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1 Mémoire de dernière année du Magistère de Juristes d’affaires de l’Université Paris II - Assas sous la direction de M. de Vauplane Sujet : La présomption de légitimité au regard de l’abus de marché ou le safe harbor en droit français Arnaud Roulhac de Rochebrune Etudiant en 3 ème année du Magistère DJCE de l’Université Paris II - Assas

Mémoire de dernière année du Magistère de Juristes …mja-assas.fr/wp-content/uploads/La-présomption-de-légitimité-au... · XX siècle aux Etats-Unis4. Ce type d’agissements

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    Mmoire de dernire anne du Magistre de Juristes daffaires

    de lUniversit Paris II - Assas

    sous la direction de M. de Vauplane

    Sujet : La prsomption de lgitimit au regard de labus de

    march ou le safe harbor en droit franais

    Arnaud Roulhac de Rochebrune

    Etudiant en 3me anne du Magistre DJCE

    de lUniversit Paris II - Assas

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    "L'universit Panthon-Assas (Paris II) droit - conomie - sciences sociales, n'entend

    donner aucune approbation, ni improbation, aux opinions mises dans ce mmoire. Ces

    opinions doivent tre considres comme propres leur auteur".

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    Sommaire

    Introduction p. 7

    Chapitre 1 : Le safe harbor en application de la rglementation europenne des

    abus de march p. 10

    Introduction

    Section Prliminaire rappel quant llaboration de la norme communautaire :

    le plan global daction europenne pour les services financiers p. 11

    A) La norme de niveau 1 : la Directive abus de march

    B) Les normes de niveau 2 : les directives et rglements dapplication

    1) Rglement n 2273/2003 de la Commission du 22 dcembre 2003 sur

    les programmes de rachat et de stabilisation dinstruments financiers

    2) Directive n 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004. Directive

    portant modalits dapplication de la Directive n 2003/6/CE en ce qui concerne les

    pratiques de march admises

    3) Directive n 2003/124/CE

    C) La norme de niveau 3 : le rapport du CESR

    Section 1 Le safe harbor est une exception un principe p. 18

    1 Le principe dinterdiction p. 18

    A) Linterdiction de manipuler le cours

    1) La manipulation de cours

    2) Lidentification des manipulations

    a) Les trois exemples de la Directive abus de march

    b) Les signes prendre en compte lors de lexamen dune opration

    B) Le prsuppos : les oprations sur instruments financiers propres sont

    susceptibles de causer des manipulations de cours

    1) La formation des cours

    2) Latteinte au march

  • 4

    2 Lexception : la lgitimit dune pratique p. 24

    A) Lintervention est lgitime

    B) Lintervention relve dune pratique de march admise

    1) les pratiques de march admises

    2) un mini safe harbor ?

    C) Lintervention lgitime par le safe harbor

    1) Le safe harbor au sens communautaire

    2) Une protection absolue

    Section 2 Le safe harbor est un mode de rgulation innovant p. 30

    1 Un mode de rgulation dorigine amricaine p. 30

    A) Le safe harbor bas sur la volont des intervenants

    1) Le safe harbor un refuge

    2) Le safe harbor : un guide

    a) Libre volont des intervenants dy recourir

    b) Limites

    B) Mise en uvre du safe harbor amricain

    1) Conditions de mise en oeuvre

    a) Manner of purchase condition

    b) Timing condition

    c) Price condition

    d) Volume condition

    2) Information : la disclosure

    2 Un mode de rgulation avantageux repris par le droit communautaire p. 35

    A) Une rglementation plus souple et adapte pour le rgulateur

    B) Un outil pour le lgislateur

    C) Une meilleure scurit pour lintervenant

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    Chapitre 2 : Le safe harbor lpreuve de la transposition franaise p. 37

    Introduction

    Section prliminaire rappel du traitement des manipulations de cours en droit

    franais p. 38

    1 Historique de la Manipulation de cours p. 38

    2 Un double rgime rpressif de la manipulation de cours p. 39

    A) La manipulation de cours sous langle du droit pnal

    B) La manipulation de cours sous langle du droit administratif

    Section 1 Une transposition qui vide de son intrt le safe harbor p. 43

    1 Une plus grande scurit pour les oprateurs p. 43

    A) Un encadrement plus protecteur

    1) Des conditions claires

    2) Une prsomption irrfragable de lgitimit

    B) Un encadrement qui rigidifie le systme

    2 Le risque que les acteurs sen dtournent au profit des pratiques de march

    p. 48

    A) Les pratiques de march sont exclusives du safe harbor

    1) Deux pratiques de march

    2) Ne relevant pas du safe harbor

    B) Au risque que les intervenants prfrent les pratiques au dtriment du safe

    harbor

    3 Une application respectueuse p. 51

    A) La dcision Eurazeo : une application juste du safe harbor

    B) Dans une hypothse spciale de manipulation formelle

  • 6

    Section 2 Le safe harbor : une nouvelle faon dapprhender la manipulation de

    cours ? p. 54

    1 La protection du march ou du prix ? p. 54

    A) Lacception traditionnelle : la protection des prix ?

    B) Lapproche moderne par le march

    2 Le droit de la concurrence laide de la rpression de la manipulation de cours

    p. 57

    A) De lapport du Droit de la concurrence

    B) Labus de domination

    1) La manipulation de cours, un abus de domination

    2) La preuve de labus

    Conclusion p. 63

    Bibliographie p. 65

  • 7

    Introduction

    " Vous vendez, n'est-ce pas ? " demanda Moser Salmon.

    Mais le muet sourire de ce dernier fut si aiguis de finesse, qu'il en resta anxieux,

    doutant maintenant de cet ultimatum de l'Angleterre, qu'il ne savait mme pas avoir

    invent 1.

    Zola aprs La Cure, o il narre lenrichissement foudroyant du dnomm Saccard sur le

    march immobilier parisien la fin du XIX sicle, sattaque aux spculations de ce

    dernier sur le march boursier. Il se fait lcho dune bruyante et relle affaire qui frappa

    la conscience collective2 : la faillite de lUnion Gnrale en 1882, qui entrana la chute et

    la condamnation de lhomme daffaires Eugne Bontoux. Faillite retentissante, car elle

    ruina un grand nombre de petits porteurs qui avaient mis lensemble de leurs conomies

    dans ce projet. Projet dautant plus attrayant quil prsentait monts et merveilles au vu de

    ses perspectives financires. Faillite retentissante, car cause par les agissements

    purement spculatifs de quelques uns3. Ces oprations qui, par utilisation de manuvres

    sur le cours de Bourse, ont fait croire la sant financire de la compagnie.

    Cette affaire rvle les prmisses de la criminalit en col blanc qui sera dnonce au

    XX sicle aux Etats-Unis4. Ce type dagissements a peu peu fait lobjet dune

    rpression, car il contrevenait lordre et la morale publique, en effet la spculation a

    depuis longtemps t vue comme nfaste lordre public conomique5. Il nen demeure

    pas moins que les sanctions pnales ou administratives prononces lencontre des

    auteurs de manipulations de march sont excessivement rare 6, car sans forcment

    1 E. ZOLA, LArgent, 1891. 2 M-C. de NAYER, Le rachat daction, Bull. Joly Bourse, 01 septembre 1998, n 5, p. 597. 3 Notamment les banquiers ROTHSCHILD, V. larticle Wikipedia sur

    http://fr.wikipedia.org/wiki/LArgent. 4 E. SUTHERLAND, White-collar criminality, address at the president during the sociological meeting of

    1939. American sociological review, 1940, p. 1. 5 Cf. la faillite de la Compagnie des Indes, la banqueroute du systme LAW en 1721 et enfin les cinq

    reproches de CALONNE la spculation. 6 M. TOMASI, Vers un renouveau de la lutte contre les manipulations de cours : lapport de la Directive

    abus de march, Mlanges AEDBF France IV, p. 439.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/L'Argent

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    mener la faillite, ce sont des pratiques fugaces, multiformes et peu voyantes . Par

    consquent plus difficilement rprhensible. La manipulation de cours est alors devenue

    un dlit qui vise apporter une sanction des altrations apportes volontairement par

    certains metteurs au processus de formation des cours de bourse 7.

    Depuis la faillite de lUnion Gnrale, les marchs financiers se sont muts

    profondment et ce changement ncessite du juriste non plus une approche purement

    juridique (plus prcisment pnaliste), mais aussi une apprhension des manipulations

    sous un angle conomique. En outre louverture europenne, la mondialisation des flux

    financiers, le dveloppement exponentiel des nouvelles technologies requirent une

    vision globale du phnomne de manipulation de cours. Si le doute persiste, il nest qu

    voir le dveloppement du March unique dans le cadre de lUnion europenne.

    Dabord construite sur le principe de la libert de circulation des marchandises et des

    personnes, lUnion europenne a ensuite pris la voie de la libre circulation des capitaux.

    Ds lors, tout un chacun a la possibilit de faire circuler ses capitaux dans les Etats

    membres et donc dinvestir dans les titres financiers cots sur les places europennes.

    Cependant deux risques majeurs risquent dentraver lharmonisation recherche, savoir

    dune part la disparit des rglementations antrieures entre chaque pays et dautre part

    lapplication non uniforme par chaque tat des rgles europennes.

