franco-congolais Elikia Mbokolo (Tripoli2009, Addis-Abeba 2013, Rio de Janeiro en 2014 ou 2015) apparaissent commeun signal prometteur du renouveau des études africaines contemporaines.

Du côté francophone, on a pris beaucoup de retard : au début de l’indépen-dance, la seule université existante, celle de Dakar, avait d’abord été, au débutdes années 1950 seulement, un collège dépendant de l’université de Bordeaux.Elle n’eut statut universitaire qu’en 1958. Encore le Président Senghor désirait-ilqu’elle gardât la nationalité française. La quasi-totalité du personnel enseignantrestait français. Il fallut attendre 1962 pour que soient créées, à la Sorbonne, lesdeux premières chaires d’histoire africaine, toutes deux occupées au démarragepar deux anciens administrateurs coloniaux : l’ex-gouverneur Deschamps (àl’origine spécialiste de Madagascar) pour l’histoire contemporaine, et RobertMauny pour l’islam médiéval africain dont il fut un spécialiste magistral (1961).Le seul historien professionnel susceptible de diriger les travaux d’étudiantsspécialisés sur l’Afrique subsaharienne (car à Dakar comme en France, il fal-lait être docteur d’État : c’était la grande différence de statut d’avec le Ph.D.qui permettait aux collègues anglophones de travailler sur un plan d’égalitéavec leurs collègues britanniques) était alors Henri Brunschwig, depuis l’annéeprécédente directeur d’études à l’École des hautes études. Brunschwig étaitdavantage, à l’origine, spécialiste d’histoire de la colonisation que d’histoireafricaine proprement dite. Quant au côté africain, s’il démarra tard, ce fut defaçon remarquable ; en 1972 parut un maître livre publié par le premier Africain

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francophone agrégé d’histoire devenu Inspecteur de l’Éducation nationale : leBurkinabé Joseph Ki-Zerbo. Son Histoire de l’Afrique noire (1972), en un volumedense auquel il consacra dix années de documentation, dérivait tout droit del’École des Annales. Fernand Braudel en écrivit d’ailleurs la préface.

Dans le même temps, côté grand public, un travail de vulgarisation scienti-fique de qualité fut élaboré à la veille des indépendances par deux Européensdont le caractère novateur influença grandement les jeunes historiens africainspeu sensibles aux manuels d’histoire coloniale alors à leur disposition : le jour-naliste britannique Basil Davidson et le géographe français Jean Suret-Canale.Le premier publia en 1959 Old Africa Rediscovered. The Story of Africa’s ForgottenPast, sorti en France en 1962 sous le titre L’Afrique avant les Blancs. Le secondle devança d’une année pour sortir le premier volume de son Afrique noireoccidentale et centrale, avec pour sous-titre « Géographie, civilisations, histoire »(Suret-Canale, 1958). Ils faisaient découvrir au monde, et aux Africains commeaux autres, que l’histoire africaine existait avant la colonisation et qu’il y avaitbien des choses à en dire. Grâce à leur volonté radicale (l’un et l’autre furent dejeunes résistants aventureux lors de la Deuxième Guerre mondiale), ils jouèrent,à côté des écoles historiques proprement dites, un rôle initiateur importantchez les Africains férus d’histoire. Ceux-ci, surtout, pouvaient se reconnaîtredans une revue africaine de qualité, Présence africaine, fondée à Paris dès1947 par une équipe africano-antillaise décidée sous la conduite du SénégalaisAlioune Diop, celui qui fut à l’origine du premier congrès international desécrivains et artistes noirs, en pleine Sorbonne, dès 1956. Bien que la revue fûtsurtout le fait de littéraires, elle accorda une place importante à l’histoire écritepar les Africains, francophones et anglophones, car elle fut d’emblée bilingue(Coquery-Vidrovitch, 1992).

