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« MEILLEURES PRATIQUES » DE GOUVERNANCE ET CRÉATION DE VALEUR : UNE APPRÉCIATION CRITIQUE DES CODES DE BONNE CONDUITE Peter Wirtz Association Francophone de Comptabilité | Comptabilité - Contrôle - Audit 2005/1 - Tome 11 pages 141 à 159 ISSN 1262-2788 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-comptabilite-controle-audit-2005-1-page-141.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Wirtz Peter, « « Meilleures pratiques » de gouvernance et création de valeur : une appréciation critique des codes de bonne conduite », Comptabilité - Contrôle - Audit, 2005/1 Tome 11, p. 141-159. DOI : 10.3917/cca.111.0141 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Association Francophone de Comptabilité. © Association Francophone de Comptabilité. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 195.19.233.81 - 06/12/2013 22h44. © Association Francophone de Comptabilité Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 195.19.233.81 - 06/12/2013 22h44. © Association Francophone de Comptabilité

« Meilleures pratiques » de gouvernance et création de valeur : une appréciation critique des codes de bonne conduite

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« MEILLEURES PRATIQUES » DE GOUVERNANCE ET CRÉATION DEVALEUR : UNE APPRÉCIATION CRITIQUE DES CODES DE BONNECONDUITE Peter Wirtz Association Francophone de Comptabilité | Comptabilité - Contrôle - Audit 2005/1 - Tome 11pages 141 à 159

ISSN 1262-2788

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-comptabilite-controle-audit-2005-1-page-141.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Wirtz Peter, « « Meilleures pratiques » de gouvernance et création de valeur : une appréciation critique des codes de

bonne conduite »,

Comptabilité - Contrôle - Audit, 2005/1 Tome 11, p. 141-159. DOI : 10.3917/cca.111.0141

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour Association Francophone de Comptabilité.

© Association Francophone de Comptabilité. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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« Meilleures pratiques » de gouvernance et créationde valeur : une appréciationcritique des codes de bonneconduite*Peter WIRTZ

Peter WIRTZ

« MEILLEURES PRATIQUES » DE GOUVERNANCE ET CRÉATION DE VALEUR:UNE APPRÉCIATION CIRITIQUE DES CODES DE BONNE CONDUITE

reçu : juin 2004/accepté : février 2005

Abstract

For about a decade, the intensifying debate oncorporate governance has led to multiple initia-tives promoting rules of “best practice”. Theseinitiatives are led by a great variety of actors,such as institutional investors, internationalorganizations, national governments or corpo-rate managers themselves. They have broughtabout several so-called corporate governancecodes, which are applicable on a voluntary basisand contain some recommendations that areoften represented as an “ideal” solution. Wheneverideas on corporate governance are hence pro-moted on a large scale and there is growing consenton them representing a universal standard, a cri-tical examination of their theoretical under-pinnings may prove helpful to avoid being lockedinto a narrow and possibly counterproductiveperspective.

Résumé

Depuis environ une décennie, la placecroissante occupée par le thème de la gouver-nance s’est traduite par des initiativesmultiples visant à établir et à expliciter les « meilleures pratiques » en la matière. Ellesémanent d’acteurs divers, qu’il s’agisse d’inves-tisseurs institutionnels, d’organismes interna-tionaux, gouvernementaux ou de représen-tants du monde des entreprises elles-mêmes.Ces initiatives ont débouché sur un ensemblede codes de gouvernance (CG) dont l’applica-tion est volontaire et qui contiennent desrecommandations se voulant comme un « idéal » à atteindre. Lorsque des idées sur lagouvernance sont ainsi promues à grandeéchelle et que la conviction se répand qu’ils’agit d’un standard universel, un examencritique de leurs présupposés théoriques serévèle souvent salutaire pour éviter de s’enfer-mer dans une perspective étroite.

MOTS CLÉS. – GOUVERNANCE – MEILLEURES

PRATIQUES – VALEUR.KEYWORDS. – CORPORATE GOVERNANCE – BEST

PRACTICE – VALUE.

* L’auteur tient à remercier Gérard Charreaux, Isabelle Huault, Pierre Salmon, les participants du séminaire interne COPISORG consacré aux « meilleures pratiques », ainsi que les deux rapporteurs anonymes pour leurs commentaires et sugges-tions par rapport à une précédente version de l’article. L’auteur est seul responsable de la persistance d’éventuelles erreurs.

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IntroductionLa gouvernance, définie comme l’ensemble des mécanismes qui délimitent l’espace discrétionnaire dudirigeant, est désormais reconnue comme un aspect important dans la vie d’une entreprise. Cettereconnaissance s’est traduite, depuis environ une décennie 1, par des initiatives multiples visant àétablir et à expliciter les « meilleures pratiques » en la matière. Elles émanent d’acteurs divers, qu’ils’agisse d’investisseurs institutionnels, d’organismes internationaux, gouvernementaux ou de repré-sentants du monde des entreprises elles-mêmes. Ces initiatives ont débouché sur un nombre signifi-catif de codes de gouvernance (CG) dont l’application est volontaire et qui contiennent un ensemblede recommandations se voulant comme un « idéal » à atteindre. À fin mars 2004, on peut compter untotal de 121 CG au niveau mondial 2. Pour les seuls pays membres de l’Union européenne (UE), unerécente étude mandatée par la Commission de Bruxelles (Weil, Gotshal et Manges, 2002) endénombre 35.

Selon cette même étude, le mouvement de conception et de diffusion des « meilleures pratiques »de gouvernance trouve, en ce qui concerne l’Europe, son point de départ essentiellement dans laGrande-Bretagne du début des années 1990 3, faisant suite à un certain nombre de scandales finan-ciers ayant fait sentir la nécessité d’un effort de réflexion quant à l’efficacité des systèmes de contrôlepratiqués jusque-là 4. Le constat de dysfonctionnements manifestes coïncidant avec la spoliation decertains investisseurs explique que l’attention des acteurs concernés se soit portée sur des problèmesde conflits d’intérêts ainsi que sur leur impact sur la création et l’appropriation de valeur. En Europe,les CG sont donc d’abord apparus outre-Manche dans un contexte de scandales financiers, particu-lièrement propice à susciter l’intérêt pour des explications mobilisant des notions de conflit d’intérêtset de spoliation. De fait, dans un premier temps, c’est surtout la Grande-Bretagne qui a été particu-lièrement prolifique en matière de production de CG. Sur les dix codes européens que dénombrentWeil, Gotshal et Manges (2002) pour la période de 1991 à 1997, six ont été édités au seul Royaume-Uni. C’est à partir de 1998 que le mouvement a largement débordé les frontières britanniques et queson rythme s’est, par ailleurs, grandement amplifié, avec un ensemble de 25 codes créés entre 1998 et2001 5. On observe également un changement de rythme au niveau mondial, car la diffusion des « meilleures pratiques » de gouvernance est d’abord lente, pour entamer une croissance quasi expo-nentielle à partir du milieu des années 1990, comme le montrent les données empiriques recueilliespar Aguilera et Cuervo-Cazurra (2004, p. 420).