    La Directive 89/592/CEE du Conseil du 13 novembre 19898, a fond le cadre juridique

    communautaire de la lutte contre les Abus de march, mais plus particulirement contre

    les dlits dinitis et non contre les manipulations de cours. En outre, labsence et/ou la

    grande diversit de rglementation entre les tats9, le dveloppement des changes

    commerciaux et de l'information, louverture toujours plus grande du March unique

    ainsi que de rcents scandales financiers dans les annes 200010 ont entran une remise

    7 D. OHL, Le droit des socits cotes, d. Litec, n529. 8 JOCE n L 334 du 18/11/1989 p. 30 - 32. 9 Considrant n 11 de la Directive abus de march. 10 Cf. la dnonciation faite des pratiques de la socit Vivendi Universal en octobre 2001, dans le Rapport

    au Snat 104-309 sur http://www.senat.fr/rap/l04-309/ et aussi N. RONTCHEVSKY, Une raction des

    institutions communautaires face aux rcents scandales financiers : ladoption de la Directive relative aux

    abus de march, RTD Com., 2003, n3, p. 53.

    http://www.senat.fr/rap/l04-309/

  • 9

    jour du traitement des Abus de march. La construction du March Unique europen

    se fonde sur lharmonisation des rgles rgissant les diffrentes places financires au

    sein de lUnion. Cette rgulation visant protger tant le petit investisseur assimil au

    consommateur, que linvestisseur important qui jongle entre les bourses.

    Cest au travers de la Directive abus de march du 23/01/200311 que les institutions

    europennes ont entendu rgler le problme des abus de march. Abus de march

    constitus par les dlits dinitis, mais aussi par les manipulations de march, c'est dire

    au sens communautaire la fois la manipulation de cours et la diffusion de fausses

    informations. Ltude, ici propose, nentend sintresser qu la manipulation de cours

    et non la fausse information, mme si la frontire entre les deux peut apparatre

    poreuse.

    La manipulation de cours est une entrave lefficience du march, elle est difficile

    cerner et dfinir et le lgislateur pourrait tre tent dinterdire par principe toute forme

    de manipulation. La ralit est nanmoins plus nuance et certaines manipulations

    savrent bnfiques aussi bien pour lintervenant, c'est dire loprateur qui agit

    lachat ou la vente, que pour le march. Une interdiction gnrale nest donc pas

    efficace, il faut admettre des exceptions.

    Ces exceptions sont clairement mises en place par la Directive abus de march qui

    introduit un mode de rgulation nouveau via linstauration dun safe harbor et de

    pratiques de march admises. Safe harbor selon lequel lintervenant sur le march, sil

    suit certaines conditions, bnficiera de lexception. Il ne sera pas pour autant

    responsable dune manipulation au cas o il ne se conformerait pas au safe harbor, tant

    quil peut dmontrer la lgitimit de son intervention. Pratiques de march admises selon

    lesquelles le rgulateur national nonce des pratiques qui seront, sauf preuve contraire,

    rputes lgitimes.

    11 JOUE, 12 avril 2003, L 96/16.

  • 10

    Ce texte communautaire devait tre transpos en droit franais avant le 12 octobre

    200412. Nanmoins le concept de safe harbor dorigine anglo-saxonne droge aux modes

    de rgulations traditionnels utiliss en France, o il a t transpos au travers dune

    prsomption irrfragable de lgitimit qui nest pas voque par la Directive abus de

    march. Ds lors de manire gnrale cette tude cherchera vrifier la ralit du safe

    harbor en droit franais ?

    Pour rpondre cette interrogation il y a lieu de saisir les termes du dbat en

    auscultant au regard de la rglementation europenne des abus de march la notion de

    safe harbor (Chapitre 1) puis dans un second temps il sagira de vrifier la conformit de

    la notion lpreuve de la transposition franaise (Chapitre 2).

    Chapitre 1 : Le safe harbor en application de la rglementation europenne des

    abus de march

    Le 11 mai 1999 la Commission europenne adopte par une Communication13 le plan

    daction pour les services financiers, visant rendre plus efficace llaboration de la

    norme communautaire. Et, cest loccasion du Conseil europen de Lisbonne en mars

    2000 puis ensuite lors du Conseil europen de Stockholm, en mars 2001, que les chefs

    d'Etat ou de gouvernement ont demand que ce plan daction respecte un calendrier avec

    pour objectif : lintgration des marchs financiers europen en 200514. Le plan daction

    vise lachvement du march unique pour les services financiers et offrir par l mme

    un niveau de scurit et defficacit identique dans tous les tats membres. Enfin,

    imposer des rgles de surveillance prudentielle de niveau lev15. En effet le risque

    europen dun abus de march existe bien, soit directement en cas de multi cotations,

    soit indirectement de par ses effets secondaires.

    12 Article 18 de la Directive abus de march. 13 Communication de la Commission n 232 du 11 mai 1999, Mise en uvre du cadre daction pour les

    services financiers : plan daction. 14 Cf. pour un expos plus exhaustif les observations gnrales sous le Projet de dcision de la

    Commission du 6 juin 2001 instituant le comit europen des valeurs mobilires. 15 Communication de la Commission n 232 du 11 mai 1999 prcite.

  • 11

    Si la volont tait bien prsente encore fallait-il une mthode rapide dlaboration de la

    norme. Cette mission a t confie A. Lamfalusy et au Comit des sages sur la

    rgulation des marchs europens des valeurs mobilires institu par le Conseil europen

    du 17 juillet 2000. Ce comit a rendu son rapport final en fvrier 2001, qui a t entrin

    par le Conseil europen de Stockholm en mars 2001. Il a mis en place une mthode

    originale16 avec des dates de mise en uvre rapproches17.

    Il sagit dune mthode pragmatique, prenant en compte le dsir selon lequel la directive

    doit rester gnrale et le rglement entrer dans le dtail. Plus prcisment il sagit dune

    approche rglementaire quatre niveaux, dont lefficacit semble avre. Les

    institutions europennes se flicitent dans divers rapports de leffet positif de ce

    processus et rflchissent dj le renouveler et llargir dautres domaines18.

    Cest au travers de ce processus qua t labor le concept de safe harbor, il sagit

    dabord de rappeler le processus dlaboration de la norme communautaire (Section

    prliminaire), pour ensuite voir quil sagit dune exception un principe (Section 1),

    traduisant un mode innovant de rgulation (Section 2).

    Section Prliminaire rappel quant llaboration de la norme communautaire :

    le plan global daction europenne pour les services financiers

    Cette section prliminaire sera exclusivement descriptive, elle a pour but de rappeler

    lorigine du concept de safe harbor, replac dans llaboration de la norme

    16 Cf. un rappel chronologique dans les Considrants n 3 6 de la Directive abus de march. 17 Pour mmoire on rappelle le calendrier de transposition des Directives adoptes :

    - Directive abus de march 12 octobre 2004

    - Directive prospectus 1er juillet 2005

    - Directive Marchs dinstrument financiers 30 avril 2006

    - Directive OPA 20 mai 2006

    Ainsi la Directive abus de march est la premire des Directives du plan daction bnficier du processus

    LAMFALUSSY. Runion dinformation presse de lAMF en date du 21 octobre 2004, Transposition de la

    Directive abus de march : enjeux et impacts pour la place financire, p. 4. 18 Cf. les diffrents rapports sur le site : http://europa.eu.int/rapid/pressReleasesAction.do et la nouvelle

    consultation pour dventuelle proposition damlioration du processus LAMFALUSSY, Commission

    europenne, communiqu IP/04/1384 du 19 novembre 2004.

    http://europa.eu.int/rapid/pressReleasesAction.dohttp://europa.eu.int/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/04/1384&format=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=frhttp://europa.eu.int/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/04/1384&format=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=fr

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    communautaire en matire financire et non de rentrer dans le dtail. Un bon schma

    tant souvent plus efficace quun long discours le tableau suivant rsume les

    dveloppements ci-aprs prsents19 :

    19 Rapport n 2351 du 30 mai 2005 devant lAssemble nationale sur le Projet de Loi (n2281) portant

    diverses dispositions dadaptation au droit communautaire dans le domaine des marchs financiers, R.

    MALLIE, rapporteur gnral, dput.

  • 13

    A) La norme de niveau 1 : la Directive abus de march20

    Dans cette hypothse lensemble des parties intresses est amen intervenir. La

    Commission, aprs consultation des comits comptents, adopte un projet de proposition

    examin par le Parlement europen et le Conseil qui vont laborer une directive cadre.

    Ces directives ne visent qu dcrire les principes gnraux de la rgulation ainsi qu

    donner des dfinitions des concepts en jeu et elles relguent le dtail aux niveaux

    suivants. Dans la matire objet de cette tude, cest la Directive abus de march qui est

    la norme de niveau 1. Elle vise adopter un corps de rgles communes pour combattre

    la fois les oprations dinitis et les manipulations de march 21, tout en instituant le

    concept de safe harbor22.

    La Directive abus de march nonce le principe dinterdiction de manipuler le cours et

    les exceptions acceptables23. Elle est applicable toute personne physique ou morale en

    application de larticle 5 de la directive qui ne distingue pas selon la qualit. Larticle 2-

    2 prcisant logiquement que quand une personne morale est en cause, la rglementation

    sapplique aussi aux personnes qui prennent la dcision pour le compte de la personne

    morale.

    En outre, la directive sapplique tout instrument financier rentrant dans une des

    catgories ci-dessous dfinies :

    Linstrument est admis la ngociation sur un march rglement dau moins un tat

    membre24.

    Linstrument fait lobjet dune demande dadmission la ngociation sur un march

    rglement dau moins un tat membre25.

    Linstrument nest pas admis sur un march rglement mais sa valeur dpend dun

    instrument financier cot sur un march rglement26.

    20 JOUE, 12 avril 2003, L 96/16. 21 Considrant n 12 de la Directive abus de march. 22 Article 8 de la Directive abus de march. 23 Article 1 de la Directive abus de march. 24 Article 9 de la Directive abus de march. 25 Idem. 26 Article 2,3 et 4 de la Directive abus de march.

