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LA MARIONNETTE EN RÉÉDUCATION « Quand une marionnette parle, ce n’est pas elle qui parle, C’est quelqu’un derrière ». LACAN

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LA MARIONNETTEEN

RÉÉDUCATION

« Quand une marionnette parle, ce n’est pas elle qui parle,

C’est quelqu’un derrière ». LACAN

La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

I. SOMMAIRE

I. SOMMAIRE................................................................................................................................................II

II. INTRODUCTION........................................................................................................................................1

III. LA MARIONNETTE : ASPECTS THÉORIQUES..................................................................................3

A. BREF HISTORIQUE DE LA MARIONNETTE................................................................................................3

B. LES 4 FONCTIONS DES MARIONNETTES ET SES BÉNÉFICES......................................................................4

1. Les bénéfices....................................................................................................................................4

C. LA MARIONNETTE LE DOUBLE DE SOI....................................................................................................5

D. OBJET TRANSITIONNEL, OBJET MAGIQUE................................................................................................6

E. IDENTIFICATION, PROJECTION ET SUBLIMATION......................................................................................7

F. L’ÉNONCIATION.......................................................................................................................................9

H. L’UTILISATION DE LA MARIONNETTE EN GROUPE.................................................................................11

IV. LA MARIONNETTE EN TANT QUE MÉDIATION...........................................................................14

A. LE CASTELET.........................................................................................................................................14

B. L’ESPACE TEMPS....................................................................................................................................15

C. POSER UN CADRE À DES MARIONNETTES EN LIBERTÉ...........................................................................15

1. Les règles de base :........................................................................................................................15

D. SE METTRE AU SERVICE DE L’ENFANT METTEUR EN SCÈNE..................................................................17

E. DEVENIR TUTEUR DE RÉSILIENCE..........................................................................................................18

F. LES MARIONNETTES DÉJÀ FAITES..........................................................................................................19

V. LA MARIONNETTE RÉÉDUCATRICE ET THÉRAPEUTIQUE.....................................................21

A. LES OBJECTIFS DE L’ATELIER MARIONNETTE........................................................................................21

B LA MARIONNETTE EN PREVENTION EN MOYENNE SECTION ...........................................21

C. LA FABRICATION DE LA MARIONNETTE.................................................................................................24

D. L’IDENTITÉ DE LA MARIONNETTE..........................................................................................................26

E. LE JEU AVEC LA MARIONNETTE.............................................................................................................27

F. LA MARIONNETTE EN RÉÉDUCATION POUR QUI ?..................................................................................27

1. Eléments pour indications..............................................................................................................28

2. Contre indication et risques potentiels de l’atelier marionnettes.................................................28

G. LA MARIONNETTE EN SCÈNE................................................................................................................28

1. Les dispositifs possibles selon des spécialistes..............................................................................28

2. L’écriture.......................................................................................................................................30

I. LA TECHNIQUE DE FABRICATION DES MARIONNETTES..........................................................................31

1. Les différentes marionnettes..........................................................................................................31

J. TECHNIQUES DE FABRICATION..............................................................................................................32

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1. Technique de manipulation............................................................................................................32

K. FICHE D’OBSERVATION ET BILAN..........................................................................................................33

VI. CONCLUSION...........................................................................................................................................35

VII. BIBLIOGRAPHIE.....................................................................................................................................36

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

II. INTRODUCTION

J’ai toujours été fascinée par la marionnette, c’est un médium que j’ai beaucoup utilisé

comme enseignante dans l’ordinaire puis en hôpital de jour comme enseignante spécialisée en

option D auprès des enfants ayant des troubles envahissants du développement.(TED)

Les marionnettes n’ont pas bonne presse car elles sont considérées comme un art mineur,

désuètes et enfantines mais pourtant elles sont un art de synthèse car elles offrent de

remarquables possibilités ; elles permettent d’aborder la créativité à travers le modelage et la

peinture, l’écriture du scénario, le jeu de scène et l’expression langagière.

En quoi la marionnette est-elle rééducative? Qu'est-ce qui différencie son usage à celle que

l'on fait en classe ? Je vais vous présenter deux possibilités d'utilisation de cette médiation.

Je me suis largement appuyée sur le stage «  la marionnette en thérapie groupale » auprès de

l’association « Marionnette et Thérapie », qui aborde le domaine thérapeutique et dispense

une approche théorique propre à l’outil « marionnette ».

L’atelier marionnettes est un dispositif proposé à un groupe d’enfants qui comprend un temps

de création de marionnettes, de personnages, un temps de jeux avec ces dernières et les

marionnettes déjà faites en tant que médiation associées aux contes en groupe ou en

individuel.

La marionnette déjà faite peut être aussi proposée comme une médiation associée aux contes

comme moyen d’expression.

La marionnette est une médiation de synthèse car à elle seule elle réunit de nombreuses

activités concrètes et culturelles : le modelage, le conte, l’expression théâtrale et scénique, et

enfin l’écriture. L’atelier marionnettes est un dispositif qui comprend un temps de création de

marionnettes et un temps de jeux avec ces dernières, il est proposé à un groupe d’enfants.

Par la création de marionnettes, l’enfant engendrera un être qui symbolisera un double de SOI

et pourra travailler de nombreuses problématiques telles que la projection l’identification, et la

sublimation. Les éléments des contes repris pendant le jeu développent la symbolisation, la

distanciation et l’espace transitionnel. Le jeu scénique donne à l’enfant la possibilité

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

d’éprouver de jouer à partager des émotions, des ressentis et de développer le jeu symbolique.

Le travail de l’écriture permet une mise à distance des ses actes et pensées. Cette médiation

peut être pratiquée en individuel comme en groupe et permet à l’enfant de ressentir la

contenance et l’étayage de ses pairs.

A l’instar du masque, la marionnette créée constitue pour son créateur « un miroir

initiatique » où son reflet se profile comme une figure étrange, puis elle prend vie et permet à

son créateur d’exprimer, de jouer avec distanciation grâce à la double protection de la

marionnette et du castelet, ses conflits psychiques, ses angoisses et ses affects.

La marionnette est souvent utilisée dans les projets pédagogiques ainsi que dans le soin. C’est

la mise en place d’un cadre et d’un dispositif spécifique qui permet de considérer d’aide

rééducative dans un entre deux entre la pédagogie et le soin.

Nous allons voir les aspects théoriques de la marionnette, montrer ses fonctions, les

processus psychiques mis en jeu, dans le jeu, pour mieux les comprendre.

Nous verrons la fonction du castelet ; ce dispositif spécifique est étroitement lié au regard.

Dans quelle mesure le fait d’être caché du public, d’être derrière un rideau, peut-il libérer les

défenses du sujet qui manipule la marionnette?

Nous verrons toutes les utilisations possibles de cette médiation, tout d’abord en prévention

puis les différents dispositifs proposés par l’association « Marionnette et thérapie », ainsi que

par différents auteurs que Yvan Harrault Harris , R.Elisabeth Hoffmann , JM Gillig.

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III. LA MARIONNETTE : ASPECTS THÉORIQUES

A. BREF HISTORIQUE DE LA MARIONNETTE

La marionnette est apparue très tôt dans l’humanité, dès la préhistoire : dans les grottes de

Lascaux une représentation d’un oiseau marotte placé près d’un homme gisant à terre.

Certain l’ont interprétée comme « un premier discours de l’âme ».

Le théâtre de marionnettes prend ses racines dans l’adoration des idoles, qui représentent des

dieux, des démons ou aussi des humains. De ces idoles, merveilleux objets de l’art plastique

sont nées les premières marionnettes. 

Dans l’antiquité, Platon dans la République, sa célèbre allégorie de la « Caverne », pour

évoquer la condition humaine, convie l’art du marionnettiste qui fait des merveilles, c'est-à-

dire, le « faiseur de prodiges ».

Dans les « Lois », Platon fait de l’homme  « une simple marionnette » pour les dieux.

D’après les textes anciens rédigés en sanscrit, la première marionnette serait née en Inde.

Parvati, épouse du dieu Siva avait modelé et habillé une poupée. De peur que celle –ci ne jette

un maléfice sur son mari, elle la cacha dans la montagne. Siva, curieux, épia son épouse,

découvrit la poupée et comme il la trouva très belle, il en fit cadeau aux hommes.

Au Moyen Age, la marionnette est utilisée pour enseigner la religion, elle apparaît comme

intermédiaire auprès des Dieux. L’Eglise l’emploie pour impressionner les fidèles dans les

lieux saints ou les fêtes religieuses : lors des processions, on animait des figurines

représentant le Christ, Marie ou les saints. On appelait « Marion » ou « Mariette » les statues

de la Vierge Marie. C’est une des origines possibles du mot « marionnette ».