LA GÉNÉRATION INTERMÉDIAIRE

Contrairement à ce que l’on croit d’ordinaire, l’histoire africaine écrite parles Africains ne se portait donc pas si mal à ses débuts. Nous ne dirons pas grand-chose de la période qui suivit, celle de la formation, aussi bien dans les universitéseuropéennes que, de plus en plus, dans les universités africaines, de la deuxième,voire de la troisième génération d’historiens africains. Les universités, surtoutfrancophones, manquaient encore cruellement de formateurs autochtones.Ils furent massivement – et parfois encore insuffisamment – formés, soiten Afrique anglophone, soit, pour les francophones, dans les universitésfrançaises spécialisées, très peu nombreuses. Je renvoie sur ce chapitre à desarticles précédents (Coquery-Vidrovitch, 1997, 2006, 2010 ; sur l’historiographieafricaniste française, voir Sophie Dulucq, 2009).

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Ce qu’il faut savoir néanmoins, c’est que ces étudiants africains en histoire,que ce soit dans les universités anglophones ou francophones (car chaque Étata voulu après l’indépendance posséder son université), ou dans les universitésfrançaises où ils étaient étudiants, ont effectué un travail considérable. Ils ontrédigé une masse formidable de mémoires de maîtrise, de mémoires de DEA,de thèses et de Ph.D. Il y en eut au moins plusieurs centaines, et probablementplus d’un millier. Il suffit, pour en juger, de consulter les quelques ouvragesqui les recensent, soit en Afrique, soit en France – et certainement aussi enGrande-Bretagne, où il faudrait les inventorier. Plusieurs recueils en témoignent :d’une part l’enquête, en deux volumes, réalisée dans les départements d’Histoiredes universités francophones, et qui fut publiée par L’Harmattan4 ; d’autre part,la recension des travaux dirigés par les enseignants français alors en charge, enparticulier Yves Person dont à peu d’exceptions près tous les étudiants furentafricains5 – Claude-Hélène Perrot qui prit sa suite, C. Coquery-Vidrovitch, JeanDevisse, Jean Boulègue et, à Aix-en-Provence, Jean-Louis Miège.

Tous ces travaux sont intéressants, car ils sont le fruit de recherches person-nelles, dans les archives comme sur le terrain et dans tous les autres documents,quels qu’ils soient, archéologiques ou autres, qui se trouvaient à leur portée. Legrand regret de cette production, c’est qu’elle est en grande partie ignorée, parceque la plupart de ces travaux n’ont pas été publiés. C’est une lacune qui faitméconnaître le fait pourtant évident que l’histoire africaine, depuis maintenanttrois ou quatre décennies, a été écrite (et continue de l’être) par les historiensafricains. Leurs anciens maîtres, évidemment, savent ce qu’ils ont écrit, ont pules citer et les utiliser, mais ce sont à peu près les seuls à prendre la mesure decette richesse. Heureusement, le dépôt des manuscrits a été assez souvent systé-matiquement entrepris : ils sont consultables dans les départements d’histoirede l’université de Dakar, de l’université Paris-I (Cemaf) ou de l’université ParisDiderot Paris-7 (Sedet). Mais il existe aussi en Afrique des dépôts précieux àpeu près ignorés : ainsi les mémoires de fin d’étude obligatoirement déposés àl’université de Conakry sous la présidence de Sékou Touré : le fonds conserveplusieurs centaines de mémoires, certes inégaux mais pour la plupart consacrésà des recueils oraux, d’une valeur aujourd’hui irremplaçable.

Tous ces travaux, pour la plupart des monographies inédites, relèvent de deuxgrandes catégories : l’histoire africaine ancienne, celle d’avant la colonisation,fondée en grand partie sur des sources orales dont aujourd’hui un certainnombre sont sans doute oubliées, et, d’autre part, l’histoire économique et

4. Voir les Cahiers Afrique noire de l’Université Paris-7, laboratoire SEDET, publiés par L’Harmattan : Mandé, Rajaonah, 2008 ;Chanson-Jabeur, Coquery-Vidrovitch (1995, 2003) ; Coquery-Vidrovitch, Goerg, Tenoux, 1998 ; Coquery-Vidrovitch, Goerg,Tshimanga, 2001.

5. Pour Yves Person, la recension vient d’en être faite sur internet à l’occasion du colloque organisé en son honneur les 20 et 21juin 2013. Voir C. Coquery-Vidrovitch, voir C. Chanson-Jabeur et O. Goerg (2002).