  • 14

    B) Les normes de niveau 2 : les directives et rglements dapplication

    Des directives et des rglements sont pris en application des directives cadres, ils ont

    pour but de fixer les modalits et les mesures dexcution. A ce niveau, seule la

    Commission est invite participer. Ainsi on parle de directive ou rglement de la

    Commission. Cependant les tats sont consults via leurs rgulateurs propres rassembls

    au sein du comit des rgulateurs des valeurs mobilires (ci-aprs le CESR selon ses

    initiales en anglais). Du reste, un Comit indpendant est consult, cest le comit

    europen des valeurs mobilires (ci-aprs le CEVM). Enfin la crainte dune

    rglementation purement bureaucratique est tempre par un contrle offert au

    Parlement qui tout moment peut prendre des rsolutions pour sopposer si besoin tait

    en dclarant que la norme relve du niveau 1 et donc ncessite son intervention.

    1) Rglement n 2273/2003 de la Commission du 22 dcembre 2003 sur

    les programmes de rachat et de stabilisation dinstruments financiers

    Le Considrant n 1 du Rglement n 2273/200327 rappelle que larticle 8 de la

    Directive abus de march offre un safe harbor aux intervenants sur le march qui ont

    pour objectifs soit la stabilisation dinstruments financiers, soit la mise en place dun

    programme de rachat dactions et qui remplissent certaines conditions (afin dviter

    toute rptition, ces conditions seront vues et commentes par la suite Chapitre 2,

    section 1, 1).

    Larticle 2-3 du rglement prcit ne donne pas de dfinition des programmes de

    rachat dactions, il ne procde qu un renvoi aux articles 19 24 de la Directive

    77/91/CE28. La problmatique du rachat de ses propres actions par lmetteur, est une

    problmatique qui relve du droit des socits. Elle se doit de rpondre un subtil

    dosage entre interdiction de sauto dtenir, pour des raisons de garantie des cranciers, et

    autorisation de principe, pour des raisons davantage conomique notable. Les articles

    27 JOCE, n L 336, du 23 dcembre 2003. 28 Deuxime directive 77/91/CEE du Conseil, du 13 dcembre 1976, JOCE n L 026 du 31/01/1977, p. 1

    13. Celle-ci fait actuellement lobjet dune proposition de modification.

  • 15

    19 et 24, dont il a t fait rfrence, ci-dessus sont issus dune directive qui avait pour

    objectif dharmoniser au sein de lUnion europenne les garanties offertes par les

    socits anonymes leurs cranciers. Ici la problmatique est quelque peu diffrente

    puisquil sagit de la matire boursire. La problmatique se situe ente le fait que le

    rachat massif de droits sociaux en bourse peut avoir un effet vident sur le cours et

    devrait donc tre prohib et la ncessit dautoriser les programmes de rachat. Cest

    pourquoi le Chapitre 2 du rglement prcise les conditions que doit remplir le

    programme de rachat pour tre valide et ainsi bnficier du safe harbor.

    La stabilisation dinstruments financiers signifie tout achat ou offre dachat de

    valeurs concernes [] ralis par des entreprises dinvestissement ou des

    tablissements de crdit dans le contexte dune distribution significative de telles

    valeurs, dans le seul but de soutenir leur prix sur le march pendant une dure

    prdtermine en raison dune pression la vente sexerant sur elles 29. Autant un

    programme de rachat naura pas obligatoirement pour effet de manipuler les cours,

    autant la stabilisation ne vise qu manipuler le cours. La dfinition implique en effet

    que le cours ne serait pas un niveau tel si la stabilisation ntait pas pratique.

    2) Directive n 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004. Directive

    portant modalits dapplication de la Directive n 2003/6/CE en ce qui concerne les

    pratiques de march admises

    Les objectifs de cette directive de niveau 2 poursuivent la mise en uvre de la

    Directive abus de march, puisquen effet, elle vise en donner les modalits

    dapplication. Cependant de manire plus prcise, cette directive nonce le rgime

    applicable aux pratiques de march admises. Le CESR a t amen prciser ce quil

    fallait entendre par pratiques de marchs . En effet du terme anglais de practices

    venait la confusion, signifiant la fois les pratiques condamnables et lactivit dite

    ordinaire. En effet le CESR a par un avis invit les oprateurs faire la distinction entre

    29 Article 2-7 du Rglement n2273/2003.

  • 16

    les pratiques et lactivit dordinaire ne relevant pas de la rgulation des abus de

    march30.

    Dans un but minemment pragmatique, la Directive distingue entre les bonnes et les

    mauvaises pratiques de march et ne rejette pas par principe toutes les pratiques de ct.

    Ainsi dans son Considrant n1, la Commission fait-elle la distinction entre les pratiques

    susceptibles de nuire lactivit normale du march et son intgrit et les pratiques

    qui amliorent sa (le march) liquidit . Une autre preuve de ralisme du lgislateur

    europen est la prise en compte dvolution rapide des pratiques pour sadapter aux

    besoins des investisseurs 31. Ce qui explique en partie pourquoi la Directive sempche

    de dfinir elle mme les pratiques qui doivent tre admises et laisse alors aux autorits

    de chaque tat membre la libert de dcision. En effet il relve des autorits comptentes

    d valuer lacceptabilit dune pratique 32.

    Ceci tant prcis, une pratique avant dtre opposable par lintervenant doit dabord

    tre admise. En outre avant mme de prononcer son admission lautorit comptente doit

    procder lvaluation de la pratique. Larticle 2 de la Directive 2004/72/CE en son

    premier alina numre sept critres cumulatifs de base prendre en compte, auxquels

    peuvent sajouter des critres la discrtion de lautorit comptente.

    Les sept critres sont dans lordre de larticle 2 : le degr de transparence de la pratique,

    le libre jeu de loffre et de la demande, limpact de la pratique sur la liquidit du march,

    la possibilit pour les intervenants de ragir la pratique, lintgrit des marchs des

    autres tats membres, les enqutes pralables sur la pratique en cause et les

    caractristiques structurelles du march.

    Lvaluation au vu des sept critres nest pas suffisante, encore faut-il que lautorit

    comptente suive une procdure spciale, tel que lnonce larticle 3 de la directive qui

    fait renvoi aux dispositions de la Directive abus de march. Enfin lautorit de dcision

    30 An AMP is only relevant when a particular practice appears to fall within the Directive's definition of

    market manipulation and many everyday business practices would not fit within this Avis du CESR/ 03-

    212c la commission. 31 Considrant n1 de la Directive n 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004. 32 Considrant n4 de la Directive n 2004/72/CE de la Commission du 29 avril 2004.

  • 17

    doit rendre publique ses dcisions et les faire connatre aussi rapidement que possible au

    Comit europen des rgulateurs. Il faut en outre prciser que lautorit a une obligation

    dordre didactique qui est de prciser clairement ce quil entend par cette pratique.

    3) Directive n 2003/124/CE

    La Directive n 2003/124/CE du 22 dcembre 200333 donne la dfinition et la manire

    de procder aux publications des informations privilgies ainsi que la dfinition des

    manipulations de march, elle porte modalits d'application de la Directive 2003/6/CE.

    Cette directive concerne la dfinition de linformation privilgie, mais surtout le

    faisceau d'indices permettant d'identifier les pratiques constitutives d'une manipulation

    de march ainsi que les signaux permettant d'identifier les manipulations consistant

    recourir des procds fictifs ou toute forme de tromperie ou d'artifice.

    C) La norme de niveau 3 : le rapport du CESR

    Il sagit ici dun des domaines principaux dintervention du CESR, savoir que les

    rgulateurs au sein du comit dlivrent des interprtations. Bien plus que la prise de

    positions communes les rgulateurs doivent rellement collaborer pour obtenir une

    application cohrente des normes de niveau 1 et 2 au sein de lUnion. Une norme

    harmonise doit sappliquer dans tous les Etats pour quil ne suffise pas de franchir

    une frontire pour y chapper 34.

    Le rapport du CESR/ 04-505b relatif aux pratiques de march admises (Accepted

    Market Practices) confirme linterprtation, dans son Chapitre II, selon laquelle les

    pratiques de march admises ne sont pas des safe harbor et prcise ensuite que la

    dcision dun rgulateur dautoriser une pratique de march admise na deffet qu

    lgard de ltat pour lequel il prend sa dcision.

    33 JOCE, n L. 339 du 24 dcembre 2003, p. 70. 34 Interview de F. DEMARIGNY, secrtaire gnral du CESR, Les Petites Affiches, 21 juillet 2004, n

    154, p. 4.

  • 18

    Au Chapitre III, le CESR fournit un tableau de lecture pour procder ladmission

    dune pratique de march en suivant les sept critres ncessaires mais non exhaustifs.

    Au chapitre IV, le CESR nonce les pratiques quil considre comme constituant des

    manipulations de march et au Chapitre V ce qui peut tre traduit par les signaux ou plus

    justement les indices (signals en anglais) rvlateurs dune manipulation de march.

    Il est intressant de voir quune rgulation financire commune se met en place et

    quun mouvement semble poser les premires pierres dun rgulateur commun lUnion

    europenne, savoir le CESR35. Le principe de lutte contre les Abus de march tant le

    premier de ces exemples.

    Section 1 Le safe harbor est un rgime dexception un principe

    Le safe harbor est une exception un principe dinterdiction de manipuler les cours

    sur le march (1). Celui qui en bnficie peut alors agir sur le march, il ne risque pas

    pour autant la condamnation puisquelle est juge lgitime (2).

    1 Le principe dinterdiction

    Linterdiction est de manipuler le cours (A) car cela porte atteinte lintgrit du

    march , or il y a lieu de constater que par essence les interventions dun metteur sur

    ses propres titres sont fortement susceptibles dinterfrer sur le libre jeu de loffre et de

    la demande (B).

    A) Linterdiction de manipuler le cours

    35 G. RAMEIX, Les risques de rgulation, Vers une culture de rgulation financire commune, Presses de

    sciences po. et Dalloz, p. 119.

  • 19

    Linterdiction ncessite de dfinir ce quil faut comprendre par manipulation puis

    saisir comment celles-ci sont caractrises.