En Inde, les spectacles de marionnettes sont offerts pour s’attirer la protection des dieux et se

protéger des Esprits du mal. La marionnette a joué un rôle sacré dans la plupart des pays avant

de devenir profane. Elle joue des scènes de la vie de dieux ou des morts ; elle figure la mort

lors des cérémonies funéraires en Asie, en Afrique en Océanie.

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En chine on joue pour les morts, l’âme des morts est représentée par la marionnette pour

ramener les morts parmi les vivants.

En Russie des poupées de tissu, faites avec des nœuds dans les nappes et serviettes de tables,

servent à calmer les petits bobos des enfants comme les maux de dents, otites, rhumes.

Au fil du temps, elle évolue et trouve sa place dans l’Art populaire. On invente, au XIIX ème

siècle, l’opéra marionnettes. Tout le monde en France connaît Guignol, né au XIX ème siècle

des mains d’un ouvrier de la soie lyonnais, Laurent Mourguet.

Madeleine Rambert, psychanalyste Suisse (1900.1979) est considérée comme la fondatrice de

la méthode thérapeutique des marionnettes ; elle a été une des premières à avoir utilisé le

théâtre de marionnette pour les enfants traumatisés par la guerre.

B. LES 4 FONCTIONS DES MARIONNETTES ET SES BÉNÉFICES

Pour la thérapeute G.Gauda comme pour B. Cyrulnik l’enfant élabore un vécu, il transforme

et réorchestre les ressentis subis, il devient metteur en scène, ce qui implique une mise à

distance.

Elles sont considérées comme des figures protectrices tel le doudou, les enfants se rassurent.

Ce sont des figures d’identification, auxquelles l’enfant voudrait ressembler, celui qu’il

investit de son ressenti et de ses aspirations.

Des figures de substitution qui permettent à l’enfant de revisiter une expérience vécue à

partir d’un autre point de vue.

Les figures d’agressivité, ce sont les méchants ; loups, sorcières ogres … Avec eux l’enfant

peut exprimer une agressivité sans culpabiliser.

1. LES BÉNÉFICES

Elles sont rassurantes et contenantes : la fiction du jeu ne peut pas envahir la réalité (l’objet

rangé dans la valise ne peut resurgir)

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

Elles sont ludiques et jubilatoires : l’enfant est infiniment grand et puissant dans ce monde

de petits personnages ; durant le temps du jeu, l’enfant peut se sentir tout puissant.

Elles ouvrent et favorisent l’imaginaire ; l’enfant peut expérimenter par procuration des

choses interdites ou impossibles.

Elles sont formatrices car exigeantes à gérer : l’enfant qui manipule la marionnette va avoir

à se décentrer, à imaginer comment son personnage voit les objets. L’enfant va devoir prendre

conscience des gestes et mouvements de la marionnette pour exprimer un désir, une intention

ou un sentiment.

C. LA MARIONNETTE LE DOUBLE DE SOI

La position de la marionnette est entre deux mondes, l’imaginaire et le réel ; ce personnage

qui naît de nos mains peut nous surprendre, nous ravir ou nous inquiéter. C’est une partie de

nous–mêmes, qui souvent nous échappe.

Dans le cadre de la création de sa propre marionnette le sujet crée à son insu un autre lui-

même, un double.

 Dans la mythologie grecque, comme ailleurs, la signification mortelle du double s’allie

intimement au narcissisme.

L’idée de la mort a été rendue supportable par la fabrication d’un double de l’homme, dont le

rôle est d’assurer une autre vie après la mort. L’homme a donc une partie mortelle et une

autre, son âme, qui demeure immortelle.

La marionnette est alors un objet inquiétant, pouvant passer subitement de l’animation à

l’immobilité ; elle est la métaphore de la mort, occupant ce lieu de l’entre vie et mort, entre

réel et imaginaire. La marionnette alors matérialise le miracle de résurrection. Et c’est

l’homme qui lui a accordé la vie.

La marionnette est une médiation d’humanisation entre le monde humain et le monde

extérieur, le moi caché et l’autre. Elle a un pouvoir expressif et la fonction du double ; elle

participe à la production des images, de figuration. Elle est simulacre du vivant.

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La marionnette peut se tromper, faire des fautes, dire des gros mots, elle peut être ridicule,

moche…Il y a ici une dissociation de l’objet-sujet qui déculpabilise le manipulateur quant à

ses failles.

Jouer à la guerre avec des poupées ou des figurines ne permet ni de gagner, ni de perdre, mais

uniquement de représenter le monde ; cela prépare le joueur à se confronter à la vie réelle,

dans un cadre où une fausse manoeuvre n'a que peu de conséquences.

Le petit enfant peut parler aux chiffons ou s’acharner avec colère sur des choses inanimées,

afin de les punir.

D. OBJET TRANSITIONNEL, OBJET MAGIQUE

« La marionnette est un objet magique, transitionnel, affectif, qui produit le plaisir et çà

renvoie à la 1ère relation avec la mère, sa 1ère relation avec l’objet. Elle amène à un jeu

réciproque entre la séparation affective et l’union. …L'objet est un symbole de l'union du

bébé et de la mère qui inaugure leur séparation. …Même pour les enfants qui se développent

bien, l’éveil de la créativité nécessite un manque, un espace vide. Tant que la figure

maternelle est présente, c’est elle qui capture l’esprit et organise son monde intime. Mais dès

que la mère s’absente, le monde de l’enfant se vide et pour ne pas trop souffrir de cette

privation, il doit remplir l’espace réel et psychique avec un objet qui la représente »

Comme dit Winnicott, dans son livre « Jeu et réalité », un chiffon, un foulard, un nounours

provoqueront, en prenant sa place, une familiarité analogue à la sienne. Ce processus mental

est une création puisque c’est l’enfant qui choisit un objet et le met là pour représenter celle

qui n’est plus là. L’objet caractérise la capacité de la mère de mettre à la disposition de

l’enfant l’objet, au moment précis où celui-ci en a besoin, ni trop tard, ni trop tôt, de telle

sorte que l’enfant a le sentiment tout puissant d’avoir créé magiquement cet objet. Le bébé a

l’illusion active de créer le monde autour de lui.

Au début l’enfant inclut cet objet dans son monde d’illusion et d’omnipotence, puis cet objet

n’est ni interne, ni externe, appartenant au monde de la réalité. Il est antérieur à

l’établissement de l’épreuve de la réalité et représente le sein ou l’objet de la première

relation.

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La désillusion modérée vient face aux inéluctables petites défaillances de la mère. Ceci est

nécessaire, l’enfant s’y adapte activement en replaçant l’illusion primitive par une aire

intermédiaire, aire de créativité primaire. Cet espace transitionnel est le lieu de projection de

l’illusion, de l’omnipotence et de la vie fantasmatique. C’est par essence même l’espace du

jeu de l’enfant. L’enfant prend une certaine autonomie dans cette aire transitionnelle grâce à

l’objet transitionnel. Ce vécu de l’enfant le met en relation avec son environnement.

L’idée de la toute puissance, de la pensée magique : il s’agit d’un fantasme très archaïque de

l’homme, qui se pose la question du pouvoir et de la manipulation. On peut considérer la

marionnette comme objet transitionnel, qui peut prendre symbole de valeur phallique.

L’enfant est le créateur de son œuvre sur laquelle il projette ses fantasmes ses désirs, ses

angoisses, ses rêves. Cela permet à l’enfant d’imaginer un monde parfait où il agit en maître,

en Dieu. La marionnette permet à l’enfant d’avoir l’illusion de vie et de mort et d’apaiser ses

angoisses.

La création de la marionnette peut prendre la fonction de réparation et laisse entrevoir l’idéal

du moi.

Il ne faut pas beaucoup de corps pour animer et donner âme et vie à la marionnette. Ce « pas

beaucoup de corps » est intéressant avec certains enfants qui ont un corps particulièrement

souffrant ; car une ou deux mains suffisent pour qu’elles prennent vie et encore bien

masquées.

La marionnette a un aspect magique car elle échappe aux lois de l’apesanteur, aux lois de

l’univers physique ; elles sont dans une sorte de lévitation que l’on retrouve dans le rêve qui

échappe à toute règle de rationalité de réalité, se moque de l’angoisse, des phobies.

E. IDENTIFICATION, PROJECTION ET SUBLIMATION

Identification : « processus psychologique par lequel un sujet assimile un aspect, une

propriété, un attribut de l’autre et se transforme totalement ou partiellement sur le modèle de

celui-ci ». Laplanche et Pontalis,  « Dictionnaire de la psychanalyse »

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La personnalité se constitue et se différencie par une série d’identifications.

