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mathématiques en devenir

mathématiques en devenirhlombardi.free.fr/publis/ModulesTDM.pdf · 2014. 8. 25. · Cours et exercices Calvage & Mounet. Gema-Maria Díaz-Toca. ... Claude Quitté. Maître de conférences

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  • mathématiques en devenir

  • Mathématiques en devenir

    101. — Jacques Faraut. Analyse sur les groupes de Lie. Une introduction102. — Patrice Tauvel. Corps commutatifs et théorie de Galois103. — Jean Saint Raymond. Topologie, calcul différentiel et variable com-

    plexe104. — Clément de Seguins Pazzis. Invitation aux formes quadratiques105. — Bruno Ingrao. Coniques projectives, affines et métriques106. — Wolfgang Bertram. Calcul différentiel topologique élémentaire107. — Henri Lombardi & Claude Quitté. Algèbre commutative. Méthodes

    constructives. Modules projectifs de type fini108. — Frédéric Testard. Analyse mathématique. La maîtrise de l’implicite109. — Grégory Berhuy. Modules : théorie, pratique. . . et un peu d’arith-

    métique110. — Bernard Candelpergher. Théorie des probabilités. Une introduction

    élémentaire111. — Philippe Caldero et Jérôme Germoni. Histoires hédonistes de groupes

    et de géométries. Deux tomes.112. — Gema-Maria Díaz-Toca, Henri Lombardi & Claude Quitté. Modules

    sur les anneaux commutatifs.

  • G.-M. Díaz-Toca, H. Lombardi, C. Quitté

    Modules sur lesanneaux commutatifs

    Cours et exercices

    Calvage & Mounet

  • Gema-Maria Díaz-Toca. Maître de Conférences à l’Université de Murcia (Es-pagne) et membre de l’équipe de recherche « Algoritmos y Aplicaciones en Geo-metría Real y Tropical » (MTM2011-25816-C02-02). Ses recherches concernent lecalcul formel et les mathématiques constructives.

    [email protected]://webs.um.es/gemadiaz

    Henri Lombardi. Maître de Conférences à l’Université de Franche-Comté etmembre de l’Équipe de Mathématiques de Besançon (UMR 6623). Ses recherchesconcernent les mathématiques constructives, l’algèbre réelle et la complexitéalgorithmique.

    [email protected]://hlombardi.free.fr

    Claude Quitté. Maître de conférences à l’Université de Poitiers et membredu Laboratoire de Mathématiques et Applications de l’Université de Poitiers(UMR 6086). Ses recherches concernent l’algèbre commutative effective et le calculformel.

    [email protected]

    Mathematics Subject Classification (2010)– Primary : 13 Commutative Algebra.– Secondary :

    03F Proof theory and constructive mathematics.11R04 - Algebraic numbers ; rings of algebraic integers.13C Theory of modules and ideals.13F Arithmetic rings and other special rings.

    Imprimé sur papier permanentISBN 978-2-91-635233-6

    9 7 8 2 9 1 6 3 5 2 3 3 6c© Calvage & Mounet, Paris, 2014

    http://webs.um.es/gemadiazhttp://hlombardi.free.fr

  • Préface

    Ce livre est un cours d’algèbre pour le Master 1, consacré à la théorie desmodules sur les anneaux commutatifs.Nous adoptons le point de vue constructif, pour lequel tous les théorèmesd’existence ont un contenu algorithmique explicite. En particulier, lorsqu’unthéorème affirme l’existence d’un objet, solution d’un problème, un algorith-me de construction de l’objet peut toujours être extrait de la démonstrationqui en est donnée.L’ouvrage ne réclame comme prérequis que les notions de base concernantla théorie des groupes, l’algèbre linéaire sur les corps, les déterminants.Une familiarité avec les anneaux de polynômes, les propriétés arithmétiquesde Z et la théorie de la divisibilité dans les anneaux factoriels est égalementsouhaitable.Signalons enfin que nous considérons les exercices (197 en tout) comme unepartie essentielle du livre.Nous publierons les errata et des exercices supplémentaires sur la page webde l’un des auteurs :http://hlombardi.free.fr/publis/LivresBrochures.html.

    Remerciements.Nous remercions Lionel Ducos et Claire Tête pour leurs suggestions, ainsique notre expert Latex, François Pétiard, pour ses conseils avisés.

    G.-M. Díaz-Toca, H. Lombardi, C. QuittéJuillet 2014.

    – v –

    http://hlombardi.free.fr/publis/LivresBrochures.html

  • Table des matières

    Avant-Propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xiii

    Première partieModules sur les anneaux principaux

    I Arithmétique de baseIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

    1 On a le droit de calculer modulo n . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 L’algorithme d’Euclide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Théorème des restes chinois sur Z . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 Systèmes d’équations linéaires sur Z . . . . . . . . . . . . . . . . 9

    II Groupes et anneaux commutatifsIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

    1 Groupes commutatifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182 Anneaux commutatifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293 Quelques rappels sur la théorie de la divisibilité . . . . . . . . . . 51

    III Calcul matriciel sur un anneau commutatif arbitraireIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

    1 Calcul matriciel et systèmes de Cramer . . . . . . . . . . . . . . . 642 Idéaux déterminantiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 673 Pivot chinois généralisé, splitting off . . . . . . . . . . . . . . . . 714 Systèmes linéaires sur le corps de fractions . . . . . . . . . . . . . 735 Systèmes linéaires sur un anneau intègre . . . . . . . . . . . . . . 82

    IV Systèmes linéaires sur un anneau principalIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

    1 Domaines de Bezout et anneaux principaux . . . . . . . . . . . . 862 Réduction de Smith d’une matrice sur un anneau principal . . . . 903 Systèmes linéaires sur un anneau principal . . . . . . . . . . . . . 95

    – vii –

  • viii Table des matières

    V Modules sur un anneau commutatifIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

    1 Définitions générales concernant les modules . . . . . . . . . . . . 1012 Applications linéaires entre modules libres . . . . . . . . . . . . . 1053 Modules de type fini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1094 Sommes et produits de modules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1125 Factorisation d’applications linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . 1176 Dualité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1237 Torsion, annulateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1278 Modules monogènes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1299 Un important résultat d’unicité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

    10 Suites exactes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13111 Modules de présentation finie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

    VI Modules de présentation finie sur les anneaux principauxIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144

    1 Structure des applications linéaires entre modules libres . . . . . 1442 Structure des modules de présentation finie . . . . . . . . . . . . 1493 Dualité, intersections . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1564 Cohérence d’un module de présentation finie . . . . . . . . . . . . 1585 Modules de présentation finie de torsion . . . . . . . . . . . . . . 161

    VII Structure d’un endomorphismeIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168

    1 Un K[X]-module intéressant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1692 Forme réduite de Frobenius . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1723 Un exemple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1764 Géométrie d’un endomorphisme, premiers pas . . . . . . . . . . . 1835 Utilisation du lemme des noyaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1866 Endomorphismes cycliques et sous-espaces stables . . . . . . . . . 1887 Endomorphismes semi-simples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1988 Décomposition de Jordan-Chevalley-Dunford . . . . . . . . . . . . 204

    VIII Anneaux et modules cohérents, noethériensIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

    1 Anneaux et modules cohérents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2122 Méthode modulaire de calcul . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2173 Définition de la noethérianité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2234 Propriétés noethériennes élémentaires . . . . . . . . . . . . . . . 2265 Les théorèmes de Hilbert et Noether . . . . . . . . . . . . . . . . 230

  • Table des matières ix

    Deuxième PartieApprofondissements

    IX Idéaux inversibles et domaines de DedekindIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233

    1 Principe local-global de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2342 Idéaux inversibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2353 Un exemple historique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2424 Petit théorème de Kummer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2475 Domaines de Dedekind à factorisation totale . . . . . . . . . . . . 2526 Domaines de Prüfer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 254

    X Entiers sur un anneau commutatifIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262

    1 Extensions d’anneaux, algèbres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2622 Extensions finies, entières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2633 Extensions libres finies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2714 Extension d’un anneau intégralement clos . . . . . . . . . . . . . 280

    XI Anneaux d’entiers des corps de nombresIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 283

    1 Corps de nombres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2842 Un peu plus d’arithmétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 288

    XII Anneaux et modules de fractionsIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 295

    1 Anneaux et modules de fractions . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2952 Principes local-globals pour les modules . . . . . . . . . . . . . . 2983 Principes local-globals pour les anneaux . . . . . . . . . . . . . . 300

    XIII Modules projectifs de type finiIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 301

    1 Modules projectifs de type fini sur un anneau arbitraire . . . . . . 3022 Applications linéaires localement simples . . . . . . . . . . . . . . 3063 Principes local-globals . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3094 Rang d’un module projectif de type fini sur un anneau intègre . . 3105 Les modules projectifs de type fini sont localement libres . . . . . 3126 Propriété caractéristique d’exactitude . . . . . . . . . . . . . . . . 3147 Annexe : rang d’un module projectif de type fini, cas général . . . 316

  • x Table des matières

    XIV Modules de présentation finie sur les domaines de PrüferIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 321

    1 Un principe local-global pour les domaines de Prüfer . . . . . . . 3222 Noyau, image et conoyau d’une matrice . . . . . . . . . . . . . . . 3233 Domaines de Prüfer fortement discrets . . . . . . . . . . . . . . . 327

    XV Changement d’anneau de base1 Présentation du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3292 Solution du problème dans quelques cas importants . . . . . . . . 3333 Somme directe de deux A-algèbres . . . . . . . . . . . . . . . . . 336

    XVI Dimension 0 et 1Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 341

    1 Anneaux zéro-dimensionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3422 Anneaux arithmétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3493 Anneaux intègres de dimension 6 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . 3534 Domaines de Prüfer de dimension 6 1 . . . . . . . . . . . . . . . 359

    Annexes

    A Une approche à la Kronecker des domaines de PrüferIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 367

    1 L’anneau de Kronecker . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3682 Le théorème de Kronecker . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3703 Quelques conséquences du théorème de Kronecker . . . . . . . . 373

    B Domaines de DedekindIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 377

    1 Domaines de Prüfer à factorisation partielle . . . . . . . . . . . . 3782 Problèmes de factorisation dans les domaines de Dedekind . . . . 3803 Extensions de domaines de Dedekind . . . . . . . . . . . . . . . . 385

    Solutions, ou esquisses de solutions, des exercices

    Solutions du chapitre I . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 389Solutions du chapitre II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 396Solutions du chapitre III . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 405Solutions du chapitre IV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 416Solutions du chapitre V . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424Solutions du chapitre VI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 444Solutions du chapitre VII . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 471

  • Table des matières xi

    Solutions du chapitre VIII . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 481Solutions du chapitre IX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 484Solutions du chapitre X . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 486Solutions du chapitre XI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 496Solutions du chapitre XII . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 501Solutions du chapitre XIII . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 504Solutions du chapitre XIV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513Solutions du chapitre XV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 515Solutions du chapitre XVI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 520Solutions de l’annexe B . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 529

    Tables et index

    Table des théorèmes 535Index des notations 541Index des termes 545

  • Quant à moi, je proposerais de s’en tenir aux règles suivantes :1. Ne jamais envisager que des objets susceptibles d’être définis

    en un nombre fini de mots ;2. Ne jamais perdre de vue que toute proposition sur l’infini doit

    être la traduction, l’énoncé abrégé de propositions sur le fini ;3. Éviter les classifications et les définitions non-prédicatives.