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sociale, voire politique et militaire de l’Afrique sous le régime colonial. Cesmanuscrits, plus quelques rares thèses de grande qualité publiée un peu aucompte-gouttes par les éditions Karthala, et de façon nettement plus abondantepar les éditions de L’Harmattan, démontrent un fait majeur : cette histoiresouvent factuelle, un peu trop événementielle, et pas encore très pensée, maisriche de quantité d’informations inédites, est, depuis une grande génération aumoins, très majoritairement le fait d’historiens africains qui écrivent du pointde vue africain. À côté de cette masse documentaire, le nombre de travaux écritspar des historiens français ou britanniques est quantitativement négligeable.Seuls peuvent aujourd’hui rivaliser avec eux les écrits des African Americans etdes Africains de la diaspora.

Même si la production historique francophone reste relativement limitée sion la compare à la production anglophone, elle s’est développée de façonremarquable, à partir des années 1980, dans plusieurs universités (Dakar,Ouagadougou, Niamey, Cotonou...) et a fourni de grandes thèses dont plusieursont été publiées6. L’école historique francophone, héritée du legs formidablede Joseph Ki-Zerbo (1972), doit beaucoup, au démarrage, aux initiativesd’enseignement de la recherche lancées par Boubacar Barry, historien guinéenen poste à l’université de Dakar, qui a soutenu sa thèse de troisième cycle dès1971. Il a largement contribué au développement de l’« École de Dakar » dontil a lancé le terme en 1988. Mais il en avait semé les prémices bien avant, dèssa prise de poste à l’Université Cheikh Anta Diop, avec la publication de sonhistoire du royaume du Waalo en 1972 (traduit en anglais en 2012). C’est surtoutsa somme sur l’histoire de la Sénégambie du XVe au XIXe siècle (Barry, 1988,traduction anglaise en 1997) qui a confirmé sa stature internationale.

Côté occidental, on a longtemps négligé ce savoir inédit accumulé avec unedéfiance un tantinet condescendante, sans vraiment chercher à comprendre cequ’exprimaient ces travaux. Les « africanistes » français surtout ont expriméles plus grandes réserves sur des courants « afrocentristes » (ce qu’ils étaienteffectivement parfois) honnis par les chercheurs, même s’il s’agissait davantaged’« afrocentricité », ce qui n’est pas la même chose. Malheureusement, onutilise en anglais le même mot, afrocentrism, pour exprimer les deux idées, cequi a engendré nombre de malentendus7. Néanmoins, les revendications des« subaltern studies » et les réflexions sur les postcolonial studies, après avoir étérejetées en bloc par la plupart des « africanistes » français, ont désormais droitde cité. Du moins ont-elles attiré l’attention sur l’intérêt de se pencher avecattention sur la pensée des « autres » et sur la nécessité de se dégager des préjugésethnocentrés de part et d’autre.

6. Voir le détail de ces thèses d’État africaines publiées (ou non) avant 1980 dans Coquery-Vidrovitch (2009, pp. 25-51).