    1) La manipulation de cours

    La Directive abus de march dfinit la manipulation de march par ses effets, ce qui a

    pour avantage de laisser une marge dapprciation notable. Une dfinition trop stricte

    aurait pour risque de ne pas tre exhaustive et ainsi ne pas englober lensemble des

    situations possibles.

    Larticle 1-2-a) de la Directive abus de march envisage les oprations qui dune part

    donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur loffre,

    la demande ou le cours dun instrument financier ou qui dautre part fixent le cours

    dun ou plusieurs instruments financiers un niveau anormal ou artificiel (

    savoir le price positionning anglo-saxon) par laction dune ou plusieurs personnes

    agissant de manire concerte.

    Larticle 1-2-b) de la Directive abus de march nonce une infraction purement

    matrielle qui consiste effectuer des oprations ou (d)mettre des ordres qui

    recourent des procds fictifs ou toute autre forme de tromperie ou dartifice .

    La Directive dfend ici un impratif de moralit, en effet il est dusage de dire que la

    fraude corrompt tout et il ne serait pas acceptable que lintervenant puisse user de

    procds artificiels.

    Un auteur y voit un effet redondant, larticle 1-2-a) tant daprs lui suffisant pour

    englober lensemble des manipulations 36. Cet opinion est nanmoins critiquable, le b)

    est utile et marqu dune spcificit. Lintervenant a la possibilit dapporter la preuve

    de la lgitimit de son intervention pour justifier la manipulation laquelle il procde, or

    cette preuve nest recevable qua lgard du a) et non lgard du b), dont le caractre

    36 M. TOMASI, Vers un renouveau de la lutte contre les manipulations de cours : lapport de la Directive

    abus de march, Mlanges AEDBF France IV, p. 448.

  • 20

    fictif supprime toute possibilit de justification. La qualification peut alors tre

    importante et changer la dfense de lintervenant.

    Finalement ces dfinitions visent assurer lefficience des marchs, mais

    lidentification des manipulations restant complexe la Directive y a suppl.

    2) Lidentification des manipulations

    Il est patent quil y a une vraie difficult identifier les manipulations 37, cependant la

    Directive abus de march et la Directive n 2003/124 donnent un ensemble de signaux

    qui permettent au rgulateur de mettre en exergue plus aisment les manipulations de

    march. Plus prcisment il sagit de trois exemples de manipulations ralisables et de

    nombreux signaux.

    a) Les trois exemples de la Directive abus de march

    Larticle 1-2-c nonce successivement trois exemples tendant illustrer ce que le

    droit communautaire entend par une manipulation de march. Le troisime exemple ne

    concerne pas directement le sujet trait et relve plus particulirement du manquement

    relatif la fausse information. Ces exemples sont non-exhaustifs, la manipulation

    pouvant prendre de nombreuses formes.

    Cest le cas o une personne ou plusieurs personnes agissant de manire concerte

    s'assurent une position dominante sur l'offre ou la demande d'un instrument financier,

    avec pour effet la fixation directe ou indirecte des prix d'achat ou des prix de vente ou la

    cration d'autres conditions de transactions inquitables.

    Cest la situation dans laquelle lintervenant achte ou vend des instruments

    financiers au moment de la clture du march, avec pour effet d'induire en erreur les

    investisseurs agissant sur la base des cours de clture .

    37 M. TOMASI, Vers un renouveau de la lutte contre les manipulations de cours : lapport de la Directive

    abus de march, Mlanges AEDBF France IV, p. 443.

  • 21

    b) Les signes prendre en compte lors de lexamen dune opration

    A loccasion de tout type dopration le rgulateur est inviter prendre en compte sept

    signaux. Ils sont numrs par la Directive n 2003/12438, ils permettent de dterminer le

    caractre abusif dune intervention sur le march sans pour autant caractriser en soi la

    manipulation de cours. Ici encore la liste est non limitative et le rgulateur qui procde

    une vrification est libre de prendre en compte tous autres lments qui seraient relevant.

    Lopration en question reprsente une proportion importante du volume quotidien et

    par l mme pourrait entraner une variation sensible du cours.

    Lopration effectue par une position longue ou courte significative influe de faon

    sensible sur le cours.

    Lopration nentrane aucun changement de propritaire.

    Lopration est effectue lors de la dtermination du cours de rfrence et entrane une

    variation du cours.

    Lopration se traduit par des renversements de position et concernant un volume

    dinstruments important.

    Des ordres sont mis et modifie le carnet dordre puis sont annuls avant excution.

    Un nombre doprations est concentr dans une courte priode et entrane une

    variation de cours qui sinverse par la suite.

    A loccasion de mise en place de procds fictifs par lintervenant, le rgulateur est

    invit porter son attention sur les signaux suivants qui sont indiqus par la Directive

    abus de march :

    Les oprations effectues par une personne ont t prcdes ou suivies de la diffusion

    par la mme personne dinformations fausses ou trompeuses.

    Lopration survient avant ou aprs la diffusion de travaux de recherche dont la

    vracit a t elle mme manipule.

    38 Article 4 de la directive 2003/124/CE du 22 dcembre 2003

  • 22

    Linterdiction est donc explicitement dfinie et sous tendue par des exemples et

    signaux prcis. Il faut ajouter que la Directive abus de march ajoute un prsuppos, qui

    est que les actions sur instruments financiers propres sont fortement susceptibles de

    causer une manipulation de cours.

    B) Le prsuppos : les oprations sur instruments financiers propres sont

    susceptibles de causer des manipulations de cours39

    Lintervention par un metteur sur ses propres actions peut avoir un effet sur la

    formation des cours et risquer de porter atteinte au cours de bourse.

    1) La formation des cours

    Il rsulte de la confrontation constante ou rgulire des ordres dachat ou de vente une

    valorisation de linstrument financier en cause. En thorie, nombre dinformations sont

    la disposition des investisseurs, ces derniers tirant de celles-ci des prvisions de

    lorientation du cours pour se dcider. Le prix dun instrument financier est donc le

    reflet dinformations relatives au sujet desquelles elles se rapportent. Ce nest rien

    dautre que ce qunonce le Considrant n1 de la Directive 2003/124/CE : Les

    investisseurs raisonnables fondent leurs dcisions d'investissement sur les

    informations dont ils disposent dj . Lanticipation que chaque investisseur ralise

    va donc orienter la valorisation de linstrument financier avec un ala selon lequel

    linstrument va soit sapprcier soit se dprcier.

    Le caractre raisonnable des intervenants peut certaines occasions paratre

    thorique, en effet le mythe de Panurge semble pouvoir sappliquer aux marchs

    financiers. La manipulation de cours ne serait pas une ralit si les investisseurs taient

    si raisonnables, car elle joue sur leffet dimitation et non lobtention dune information

    certaine. Loprateur surveille les signes dorientation des cours et le moindre

    mouvement mme infond peut se transformer en rajustement de sa part. Est-ce dire

    39 H. de VAUPLANE et J-J. DAIGRE, commentaire de la dcision AMF du 16 septembre 2005, Banque

    et Droit n 105, janvier fvrier 2006.

  • 23

    que la protection des cours nest finalement pas ncessaire ? Non, la recherche constante

    dun march efficient ncessite cette protection40.

    Linformation joue donc un rle essentiel dans la dtermination des cours et cest pour

    cela que celle ci doit tre vridique. Le Considrant n 15 de la Directive abus de march

    dispose qu une transparence intgrale et adquate du march, qui est un pralable

    indispensable aux oprations pour tous les acteurs conomiques intervenant sur des

    marchs financiers intgrs . La transparence autorisant lanticipation permet la

    spculation. Cest pourquoi la Directive abus de march se fait une obligation dassurer

    cette transparence. Cette disposition permettant de protger le march en garantissant la

    pleine confiance des investisseurs dans ce dernier41. Enfin, lmetteur tant le principal

    fournisseur dinformations au march, son intervention peut porter atteinte au march

    2) Latteinte au march

    Il sagit de comprendre cet intitul sous deux angles. Le premier est une acception

    concurrentielle des marchs, la manipulation de cours tant une atteinte loffre et la

    demande42 (cette question sera approfondie par la suite). Le second consiste expliciter

    le prsuppos nonc ci-avant : les oprations sur ses propres titres sont susceptibles de

    porter atteinte au march.

    Qui mieux que la socit elle mme connat le cours de ses actions ? Elle surveille au

    jour le jour lvolution de ses cours, elle bnficie dinformations propres avoir une

    influence sur le cours et elle peut mme en partie connatre lactionnariat qui compose

    son capital. Bnficiant naturellement dune position privilgie, son intervention sur ses

    propres titres peut de facto paratre suspecte, la socit pouvant bnficier de son

    avantage pour procder des rachats au prix qui avantage ses objectifs. Plus encore ses

    objectifs peuvent mme tre explicitement de manipuler le cours.

    40 Sur la notion defficience des marchs cf. H. de VAUPLANE et J.P. BORNET, Droit des marchs

    financiers, 3me d., d. Litec, n345, p. 342. 41 Considrant n12 de la Directive abus de march. 42 M. TOMASI, Vers un renouveau de la lutte contre les manipulations de cours : lapport de la Directive

    sur les abus de march, Droit bancaire et financier, Mlanges AEDBF, IV, 2004, p 441.

  • 24

    Le cours est un reflet de la sant financire de la socit, cest pourquoi cette dernire

    peut tre tent de maquiller ses atours. En outre, cette connaissance exhaustive peut tre

    mise profit pour raliser de substantielles plus value sur lachat revente de ses propres

    titres.

    Ces risques sont donc prsents, mais pourtant il ne faut pas interdire tous les rachats, et

    accepter ceux qui apparaissent lgitimes.

