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Maurizio Cilli refiguration drômoise réécrire le Palais Idéal 1 - 20

Maurizio Cilli - le pages de réécrire le Palais Idéal 1 - 20

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refiguration drômoise 1 - 20 Maurizio Cilli 2 réécrire le Palais Idéal 2009 - 2011 Installation d’un Serveur Bluetooth dans le jardin de Hauterives Proposition de projet de Maurizio Cilli. 3 4

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Maurizio Cilli

refiguration drômoise

réécrire le Palais Idéal

1 - 20

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Ô

réécrire le Palais Idéal

Installation d’un Serveur Bluetooth dans le jardin de Hauterives

2009 - 2011

Proposition de projet de Maurizio Cilli.

Programme interrégional de soutien à la production artistique Piémont-Rhône-Alpes. Bourse de recherche et production.

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réécrire le Palais Idéal est une des actions dont se compose un projet plus général de Maurizio Cilli:

refiguration drômoise

Musée international de la Chaussure, Rue Bistour à Romans, Drôme exposition du 10 février au 15 avril 2012.

refiguration drômoise

è un progetto curato e coordinato da Sylvie Vojick art3 – art contemporain 8 rue Sabaterie 26000 - Valence L’artiste a bénéficié du programme de résidences de recherche et de production soutenu par la région Rhône-Alpes et le Piémont en partenariat avec a.titolo. Avec l’aide spécifique de la région Rhône-Alpes du département de la Drôme (aide à la création), de la Ville de Romans Fondation CRT di Torino

En collaboration avec le Palais Idéal du Facteur Cheval à Hauterives.

Maurizio Cilli, C.so Casale n° 12 – 10131 – Torino, Italia. [email protected] - +39 3474210989

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Cahier réalisé à la main, par Maurizio Cilli en 4 exemplaires pour l’édition de la boîte de l’oracle – réécrire le Palais Idéal

exemplaire N° / 4

Turin, janvier 2012

Maurizio Cilli, C.so Casale n° 12 – 10131 – Torino, Italia. [email protected] - +39 3474210989

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L’auteur tient à remercier chaleureusement Silvie Vojik qui a dirigé l’ensemble du projet refiguration drômoise pour Art3 Valence .

Mes remerciements s’adressent aussi à Rebecca Rossati pour ses nombreux conseils,

à Hector Rinaldi et à la Gear

sans lesquels je n’aurais pu définir les aspects techniques du Serveur Bluetooth.

Un remerciement tout particulier à Hélène Leng pour son dévouement et son précieux travail de traduction et de révision des textes,

et une affecteuse pensée à la mémoire d’Evelina Calvi qui fut la première à me raconter l’histoire du

facteur Cheval.

Furent enfin déterminantes dans la mise en œuvre de ce travail de recherche, les pages du livre « Le Palais Idéal du Facteur Cheval - Quand Le Songe Devient Réalité »

de Jean Pierre Jouve, Claude Prévost, Clovis Prévost, Editions ARIE -1994, sans lesquelles je n’aurais pu saisir, dans toute sa complexité, la valeur et la beauté du Palais Idéal.

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refiguration drômoise

Le projet refiguration drômoise réalisé dans le cadre de la résidence de recherche et production,

soutenu par la région Rhône-Alpes et le Piémont permet de développer des

propositions artistiques liées à des questions de territoires à l’échelle des deux régions. Ce projet vient

au terme de différents séjours qui ont ponctué le temps de recherche que Maurizio Cilli

a orienté dans la Drôme des Collines en étudiant particulièrement le Palais Idéal du facteur Cheval à

Hauterives. Maurizio Cilli, architecte de formation, a associé sa démarche aux outils théoriques de Paul

Ricoeur, fil conducteur qui lui a permis d’appréhender le monument singulier de Cheval, en écho

à un travail sur le territoire de la Drôme des collines (son histoire, sa géographie, sa géologie). Le

projet refiguration drômoise s’élabore en trois étapes.

Une phase de préfiguration dans la constitution « d’un fonds » bibliographiques et iconographiques, qui

permet une connaissance du territoire.

La seconde phase est la mise en place d’une série d’actions et d’oeuvres qui font appel à une

interprétation de la construction de la mémoire et sa mise en « récit ». La dernière phase de

refiguration est la restitution de l’ensemble des éléments qui composent l’exposition. Pensée pour

l’espace du Musée de Romans, l’exposition présente des interventions minimales composées de

photographies, de dessins, et de collages, des collections bibliographiques et iconographiques. Le projet

permet d’entrer dans un espace poétique construit à partir d’une lecture du paysage de la Drôme

historique et social.

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Préface

Le travail proposé vise à offrir une réflexion autour de laquelle se dessinent les coordonnées d'un

champ d'observation interprétatif inédit de l'héritage culturel du Palais Idéal et de la vie de son facteur

bâtisseur.

Il ne s'agit pas d'une recherche proprement scientifique qui relève des méthodologies canoniques de

compréhension de l'Histoire, l'intention, ici, est de proposer une reconstruction documentaire et

philologique des sources.

C’est plus une lecture biaisée et arbitraire, animée par la curiosité et la séduction, que l'unicité et

l’apparente absence d’explications des raisons qui soustendent une possible interprétation que cette

Œuvre vive a exercée sur moi.

Bien qu’ayant beaucoup lu, peut-être toutes les histoires écrites au sujet de Ferdinand Cheval et de son

palais imaginaire, j'éprouve encore le sentiment de ne pas être en mesure de trouver des réponses

définitives pour combler pleinement ma fascination.