    Henri Poincarédans « La logique de l’infini » (Revue de Métaphysique et de Morale, 1909).

    Réédité dans Dernières pensées, Flammarion

    Avant-Propos

    Le contenu de cet ouvrageL’ouvrage, qui correspond à un cours de niveau M1, est une introduction àla théorie des modules sur un anneau commutatif.La notion de module sur un anneau commutatif est entre autres la géné-ralisation aux anneaux commutatifs de la notion d’espace vectoriel sur uncorps.Comme dans le cas des corps, la théorie des modules peut être vue commeune abstraction de la théorie de la résolution des systèmes linéaires.Une insistance toute particulière sur le cas des modules de présentationfinie sur les anneaux principaux est donnée dans la première partie du cours(chapitres I à VIII).Voici tout d’abord un bref aperçu de cette première partie.L’exemple le plus élémentaire d’anneau principal est l’anneau Z des entiersrelatifs. C’est pourquoi le chapitre I est consacré, d’une part au rappeldes propriétés arithmétiques de base de Z, d’autre part à la résolutiondes systèmes linéaires à coefficients et inconnues dans Z. Cette résolutions’appuie sur des transformations élémentaires qui ramènent n’importe quelsystème linéaire à un système équivalent1 pour lequel la résolution est toutà fait claire et simple.

    1. Les transformations élémentaires envisagées portent autant sur les lignes que surles colonnes de la matrice du système, ce qui sous-entend un éventuel changement

    – xiii –

  • xiv Avant-Propos

    Il s’agit d’une adaptation au cas de l’anneau Z de la réduction d’une matricerectangulaire sur un corps à la forme standard

    Ik 00 0

    à laquelle le lecteur est habitué.Cette nouvelle réduction, sur Z, est l’objet du théorème I-4.1, qui expliquecomment ramener une matrice à la forme

    D 00 0

    ,

    avec pour D une matrice diagonale.

    Le chapitre II est constitué de rappels concernant les groupes abéliens etles anneaux commutatifs, rappels de ce qui est usuellement fait dans lescours de L3. Les points essentiels sont les théorèmes de factorisation II-1.15et II-2.17, ainsi que le théorème des restes chinois II-2.25, généralisation àun anneau commutatif arbitraire du théorème analogue pour Z. Tout auplus, peut-être, certaines lectrices2 n’auront pas encore entendu parler dessystèmes fondamentaux d’idempotents orthogonaux, mais cette notion neprésente aucune difficulté. Le théorème les concernant (II-2.22) peut êtreconsidéré comme une variante du théorème des restes chinois.

    Le chapitre III est une introduction au calcul matriciel sur un anneaucommutatif. La théorie des déterminants connue du lecteur pour le cas descorps se généralise pour l’essentiel au cas d’un anneau, mais il faut prendregarde à quelques variations plus ou moins subtiles. Par exemple, une matricecarrée injective n’est plus nécessairement surjective. Un outil essentiel pourla généralisation de la théorie des déterminants est fourni par les idéauxdéterminantiels d’une matrice.

    Le chapitre IV est consacré à la résolution des systèmes linéaires sur unanneau principal, avec le théorème fondamental IV-2.3 pour la réductiond’une matrice à la forme de Smith : un algorithme tout à fait analogue àcelui que nous avons donné pour les matrices à coefficients entiers fonctionnedans ce cadre plus général. Signalons que de façon tout à fait étonnante,on ne sait toujours pas si une matrice sur un domaine de Bezout arbitraireadmet toujours une forme réduite de Smith.

    d’inconnues.2. La personne qui lit ce livre subit la règle inexorable de l’alternance des sexes.

    Espérons que les lecteurs n’en seront pas plus affectés que les lectrices. En tout cas, celanous économisera bien des (( ou )) et bien des (( (e) )).

  • Avant-Propos xv

    La lectrice qui maîtrise parfaitement les deux théorèmes cités peut estimerqu’elle a compris l’essentiel de la première partie du cours.Mais il lui faudra aussi faire un effort d’abstraction non négligeable pourfaire le lien entre la théorie des systèmes linéaires et celle des modules. Lereste de la première partie du cours est voué à expliquer cette abstraction.

    Le chapitre V est consacré à la définition des A-modules et à quelquesgénéralités utiles concernant cette notion. Les groupes abéliens sont exacte-ment les Z-modules, et cela facilitera sans doute la tâche du lecteur, car lechapitre reprend en grande partie, avec quelques modifications nécessaires,les rappels du chapitre II sur les groupes abéliens.Deux notions essentielles sont d’une part celle de A-module libre de rangfini, qui est la généralisation immédiate des espaces vectoriels de dimensionfinie sur un corps, et d’autre part celle de A-module de présentation finie,en relation directe avec la résolution des systèmes linéaires. C’est aussi lagénéralisation naturelle de la notion de groupe abélien de présentation finie.

    Le chapitre VI concerne le cas où l’anneau A dans lequel se déroule lescalculs est un anneau principal. Ce chapitre est organisé autour du théo-rème VI-2.1 de structure des A-modules de présentation finie. Auparavant,on aura donné la structure d’une application linéaire entre modules libresde rang fini, et la structure d’une inclusion M ⊆ L lorsque L est un modulelibre de rang fini etM un sous-module de type fini. En fait, tous les résultatsdu chapitre, hormis le théorème VI-2.9 concernant les modules de type fini,ne sont que des conséquences plus ou moins immédiates de la forme réduitede Smith des matrices, exprimées sous forme géométrique.

    Le chapitre VII est une belle application de la théorie développée au chapitreprécédent. On obtient le décryptage de la structure des endomorphismesd’un K-espace vectoriel de dimension finie, pour un corps K arbitraire :l’endomorphisme possède une matrice en forme de Frobenius pour une baseconvenable de l’espace vectoriel, et cette forme réduite est unique. Il s’agitd’un complément substantiel par rapport à la classification de Jordan, quine concerne que les endomorphismes dont le polynôme caractéristique estscindé.

    Le chapitre VIII contient une brève discussion d’une notion fort délicate,qui est la notion de module ou d’anneau noethérien. Cette discussion estéclairée par la notion d’anneau cohérent : un anneau est dit cohérent lorsquele noyau de toute matrice est un module de type fini. La cohérence esten fait un concept central du point de vue du contenu algorithmique desthéorèmes, mais elle apparaît rarement dans les ouvrages classiques, qui luipréfèrent le concept de noethérianité.

  • xvi Avant-Propos

    Les chapitres de la deuxième partie sont plus difficiles. Ils visent à étendrenombre de résultats que l’on a établis pour les anneaux principaux à desanneaux plus compliqués, notamment ceux qui interviennent en théorie desnombres algébriques (c’est-à-dire les nombres complexes qui sont zéros depolynômes à coefficients entiers).

    Le chapitre IX introduit la notion d’idéal inversible dans un anneau intègre.Ce sont des idéaux de type fini qui sont simplifiables pour le produit desidéaux. Un idéal inversible sert de (( pgcd idéal )) pour ses générateurs,quand ceux-ci n’engendrent pas un idéal principal. La théorie algébrique desnombres, qui étudie l’arithmétique des anneaux d’entiers dans les corps denombres, est fondée sur la théorie des idéaux inversibles. Dans la section 3,nous présentons l’exemple historique de l’anneau Z[ζn], où ζn est uneracine primitive n-ième de l’unité, exemple développé par Kummer dansses recherches sur le grand théorème de Fermat.Dans la section 4, nous présentons le petit théorème de Kummer, qui donnela (( décomposition en facteurs premiers )) de la plupart des idéaux de typefini dans l’anneau des entiers d’un corps de nombres.Ce chapitre introduit aussi les domaines de Dedekind, les domaines de Prüferet les domaines de Dedekind à factorisation totale, qui sont des généralisa-tions des anneaux d’entiers de corps de nombres. Les domaines de Prüfersont les anneaux intègres dans lesquels les idéaux de type fini non nuls sonttous inversibles. Ces anneaux généralisent aussi les domaines de Bezout (lesanneaux intègres dans lesquels les idéaux de type fini sont tous principaux).Les domaines de Dedekind à factorisation totale sont les domaines de Prüferdans lequel tout idéal de type fini admet une décomposition unique enfacteurs premiers.

    Le chapitre X introduit les extensions entières d’anneaux et donne leurs pro-priétés fondamentales. On y démontre notamment qu’une extension entièreet intégralement close d’un domaine de Bezout est un domaine de Prüfer.

    Le chapitre XI étudie les anneaux d’entiers de corps de nombres. On ydémontre le théorème fondamental de décomposition unique d’un idéalde type fini en produit d’idéaux maximaux (théorème XI-1.7), analoguedu théorème fondamental de l’arithmétique pour les entiers naturels. Cethéorème présente une importance historique particulière, car c’est pourl’avoir à sa disposition (en vue de démontrer le théorème de Fermat3) queKummer inventa la notion de pgcd idéal de nombres algébriques.

    3. Cette marche d’approche de Kummer pour démontrer le théorème de Fermat futcouronnée d’un succès seulement partiel, mais cette tentative a fondé la théorie algébriquedes nombres.

  • Avant-Propos xvii

    Le chapitre XII introduit les anneaux et modules de fractions pour le casdes anneaux intègres. Il présente ensuite quelques exemples de principeslocal-globals.

    Le chapitre XIII, préliminaire nécessaire au chapitre XIV, présente unebrève étude des modules projectifs de type fini sur un anneau commutatifarbitraire. On y met en évidence le fait qu’un module projectif de type finin’est autre qu’un module localement libre de rang fini. Ici, le mot (( loca-lement )) est défini de manière élémentaire, simple et précise. C’est égalementl’occasion d’introduire les applications linéaires localement simples entremodules libres de rang fini.

    Le chapitre XIV s’intéresse à la structure des modules de présentation finiesur les domaines de Prüfer. Cette structure est très proche de celle quel’on a établie pour les anneaux principaux. Certains traits particuliers ducas des anneaux d’entiers nécessitent cependant pour être généralisés lanotion de (( dimension 6 1 )), qui sera étudiée au chapitre XVI.

    Le chapitre XV traite le problème de l’extension des scalaires, ou change-ment d’anneau de base. C’est un outil fondamental et naturel en algèbrecommutative.

    Le chapitre XVI est consacré aux anneaux zéro-dimensionnels et aux an-neaux intègres de dimension de Krull 6 1. Ces notions clés sont introduitesde manière directe et algorithmique sans utiliser les idéaux premiers. Pour lesdomaines de Prüfer de dimension 6 1, nous démontrons les résultats essen-tiels concernant la structure des modules de présentation finie, usuellementétablis dans le cadre des domaines de Dedekind.

    En annexe, nous proposons deux compléments.

    L’annexe A présente de manière succincte le traitement de la théorie algé-brique des nombres (( à la Kronecker )). Il s’agit d’une approche à la foistrès algorithmique et très élégante qui ramène la théorie multiplicative desidéaux inversibles dans un domaine de Prüfer (ou un domaine de Dedekind)à la théorie analogue dans (( l’anneau de Kronecker correspondant )), qui estun domaine de Bezout (ou un anneau principal) défini à partir de l’anneaude départ.