7. Afrocentricity est apparu, mais il est d’usage moins fréquent.

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Ceci dit, il est vrai aussi que, dans cette période de transition des années1980-2000, on se trouve face à une génération en partie sacrifiée. Plusieurssont sortis d’Afrique, ont voyagé, se sont tenus au courant des évolutions dela recherche. Certains des jeunes docteurs formés dans ces années-là étaientexcellents. Beaucoup, en revanche, ont reçu une formation en partie déficiente,en raison des lacunes locales en culture générale, en raison aussi des maladressesou des manquements de formateurs lancés trop vite dans des responsabilitésuniversitaires qui les ont parfois dépassées. La sélection était minime. Lesprofesseurs, rapidement recrutés, fiers de leur titre, de leur promotion sociale etde leurs émoluments, se sont parfois montrés peu disposés à céder une placeenviée à de plus jeunes qu’eux, souvent mieux formés et plus novateurs. Uncertain nombre a été récupéré par le conformisme social ambiant peu propiceà la recherche. Ils l’ont souvent stérilisée au lieu de la vivifier. On est frappépar le nombre restreint de chercheurs que cette génération des diplômés desannées 1970-1990 a, à son tour, formés, ce qui a créé un vide générationnel,surtout dans certaines universités francophones tentées par un « mandarinat »à la française exacerbé par le privilège de séniorité. Certes, les programmesd’ajustement structurel n’ont pas arrangé les choses. Les bibliothèques sontdevenues inexistantes, le personnel chargé de les animer absent ou incompétent,les salaires virtuels : bref les travers classiques du patrimonialisme ont joué àl’université comme ailleurs, dès lors que ne s’y trouvait pas une personnalitésusceptible d’entraver ces travers, ce qui fut aussi, naturellement, parfois le cas.Ces handicaps n’ont pas disparu aujourd’hui, mais ils sont souvent en passed’être résorbés. Les conditions nouvelles de la mondialisation du savoir les ontrendus de moins en moins tolérées.

LA PÉRIODE ACTUELLE

La défiance envers les écrits africains n’est plus de mise aujourd’hui. Quellesque soient les énormes difficultés matérielles sur lesquelles je n’insisterai pascar elles ne sont que trop connues, les historiens africains de la générationactuelle sont des historiens de valeur universelle, c’est-à-dire similaires auxhistoriens de partout dans le monde ; certes, il existe, comme en France, descourants plus ou moins conformistes, plus ou moins ethnocentristes voire« afrocentristes », mais le climat national en Afrique n’est pas pire que le romannational gallo-français ! Il est à tout le moins comparable. Comme partout, ilexiste des historiens rigoureux et d’autres moins regardant sur leurs proprespréjugés. L’école historique ou, plutôt, les écoles historiques africaines surl’Afrique comptent aujourd’hui parmi les meilleures, pour plusieurs raisons.

Comme partout, c’est sur son propre continent qu’on accumule le plus desavoir. Or, plus que partout ailleurs sans doute, les historiens africains orientent

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la quasi-totalité de leur savoir sur l’Afrique, conscients des déficits accumulés.Certes, ils en sont souvent encore à une histoire plus nationale que régionaleou thématique, mais cela commence à se diversifier. En outre, ils disposentd’un instrument de recherche qui demeure déficient chez une grande partdes historiens d’Afrique des autres continents (sauf aux États-Unis où il estobligatoire, pour faire des études africaines, d’avoir étudié au moins une languede ce continent) : la ou, plutôt, les langue(s). Un jeune Africain possède déjàune langue maternelle, et souvent plusieurs. Un étudiant, sauf exception, faitses études dans une langue d’origine coloniale. En sus, un jeune chercheurfrancophone est désormais, comme ses homologues français, dans la nécessitéde se familiariser avec la langue anglaise. Plus les compétences linguistiques sontvariées, plus le chercheur est au courant des différents courants de la recherche.De ce point de vue, la vraie révolution scientifique en Afrique a été, depuisune bonne dizaine d’années, la mondialisation informatique. Les bibliothèquessont presque vides, mais la documentation africaine se démultiplie rapidement.L’effort est immense en langue anglaise, où des bibliothèques entières sontdisponibles sur internet, le plus souvent à titre gratuit en Afrique. Il n’est pasnégligeable non plus en francophonie. Les universités sont souvent incapables defournir à leurs étudiants le matériel informatique, mais l’« informel » y pourvoit.Les boutiques et les postes internet se multiplient partout à des prix défiant touteconcurrence, qui n’ont aucun rapport avec les coûts occidentaux. Le seul obstacledemeure l’accès à l’électricité, car dans les grandes villes les « délestages » semultiplient. Mais l’essor exponentiel des téléphones portables y pourvoit enpartie. D’une façon générale, l’enseignement en Afrique porte beaucoup de sesespoirs sur les mobiles dits de la « troisième génération », c’est-à-dire ceux quipeuvent tout faire ou à peu près. De ce point de vue, en ouvrant sur le monde, lamondialisation des moyens de communication est pour l’Afrique une conquêteformidable. Tous les chercheurs d’un bon niveau y ont aujourd’hui recours.