Les questions que soulèvent l’existence et la diffusion rapide des codes de « meilleures pratiques »dans quasiment tous les pays de l’UE et l’attention réelle que leur accorde la profession financière sontpotentiellement nombreuses. Ainsi, on pourrait s’intéresser aux origines historiques de certaines idéessur les « meilleures pratiques » et à la personnalité de leurs premiers promoteurs (Marens, 2003). Uneautre question serait d’étudier, au-delà des discours, les conditions de la mise en application réelle des« meilleures pratiques » ou de leur appropriation par les entreprises (Pellens et al., 2001). La présentecontribution se situe à un niveau différent. Partant d’une analyse des CG, elle se focalise sur la ques-

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Correspondance : Université Lumière (Lyon 2)Faculté de sciences économiques et de gestion/copiSorG16, quai Claude Bernard – 69007 LyonTél. : [email protected]

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tion de savoir ce qui autorise, en dehors de leur intuition personnelle, les auteurs de codes de gouver-nance à juger leurs recommandations comme étant les « meilleures pratiques » 6. Autrement dit, existe-t-ildes arguments scientifiques pour appuyer la croyance en la qualité supérieure de telle ou telle pratiquede gouvernance ? La pertinence de cette question nous semble d’autant plus forte que l’étude compa-rative des 35 codes européens montre une étonnante convergence des recommandations les plusimportantes (Weil, Gotshal et Manges, 2002) 7, malgré des traditions nationales par rapport à lagouvernance initialement très différentes (cf. la désormais très riche littérature sur des comparaisonsinternationales des systèmes de GE dont Wirtz, 2002, donne un aperçu représentatif ). Le phénomèneest donc de taille et les entreprises sont soumises à des pressions diverses cherchant à obtenir leur miseen conformité avec les « meilleures pratiques » de gouvernance. Un des domaines où cette pression sefait très concrète est celui de la comptabilité, car les scandales financiers tels qu’Enron étaient enmême temps des scandales comptables. La consécration des comités d’audit comme un ingrédientindispensable des « meilleures pratiques » (Walker, 2004) et les règles imposées par les lois Sarbanes-Oxley et LSF (loi sur la sécurité financière) témoignent ainsi de l’impact des idées dominantes enmatière de gouvernance sur la pratique concrète de la comptabilité 8. Cela n’est guère surprenantcompte tenu du rôle central de l’asymétrie d’information dans toute réflexion théorique sur la gouver-nance alors qu’une des principales sources d’information des différents acteurs de la gouvernance estjustement de nature comptable 9. Ainsi, la philosophie de la valeur qui sous-tend l’approche domi-nante de la gouvernance influe entre autres sur le travail de normalisation comptable, car l’exercice dela discipline financière est au moins partiellement dépendant du modèle comptable de la valeur et desinformations produites en conséquence (Dumontier et Teller, 2001; Hoarau et Teller, 2001).

La promotion intense des « meilleures pratiques » de gouvernance au-delà des contextes spécifiquesdans lesquels elles ont été conçues initialement est donc aujourd’hui une réalité, et nous venonsd’illustrer à travers l’exemple de la comptabilité que la mise en œuvre des idées exprimées dans les CGest susceptible d’influencer fortement l’exercice concret des fonctions managériales. Or, il n’est pasimpossible que les individus adhèrent à des idées fausses tout en invoquant des raisons perçues commefortes (Boudon, 1986), et la gouvernance n’échappe pas à cette règle. Ainsi, lorsque certaines idées surla gouvernance sont promues à grande échelle et que la conviction se répand qu’il s’agit d’un standarduniversel, un examen critique de leurs présupposés apparaît salutaire pour éviter de s’enfermer dansune perspective étroite qui conduirait à adhérer à des idées fausses sur la base d’arguments tout à faitrationnels, voire scientifiquement fondés (Boudon, 1990). Parler des « meilleures pratiques » impliqueen fait un jugement de valeur, et nous cherchons à repérer les arguments théoriques auxquels se réfè-rent plus ou moins implicitement les CG et leurs promoteurs pour justifier un tel jugement de valeur.Une fois le référentiel théorique révélé, ce dernier peut être soumis à un examen critique pour montrerses limites potentielles, et donc celles des CG. Tel est l’objectif du présent article.

D’un point de vue financier, l’enjeu central pour juger les pratiques de gouvernance est leur impactsur la création de valeur. Aguilera et Cuervo-Cazurra (2004, p. 428) affirment d’ailleurs : « Leadinginstitutional investors, such as CalPERS in the USA, believe that “good governance is good business”,and hence will by default create shareholder value. » Suivant ce raisonnement, sera jugée comme « meilleure » toute pratique de gouvernance contribuant à un accroissement de la valeur 10. La thèseque nous défendons dans cet article est dès lors que l’argument de qualité implicitement contenu dansles CG est cohérent avec la représentation dominante de la valeur 11, telle que contenue dans la théo-rie financière moderne et, plus particulièrement, dans la théorie de l’agence. Un examen critique del’approche traditionnelle de la valeur en révèle cependant certaines faiblesses, car, négligeant certains

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aspects cognitifs, elle fait largement l’impasse sur l’étude d’une source, pourtant essentielle, de créa-tion de valeur, à savoir les schémas de pensée innovants et compétences distinctives soutenant unavantage concurrentiel durable. Sans remettre en cause la pertinence des arguments empruntés à lathéorie de l’agence dans certains contextes très précis, ce constat incite à la prudence par rapport à lavisée universelle des CG.

1. « Meilleures pratiques » de gouvernance et argumentssous-jacents en matière de valeur

Dans un premier temps, nous allons résumer les principales recommandations convergentes enmatière de « meilleures pratiques » de gouvernance telles qu’identifiées par l’étude de Weil, Gotshal etManges (2002) pour la quasi-intégralité des pays de l’Europe des Quinze. Ensuite, ces recommanda-tions seront soumises à un examen de leurs présupposés théoriques en matière de création de valeur.L’objectif est de mettre en exergue le référentiel autorisant les promoteurs des codes de gouvernance àqualifier telle pratique de gouvernance de « meilleure » que telle autre.

1.1. Recommandations centrales des codes de gouvernanceLes éléments figurant dans cette section se fondent sur des données secondaires, dans la mesure où ilssont extraits de la très riche base de données qualitatives – disponible sur le site Internet de l’Unioneuropéenne – qui fait partie de l’étude de Weil, Gotshal et Manges (2002). Cette base fait l’objet del’annexe V de l’étude susmentionnée et est intitulée « Comparative Matrix of Corporate GovernanceCodes Relevant to the European Union and Its Member States ». Il s’agit d’un matériau empiriquesous la forme de tableaux comparatifs pour l’ensemble des codes européens. Ces tableaux sont issusd’une analyse thématique détaillée (plus de 350 pages) et comparent les codes par rapport à unensemble de 36 thèmes, dont « la mission assignée au conseil d’administration », « l’indépendance »,« les conflits d’intérêts », « les flux d’informations » et « la rémunération des dirigeants ».

Dans les idées promues par les codes de gouvernance figure, entre autres, l’importance de la capa-cité des dirigeants à rendre compte de leur gestion aux différentes parties prenantes 12. Même si laformulation concrète du principe, baptisé « accountability » (Weil, Gotshal et Manges, 2002, p. 75),connaît des variantes, il occupe une place centrale dans l’ensemble des CG. Ce principe établit impli-citement une hiérarchie entre le dirigeant et les différents partenaires de l’entreprise, car il confère aupremier le statut d’un agent (au sens de la théorie de l’agence 13), chargé de l’exécution des intérêts desseconds. Les promoteurs des « meilleures pratiques » disposent alors d’un argument théorique pourjustifier d’une approche de la gouvernance essentiellement tournée vers la surveillance (monitoring) dela conformité du comportement des dirigeants aux intérêts des parties prenantes, supposés connus defaçon certaine.