Je perçois toujours les contours d'une affaire encore ouverte, qui, par son degré de complexité, envoie

sans cesse des signaux qui, peu a peu, concourent à tracer la voie, parfois subtile et floue, autour de

laquelle s’amoncellent l'un après l'autre de petits événements, vers lesquels il arrive de se sentir très

attiré, voire accroché, empêtré dans des histoires, et qui, à l’improviste, conduisent chacun de nous à

croire avoir croisé son destin.

Le présent du passé est la mémoire, le présent de l’avenir est l’attente

Je considère le Palais Idéal comme une Œuvre vive car je lui attribue la valence de monument

paradigme de l'espace qui se fait temps, un lieu mental dans lequel le temps semble être condensé.

Une masse énorme, dénuée, ou presque, de planification apparente, échappée au contrôle des

proportions entre ses parties, engendrée d’un processus constructif incrémental, par des stratifications

successives dont chacune revendique son rôle dominant, rendant la composition difficilement

définissable, de caractère obsessionnel, enchevêtrement inextricable, scénario profond dans lequel

chaque chose semble se projeter au premier plan.

Un univers animé par des figures qui paraissent rappeler les forces obscures de l'inconscient humain,

l’œuvre d'un homme simple qui semble puiser ses forces à la source d'un désir mystérieux, du besoin

profond de construire le témoignage concret de ses connaissances et de son passage sur terre.

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Un acte solitaire, contre l'oubli et contre la mort, injustifiable et pressant, fou et violent, la tentative

ultime de vaincre l'horror vacui de l'existence.

D’où mon désir de chercher à libérer ce curieux édifice du théâtralisme déroutant et inquiétant de son

créateur, de la moralité encombrante de ses nombreuses inscriptions ; mon désir de tourner le regard

vers un horizon différent, un contexte plus vaste, autrement dit de proposer un autre niveau de lecture,

par fragments, visant à isoler les frêles traces de beaucoup d'autres histoires à raconter.

L’esprit et les intentions de ce travail résident donc précisément dans la volonté d'enquêter, de collecter

et d'organiser les indices offerts par cette complexité narrative, d'en identifier les valeurs universelles,

de donner une voix à sa mémoire identitaire.

Hauterives Drôme - Temple de la Nature

Le Palais Idéal est une œuvre fragile, bâtie sans fondations. L’amalgame de ses matériaux est pauvre,

un mélange élémentaire fait d'eau, de sable et de pierres de la Galaure, la petite rivière qui coule au sud

de Hauterives.

La terre, les pierres, l'eau, les arbres, des animaux petits et grands, des figures incertaines, des têtes,

composent une sculpture hétérogène, des formes mentales imprégnées de naïveté et de douceur, une

animalité primitive qui sait évoquer l’amour pour la simple beauté de la nature.

Chaque élément et figure nous rend les contours d'un environnement connu, les paysages d'un territoire

à portée de main qui contraste avec les personnages et les formes d'un monde seulement imaginé.

Ainsi la nature, les champs, les bois, les arbres, les berges, les rivages, les eaux des rivières, les

villages, les villes, les églises romanes, les châteaux, les ruines, les histoires et la vie de la Drôme des

Colinnes, ce qui donc fait partie, jour après jour, de la tournée du Facteur, est associé aux figures

séduisantes qui animent les pages de ses lectures, notamment des magazines populaires de

vulgarisation scientifique et géographique, le Magasin pittoresque, le Monde illustré, la Revue des

Deux Mondes.

Le résultat de cette combinaison est un espace engendré par un entrelacement, une tresse narrative

suspendue entre l'histoire, la mémoire, l'expérience et les formes de la vie quotidienne, soudainement

corrompue par la séduction qu’exerce un imaginaire exotique, fait d’attentes et de personnages qui

viennent du passé, de civilisations et de lieux lointains.

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réécrire le Palais Idéal

Cette œuvre s’inscrit dans un plus vaste contexte d’activités artistiques du projet et elle propose au

spectateur un jeu interprétatif par lequel l’on entend proposer l'expérience de l’écart perceptif.

A travers l’œuvre on veut reconnaître au Palais Idéal un espace de vie propre et la possibilité d’entrer

en relation directe avec les visiteurs.

Réécrire le Palais Idéal permet, une fois qu’on a franchi le seuil du jardin de Hauterives, de se mettre

à l’écoute et d’instaurer un dialogue avec le monument.

De très nombreuses pages de récit, annotations, évocations, références, intuitions, données statistiques,

chroniques, élaborées et présentées sous forme de messages de texte avec images, fichiers son et vidéo

sont envoyées via Bluetooth aux portables des visiteurs.

Il est ainsi proposé au visiteur une approche d'identification menée à rebours, par soustraction, dans un

parcours perceptif et imaginaire du passé, approche engendrée par la réverbération de suggestions

provenant tant du milieu environnant que de lieux lointains dans le temps et dans l'espace.

Appeler, littéralement, les visiteurs à vivre et percevoir l'expérience d'une désorientation, à se sentir sur

place tout en étant appelé ailleurs, en les conduisant à la reconnaissance des valeurs universelles de la

mémoire, de l'absent qui a été, le précédent, l'antérieur.

Le monument affirme ainsi sa vitalité expressive et sa vocation narratrice en adressant aux visiteurs des

sollicitations continuelles qui évoquent une pluralité d’appartenances.

Réécrire le Palais Idéal entend libérer le monument de son image englobante en offrant une

interprétation polyphonique inédite de langages et significations.