Cette révolution technologique se double en effet d’un réseau internationalde recherche incomparable : la diaspora des chercheurs à travers le monde entier.Pour ne parler que des historiens, un certain nombre d’entre eux, aussi bienfrancophones qu’anglophones ou lusophones, enseignent désormais dans lesuniversités américaines ou canadiennes. L’université française étant particu-lièrement réticente à accueillir des historiens africains8, ce qui n’est pourtantpas le cas dans d’autres disciplines en sciences humaines (sciences politiques,sociologie, voire archéologie préhistorique), quelques-uns des historiens franco-phones les plus connus ont franchi l’Atlantique : le Sénégalais Mamadou Dioufà Columbia University (de même que son compatriote le philosophe Souleï-mane Bachir Diagne), le Sénégalais Mohamed Mbodj au nord de New York, le

8. Elle s’enorgueillit à juste titre de la présence à l’EHESS du Congolais Elikia Mbokolo. Celui-ci, de nationalité française depuisune trentaine d’années, est en France depuis le début de ses études universitaires et approche de la retraite.

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sociologue Abdoulaye Gueye à l’université de Toronto, l’historien Issiaka Mandeà l’UQAM de Montréal, les Congolais Valentin Mudimbe à Duke University,Didier Gondola ou Charles Tschimanga dans d’autres universités américaines,etc. Quant aux historiens africains anglophones, on ne compte plus ceux quisont en poste aux États-Unis. Il y a aussi des francophones en Allemagne (leMalien Mamadou Diawara), d’autres en Suède, voire en Chine. Ceux que jecite font souvent partis de cette « génération perdue » dont je parlais ci-dessus,que les difficultés majeures des années 1980-1990 ont finalement contraint àémigrer s’ils voulaient poursuivre leurs recherches, après avoir consacré déjàune bonne partie de leur vie professionnelle dans les universités de leur pays.C’est important, car ils n’ont pas perdu contact. Au contraire, actuellement,grâce aux progrès techniques, les interrelations s’intensifient ; non seulementles historiens en poste en Afrique vont de plus en plus à l’étranger, mais ceuxde l’étranger gardent avec eux des liens parfois étroits et leur font partager leursavoir. Il en résulte actuellement une effervescence intellectuelle interafricainedont on a peu idée en France.

J’en donnerai trois exemples. Le premier est le rôle joué par un organismeinter-État de recherches en sciences humaines qui existe maintenant depuisune génération et qui connaît un véritable essor : le Codesria. Cet institut, quia son siège à Dakar, est bilingue (anglais et français) mais aussi lusophoneet arabophone, et assure des traductions en langues africaines (notammenten swahili). C’est un organisme de recherche, qui se démultiplie en réseauxinterafricains ; chaque année, les thèmes en sont renouvelés ; les publicationsreflètent les résultats de la recherche. Les dernières publications sont désormaissystématiquement mises à disposition sur internet en texte intégral (site google« Publications du Codesria en texte intégral »), de même que des textes plusciblés, monographies en ligne faites pour engager des débats.

Une solide revue bilingue trimestrielle fait le point, Afrique et développement(Africa Development) et une autre revue, plus spécifiquement historienne, semaintient plus modestement, après avoir pris la suite d’Africa Zamani, reflet desactivités de l’Association des historiens africains (AHA) qui tient des congrèspanafricains périodiques de qualité. La revue est en ligne depuis 2001-2002(n° 9 et 10) et actuellement jusqu’en 2009 (n° 17), même si l’éditeur prend duretard ces derniers temps.