Une deuxième idée partagée par les auteurs des CG est la nécessité d’un traitement équitable del’ensemble des actionnaires (Weil, Gotshal et Manges, 2002, p. 76). Pour cela, plusieurs mécanismessont préconisés. Il s’agit d’assurer une circulation de l’information sans faille auprès de tous les action-naires concernant la structure du capital et ses évolutions. Les barrières à la participation active auxassemblées générales sont à réduire et les déséquilibres entre structure du capital et structure des droits

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de vote à éviter. Cette exigence revient à réclamer, en principe, un alignement du droit de contrôlerésiduel sur le droit de propriété attaché au statut d’actionnaire.

Plusieurs recommandations concernent le conseil d’administration comme mécanisme interne degouvernance (Weil, Gotshal et Manges, 2002, p. 77-78). Même si les différents pays européens possè-dent à l’origine des cadres réglementaires différents en matière de structure du conseil, où l’ondistingue notamment des pays à conseil unique et des pays à directoire et conseil de surveillance, l’en-semble des CG affiche un large consensus concernant les principes de structuration des conseils ainsique le rôle qu’ils devraient jouer. Notamment, beaucoup de codes militent pour une séparation desfonctions de management et de surveillance, même dans les firmes à conseil unique, afin de rendrel’exercice de cette fonction de surveillance plus efficace. Cela passerait notamment par trois types demesures : la séparation des rôles de président du conseil et de directeur général, l’indépendance de l’organe de contrôle et, enfin, la mise en place de comités au sein du conseil.

Il apparaît à l’examen des recommandations sur le conseil d’administration que les CG mettentsurtout l’accent sur la capacité de cet organe à exercer son rôle de surveillance des décisions prises etmises en œuvre par les dirigeants de la façon, soi-disant, la plus « objective » possible 14, c’est-à-direavec impartialité. Les propositions concrètes en matière de composition et de présidence du conseil, àsavoir une forte proportion d’administrateurs indépendants et un président distinct du principal diri-geant, ont justement comme but d’assurer des contrôles qui ne soient pas soumis à des intérêts parti-culiers divergents. Ainsi, l’indépendance des membres du conseil implique entre autres l’absence derelations d’affaires ou de famille avec les dirigeants et les principaux actionnaires. Le but du conseilétant de pallier les effets coûteux d’éventuels conflits d’intérêts, il convient de définir un organe dontle fonctionnement ne soit pas troublé par les mêmes conflits qu’il est justement censé contrôler.

Globalement, les recommandations au sujet du conseil de surveillance sont explicitement reliées àl’objectif d’une réduction d’un ensemble de conflits d’intérêts identifiés a priori, comme celui oppo-sant le dirigeant aux actionnaires, voire les actionnaires majoritaires et le dirigeant aux actionnairesminoritaires. C’est cette même logique qui sous-tend la recommandation de mettre en place uncertain nombre de comités au sein du conseil d’administration. Concrètement, les comités les plusfréquemment évoqués concernent des domaines où les conflits d’intérêts sont a priori les plussensibles, à savoir l’audit des comptes, la rémunération et la nomination des dirigeants 15. C’est surtoutdans ces comités que les administrateurs indépendants sont d’ailleurs censés jouer un rôle important.

Enfin, les CG ont tendance à promouvoir un degré de transparence élevé. Ainsi, les avocats des « meilleures pratiques » de gouvernance cherchent à inciter les firmes à rendre publique toute infor-mation particulièrement sensible en matière de gouvernance, notamment la rémunération desmandataires sociaux et des dirigeants, ainsi que le degré d’indépendance du conseil d’administration.

Ce qui frappe à ce niveau est la focalisation des CG sur la révélation d’indicateurs supposéscruciaux pour apprécier, dans le cas de chaque entreprise, l’existence ou non de conflits d’intérêts,dont la plausibilité a été clairement établie a priori, et qui peuvent, en principe, être identifiés à traversune information objective, pourvu que cette dernière soit mise à la disposition des contrôleurs.Autrement dit, ce qui apparaît problématique aux yeux des promoteurs des CG est la distributioninégale d’une information prétendument objective parmi les différentes parties prenantes. La questionamont, qui est de savoir ce qu’est une information véritablement pertinente pour la gouvernance etcomment accéder à une connaissance fiable de la capacité d’une firme à créer de la valeur, ne semblepas constituer un souci majeur dans le référentiel des « meilleures pratiques ». Ce dernier suppose

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implicitement que l’information existe et que la « bonne » pratique en matière de gouvernance estcelle qui réduit l’asymétrie des partenaires de la firme face à cette information pour pouvoir imposerleur discipline.

1.2. La perspective des arguments théoriques sous-jacents : minimisationdes coûts d’agence comme principal mécanisme pour créer de la valeur

Après avoir résumé les « meilleures pratiques » de gouvernance telles que promues par les CG, nousallons à présent tenter de déceler les arguments théoriques sur lesquels se fonde cette position norma-tive. Quel raisonnement conduit les auteurs des CG à établir la supériorité de certaines pratiques et,surtout, leur supériorité par rapport à quoi ? Nous pouvons tenter d’appréhender la question du bien-fondé des pratiques de gouvernance à travers l’identité des principaux promoteurs des CG. Il s’agit,très souvent, soit d’investisseurs professionnels 16, soit d’acteurs soucieux de ménager l’accès des entre-prises aux capitaux de tels investisseurs 17. Ce qui veut dire que les « meilleures pratiques » de gouver-nance constituent une initiative fortement appuyée par des parties prenantes à la politique financièredes firmes. Fort de ce constat, il convient de se tourner vers la finance pour rechercher les critères dejugement que propose cette discipline pour discriminer entre les pratiques. Il apparaît alors que lecritère central est celui de la valeur, ou plutôt celui de la création de valeur (Jensen, 2000). Selon cetteoptique, sera considérée comme « meilleure » toute pratique de gouvernance contribuant à l’accrois-sement de la valeur des entreprises.