    2 Lexception : la lgitimit dune pratique

    Au prsuppos, une exception est admise. En effet lintervenant reste libre de

    dmontrer que son intervention est lgitime (A). En effet larticle 1-2-a) de la Directive

    abus de march nonce que lintervenant effectuant certaines oprations tombera sous la

    qualification de manipulation de cours moins que la personne ayant effectu les

    oprations ou mis les ordres tablisse que les raisons qui lont pousse le faire sont

    lgitimes et que ces oprations ou ces ordres sont conformes aux pratiques de march

    admises sur le march rglement concern . Lintervenant est nanmoins aid dans

    sa dmonstration par llaboration de pratiques de march admises par les

    rgulateurs nationaux (B). En outre, lexception ne paraissant pas suffisante elle a t

    complte par larticle 8 de la Directive abus de march qui institue un safe harbor (C)

    dans le cadre duquel la lgitimit de lopration naura mme pas tre tablie si

    lintervenant remplit les conditions ncessaires.

    A) Lintervention est lgitime

    Le caractre lgitime signifie que lintervention sur le march est digne dtre prise

    en considration, non seulement comme conforme aux exigences de la lgalit ou aux

    rgles de droit, mais comme fonde sur des donnes tenues pour normales relativement

    un certain niveau moral et social 43. Mais dfinir plus prcisment la notion de

    lgitimit nest pas ais il est possible de dire que la lgitimit est la qualit de ce qui

    43 G. CORNU, Vocabulaire juridique, d PUF.

  • 25

    est consacr par la loi 44. Est ce tout ? Non, il semblerait que ce terme signifie plus

    prcisment en droit communautaire la conformit de la pratique de march des

    oprations juges bnfiques ltablissement dun march concurrentiel de services

    financiers45. Dans une conomie dite librale et de libre concurrence la pratique lgitime

    sera celle qui vise ou linstauration dune plus grande concurrence ou le dveloppement

    conomique46. Le fait quune manipulation soit considre comme lgitime nest pas

    nouveau, ainsi le droit franais admet depuis longtemps que lobjectif de rgularisation

    des cours de bourse peut tre profitable47.

    Il sagit ici dtre pragmatique avant tout. Pourquoi par principe interdire une

    opration qui par ailleurs sous certains angles et dans certains cas peut tre bnfique

    lensemble des acteurs ? Linterdiction vise la protection des acteurs du march, mais

    ces acteurs ne requirent aucune protection ds lors que lopration leur sera

    gnralement favorable. Peuvent ainsi tre favorable au march : lamlioration de la

    liquidit, qui permet de faire ressortir la profondeur du march et la vivacit dun titre,

    ou encore la possibilit pour la socit de procder une croissance externe par change

    de titres, qui va valoriser les titres et permettre le regroupement dentreprises,

    La lgitimit ne doit pas pour autant tre dtourne de sa finalit. Le recours une

    pratique de march admise ou au safe harbor ne doit en tout tat de cause pas constituer

    un abus de droit48. En effet il est interdit de dguiser des oprations frauduleuses sous

    lapparence dune intervention lgitime.

    Une question dinterprtation demeure. La Directive abus de march en son article 1-

    2-a) nonce ainsi que lintervenant peut apporter la preuve que les raisons qui lont

    pouss le faire sont lgitimes et que ces oprations ou ces ordres sont conformes aux

    pratiques de march admises sur le march rglement concern . La conjonction de

    coordination et semble mal venue, elle restreint alors considrablement le champ des

    44 Le droit de A Z, Dictionnaire juridique pratique, Editions juridiques europennes, 3me dition 1998, p.

    358. 45 Cette dfinition se rapproche de celle de saint Thomas dAquin qui voit dans la lgitimit ce qui est

    susceptible dapporter le bien tous. cf.http://www.ledroitpublic.com/droit_constitutionnel/legitimite.php. 46 Considrants n 12 et 33 de la Directive abus de march. 47 Article 217-2 de la Loi du 24 juillet 1966, devenu article L 225-209 du Code de commerce. 48 Considrant n 20 de la Directive abus de march.

    http://www.ledroitpublic.com/droit_constitutionnel/legitimite.php

  • 26

    possibles. Dune part, elle impose lintervenant de prouver la lgitimit et encore, que

    sil se situe dj dans le cadre dune pratique de march admise. Dautre part, il exclut

    toute innovation tant que celle-ci ne serait pas reconnue par le rgulateur.

    Il y a lieu desprer quil ne sagit l que dune erreur rdactionnelle, car sinon le

    principe mme de safe harbor serait vid de son sens. En effet, la souplesse qui le

    caractrise est en partie du au fait que lintervenant mme sil sort des conditions nen

    est pas pour autant responsable per se dune manipulation de cours. A suivre la directive,

    il appartient lintervenant de prouver la lgitimit de son intervention et il y aurait une

    quasi prsomption dillgitimit ne pas se plier au safe harbor ou une pratique de

    march admise49. C'est dire par un raisonnement a contrario dduire quun programme

    dont la finalit est diffrente de celle prvue, constitue de fait une manipulation de

    cours50. En outre, ce et soppose la Directive 2004/72/CE qui invite en son article

    2-2 ce que les pratiques de march [] ne soient pas considres comme

    inacceptables par lautorit comptente du simple fait quelles nont pas encore t

    formellement reconnues sur le march . Ceci explique pourquoi des rgulateurs,

    comme lAMF, ont suivi cette deuxime interprtation et autorise dans tous les cas un

    intervenant prouver la lgitimit de son intervention51.

    B) Lintervention relve dune pratique de march admise

    Les activits dun intervenant nont pas par principe de caractre abusif si ces

    oprations ou ces ordres sont conformes aux pratiques de march admises sur le

    march rglement concern .

    1) les pratiques de march admises

    Les pratiques de march admises sont des pratiques qui sans autres prcisions seraient

    susceptibles de relever des manipulations de cours et tre sanctionnes ce titre.

    49 Article 1-2-a) de la Directive abus de march. 50 S. TORCK, Le rachat dactions aux fins de gestion financire du capital sous linfluence du droit

    communautaire, Bull. Joly bourse, 01 fvrier 2005, n 2 p. 112. 51 Document interprtatif de lAMF, La mise en uvre du nouveau rgime de rachat dactions propres,

    publi dans la Revue AMF de mars 2005, n 12 p. 83 et consultable sur le site de lAMF.

  • 27

    Cependant les institutions communautaires ont permis que des pratiques soient

    officiellement acceptes par le rgulateur de chaque tat.

    Finalement ladmission dune pratique de march nest que la conscration dune

    lgitimit reconnue suivant un consensus partag. En effet, le rgulateur, qui admet une

    pratique, aura dans les faits entendu les acteurs des marchs financiers et cette pratique

    est bnfique tant lattrait du march qu son efficience.

    2) un mini safe harbor ?

    Cet intitul de mini safe harbor peut paratre tonnant premire vue, mais pourtant

    justifi. Le safe harbor, en droit communautaire et amricain a pour originalit de laisser

    son bnficiaire avoir ventuellement recours une autre pratique sans pour autant que

    celle-ci soit juge illgitime per se. Or la Directive 2004/72/CE en voulant favoriser

    lmergence de nouvelles pratiques susceptibles dtre admise nonce en son article 2-2

    que les pratiques de march [] ne soient pas considres comme inacceptables par

    lautorit comptente du simple fait quelles nont pas encore t formellement

    reconnues sur le march . Ds lors loriginalit de cette rgulation, laissant place

    linnovation, est assure par les pratiques de march admises.

    Mais le safe harbor restera mini . Le second effet au regard du safe harbor est une

    protection absolue selon laquelle lintervenant ne peut voir sa responsabilit engage. Or

    les pratiques de march admises tablissent une protection qui peut tre renvers par le

    rgulateur qui tablirait lillgitimit de lopration.

    Cette remarque tend souligner que le lgislateur communautaire entend laisser la

    porte ouverte limagination et la crativit des oprateurs, sans pour autant leur

    octroyer une dfense absolue.

    C) Lintervention lgitime par le safe harbor

    1) Le safe harbor au sens communautaire

  • 28

    Le Considrant n 33 de la Directive abus de march nonce que des raisons

    conomiques peuvent justifier le recours par un metteur au rachat de ses propres

    actions, elles ne devraient donc pas tre assimiles, en tant que telles, des abus de

    march .

    Les notions de rachat dactions et de stabilisation ont t dfinies ci-avant, il ne sagit

    pas de revenir dessus, mais il sagit de comprendre pourquoi ces deux oprations

    peuvent bnficier de la protection du safe harbor ?

    Les socits cotes recourent frquemment la mise en place de programme de rachat

    dactions pour des buts divers. La rglementation europenne en retient deux types dans

    le cadre du safe harbor52. Il sagit :

    Du rachat ayant pour objectif de procder une rduction de capital.

    Du rachat ayant pour but dhonorer des obligations lies des titres de crance

    convertibles en titre de proprit ou la distribution dactions aux salaris.

    A lexemple des Etats-Unis, les lgislateurs europens ont admis la possibilit pour les

    socits de procder au rachat de leurs actions propres53. Les raisons sont nombreuses, le

    rachat peut tre ncessaire en cas de rduction de capital non motiv par des pertes, ou

    pour faire grimper le ratio du bnfice net par action. Le rachat risque alors de faire

    grimper le cours de bourse, ce qui peut permettre de stabiliser lactionnariat ou encore

    servir de lutte anti-OPA54.

    La stabilit est par essence rassurante et linstabilit cause dangoisse. Cependant,

    linstabilit ne doit pas se confondre avec la variabilit. Que le cours dune action soit

    variable est lessence mme du march, mais le risque est rel que lors dune mission

    de titres les fluctuations soient grandes. La sensibilit du cours ce moment peut

    ncessiter le recours par lmetteur la stabilisation afin dassurer un bon droulement

    52 Considrant n 5 du Rglement n 2273/2003 de la Commission du 22 dcembre 2003 sur les

    programmes de rachat et de stabilisation dinstruments financiers 53 Cf. en France, le rapport Esambert la COB en janvier 1998, Le rachat par les socits de leurs propres

    actions. 54 P. MERLE, Droit commercial, Socits commerciales, Prcis Dalloz, 9me d., n 279, p. 321.

