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10 MARS | AVRIL MARS | AVRIL 11 SPÉCIAL ART MARION CADET - INTERVIEW PAR THIBAULT ROY. Jeune artiste autodidacte, Marion Cadet est une valeur émergente de l’art contem- porain en France. À seulement 28 ans, sa peinture fait le tour des foires d’Europe. Soutenue par ses pères et par Acid Galery à Lille, on n’a pas fini d’entendre parler de cette artiste accomplie. MARION CADET — Peux-tu te présenter en quelques mots ? J’ai 28 ans et originaire de Paris. Je suis peintre depuis 4 ans mais architecte de formation. J’ai suivi un parcours scolaire assez classique avec un Bac S puis j’ai passé les concours d’archi. En 2014, j’ai arrêté de travailler en agence pour me consacrer plei- nement à la peinture. — Tu es donc peintre autodidacte ? Pas tout à fait, j’ai appris à peindre à la Petite Académie de Peinture de Lyon puis avec des artistes indépendants. J’ai commencé à peindre à 3 ans et je n’ai jamais arrêté, cela m’a suivi toute ma scolarité jusqu’à mes études d’archi qui étaient plus orien- tées Beaux-Arts et conception sensible que technique. Je crois que j’ai su peindre avant même de savoir parler ( Rires ). — Quelles sont tes sources d’inspiration ? Je ne peins que des femmes. Je me pose toujours la question du « pourquoi », mais c’est parce que je m’identifie à ces nanas ; leurs visage, leur corps sont comme une interface pour traduire de mes propres humeurs. Je pense que l’on est plus sincère en art quand on parle de soi. A travers elles je parle de moi, de ce qui me touche ... — Justement, qu’est ce qui te touche ? Je souhaite surtout exprimer les émo- tions, les humeurs et également toutes les contradictions de la société. Cette peinture, c’est ma façon de communiquer et d’exis- ter, mais c’est également un moyen de me comprendre moi-même. Je suis remplie de paradoxes et de contradictions. Je tente de les mettre à plat, « à l’instant T », sur un tableau, en essayant d’être plus dans l’application que dans la réflexion. Pour cela, je travaille avec des outils en opposi- tion avec le sujet : j'utilise par exemple des brosses larges pour travailler les détails, je peins des portraits immenses en noir et blanc brossé pour parler d’émotions légères et éphémères qu’on essayerait de figer. — Tu as été sélectionnée pour exposer au salon annuel des artistes français au Grand Palais de Paris. C’est une rencontre qui a été provoquée ? Lorsque j’ai décidé de me professionnali- ser dans l’art, j’ai simplement envoyé ma candidature au Grand Palais avec une photo d’une de mes toiles et le bordereau d’inscription. J’ai croisé les doigts sans trop y croire et ça a marché. J’ai proposé un nu d’1m60 par 1m15 et on m’a décerné la médaille de bronze. Je me suis donc dit qu’avec le soutien de mes pairs je pouvais vraiment tenter l’aventure. J’ai ensuite exposé en galerie à Genève, puis à Megève. Les propositions se sont enchaînées et m’ont conduit à l’Arsenal de Venise en 2017, finaliste d’un concours inter- national prestigieux qui regroupait 3 500 artistes pour ne tirer que 50 exposants en section peinture, dont j’ai eu le privilège d’en faire partie.

MARION CADET - Au coeur de la vie - Au coeur de la ville

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Page 1: MARION CADET - Au coeur de la vie - Au coeur de la ville

10 MARS | AVRIL MARS | AVRIL 11

SPÉCIAL ARTMARION CADET - INTERVIEW

PA R T H I B A U LT R OY.

Jeune artiste autodidacte, Marion Cadet est une valeur émergente de l’art contem-porain en France. À seulement 28 ans, sa peinture fait le tour des foires d’Europe. Soutenue par ses pères et par Acid Galery à Lille, on n’a pas fini d’entendre parler

de cette artiste accomplie.

MARION CADET

— Peux-tu te présenter en quelques mots ? J’ai 28 ans et originaire de Paris. Je suis peintre depuis 4 ans mais architecte de formation. J’ai suivi un parcours scolaire assez classique avec un Bac S puis j’ai passé les concours d’archi. En 2014, j’ai arrêté de travailler en agence pour me consacrer plei-nement à la peinture.

— Tu es donc peintre autodidacte ?Pas tout à fait, j’ai appris à peindre à la Petite Académie de Peinture de Lyon puis avec des artistes indépendants. J’ai commencé à peindre à 3 ans et je n’ai jamais arrêté, cela m’a suivi toute ma scolarité jusqu’à mes études d’archi qui étaient plus orien-tées Beaux-Arts et conception sensible que technique. Je crois que j’ai su peindre avant même de savoir parler ( Rires ).