Le fait d’attribuer à la marionnette un nom, un sexe, une personnalité, une identité permet à

l’enfant d’essayer des personnalités différentes, lui permet de ne pas rester figer dans une

identification, d’expérimenter d’autres personnages et l’aide dans la structuration de son moi.

Le jeu des marionnettes va permettre une évolution de l’identification qui peut devenir

aliénante.

Le travail de l’identification se fait au travers de l‘élaboration de la carte d’identité après

l’étape de fabrication.

Projection : « opération par laquelle le sujet expulse de soi et localise dans l’autre, personne

ou chose, des qualités, des sentiments, des désirs, voire des « objets », qu’il méconnaît ou

refuse en lui ».

C’est un mécanisme de défense sur le mode du sujet. Il s’agit de projeter sur le monde

extérieur ce qui est dangereux ou mauvais et méconnaître désormais l’origine interne.

Projeter, dans la méconnaissance, ses « mauvais » désirs inconscients sur les forces de la

nature.

La fabrication d’une marionnette demande la plupart du temps, une grande implication de la

part de celui qui la confectionne. C’est un temps souvent silencieux, ou le créateur se retrouve

seul avec son personnage. En la construisant, il y projette un peu de lui-même. Elles peuvent

ressembler étrangement à leur propriétaire (choix d’un habit semblable, même sexe, détails

identiques, etc.), d’autres se distinguent clairement.

Yves de la Monneraye, lors d’une conférence à IUFM de Tour, déclare que l’on ne peut pas

parler de la marionnette de manière non anthropomorphique et déclare « On ne peut pas la

réduire à quelque chose qui échapperait à toute projection. C’est toute sa richesse ; et c’est

pour ça que c’est à manipuler avec précaution parce que c’est tout ça qui est en jeu. »

Ivan Darrault-Harris au sujet du jeu avec la marionnette considère que « les enfant qui

inventent spontanément avec les marionnettes des choses qui sont à bonne distance de leur

problématique. Alors que quand on leur demande d’inventer directement avec à partir du

langage du corps ici et maintenant sont trop près ou trop loin…avec la marionnette il y a une

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espèce de prise automatique qui n’est pas si mal que ça . Et là on rejoint les préoccupations

des rééducateurs qui dans la relation d’aide essaient de trouver la bonne distance »

Sublimation : processus postulé par Freud pour rendre compte d’activités humaines

apparemment sans rapport avec la sexualité, mais qui trouvent leur ressort dans la force de la

pulsion sexuelle (principalement l’activité artistique et l’investigation intellectuelle)

La pulsion est dite sublimée dans la mesure où elle est dérivée vers un nouveau but non sexuel

et où elle vise des objets socialement valorisés.

Dans les ateliers, on utilise des matériaux de récupération pour faire nos marionnettes ; on

peut parler alors de désir de réparation ou de joie sublimée, de transfigurer ce qui n’était pas

regardable ; Sublimation du déchet qui vise la maîtrise d’un monde reconstruit.

F. L’ÉNONCIATION

Ivan Darrault- Harris lors du colloque international de 1994 parle d’un phénomène invisible

mais qui est mis en scène par la marionnette c’est l’ENONCIATION. Il définit la marionnette

ainsi « Voilà une chose inanimée qui n’en n’est pas une. C'est une espèce de petite dépouille

qui n'en finit pas de ressusciter et qui est mue divinement par le souffle d'une voix et par le

corps d'un autre corps.. » La situation de jeu avec la marionnette derrière un castelet un cadre

implique invite le regard induit une situation particulière, le montreur ne voit pas le(s)

spectateur(s), qui ne voi(en)t pas le montreur.

Selon l'extraordinaire formule de Paul Claudel, qui définit la marionnette comme ça : « Ce

n'est pas un acteur qui parle, c'est une parole qui agit ». C'est de la parole qui s'est faite chair

symbolique ; c'est de la parole qui s'est incarnée.

Le discours, au sens large, suggéré par la marionnette s'oppose tout à fait par exemple au

dessin, au modelage, au conte oral ou écrit, parce que c'est un discours multisémiotique. Ce

qui caractérise la marionnette, c'est que c'est le seul, langage, système de signification qui

entend mimer toutes les composantes du comportement humain. La marionnette peut passer

du mouvement à l'immobilité, à l'état de présente-abandonnée —Ce sont les enfants qui

retirent la main et la marionnette, elle, est sur le support du castelet ; elle est vide de toute vie,

provisoirement, c'est toujours très intéressant, ou elle disparaît.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

Elle peut passer du mutisme aux cris, au chant, à la parole et retourner incontinent au

silence sans que personne ne trouve rien à redire. Autrement dit, elle peut exécuter aussi des

gestes, des déplacements fulgurants, intenses, violents, dans l'instantané ou l'interminable

répétition.

Selon la théorie de Ivan Darrault et Jean Pierre Klein dans la revue Art et Thérapie qui

s’appelle « l’âme d’une marionnette » Ils présentent plusieurs niveaux d’énonciation.

Le premier niveau possible est constitué par l’enfant et le rééducateur et communique sous le

code du « je, ici, maintenant »

Le niveau II est représenté par un autre couple qui est le montreur et le public. Ce qui est

intéressant ici, c'est que l’enfant et le rééducateur peuvent occuper l'une ou l'autre position

successivement ; il y a des échanges.

Il y a un troisième niveau, qui est celui de la simulation de communication entre les

personnages-marionnettes ; la marionnette est fondamentalement un « il » ou un « elle ». Mais

ce qui est étonnant c'est que c'est un « il » ou un « elle » qui dit « je », « je, ici, maintenant ».

La marionnette est une sorte d'accélérateur fantastique de la construction d'un discours où un

« je », celui de l’enfant au montreur, brûle les étapes et engendre directement un « je » vivant

qui n'est absolument pas synonyme et superposable au premier « je » qui l'a engendré.

Le « Je » de l’énonciation est infini, il peut être le « je » du montreur qui engendre le « je » de

la marionnette mais la marionnette peut tenir un discours en « il, alors, ailleurs » elle peut

raconter une histoire et dans cette histoire il y a des personnages qui disent « je »et qui

racontent des histoires c’est une mise en abîme. Il y a là un remarquable raccourci proposé à

l'enfant, c'est-à-dire : « Instantanément, je te propose d'installer, effectivement, la fiction d'un

récit en brûlant les étapes, mais en même temps en les respectant parce que la marionnette

c'est un "il" ou un "elle" vivant ».

L'échange hétérotope, c'est-à-dire l'échange d'un niveau à l'autre : par exemple, la marionnette

s'adresse au public, elle ne s'adresse plus à l'interlocuteur-marionnette ou, par exemple, on

peut imaginer aussi le public qui s'adresse à la marionnette, ou qui s'adresse éventuellement à

une autre instance. Ces niveaux d’échanges ces niveaux d’énonciation sont intéressants du

point de vue de la lisibilité et de l’interprétation de la problématique de l’enfant.

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Schéma d’interaction enfant, marionnette, manipulateur

G. L’UTILISATION DE LA MARIONNETTE EN GROUPE

En individuel, la marionnette introduit un tiers. Avec une marionnette l’Autre existe. C’est un

auxiliaire précieux pour nouer ou renouer des liens de confiance de socialisation.

Le groupe est une mise en commun des angoisses de morcellement du psychisme qui va

jusqu’à la perte de l’identité. Ces angoisses sont visibles durant les premières séances et

s’apaisent quand le groupe prend corps.

Le groupe constitue symboliquement une famille dont l’imago parental joue un rôle

structurant.

Après les débuts angoissant de la perte d’identité de chacun, l’illusion groupale remplace

l’identité de l’individu par celle du groupe qui se sent dans l’omnipotence.

L’illusion groupale expression inventée en 1971 par D Anzieu est un état psychique collectif

que les membres d’un groupe formulent ainsi. «  Nous sommes un bon groupe, et si le leader

partage cet état nous avons un bon leader »

Cette illusion sociétale reproduit le renoncement des frères et des sœurs au désir infantile

d’être le préféré du père. Dans les groupes non directifs, l’illusion groupale survient après une

première phase dominée par la peur, l’angoisse persécutrice. D’où le sentiment d’euphorie

d’être délivré de cette angoisse et qui cimente l’unité du groupe. Trois phénomènes

accompagnent l’illusion groupale.

Un membre du groupe devient le bouc émissaire du groupe.

Une idéologie égalitariste nie la différence des membres entre eux (de sexe de

génération …).

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

L’utopie des membres du groupe qui consiste à croire que le groupe n’existe que par

nous-mêmes.