Shleifer et Vishny (1997) présentent une synthèse représentative du courant dominant desrecherches sur la gouvernance inspirées par la finance moderne. Il convient d’ailleurs de noter que ladominance de la théorie de l’agence dans le débat théorique sur la gouvernance est également recon-nue en dehors du seul champ disciplinaire de la finance (Daily, Dalton et Cannella, 2003). L’étude desprésupposés théoriques de l’approche dominante révèle que celle-ci se fonde en vérité sur une repré-sentation relativement pauvre du concept de la valeur, privilégiant l’aspect spoliation des bailleurs defonds et économie de coûts (en l’occurrence il s’agit des coûts d’agence). En témoigne la définitionrelativement restrictive de la gouvernance, très axée sur l’évitement d’une spoliation des investisseurs,que proposent Shleifer et Vishny (1997) : « Corporate governance deals with the ways in whichsuppliers of finance to corporations assure themselves of getting a return on their investment. [...]How do they make sure that managers do not steal the capital they supply or invest in bad projects ?»(p. 737). Dans une étude détaillée des bases de la théorie financière moderne et des possibilités de leurdépassement, Charreaux (2002 a) fait le constat suivant : « Dans l’interprétation dominante des théo-ries contractuelles appliquées à la firme, l’analyse du schéma de création et d’appropriation de lavaleur est très spécifique. [...] l’origine de la valeur, de la rente organisationnelle est passée sous silence.L’ensemble des opportunités d’investissement les plus profitables étant connu, ce qui importe c’estd’éviter de gaspiller les ressources en investissant de façon sous-optimale [...] en raison des conflitsd’agence. Le schéma contractuel conduit ainsi à attribuer la source de la performance non pas à lafaçon dont on crée de la valeur, c’est-à-dire à la façon dont une firme parvient à être plus performanteque ses concurrentes dans sa fonction productive, mais à la façon dont on évite de gaspiller la valeurpotentielle en mettant en place des schémas de contrôle adaptés. [...] »Mais, en dehors des seules économies de coûts d’agence, qu’en est-il des autres vecteurs potentiels de lacréation de valeur ? Selon la théorie financière, il y a création de valeur lorsque la rentabilité générée parl’entreprise dépasse le coût du capital, c’est-à-dire le coût d’opportunité des bailleurs de fonds.

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Maximiser la création de valeur implique donc de sélectionner tous les projets d’investissement à valeuractuelle nette (VAN) positive. Or, en raison d’intérêts potentiellement divergents et en présence d’in-formations distribuées de façon asymétrique, les dirigeants peuvent être incités à détruire de la valeurpour les actionnaires (investissements à VAN négative) et/ou à ne pas exploiter l’intégralité du poten-tiel de création de valeur à leur disposition (sous-investissement). Il s’agit de deux manifestations desconflits d’agence. Dès lors la théorie de l’agence conclut qu’il est possible de créer de la valeur par desmécanismes d’incitation et de contrôle – et donc disciplinaires – qui, en réduisant la spoliation desinvestisseurs, minimisent les coûts d’agence. Mais, si l’optimisation de la création de valeur signifie lamaximisation d’un écart positif entre la rentabilité des investissements et le coût du capital, commentpeut-on expliquer des cas dans lesquels une entreprise élabore un ensemble de projets qu’elle seule a lacapacité (ou la compétence) d’exploiter de façon rentable ? Il semble que la théorie financière tradi-tionnelle évacue cette question de l’élaboration des projets en supposant l’ensemble des opportunitésd’investissement comme donné de façon exogène. Si on adopte l’approche financière traditionnelle dela valeur, l’enjeu de la gouvernance est donc essentiellement une question de discipline. Il s’agit demettre en place un ensemble de mécanismes contraignant le dirigeant à choisir tous les projets à VANpositive et uniquement ceux-ci, ces projets pouvant être connus objectivement. Ce raisonnement sous-tend, entre autres, la théorie du free cash flow de Jensen (1986), dont les idées sont cohérentes avecplusieurs propositions normatives en matière de gouvernance. On peut s’en convaincre en relisant l’ar-gumentation de Jensen pour étayer ses propres recommandations en matière de gouvernance (Jensen etChew, 1995) et qui, à certains égards, paraissent très proches des « meilleures pratiques » proposéesdans les CG européens. Cette convergence des idées d’un des principaux promoteurs de la théorie del’agence avec les « meilleures pratiques » des CG concerne plus particulièrement deux caractéristiquesstructurelles du conseil d’administration, à savoir son indépendance et sa présidence. Ainsi, Jensen etChew (1995) se font explicitement les avocats de la séparation des rôles de président du conseil et dedirecteur général 18 et prônent également l’indépendance des administrateurs 19.

L’accent mis sur les conflits d’agence et la discipline dans les analyses académiques du courant domi-nant en finance d’entreprise se retrouve comme une des principales justifications de ce qui est consacrécomme étant la « meilleure pratique » par les CG. En effet, la théorie de l’agence fonde son raisonne-ment essentiellement sur des concepts tels que l’asymétrie d’information et les conflits d’intérêts, lecouplage des deux conduisant à des coûts d’agence, car l’asymétrie de l’information rend le contrôle descomportements intéressés difficile. C’est précisément ce type de raisonnement qui inspire en grandepartie les CG, notamment lorsque ceux-ci réclament un haut degré de transparence dans des domainesbien connus pour leurs conflits d’intérêts potentiels. Le constat suivant est très instructif à cet égard : «[...] the codes tend to favor greater transparency on all aspects of corporate governance and, in parti-cular, executive and director compensation and director independence. » (Weil, Gotshal et Manges,2002, p. 6). L’analyse détaillée des objectifs affichés par les différents CG renforce le constat de leurancrage conceptuel dans l’approche traditionnelle de la théorie de l’agence, focalisée sur les coûtsd’agence informationnels liés au comportement du dirigeant. Les termes « information » et « accoun-tability » sont des objectifs très fréquemment cités (tableau E dans Weil, Gotshal et Manges, 2002, p. 22-24). L’analyse des définitions du terme gouvernance contenues dans les CG donne une indicationsupplémentaire quant à la visée essentiellement disciplinaire de ces textes. L’emploi privilégié des termes« supervision » et « monitoring » est ainsi révélateur (Weil, Gotshal et Manges, 2002, p. 28-29).

Compte tenu de la focalisation quasi exclusive sur les aspects disciplinaires, on peut alors légitime-ment se demander si les CG sont vraiment aptes à favoriser la création de valeur dans toutes les

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circonstances. Nous venons, en effet, de voir qu’ils relèvent d’une conception qui cherche plutôt àéviter sa destruction 20 ou, au mieux, la sous-exploitation d’un ensemble d’opportunités préexistanteset objectivement connu par tous (cas du sous-investissement). Or, cette conception est trop étroitepour définir de manière universelle les conditions optimales de la création de valeur. Notamment, sansnier l’intérêt de l’innovation pour la création de valeur, elle fait abstraction du fait qu’outre des inci-tations et contrôles pour protéger les contributeurs au processus, l’activité innovante est tributaire desconnaissances spécifiques de ses dirigeants ainsi que d’un ensemble de capacités organisationnellesparticulières. Dans une critique similaire adressée au courant dominant de la gouvernance, Ricart(2000, p. 231) l’exprime dans les termes suivants : « [...] the problem of value creation is the develop-ment of organizational capabilities that allows new forms of combination of human capital andprovides the right vision so that, through creativity and innovation, new value is being created. »