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Sommaire des détails techniques de l’installation

La réalisation technique du projet prévoit :

- l'installation sur le monument et dans le jardin environnant d’un Serveur Bluetooth pour

communiquer avec les visiteurs, invités à l’accueil du site à activer cette modalité de réception sur leur

téléphone mobile.

Le Serveur est composé d'un logiciel à distance, chargé dans l'un des ordinateurs des bureaux de la villa

Alicius, en mesure de gérer le calendrier de livraison de pages de contenus en fichiers de différents

formats :

texte (.txt)

fichiers sonores (.mp3, waw, midi)

fichiers image (.gif, .jpg, .png)

fichiers vidéo (3gp, mpeg4)

vCal, vCard,

logiciels Java (.jar, .jad),

WML deck

Le Serveur envoie les messages à travers une série de dispositifs de réception et transmission alimentés

en réseau, enfermés dans des boitiers étanches de dimensions contenues et non invasives, à installer sur

le monument ou bien le long du parcours dans le jardin.

Le système permet d'envoyer les messages, les pages, suivant différentes modalités :

- configurer un message de bienvenue ;

(Souhaitez-vous recevoir les contenus de l'œuvre « Réécrire le Palais Idéal » ?)

- gérer l’ordre de distribution selon un chargement prédéfini ou aléatoire ;

- déterminer la portée du dispositif ;

- gérer les créneaux horaires pour la distribution des contenus ;

- gérer le délai de réception ;

(Le nombre de secondes pendant lequel le portable peut décider de recevoir ou non le message)

- gérer le délai de la liste noire ;

(Le nombre de secondes pendant lequel le portable doit accepter le message pour ne pas rentrer

dans la liste noire, c’est-à-dire dans la liste des dispositifs qui ne seront plus contactés)

Le système permet de mettre en marche ou de modifier dans le temps chacune de ces modalités.

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Les pages de réécrire le Palais Idéal

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1. Le paysan « Les habitants du département de la Drôme sont, en général, de taille moyenne mais bien

proportionnée, leur teint est d’un brun clair, leur voix douce, leur accent net quoiqu’un peu trainant,

leurs traits sont réguliers, leur physionomie mêle douceur et vivacité, finesse et franchise. Ils sont

agiles et robustes.

Ils ont de la bienfaisance, ils sont affables, laborieux et économes; ils ont de l’esprit naturel, et se sont

toujours distingués sur les champs de bataille. »

Nicolas Delacroix

Joseph-Ferdinand Cheval né à Charmes-sur-l'Herbasse à 15 km de Romans, le 19 avril 1836 à cinq heures du matin. Fils de paysan et fils de ses oeuvres, il est resté paysan. Les parents de Joseph-Ferdinand Cheval sont de petits cultivateurs. Le 14 janvier 1834, Jean-François Cheval a épousé en seconde noce, Rose-Françoise Sibert à Crepol. Il a déjà un fils, François-Victor, né à Charmes le 18 janvier 1831 de son premier mariage avec Marie Brenier.

Un paysan est une personne tirant des ressources de la nature proche de son habitat. Il peut adopter ou subir une économie de subsistance. Il peut être amené à se déplacer d'une manière saisonnière dans d'autres "villages" vers des pâturages qui font défaut à ses bêtes, par exemple. Il façonne son environnement (et indirectement le paysage) par ses différents prélèvements, apports, aménagements, plantations, etc. Ses activités sont souvent multiples : élevage, cultures, maçonnerie, artisanat et, accessoirement, commercialisation de ses excédents de production. On ne peut pas parler de métier (« paysan » ne figure jamais dans les listes des métiers de la terre) mais plutôt de « chaîne du savoir » sur la faculté de créer un ensemble d'outils, de bâtiments, de cheptels viables pour lui et sa famille. On parle aussi de la paysannerie comme culture, mais aussi comme d'un ensemble de traditions, ayant parfois aussi des connotations politiques. De ces paysans, un métier a émergé dans certains pays : les agriculteurs professionnels, dont certains ont rompu cette « chaîne du savoir ». D'autres essaient de la maintenir, voire militent pour son enseignement.

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2. la Drôme des Collines La Drôme des Collines bénéficie d’une position centrale en Rhône Alpes. Elle se situe au carrefour de l’Isère, de l’Ardèche et de la Vallée du Rhône, avec des axes autoroutiers et ferroviaires très développés (A7, A9, gare TGV). Ce territoire dénommé Nord Drôme jusqu’à la fin des années 80 a été identifié sous le nom de Drôme des Collines suite à la volonté d’élus et d’acteurs locaux en collaboration avec le Conseil Général de la Drôme. Dès janvier 1990, son identification s’est confirmée à travers les actions de l’association Drôme des Collines dont l’objet était le développement touristique. Ce territoire s’est structuré autour de deux logiques géographiques : - Une logique nord-sud, le long du Rhône - Une logique plus urbaine autour de Romans Bourg-de-Péage. Le périmètre définitif comprenant 7 cantons (Saint Vallier, le Grand Serre, Tain l’Hermitage, L’Herbasse, Romans 1 et 2, Bourg de Péage) date de la fin des années 90. A ce jour, la Drôme des Collines regroupe 93 communes avec 85 communes drômoises et 8 communes ardéchoises réparties sur 8 communautés de communes (Communautés de communes du canton de Bourg-de-Péage, du Pays de Romans, du Pays de l’Herbasse, Rhône Valloire, Pays de l’Hermitage et de la Galaure, des 4 collines).