    L’annexe B traite des problèmes de factorisation dans les domaines de Prüfer,avec le cas particulièrement important des domaines de Dedekind. Il s’agitici d’examiner dans quelle mesure on peut généraliser le théorème XI-1.7,établi précédemment pour les anneaux d’entiers (décomposition unique d’unidéal de type fini non nul en produit d’idéaux maximaux inversibles).

  • xviii Avant-Propos

    Ce que l’on ne trouve pas dans cet ouvrageNous nous sommes limités, pour ce qui concerne la technique de la localisa-tion, au cas des anneaux intègres. Un localisé d’un anneau intègre peut eneffet se voir comme un sous-anneau du corps de fractions de l’anneau, etcela évite les subtilités inhérentes au cas général. Bien que le cas généralsoit d’une extraordinaire fécondité à travers la généralisation du principelocal-global, nous n’en avons pas réellement l’utilité dans le présent ouvrage.

    Nous avons évité d’introduire les produits tensoriels de modules. Bien qu’ils’agisse d’une notion importante et assez naturelle, nous ne lui avons pastrouvé de place dans l’ouvrage, qui a comme lignes directrices la résolutiondes systèmes linéaires et la structure des modules de présentation finie.

    Nous avons notamment préféré introduire de manière directe la notion dechangement d’anneau de base sans passer par le produit tensoriel, contrai-rement à la tradition. Cela nous a semblé plus naturel.

    Nous avons évité autant que possible d’utiliser les idéaux premiers et maxi-maux, ici aussi contrairement à la tradition, sauf dans les cas où l’on maîtrisela construction de ces idéaux.

    En outre, et bien qu’il soit très simple de traiter les anneaux locaux sansl’utilisation des idéaux premiers et maximaux, nous ne les avons pas intro-duits non plus. Nous avons défini le radical de Jacobson sans recours auxidéaux maximaux.

    Enfin, nous avons évité autant que possible d’utiliser la noethérianité. Ils’agit en effet d’un concept délicat, difficile à manipuler d’un point de vuealgorithmique. Il s’agit aussi d’un concept souvent trompeur, dans la mesureoù l’on peut avoir l’impression avec les anneaux noethériens que tout devienttrès très simple. Par exemple, tous les modules de type fini sont réputésêtre de présentation finie. Mais, ce dernier résultat, par exemple, n’est paseffectif et ne peut pas être rendu effectif, même pour un anneau aussi simpleque Z.

    Sur le contenu algorithmique de l’algèbreL’algèbre dans la tradition d’al-Khwarismi, Viète, Gauss, Galois, Bezout etKronecker est une science de nature algorithmique.Nous avons pris comme option d’insister sur le contenu algorithmique desthéorèmes présentés dans cet ouvrage. Contenu algorithmique qui a biensouvent disparu des cours modernes.Ainsi, nous avons toujours indiqué quel était le contenu concret des hypo-thèses qui permet d’aboutir à la conclusion de façon algorithmique, commerésultat d’un calcul effectif.

  • Avant-Propos xix

    Prenons un exemple simple pour illustrer notre propos. Sur un anneauprincipal, un élément arbitraire est réputé se décomposer en produit defacteurs premiers, de manière unique. Mais, pour que ceci ait la significationobjective d’un calcul, il faut supposer que l’on sache tester la divisibilitéd’un élément par un autre, que l’on sache trouver le quotient quand ladivisibilité a lieu, que l’on ait un test d’irréductibilité, et que lorsque laréponse à ce test est négative, l’on sache effectivement décomposer l’élémentnon irréductible en un produit de deux facteurs.Il y a cependant dans le cursus usuel certains théorèmes qui n’ont aucuncontenu algorithmique, même lorsque l’on fait l’effort de prendre des hypo-thèses très précises (comme celles indiquées ci-dessus pour les problèmesde factorisation). Nous avons choisi d’en donner un minimum, avec leurdémonstration usuelle, tout en indiquant que leur contenu est litigieux,au moyen d’une astérisque. La signification réelle de ces théorèmes n’estpas claire, hormis le fait qu’ils ont une démonstration dans le cadre de la(( théorie formelle des ensembles )) usuelle, laquelle n’a pas de sémantiqueclaire.

    Sur l’importance des exercicesNous considérons les exercices (197 en tout) comme une partie essentielledu livre. Les exercices marqués du signe \ sont plus difficiles. Les autressont souvent du style (( application directe du cours )). Il est recommandéde ne pas se précipiter sur les corrections, regroupées à la fin de l’ouvrage,mais plutôt d’essayer de résoudre les exercices au fur et à mesure qu’ils seprésentent.

    Quelques renseignements pratiquesUne table des principaux théorèmes du cours est donnée page 535 et sui-vantes.On trouve un index des notations page 541, suivi d’un index des termes.Les définitions de termes sont mises en italique gras. Elles sont souventsituées dans le texte du cours plutôt que dans une définition numérotée.Les démonstrations se terminent par le symbole carré blanc comme ceci : 2Les remarques, exemples et commentaires se terminent par le symbole carrénoir comme cela :Toutes les propositions, théorèmes, définitions, etc. sont numérotées les unesaprès les autres dans chaque section, à l’exception notable des exercices, quisont regroupés à la fin de chaque section, avec une numérotation séparéequi n’indique pas le numéro de la section.Quand on cite un résultat ou une définition du chapitre où l’on se trouve,le numéro du chapitre n’est pas indiqué. Par exemple, à l’intérieur duchapitre IV, le théorème IV-2.3 est cité comme théorème 2.3.

  • xx Avant-Propos

    Deux livres de référence pour l’algèbre de licence– Jacqueline Lelong-Ferrand & Jean-Marie Arnaudiès. Coursde mathématiques, 1. Algèbre. Réédition, Dunod 2003.

    – Mathématiques L3 – Algèbre, coordonné par Aviva Szpirglas. Pearson2009.

    Des livres de référence pour approfondir– Joël Briançon. Algèbre approfondie. Université de Nice 1990-91.

    http://hlombardi.free.fr/publis/CoursBrian.pdf– Georges & Marie-Nicole Gras.Algèbre fondamentale. Arithmétique. Ellipses 2004.

    – Rémi Goblot. Algèbre Commutative. Dunod 2001.– [ACMC] Henri Lombardi & Claude Quitté.Algèbre Commutative. Méthodes constructives. Calvage & Mounet 2011.

    – [MRR] Ray Mines, Fred Richman & Wim Ruitenburg.A Course in Constructive Algebra. Universitext. Springer 1988.

    – [MMICA] Jounaïdi Abdeljaoued & Henri Lombardi.Méthodes Matricielles. Introduction à la Complexité Algébrique.Collection Mathématiques et Applications. Springer, Vol. 42, 2003.

    G.-M. Díaz-Toca, H. Lombardi, C. QuittéJuillet 2014.

    http://hlombardi.free.fr/publis/CoursBrian.pdf

  • Chapitre VII

    Structure d’unendomorphisme

    SommaireIntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168

    1 Un K[X]-module intéressant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171

    2 Forme réduite de Frobenius . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175

    3 Un exemple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1764 Géométrie d’un endomorphisme, premiers pas . . . . . . . . . . 183Restriction et extension du corps de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184Endomorphismes de petit rang et forme de Frobenius . . . . . . . . . . 184Critère de diagonalisabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185

    5 Utilisation du lemme des noyaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186Factorisation partielle d’une famille de polynômes . . . . . . . . . . . . . 187Se ramener au cas où les invariants de similitude sont des puissances

    d’un même polynôme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1876 Endomorphismes cycliques et sous-espaces stables . . . . . . . 188Nouvelles formes réduites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190Commutation d’endomorphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193Sous-espaces stables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 196Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197

    7 Endomorphismes semi-simples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 198Une propriété caractéristique dans un cas particulier . . . . . . . . . . . 198Un résultat algorithmique plus général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199Polynômes séparables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201Factorisation séparable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204

    – 167 –

  • 168 VII. Structure d’un endomorphisme

    8 Décomposition de Jordan-Chevalley-Dunford . . . . . . . . . . . 204Méthodes d’analyse en algèbre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205Des endomorphismes qui commutent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206Le théorème de Chevalley . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

    IntroductionOn fixe le contexte suivant pour tout ce chapitre.

    Soit V un K-espace vectoriel de dimension finieet soient E = (e1, . . . , en) une base de V sur K

    et ϕ un endomorphisme de V .

    Le but du chapitre est d’étudier la structure de ϕ, et en particulier d’expli-citer une forme réduite uniquement déterminée pour la matrice de ϕ, aprèsun changement de base convenable.Cette étude est facilitée si l’on munit V d’une structure naturelle de modulesur l’anneau K[X] attachée à l’endomorphisme ϕ.Le grand avantage de la forme réduite de Frobenius (que nous allons expli-quer) est d’être calculée par une procédure purement rationnelle : on nesort jamais du corps des coefficients de la matrice donnée au départ. Enparticulier, contrairement à ce qui se passe avec la réduite de Jordan, il n’estpas besoin de faire appel aux racines du polynôme caractéristique de ϕ.

    Nous précisons maintenant la terminologie des K-algèbres, qui sera utiledans ce chapitre.Une K-algèbre est donnée par un anneau B, et un morphisme d’an-neaux ρ : K→ B. Cela fait de B un K-espace vectoriel. Si B 6= 0, l’homo-morphisme ρ est injectif et l’on identifie parfois K à son image dans B.Sauf mention expresse du contraire, les algèbres que nous considérons sontcommutatives.Un morphisme de la K-algèbre K ρ−→ B vers la K-algèbre K ρ

    −→ B′ estun homomorphisme d’anneaux B ϕ−→ B′ vérifiant ϕ ◦ ρ = ρ′, autrement ditun homomorphisme K-linéaire.

    ��

    ρ′

    %%B

    ϕ// B′

    Nous noterons HomK(B,B′) l’ensemble des homomorphismes de K-algèbresde B vers B′ ; c’est un sous-espace vectoriel de LK(B,B′).

  • §1. Un K[X]-module intéressant 169

    Outre les algèbres de polynômes que nous avons déjà rencontrées, nous seronsintéressés ici par les algèbres qui sont des K-espaces vectoriels de dimensionfinie, par exemple des algèbres quotients K[X]/〈f〉 ou des sous-algèbrescommutatives de l’algèbre (non commutative) de Mn(K).

    1. Un K[X]-module intéressantOn peut voir le K-espace vectoriel V comme un K[X]-module, en définissantla loi externe (( ·ϕ )) comme suit :

    P ·ϕ u = P (ϕ)(u), P ∈ K[X], u ∈ V.

    Nous notons Vϕ le K[X]-module ainsi défini.

    Si l’endomorphisme ϕ de V est fixé, on notera souvent P · u pour P ·ϕ u.Nous notons νϕ le polynôme minimal et χϕ le polynôme caractéristiquede ϕ.Faisons alors quelques remarques de bon sens, que nous regroupons dansles deux propositions qui suivent.

    1.1. Proposition1. Un sous-K-espace vectoriel E de V est un sous-module de Vϕ si, et seu-

    lement si, ϕ(E) ⊆ E, i.e. E est un sous-espace vectoriel ϕ-stable.2. Des sous-espaces ϕ-stables sont en somme directe comme K-espaces

    vectoriels si, et seulement si, ils sont en somme directe comme sous-modules de Vϕ.

