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génétique | actualités 7 OptionBio | Lundi 15 septembre 2008 | n° 405 L e cas clinique décrit ici est celui d’un jeune homme âgé de 30 ans, sans antécédents médicaux particuliers, qui présente de la fièvre depuis deux jours à 39 °C et des urines de couleur noire. Aucune prise de médicament n’est notée chez cette personne jusqu’à son arrivée à l’hôpital central de Bulawayo, au Zimbabwe. Investigations Les analyses biologiques réalisées montrent un taux d’hémoglobine à 7,6 g/dL, une urée sanguine à 4,8 mmol/L et une créatinine à 89 μmol/L. Le taux de bilirubine totale est de 15 μmol/L et la bilirubine conjuguée à 1 μmol/L. Le test urinaire à la bandelette est positif pour le sang mais l’examen microscopique ne révèle pas de globules rouges (cette bandelette ne permet pas de différencier la présence d’hématie d’une hémoglobinurie). Le frottis sanguin révèle une parasitémie à 5 % de Plasmodium falciparum. Les urines s’éclaircissent progressivement, passant d’une couleur brune foncée à jaune 42 heures après l’hospitalisation, grâce à un traitement par quinine, administré initialement par voie intraveineuse puis par voie orale pour une durée de sept jours. Au total, le patient est hospitalisé durant 48 heures. Le taux de glu- cose-6-phosphate déshydrogénase (G6PD) dosé 28 jours plus tard est anormalement bas. Une protection naturelle contre le paludisme Ce genre de pathologie avec de la fièvre et une hémoglobinurie est le plus souvent associé à l’utilisation d’une médication antipaludique, en particulier la quinine. Mais chez ce patient, cela ne semble pas être le cas, la coloration noire des urines étant apparue avant le traitement par quinine. La cause réelle de l’hémolyse semble être donc liée à une déficience hétérozygote en G6PD fréquente chez de nombreux Africains. Cette mutation permet d’ailleurs une protection naturelle contre le paludisme. Cette pathologie est héréditaire transmise de manière récessive liée au sexe et n’atteint que les hommes. Les signes cliniques observés habituellement sont des crises hémolytiques apparaissant dans les deux jours suivant la prise d’un médicament comme des antipaludéens mais aussi des anal- gésiques, sulfamides, nitrofuranes, Négram ® ou encore des antibilharziens. | OPHÉLIE MARAIS médecin biologiste, Paris [email protected] Source Tombe M. Images in clinical medicine. Hemoglobinuria with mala- ria. NEJM. 2008 ; 358 : 1837. Hémoglobinurie et paludisme L’Ordre gagne contre la Générale de santé Pour les groupes financiers qui tentent d’entrer dans le capital des sociétés d’exercice libéral (SEL) de biologie, le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 juillet est un sérieux revers. Car, jusqu’à nouvel ordre, il ne fait pas bon pour des SEL de laboratoires d’analyses de biologie médicale de céder ainsi des parts de leur capital à des établissements de santé, sociaux et médico- sociaux. Que ce soit directement ou indirectement comme a cru pouvoir opérer, via sa filiale Cofindex, la Générale de santé en quête d’investissement sur ce marché. Pour avoir ignoré, pour leur part, qu’ils contrevenaient au Code de la santé publique, les directeurs des SEL cédantes Biogam et Bio C ont été mis en demeure par Robert Desmoulins, président de la section G de l’Ordre national des pharmaciens, de renoncer à ces participations. Ne l’ayant pas entendu de cette oreille, la filiale de la Générale de santé avait saisi le tribunal administratif. En vain. Car non seulement celui-ci a, dans son jugement du 15 juillet, rejeté l’annulation de la mise en demeure ordinale mais aussi la demande de 63 millions d’euros que Cofindex réclamait à titre de réparation. | S.B.