2. Changement de perspective et appréciation des « meilleures pratiques »

Dans une étude récente sur la mise en œuvre des recommandations du rapport Cadbury 21 ainsi que surl’impact des « meilleures pratiques » qu’il contient sur la valeur des entreprises, Dedman (2003) résumeses résultats comme suit. « While there is no empirical evidence of an association between board struc-ture and firm value, there is some evidence that compliance with the Cadbury recommendationsenhances board oversight with respect to the manipulation of accounting numbers and the discipline ofthe top executive. » (nos italiques) Ce constat semble cohérent avec l’idée selon laquelle les CG s’inspi-rent à la base d’un modèle incomplet de la valeur qui est cantonné dans une approche disciplinaire.Cela n’enlève pas la pertinence des analyses fondamentales proposées par la théorie de l’agence, maismontre que l’approche traditionnelle est contingente, c’est-à-dire que son acceptabilité (au sens deBoudon 22) est tributaire d’un certain type d’environnement. Des scandales financiers récurrents (enfait, Enron, Worldcom, Vivendi, Ahold et Parmalat ne sont que les cas les plus récents et les plus média-tiques d’une longue série) illustrent bien la plausibilité de la théorie de l’agence sous son aspect disci-plinaire pour expliquer la contribution potentielle de certains mécanismes de gouvernance à assurerune gestion conforme à l’objectif de création de valeur. Notre propos n’est donc nullement de contes-ter l’existence manifeste de vrais problèmes d’agence dans certaines firmes, mais uniquement de suggé-rer que l’acceptabilité d’une approche exclusivement disciplinaire de la gouvernance est largementcontingente, et contredit donc l’ambition universaliste 23 exprimée par le terme de « meilleure pratique ».Wirtz (2003) démontre, en effet, que les dimensions de la seule théorie de l’agence traditionnelle, bienque présentes, expliquent insuffisamment la création de valeur d’une entreprise comme O.M. Scott etque cette insuffisance provient partiellement du fait que l’entreprise étudiée dans ce cas d’espèce nesatisfait pas aux critères de la grande firme managériale au capital largement dispersé, telle que définiepar Berle et Means (1932). Notons, à ce sujet, que Jensen lui-même reconnaît implicitement la contin-gence de ses propres explications et recommandations en matière de gouvernance, en suggérant que sonraisonnement s’appliquerait le mieux à des entreprises à faible croissance ou en déclin où les coûtsd’agence du free cash flow 24 sont élevés (Jensen, 1993, p. 868).

Il convient dès lors de s’interroger sur des approches alternatives, voire complémentaires, de lagouvernance pour mieux rendre compte des différentes dimensions de la création de valeur (2.1.). Un

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retour sur les CG cherchera, enfin, à établir dans quelle mesure on peut éventuellement trouver destraces d’une conception élargie de la valeur dans les « meilleures pratiques » (2.2.).

2.1. Création de valeur : au-delà de la discipline

Quelle que soit sa pertinence dans certains contextes très précis, il n’en reste pas moins que la repré-sentation des possibilités d’agir sur la valeur dans l’approche traditionnelle de la gouvernance resteincomplète. Cela est susceptible d’être une explication importante quant aux résultats mitigés desétudes qui cherchent à mesurer l’impact de la mise en œuvre des « meilleures pratiques » sur la valeurdes entreprises (Dedman, 2003) 25. En effet, la perspective exclusivement disciplinaire s’attaque plus àdes comportements déviants pour éviter la destruction de valeur et la spoliation qu’à la découverte desources de valeur inédites. Or, l’exploration de nouveaux gisements de valeur est avant tout une ques-tion cognitive plutôt que de discipline. Parvenir à une représentation plus riche du processus de créa-tion de valeur passe ainsi vraisemblablement par l’intégration de l’aspect cognitif qui, pourtant, estrelativement peu visible dans les « meilleures pratiques » de gouvernance pour les raisons évoquéesdans la section précédente.

Intégrer la dimension cognitive pour apprécier l’impact de la gouvernance sur la création de valeurdes entreprises est a priori susceptible de rendre nos grilles de lecture plus puissantes (Ricart, 2000).C’est ce que montre également Charreaux (2002 a) en proposant une revue originale des fondementsthéoriques qui sous-tendent les recherches en finance et en gouvernance d’entreprise. Ce faisant, ilrelate quelques tentatives récentes visant à développer une véritable théorie cognitive de la gouver-nance, susceptible de compléter l’approche disciplinaire traditionnelle. Cette nouvelle approche puiseses concepts dans des courants théoriques tels que la théorie fondée sur les ressources (Penrose, 1959 ;Wernerfelt, 1984 ; Barney, 1986 ; Conner et Prahalad, 1996), celle des capacités organisationnelles(Langlois et Robertson, 1995 ; Teece, Pisano et Shuen, 1997), et celle de l’évolutionnisme écono-mique (Nelson et Winter, 1982).

Si on adopte cette nouvelle posture en matière de création de valeur, force est d’admettre qu’un desproblèmes centraux, au moins pour certaines entreprises, n’est pas tant de saisir sous l’œil vigilant desadministrateurs-surveillants les meilleures opportunités existantes et objectivement connues par tous,mais de développer une vision pertinente de l’avenir 26. Cela signifie l’abandon de l’hypothèse tradi-tionnelle en finance, selon laquelle l’ensemble des opportunités serait une donnée exogène et objec-tive 27, pour laisser place à une approche dans laquelle certaines opportunités sont des créationsauthentiques des dirigeants. Le système de gouvernance qui régit les entreprises de haute technologiede la Silicon Valley illustre particulièrement bien cet aspect, car les meilleurs projets n’y sont pasconnaissance commune mais émergent au cours du temps grâce aux multiples initiatives d’entrepre-neurs indépendants. Dans ce contexte, les fonctions de gouvernance assumées par les investisseurs nesont pas uniquement disciplinaires, mais surtout cognitives dans la mesure où les capital-risqueursfont une contribution cruciale à l’apprentissage de standards technologiques émergents (Aoki, 2000).Sans être complètement dénué de discipline, un tel apprentissage collectif représente un phénomènecognitif. Or, affirmer que la cognition est une variable significative de la création de valeur nous obligeà modifier quelque peu notre appréciation des « meilleures pratiques » de gouvernance. Charreaux(2000) illustre cela pour le cas de la structure du conseil d’administration. Il conclut en effet que laperspective cognitive conduit à une réinterprétation du rôle des administrateurs qui, au lieu d’être de

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simples surveillants, peuvent « aider le dirigeant à construire sa vision – en la confrontant aux modèlesmentaux des administrateurs –, ou à détecter, sinon à construire des opportunités de croissance »(Charreaux, 2002 a). Dès lors, vouloir qualifier l’indépendance des administrateurs de « meilleurepratique », quel que soit le type d’entreprise considéré, apparaît comme excessif. Au contraire, si l’onsuit Charreaux (2002 a), « dans la perspective stratégique cognitive, le conseil doit être composé enpriorité des administrateurs pouvant le mieux contribuer à la création de compétences, aider le diri-geant à concevoir une vision facilitant l’apprentissage organisationnel ou, encore, faciliter la réductiondes conflits cognitifs. Les qualités demandées aux administrateurs ne se conçoivent plus alors entermes d’indépendance et d’expertise en matière de contrôle, selon la distinction interne/externe, maisen fonction des contributions cognitives à même de s’intégrer dans un projet collectif ». Le récit d’uncas comme celui d’UPS fait effectivement ressortir l’aptitude du conseil d’administration à soutenirun réel apprentissage des opportunités stratégiques comme un facteur essentiel de son succès(Sonnenfeld, 2002), ce qui illustre la plausibilité de l’approche cognitive. Dans cet exemple, il estd’ailleurs intéressant de constater que certaines contributions importantes pour le débat critiqueconcernant les options stratégiques émanent d’administrateurs, qui ne peuvent pas être considéréscomme indépendants selon les critères classiques. Le tableau 1 synthétise les principales différencesentre la théorie de l’agence traditionnelle et le référentiel cognitif.