    3. Le module Vϕ est de type fini et de torsion.4. L’idéal annulateur AnnK[X](Vϕ) = (0 : Vϕ) ⊆ K[X] est égal à 〈νϕ〉.

    N.B. : dans la suite, lorsque V et ϕ sont fixés, on dira simplement (( sous-espace stable )) pour (( sous-K-espace vectoriel ϕ-stable de V )).Démonstration. 1. Clair.2. En effet, cela signifie dans les deux cas qu’ils sont en somme directecomme sous-groupes abéliens de V .3. En effet, le K[X]-module Vϕ est engendré par les vecteurs e1, . . . , en, etle polynôme χϕ(X) annule Vϕ, i.e. χϕ ∈ (0 : Vϕ)K[X].4. Par définition du polynôme minimal de ϕ. �

    La sous-K-algèbre de EndK(V ) engendrée par ϕ est notée K[ϕ], et commele noyau de l’homomorphisme K[X] → K[ϕ] d’évaluation de X en ϕ estégal à νϕ, on a K[ϕ] ' K[X]/〈νϕ〉. Notons que Vϕ peut également être vucomme un K[ϕ]-module.

  • 170 VII. Structure d’un endomorphisme

    1.2. Proposition et définitionPour tout v ∈ Vϕ, le sous-module K[X] ·ϕ v est le plus petit sous-espacevectoriel ϕ-stable de V contenant v. On le notera aussi 〈v〉ϕ ou K[ϕ] · v.Si ϕk(v) = a0v +

    ∑k−1j=1 ajϕ

    j(v) (ai ∈ K) est la première relation de dépen-dance linéaire qui se présente entre v, supposé maintenant non nul, etses transformés successifs par ϕ, le sous-espace K[ϕ] · v admet la K-baseBv,ϕ =

    (v, ϕ(v), . . . , ϕk−1(v)

    ).

    On appelle alors polynôme minimal de v pour ϕ et l’on note νv,ϕ(X)le polynôme Xk −

    ∑k−1j=0 ajX

    j. On a alors les résultats suivants1.

    1. L’annulateur (0 : v)K[X] est égal à 〈νv,ϕ〉, ce qui implique que νv,ϕdivise le polynôme minimal νϕ.

    2. Le sous-espace K[ϕ] · v est isomorphe en tant que K[X]-module aumodule K[X]/〈νv,ϕ〉. L’isomorphisme est donné par

    K[X]/〈νv,ϕ〉 −→ K[ϕ] · v, g 7−→ g · v.En particulier, en notant x = X, l’image de (1, x, . . . , xk−1) (basenaturelle du K-espace vectoriel K[X]/〈νv,ϕ〉) est la base Bv,ϕ.

    3. La matrice sur la base Bv,ϕ de l’endomorphisme induit ϕ〈v〉ϕ est lamatrice compagne du polynôme νv,ϕ(X) = Xk −

    ∑k−1j=0 ajX

    j :

    Mνv,ϕ =

    0 · · · · · · · · · 0 a01

    . . .... a1

    0. . . . . .

    ......

    .... . . . . . . . .

    ......

    .... . . . . . 0 ak−2

    0 · · · · · · 0 1 ak−1

    .

    4. Le polynôme caractéristique et le polynôme minimal de ϕ〈v〉ϕ , c’est-à-dire aussi ceux de la matrice compagne Mνv,ϕ , sont tous deux égaux aupolynôme νv,ϕ.

    Démonstration. Clair, modulo éventuellement de petits calculs. Par exemple,pour le point 4 on note que νv,ϕ divise le polynôme minimal de Mνv,ϕ , quidivise le polynôme caractéristique de Mνv,ϕ . Les trois polynômes sont uni-taires et les deux extrêmes sont de même degré, donc ils sont les troiségaux2. �

    1. Lorsque ϕ(v) = av et v 6= 0, on a νv,ϕ = X − a. La base Bv,ϕ est (v) et la matricecompagne de νv,ϕ est [a]. Dans le cas où v = 0, on a νv,ϕ = 1. La base Bv,ϕ est videet la matrice compagne de νv,ϕ est également vide. Son déterminant et son polynômecaractéristique sont égaux à 1. Les points 1 à 4 restent tous corrects.

    2. C’est aussi un exercice amusant de trouver comment calculer sans effort le polynômecaractéristique d’une matrice compagne.

  • §1. Un K[X]-module intéressant 171

    Le théorème qui suit est un peu plus délicat.

    1.3. Théorème. Avec les notations précédentes, soit F = ME(ϕ). Alors,la matrice caractéristique XIn − F est une matrice de présentation dumodule Vϕ pour le système générateur (e1, . . . , en).

    Démonstration. Si F = (aij)i,j∈J1..nK, on a X · ej =∑i∈J1..nK aijei.

    Autrement dit,(X − ajj) · ej −

    ∑i∈J1..nK,i6=j aijei = 0.

    Ainsi, la j-ième colonne de XIn−F est une relation de dépendance linéairepour le système générateur (e1, . . . , en).Il nous faut ensuite démontrer que toute relation de dépendance linéairepour (e1, . . . , en) est une combinaison K[X]-linéaire des relations donnéespar les colonnes de XIn − F .Puisque X2 · ej = X · (X · ej), on voit3 que l’expression de X2 · ej commecombinaison K-linéaire de E s’écrit comme combinaison K[X]-linéaire desrelations données par XIn − F .De même, pour tout g ∈ K[X], l’expression de g · ej sur la K-base E s’écritcomme combinaison K[X]-linéaire des relations données par XIn−F . Cetteexpression est donnée en fait par la j-ième colonne de la matrice g(F ).Maintenant, pour (g1, . . . , gn) ∈ K[X]n, l’expression de

    ∑i∈J1..nK gi · ei sur

    la K-base E s’écrit aussi comme combinaison K[X]-linéaire des relationsdonnées par XIn − F . Et une telle expression est identiquement nulleexactement lorsque

    ∑i∈J1..nK gi · ei = 0. �

    Exercices

    Exercice 1. Donner une démonstration détaillée des propositions 1.1 et 1.2.

    Exercice 2. Soit B un domaine de Bezout et soient a, b ∈ B, g = pgcd(a, b),et m = ppcm(a, b). Soit enfin V un B-module.1. Montrer que (a ·V ) + (b ·V ) =g ·V et (a ·V )∩ (b ·V ) =m ·V .

    2. Montrer que (0 :a)V + (0 : b)V = (0 :m)V et (0 :a)V ∩ (0 : b)V = (0 :g)V .

    3. Que donnent les résultats précédents lorsque V est un K-espace vecto-riel avec un endomorphisme ϕ, et lorsque l’on considère la structurede K[X]-module sur V donnée par a · x = a(ϕ)(x) pour a ∈ K[X]et x ∈ V ?

    3. Le lecteur sceptique est vivement encouragé à écrire les détails de ce petit calcul,par exemple avec n = 3.

  • 172 VII. Structure d’un endomorphisme

    Exercice\3.(Structure de A[X]-module sur An associée à A ∈Mn(A)

    )On généralise le théorème 1.3 en remplaçant le corps K par un anneauarbitraire A. Considérons une matrice A ∈Mn(A) qui définit un endomor-phisme ϕ de V = An.On munit V d’une structure de A[X]-module en posant

    Q ·ϕ b = Q · b = Q(A) b = Q(ϕ)(b),

    pour Q ∈ A[X] et b ∈ An. On note Vϕ le A[X]-module ainsi obtenu. Cettestructure sur V est la seule structure (compatible avec celle de A-module)pour laquelle X · b = Ab pour tout b.Soit θϕ : A[X]n � An l’unique A[X]-morphisme qui transforme la basecanonique de A[X]n en celle de An. Autrement dit, si l’on note du mêmenom (e1, . . . , en) ces deux bases canoniques, le morphisme θϕ est défini par

    θϕ(Q1, . . . , Qn) = θϕ(Q1e1 + · · ·+Qnen)def= Q1 · e1 + · · ·+Qn · en= Q1(A) e1 + · · ·+Qn(A) en.

    On va montrer que la suite ci-dessous est exacte :

    A[X]n XIn−A−−−−−→ A[X]n θϕ−−→ An → 0.Autrement dit, An est un A[X]-module de présentation finie, et XIn −Aest une matrice de présentation pour le système générateur (e1, . . . , en).1. Montrer que l’on a une somme directe de A-modules

    A[X]n = Im(XIn −A)⊕An.2. Conclure.

    2. Forme réduite de FrobeniusDans l’anneau euclidien K[X], tout polynôme non nul est associé à ununique polynôme unitaire (au sens de la relation d’association). Or, dans laforme réduite de Smith d’une matrice, les éléments diagonaux sont a prioridéfinis à association près. On obtient cependant dans le cas de l’anneau K[X]une forme réduite complètement unique en demandant que les élémentsdiagonaux non nuls soient des polynômes unitaires.Rappelons qu’une matrice H ∈ Mn(K[X]) est inversible si, et seulementsi, son déterminant est inversible dans K[X], c’est-à-dire si det(H) ∈ K∗.Notons aussi que dans le processus de réduction de Smith d’une matrice surun anneau euclidien, les matrices de passage produites sont automatiquementde déterminant ±1.

  • §2. Forme réduite de Frobenius 173

    2.1. Théorème. (Structure d’un endomorphisme d’un K-espace vectoriel)Nous gardons les notations précédentes.

    1. La réduction de Smith de la matrice XIn − F est du typeL(XIn−F )C=Diag(1, . . . ,1,f1, . . . ,fk), k∈N∗ et L, C∈GLn(K[X]),avec pour fi des polynômes unitaires 6= 1 vérifiant f1 | · · · | fk.

    2. Le K[X]-module Vϕ est isomorphe àK[X]/〈f1〉 ⊕ · · · ⊕K[X]/〈fk〉 .

    3. La matrice F est semblable à une matrice diagonale par blocs, dontles blocs diagonaux sont les matrices compagnes des polynômes fi. Cetteforme réduite de la matrice de ϕ est appelée forme de Frobenius.

    4. Le polynôme fk est égal au polynôme minimal νϕ de ϕ. Le polynômecaractéristique χϕ de ϕ est égal au produit des fi.

    5. Si χϕ = νϕ, alors Vϕ = K[ϕ] · y pour un y ∈ V , et la forme réduite deFrobenius de ϕ est la matrice compagne de χϕ.

    Démonstration. Conséquence du théorème VI-2.1 (forme réduite de Smithd’une matrice sur un anneau principal), du corollaire VI-2.5 (structuredes modules de présentation finie de torsion sur un anneau principal), duthéorème 1.3 (matrice de présentation de Vϕ) et des propositions 1.1 et 1.2(remarques de bon sens sur le module Vϕ). Les détails sont laissés à lalectrice. �

    2.2. Corollaire. Pour tout endomorphisme ϕ de V ' Kn, le polynômecaractéristique divise νnϕ. Plus précisément, on obtient les résultats suivants.

    – Le polynôme caractéristique χϕ divise νmϕ , où m = n+ 1− deg(νϕ).– Si la forme réduite de Frobenius (unique d’après le théorème 2.5) com-porte k blocs diagonaux, alors :◦ le polynôme χϕ divise νkϕ ;◦ le polynôme χϕ est multiple d’un polynôme fk1 , avec deg(f1) > 1.

    Démonstration. Clair d’après les points 1 et 4 du théorème 2.1. �

    2.3. Corollaire. Pour tout endomorphisme ϕ d’un K-espace vectoriel dedimension finie, il existe un v ∈ V tel que l’on ait :– le polynôme minimal de v pour ϕ est égal au polynôme minimal de ϕ ;– le sous-espace stable K[ϕ] · v, qui est de dimension deg νϕ, est facteurdirect d’un autre sous-espace stable.