Bref la production panafricaine (et non plus seulement nationale) apparaîtvivante, en dépit bien entendu des difficultés rencontrées. Les auteurs publiésdans ces revues sont, dans leur écrasante majorité, des Africains en poste enAfrique. Le comité éditorial d’Afrique et développement de vingt membres (dontquatre francophones) est panafricain, Afrique du Nord incluse, sans exclurenon plus sept personnalités de l’extérieur (deux Africains de la diaspora, deuxAméricains, deux Suédois, un Hollandais). Les thèmes en sont ancrés dans les

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problématiques contemporaines comme dans n’importe quelle autre région dumonde. En témoignent ses derniers numéros spéciaux : « Fourth GenerationAfrican Scholars » (vol. XXXIIII, n° 1, 2008) ; « Selected Papers from the 12thCODESRIA General Assembly » (vol. XXXV, n° 4, 2010) ; « The African PublicSphere : Concepts, Histories, Voices and Processes » (vol. XXXVII, n° 1, 2012).D’autres revues paraissent de façon régulière, en particulier en Afrique du Sud,depuis une quarantaine d’années – c’est-à-dire depuis l’éveil de la dernièredécennie de l’apartheid : Africa Insight. Development through knowledge est larevue de l’Africa Institute of South Africa (vol. 42 en 2012). Le South AfricanHistorical Journal, plus international, est l’une des meilleures à l’heure actuelle.

En même temps, la diaspora historienne africaine est en plein essor. Brefil n’est plus de mise, face à ces réalisations, d’adopter l’habituelle attitudemisérabiliste des milieux occidentaux. La pensée historienne africaine existe,elle est vivante et elle produit. Le rôle de la diaspora est particulièrement visibledans le cas anglophone, grâce à l’activité infatigable d’un historien nigérian dequalité, Toyin Falola, Professeur à l’Université d’Austin (Texas). Toyin Falolaest un historien formé dans la grande tradition de l’« Ibadan School ». Né en1953 à Ibadan, il a soutenu son Ph.D. à Ife et a commencé comme instituteur ;il est devenu lecturer à l’université d’Ibadan puis professeur à Lagos. Il a aussiété pensionnaire à Cambridge avant d’arriver à Austin (Texas), en 1981, dans laforce de l’âge. Il consacre véritablement sa vie à promouvoir le travail scientifiquedes historiens anglophones du continent africain. Chaque année, il organisedans son université un vaste colloque sur un thème important, où il convie tousles chercheurs intéressés. Les ressources financières sont entièrement réservéespour faire venir des historiens du continent, les autres participants étant priés detrouver leurs ressources dans leur institution d’origine. Les colloques réunissentannuellement une centaine de participants au moins, mélange attrayant dechercheurs confirmés et de jeunes chercheurs, doctorants et post-doctorants.Toutes ces manifestations, organisées de main de maître par une équipe aguerriede Graduate Students et d’universitaires du lieu, sont l’occasion de publications.On peut ainsi prendre connaissance d’une grande partie de la recherche entrain de se faire, en Afrique de l’Ouest surtout. Le résultat est impressionnant.Dans le monde universitaire américain, aussi conformiste en son genre que leurshomologues français, il est de bon ton de faire quelque peu la fine bouche devantla masse de documents ainsi produits : c’est en méconnaître l’extraordinaireapport. En suivant, année après année, ces publications, qui présentent lesrencontres entre Africains d’Afrique, Africains de la diaspora, African Americanset historiens des autres parties du monde, on prend conscience de la placeremarquable que les études historiques africaines de langue anglaise sont entrain de prendre dans le monde scientifique international, qui ferait bien dese plonger dans ces ouvrages plutôt que de s’ébaubir de façon peu amène sur

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leur abondance. Ce sont des documents importants, toujours introduits par unspécialiste reconnu de la question abordée.

Qu’on en juge ; depuis 2002, plusieurs dizaines de publications collectivesportent la marque du Professeur Falola, sur les sujets porteurs du moment, et passeulement sur le Nigeria : villes (Falola, Salm, 2005 ; Salm, Falola, 2005), femmes(Falola, Fwatshak, 2011 ; Falola, House-Soremekun, 2011 ; Falola, Amponsah,2012), économie (Falola, Jalloh, 2002), Islam et Christianisme (Kalu, Wariboko,Falola, 2010a, 2010b), esclavage et traites (Falola, Roberts, 2008 ; Lovejoy, Falola,2003), migrations (Falola, Afolabi 2007), culture (Falola, 2001 ; Salm, Falola,2002 ; Falola, Agwuele, 2009 ; Falola, Ngom, 2009), mondialisation (Mbah,Falola, 2012 ; Falola, Brownell, 2011 ; Jalloh, Falola, 2008), environnement(House-Soremekun, Falola, 2011 ; Falola, Brownell, 2012). Plusieurs de cessommes sont consacrées au Nigeria (Falola, 1998), et une histoire du Nigeria endeux volumes, enfin une belle autobiographie enracinée dans son pays (Falola,2004). Ces ouvrages thématiques, dont l’apport mériterait d’être étudié de près,sont complétés par des réflexions méthodologiques récurrentes (Falola, 1993 ;Falola, Jennings, 2003 ; Falola, Paddock, 2008). D’où finalement, en 2011, unénorme hommage (Alao, Taiwo, 2011).