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Tableau 1.Comparaison de l’approche dominante avec le référentiel cognitif

TPA TRADITIONNELLE RÉFÉRENTIEL COGNITIF

Aspects théoriques centraux – Spoliation – Cognition– Sous-/surinvestissement – Innovation d’investissements– Destruction (ou non-exploitation) – Création (ou exploration)

de valeur de valeur– Discipline – Apprentissage

Implications en matière Administrateurs indépendants Administrateurs compétentsde « meilleures pratiques » de gouvernance

Le statut de l’argument cognitif dans le processus de création de valeur n’est cependant pas simple.D’une part, des administrateurs choisis pour leurs compétences cognitives et professionnelles dépas-sant la seule expertise en matière de surveillance sont susceptibles de contribuer à la valeur cognitive del’entreprise en suggérant au dirigeant des initiatives stratégiques inédites ou en incitant à l’apprentis-sage de certaines capacités organisationnelles. D’autre part, la structure mentale propre de certainsadministrateurs comporte également le risque d’un conflit tout autre que celui traditionnellementanalysé dans la théorie de l’agence, à savoir un conflit cognitif fondé non pas sur des intérêts objective-ment divergents, mais sur un véritable désaccord concernant la meilleure conduite à adopter (Conneret Prahalad, 1996, p. 483). Un tel conflit peut alors être source de coûts, notamment sous la formed’opportunités d’investissement non exploitées et/ou non créées.

Fort du constat de la plausibilité des coûts d’agence dans certains contextes, mais égalementconvaincu de l’incapacité de l’approche traditionnelle à saisir à elle seule correctement la nature duprocessus de création de valeur, Charreaux (2002 b) propose une intégration des approches discipli-

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naire et cognitive de la gouvernance dans un modèle unifié. Il procède en ajoutant des variablesnouvelles au modèle d’agence traditionnel : le raisonnement en termes de coûts d’agence managériauxtraditionnels est enrichi par l’introduction de « gains cognitifs » et de « coûts d’agence cognitifs ».Optimiser la valeur d’une entreprise relève par conséquent d’un arbitrage complexe et dynamiqueentre l’ensemble de ces variables, en sachant que la valeur concrète prise par chacune d’elles dans uncas réel dépend vraisemblablement de l’état de l’environnement, entre autres en matière de technolo-gie, de turbulence et de cadre institutionnel.

Alors, si une pratique de gouvernance tire sa légitimité comme étant la « meilleure » de sa capacitéà encourager l’optimisation de la création de valeur, les développements précédents devraient inciterà une certaine prudence dans le travail d’évaluation des dispositifs de gouvernance. En effet, créer dela valeur implique plus que la seule réduction des coûts d’agence à travers des instances disciplinaires.Or, qualifier les recommandations des CG sous leur forme actuelle – c’est-à-dire quasi exclusivementdisciplinaire – de « meilleures pratiques » implique que les grilles d’évaluation qui en sont dérivées(exemple : DVFA, 2000) négligent la dimension cognitive de la création de valeur. Une applicationrigide des recommandations des CG, bien qu’a priori indiquée dans certains cas de figure où lesproblèmes d’agence se révèlent effectivement intenses, risque d’avoir des effets contre-productifs dansdes activités exigeant de la part des dirigeants certaines compétences très spécifiques et difficilementcommunicables à des non-experts. Tel est notamment le cas des entreprises dans des secteurs de hautetechnologie à caractère fortement innovant. Il en résulte que la qualité des pratiques de gouvernanceest contingente et qu’il est vraisemblablement impossible d’établir le « meilleur » dosage entrepratiques à effet disciplinaire et pratiques à effet cognitif de façon universelle.

2.2. Compatibilité des idées cognitives avec les CGPour rendre justice aux CG, il convient de signaler que les aspects cognitifs n’y sont pas complètementignorés. On peut effectivement en trouver quelques traces, comme le montre la citation suivante issuedu code intitulé Swedish Shareholders Association Policy. « The board should be composed of capablemembers representing all-round competence. » (Weil, Gotshal et Manges, 2002, p. 51, nos italiques)Ainsi, le terme « all-round competence » semble plus proche d’un référentiel du type théorie fondéesur les ressources que d’une perspective étroitement disciplinaire.

L’approche contractuelle/disciplinaire de la gouvernance et l’approche cognitive n’apparaissentdonc pas comme complètement incompatibles. Simplement, bien que l’intérêt de l’expertise et de lacompétence professionnelles pour la création de valeur ne soit pas complètement ignoré par lesauteurs des CG, ces derniers n’en tirent pas véritablement de conséquences pour la formulationconcrète des « meilleures pratiques ». La dimension cognitive n’apparaît qu’implicitement et très à lamarge, alors que les aspects liés à l’asymétrie d’information et aux conflits d’intérêts sont développésd’une façon très explicite dans les CG. Ainsi, dans leurs recommandations, l’aspect disciplinaireprédomine.

Cela est susceptible d’avoir des implications pour l’applicabilité des CG. En fait, une des particu-larités des codes étudiés par Weil, Gotshal et Manges (2002) est le fait que l’application des principesqu’ils contiennent est facultative, dans la mesure où il ne s’agit pas de textes législatifs. Ainsi, la miseen œuvre concrète des « meilleures pratiques » de gouvernance est susceptible d’être caractérisée parune certaine souplesse. On peut probablement aller encore plus loin en formulant l’hypothèse selon

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laquelle l’adoption incomplète des « meilleures pratiques » de gouvernance par les entreprises, telleque régulièrement relatée dans les études de conformité 28, n’est pas seulement un phénomène passa-ger mais tient, au contraire, aux caractéristiques propres du processus de création de valeur decertaines firmes. Autrement dit, si certaines entreprises ne se conforment pas aux « meilleurespratiques » de gouvernance exposées dans les CG 29, et cela durablement, il n’est pas exclu qu’il s’agissed’entreprises où la variable cognitive joue un rôle très significatif, alors que les conflits d’agence sontde faible ampleur. C’est une hypothèse, qui mériterait d’être approfondie et testée ultérieurement.Sans représenter un test empirique rigoureux, certaines observations vont dans ce sens. Ainsi, le BerlinCenter of Corporate Governance de l’Université technologique de Berlin réalise annuellement uneenquête au sujet de la conformité des entreprises allemandes avec les recommandations du DeutscherCorporate Governance Kodex (Cromme Code). Il en ressort qu’un nombre marginal d’entreprisesapplique le code dans son intégralité, la plupart indiquant une mise en œuvre partielle. Par ailleurs, letaux des recommandations appliquées par rapport au nombre total est le plus élevé pour les entre-prises de grande taille (Werder, 2004), ce qui n’est pas surprenant si on accepte l’argument selon lequelles problèmes d’agence au sens traditionnel devraient être particulièrement présents dans les grandesfirmes à la Berle et Means. Notons aussi que le droit des sociétés allemand oblige depuis 2002 lesentreprises à publier une prise de position par rapport à l’application des recommandations du codeet à expliciter précisément les points sur lesquels leur pratique diverge de ces standards d’une « bonne »gouvernance. Certaines entreprises justifient ces divergences. Ainsi, on peut lire dans la déclaration dela Fresenius Medical Care AG pour 2003 que la recommandation visant la mise en place d’une limited’âge des membres du conseil n’est pas actuellement appliquée et ne le sera pas non plus dans l’avenir.La justification : « Une telle limite nous semble inadéquate, car le conseil de surveillance a besoin deconnaissances, de compétences et d’expérience technologique, qui sont autant de facteurs décisifs pour l’en-treprise » (Fresenius Medical Care AG, 2003, nos italiques, notre traduction). Nous voyons qu’ici unargument de connaissance et de compétence technologique est opposé à l’intention disciplinaire ducode qui consiste à réduire les possibilités d’enracinement.