  • 29

    de lmission et que celle-ci soit un succs55. Cest pourquoi le seul objectif de la

    stabilisation doit tre de soutenir le prix dune mission de valeurs mobilires.

    Pour autant, il nest pas discutable quen soi la stabilisation est une manipulation de

    cours, puisque tel est son but. Lexistence mme du march boursier nen est pas moins

    conditionne par lopportunit pour les metteurs de pratiquer des missions de titres

    lors de lintroduction sur le march ou lors dune augmentation de capital. Un vritable

    risque existe tout de mme cest pourquoi il faut que la stabilisation soit limite dans le

    temps. Ces limites sont56 :

    Lors dune introduction en bourse, la stabilisation ne peut perdurer au del de 30 jours

    aprs de la mise en ngociation des instruments financiers sur le march secondaire.

    Lors dune offre secondaire, cest encore un dlai de 30 jours, compter de la date

    dallocation des instruments financier, qui met fin toutes interventions par lmetteur

    sur les valeurs concernes.

    Enfin lmetteur doit se soumettre des obligations dinformation du march pour

    rendre compte de lactivit gnre par ses interventions.

    2) Une protection absolue

    Hors le cas de la fraude, lintervenant qui respecte les conditions de mise en uvre est

    assur de ne pas voir sa responsabilit engager au titre dune manipulation de cours. La

    rglementation ce sujet ne lui est pas applicable. Cela ne signifie pas pour autant que

    lintervenant ne peut pas se rendre coupable dautres faits dlictueux.

    Cette protection est trs forte et explique pourquoi les conditions de mise en uvre sont

    strictes. Pour autant ntant pas en principe un rgime obligatoire, il faut voir dans cette

    protection une invitation aux intervenants y adhrer. Le respect de la libre volont des

    oprateurs semble tre la meilleure faon de les inviter une forme dauto rgulation.

    55 H. de VAUPLANE et J.P. BORNET, Droit des marchs financiers, 3me d., Litec, n1059. 56 Article 8 du Rglement 2273/2003/CE.

  • 30

    Le safe harbor savre donc tre une exception un principe. Il est cependant plus

    quune exception, puisquil laisse libre loprateur de sy conformer. Cest un nouveau

    mode de rgulation qui apparat ici.

    Section 2 Le safe harbor est un mode de rgulation innovant

    Le safe harbor nest pas une invention de la Commission europenne ce concept

    juridique tait dj utilis en droit amricain (1), et dot de nombreux avantages,

    lUnion Europenne en a fait son moyen dextraire certaines pratiques qui en principe

    auraient du relever de la manipulation de cours (2).

    1 Un concept original dorigine amricaine

    Le concept de safe harbor nest pas nouveau, il trouve son origine aux Etats-Unis o il

    tait dj utilis en matire financire57. Il repose fondamentalement sur la volont des

    intervenants (A) et doit rpondre une mise en uvre prcise (B).

    A) Le safe harbor bas sur la volont des intervenants

    Les intervenants sur le march financier amricain auront recours au safe harbor si ils

    recherchent un refuge et un guide.

    1) Le safe harbor un refuge

    Le Safe Harbor est une notion qui prend sa source dans le droit amricain et plus

    particulirement dans le droit financier. Ltude de la notion sous cet angle se rvle

    intressante car le systme communautaire sen inspire beaucoup. La notion est traduite

    57 Dans le cadre du 1934 Act, Senat Report, n 1455, 73rd, congress, 2nd session, 81, 1934.

  • 31

    par certains comme la rgle refuge 58, cette traduction trs littrale nen est pas moins

    vraie et permet denvisager pleinement le concept qui est dfini juridiquement en anglais

    comme A provision (as in a statute or regulation) that affords protection from liability

    or penalty 59. Dautres auteurs le traduisent comme la rgle protection 60 car, en

    effet, il sagit galement dune forme dimmunit61 contre les poursuites en

    responsabilit. Inconnu jusqualors par nos institutions, le droit communautaire la

    introduit au travers de la Directive abus de march afin de proposer une forme de

    rgulation apparemment plus souple et pragmatique.

    Il faut souligner que par principe le safe harbor nest, en droit amricain, pas impratif,

    ds lors une personne qui ne remplirait pas toutes les conditions pour bnficier du

    refuge ne commettrait pas par la mme une manipulation de march.

    Cette notion est expressment mise en exergue dans le Securities Exchange Act 1934,

    propos des manipulations de march dans la Rule 10b-1862, plus particulirement

    propos du rachat par une entreprise de ses propres actions63.

    2) Le safe harbor : un guide

    a) Libre volont des intervenants dy recourir

    Au mme titre que lon peut dcider de partir en randonne avec un guide qui vous

    assure de vous emmener destination sans problme, on peut aussi faire le choix de se

    passer de lui, mais alors on ne bnficie plus de son assurance. Appliqu au march

    financier leffet de la Rule 10b-18, intitul Purchases of Certain Equity Securities by

    the Issuer and Others , est le mme. Il offre lmetteur qui sy conforme, un safe

    58 A. FELIX, La transposition par lAMF de la Directive abus de march en matire de rachat dactions :

    que reste-t-il du safe harbor, Revue de Droit bancaire et financier, sept oct. 2005, p.51. 59 Blacks Law Dictionary, 8me edition, Thomson West. 60 F. DANGEARD, Le droit financier amricain : droit et pratique des marchs financiers aux Etats-Unis,

    d. Feduci, 1990. 61 Cause dimpunit qui tenant la situation particulire de linfraction au moment o il commet celle-ci,

    soppose dfinitivement toute poursuite , G. CORNU, Vocabulaire juridique, d PUF. 62 Release n 34-19244, 17 novembre 1982. 63 Preliminary notes to Rule 240.10b-18.

  • 32

    harbor ayant pour consquence que celui-ci ne peut tre condamn au titre dune

    manipulation64.

    b) Limites

    Le safe harbor amricain est encadr par des limites qui ne se retrouve pas dans la

    mise en uvre communautaire. La protection offerte par le safe harbor amricain nest

    pas absolue, la diffrence de du safe harbor communautaire. En effet si lintention

    formelle de lintervenant est duser des conditions uniquement pour chapper la

    condamnation au regard de la manipulation de cours, alors le bnfice de cette protection

    ne lui sera pas accord sans mme quune fraude nait tre prouver. Ensuite, il faut

    signaler que le champs dapplication est restreint aux actions ordinaires et ne stend pas

    aux actions de prfrence alors que les actions de prfrence sont viss par le dispositif

    europen. Enfin le safe harbor ne bnficie pas au rachat dans le but de couvrir les plans

    dactionnariat des salaris, ce qui en revanche est admis par lAutorit des Marchs

    Financiers (ci-aprs lAMF) comme une pratique de march.

    B) Mise en uvre du safe harbor amricain

    Pour bnficier du safe harbor encore faut-il que lintervenant se soumette certaines

    conditions et respecte des obligations dinformation.

    1) Conditions de mise en oeuvre

    La section b. de la Rule 10b-18 nonce quatre conditions qui sont relatives la

    personne, lpoque des achats, au prix de lachat et aux volumes dachat. Conditions

    qui se retrouvent dans le dispositif europen de manire plus ou moins marqu.

    a) Manner of purchase condition

    64 Rule 10b-18 provides an issuer with safe harbor from liability for manipulation , Preliminary

    Notes to Rule 240.10b-18.

  • 33

    Le rachat de ses propres actions ne peut pas tre effectu par nimporte qui, ainsi

    lintervenant ne doit recourir au service que dun seul broker or dealer quivalent du

    prestataire de services dinvestissement en droit franais 65.

    Cette condition a pour but de faciliter lanalyse de la mise en uvre des autres

    conditions. Il est plus facile de surveiller les activits dun intervenant sil na recours

    qu un seul intermdiaire, plutt quil ne brouille les pistes en dmultipliant les

    intermdiaires et les degrs dintermdiation. Du reste cet intermdiaire, encourant lui

    mme un risque de mise en responsabilit, simposera les limites quil ne doit pas

    dpasser pour ne pas sortir du bnfice du safe harbor.

    b) Timing condition

    Cette condition66 relative au temps permet de contrer une des principales

    manipulations. Il sagit en fait de restrictions quant aux heures dintervention sur le

    march. Ainsi de faon succincte, lintervenant doit sabstenir dagir de faon fixer le

    cours douverture et il doit suspendre ses activits 30 minutes avant la clture des

    cotations.

    Par cette condition, la SEC sassure que ce nest pas lintervenant qui fait les cours

    douverture et de clture, qui sont des cours de rfrence. Cours de rfrence largement

    pris en compte tant par les analystes financiers que par le boursicoteur occasionnel. Le

    risque de manipulation du cours est donc, par cette condition, largement rduit.

    c) Price condition

    Cette condition67 essentielle est extrmement importante et dune simplicit

    dconcertante. Les ordres de rachat ne doivent pas excder le prix propos par un autre

    acteur du march de lintervenant en faisant rfrence la dernire transaction

    indpendante effectue68.

    65 Rule 10b-18, b, 1 et pour le droit franais article L 531-1 du Code montaire et financier. 66 Rule 10b-18, b, 2. 67 Rule 10b-18, b, 3. 68 The last independent transaction price , Rule 10b-18, b, 3.