Les pulsions libidinales sont concentrées sur l’objet du groupe, les pulsions clivées sont

projetées sur une victime émissaire ou sur un groupe extérieur. Anzieu a montré que les

fantasmes de casse constituent ainsi la contre partie de l’illusion groupale. L’illusion groupale

provient de la substitution au moi idéal de chacun d’un moi idéal partagé de type paternel.

Une euphorie groupale s’installe quand le groupe se sent en sécurité, c’est souvent à ce

moment que le groupe se constitue. Pour que le groupe se constitue il doit trouver un mauvais

objet pour que se fasse un transfert négatif vers l’extérieur.

La personne souffrant d’un déficit narcissique s’appuie sur le groupe, et risque une

décompensation en fin de fonctionnement du groupe si elle n’est pas accompagnée, pour

éviter la rupture trop brutale la date de la fin d’un groupe doit être programmée, et

accompagner cette fin de session par la parole.

En aménageant un cadre, on offre au groupe une sécurité narcissique ; le groupe devient le

contenant des affects et des fantasmes qui circulent entre les membres du groupe, d’où la

nécessité de faire une enveloppe qui contient l’appareil psychique, le délimite, le protège et

permet les échanges vers l’extérieur, remplir la fonction de MOI PEAU selon le concept

d’Anzieu.

Le groupe est le lieu de verbalisation des processus inconscient, le cadre offre la fonction de

dépôts de ces saletés, de ces déchets et permet de libérer les membres de leurs fantasmes.

C'est Bleger qui nous a appris à penser l'action psychique qu'est la "contenance", voire la

contention, ainsi que la fonction "conteneur" du groupe, d'un dispositif, voire d'une institution

"le cadre...agit comme support (...), nous le percevons (...) que lorsqu'il se modifie ou se

casse". Pour Bleger, le cadre est le "rempart" le plus puissant, le plus durable et, en même

temps, le moins apparent. Il maintient une continuité dans la discontinuité, c'est-à-dire qu'il ne

doit pas changer pour que le sujet change.  Le cadre est ce qui procure une sécurité psychique

suffisante pour que le sujet puisse assumer l'incertitude du changement auquel il a pourtant à

se confronter pour grandir et se former.

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Cette fonction de cadre offre au sujet une appartenance à un groupe unique bien déterminé.

Ce qui amène Bleger à préciser que "toute institution [ou groupe] est une partie de la

personnalité de l'individu ; et cela au point que l'identité se structure par l'appartenance à un

groupe, à une institution, à une idéologie, à un parti, etc.

Françoise Dolto disait que les groupes nous faisaient régresser, ils décentrent l'individu. Il y

a des organisateurs inconscients du groupe.

Dans les premiers temps du groupe, il y a une sidération groupale. Les enfants cherchent

l'égalité. Ils essaient de ne pas être en conflit, de ne pas être différents, comme un groupe

fraternel.

Premier organisateur : Les enfants essaient de se protéger grâce à l'imago maternelle.

Puis, évolution Deuxième organisateur : Recherche d'une loi ou d'un chef = Imago paternel

Déplacement vers les analystes, début de la différence, sécurité grâce à la présence du chef.

Fantasmes originaires : 4 types (phylogénique = Appartenance à l'homme) :

Origine de la vie : Fantasme de la vie intra utérine

Fantasme de la scène primitive (origine de la vie). Origine de la différenciation

Fantasme de séduction (les enfants essaient de séduire les adultes)

Fantasme de castration

Le groupe aide les enfants à mettre leurs fantasmes en jeu. Les enfants mis en situation de

groupe sont plutôt des enfants inhibés. L'enfant va pouvoir peu à peu se différencier et

changer de support d'identification. Il va aussi faire la différence entre le rêve et la réalité.

Le groupe crée une dynamique basée sur les interactions des uns et des autres auquel s’ajoute

les interventions du rééducateur sont à prendre en compte. On peut observer des relations de

transferts et contre-transfert du rééducateur avec les enfants, des enfants avec la marionnette

des enfants entre eux. Il se forme ainsi une triangulation entre les enfants le rééducateur et la

marionnette qui permet un travail de séparation.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

IV. LA MARIONNETTE EN TANT QUE MÉDIATION

. « La marionnette va jouer son rôle de médiation ; elle va créer un pont, où la parole peut surgir,

pour murmurer ou crier ce qui fait souffrir, ce qui peut enfin soulager ». 

A. LE CASTELET

La pratique de la marionnette avec un castelet facilite cette délimitation d’une aire de jeu. Ce

passage d’une aire à l’autre permet le passage du réel vers un lieu de l’imaginaire celui où tout

est permis. Il est important comme au théâtre de délimiter l’espace scénique de celui de la

salle. Cette organisation spatiale qui différencie l’espace de l’acteur celui qui agit et du

spectateur qui observe est un moyen indispensable pour éviter le chaos. Le castelet sert de

cadre et de contenant dans un jeu susceptible de libérer des pulsions. C’est une frontière entre

deux mondes, l’espace de la représentation où tout est permis et celui de la réalité extérieure.

L’espace scénique offre un lieu de représentation, un lieu d’énonciation et devient aussi celui

de la distanciation, permet la transformation de l’enfant. Ceci nous renvoie au jeu de  cache-

cache dans lequel un des joueurs cherche à découvrir les autres qui sont cachés. « Tirer le

rideau », c’est cacher, laisser dans l’ombre pour préserver le secret.

Le castelet est un espace protégé, c’est la maison des manipulateurs et des marionnettes. Il

met à l’abri tout le corps du joueur, en ne laissant voir que sa main gantée.

C’est un dispositif très puissant en ce qui concerne le cadre rééducatif. Le rideau qui sépare

l’espace en deux parties, symbolise un intérieur et un extérieur, il est une double protection,

c’est un cadre dans un cadre.

De même le jeu d’aller retour de la marionnette, qui apparaît et disparaît que l’enfant fait

derrière ce castelet, est une mise en acte du jeu de la bobine de fil que l’enfant utilise pour

symboliser l’absence de la mère et qui lui permet d’apaiser ses angoisses. (FREUD)

L’utilisation du castelet permet de filmer le jeu scénique sans entrer dans des demandes

d’autorisation du droit à l’image et enrichit les possibilités d’exploitation de la médiation.

Filmer le jeu des marionnettes permet pour le manipulateur de voir ce qui ne peut être vu. Cet

aspect suscite de la part des participants enfants des commentaires. Elle permet une mise à

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distance entre lui et la marionnette, et donne une consistance à l’image, une représentation qui

s’inscrit dans le symbolique.

B. L’ESPACE TEMPS

De même, l’organisation de l’espace temps des séances est importante. Il est important

que les séances soient inscrites de façon régulière dans un lieu qui reste identique.

Les séances hebdomadaires doivent se déroulées dans la même salle aux mêmes

heures.

La durée des séances doivent être 1 heure 30 quand c’est un atelier de fabrication ou

de 3/4 heure pour le jeu.

Personne ne peut entrer ou sortir de la salle durant toute la durée de l’activité.

Le protocole proposé par Colette Duflot propose que 2 thérapeutes, dont les rôles sont

différenciés, assistent à la séance , un qui reste en retrait et observe occupant la place du

psychanalyste et l’autre qui anime . Cette organisation est une garantie pour conserver cette

attention flottante, cette écoute avec une 3° oreille.

C. POSER UN CADRE À DES MARIONNETTES EN LIBERTÉ.

La première tache du rééducateur est de poser le cadre : C’est lui qui décide du dispositif où la

marionnette intervient. Il doit être explicitement dit pour contenir les poussées pulsionnelles.

1. LES RÈGLES DE BASE :

Pour les enfants

On peut dire tout ce que l’on veut même le honteux, l’indicible derrière le castelet à

condition que l’on reste dans le faire semblant

On ne casse pas les marionnettes

On ne fait pas de mal aux marionnettistes

On se fait pas mal

On ne critique pas, on ne se moque pas, on ne juge pas.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

Pas de critère d’esthétisme. Le rééducateur est là pour les conseils techniques uniquement.

Nous avons le droit de jouer avec notre marionnette mais pas celle des autres.

On n’emporte pas sa marionnette, ni celle d’un autre chez soi, durant toute la durée du

travail ; on choisira de la reprendre chez soi ou de la laisser en fin de la dernière

séance.

Pour le rééducateur

Confidentialité : Tout ce qui fait et tout ce qui se dit doit rester à l’abri des regards

extérieurs.

Le rééducateur doit être prêt à accepter tout ce qui se dit derrière le castelet et ne pas

faire d’interprétation

S’abstenir de toute interprétation car on peut faire effraction dans l’inconscient de

l’enfant.

Construire une séance avec un début, qui est le rituel, et une fin pour rassembler le

groupe et parler.