    Démonstration. Clair d’après la forme réduite de Frobenius. �

  • 174 VII. Structure d’un endomorphisme

    2.4. Corollaire. Si le polynôme minimal d’un endomorphisme ϕ est divi-sible par un facteur carré (non constant), on peut construire un sous-espacestable qui n’admet pas de supplémentaire stable.Démonstration. Supposons que νϕ = fg2 avec deg(g) > 1. Soit x ∈ V telque νx,ϕ = νϕ et soient y = f · x et z = g · y ; alors, g · z = fg2 · x = 0.On considère le sous-espace stable U = K[ϕ] · z. Soit T un sous-espacestable tel que T + U = V . On écrit y = t+ h · z avec t ∈ T , d’où

    z = g · y = g · (t+ h · z) = g · t+ hg · z = g · t ∈ g · T ⊆ T,Ainsi, T = V , et par conséquent U n’a pas de supplémentaire stable. �

    Les deux théorèmes structurels 1.3 et 2.1 doivent être complétés par lethéorème plus facile qui suit.Deux endomorphismes d’un même K-espace vectoriel de dimension finiesont dits semblables s’ils sont conjugués sous l’action du groupe linéaire,c’est-à-dire encore si leurs matrices sont semblables.

    2.5. Théorème et définition. On considère deux endomorphismes ϕ et ψdu K-espace vectoriel V (de dimension finie n).1. a. Tout homomorphisme de K[X]-modules, θ : Vϕ → Vψ, est un endo-

    morphisme du K-espace vectoriel V .b. Pour qu’un θ ∈ EndK(V ) soit un homomorphisme de Vϕ dans Vψ,

    il faut et suffit qu’il entrelace ϕ et ψ, c’est-à-dire que θ ◦ ϕ = ψ ◦ θ.2. Les endomorphismes ϕ et ψ sont semblables si, et seulement si, les

    modules Vϕ et Vψ sont isomorphes.3. Les polynômes fi dans le théorème 2.1 caractérisent la classe de si-

    militude de l’endomorphisme ϕ. Ils sont appelés les invariants desimilitude de l’endomorphisme ϕ.

    4. Les endomorphismes ϕ et ψ sont semblables si, et seulement si, ils ontla même forme réduite de Frobenius.

    Démonstration. 1a. Évident.1b. Pour g ∈ K[X] et v ∈ V , notons g(ϕ)(v) = g ·ϕ v et g(ψ)(v) = g ·ψ v.Alors, θ est un homomorphisme de Vϕ dans Vψ si, et seulement si, pourtout g ∈ K[X] et tout v ∈ V , on a

    θ(g ·ϕ v) = g ·ψ θ(v).Cela implique pour g = X que θ

    (ϕ(v)

    )= ψ

    (θ(v)

    ).

    Inversement, si θ ◦ϕ = ψ ◦ θ, alors par récurrence sur r, on a θ ◦ϕr = ψr ◦ θ,puis, pour tout g ∈ K[X], θ ◦ g(ϕ) = g(ψ) ◦ θ. Donc, θ(g ·ϕ v) = g ·ψ θ(v)pour tout v.2. Cela résulte du point 1b appliqué pour les endomorphismes bijectifs.

  • §2. Forme réduite de Frobenius 175

    3. La liste des fi caractérise exactement la classe d’isomorphisme du mo-dule Vϕ (corollaire VI-2.5). D’après le point 2, elle caractérise donc exacte-ment la classe de similitude de ϕ.4. Conséquence du point 3. �

    Remarques. 1) En dimension n fixée et pour un polynôme caractéristiquedonné, les invariants de similitude sont soumis à deux contraintes. D’unepart, leur produit doit être égal au polynôme caractéristique ; d’autre part,ils doivent se diviser successivement : fi | fi+1 pour 1 6 i < k. On vérifiefacilement qu’il n’y a pas d’autres contraintes. On en déduit qu’il n’y a qu’unnombre fini de classes de similitudes pour un polynôme caractéristique fixé.Notons aussi que si k > 2, le polynôme caractéristique possède le facteurcarré f21 dans K[X].2) Si ϕ est nilpotent, son polynôme caractéristique est Xn, et les invariantsde similitude de ϕ sont des polynômes Xri . La forme de Frobenius est alorsidentique à la forme de Jordan (à ceci près que dans un bloc de Jordan usuelles 1 sont au dessus de la diagonale, alors que dans la forme de Frobeniusils sont en dessous de la diagonale ; il suffit de prendre les vecteurs dans lanumérotation opposée pour passer d’une forme à l’autre).3) Si ϕ− λId est nilpotent, son polynôme caractéristique est (X − λ)n, etles invariants de similitude de ϕ sont des polynômes (X − λ)ri . La forme deFrobenius de ϕ− λId permet de retrouver la forme de Jordan

    (comme dans

    la remarque 2)).

    4) Si l’on sait calculer la décomposition en facteurs premiers du polynômecaractéristique χϕ de ϕ, on écrit χϕ = q1× · · ·× qr, où les qi sont despuissances de polynômes irréductibles pi. On obtient alors par le lemmedes noyaux la décomposition V = V1 ⊕ · · · ⊕ Vr, où Vi = Ker qi(ϕ). Ennotant ϕi l’endomorphisme de Vi induit par ϕ, on peut ensuite calculer laforme réduite de Frobenius de chaque ϕi. Les invariants de similitude de ϕisont alors des puissances de pi.Ce type de calcul est a priori plus difficile que celui qui donne la formede Frobenius. Il est même parfois impossible, car il est fondé sur le calculde la décomposition en facteurs premiers du polynôme caractéristique. Onpeut néanmoins profiter utilement du lemme des noyaux sans pour autantdécomposer le polynôme caractéristique en produits de polynômes irréduc-tibles. Pour cela, voir les sections 5 à 8.

    ExercicesExercice 4. Expliquer la relation précise entre invariants de similitude etfacteurs invariants.

    Exercice 5. Donner les invariants de similitude d’une matrice diagonale.

  • 176 VII. Structure d’un endomorphisme

    Exercice 6. Soit A ∈Mn(K), où K est un corps.1. Montrer que A et tA ont même polynôme caractéristique et même

    polynôme minimal.2. En utilisant la réduction de Frobenius, montrer que A et tA sont

    semblables.

    Exercice 7. Soit A =[

    8 20 1

    ]∈M2(Z).

    – Calculer les vecteurs propres de A et tA dans Q2.– Montrer que A et tA ne sont pas semblables sur Z. Autrement dit, onn’a aucune matrice P ∈ GL2(Z) vérifiant PAP−1 = tA.

    Exercice 8. Soit ϕ∈EndK(V ) et soit v∈V tel que dimK(K[ϕ] ·v)=degνϕ.Alors K[ϕ] ·v est facteur direct d’un autre sous-espace stable.

    3. Un exempleLes exemples d’application de la théorie précédente sont de deux ordres.Tout d’abord le plus souvent, un endomorphisme ϕ (d’un espace vectorielde dimension finie) a son polynôme minimal égal à son polynôme carac-téristique. Dans ce cas la théorie nous dit que, sur une base convenable,l’endomorphisme admet pour matrice la matrice compagne de son polynômecaractéristique. La base est du type

    (x1, . . . , xn), avec x2 = ϕ(x1), x3 = ϕ(x2), . . . , xn = ϕ(xn−1).En pratique, il suffit de choisir le vecteur x1 (( au hasard )) et cela marcheavec une très bonne probabilité de succès (i.e., les xi sont linéairementindépendants).Les exemples plus difficiles sont lorsque le polynôme minimal n’est pas égalau polynôme caractéristique. Il existe des techniques d’algèbre linéaire purequi n’utilisent pas la belle théorie des modules sur les anneaux principaux,et qui donnent, à partir d’une matrice carrée F , deux matrices H et P , où Hest la forme réduite de Frobenius de F , et P est la matrice de changementde base : P−1F P = H.La théorie que nous avons développée est plus élégante, mais ne fournitsans doute pas d’algorithme plus performant que ceux fondés sur l’algèbrelinéaire.Nous proposons ici un exemple que nous avons traité avec le logiciel Maple.Nous donnons les algorithmes correspondants en pseudocode. Nous indiquonsensuite les étapes du calcul pour cet exemple.Pour notre méthode, nous considérons la matrice caractéristique A = uI−F ,à coefficients dans Q[u] ; et, nous allons lui faire subir des transformationsde lignes et de colonnes légitimes pour l’anneau principal Q[u].

  • §3. Un exemple 177

    À la suite de ces transformations, nous aurons une égalité L A C = A′,avec L et C ∈ GL6(Q[u]) (en fait, L et C sont de déterminant ±1) et l’imagede A′ sera suffisamment simple (en forme de Smith, à des permutationsprès) pour que la structure du module CokerA′ soit claire.Nous aurons besoin de connaître L−1 pour donner la matrice de changementde base. Pour cela, nous initialisons V et W = V −1, avec V = W = I6.Au cours du traitement de la matrice A, chaque fois qu’une manipulationde ligne intervient, nous faisons subir à V la même manipulation de ligneet à W la manipulation de colonne opposée, de manière à obtenir denouveau W = V −1. En revanche, nous ne nous préoccupons pas de calculerla matrice C correspondant aux manipulations de colonnes, car cette matricen’a pas d’incidence sur l’image de la matrice LAC. Ainsi, les procéduresde manipulations de lignes transforment le triplet (A, V,W ) tandis queles procédures de manipulations de colonnes opèrent uniquement sur lamatrice A.La procédure AjoutLigne (dont nous ne donnons pas les détails) appliquéeà une matrice M , avec deux indices de lignes i1 et i2 et un coefficient aeffectue la manipulation élémentaire Li2 ← Li2 + aLi1 sur les lignes de lamatrice M . Même chose pour la procédure AjoutColonne.La procédure PivotLigne utilise le coefficient en position (m,n), supposéconstant non nul, comme pivot pour tuer tous les coefficients de la colonne n,sauf le pivot, au moyen de manipulations de lignes.

    PivotLigneEntrée : A, V , W : Mr(Q[u]) ; r, m, n : N.Sortie : A1, V1, W1 : les matrices transformées après traitement du pivot.Variables locales : piv, coe : Q ; i : N.DébutA1 ← A ; V1 ← V ; W1 ← W ; piv ← A[m,n] ;Pour i de 1 à r faire

    Si i 6= m alors coe ← A[i, n] ;AjoutLigne(A1,m, i,−coe/piv) ;AjoutLigne(V1,m, i,−coe/piv) ;AjoutColonne(W1, i,m, coe/piv)

    fin sifin pour ;Fin.

    La procédure PivotColonne utilise le coefficient en position (m,n), supposéconstant non nul, comme pivot pour tuer tous les coefficients de la ligne m,sauf le pivot, au moyen de manipulations de colonnes.