  • 34

    Sauf fraude, le rgulateur sassure que les transactions se ralisent au prix du march et

    non au prix dsir par lintervenant, lefficience du march est ainsi protge dun

    objectif manipulatif. La seule limite est alors que le prix de rfrence ne soit pas

    rellement indpendant.

    d) Volume condition

    La condition de volume instaure une limite selon laquelle lensemble des interventions

    ne doit pas dpasser 25 % de la moyenne quotidienne des transactions au cours des

    quatre semaines prcdentes. Ensuite il faut souligner que pendant longtemps le safe

    harbor ne bnficiait pas la ngociation de bloc, savoir les block trades 69, mais

    une rforme rcente a supprim cette disposition et lachat de bloc doit respecter

    lensemble des conditions prcites70.

    2) Information : la disclosure

    Au del de la mise en uvre des conditions techniques, une condition formelle est

    ncessaire, cest la rvlation de tout lment important, c'est dire lobligation de

    disclosure. La traduction qui respecte plus ce terme serait la transparence qui est un

    des leitmotive de la Directive abus de march, cest dire que les diffrents intervenants

    ont la possibilit de connatre de manire exhaustive ltat financier de la socit et

    lensemble des oprations qui peuvent affecter cet tat. Cette obligation consiste dans la

    rvlation de tout lment qui pourrait avoir une influence notable sur les cours71.

    69 A savoir lacquisition de plus de 200 000$, ou de plus de 50 000$ et 5 000 actions (Rule 10b-18, a, 5) et

    V. F. DANGEARD, Le droit financier amricain : droit et pratique des marchs financiers aux Etats-

    Unis, d. Feduci, 1990, p.85. 70 Securities and Exchange Commission, 17 CFR Parts 228, 229, 240, 249, 270, and 274, [Release Nos.

    33-8335; 34-48766; IC-26252; File No. S7-50-02], Purchases of Certain Equity Securities by the Issuer

    and Others. 71 Disclosure of all material terms and conditions: revealing everything important, with a substantial

    likelihood, to which an investor would attach importance in determining whether to purchase, Cours de

    3me anne du Magistre DJCE de droit financier amricain, dispens par N. MARCHAND.

  • 35

    La rgulation amricaine en fait un outil de bonne gouvernance des entreprises, qui

    volontairement adhreront celui-ci et volontairement se plieront aux conditions strictes

    daccs au bnfice du safe harbor, car cette rgulation est avantageuse.

    2 Un mode de rgulation avantageux repris par le droit communautaire

    Les raisons pour lesquelles ce mode de rgulation a t repris par les instances

    communautaires tiennent principalement aux avantages considrables du safe harbor.

    Ces avantages ont t particulirement mis en valeur par un auteur72, il sagira de

    sappuyer sur son tude en la compltant et la rorganisant.

    A) Une rglementation plus souple et adapte pour le rgulateur

    Du point de vue du rgulateur, les avantages de ce mode de rgulation sont

    consquents et le safe harbor apprciable par sa souplesse.

    Tout dabord, le rgulateur en charge de la lutte contre les manipulations pourra se

    contenter de vrifier que les conditions du safe harbor sont biens remplis et il ne sera

    plus tenu de procder un examen individuel fastidieux et coteux. Ensuite, au cas o il

    voudrait faire application de la rglementation sur les manipulations de march, il ne

    sera pas enferm dans une dfinition forcment trop restrictive de linfraction. En

    revanche le rgulateur est tenu de deux obligations, dune part, rester en harmonie avec

    les autres rgulateurs europens et dautre part, jouer un rle didactique en expliquant

    clairement comment il entend mettre en uvre le safe harbor.

    B) Un outil pour le lgislateur

    Le lgislateur europen et national doit remplir deux objectifs, savoir en premier lieu

    assurer aux oprateurs une rgulation claire et efficace et en second lieu que sa

    rglementation soit concurrentielle. En scurisant les transactions via le safe harbor, le

    72 A. FELIX, La transposition par lAMF de la Directive abus de march en matire de rachat dactions :

    que reste-t-il du safe harbor, Revue de Droit bancaire et financier sept oct. 2005, p. 52.

  • 36

    lgislateur offre une meilleure attractivit ses places financires. Objectif de scurit

    qui est atteint par linstauration de conditions prcises.

    En outre, en compltant le safe harbor par des pratiques de march admises le

    lgislateur europen assure une trs grande souplesse. En effet le lgislateur national qui

    constate une distorsion a alors la possibilit de procurer une rponse rapide et approprie

    son march, soit en ajoutant, soit en largissant le champ des pratiques de march

    admises. Du reste, ni le lgislateur ni le juge ne seront pas entravs par une dfinition

    trop restrictive, qui empcherait une vritable marge dapprciation.

    C) Une meilleure scurit pour lintervenant

    Du point de vue de lmetteur agissant sur le march deux avantages sont relever. En

    premier lieu, le safe harbor ne fige pas la situation des oprations que peut exercer

    lmetteur. En effet, au mme titre quen droit amricain et en application du

    Considrant n 2 du Rglement europen n 2273/2003, lmetteur qui agit en dehors

    des conditions du safe harbor nen est pas pour autant derechef responsable dune

    manipulation de cours. Comme le souligne A. FELIX le safe harbor confre un droit

    que tout metteur peut, par dfinition, choisir de ne pas exercer 73. Labsence de

    caractre impratif est le principal avantage de ce type de rgulation qui assure un

    niveau lev de scurit pour les intervenants sur le march et suffisamment de

    souplesse pour les metteurs.

    En second lieu, le safe harbor est un facteur de scurit juridique grandement

    recherch par les acteurs conomiques. En effet, la personne qui accepte de se plier aux

    conditions requises est assure de ne pas encourir de responsabilit au titre de la

    manipulation de march. Le chemin est balis et il mne bon port mais ne pas

    lemprunter ne signifie pas que lon tombera de Charybde en Sylla.

    73 A. FELIX, La transposition par lAMF de la Directive abus de march en matire de rachat dactions :

    que reste-t-il du safe harbor, Revue de Droit bancaire et financier sept oct. 2005, p. 52.

  • 37

    Innovant ! Lgitime ! Voil des qualificatifs apprciables, lis la notion de safe

    harbor tel qulabor par le droit communautaire. Cest une rgulation positive qui

    claire sur ce que peut faire lintervenant et non comme usuellement en nonant ce qui

    ne peut pas tre fait. Cependant, si la transposition dans un tat membre ne devrait pas

    thoriquement poser de problme, il y a un vritable dfi dans larticulation entre

    rgulation europenne et rgulation nationale , ds lors que diffrents niveaux sont

    invits intervenir74. La question est alors de savoir si la transposition franaise na pas

    ni le caractre original du safe harbor ?

    Chapitre 2 : Le safe harbor lpreuve de la transposition franaise

    Les Etats membres taient tenus de transposer la Directive abus de march avant le 12

    octobre 2004, la France a us de la voie rglementaire75 et lgislative76 pour y procder.

    La rglementation en matire de manipulation de cours est relativement ancienne

    (Section prliminaire), nanmoins le principe de safe harbor est bien nouveau. Or,

    comme tout concept nouveau impos par une norme suprieure, la question est de savoir

    si la France par sa transposition na pas enlev tout effet au safe harbor ? Pour y

    rpondre deux angles dattaque sont envisageables. Dune part, il faut vrifier que la

    transposition ne vide pas de son sens le safe harbor (Section 1), dautre part il faut

    constater que le safe harbor offre une nouvelle apprhension de la manipulation de cours

    (Section 2).

    74 J. P. JOUYET, Les risques de rgulation, Articulation ou dsarticulation des rgulations ?, Presses de

    sciences po et Dalloz, p. 120. 75 Cf. Rglement gnral de l'AMF. 76 Cf. Loi n 2005-842 du 26 juillet 2005, Journal Officiel du 27 juillet 2005

  • 38

    Section prliminaire rappel du traitement des manipulations de cours en droit

    franais

    Il sagit ici de faire un bref rappel historique de la manipulation de cours en droit

    franais (1) pour envisager la rponse actuelle qui repose sur un double rgime

    rpressif (2).

    1 Historique de la Manipulation de cours77

    La manipulation de cours est depuis longtemps sanctionne en France par les anciens

    articles 419 422 du code pnal. Plus particulirement larticle 419 ne visait que

    lagiotage et non le dlit boursier78. La rforme tait donc ncessaire, la premire est

    issue de la Loi du 3 dcembre 1926. Elle est qualifie d anctre lgislatif commun du

    droit de la concurrence moderne et du dlit actuel 79 car par un article 419-2 elle

    incriminait les manuvres frauduleuses . Cependant des manques et oublis de cette

    rglementation apparaissent et appellent encore une nouvelle rforme. Rforme

    dautant plus pressante que larticle 419-2 a t abrog par lordonnance sur les prix du

    1er dcembre 1986, sans tre remplac. Mais ce nest que pour mieux renatre de ses

    cendres peines refroidies ! Puisquen 198880, le dlit de manipulation de cours devient

    une infraction propre au droit boursier avec larticle L 465-2 du Code montaire et

    financier.

    Dun point de vu administratif cest le Rglement de la Commission des oprations de

    bourse (ci-aprs la COB) n 90-04 relatif ltablissement de cours (notamment son

    article 3) qui rgissait cette matire. Cependant, des problmes dimprcision

    mergeaient car le Rglement ne visait que le rsultat et non la manipulation elle mme.

    Un certain degr dimprcision est certes ncessaire pour englober tout type de

    manipulation, mais un risque pour la scurit juridique tait prsent.

    77 H. de VAUPLANE et O. SIMART, La notion de manipulation de cours et ses fondements en France et

    aux USA, Revue droit bancaire, n 56 juillet - aot 1996. 78 H. de VAUPLANE et J.P. BORNET, Droit des marchs financiers, 3me d., d Litec, n 1044. 79 M. TOMASI, Vers un renouveau de la lutte contre les manipulations de cours : lapport de la Directive

    abus de march, Mlanges AEDBF France IV, p. 444. 80 Loi n 88-70 du 22 janvier 1988 sur les valeurs mobilires.