L’Ordre gagne contre la Générale de santé

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génétique | actualités

7OptionBio | Lundi 15 septembre 2008 | n° 405

Le cas clinique décrit ici est celui d’un jeune homme âgé de 30 ans, sans antécédents médicaux particuliers, qui présente de la

fièvre depuis deux jours à 39 °C et des urines de couleur noire. Aucune prise de médicament n’est notée chez cette personne jusqu’à son arrivée à l’hôpital central de Bulawayo, au Zimbabwe.

InvestigationsLes analyses biologiques réalisées montrent un taux d’hémoglobine à 7,6 g/dL, une urée sanguine à 4,8 mmol/L et une créatinine à 89 μmol/L. Le taux de bilirubine totale est de 15 μmol/L et la bilirubine conjuguée à 1 μmol/L. Le test urinaire à la bandelette est positif pour le sang mais l’examen microscopique ne révèle pas de globules rouges (cette bandelette ne permet pas de différencier la présence d’hématie d’une hémoglobinurie). Le frottis sanguin révèle une parasitémie à 5 % de Plasmodium falciparum.Les urines s’éclaircissent progressivement, passant d’une couleur brune foncée à jaune 42 heures après l’hospitalisation, grâce à un traitement par quinine, administré initialement par voie intraveineuse puis par voie orale pour une durée de sept jours. Au total, le patient est hospitalisé durant 48 heures. Le taux de glu-cose-6-phosphate déshydrogénase (G6PD) dosé 28 jours plus tard est anormalement bas.

Une protection naturelle contre le paludismeCe genre de pathologie avec de la fièvre et une hémoglobinurie est le plus souvent associé à l’utilisation d’une médication antipaludique, en particulier la quinine. Mais chez ce patient, cela ne semble pas être le cas, la coloration noire des urines étant apparue avant le traitement par quinine. La cause réelle de l’hémolyse semble être donc liée à une déficience hétérozygote en G6PD fréquente chez de nombreux Africains. Cette mutation permet d’ailleurs une protection naturelle contre le paludisme. Cette pathologie est héréditaire transmise de manière récessive liée au sexe et n’atteint que les hommes.Les signes cliniques observés habituellement sont des crises hémolytiques apparaissant dans les deux jours suivant la prise d’un médicament comme des antipaludéens mais aussi des anal-gésiques, sulfamides, nitrofuranes, Négram® ou encore des antibilharziens. |

OPHÉLIE MARAIS

médecin biologiste, Paris

[email protected]

SourceTombe M. Images in clinical medicine. Hemoglobinuria with mala-

ria. NEJM. 2008 ; 358 : 1837.

Hémoglobinurie et paludisme

L’Ordre gagne contre la Générale de santéPour les groupes financiers qui tentent d’entrer dans le capital des sociétés

d’exercice libéral (SEL) de biologie, le jugement du tribunal administratif de Paris

du 15 juillet est un sérieux revers. Car, jusqu’à nouvel ordre, il ne fait pas bon

pour des SEL de laboratoires d’analyses de biologie médicale de céder ainsi

des parts de leur capital à des établissements de santé, sociaux et médico-

sociaux. Que ce soit directement ou indirectement comme a cru pouvoir opérer,

via sa filiale Cofindex, la Générale de santé en quête d’investissement sur ce

marché. Pour avoir ignoré, pour leur part, qu’ils contrevenaient au Code de la

santé publique, les directeurs des SEL cédantes Biogam et Bio C ont été mis en

demeure par Robert Desmoulins, président de la section G de l’Ordre national

des pharmaciens, de renoncer à ces participations. Ne l’ayant pas entendu de

cette oreille, la filiale de la Générale de santé avait saisi le tribunal administratif.

En vain. Car non seulement celui-ci a, dans son jugement du 15 juillet, rejeté

l’annulation de la mise en demeure ordinale mais aussi la demande de 63 millions

d’euros que Cofindex réclamait à titre de réparation. |

S.B.