ConclusionL’utilisation du terme « meilleures pratiques » est courante pour qualifier les recommandations conte-nues dans les codes de gouvernance. Ce terme ne doit cependant pas induire en erreur, car le superlatifsuggère l’universalité des recommandations formulées. Or, un examen attentif des présupposés théo-riques qui sous-tendent le jugement de valeur porté sur les mécanismes de gouvernance révèle la naturecontingente du modèle de création de valeur dominant. S’inscrivant dans une logique d’essence disci-plinaire, ce modèle conduit à des recommandations en termes de gouvernance qui pourraient êtrequalifiées de palliatifs à une possible spoliation des investisseurs, mais qui négligent la question centraledes sources de la construction d’un avantage compétitif durable. Pertinente dans certains contextes,notamment dans le cas des grandes firmes managériales au sens de Berle et Means (1932) où lesproblèmes d’agence sont potentiellement aigus, une application rigide de ces principes à n’importequelle entreprise risquerait d’être contre-productive, car faisant abstraction de deux déterminants essen-tiels de la création de valeur, à savoir la valeur cognitive et d’éventuels coûts d’agence cognitifs.

En pratique, la très large reconnaissance d’un ensemble de principes de gouvernance déboucheinévitablement sur un enjeu d’évaluation pour les entreprises. En témoigne l’apparition de grilles

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d’évaluation des pratiques de gouvernance, directement dérivées des principes formulés dans les codesde bonne conduite, comme la Scorecard for German Corporate Governance de l’association allemandedes analystes financiers et des gestionnaires d’actifs (DVFA, 2000) ou l’instrument d’évaluation utilisépar un cabinet de conseil comme Déminor et dont les analyses en matière de gouvernance sont régu-lièrement relatées par la presse financière. Récemment, les agences de rating ont également fait savoirque les standards de gouvernance allaient à l’avenir davantage influencer leur notation (Les Échos,30/03/2004). De par leur impact sur l’attitude de la communauté financière, de telles évaluations desfirmes par rapport à l’étalon des « meilleures pratiques » de gouvernance sont susceptibles d’influen-cer le comportement réel des entreprises soucieuses de gérer leur accès aux ressources. Pourtant, l’application des principes contenus dans les CG n’est pas un garant de la création de valeur.

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AnnexeLes codes de « meilleures pratiques » de gouvernance par pays

PAYS CODE DATE

Allemagne – Berlin Initiative Code Juin 2000– German Panel Rules Juillet 2000– Cromme Commission Code Décembre 2001

Belgique – Recommendations of the Federation of Belgian Companies Janvier 1998– Recommendations of the Belgian Banking and Finance Commission Janvier 1998– Cardon Report Décembre 1998– The Director’s Charter Janvier 2000

Danemark – Danish Shareholders Association Guidelines Février 2000– Nørby Report & Recommendations Décembre 2001

Espagne – Olivencia Report Février 1998

Finlande – Chamber of Commerce/Confederation of Finnish Industry Février 1997and Employers Code Novembre 2000

– Ministry of Trade & Industry Guidelines

France – Rapport Viénot Juillet 1995– Hellebuyck Commission Recommendations Juin 1998, mise

à jour octobre 2001– Rapport Viénot II Juillet 1999

Grèce – Mertzanis Report Octobre 1999– Federation of Greek Industries Principles Août 2001

Irlande – IAIM Guidelines Mars 1999

Italie – Preda Report Octobre 1999

Pays-Bas – Peters Report Juin 1997– VEB Recommendations 1997– SCGOP Handbook and Guidelines Août 2001

Portugal – Securities Market Commission Recommendations Novembre 1999

Royaume-Uni – Institute of Chartered Secretaries & Administrators Code Février 1991– Institutional Shareholders Committee Statement of Best Practice Avril 1991– Cadbury Report Décembre 1992– PIRC Shareholder Voting Guidelines Avril 1994, mise

à jour mars 2001– Greenbury Report Juillet 1995– Hermes Statement Mars 1997, mise

à jour janvier 2001– Hampel Report Janvier 1998– Combined Code Juillet 1998– Turnbull Report Septembre 1999– NAPF Corporate Governance Code Juin 2000– AUTIF Code Janvier 2001

Suède – Swedish Shareholders Association Policy Novembre 1999

Source : Weil, Gotshal et Manges (2002).

N.B. Ce tableau donne une idée de la diffusion géographique des idées (telles que promues par les acteurs dansleur discours officiel) sur les « meilleures pratiques » de gouvernance dans le temps. Ainsi, le premier payseuropéen à avoir enclenché le débat est le Royaume-Uni au début de la décennie 1990, suivi par la Franceavec le rapport Viénot de 1995. Il apparaît donc que la France a adopté un certain nombre d’idées sur lespratiques de gouvernance relativement tôt comparativement à d’autres pays d’Europe continentale, la vaguemassive suivante de publication de codes pouvant être datée des années 1997/98 (Belgique, Espagne, Pays-Bas). Il est remarquable qu’un pays comme l’Allemagne n’ait adopté ses codes que relativement tard, c’est-à-dire à partir de 2000. Cela représente presque une décennie après la première apparition du phénomène « meilleures pratiques » de gouvernance en Europe.

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Notes

1. Notre analyse se focalise essentiellement sur les « meilleures pratiques » promues en Europe, ce quiexplique l’horizon temporel retenu. Aux États-Unis, le mouvement est antérieur. Aguilera etCuervo-Cazurra (2004) identifient le rapport dela Business Roundtable, publié en 1978 aux États-Unis, comme le premier code de gouvernance. Ils’agit cependant d’une initiative relativementisolée, dans la mesure où il faut attendre le Code ofBest Practice de Hong Kong de 1989 avant d’assis-ter à une diffusion du phénomène en dehors desfrontières américaines, selon ces mêmes auteurs.

2. Nous avons calculé ce chiffre grâce à la liste descodes maintenue à jour par le European CorporateGovernance Institute (relevé du 31 mars 2004 ;www.ecgi.org/codes/all_codes.htm). Dans la listecomplète, nous avons supprimé 10 références, cesdernières n’étant pas des CG à strictement parler,mais des études comparatives et des projets de lois.

3. Pour être tout à fait précis, signalons l’antérioritéd’une initiative du secteur public britannique de1982, baptisée ProNED (promotion of non-execu-tive directors).

4. Il est par ailleurs intéressant de noter que cet effortde réflexion mené en Grande-Bretagne au sujet del’efficacité des systèmes de contrôle des entre-prises, qui se traduit par la publication du rapportCadbury en décembre 1992, coïncide avec unensemble de critiques similaires adressées, quasi-ment en même temps, à la gouvernance des entre-prises américaines et émanant directement d’undes plus éminents contributeurs à la théorie finan-cière contemporaine (Jensen, 1993).