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3. la famille

Joseph-Ferdinand Cheval, sa seconde femme Claire-Philomène Richaud et leur fille Alice probablement en 1884. A l’encontre des conventions, Claire-Philomène se tient debout sereine et protrectrice du père et de l’enfant. Alice est la mesure du temps qui passe tandis que le Palais Idéal s’élève: elle est née au commencement de sa construction, le 11 octobre 1897.

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4. le Téméraire

J. M.W. Turner a immortalisé le dernier retour du navire le Téméraire qui, en 1805, avait participé à la bataille de Trafalgar et qui, en juin 1838 est remorqué par un bateau à vapeur le long de la Tamise pour être porté à la démolition. C’est le début de la fin de la marine marchande à voile. Les navires qui relient l’Europe aux continents américains et asiatiques convoient des marchandises en tous genres dont des plantes exotiques pour la décoration des jardins et potagers privés et publics, y compris les jardins botaniques. Ils transportent, par ailleurs, des denrées alimentaires, des semences, du guano et des pommes de terre. Originaire du Mexique et implantée depuis des millénaires où elle est amplement cultivée en Amérique du Sud par les populations des Andes, la patata, principale source d’alimentation de nos jours de part le monde, était inconnue en Europe jusqu’à ce qu’au cours du XVIe siècle, les « conquistadores » espagnols l’eurent rapportée. En moins de deux siècles, cette modeste plante devint une culture agraire d’importance tout particulièrement dans le centre et le nord de l’Europe, îles britanniques comprises. En Irlande où les conséquences d’une politique socio-économique insensée avaient porté la majeur partie de la population au bord de la famine, elle devint très rapidement la Irish potato, principale ressource alimentaire et industrielle du pays, permettant ainsi dès le début du siècle dernier, à la population de doubler - 4,5 à plus 8 millions - en l’espace de 40 ans. Entre 1843 et 1844, une maladie, la malaria, dont on suppose qu’elle fut portée par voie maritime d’Amérique du Sud par le biais des tubercules de patates, fit son apparition dans quelques régions d’Europe septentrionale (Belgique, France, Angleterre) et, de façon plus manifeste en Amérique du Nord (états nord-orientaux des Etats-Unis et Canada). Elle altérait la cime des pommes de terre et les tubercules moisissaient dans les champs et les chais, comme ravagés par la gangrène. L’étiologie de la maladie des plantes demeura obscure comme cela était souvent le cas en ces temps-là ; même dans les années qui suivirent, lorsque l’épidémie survint, une kyrielle d’hypothèses des plus fantaisistes furent avancées: de l’altération chimique aux phénomènes électriques dus au passage de locomotives bringuebalantes à travers les campagnes à la vitesse de 30km/heure ! Finalement, l’origine cryptogamique, initialement supposée par plus d’un spécialiste, reconnue par Montagne en 1845 lors d’une description de l’agent pathogène, fut confirmée expérimentalement par A. de Bary, 16 années plus tard.

Extrait du discours du Prof. ANTONIO GRANITI, Membre de l’Académie Natonale des Sciences dite des XL lors de l’inauguration de l’année universitaire, le 10 Mars 1988. Département de Pathologie Végétale, Università degli Studi, Bari

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4. la famine

Entre 1843 et 1844, une maladie, la malaria, dont on suppose qu’elle fut portée par voie maritime d’Amérique du Sud par le biais des tubercules de patates, fit son apparition dans quelques régions d’Europe septentrionale (Belgique, France, Angleterre) et, de façon plus manifeste en Amérique du Nord (états nord-orientaux des Etats-Unis et Canada). Elle altérait la cime des pommes de terre et les tubercules moisissaient dans les champs et les chais, comme ravagés par la gangrène. L’étiologie de la maladie des plantes demeura obscure comme cela était souvent le cas en ces temps-là ; même dans les années qui suivirent, lorsque l’épidémie survint, une kyrielle d’hypothèses des plus fantaisistes furent avancées: de l’altération chimique aux phénomènes électriques dus au passage de locomotives bringuebalantes à travers les campagnes à la vitesse de 30km/heure ! Finalement, l’origine cryptogamique, initialement supposée par plus d’un spécialiste, reconnue par Montagne en 1845 lors d’une description de l’agent pathogène, fut confirmée expérimentalement par A. de Bary, 16 années plus tard. Entre-temps, relégué en quarantaine aux têtes de ponts, le mildiou de la pomme de terre (Phytophthora infestans) se prépare à une attaque surprise attendant que les conditions climatiques soient pleinement réunies : une saison exceptionnellement pluvieuse et fraîche en plein été telle que fut celle de 1845. Tout d’abord en Belgique, puis en France, Hollande, Allemagne et enfin dans d’autres pays européens presque jusqu’à la Méditerranée, l’épidémie de mildiou explosa avec une violence et une vélocité rares et se développa en toutes directions ; entre juillet et septembre 1845 via l’Angleterre, il atteind l’Irlande. Dans les zones les plus touchées, les champs qui, une semaine auparavant étaient toujours verts et luxuriants, devinrent un amas de résidus moisis et malodorants ; les pommes de terre, pourrissaient sur la terre gorgée d’eau. Le désastre se répéta l’année suivante puis deux ans plus tard en 1948, année qui fut celle de la quatrième de disette en Irlande. L’épidémie s’étendit à d’autres zones européennes avec des conséquences moins dramatiques.

En France, Jean-François Millet peignit entre 1856 et 1857, la désolation des champs dévastés et l’impuissance des agriculteurs dans une œuvre célèbre « l’Angelus ».