On doit aussi citer l’Association des historiens africains (AHA), créée en1974, dont la renaissance, à la fin des années 1990, est due aux efforts conjointsdu Comité international des sciences historiques (CISH/ICHS) et de l’Unescopour assurer la participation active des historiens africains à la rencontre deshistoriens du monde entier, qui a lieu dans une ville différente tous les cinq ans.La première délégation d’historiens africains y est venue en 2000, à l’occasiond’une table ronde qui leur fut réservée. Désormais, un nombre limité maisnéanmoins sérieux d’historiens venus de divers pays d’Afrique subsaharienne– de l’ordre d’une douzaine au moins – participent de diverses façons à cecongrès (Oslo 2000, Sidney 2005, Amsterdam 2010, Jinan (Chine) 2015). LeCISH réserve des bourses spéciales pour les historiens originaires de pays duSud dépourvus de moyens. L’historien sénégalais de réputation internationaleIbrahima Thioub a participé à la table ronde inaugurale de 2005 et il a ouvertcelle de 2010. Le congrès international d’Histoire globale (ENIUGH) qui va setenir en 2014 à Paris dans les locaux de la rue d’Ulm à l’initiative de l’universitéde Leipzig s’apprête, de même, à donner une place attentive aux historiens venusd’Afrique.

Il existe désormais tant de productions remarquables des historiens anglo-phones de la diaspora qu’on ne saurait les citer tous. L’un des ouvrages récentsles plus remarquables est consacré à l’histoire de l’esclavage en Afrique. Sonauteur, le Nigerian G. Ugo Nwokeji (2010), a obtenu son Ph.D à Toronto etenseigne à Berkeley depuis 2003.

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Le thème de l’histoire de l’esclavage dans les sociétés africaines, encoretabou sur le continent il y a une quinzaine d’années, a surtout explosé dans lalittérature historique francophone, grâce aux efforts conjoints d’une rechercheinternationale pilotée de Dakar par le professeur Ibrahima Thioub et duCNRS par Myriam Cottias, directrice de recherche. Les chercheurs africains(béninois, nigériens, burkinabé, sénégalais) opèrent dans les divers pays d’Afriqueoccidentale et ont défriché la question dans des ouvrages remarquables. On peutciter, entre autres, Félix Iroko (2003), André Salifou (2006), Maurice Bazemo(2007), Ibrahima Thioub (2005, 2008), Livio Sansone, Elisée Soumonni etBoubacar Barry (2010). Les historiens d’Afrique se préoccupent aussi, désormais,de leur historiographie (Kimba, 2004 ; Ekanza ; Kiéthéga ; Thioub, 2007, 2002).

En revanche, on doit signaler le retard relatif des historiens francophonesd’Afrique équatoriale, à l’exception des Camerounais, des Congolais de ladiaspora et des Congolais de RDC. Ils ont très peu publié. On doit probablementen incriminer des situations de guerre et de dictatures sans commune mesureavec celles dont a pu souffrir l’Afrique occidentale. Quant aux historiens deRDC, ils ont bénéficié, pour les générations précédentes, d’une solide formationsur place de grands maîtres spécialisés qui ont enseigné dans les années 1958-1975 : les Belges Jan Vansina et Benoît Verhaegen, et le Polonais (aujourd’huicanadien) Bogumil Jewsiwicki, qui furent à l’origine de l’essor de « l’école deKisangani ». Ils continuent de travailler dans des conditions dont les difficultésdéfient l’imagination.