Il est possible d’envisager au début des séances pour former le groupe, des jeux

corporels qui favorisent la dynamique du groupe mais permet aussi de préparer le

corps car la manipulation derrière un castelet est assez physique.

Toute absence d’un participant doit être matérialisée par une chaise vide. On ne peut

démarrer la fabrication de la marionnette tant que le groupe n’est pas formé.

La fin de la séance a pour objectif de rassembler le groupe et de verbaliser ce qui a été

ressenti par chacun. Le passage de la parole peut se faire par un bâton de parole

qui peut prendre des formes différentes en fonction du ressenti du rééducateur.

Bâton de sorcière, bâton magique.

Un enfant mutique a le droit d’avoir son temps en symbolisant le temps par un sablier

ou en prenant le bâton de parole durant le temps de verbalisation.

Il est important de préciser en début de la session, si l’atelier est ouvert ou fermé, quel

type d’atelier on fait, avec création de marionnettes, de scénario ou pas et

éventuellement programmer un spectacle dans le cadre de la prévention.

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Le rééducateur a la possibilité de proposer à l’enfant la structure non directive issue de la

thérapie par le jeu et l’enfant choisit ses activités, soit il passe avec l’enfant un contrat que

« ici on va inventer des histoires et les faire jouer à des marionnettes. »

Il veille aussi à ce que ne soient mélangés monde fictionnel et monde réel. Ceci est essentiel

pour délimiter l’espace d’expression imaginaire par rapport à la réalité hors de la salle de

rééducation. Pour cela une règles est à instaurer : ne parler ni de soi ni des autres et ne pas

donner aux personnages des noms de gens de sa famille ou de gens connus.

Une supervision est un élément important pour le rééducateur afin de se protéger et d’analyser

les effets du contre-transfert.

D. SE METTRE AU SERVICE DE L’ENFANT METTEUR EN SCÈNE

Participer au jeu de marionnette est la tâche de l’adulte afin de favoriser l’enfant à utiliser

efficacement cet outil. Trois attitudes peuvent être utilisées.

L’adulte joue avec l’enfant, il prend la marionnette qu’il lui octroie, respecte les consignes qui

lui sont données et lui donne la réplique dans le sens demandé. Ceci exige de la créativité et

de la théâtralité sans trop induire une part de lui-même et couper la créativité de l’enfant.

L’adulte est spectateur du jeu de l’enfant car certains enfants ont du mal à accepter toute

intervention de l’adulte.

L’adulte joue pour l’enfant spectateur, parfois quand l’enfant est épuisé ou qu’il a besoin

d’être entouré, ou quand il manque de structure et qu’il n’arrive pas à poser le moindre

scénario. Alors le rééducateur joue une courte histoire avec des personnages que l’enfant a

choisis.

Le fait de demander à l’enfant quoi et comment jouer est une façon de le rendre créateur sujet

cela ne suffit pas pour garantir à la séance un effet rééducatif.

Quand l’enfant est bloqué dans le jeu où que des effets cathartiques sont apparus, le

rééducateur peut utiliser une marionnette neutre sans bouche ni regard qui permet de lui faire

jouer n’importe quel rôle et ainsi faire évoluer le jeu dans des situations limites.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

C'est l'enfant qui est le régisseur de l'histoire jouée. Le rééducateur crée une atmosphère et un

cadre sécurisant pour cette mise en scène et participe au jeu. Il doit maintenir le contact avec

l’enfant, ne pas le laisser dans le trou du castelet Il s’agit d’aider l’enfant dans la dynamique

de la quête et pas dans la finalité de la quête, c'est-à-dire qu’il faut aider l’enfant à mettre en

place des contenants narratifs mais lui laisser la possibilité de remplir ces contenants avec des

contenus : les siens.

Le rééducateur reprend toujours ce que l’enfant propose et il doit se méfier des interventions

annulantes qui gomment le discours de l’enfant, tout accueillir de la parole et se méfier des

interprétations directes comme disait Lacan « Ne soyez pas intelligent ».

Dans un premier temps, l'enfant mettra en scène les sujets qui le préoccupent, les difficultés

qu'il rencontre et qui l'empêchent de grandir. L'utilisation de la marionnette lui permettra

d'exprimer ses émotions (colère, tristesse, haine, jalousie etc.) et de formuler ses besoins

(tendresse, appartenance, reconnaissance, identité). Ainsi, un enfant prétendant toujours tout

savoir demandera pour la première fois de l'aide ou un enfant peureux et renfermé manifestera

pour la première fois son refus d'obéissance. Ces nouvelles solutions sont jouées à maintes

reprises jusqu'à ce que l'enfant les ai intégrées et puisse faire le transfert en les appliquant

dans sa vie quotidienne. Cette médiation permet donc de déceler et fortifier les ressources de

l'enfant et de l'inciter, dans sa créativité, à trouver des solutions à ses problèmes.

E. DEVENIR TUTEUR DE RÉSILIENCE

Pour reprendre la métaphore de Boris Cyrulnik, le tuteur est un moyen de favoriser la

créativité et un climat de confiance et d’écoute.

1° tuteur   est d’encourager la créativité de l’enfant de l’accompagner dans ses tâtonnements

vers une mise en forme de ce qui le préoccupe.

2° tuteur est le climat de confiance, la capacité à former des images et à les utiliser, dépend de

la capacité à faire confiance.

3° tuteurs sentir accueilli, écouté pour que la parole émerge.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

Une règle importante au quelle le rééducateur doit s’astreindre c’est la neutralité et un regard

bienveillant, il est important de se préserver de tout jugement.

Dans le concept Rogerien, l’empathie, acceptation inconditionnelle et la congruence vont dans

le même sens que ce qui a été dit plus haut.

Le rééducateur aura à vérifier s’il ne s’est pas laisser déprimer par la dépression de l’enfant,

engloutir dans la dépendance, si ses sentiments parasitent la relation.

Le cadre particulier de l’atelier marionnette permet de créer des liens, mais le danger de ces

liens c’est qu’ils contiennent aussi des projections, des régressions, des jeux de miroirs

réciproques. Il est important pour l’aidant de reconnaître les sentiments des enfants et les

siens, de se garder de s’identifier à tel enfant en l’entraînant dans une relation en miroir et

créer un contre-transfert négatif.

Les trois séances d’observations préliminaires sont indispensables afin de définir l’indication,

apprendre à se connaître pour créer un climat de sécurité et de repérer les stratégies

d’intervention.

F. LES MARIONNETTES DÉJÀ FAITES

L’utilisation de marionnettes toutes faites permet de disposer d’un éventail plus important de

personnages qui peuvent revêtir des imagos universelles qui peuplent l’imaginaire des sujets.

Les marionnettes femmes pouvant devenir mère, tante, institutrice… des personnages

masculins qui seront au cours du jeu père, juge, roi…. les animaux ; chien, chat, ours, oiseaux

des personnages incontournables comme la sorcière, le gendarme, Zorro en justicier…. sont

les ingrédients nécessaires à des situations de jeu, des personnages amis et bienfaisants :

copain, copine, fée.

Le jeu avec les marionnettes toutes faites permet davantage de distance et facilite la projection

des émotions négatives sans impliquer une trop forte identification.

L’avantage des marionnettes représentant des personnages de contes de fée, donnent à

l’enfant sans imaginaire une trame de récit et le préserve d’une trop forte implication de son

psychisme. L’utilisation à la fois de la marionnette et du conte permet au rééducateur de

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mettre de la distance, il peut être hors et dans l’action, il participe au jeu mais il en est le

garant, il rassure, il contient, il enveloppe. Le conte fait partie du bagage culturel commun et

permet à l’enfant de partager avec le rééducateur des valeurs communes, sans aucun risque.

L’autre avantage de ces marionnettes c’est qu’elles ne sont pas de grande valeur puisqu’elles

ne sont pas le double de SOI et peuvent être manipulées par n’importe qui.

Selon que l’on dispose de marionnettes déjà faites ou qu’on les a fabriquées, on donne plus

d’importance à la projection ou à l’identification. Dans le cas où la marionnette est toute

faite, on amène le sujet à se projeter sur quelque chose qui est en dehors. Dans le cas où elles

sont fabriquées, on souligne l’aspect d’identification. La marionnette déjà faite peut se

charger des projections, aider le sujet à mettre au jour les conflits, les désirs qui l’habitent.

Elle facilite plus la projection des émotions négatives sans impliquer une trop forte

identification. Les deux sont utiles il faut savoir quand et comment ce que l’on est en train de

faire.