Extrait du discours du Prof. ANTONIO GRANITI, Membre de l’Académie Nationale des Sciences dite des XL lors de l’inauguration de l’année universitaire, le 10 Mars 1988. Département de Pathologie Végétale, Università degli Studi, Bari

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4. la fille

11 ottobre 1879: naissance d’Alice-Marie-Philoméne Cheval, troisième enfant de Joseph-Ferdinand Cheval. 29 octobre 1893: naissance d’Alice-Marie-Louise Cheval à Saint-Uze, seconde fille de Joseph-Ferdinand Cheval. 2 juin 1894: décés à Hauterives de la fille ainée du Facteur, Alice-Marie-Philoméne Cheval, dans sa quinzième année. 10 avril 1917: mariage à Hauterives d’Alice-Marie-Louise Cheval, seconde fille du Facteur, avec Charles Lardant, instituteur. La noce est photographiée devant le Palais Idéal. Dernière photo connue de Joseph-Ferdinand Cheval.

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7. l’héritage

L’oncle de Joseph Cadier qui accueillit ce dernier en 1865 à Stockolm pose ici en grande tenue de franc-maçon: il porte le tablier des cérémonies rituelles marqué du sceau de Salomon et de la lettre G. ; symboles de l’homme accompli ayant accédé à la Connaissance, l’écharpe faisant de l’homme du peuple l’égal d’un gentilhomme et l’épée le symbole de la vérité agissante.

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8. La Maison des Têtes

La Maison des Têtes de Valence sise au 57, Grande Rue, est un fleuron de l'architecture du début du XVIe siècle. La façade de cet ancien hôtel particulier qui abrite le service municipal « Valence ville d'art et d'histoire », offre aux passants le foisonnement de son décor sculpté. Cette maison, marquant le passage du style gothique flamboyant au style renaissance, doit son nom aux nombreuses têtes qui ornent sa façade. Des sculptures symbolisent les vents, la fortune, le temps, ou encore la théologie, le droit ou la médecine tandis que le couloir est orné de bustes d'empereurs romains. La Maison des Têtes a été construite entre 1528 et 1532 par Antoine de Dorne, professeur à l'Université et Consul de Valence. Il décida de son édification de retour, dit-on, d'un voyage en Italie.

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9. le pain

Le Suisse de Valence est un biscuit, spécialité de la ville liée à son histoire...

Le Pape Pie VI fut envoyé en exil par le Général Bonaparte, il décède à Valence où s’écoulent deux longues années avant que ne soit autorisé le retour de sa dépouille à Rome. Pendant ce laps de temps, un détachement de Gardes Suisses veille les reliques du Pape. L'uniforme original et coloré des gardes est à l'origine de ce biscuit à base de pâte sablée et d'écorce d'orange... Beurre, sucre, écorces d'oranges confites sont mélangés ensemble, on y ajoute les oeufs, un à un, puis le parfum, fleur d'oranger et enfin la farine... Lorsque le mélange forme une belle pâte homogène on met l’ensemble à reposer une bonne demie-heure... On façonne ensuite le pâton en forme de bonhomme, on réserve un peu de pâte pour la décoration, à savoir un demi-cercle pour le chapeau, des petites boules pour le nez, le menton, les boutons, des petites bandes pour les bras, le corps et les pieds, un petit filet pour les moustaches... On agrémentera le tout de morceaux d'écorces pour la couleur orange propre aux gardes suisses... Enfin on badigeonne la pâte avec un mélange oeuf miel et on enfourne à 240°. Plaisir des enfants, et symbole de convivialité, c'est aussi un régal pour les grands qui le dégustent volontiers au moment du café...

Préparation: 15 min

Cuisson: 20 min

Ingrédients (pour 10 suisses):

- 1 kg farine

- 6 oeufs + 1 jaune

- 500 g de sucre

- 250 g de beurre

- 1 sachet de levure

- 1 citron

- eau de fleur d'oranger (2 cuillères à soupe)

- rhum (facultatif)

Préparation:

Mettre la farine en puits avec la levure, ajouter le sucre, le beurre fondu, les oeufs, le zeste et le jus de

citron, l'eau de fleur d'oranger. Bien mélanger.

Sur une plaque, modeler un bonhomme (ou un autre personnage), bien applatir (1 cm d'épaisseur

environ). Badigeonner au jaune d'oeuf.

Décorer avec raisins secs, morceaux de fruits confits ou smarties.

Faire cuire 20-30 min à 180°C. Le suisse doit être bien doré.

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10. la brouette

Facteur Cheval de André Breton

Nous les oiseaux que tu charmes toujours du haut de ces belvédères

Et qui chaque nuit ne faisons qu'une branche fleurie de tes épaules aux bras de ta brouette animée

Qui nous arrachons plus vifs que des étincelles à ton poignet

Nous sommes les soupirs de la statue de verre qui se soulève sur le coude quand l'homme sort

Et que des brèches brillantes s'ouvrent dans son lit

Brèches par lesquelles on peut apercevoir des cerfs aux bois de corail dans une clairière