  • 178 VII. Structure d’un endomorphisme

    PivotColonneEntrée : A : Mr(Q[u]) ; r, m, n : N.Sortie : A1 : la matrice transformée après traitement du pivot.Variables locales : piv, coe : Q ; j : N.DébutA1 ← A ; piv ← A[m,n] ;Pour j de 1 à r faire

    Si j 6= n alors coe ← A[i, n] ;AjoutColonne(A1, n, j,−coe/piv) ;

    fin sifin pour ;Fin.La procédure PivotLiCo enchaîne les deux procédures précédentes.La procédure QuoPivLi considère les coefficients a et b ∈ Q[u] en posi-tions (m1, n) et (m2, n). La division euclidienne du polynôme a par lepolynôme b donne le quotient q = Quotient(a, b) : on retranche q fois laligne m2 à la ligne m1, ce qui remplace a par le reste de la division de apar b.QuoPivLiEntrée : A, V , W : Mr(Q[u]) ; n, m1, m2 : N.Sortie : A1, V1, W1 : les matrices transformées.Variables locales : a, b, q : Q[u] ; j : N.DébutA1 ← A ; V1 ← V ; W1 ← W ;a ← A[m1, n] ; b ← A[m2, n] ; q ← Quotient(a, b) ;AjoutLigne(A1,m2,m1,−q) ;AjoutLigne(V1,m2,m1,−q) ;AjoutColonne(W1,m1,m2, q) ;Fin.La procédure QuoPivCol est la procédure de manipulations de colonnesanalogue, visant à diviser un coefficient par un autre situé sur la même ligne.

    L’exemple a été fabriqué à partir d’une matrice G en forme réduite deFrobenius.

    G :=

    · · · −11 · · 0· 1 · −2· · 1 0

    · −11 0

    .

    Ses invariants de similitude sont X2 + 1 et (X2 + 1)2.

  • §3. Un exemple 179

    On a construit une matrice inversible T1, calculé la matrice T2 = T−11 , puis

    la matrice F = T2 G T1, ce qui a donné

    F :=

    13 −9 −5 −13 −3 −6−4 0 0 10 3 526 −14 −8 −36 −9 −186 −1 0 −8 −4 −28 −8 −5 −8 0 −6−7 1 0 10 5 3

    .

    La procédure Frobenius de Maple, appliquée à la matrice F , donne les

    matrices suivantes pour P et P−1

    P =

    13231643

    178891643

    249651643 −

    129601643 −

    3201643 −

    34701643

    − 4051643 −56521643 −

    45241643

    319401643 −

    4051643

    9201643

    15661643

    358111643

    378661643 −

    719571643

    15661643 −

    69071643

    − 2118164361091643

    284061643 −

    11801643 −

    21181643 −

    37491643

    12553

    38453 −

    12553 −

    38453

    12553 −

    4053

    18391643 −

    59541643 −

    281271643

    10251643

    18391643

    55471643

    P−1 =

    1 − 20491643 −12691643 −

    4501643

    3921643 −

    4291643

    0 6321643333

    1643 −412

    1643 −9

    53 −1

    53

    0 − 3131643 −184

    1643604

    1643237

    1643284

    1643

    0 136164323

    1643 −9

    1643 0 0−1 2483445

    31689

    60263445

    4853

    27673445

    0 − 6163445 −77

    68938133445

    953

    33513445

    .

    Autrement dit, la nouvelle base est formée par le vecteur correspondant

    à la première colonne de P , ses trois transformés successifs par F , puis le

    vecteur correspondant à la colonne no 5 de P et son transformé par F . On

    vérifie que l’on a bien P−1 F P = G.

  • 180 VII. Structure d’un endomorphisme

    Avec notre méthode, nous créons tous d’abord les matrices A = uI6 − F ,et V = W = I6 :

    A =

    u− 13 9 5 13 3 64 u 0 −10 −3 −5

    −26 14 u+ 8 36 9 18−6 1 0 u+ 8 4 2

    −8 8 5 8 u 67 −1 0 −10 −5 u− 3

    .

    La procédure PivotLiCo pour le pivot 1 en position (4, 2) donne des ma-trices A1, V1, W1, avec

    A1 =

    41 + u 0 5 −9u− 59 −33 −12

    6u+ 4 0 0 −u2 − 8u− 10 −4u− 3 −2u− 5

    58 0 u+ 8 −14u− 76 −47 −10

    0 1 0 0 0 0

    40 0 5 −8u− 56 −32 + u −10

    1 0 0 u− 2 −1 −1 + u

    .

    Maintenant, on utilise le pivot 1 en position (6, 1), on obtient des ma-trices A2, V2, W2, avec

    A2 =

    0 0 5 −48u− u2 + 23 u+ 8 29− 40u− u2

    0 0 0 −7u2 − 2 2u+ 1 −1− 6u2

    0 0 u+ 8 −72u+ 40 11 48− 58u

    0 1 0 0 0 0

    0 0 5 −48u+ 24 u+ 8 30− 40u

    1 0 0 0 0 0

    .

    On utilise ensuite le pivot 5 en position (1, 3), et l’on obtient des ma-trices A3, V3, W3, avec pour A3 :

    0 0 5 0 0 0

    0 0 0 −7u2 − 2 2u+ 1 −1− 6u2

    0 0 0 u3 + 56u2 + u+ 16

    5 −u2 + 16u+ 9

    5u3 + 48u2 + u+ 8

    50 1 0 0 0 0

    0 0 0 u2 + 1 0 u2 + 1

    1 0 0 0 0 0

    .

  • §3. Un exemple 181

    Sur la ligne 2, on utilise les coefficients en position (2, 6) et (2, 5), et l’onapplique la procédure QuoPivCol, qui nous donne la matrice A4 :

    0 0 5 0 0 0

    0 0 0 −7u2 − 2 2u+ 1 − 52

    0 0 0 u3 + 56u2 + u+ 16

    5 −u2 + 16u+ 9

    5−4u3 + 3u2 − 4u+ 43

    100 1 0 0 0 0

    0 0 0 u2 + 1 0 u2 + 1

    1 0 0 0 0 0

    .

    On utilise ensuite le pivot − 52 en position (2, 6), et l’on obtient des ma-trices A5, V5, W5, avec

    A5 =

    0 0 5 0 0 0

    0 0 0 0 0 − 520 0 0 f34(u) f35(u) 0

    0 1 0 0 0 0

    0 0 0 − 14u4 + 13u2 − 1

    54u3 + 2u2 + 4u+ 2

    5 0

    1 0 0 0 0 0

    ,

    où f34(u) = 28u5 − 21u4 + 41u3 − 27u2 + 13u− 6

    25,

    et f35(u) = − 8u4 + 2u3 − 10u2 + 2u− 2

    25 ·

    Sur la ligne 5, on utilise les coefficients en position (5, 4) et (5, 5), et l’onapplique la procédure QuoPivCol, qui nous donne la matrice A6 dont nousdonnons la sous-matrice extraite sur les lignes 3 et 5 et les colonnes 4 et 5 u

    3 − u2 + u− 110

    −8u4 + 2u3 − 10u2 + 2u− 225

    − u2 + 1

    24u3 + 2u2 + 4u+ 2

    5

    .Enfin, le coefficient − u

    2 + 12 en position (5, 4) peut servir de pivot pour

    sa ligne et sa colonne. En utilisant les procédures QuoPivCol et QuoPivLi,nous obtenons finalement la matrice A8

    L F C = A8 =

    0 0 5 0 0 0

    0 0 0 0 0 52

    0 0 0 0 −4 (u4 + 2u2 + 1)

    25 00 1 0 0 0 0

    0 0 0 − u2 + 1

    2 0 01 0 0 0 0 0

    ,

  • 182 VII. Structure d’un endomorphisme

    avec L = V8, et

    L−1 = W8 =

    1 0 0 9 0 41 + u0 1 0 u 0 6u+ 4

    u+ 85

    4u3 − 3u2 + 4u− 4325 1 14

    −u+ 15 58

    0 0 0 1 0 0

    1 −2 (u2 + 1)

    5 0 8 1 400 0 0 −1 0 1

    .

    Exprimé sur la base (w1, . . . , w6) de Q[u]6 formée par les colonnes de W8,l’endomorphisme ψ = uIn−ϕ est représenté par la matrice A8, donc l’imagede ψ est égale à

    Q[u]w1⊕Q[u]w2⊕(u4+2u2+1)Q[u]w3⊕Q[u]w4⊕(u2+1)Q[u]w5⊕Q[u]w6.

    Or, l’espace vectoriel Q6, vu comme Q[u]-module via l’action de ϕ, estisomorphe à Cokerψ.Donc, lorsque l’on substitue F à u, les vecteurs w1, w2, w4, w6 serontcertainement évalués nuls, les vecteurs w3 et w5 seront évalués non nuls, etle système

    B =(w3, ϕ(w3), ϕ2(w3), ϕ3(w3), w5, ϕ(w5)

    )sera une base de Q6 par rapport à laquelle l’endomorphisme ϕ est lamatrice G donnée au départ, en forme réduite de Frobenius pour les poly-nômes (u2 + 1)2 et u2 + 1. C’est ce qui est confirmé par le calcul. La base Best donnée par les colonnes de la matrice Q suivante :

    Q =

    0 −5 −10 0 1 −2

    0 0 5 −10 0 2

    1 −8 −21 18 95 −325

    0 0 −10 −5 0 −2

    0 −5 0 5 2 −1

    0 0 10 5 0 3

    .

    Et le calcul donne bien le résultat attendu Q−1 F Q = G : en effet, lesmathématiques de Q[u] ne sont pas contradictoires, et le logiciel de calculformel exécute correctement les algorithmes fournis par notre théorie.

    Remarques1) La matrice de passage obtenue est (( bien meilleure )) que celle donnéepar Maple, du moins si l’on prend comme critère la taille des coefficients.2) Notre exemple a été fabriqué avec une matrice de passage dans SL6(Z),mais nous n’avons pas récupéré un aussi bon résultat. De façon générale,

  • §4. Géométrie d’un endomorphisme, premiers pas 183

    c’est un problème difficile de déterminer s’il existe une matrice de passagedans SLn(Z) pour ramener une matrice de Mn(Z) à sa forme de Frobeniussur Q.

    4. Géométrie d’un endomorphisme, premierspas

    Une fois que l’on sait que deux endomorphismes d’un espace vectoriel dedimension finie sont semblables si, et seulement si, ils ont les mêmes inva-riants de similitude, donc la même forme réduite de Frobenius, il sembleque l’essentiel soit dit en terme de géométrie d’un endomorphisme.Cette section et les suivantes montrent qu’il faut modérer cet enthousiasmeet qu’il y a encore beaucoup de belles choses à découvrir. Nous auronsbesoin pour cela de quelques outils classiques, que nous introduirons au furet à mesure de nos besoins.

    Dans cette section et les suivantes, K désignera toujours un corps et A unanneau commutatif.Pour exécuter sans risque les algorithmes proposés, il est nécessaire quela disjonction (( x = 0 ou ∃y avec 1 = xy )) soit explicite sur le corps Kconsidéré. Ce n’est par exemple pas le cas avec le corps des réels ou celui descomplexes, comme le savent bien celles qui pratiquent l’analyse numérique.