Afin d’éviter les angoisses de la marionnette comme objet mort, sans vie, il est recommandé

de disposer les marionnettes de façon attractives, elles doivent être placées dans une valise

têtes apparentes, cotes à cotes de telle façon qu’en un seul coup d’œil l’enfant puisse toute les

voire donc effectuer un choix adapté.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

V. LA MARIONNETTE RÉÉDUCATRICE ET THERAPEUTIQUE

A. LES OBJECTIFS DE L’ATELIER MARIONNETTE

Elle sert en prévention, elle permet d’aborder des problèmes difficiles, résoudre des conflits

des maladies, lors de grands phénomènes traumatisants (tremblement de terre, guerre.

Elle peut être utilisée de manière prophylactique en mettant en garde les enfants contre

certains dangers de la vie, domestique, en voiture, sexuels, …)

Du point de vue fonctionnel, le théâtre de marionnette est un bon moyen de faire progresser

les enfants qui ont difficultés de langage, les enfants qui ont besoin de rééducation en

psychomotricité fine.

B. LA MARIONNETTE EN PRÉVENTION EN MOYENNE SECTION

Dans le cadre de la prévention, la marionnette est l’élément utile pour permettre aux

moyennes section de se présenter et se familiariser avec cet outil.

L’objectif de la rééducation est de proposer aux l’enfants leurs propres modes d’expressions

et de communication et en découvrir d’autres, les amener à l’usage du langage et une forme

de communication de la pensée valoriser d’autres formes d’expression. Dans le B.O .n°1 du

14/02/2002, il est écrit, au niveau du langage de communication, que « L'élève doit être capable de

participer à un échange collectif en acceptant d'écouter autrui, en attendant son tour de parole et en

restant dans le propos de l'échange. ». la marionnette est une médiation idéale pour travailler ces

compétences.

Durant la deuxième période de rééducation, les enfants inventeront une histoire avec l’aide de l’atelier

des contes de chez Nathan, ils tirent à tour de rôle, la carte du héros, le lieu où se déroule l’histoire ,

l’ami qui va aider ce héros , puis celle de l’ennemi , l’objet magique et enfin le but que veut atteindre

ce dernier.

Matériel :

Marionnettes d’animaux (ours, cochon, loup, lapin, girafe)

Marionnettes de personnes (Zorro roi, grand-mère, petit chaperon rouge, dame, homme,

gendarme, enfant noir, sorcière)

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Castelet   : un portant à vêtements réglable sur lequel on met un grand rideau noir.

Instrument de musique : grelots, maracas, cloches, tambour

Objets symboliques : couteau, épée , pistolet , trésor, pomme, collier anneaux…

séance projets actions

1 Nommer pour apprendre à se différencier

Rituel   : choisir une marionnette animal, se présenter avec l’aide de la marionnette : « je m’appelle…. Et je vous dit bonjour »

2° temps se présenter derrière le castelet et dire quel animal on est .

2 Différencier pour apprendre à se connaître

Rituel : choisir une marionnette animal, se présenter avec l’aide de la marionnette : « je m’appelle…. Et je vous dit bonjour,

2° temps ; la même présentation derrière le castelet, et dire quel animal on est, et dire son genre (papa, maman, fille, garçon)

3 Différencier pour apprendre à se connaître

S’identifier pour aider à la construction d’une image de soi

Rituel : choisir une marionnette personne, se présenter avec l’aide de la marionnette : « je m’appelle…. Et je vous dit bonjour » dire son genre

2° temps ; la même présentation derrière le castelet, et dire sa dénomination : roi, reine, policier ...

4 S’opposer pour aider à se forger une identité

Imaginer pour aider pour apprendre symboliser

Rituel : choisir une marionnette personne, se présenter avec l’aide de la marionnette : « je m’appelle…. Et je vous dit bonjour »

2° temps : dire son genre, son état si l’on est gentil ou méchant et faire évoluer le personnage suivant son caractère.

5 Symboliser pour stimuler l’expression de soi

S’opposer pour aider à se forger une identité

Rituel : choisir une marionnette personne ou animal se présenter avec l’aide de la marionnette : « je m’appelle…. Et je vous dit bonjour »

2° temps : dire son genre, sa singularité, 2 personnages derrière le castelet se saluent s’embrassent ou se serrent la main.

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6 Rapprocher pour aider à la construction de repère

S’opposer pour aider à se forger une identité

Rituel : choisir une marionnette personne ou animal se présenter avec l’aide de la marionnette : « je m’appelle…. Et je vous dit bonjour »

2° temps : opposer des personnages (loup/ cochon, Sorcière/petite fille, Grand-mère / loup, roi /reine)

Derrière le castelet les personnages placés en couple opposés jouent à leur guise.

7 Se différencier

entre soi et l’autre pour aider à la construction des repères

Permettre de mettre en scène des peurs , des pulsions destructrices par la symbolisation

Rituel : choisir une marionnette personne ou animal se présenter avec l’aide de la marionnette : « je m’appelle…. Et je vous dit bonjour »  inventer un timbre de voix en rapport au caractère du personnage (voix grave, aigue, méchante, …) dire son genre, sa dénomination et son émotion (triste, gai, en colère, peureux.)

Conte   : les trois petits cochons

2° temps : mise en scène du conte avec les marionnettes, choix des marionnettes , s’accorder sur les rôles de chacun , symboliser l’espace des différentes maisons.

Jeu : puis verbalisation

8 S’imprégner d’un nouveaux conte , le différencier de l’autre

Symboliser la problématique de la désobéissance et de la peur par le jeu de la marionnette

Conte   le petit chaperon rouge

2° temps   : choix des marionnettes et sur le rôle de chacun. Symboliser les lieux d’action : maison, lit .

Jeu puis verbalisation

9 Mise en scène de la problématique de l’abandon, de l’intrusion , de l’injustice

Conte   : Conte   : boucle d’Or et les trois ours raconté avec un livre

2° temps : jeux sans castelet. Schématisation des espaces de jeu .Symbolisation des objets : chaises , bols, lits

10 Mise en scène de la problématique du triomphe du faible sur le plus fort.

Conte   : la petite poule rousse racontée avec l’aide des cartes de l’atelier des contes de chez Nathan

2° temps répartition des rôles et jeu avec les marionnettes les cartes servent d’aide pour le déroulement de l’histoire

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C. LA FABRICATION DE LA MARIONNETTE

C. Duflot, consciente de travailler les trois registres, celui du réel, de l’imaginaire et du

symbolique, proscrit la réalisation d’autoportrait et encore moins celui de personnages de la

réalité. La marionnette doit rester dans celui de l’imaginaire.

Les marionnettes modelées, travaillées avec les mains, échappent au contrôle conscient du

sujet, deviennent le surgissement de véritable « lapsus des mains ».Les marionnettes ainsi

faites ne sont pas interchangeables, c’est le discours inconscient du sujet qui s’exprime en

elles.

La phase de construction de la marionnette est un monde intermédiaire, ce n’est pas le jeu, ce

n’est pas la réalité, c’est un moment de la construction où l’enfant pose un acte intentionnel

où cette marionnette en devenir est accueillie, attendue comme l’enfant idéalisé.

La fabrication de la marionnette est un moment important et très fort à vivre. A l’instar de

l’artiste, l’enfant se trouve avec des matériaux bruts, la terre pour fabriquer une part de lui-

même. C’est un moment de grand silence où l’enfant est seul face à sa création, il projette une

part de lui-même.

L’image du corps du névrosé est une image d’un corps morcelé. L’image du corps de la

personne psychotique est une image d’un corps éclaté sans aucun lien. Le modelage permet la

réparation, rassemble, rajoute, unifie les morceaux épars pour en faire un tout. Un tout qui

prend sens peu à peu dans un temps plus ou moins long, et c’est ainsi que la marionnette

prend corps.

A l’instar de la femme enceinte, le temps de fabrication est un temps de gestation, où il n’y a

que soi et sa création, l’autre n’existe pas, on est seul face à sa production. C’est un moment

de lutte entre le désir d’un moi idéal et ce que les mains produisent. L’enfant va germer,

grandir avec la fabrication de la marionnette et vivre cette fabrication comme un

accouchement merveilleux d’une part de soi même. Le rééducateur est la sage femme qui aide

et accompagne à cette création pour que l’enfant puisse se projeter sur un double qui lui

convienne.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

L’enfant peut être bouleversé, dérangé, par sa création, cela fait référence à son double et à

l’inquiétante étrangeté (Freud).

Cette phase de construction d’un double sera suivie d’une phase de jeu où le sujet essaiera de

parvenir à donner à ce double un statut d’image mais avant cela cette marionnette va prendre

une identité.