Et des femmes nues tout au fond d'une mine

Tu t'en souviens tu te levais alors tu descendais

Du train

Sans un regard pour la locomotive en proie aux immenses racines barométriques

Qui se plaint dans la forêt vierge de toutes ses chaudières meurtries

Ses cheminées fumant de jacinthes et mue par des serpents bleus

Nous te précédions alors nous les plantes sujettes à métamorphoses

Qui chaque nuit nous faisions des signes que l'homme peut comprendre

Tandis que sa maison s'écroule et qu'il s'étonne devant les emboîtements singuliers

que recherche son lit avec le corridor et l'escalier

L'escalier se ramifie indéfiniment

Il porte à une porte de meule il s'élargit tout à coup sur une place publique

Il est fait de dos de cygnes une aile ouverte pour la rampe

Il tourne sur lui-même comme s'il allait se mordre mais non il se contente sur nos pas d'ouvrir toutes

ses marches

Comme des tiroirs

Tiroirs de chair à la poignée de cheveux

A cette heure où des milliers de canards de Vaucanson se lissent les plumes

Sans se retourner tu saisissais ta truelle dont on fait les seins

Nous te souriions tu nous tenais par la taille

Et nous prenions les attitudes de ton plaisir

Immobiles sous nos paupières pour toujours comme la femme aime voir l'homme

Après avoir fait l'amour.

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11. le sacrifice

La religion que Jules César trouva si fortement établie dans la croyance des Gaulois n'était pas nationale : ils l'avaient reçue des Bretons à une époque dont l'histoire ne fait pas mention ; et, plus tard, sous la domination des Romains, ils abandonnèrent le culte du dieu Teutatès pour celui de Jupiter et des autres divinités de l'Olympe. L'Evangile fut ensuite prêché par des ministres sans armes ni soldats, et les conquêtes de la religion chrétienne amenèrent encore de nouveaux changements. Mais comme il n'est pas au pouvoir de l'homme de transformer entièrement ses idées et ses croyances, le Gaulois mêla quelques restes de la religion des druides à celle des Romains, ses vainqueurs et ses maîtres ; et lorsqu'il devint chrétien, les deux cultes anciens ne furent pas complétement oubliés. Teutatès fut le Jupiter des Bretons et des gaulois ; les druides étaient ses ministres, distribuaient ses faveurs, lançaient ses foudres contre les impies, interprétaient les réponses que le dieu daignait leur faire lorsqu'ils l'interrogeaient suivant les rites de son culte, etc. ; ils s'étaient même emparés de l'administration de la justice, et si quelqu'un osait décliner leur juridiction, ils le privaient de toute participation aux sacrifices : le recours à la divinité était alors interdit, à moins qu'on ne commençât à apaiser le courroux des ministres. Ainsi l'excommunication fut une arme redoutable entre les mains des prêtres de Teutatès, comme elle le fut par la suite lorsqu'elle fut lancée par des prêtes chrétiens. Les druides offrirent leurs secours aux malades, mais sans exercer la médecine: c'était par leur intercession auprès de Dieu qu'ils promettaient de rendre la santé; mais Teutatès était quelquefois très exigent, et si la maladie était mortelle, il ne fallait rien moins qu'une victime humaine pour racheter la vie que l'on voulait conserver. Dans les cas ordinaires, le dieu voulait bien se contenter de l'offrande de quelques bestiaux.La cueillette du gui de chêne fut la cérémonie la plus imposante de la religion des druides, et celle dont la tradition a conservé le plus de vestiges. Nous sommes encore assez près du temps où le gui était un sujet de chants populaires, au lieu d'être traité comme un ennemi dont une bonne culture délivre les arbres. Chez les Gaulois, lorsque l'on avait découvert un gui de chêne, on s'apprêtait à le cueillir, en observant scrupuleusement les rites prescrits en cette occasion. Deux taureaux bancs étaient attachés par les cornes au tronc du chêne chargé de la précieuse excroissance; le don qu'on allait recevoir valait au moins cette offrande. Un druide montait sur l'arbre armé d'une serpe d'or, et détachait le gui; d'autres le recevaient sur un tissu de laine blanche destiné à cet usage. C'était une panacée universelle, dont une parcelle infusée dans l'eau préservait des atteintes du poison, procurait aux bestiaux un accroissement de force et de fécondité, etc. Pour célébrer dignement cette heureuse trouvaille, les dévots présentaient leurs offrandes, et c'était l'élite de leurs troupeaux. Les victimes étaient partagées en trois parts: l'une pour le dieu (elle était livrée aux flammes), l'autre pour les druides et la troisième restait aux donataires. Dans les grandes calamités publiques, ou avant d'entrer en campagne contre un ennemi formidable, les druides avaient introduit l'exécrable usage des holocaustes humains. On construisait un énorme mannequin représentant un homme, on le remplissait de malheureux condamnés dans les assemblées, et si leur nombre était insuffisant, on choisissait des victimes parmi les hommes hors d'état de se défendre; on entassait des combustibles autour de cette horrible figure, et l'on y mettait le feu. Quand on lit le détail de ces scènes d'horreur, on est tenté d'en révoquer l'authenticité ; mais malheureusement le souvenir encore tout récent des cruautés de l'inquisition est trop positif pour nous permettre de rejeter sur l'humeur poétique des historiens, et sur les infidélités des traditions, les crimes dont l'espèce humaine fut coupable. Texte et iconographie extraits du Magasin Pittoresque, publié sous la direction de MM. Euryale Cazeaux et. Édouard Charton, première année, 1833. Paris, rue Jacob n° 30.

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12. la Galaure La Galaure est un affluent du Rhône en rive gauche. La Galaure coule en région Rhône-Alpes, dans les départements de l'Isère et de la Drôme. Son nom vient d'un ancien Galauara, basé sur la racine hydronymique pré-celtique gal- signifiant "pierre", complétée du double suffixe locatif -au-ar. Des formations similaires se retrouvent dans les noms de la Galèbre (Beaujeu) ou de Galabre (La Robine-sur-Galabre). La rivière naît dans le département de l'Isère dans la forêt de Chambaran, commune de Roybon, tout près des sources de l'Herbasse. Elle coule de manière générale vers l'ouest, baigne Hauterives avec son étonnant Palais Idéal du Facteur Cheval. Elle conflue avec le Rhône à Saint-Vallier.