  • 39

    Le Rglement de la COB a t remplac par le Rglement gnral de l'AMF81. Cette

    succession donnant lieu lheure actuelle des dcisions de lAMF relatives

    lapplication de la loi dans le temps pour savoir notamment si la prsomption de

    lgitimit doit sappliquer des situations passes 82 ? La solution retenue semblant tre

    linstar du droit pnal de faire application de la rtroactivit in mitius83.

    Mais le concept, objet de cette tude, qui a t transpos sous la forme dune

    prsomption irrfragable de lgitimit, est-il totalement neuf en droit franais ? En effet,

    des auteurs ont put crire que la COB a dailleurs tabli une prsomption de lgitimit,

    inspire des safe harbour rules anglo-saxonnes 84. Il ne sagit cependant que dune

    inspiration , leffet principal du safe harbor selon lequel lintervenant bnficie dune

    protection absolue contre toute mise en responsabilit, nest pas tabli.

    2 Un double rgime rpressif de la manipulation de cours

    Un double rgime rpressif sanctionne la manipulation de cours, il sagit du dlit pnal

    et du manquement administratif, le lgislateur a rcemment tent dharmoniser ces deux

    rgimes, en faisant prvaloir le droit pnal pour les infractions les plus graves85. Le

    double rgime rpressif pourrait poser un problme au vu de la rgle non bis in idem

    telle que consacre par larticle 4 du protocole additionnel n 7 la Convention

    Europenne de Sauvegarde des Droits de lHomme et des Liberts Fondamentales.

    Cependant cette question ntant pas directement lie cette tude il ne faut pas

    sattarder dessus86. Il doit seulement tre prcis que cette rgle interdit la double

    condamnation criminelle, et non le cumul dune condamnation criminelle et

    81 En application de larticle L 621-6 du Code montaire et financier. 82 Dcision AMF du 14 avril 2005, publi dans la Revue AMF, mai 2005, p. 51, notes : N.

    RONTCHEVSKY, RTD com. juillet/septembre 2005, p. 567, et S. TORCK Bull. Joly bourse, 01

    novembre 2005, n 6 p. 770, relative lapplication de la prsomption de lgitimit. 83 Pour une critique de ce type de dcision : C. DUCOULOUX-FAVARD, Dbuts critiquables de la

    commission des sanctions de lAMF, Bull. Joly bourse, 01 mai 2005, n 3 p. 238. En outre il faut souligner

    le risque de condamnation de la France par la Cour Europenne des Droits de lHomme en application de

    sa jurisprudence CEDH 21/02/1984 Oztrk contre Allemagne, srie A, n 73. 84 H. de VAUPLANE et J.P. BORNET, Droit des marchs financiers, 3me d., d Litec, n 1060. 85 Rapport n 2342 du 30 mai 2005 devant lAssemble nationale sur le Projet de Loi (n2249) pour la

    confiance et la modernisation de lconomie, G. CARREZ, rapporteur gnral, dput. 86 Pour un approfondissement V. H. de VAUPLANE et J.P. BORNET, Droit des marchs financiers, 3me

    d., d Litec, n 1073.

  • 40

    administrative87. En outre, la jurisprudence88 nonce que lapplication du principe ne

    trouve pas sappliquer en lespce, la condamnation au pnal (A) ayant un fondement

    distinct de la condamnation administrative89 (B).

    A) La manipulation de cours sous langle du droit pnal

    Le droit pnal est, en considration du droit communautaire, laiss lapprciation de

    chaque tat. En effet, cette matire ne relve pas encore des domaines harmoniss. La

    France a depuis longtemps fait le choix de sanctionner pnalement ce type de

    comportement pour des raisons datteinte au prix90. Larticle L 465-2 du Code montaire

    et financier donne une dfinition de la manipulation comme le fait, pour toute

    personne, dexercer ou de tenter dexercer, directement ou par personne

    interpose, une manuvre ayant pour objet dentraver le fonctionnement rgulier

    dun march rglement en induisant autrui en erreur . Le champ dapplication de

    la manipulation de cours a t rcemment rduit. Il portait avant sur tout march

    dinstruments financiers , mais les autres infractions boursires (dlit diniti et fausses

    informations) ne concernaient que le march rglement. Le lgislateur a fait le choix

    daligner ces diffrents rgimes, cette modification vise la mise en cohrence des

    champs d'application respectifs de la rpression pnale et de la rpression

    administrative 91. Ainsi, le droit pnal naurait vocation sappliquer quaux faits les

    plus graves, alors que les manquements administratifs concerneraient tout comportement

    ayant un effet ou un objectif rprhensible.

    Sagissant dun dlit il faut caractriser llment matriel qui consiste lemploi de

    manuvres frauduleuses. Cest un dlit formel car dfini par rapport son objet et non

    par rapport son effet 92. La notion de manuvre nest pas en soi dfinie par le

    87 Dcision du Conseil constitutionnel DC n89-260 du 28 juillet 1989, relative la COB. 88 Cass. crim. 1er mars 2000. 89 Cf. les critiques sur ce point releves dans H. de VAUPLANE et J.P. BORNET, prcit n 1073. 90 Cours de 3me anne du Magistre DJCE de droit des marchs financier, dispens par H. de

    VAUPLANE. 91 Rapport n 2342 du 30 mai 2005 devant lAssemble nationale sur le Projet de Loi (n2249) pour la

    confiance et la modernisation de lconomie, G. CARREZ, rapporteur gnral, dput. 92 H. de VAUPLANE et J.P. BORNET, Droit des marchs financiers, 3me d., d Litec, n 1073.

  • 41

    lgislateur, ceci laissant au juge une marge dapprciation plus vaste93. Selon un auteur il

    y a lieu de comprendre par ce terme plus quun mensonge : des moyens, des

    agissements, quelque chose dorganis, de dissimul 94.

    Par ailleurs, llment moral ne semble plus en soi ncessaire, la Loi du 2 Juillet 1996

    ayant abrog le terme sciemment . Il y a ici une volont de retirer tout lment

    intentionnel cette infraction, pour permettre une rpression plus aise de ce type de

    comportements dlictueux qui sont particulirement complexes caractriser. Il faut

    sinterroger sur la pertinence de cette volont. Comment quelquun pourrait-il en

    pratique exercer des manuvres sans en tre conscient ? Il semble que llment

    intentionnel soit intrinsque la manipulation de cours, la notion de manuvre tant

    indissociable du caractre intentionnel 95. Cependant une difficult souleve par

    nombre dauteurs demeure, celle de la preuve96. Un dol spcial doit tre prouv, savoir

    la volont dinduire autrui en erreur . Quant la difficult de la preuve de lintention

    une proposition sera faite ultrieurement (V. Chapitre 2 Section 2 1 B).

    La sanction pnale tant souvent longue venir, il a sembl plus efficace de recourir

    la sanction administrative. Une condamnation dcale et une sanction contre temps

    nayant pas leffet rdhibitoire escompt sur les autres intervenants du march.

    B) La manipulation de cours sous langle du droit administratif

    La sanction administrative doit remplir un impratif de rapidit, cest une rponse sans

    doute plus approprie ce type de comportements. En outre, au del de laspect

    pratique, ce type de sanctions est impos par la Directive abus de march97. Directive qui

    oblige les tats membres se doter dun rgulateur pour soccuper de ce type

    93 J-H. ROBERT et H. MATSOPOULOU, Trait de droit pnal des affaires, d. PUF droit, Collection

    droit fondamental, n 287, p. 463. 94 T. BONNEAU et M-F. DRUMMOND, Droit des marchs financiers, d. Economica, 2me d. 2005, p.

    463. 95 J. H. ROBERT et H. MATSOPOULOU, idem trait prcit, n 287, p. 465. 96 D. SCHMIDT, Les dlits boursiers, Revue de jurisprudence commerciale, novembre 2001, p. 71, ou

    encore M. TOMASI, Vers un renouveau de la lutte contre les manipulations de cours : lapport de la

    Directive sur les abus de march, Droit bancaire et financier, Mlanges AEDBF, IV, 2004, p. 440. 97 En application du Considrant n22 de la Directive abus de march.

  • 42

    dinfraction. LAMF existant dj en France et soccupant auparavant de ce type de

    contentieux, a naturellement continu exercer ce rle 98.

    LAMF est une autorit administrative indpendante disposant de pouvoirs divers et

    notamment du pouvoir de sanction vis--vis des intervenants qui contreviendraient aux

    rgulations applicables au march99. Elle dicte son propre Rglement100. Ainsi le

    rgime de la manipulation de cours est-il contenu dans le Titre III du Rglement gnral

    de lAMF. Larticle L 631-1 du Rglement gnral de l'AMF nonce linterdiction selon

    laquelle : Toute personne doit sabstenir de procder des manipulations de

    cours .

    Ce mme article poursuit sur le modle de la Directive abus de march101 et donne une

    dfinition de la manipulation en cause : Constitue une manipulation de cours :

    1 Le fait deffectuer des oprations ou dmettre des ordres :

    a) Qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou

    trompeuses sur loffre, la demande ou le cours dinstruments financiers ou ;

    b) Qui fixent, par laction dune ou de plusieurs personnes agissant de manire

    concerte, le cours dun ou plusieurs instruments financiers un niveau anormal

    ou artificiel, moins que la personne ayant effectu les oprations ou mis les

    ordres tablisse la lgitimit des raisons de ces oprations ou de ces ordres et leur

    conformit aux pratiques de march admises sur le march rglement concern ;

    2 Le fait deffectuer des oprations ou dmettre des ordres qui recourent des

    procds donnant une image fictive de ltat du march ou toute autre forme de

    tromperie ou dartifice .

    Il faut prciser que lAMF, lorsquelle exerce son po