D. L’IDENTITÉ DE LA MARIONNETTE

De même que l’étape qui consiste à donner une identité à sa marionnette est une métaphore du

baptême ou de la reconnaissance à l’état civil, c’est le moment où le regard est posé sur la

marionnette et où elle prend son identité. A un moment donné, il faut choisir. C’est là, un

point très important dans le travail rééducatif, que ce moment d’embarras ; l’embarras du

choix. C’est le moment de poser la question de l’identité sexuelle de la marionnette:

Est-ce que ça va être un homme ? Une femme ? Ce personnage sera-t-il jeune, vieux, beau,

laid ? Que fera-t-il comme métier ? Quel caractère ou trait de personnalité aura-t-il ? Que va-

t-il lui arriver ? Parfois, dès que le choix est fait, certains enfants voudraient changer

rapidement ces données. D’autres, au contraire, font plusieurs séries de même personnage

pendant des années, en restant figés sur une identification. A la fois ces identifications

structurent le sujet mais en même temps le sujet ne doit pas se figer dans une identification.

Soit le sujet est fixé sur une identification, soit il est en manque, c'est-à-dire, il ne sait pas qui

il est et ce qu’il veut. Le choix du sexe des marionnettes que l’on fabrique comme pour celles

d’animaux constitue une appartenance symbolique de taille, de même, la fabrication les

attributs : chevelure, vêtements, bijoux, moustache est un choix symbolique d’importance.

La voix donnée par son manipulateur à son personnage donne à celui-ci une caractéristique,

ainsi cette voix transformée, peut amener à fortifier le jeu de cache- cache entre le sujet et son

public.

Pour fixer ce moment et le garder en mémoire il est important d’écrire le nom de la

marionnette et éventuellement de lui faire une carte d’identité cela permet aux enfants qui ont

des difficultés identitaires de se construire une inscription dans une filiation, une meilleure

estime de soi et de se trouver une place en tant que sujet désiré.

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

Lorsque certains pensent dire n’importe quoi, en ce qui concerne l’élaboration de la carte

d’identité, ils se rendent souvent vite compte d’une implication personnelle, voire de la

présence de matériel inconscient dans leur choix. Au début on ne sait pas trop bien qui

manipule. Il est évident que c’est le marionnettiste qui manipule la marionnette, mais dans la

pratique très vite « la marionnette prend le dessus » et « c’est elle qui mène le jeu ». Le

marionnettiste se laisse emporter par le jeu. La marionnette devient un pur signifiant et le

sujet est manipulé par sa marionnette.

Une marionnette abîmée ou un élément cassé ne doit jamais être jeté mais plutôt faire l’objet

d’une scène de réparation chirurgicale qui permettra la restauration de l’estime de soi et

réversibilité des situations.

E. LE JEU AVEC LA MARIONNETTE

Après cette période de création vient l’étape qui consiste à faire connaissance avec sa

marionnette.

Cette période semble souvent particulièrement difficile et peut mettre mal à l’aise. En effet, la

personne se sent intimidée, ne sachant quoi dire à son sujet. Comme si, on rencontrait

quelqu’un pour la 1ère fois. Cette étape consiste à s’interroger sur sa marionnette ; qui elle est ?

D’où vient-elle ? Comment elle est ? Quelles sont ses particularités ?

La deuxième étape est celle où le manipulateur joue avec sa marionnette derrière le castelet.

Au fil des répétitions, la personne s’affirme, elle prend de l’assurance. Elle commence à

mieux connaître sa marionnette, elle la cerne mieux car elle construit progressivement son

identité. Ceci entraîne une complicité avec ce personnage de fiction, qui naît et qui se renforce

au fur et à mesure des jeux collectifs.

La troisième phase est celle d’une distanciation face à l’objet : on prend de la distance. En

cela la marionnette est pleinement un objet qui remplit la fonction de médiateur. La

marionnette reste un « être de fiction », mais c’est l’investissement que le sujet lui porte qui a

des effets. Elle devient l’outil d’un rapport au corps et au langage parfois désinhibé et fait le

lien entre la découverte de la magie du faire et l’univers merveilleux ou fantastique.

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F. LA MARIONNETTE EN RÉÉDUCATION POUR QUI ?

Selon G Gauda le travail avec les marionnettes peut se faire avec tous les enfants à partir de 4

ans à partir du moment qu’ils ont accès au faire semblant, c’est-à-dire d’attribuer à la

marionnette des actions et des réactions propres.

Pour JP Klein la marionnette est indiquée lorsqu’elle n’aborde pas de front la difficulté de

l’enfant tout en ne s’égarant pas dans la facilité : la médiation marionnette doit être choisie en

respectant les défenses de l’enfant, en même temps éviter le terrain où il est à l’aise pour

donner l’impression d’avoir beaucoup travaillé.

1. ELÉMENTS POUR INDICATIONS

Cet atelier est utile pour tous et particulièrement pour :

Les personnes pour lesquelles l’expression du langage est difficile,

Pour les jeunes qui sont dans le passage à l’acte dont leurs conduites sont anti-sociales,

Les enfants qui présentent des troubles de l’image du corps et du schéma corporel.

2. CONTRE INDICATION ET RISQUES POTENTIELS DE L’ATELIER

MARIONNETTES

Faire jouer des enfants qui ont une structure psychotique sans castelet.

Ne pas faire jouer des enfants handicapés physique derrière un castelet mais plutôt

fabriquer des marionnettes de table

G. LA MARIONNETTE EN SCÈNE

1. LES DISPOSITIFS POSSIBLES SELON DES SPÉCIALISTES

Selon Hanna KENDE psychothérapeute et psychanalyste

Elle tient à la disposition de l’enfant une trentaine de marionnettes ; animaux, montres,

humains, enfants…

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

l’enfant choisit celle qu’il désire mettre en jeu, il énonce l’histoire qu’il veut jouer, il

désigne les marionnettes que le thérapeute devra animer.

La pièce est jouée mais ne correspond pas à ce qui a été énoncé.

L’enfant résume son jeu et lui donne un titre ; le thérapeute écrit sous sa dictée.

Selon Gundun GAUDA psychologue, psychothérapeute et formatrice

Elle dispose d’un grand choix de personnages ainsi que des personnages des contes et de

même une série d’objets à la symbolique très forte : Clé, trésor, arme, pomme, miroir

l’enfant choisit 3 objets qui l’attirent dans la série.

Il choisit 3 personnages qui vont avoir à se servir des ces objets.

Il décide du lieu où se déroule l’histoire.

Avant de commencer, l’enfant explique le caractère que doivent avoir les personnages

(loup gentil ou méchant…)

Il distribue les rôles.

Il dit comment commence l’histoire.

Ensuite le jeu est mené en improvisation, il n’est pas repris verbalement par l’enfant.

Mais le thérapeute note soigneusement le déroulement du récit à posteriori

Selon Elisabeth Hoffmann : Docteur en science de l’éducation et professeur à l’IUFM et

membre du comité scientifique de la Fnaren

Sont à disposition environ 40 personnages, marionnettes à gaine, poupées peluches,

figure abstraite, d’autre part 20 objets à forte charge symbolique : collier, panier,

fiole, miroir … Un espace scénique est matérialisé par une longue table couverte

de toile noire.

L’histoire à jouer comporte 2 actes : le premier où 2 personnages sont en scène autour

d’un objet (exposition de la situation de départ déroulement d’une première série

d’interactions). Et la deuxième marquée par l’arrivée d’un troisième personnage

(suite des péripéties et dénouement).

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La Marionnette en Rééducation Nathalie CailliotAvril 2009

Deux participants sont invités à jouer ; le premier sera le metteur en scène le second le

partenaire à l’écoute et à la disposition du premier. Le metteur en scène donne des

indications sur le caractère des personnages et décide de comment commence le

jeu. Le rôle de metteur en scène sera dévolu à un enfant et de partenaire à l’adulte.

Les autres participants après avoir été public ont pour tache d’analyser le jeu.

Selon J-M Gillig: (Inspecteur de l’Education Nationale, auteur de «  Le conte en pédagogie et

en rééducation)

A la manière de Propp : pour enrichir et mettre en œuvre l’imaginaire de l’enfant et

développer des compétences narratives indispensable à l’écriture du conte on peut créer une

petite fabrique de contes.

Cette machine est une plaque en bois sur laquelle on fixe 7 vis, 7 écrous et 7 disques

espacés pour permettre la rotation de celles-ci. Chaque disque est affecté d’un titre et

comprend 8 paradigmes différents ; des personnages, d’objets, ou de situations, ce qui permet

des scénarios multiples de contes.

Il existe aussi l’atelier des contes (chez Nathan) particulièrement recommandé pour les Cycle

1 et 2 il est indiqué pour l’imprégnation par éléments appartenant au conte traditionnel.