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13. le travail

L'éthique protestante du travail est une valeur calviniste soulignant, pour chaque homme, la nécessité de suivre les valeurs : travail, épargne et discipline. Le terme a été utilisé en premier par Max Weber, dans son ouvrage L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme. On attribue souvent à l'éthique protestante du travail d’avoir marqué les sociétés où le protestantisme était fort, notamment les nations scandinaves, germaniques, britanniques et américaines. Dans ces sociétés, elle est généralement considérée comme l'un des piliers de la prospérité nationale. En général, la population des pays à racines protestantes tend à être plus matérialiste, perfectionniste, et se concentre plus sur le travail, contrairement aux pays plus catholiques (notamment les pays latins), où les gens ont une attitude plus détendue face au travail. Il est intéressant de considérer comment les valeurs de cette doctrine protestante se sont insinuées dans la culture populaire française et en particulier dans la région de la Drôme rurale. A titre d’exemple l’histoire de la Brigade de la Drôme dans l'entre-deux-guerres (1922-1939) peut être, un point de repère utile pour comprendre cette hérédité.

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14. la fonte Parc naturel de Chambaran à Roybon (à 20km) Balcon du bas Dauphiné, le territoire des Chambaran est caractérisé géographiquement par une alternance de plateaux, vallons et collines d'herbe tendre aux sommets couverts de taillis. C'est la « feyta », ligne de crête exprimée en dialecte local, qui délimite ces deux types de paysages distincts. A la source de nombreux ruisseaux, le plateau verdoyant offre un aspect serein. Plateau en Bas-Dauphiné, modelé dans les terrains molassiques entre le massif du Vercors et la plaine de Bièvre-Valloire. Son altitude s'élève jusqu'à 732 m sur le plateau proprement dit, 780 un peu plus à l'est dans les hautes collines qui dominent Tullins. La Galaure y a sa source. Ses terres «froides» en ont fait un pays de landes et de bois, hébergeant de très petits villages, quelques monastères, un grand camp militaire. Le Chambaran a souvent servi de refuge, sinon de repaire: il abrita des groupes de la Résistance, et jadis le fameux bandit Louis Mandrin (1725-1755), si bien devenu un héros dans l'imaginaire local que l'office du tourisme de Roybon s'intitule Mandrin-Chambaran ! On fredonne encore la fameuse complainte:

" Nous étions vingt ou trente,

Brigands dans une bande,

Tous habillés de blanc,

A la mode des...

Vous m'entendez?

Tous habillés de blanc

A la mode des marchands...".

Nous conseillons d’écouter la version de la complainte de Mandrin, chantée par Yves Montand in Chansons Populaires de France: http://www.chansons-net.com/Tine/E148.htm

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15. la guillotine

Cet ensemble de photographies représente probablement celui des meilleures représentations d’une exécution à la guillotine. Elles furent prises à Valence (sud-est de la France) le 22 septembre 1909. La triple exécution se tint bien après le levée du soleil contrairement à l’usage, aussi la lumière du jour donna-t’elle aux photographes la possibilité d’exécuter de tels clichés. Les assassins condamnés sont Pierre Berruyer, Octave David et Urbain Liottard du gang appelé « Les Chauffeurs de la Drôme » car ils brulaient les pieds de leurs victimes afin de leur faire avouer l’endroit où ces derniers cachaient leurs économies. La première et la seconde en partant du bas montre Octave David conduit à la potence par les deux assistants de Deibler, probablement « grand » Louis Rogis et Léopold Desfourneaux. Anatole Deibler, reconnaisable à son bouc est prêt, debout près du levier tandis que le troisième assistant Marcel Deschamps attend d’insérer la tête de l’homme dans la lunette. David porte la traditionnelle chemise blanche à col coupé et doit donc être tiré en avant car ses bras et ses jambes sont liés. Au cours de cette période de l’histoire de France, la guillotine était placée sur une place publique près d’une prison mais une brève course en fourgon tiré par des chevaux était cependant parfois nécessaire jusqu’au lieu de l’exécution. En l’occurrence, la guillotine fut assemblée juste à l’extérieur des portes de la prison de Valence sur la voie de passage des véhicules et les condamnés y parvinrent à pied directement des portes de la prison. Sur la photo du haut, la lame est descendue et souillée. Justice a été rendue ! Deschamps est penché et tient le tub en étain prêt à transférer la tête tranchée dans la grande malle gainée de zinc où elle rejoindra le corps. Deibler est debout derrière la malle et la tient ouverte tandis que les deux autres assistants surveillent. Le bouclier a été tiré de côté pour atteindre le tub et se trouve au sol à droite. L’officiel sans couvre-chef au premier plan semble s’approcher pour observer la procédure…

Cet ensemble de photos fit scandale en son temps au sein du gouvernement français car il était illégal de photographier les exécutions. André Obrecht, neveu d’Anatole Deibler et, lui-même, futur exécuteur en chef, se souvenait qu’enfant après avoir regardé ces photos il avait eu des cauchemars sur son oncle qui tranchait la tête des gens.