— Quelles sont tes sources d’inspiration ?Je ne peins que des femmes. Je me pose toujours la question du « pourquoi », mais c’est parce que je m’identifie à ces nanas ; leurs visage, leur corps sont comme une interface pour traduire de mes propres humeurs. Je pense que l’on est plus sincère en art quand on parle de soi. A travers elles je parle de moi, de ce qui me touche ...

— Justement, qu’est ce qui te touche ?Je souhaite surtout exprimer les émo-tions, les humeurs et également toutes les contradictions de la société. Cette peinture, c’est ma façon de communiquer et d’exis-ter, mais c’est également un moyen de me

comprendre moi-même. Je suis remplie de paradoxes et de contradictions.

Je tente de les mettre à plat, « à l’instant T », sur un tableau, en essayant d’être plus dans l’application que dans la réflexion. Pour cela, je travaille avec des outils en opposi-tion avec le sujet : j'utilise par exemple des brosses larges pour travailler les détails, je peins des portraits immenses en noir et blanc brossé pour parler d’émotions légères et éphémères qu’on essayerait de figer.

— Tu as été sélectionnée pour exposer au salon annuel des artistes français au Grand Palais de Paris. C’est une rencontre qui a été provoquée ?Lorsque j’ai décidé de me professionnali-ser dans l’art, j’ai simplement envoyé ma candidature au Grand Palais avec une photo d’une de mes toiles et le bordereau d’inscription. J’ai croisé les doigts sans trop y croire et ça a marché. J’ai proposé un nu d’1m60 par 1m15 et on m’a décerné la médaille de bronze. Je me suis donc dit qu’avec le soutien de mes pairs je pouvais vraiment tenter l’aventure.

J’ai ensuite exposé en galerie à Genève, puis à Megève. Les propositions se sont enchaînées et m’ont conduit à l’Arsenal de Venise en 2017, finaliste d’un concours inter-national prestigieux qui regroupait 3 500 artistes pour ne tirer que 50 exposants en section peinture, dont j’ai eu le privilège d’en faire partie.

Page 2: MARION CADET - Au coeur de la vie - Au coeur de la ville

12 MARS | AVRIL MARS | AVRIL 13

MARION CADET - INTERVIEW MARION CADET - INTERVIEW

— Tu es représentée depuis 1 an par Acid Gallery à Lille. Comment s’est faite cette rencontre ?Eric Delecourt, le directeur d’ Acid Gallery a remarqué mes publications sur l’expo-sition à l'Arsenal de Venise. Il me suivait depuis quelques temps déjà sur Instagram. Je  reçois un jour un message me disant que mon travail l'intéressait, qu’il aime-rait me porter et donc commencer une collaboration avec moi. On a longtemps échangé par mail et par téléphone puis on s’est rencontré. J’ai tout de suite accroché ! Quelques semaines plus tard, il présentait mon travail sur les plus grandes foires d’art contemporain d’Europe.

— Quels sont tes projets à venir ?J’expose en ce moment dans une petite galerie du coté de Nothing Hill à Londres et à Megève. Tout le mois de mars, je présente un solo show au centre hospitalier Saint Joseph- Saint Luc de Lyon à l’occasion de la journée de la Femme. C’est un espace public et cela me tient à cœur de montrer ma peinture à tout le monde et non pas uniquement à un public initiés. Je serai également mi-mars sur Affordable Art Fair Brussels avec Acid Gallery. On prévoit

aussi de faire un gala-vente aux enchères caritatives au profit de femmes victimes de violences avec l’association Femmes Solidarité Strasbourg. J’offre une œuvre à cette association et cela donne encore plus de sens à ma peinture. C’est une façon d’apporter un soutien concret, je vis en ce moment une séparation et ces sujets me touchent profondément.

— Quel regard portes-tu sur la femme d’aujourd’hui ?De manière basique je répondrai qu’elle est libre et indépendante. Mais elle doit être perçue au delà de l’image qu’elle dégage. C’est justement ce que j’essaye de provo-quer avec ma peinture, rompre avec tous les stéréotypes de la femme objet que l’on a en permanence. Je travaille sur la profondeur des sentiments, les émotions, la pudeur. Nous sommes plutôt dans le registre de l’âme que sur les apparences, même si l’on s’arrête sur une œuvre qui représente une visage, des yeux, une bouche ... On n’aura jamais fini de s'interroger sur les subtilités de la féminité. La femme reste une constante pour le moment mais quand je sentirai avoir fait le tour de la question, je changerai de sujet.

© Adagp, Paris, [Année / Year]