CONCLUSION

Aujourd’hui, on peut parler d’une tendance générale à la réappropriation del’histoire, ou plutôt de l’écriture de l’histoire. Non que cette écriture soitnécessairement différente au fond : compte tenu de la circulation accruedes chercheurs, surtout dans les nouvelles générations, un certain nombred’historiens africains internationaux ne se pensent pas eux-mêmes différents(pas plus que leurs partenaires étrangers), et ne pensent pas non plus que leurhistoire est d’une essence différente des autres. Mais ils se la réapproprient dansla mesure où ils n’ont plus besoin des autres ou du regard des autres pourl’écrire. Ils savent désormais qu’ils sont les plus nombreux et souvent au moinsautant, sinon davantage, compétents. Ils entendent donc l’écrire à leur façon ;ils apprécient de pouvoir discuter entre eux de leur histoire, à l’occasion derencontres interafricaines de plus en plus fréquentes à Dakar, Ouagadougou,Lomé ou Ibadan, Nairobi ou Addis Abeba. Ils demeurent, pour la plupart, à lafois accueillants mais néanmoins méfiants : il n’est plus question d’accepter leregard paternaliste hérité de la période coloniale. C’est pourquoi les rencontresorganisées par Toyin Falola sont si appréciées : il sait réaliser l’amalgame entre

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ceux de l’intérieur et ceux de la diaspora, tout en mettant à la disposition desAfricains des moyens qu’ils ne peuvent guère trouver chez eux. Ces moyens, on lesait, sont très déficients. Ils sont surtout pénalisants au niveau de l’enseignementsupérieur, ce qui pose un problème grave de renouvellement des élites pourl’avenir. Ils le sont moins au niveau de la recherche, parce que celle-ci devientde plus en plus internationale. Bien sûr, certains intellectuels africains jouentun jeu trouble avec les institutions internationales qui leur offrent parfois dessinécures de luxe. Mais cela est de moins en moins vrai. Les chercheurs del’intérieur savent à merveille coopérer scientifiquement avec des organismes derecherche étrangers, voire avec leurs propres gouvernements (même s’ils sontdans l’opposition), pour tirer le meilleur parti des opportunités offertes (parexemple en bureau ou en matériel informatique). Mais ils le font pour eux, et depréférence avec des institutions relativement désintéressées : ONG, coopérationsuédoise ou danoise, voire Agence universitaire de la francophonie (AUF) ou UA(Union africaine) : tout est bon à prendre pour en faire le meilleur usage possible– comme le font d’ailleurs tous les organismes scientifiques en mal d’argent àtravers le monde. Compte tenu de réalisations remarquables en dépit de leurpeu de moyens, les chercheurs s’épuisent, mais ils travaillent et ils produisent –pas tous, naturellement, mais les meilleurs – d’une façon que leurs homologuesoccidentaux ne peuvent qu’admirer car ils ne seraient souvent pas capables d’enfaire autant.

Ceci dit, on doit le répéter : les historiens francophones sont moins publiésque les anglophones, et c’est en consultant leurs travaux actuels, encore tropsouvent inédits, que l’on prend la mesure de leur apport. En ce domaine, unesource précieuse est le site internet du département d’histoire de l’université deDakar (www.histoire-ucad.org/archives/) qui entend proposer en ligne thèses etmémoires soutenus, et les ouvrages parfois inconnus ailleurs de la bibliothèque.Un signe prometteur est aussi la réapparition de maisons d’éditions (car il enexistait quelques-unes au moment de l’indépendance) nationales ou locales, quipermettent la diffusion sur place, à des prix nettement plus abordables que lesouvrages importés de France.

En définitive, il n’y a aucune raison d’être pessimiste, au contraire, quantà la qualité de la production historique africaine en Afrique, d’autant que lesrencontres et colloques scientifiques internes et internationaux sont de plus enplus nombreux, et aussi de plus en plus fréquemment rendus accessibles surinternet. On ne peut que déplorer l’ignorance ou l’indifférence dans lesquellesse trouvent la plupart des lecteurs français en ce domaine.

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