2. L’ÉCRITURE

La mise en mémoire de la carte d’identité par le passage à l’écrit est un moment important de

l’atelier, mais il est aussi un autre moment hautement culturel c’est celui où l’on écrit

l’ébauche du conte. Si l’on travaille avec la petite fabrique du conte on note au fur et à mesure

le héros, le départ, de l’histoire, le but, le lieu, l’ennemi , l’ami, l’objet magique une histoire

s’ébauche et peut produire si la demande est faite la rédaction d’un conte.

C’est un travail de création, où l’enfant peut mettre à distance des pensées et ses actes. C’est

un moment de pur plaisir de production de mots et de phrases qui n’est pas sanctionné par

l’orthographe.

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H. LA TECHNIQUE DE FABRICATION DES MARIONNETTES

1. LES DIFFÉRENTES MARIONNETTES

Il existe plusieurs types de marionnettes celles montées sur un bâton, à gaine ou à fils.

Généralement les marionnettes les plus utilisées sont

les marionnettes à gaine dans lesquelles on introduit une main dont la tête tient sur

un index et le pouce et l’annulaire rentrent les manches de l’habit. C’est une des

marionnettes les plus intimistes car elle est dans le prolongement du bras, d’autre

part elle n’est pas facile à manipuler pour les jeunes enfants car elle très près du

corps et demande une dextérité fine de la main parfois ils refusent la manipulation

conventionnelle de marionnette à gaine en la prenant par la tête.

La marotte est une tête prolongée par un bâton est déjà plus distanciée.

L’inconvénient c’est que les enfants ont tendance à s’en servir pour taper sur ses

camarades.

La marionnette à fil. C’est celle qui est la plus éloignée du manipulateur. Certaines

sont simples et les enfants les aiment beaucoup, l’inconvénient c’est que les fils se

cassent et s’embrouillent facilement.

Les marionnettes de table. Comme pour la marionnette à fils le corps est entièrement

représenter utile pour les enfants handicapés physiques et qui permet d’être

manipulé quand on n’a pas de castelet à condition de symboliser l’espace scénique

avec un tissu noir.

Les Muppets ; Ce sont des bouches molles faites avec des chaussettes et qui plaisent

beaucoup aux enfants. Elles sont particulièrement utiles pour les orthophonistes.

Les marionnettes à doigts ; ce sont des petits personnages que l’on met sur les doigts

qui présentent l’avantage d’être faciles à faire, donnent le sentiment de toute

puissance et ne nécessitent pas de castelet.

Les marionnettes d’ombres : Ce sont des silhouettes découpées dans du papier noir

que l’on fait évoluer derrière un drap blanc dur lequel est projeté un spot.

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I. TECHNIQUES DE FABRICATION

La fabrication de la tête de la marionnette doit être facile à manipuler et doit supporter des

chocs. Pour cela les têtes sont faites à partir d’un support comme une boule de polystyrène ou

d’une bouteille en plastique ou de pâte à papier, ce support est recouvert de plastiroc de terre

qui durcit à l’air, que l’on met par plaques et par ajout de matière. Puis la tête est peinte avec

de la peinture acrylique on trace la bouche les yeux ; l’erreur la plus courante est de placer le

regard du personnage vers le haut alors qu’il doit plutôt regarder en bas puisqu’elle est

manipulée en hauteur. Les cheveux sont faits de laine ou de fourrure et collés avec de la colle

néoprène.

Un trou à base de la tête fait à l’aide d’un vide pomme permet de glisser soit un bâton pour la

marotte soit un tube rigide dans lequel on enfile le doigt .Puis un vêtement, une robe avec 2

espaces à gauche et à droite pour laisser passer les doigts du manipulateur qui permet de saisir

des objets ou accompagner la parole de la marionnette. Cette étape de fabrication du vêtement

nécessite le besoin de coudre, c’est une activité oubliée et peu pratiquée par les enfants. On

peut envisager l’utilisation d’une machine à coudre, cet outil produit chez les enfants une

fascination quelque soit leur sexe, certains même se l’approprient immédiatement car c’est

dans certaines familles un objet culturel.

Tous les matériaux les plus hétéroclites sont gardés car ils peuvent être utilisées et donnent à

l’enfant le sentiment que tout est valable rien n’est à rejeter et ainsi donner le sentiment de

réparation et d’alléger l’angoisse de rejet.

1. TECHNIQUE DE MANIPULATION

Les entrées de scène peuvent être marquées par les 3 coups de bâtons qui marquent encore

plus l’espace de jeu.

Travailler les sorties et entrées de scène : comment les marionnettes marchent, comment elles

tournent ; se familiariser avec les attitudes de chaque marionnette, essayer de donner un sens

aux différents mouvements; apprendre à immobiliser sa marionnette quand un autre parle …

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Il est important de travailler les compétences sociales, car les règles du spectacle sont

similaires à celles qu’on utilise dans la bonne communication avec les autres : le contact

visuel, l’attente de son tour de parole.

Le travail aussi de la voix, avec des exercices d’articulation et de différentes intonations d’une

même phrase permet de prendre conscience des effets que cela produit sur le public.

L’utilisation d’instruments de musique permet de remplir un espace sonore et simuler des

bruits ou donner des effets théâtraux.

J. FICHE D’OBSERVATION

L’analyse des comportements sociaux :

Relation avec ses pairs, avec l’adulte

Conduites émotionnelles et affectives ;

Le renoncement, l’affection, l’agressivité, la maîtrise,

plaisir

L’analyse du langage

Verbalise, fait des propositions, change sa voix

Analyse corporelle, des positions du corps 

Aisance, figé,

Investissement dans l’activité ;

Dynamisme, inhibition, imitation, passivité, leader

Objet créé et schéma corporel ;

Capacité à symboliser :

Accès au jeu symbolique, rapport à l’imaginaire

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Capacité à supporter le cadre et le respecter

Thèmes abordés :

Mise en scène choisis, problématique abordée

Bénéfices  perçus ou pas

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VI. CONCLUSION

Ce travail de recherche sur la marionnette m’a ouvert des horizons que je n’imaginais pas. Au

fur et à mesure de l’écriture de ce travail et grâce au stage « La marionnette en thérapie

groupale » et les lectures relatives à la marionnette, je me suis aperçue que cette médiation

offre des possibilités très larges.

Ce travail de recherche et de réflexion sur l'utilisation de marionnette m'a permis de réaliser à

quel point , elle est riche pour l'expression de soi dans de nombreux domaines ; au niveau de

l’expression plastique et orale, de l’imagination et de la relation.

En effet, mine de rien, ces petits bouts de chiffon de rien du tout « parlent » de nous en

ranimant notre parole d’enfant. Ils sont médiateurs pour entrer en dialogue avec Soi, pour la

découverte des facettes du Moi et l’exploration des dynamiques relationnelles

interpersonnelles et intrapsychiques.

La marionnette est une médiation de synthèse car à elle seule, elle réunit de nombreuses

activités concrètes et culturelles: le modelage, le conte, l’expression théâtrale et scénique, et

enfin l’écriture. Elle permet à l'enfant de devenir élève.

L'atelier marionnette a des effets thérapeutiques et réconfortant pour l'estime de soi mais c’est

aussi une médiation qui permet à l'enfant de s'inscrire dans un statut d'élève. Elles permettent

à l’enfant d’exprimer ses angoisses, son mal être. Pour l’enfant inhibé, gêné en groupe, mal à

l’aise avec autrui, elles constituent un intermédiaire précieux au travers duquel il peut nous

raconter sans crainte des jugements, ni se sentir coupable.

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VII. BIBLIOGRAPHIE

Anzieu D., « Le groupe et l’inconscient, L’imaginaire groupal », éd : Dunod, Bordas, Paris

1984, p. 226

D Bensky . Recherches sur les structures et la symbolisation de la marionnette. Edition Nizet

Dolto F. « L’image inconsciente du corps », essais, éd. Du seuil, 1984,

Colette Duflot. « Des marionnettes pour le dire. Entre jeu et thérapie ». Edition : Homme et

perspectives. 1997

R.Elisabeth Hoffmann : Conférence du XVII congrès FNAREM 2001 : « marionnette vas-y,

dis le ! » 2001

JM Gillig . » le conte en pédagogie et en rééducation ». Dunod 1997

Le Maléfan Pascal, « La marionnette comme détour », article 02-05-1997, association

Lacanienne Internationale 2007,

Lions M., « Ateliers-marionnettes et leurs effets thérapeutiques », ouverture de la VI e

Journée clinique, 2002, revue Théorie et Pratiques, no 29, collection « Marionnette et

Thérapie », p.2-3

Winnicott D.W., « Jeu et réalité », éd : Gallimard., Paris, 1975, p. 207

U. Tappolet . « La thérapie par la marionnette et le conte de fées. » Collection marionnette et

thérapie n°15

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