    Commentaire. Les théorèmes 2.1 et 2.5 ramènent l’étude de l’endomorphis-me ϕ de V à celle du K[X]-module Vϕ. Le lecteur pourra vérifier que dans lasuite du chapitre, la plupart des énoncés ont une forme équivalente plus géné-rale qui s’applique à n’importe quel module de présentation finie de torsiond’un anneau principal. Il faut seulement traduire certaines expressions dansles énoncés où interviennent des endomorphismes g(ϕ), depuis le langagedes K-espaces vectoriels vers le langage de K[X]-modules :– le sous-espace stable W est traduit en (( le sous-module W )) ;– le polynôme minimal de v pour ϕ est traduit en (( l’idéal annulateurde v )), c’est-à-dire (0V : v)K[X] ;

    – l’endomorphisme g(ϕ) est traduit en (( l’homothétie v 7→ g · v )) ;– le sous-espace stable Ker g(ϕ) est traduit en (( le sous-module annulateurde g )), c’est-à-dire (0V : g)V ;

    – le sous-espace stable Im g(ϕ) est traduit en (( le sous-module g · V )) ;– etc.

  • 184 VII. Structure d’un endomorphisme

    Restriction et extension du corps de baseL’algorithme qui construit une base pour la forme normale de Frobeniusd’un endomorphisme ϕ de V ' Kn est un algorithme (( rationnel )) : il partd’une matrice A de ϕ sur une base arbitraire de V , et construit une nouvellebase en utilisant uniquement les opérations arithmétiques du corps et le testà 0. En conséquence, si K1 est le corps engendré par les coefficients de A,tous les calculs se passent dans K1. Les invariants de similitude (f1, . . . , fk)sont des éléments de K1[X], et si K0 est le corps engendré par les coefficientsdes fi, ce corps K0 est le plus petit sous-corps de K sur lequel on puissetrouver une matrice qui possède les mêmes invariants de similitude.Le fait que les invariants de similitude caractérisent le type de ϕ à conjugai-son près (le type d’isomorphisme de ϕ) admet donc la conséquence facile,mais importante, suivante.

    4.1. Théorème. (Similitude et extension du corps de base)Soient A et B deux matrices dans Mn(K) et soit K1 le sous-corps engendrépar les coefficient de A et B. On considère enfin un surcorps arbitraire Lde K1. Alors, les propriétés suivantes sont équivalentes.1. Les matrices A et B ont les mêmes invariants de similitude.2. Les matrices A et B sont semblables sur K1

    (i.e. conjuguées par un

    élément P de GLn(K1)).

    3. Les matrices A et B sont semblables sur K.4. Les matrices A et B sont semblables sur L.

    Endomorphismes de petit rang et forme de FrobeniusLa matrice compagne Mf d’un polynôme f(X) = Xr −

    ∑r−1j=0 ajX

    j dedegré r est de rang r si f(0) 6= 0, et de rang r − 1 si f(0) = 0, car on a4 :

    Mf =

    0 · · · · · · · · · 0 a01

    . . .... a1

    0. . . . . .

    ......

    .... . . . . . . . .

    ......

    .... . . . . . 0 ar−2

    0 · · · · · · 0 1 ar−1

    .

    Nous notons (f1, . . . , fk) les invariants de similitude de A ∈Mn(K)(5). Laremarque initiale nous donne les résultats suivants.

    4. La réduction de Frobenius implique en particulier que le degré du polynôme minimalde A, qui est la taille du dernier bloc, est majorée par 1 + rg(A).

    5. Avec f1 | · · · | fk et fk est le polynôme minimal νA.

  • §4. Géométrie d’un endomorphisme, premiers pas 185

    1. Si rg(A) = 1 et n > 2, on a (f1, . . . , fk) = (X, . . . ,X,X2 − aX) ; deplus, le scalaire a n’est autre que la trace. On constate ainsi que deuxmatrices de rang 1 sont semblables si, et seulement si, elles ont mêmetrace. Notons enfin que la matrice A de rang 1 est diagonalisable si, etseulement si, sa trace est non nulle.

    2. Si rg(A) = 2 et n > 3, les premiers fi sont égaux à X, et les autresinvariants de similitude sont ou bien (X2 − aX,X2 − aX), ou bien(X3 − aX2 − bX). En particulier, la classe de similitude de A est ca-ractérisée par n et νA. Autrement dit, deux matrices de Mn(K) derang 2 sont semblables si, et seulement si, elles ont le même polynômeminimal.

    3. Si rg(A) = 3 et n > 4, les premiers fi sont égaux à X, et les autresinvariants de similitude sont ou bien (X2−aX,X2−aX,X2−aX), oubien

    (X2 − aX, (X2 − aX)(X − b)

    ), ou bien (X4 − aX3 − bX2 − cX).

    Dans le cas où le polynôme minimal est de degré 2 ou 4, il caractérisepour de telles matrices leur classe de similitude. En revanche, lorsquele polynôme minimal est degré 3, il y a ambiguïté entre les deux cas(X(X − a), X(X − a)(X − b)

    )et(X(X − b), X(X − a)(X − b)

    ).

    Remarque. Si l’on note ϕ̂ l’endomorphisme induit par ϕ sur son imageIm(ϕ), on a clairement νϕ̂(ϕ)

    (ϕ(v)

    )= 0 pour tout v ∈ V , de sorte que

    νϕ(X) divise Xνϕ̂(X). En conséquence, le polynôme minimal de ϕ est égalau polynôme minimal de ϕ̂ ou bien au produit de ce dernier par X. Onretrouve en particulier que le degré de νϕ(X) est au plus 1 + rg(ϕ).

    Critère de diagonalisabilité4.2. Théorème. Pour qu’un endomorphisme ϕ soit diagonalisable, il fautet suffit que son polynôme minimal soit un produit sans carré de facteurslinéaires.Démonstration. La condition est clairement nécessaire. Si elle est réalisée, etle polynôme minimal égal à

    ∏ri=1(X−ai) (avec les ai deux à deux distincts),

    le lemme des noyaux nous dit que V est somme directe des Ker(ϕ− aiIdV ),c’est-à-dire somme directe des sous-espaces propres. �Remarque. Voici une autre démonstration, nettement plus savante, qui nesemble pas utiliser le lemme des noyaux même de manière cachée.Considérons les invariants de similitude f1, . . ., fk, le dernier étant égal aupolynôme minimal. Si fk =

    ∏ri=1(X−ai) (avec les ai deux à deux distincts),

    on a nécessairement fj =∏i∈Lj (X − ai) avec ∅ 6= L1 ⊆ · · · ⊆ Lk = J1..rK.

    Alors, ϕ admet les mêmes invariants de similitude que la matrice diagonalequi admet le même polynôme caractéristique que ϕ (voir l’exercice 5). Lesdeux matrices sont donc semblables, et donc ϕ admet une base de vecteurspropres.

  • 186 VII. Structure d’un endomorphisme

    5. Utilisation du lemme des noyauxRappelons le lemme des noyaux V-5.8, valable pour tout anneau A ettout A-module V .Lemme des noyaux. Soit ϕ un endomorphisme du A-module V et soitp∈A[X] un polynôme vérifiant p(ϕ) = 0. On suppose que p=p1× · · ·×p`,avec les pi deux à deux comaximaux.Notons Ki = Ker

    (pi(ϕ)

    ), qi =

    ∏j 6=i pj et Li = Ker

    (qi(ϕ)

    ). Alors, on a les

    résultats suivants.

    1. Le A-module V se décompose comme somme directe des sous-modules Ki,et plus précisément

    V =⊕`

    j=1 Kj , Ki = Im(qi(ϕ)

    ), Li = Im

    (pi(ϕ)

    )=⊕

    j 6=iKj .

    2. Pour chaque i, le sous-module Ki est stable par ϕ ; de plus, si ϕi estl’endomorphisme induit par ϕ sur Ki, on a pi(ϕi) = 0.

    3. Pour chaque i, la projection πi sur Ki parallèlement à la somme directedes autres Kj s’exprime comme un polynôme en ϕ.

    4. Tout sous-module N stable par ϕ est somme directe des modules Nidéfinis par Ni = N ∩Ki.

    Rajoutons les précisions suivantes concernant les invariants de similitudedans le cas d’un endomorphisme ϕ de V ' Kn, avec A = K[X] etle A-module Vϕ.

    5.1. Lemme. Dans le lemme des noyaux précédent, si h = νϕ (le polynômeminimal) et h = h1× · · ·×h`, on a hi = νϕi pour chaque i. En outre, lepolynôme caractéristique est donné par l’égalité χϕ =

    ∏`j=1 χϕj .

    Démonstration. Concernant les polynômes minimaux νϕi ils sont deux àdeux étrangers car ils divisent les hi ; donc leur ppcm, qui est égal à νϕ, estégal à leur produit. Enfin, l’égalité

    ∏`j=1 hj =

    ∏`j=1 νϕj force les égalités

    des facteurs hj = νϕj .Quant à l’égalité χϕ =

    ∏`j=1 χϕj , elle résulte du calcul du déterminant d’une

    matrice diagonale par blocs. �

    5.2. Lemme. On reprend les notations ci-dessus avec h = νϕ.Si (f1, . . . , fk) est la liste des invariants de similitude de ϕ, alors, pourchaque i ∈ J1..`K, la liste des invariants de similitude de ϕi est donnée par(

    pgcd(hi, f1), . . . , pgcd(hi, fk)),

    en supprimant les 1 qui se trouvent éventuellement au début de la liste.Démonstration. Voir l’exercice VI-9. �

  • §5. Utilisation du lemme des noyaux 187

    Factorisation partielle d’une famille de polynômesOn rappelle que l’algorithme d’Euclide permet de calculer le pgcd unitairede deux polynômes unitaires dans K[X] lorsque K est un corps.

    5.3. Proposition et définition. On dispose d’un algorithme de factori-sation partielle pour les familles finies de polynômes unitaires dans K[X] :une factorisation partielle pour une famille finie (f1, . . . , fr) est don-née par une famille finie (g1, . . . , gs) de polynômes unitaires deux à deuxétrangers et par l’écriture de chaque fi sous la forme

    fi =∏s

    k=1gmk,ik (mk,i ∈ N).

    La famille (g1, . . . , gs) s’appelle alors une base de factorisation partiellepour la famille (f1, . . . , fr).Démonstration. Si les fi sont deux à deux étrangers, il n’y a rien à faire.Sinon, supposons par exemple que l’on ait

    pgcd(f1, f2) = h0, f1 = h0h1 et f2 = h0h2 avec deg(h0) > 1.On remplace la famille (f1, . . . , fr) par la famille (h0, h1, h2, f3, . . . , fr). Onnote que la somme des degrés a diminué. On note aussi que l’on peutsupprimer dans la liste les polynômes égaux à 1, ou les occurrences multiplesd’un même polynôme (tous les polynômes sont unitaires).L’algorithme procède par étapes. Il consiste à examiner si toutes les pairesdans la liste fournie à l’étape précédente sont étrangères. Si ce n’est pas lecas, on fait subir à une paire non étrangère de la liste le traitement indiquéjuste avant pour la paire (f1, f2). Comme la somme des degrés diminue àchaque étape, l’algorithme aboutit au résultat souhaité en un nombre finide calculs. �

    Remarque. La lectrice est invitée à écrire, dans son logiciel de calcul formelpréféré, un algorithme qui prend en entrée une liste (f1, . . . , fr) arbitraire,et qui donne en sortie, d’une part la liste (g1, . . . , gs), et d’autre part lamatrice formée par les entiers mk,i (k ∈ J1..sK, i ∈ J1..rK).

    Se ramener au cas où les invariants de similitude sontdes puissances d’un même polynômeDans le cas où V = Kn et ϕ ∈ EndK(Kn), on peut calculer la liste desinvariants de similitude6 (f1, . . . , fk). On peut calculer ensuite une base defactorisation partielle7 (h1, . . . , h`) pour (f1, . . . , fk).