5. Pour une liste des codes par pays, voir annexe.6. L’utilisation du qualificatif best practice est en effet

extrêmement fréquente (Weil, Gotshal et Manges,2002), et se retrouve sous une forme plus oumoins explicite (« best practice », « good corporategovernance », « meilleur gouvernement des entre-prises », « buen gobierno ») même dans le titre decertains codes. Tel est effectivement le cas de 18 CG de la liste du ECGI.

7. « The corporate governance codes analyzed forthis study emanate from nations with diversecultures, financing traditions, ownership struc-

tures and legal origins. Given their distinctorigins, the codes are remarkable in their similari-ties, especially in terms of the attitudes theyexpress about the key roles and responsibilities ofthe supervisory body and the recommendationsthey make concerning its composition and prac-tices [...] » (p. 74)

8. Un exemple récent des recherches portant sur l’effet concret des « meilleures pratiques » de gouver-nance est fourni par Carcello et Neal (2003). Cesauteurs étudient l’impact de l’indépendance ducomité d’audit sur les choix comptables adoptéspar les dirigeants et trouvent qu’un faible degréd’indépendance est positivement corrélé avec unecommunication financière véhiculant une imageoptimiste de la situation des entreprises en difficulté.

9. Pour une analyse générale de la relation entregouvernance et comptabilité, voir Charreaux(2000a) et Wirtz (2000).

10. Il est significatif d’observer que les investisseursinstitutionnels, qui comptent parmi les promo-teurs engagés des CG, prétendent être disposés àpayer plus cher les actions d’entreprises « biengouvernées » (McKinsey, 2000).

11. Pour l’Allemagne, Pellens (2001, p. 1246) trouveune proportion de 61,8 % des dirigeants interro-gés qui adhèrent à l’idée de l’importance des CG.Selon la même enquête (p. 1249), 85,3 % desrépondants considèrent qu’une « bonne » gouver-nance a un impact positif sur le cours boursier.

12. Il convient de noter que la lecture attentive de lamajorité des codes semble révéler que les intérêtsdevant être servis par les dirigeants sont globale-ment définis d’une manière relativement large,dépassant une perspective étroitement focaliséesur les seuls actionnaires (Weil, Gotshal etManges, 2002, p. 75-76). C’est également vraipour le Royaume-Uni, ce qui peut surprendrecompte tenu de la caricature qui en est souventfaite, présentant la gouvernance anglo-saxonnecomme inspirée par une idéologie actionnarialepure.

13. Jensen et Meckling (1976).

14. « [...] all codes place significant emphasis on theneed for a supervisory body that is distinct frommanagement in its decisional capacity for objecti-

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vity to ensure accountability and provide strategicguidance. » (Weil, Gotshal et Manges, 2002, p. 77, nos italiques)

15. « The codes reflect a trend toward reliance onboard committees to help organize the work of thesupervisory body, particularly in areas where theinterests of management and the interests of thecompany may come into conflict, such as in areas ofaudit, remuneration and nomination. » (Weil,Gotshal et Manges, 2002, p. 78, nos italiques)

16. Parmi les 72 CG inventoriés par Aguilera etCuervo-Cazurra (2004, p. 423), 15 ont été propo-sés par des investisseurs.

17. 22 codes relèvent de l’initiative des bourses (ibid.),dont le rôle consiste précisément à organiser laconfrontation de l’offre et de la demande de capi-taux. Notons, par ailleurs, que d’autres initiativesmenées par des organismes qui ne représentent passpécifiquement la profession financière justifientégalement leurs principes d’une « bonne » gouver-nance par des arguments financiers. Le premierrapport Viénot, initiative patronale, en donne unexemple : « Les recommandations qu’il [le rapportViénot] formule à cet égard lui paraissent s’impo-ser pour raffermir la confiance des souscripteursdans les organes sociaux des entreprises danslesquelles ils sont invités à investir. » (Viénot,1995, p. 5)

18. «Without the direction of an independent leader,it is much more difficult for a board to perform itscritical function. Therefore, for the board to beeffective, it is important to separate the CEO andthe chair positions. » (Jensen et Chew, 1995)

19. « Because the possibility for internal animosityand retribution from the CEO is too great, it isalmost impossible for direct reports to the CEO toparticipate openly and critically in effectiveevaluation and monitoring of the CEO.Therefore, the only inside board member shouldbe the CEO [...] » (ibid.)

20. Notons que quelqu’un comme Jensen est, en prin-cipe, conscient de la faiblesse d’une approchepurement disciplinaire. Nous en voulons pourpreuve la citation suivante de Jensen et Chew(1995). « Boards are moved to serve shareholdersprimarily by substantial legal liabilities through

class action suits initiated by shareholders, theplaintiffs bar, and others – lawsuits that are oftentriggered by unexpected declines in stock price.These legal incentives are more often consistentwith minimizing downside risk than with maxi-mizing value. » (nos italiques) Toujours est-il quecet auteur ne s’emploie pas véritablement à unapprofondissement conceptuel des mécanismes decréation de valeur autres que disciplinaires.

21. Nous rappelons qu’il s’agit d’un des premiers CGeuropéens.

22. Sous le titre « Qu’est-ce qu’une bonne théorie ? »,Boudon (1999, p. 349-385) développe une réflexionméthodologique sur les conditions d’acceptabilitéd’une théorie scientifique.

23. L’étude de Weil, Gotshal et Manges (2002)montre en effet qu’au moins 11 des 35 CG analy-sés encouragent l’application de leurs recomman-dations à toutes les catégories de sociétés (voirtableau G, p. 25-26).

24. Précisons que, pour identifier l’existence de freecash flow et exercer, le cas échéant, de la discipline,un observateur externe doit avoir connaissance del’ensemble des opportunités d’investissement quis’offrent à l’entreprise. Cela peut paraître commerelativement plausible dans des secteurs d’activitéà maturité et, donc, bien connus, mais semble apriori plus problématique dans des industries rela-tivement nouvelles marquées par un haut degréd’incertitude (au sens de Knight, 1921). Parconséquent, l’approche purement disciplinaire dela gouvernance perd de sa pertinence dans unenvironnement caractérisé par un degré élevé d’in-certitude.

25. Voir également Bhagat S. et Black B. (1999).

26. Cette fonction proprement stratégique du conseild’administration est étudiée par Goodstein,Gautam et Boeker (1994), qui expliquent que lacapacité à initier des changements stratégiques serévèle notamment importante pour des firmesévoluant dans un environnement turbulent. Or, lesauteurs ne trouvent pas de relation significativeentre cette capacité critique et la proportion d’administrateurs indépendants au sein du conseil.

27. Nous rappelons que cette hypothèse est unecondition nécessaire pour identifier d’éventuels

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problèmes de free cash flow et exercer de la disci-pline pour y remédier comme l’appelle de sesvœux Jensen (1993).

28. Dans le cas de la France, on peut citer l’exempledes études du cabinet KPMG qui analyse réguliè-rement le degré de mise en application des recom-mandations du rapport Viénot par les entreprises.

29. Bouton (2002, p. 5) fait le constat suivant concer-nant les recommandations des rapports Viénot : « Il reste qu’il existe de grandes entreprises cotéesqui ne satisfont pas encore à certaines des règlesessentielles qu’ils avaient préconisées. »

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