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16. le cèdre du Liban

Sur la rive gauche de la Galaure, face au village, et sur un terrain dominant d’une bonne dizaine de mètres la petite rivière, le seigneur de Hauterives fit construire au XVIIe siècle un château pour remplacer l’ancien, tombant en ruine et n’étant pas placé de façon avantageuse. Sur les terrasses attenantes au bâtiment, un joli jardin arboré fut aménagé, qui laisse voir aujourd’hui toujours de magnifiques spécimens. Le plus gros, le plus beau d’entre eux est un cèdre du Liban. Certaines affirmations laissent entendre que ce serait un arbre de Sully, mais cette hypothèse n’a pas résisté aux enquêtes et analyses faites par F.Monteillet, et les informations recueillies par lui laissent plutôt penser que cet arbre pourrait avoir été planté vers les 1760. Le cèdre du Liban de Hauterives : circonférence 7,65 mètres, hauteur 35 mètres fut planté par les seigneurs de Hauterives près de leur nouveau château vers 1650. On peut plutôt penser à une plantation au 18ème siècle d’après des recherches facilitées par Monsieur Alloncle de Hauterives.

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7. la grotte La grotte des cuves est l’une des sept merveilles du Dauphiné. La légende raconte que la fée Mélusine, transformée périodiquement en sirène, se baignait ; surprise par son mari, elle s’enfuit à jamais dans les profondeurs de la grotte. Les cuves (creux en forme d'entonnoir à l'entrée de la grotte) plus ou moins pleines, servaient de baromètre aux paysans. Les géologues amateurs fréquentent à Hauterives la combe de l’Œillon, à Tersanne la combe Vermeille où l’un d’eux recueilla plus de quatre-vingts espèces de petites coquilles marines. Fossiles que ramasse aussi le facteur Cheval qui apprend à les reconnaître.

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18. la tournée

Chaque jour J.F. Cheval effectuait à pied au cours de sa tournée-lettres un parcours d’environ quatorze kilomètres. S’accompagnant de sa fidèle brouette, il traversait un territoire de collines parsemées de champs et de bosquets dans les alentours de Hauterives et de Trésanne. Son parcours pouvait se rallonger de dix kilomètres supplémentaires parmi les ruiseaux et les berges escarpées de la rivière Galaure le long de laquelle il ramassait les éloquentes pierres de sa collection.

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19. le feu

Entre 1905 et 1908, ces criminels s'introduisaient la nuit chez leurs victimes et leur brûlaient les pieds dans la cheminée ou sur les braises pour leur faire avouer où ils cachaient leurs économies, avant de les assassiner, d’où leur surnom de « chauffeurs ». On leur impute le meurtre de 18 personnes. Alors qu’ils tuaient la nuit, le jour les « chauffeurs » reprenaient leurs activités professionnelles de cordonnier ou de maçon. Cet anonymat leur permit d'agir en toute impunité pendant plusieurs années. Leurs méfaits feront la une du Petit journal. Démasqué, Octave David, Louis Berruyer et Urbain Liottard furent arrêtés, tandis qu’un quatrième complice Jean Lamarque échappa dans un premier temps à la police. La plupart des crimes auraient été préparés au domicile Berruyer, rue Pêcherie à Romans-sur-Isère, en compagnie de leurs complices, Noémie Nirette surnommée « La Poule Noire », Hippolyte Caleu dit « Bel-Oeil » et Romanin Finet. Jugés, les trois principaux instigateurs furent condamnés à mort et, le 22 septembre 1909, à Valence, ils sont guillotinés par le bourreau Anatole Deibler. Au moment de l'exécution, David s'écria : « Je vais m'enrhumer, salut ! » Jean Lamarque, lui, fut finalement arrêté le 1er avril 1910 et sa condamnation à mort par contumace confirmée par les assises de la Drôme, puis commuée en travaux forcés à perpétuité par le président Armand Fallières. Il finira ses jours à Cayenne. Ce sont leurs méfaits qui vont notamment conduire Georges Clémenceau à créer les fameuses Brigades du Tigre pour pouvoir les intercepter.

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20. la forêt

La forêt domaniale de Chambaran couvre 3 200 ha, principalement dans la commune de Roybon; un parc naturel du Chambaran y a été enclos sur 300 ha à Saint-Pierre-de-Bressieux. Le plateau de Chambaran, en France, se situe à l'ouest du département de l'Isère, à la limite de la Drôme dite des Collines, aux environs de Roybon, et oscillant aux alentours de 700 m d'altitude. Le point culminant atteint 784 mètres au Marsonnat, entre Tullins et Saint-Paul-d'Izeaux. Il donne au sud sur le massif du Vercors, dont la vallée de l'Isère le sépare. Au nord, il est séparé des Terres froides par la plaine de la Bièvre. Il abrite un parc naturel clos de 300 hectares, constitué de forêts vallonnées et d'étangs, et accueillant une faune riche (cervidés, sangliers, rongeurs, oiseaux...), ainsi qu'un camp militaire. Ces bois vont servir de refuge et de base arrière à la Résistance de cette région et du maquis du Vercors. Des bagnards du fort d'Aiton, près d'Albertville, étaient affectés dans les années 1960-1970 au camp militaire de Chambaran. Ils étaient revêtus de la tenue de 1940 (treillis blanc, calot à grandes pointes) et étaient chaussés de sabots. Il y avait un bagne en dessous du fort supérieur d'Aiton. Le fort d'Aiton connut en effet une affectation spéciale lorsque, en 1962, il reçut les « pensionnaires » du centre disciplinaire de l'armée française ou, plus précisément, la Compagnie spéciale des troupes métropolitaines, dissoute en 1972.

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