    6. En particulier, fi divise fi+1 et fk est le polynôme minimal de ϕ.7. Si le corps est parfait, ou si sa caractéristique est supérieure à tous les deg(fi), on

    peut même calculer une (( factorisation sans carrés )) (voir l’exercice 7.11). Si le corpspossède un algorithme de factorisation totale des polynômes, on peut aussi prendrepour hi les facteurs irréductibles du polynôme minimal.

  • 188 VII. Structure d’un endomorphisme

    Il est clair que tous les hj figurent avec un exposant > 1 dans fk. Lepolynôme minimal fk = νϕ annule ϕ et divise une puissance de

    ∏`i=1 hi.

    Ainsi, nous obtenons la décomposition suivante en appliquant le lemme desnoyaux.

    5.4. Lemme. À partir de la matrice de ϕ, on peut calculer des polynômes hiet des entiers mi > 0 qui satisfont les propriétés suivantes.

    1. Les hi sont deux à deux étrangers, et νϕ =∏`i=1 h

    mii .

    2. V = K1 ⊕ · · · ⊕K` avec Ki = Kerhmii (ϕ) = Kerhni (ϕ).3. En notant ϕi l’endomorphisme de Ki induit par ϕ, les invariants de

    similitude de ϕi sont tous des puissances de hi.Démonstration. Seul le point 3 demande une explication. Or, il résulteclairement du lemme 5.2. �

    On notera que le calcul proposé avant l’énoncé est rationnel, au sens où il sedéroule entièrement dans le corps engendré par les coefficients de la matricede ϕ.Les endomorphismes satisfaisant à l’hypothèse du corollaire qui suit sont lesendomorphismes semi-simples dont l’étude sera poursuivie dans la section 7.

    5.5. Corollaire. Supposons que le polynôme minimal de ϕ ne soit divisiblepar aucun carré (de degré > 1). Alors, à partir de la matrice de ϕ, on peutcalculer des polynômes hi qui satisfont les propriétés suivantes.1. Les hi sont deux à deux étrangers, et νϕ =

    ∏ri=1 hi.

    2. V = K1 ⊕ · · · ⊕K` avec Ki = Kerhi(ϕ).3. On note ϕi l’endomorphisme de Ki induit par ϕ, et Ki l’anneau K[ϕi],

    qui est isomorphe à K[X]/〈hi〉. Alors, chaque Ki est un Ki-modulelibre.

    Démonstration. Seul le point 3 demande une explication. Par construction,les invariants de similitude de ϕi sont tous égaux à hi. Cela signifie que ϕiest représenté par une matrice diagonale par blocs, avec chaque bloc égalà Mhi . S’il y a ri blocs, cela signifie que Ki est un Ki-module libre derang ri. �

    6. Endomorphismes cycliques et sous-espacesstables

    Un endomorphisme ϕ de V ' Kn est dit cyclique si le K[X]-module Vϕest cyclique. Des propriétés équivalentes sont les suivantes.

    – Il y a un x ∈ V tel que K[ϕ] · x = V .

  • §6. Endomorphismes cycliques et sous-espaces stables 189

    – La matrice de ϕ sur une K-base de V est semblable à la matricecompagne de son polynôme caractéristique χϕ.

    – L’endomorphisme ϕ n’a qu’un seul facteur invariant.– Le polynôme minimal est égal au polynôme caractéristique : χϕ = νϕ.

    Pour un endomorphisme ϕ arbitraire, mais fixé par le contexte, un sous-espa-ce vectoriel stable W de V est dit cyclique si l’endomorphisme de W induitpar ϕ est cyclique ; autrement dit, si Wϕ est un K[X]-module cyclique.L’existence d’une forme normale de Frobenius pour un endomorphismearbitraire implique entre autres que V est une somme directe de sous-modules cycliques.

    6.1. Lemme. Le fait qu’une matrice carrée représente un endomorphismecyclique est indépendant du (( corps de base )) considéré (la seule contrainteest que ce corps doit contenir les coefficients de la matrice).Démonstration. Les deux polynômes χϕ et νϕ ne dépendent pas du corps debase considéré, et leur égalité caractérise les endomorphismes cycliques. �

    Nous allons nous intéresser aux sous-espaces stables de V lorsque l’endomor-phisme ϕ est cyclique. Cela a déjà été largement traité dans l’exercice V-15.Il y est question d’un domaine de Bezout A, d’un élément a ∈ A∗ et de ladescription des sous-A-modules de type fini de A et de A/〈a〉. Dans notrecadre, il faut prendre

    A = K[X], a = χϕ, et V = K[ϕ] · x ' K[X]/〈χϕ〉= A/〈a〉 .Voici, à très peu près, ce que l’on a écrit dans la correction de l’exercice.On sait que les sous-A-modules de type fini de A (i.e. les idéaux de typefini de A) sont tous de la forme cA, et que l’idéal cA détermine de manièreunique la classe de c modulo l’association (dans A/A×).En outre, cette bijection de A/A× vers l’ensemble des idéaux de type finide A transforme ppcm, pgcd et produit en intersection, somme et produit.On en déduit qu’il y a une correspondance bijective entre les diviseursde a (vus dans A/A×) et les sous-A-modules de type fini de A/〈a〉. Cettebijection transforme ppcm et pgcd en intersection et somme, et fonctionnecomme suit

    b diviseur de a ←→{b (A/〈a〉) ' bA/aAsous-A-module de type fini de A/〈a〉.

    À gauche, on voit b comme un élément de A/A× : seule compte la classed’équivalence de b pour la relation d’association. Si a = bc, on a, en identi-fiant V et A/〈a〉 d’une part, x et la classe de 1 dans A/〈a〉 d’autre part :

    (0V : bx)A = cA, (0V : b)V = c (A/〈a〉) = A cx et b (A/〈a〉) ' A/〈c〉 .Nous donnons maintenant la transcription de ces résultats dans le contexteprésent.

  • 190 VII. Structure d’un endomorphisme

    6.2. Fait. Soit ϕ un endomorphisme cyclique d’un K-espace vectoriel V dedimension n et soit x ∈ V tel que V = K[ϕ] · x.1. Tout sous-espace stable W de type fini s’écrit f · V = K[ϕ] · (f · x),

    pour un (unique) diviseur unitaire f du polynôme caractéristique χϕ.En particulier, W est un sous-espace cyclique.

    2. En notant g = χϕ/f , on a dimW = deg g et plus précisément,W = Im f(ϕ) = Ker g(ϕ) et νf ·x,ϕ = g.

    3. L’application f 7−→ f · V est une bijection entre les diviseurs unitairesde χϕ et les sous-espaces vectoriels stables de type fini.

    4. Cette bijection transforme pgcd et ppcm en somme et intersection.Remarque. Le lecteur a sans doute été un peu surpris par l’énoncé despoints 1 et 3, car l’on omet en général la précision selon laquelle le sous-espace vectoriel doit être de type fini. Tous les sous-espaces vectoriels d’unespace vectoriel de dimension finie sont en effet réputés avoir une base.Mais il n’est pas vrai que l’on sache construire une base (ou, ce qui revientici au même, un système générateur fini) pour un sous-espace vectoriel(( arbitraire )) d’un espace vectoriel donné de dimension finie. Ainsi, lorsquel’on omet cette précision, on perd le caractère algorithmique du résultat.En bref, pour un sous-espace vectoriel stable (( arbitraire )), personne ne saitconstruire le diviseur f de χϕ correspondant.

    Nouvelles formes réduitesNous donnons maintenant une description purement matricielle des pro-priétés énoncées dans le fait 6.2.Examinons tout d’abord ce qui se passe lorsque χϕ = fg, pour deux poly-nômes unitaires de degrés d et ` > 1. Nous notons B`,d la matrice suivante :

    B`,d =0 10 0 ∈M`,d(K).

    6.3. Fait. Si ϕ est cyclique avec χϕ = fg, si deg(f) = d > 1 et si deg(g) = ` > 1,alors on a des formes réduites de matrices comme suit.1. Sur une base convenable, l’endomorphisme ϕ admet pour matrice

    Mf 0

    B`,d Mg,

    et l’on a– Ker g(ϕ) = Im f(ϕ) et Ker f(ϕ) = Im g(ϕ) ;– dimK Ker g(ϕ) = deg(g) et dimK Ker f(ϕ) = deg(f).

  • §6. Endomorphismes cycliques et sous-espaces stables 191

    2. Si f et g sont étrangers, on a V = Ker g(ϕ)⊕Ker f(ϕ), et l’endomor-phisme admet également (sur une base différente) la matrice

    Mf 0

    0 Mg

    .

    3. Si y ∈ V et νy,ϕ = g, alors K[ϕ] · y = Ker g(ϕ) = Im f(ϕ).

    Démonstration1. Considérons une base (x1, . . . , xn) sur laquelle la matrice de ϕ est lamatrice compagne Mfg. On a xi+1 = X · xi = ϕ(xi) pour i < n.Notons d = deg(f) et écrivons f(X) = Xd −

    ∑d−1j=0 ajX

    j .Considérons un nouveau système (y1, . . . , yn) défini comme suit :– y1 := x1, . . ., yd := xd = X · yd−1 ;– yd+1 := f · y1 = f(ϕ)(y1) = xd+1 −

    ∑d−1j=0 ajxj+1

    = X · yd −∑d−1j=0 ajyj+1,

    de sorte que ϕ(yd) = X · yd = yd+1 +∑d−1j=0 ajyj+1 ;

    – yd+2 := X · yd+1, . . ., yn := X · yn−1.Par construction, chaque yk s’exprime sous la forme xk +

    ∑k−1`=1 bk,`x`, donc

    le nouveau système est une base triangulaire par rapport à la précédente.Et, il est clair que la matrice de ϕ par rapport à cette nouvelle base est lamatrice annoncée, puisque g · yd+1 = g · (f · y1) = (g · f) · x1 = 0.Les matrices de f(ϕ) et g(ϕ) pour cette base sont alors de la forme

    f(ϕ) :0 0

    D f(Mg)

    et g(ϕ) :g(Mf ) 0

    C 0

    ,

    ce qui montre que dim Ker g(ϕ) > ` et dim Im f(ϕ) 6 `. Comme les deuxespaces sont égaux8 (fait 6.2), ils sont de dimension `.Même chose pour Ker f(ϕ) et Im g(ϕ).

    8. Pour la lectrice sceptique, voici de nouveau l’argument, précisé dans le contexteprésent. D’une part, f ·V = Im f(ϕ) est contenu dans Ker g(ϕ), car g · (f ·V ) = gf ·V = 0.D’autre part, soit y ∈ Ker g(ϕ). Puisque ϕ est cyclique, écrivons y = h · x et montronsque y ∈ f · V . En effet, g(h − f) · x = g · y − gf · x = 0, donc g(h − f) est multiplede νx,ϕ = gf , donc h− f est multiple f , donc h = fq et y = f · z pour z = q · x.

  • 192 VII. Structure d’un endomorphisme

    2. D’après le lemme des noyaux, on aV = Ker f(ϕ)⊕Ker g(ϕ) = K1 ⊕K2.

    D’après le point 1, dim(K1) = deg(f) et dim(K2) = deg(g). Notons ϕ1et ϕ2 les endomorphismes de ces sous-espaces induits par ϕ. Le polynôm