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652 Notes de lecture de soutien psychologique, coanimation de groupes de reflexion au sein des ONG. Si penser la souffrance collective, le moment de rupture et d’echec du travail de civilisation ne peut laisser le psychologue exempt d’un engagement social et politique, cet engagement ne doit pourtant pas faire barrage a son Cthique. L’illusion salvatrice comme la toute-puissance the- rapeutique guettent les temoins de tels drames. Mais l’auteur Cvite cet Ccueil et nous pre- sente une approche psychodynamique qui ne reduit l’homme ni a un appareil psychique ni a un role social. 11 demontre avec elegance et pudeur combien la clinique du psychologue se differencie d’une application psychanalytique, tout en n’oubliant pas ses enseignements. En effet, ce travail demontre Q qu’on ne peut rien decreter, sinon que les hommes [les <T psy FP] doivent etre sensibles au contexte dans lequel ils Cvoluent, et que les affects qu’ils Cprouvent ne sont pas a rejeter defensivement, mais au contraire sont partie mtegrante du travail, a condition qu’ils soient v&us comme des positions Claborantes B (p. 158). Comment mieux definir la position du psychologue clinicien, intervenant toujours en situation contextualisee ? Outre l’apport chnique inestimable, bien que cruel et difficilement suppor- table, ce travail donne des indications precieuses, saris jamais le revendiquer sur le metier du psychologue. Au point que tout Ctudiant en psychologie clinique devrait en prendre connaissance, a la fois en tant que temoignage humain et comme discours incarne dune psy- chologie dynamique, soucieuse du respect de la personne humaine dans sa dimension psy- chique, qui devrait guider le metier du psychologue. M. Santiago Delefosse MCnCchal J, et al. Le Risque de P&ranger, soin psychique et politique. Paris : Dunod ; 1999. 221 p. Voici un ouvrage collectif passionnant qui s’interesse de maniere courageuse a un theme le plus souvent CvitC (meconnu ?) en psychopathologic : le rapport entretenu entre soin psy- chique et politique ; en effet. les deux se partagent la responsabilite de penser et d’organiser le rapport a l’autre, que ce soit dans son mal-etre, sa souffrance, sa violence ou sa difference. Le premier chapitre nous rappelle que l’etranger est essentiel dans la vie psychique, mais le deuxieme chapitre montre combien cette essence derange le monde et provoque le sujet dans le risque qu’il accepte ou non en laissant une place a l’alterite. Cette place est une Cpreuve individuelle et sociale puisqu’elle questionne le malaise dans la culture, le face-a- face avec l’exil et le hors-lieu. Car les figures de l’etranger. ce sont aussi les figures du dou- ble, de la haine de soi sous la haine de l’autre. de l’inquietante Ctrangete face a l’envahisse- ment par son image en miroir, d&s lors devenue insupportable. L’institution ne s’en sort guere mieux lotie que le sujet puisque cc penser I’alteration )), c’est toujours << risquer l’alterite F>. Et comme le souligne Jean MCnCchal, x le risque de letranger en ressort decuple. Car il faut a la fois penser le dedans et le dehors en traquant les effets de l’ideologie du lien [...I donner au sujet la possibilite de construire son propre objet politique interne, conflic- tualisable et done inquietant parce que porteur de la figure de la trahison ), (p. 3-4). Le tra- vail suscite la reflexion de tout un chacun, qu’il soit membre a part entiere dune institution de soin ou simplement qu’il se considere comme Clement de la Cite. M. Santiago Delefosse

Ménéchal J, ,Le Risque de l'étranger, soin psychique et politique (1999) Dunod,Paris 221

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Page 1: Ménéchal J, ,Le Risque de l'étranger, soin psychique et politique (1999) Dunod,Paris 221

652 Notes de lecture

de soutien psychologique, coanimation de groupes de reflexion au sein des ONG. Si penser la souffrance collective, le moment de rupture et d’echec du travail de civilisation ne peut laisser le psychologue exempt d’un engagement social et politique, cet engagement ne doit pourtant pas faire barrage a son Cthique. L’illusion salvatrice comme la toute-puissance the- rapeutique guettent les temoins de tels drames. Mais l’auteur Cvite cet Ccueil et nous pre- sente une approche psychodynamique qui ne reduit l’homme ni a un appareil psychique ni a un role social. 11 demontre avec elegance et pudeur combien la clinique du psychologue se differencie d’une application psychanalytique, tout en n’oubliant pas ses enseignements.

En effet, ce travail demontre Q qu’on ne peut rien decreter, sinon que les hommes [les <T psy FP] doivent etre sensibles au contexte dans lequel ils Cvoluent, et que les affects qu’ils Cprouvent ne sont pas a rejeter defensivement, mais au contraire sont partie mtegrante du travail, a condition qu’ils soient v&us comme des positions Claborantes B (p. 158). Comment mieux definir la position du psychologue clinicien, intervenant toujours en situation contextualisee ? Outre l’apport chnique inestimable, bien que cruel et difficilement suppor- table, ce travail donne des indications precieuses, saris jamais le revendiquer sur le metier du psychologue. Au point que tout Ctudiant en psychologie clinique devrait en prendre connaissance, a la fois en tant que temoignage humain et comme discours incarne dune psy- chologie dynamique, soucieuse du respect de la personne humaine dans sa dimension psy- chique, qui devrait guider le metier du psychologue.

M. Santiago Delefosse

MCnCchal J, et al. Le Risque de P&ranger, soin psychique et politique. Paris : Dunod ; 1999. 221 p.

Voici un ouvrage collectif passionnant qui s’interesse de maniere courageuse a un theme le plus souvent CvitC (meconnu ?) en psychopathologic : le rapport entretenu entre soin psy- chique et politique ; en effet. les deux se partagent la responsabilite de penser et d’organiser le rapport a l’autre, que ce soit dans son mal-etre, sa souffrance, sa violence ou sa difference. Le premier chapitre nous rappelle que l’etranger est essentiel dans la vie psychique, mais le deuxieme chapitre montre combien cette essence derange le monde et provoque le sujet dans le risque qu’il accepte ou non en laissant une place a l’alterite. Cette place est une Cpreuve individuelle et sociale puisqu’elle questionne le malaise dans la culture, le face-a- face avec l’exil et le hors-lieu. Car les figures de l’etranger. ce sont aussi les figures du dou- ble, de la haine de soi sous la haine de l’autre. de l’inquietante Ctrangete face a l’envahisse- ment par son image en miroir, d&s lors devenue insupportable. L’institution ne s’en sort guere mieux lotie que le sujet puisque cc penser I’alteration )), c’est toujours << risquer l’alterite F>. Et comme le souligne Jean MCnCchal, x le risque de letranger en ressort decuple. Car il faut a la fois penser le dedans et le dehors en traquant les effets de l’ideologie du lien [...I donner au sujet la possibilite de construire son propre objet politique interne, conflic- tualisable et done inquietant parce que porteur de la figure de la trahison ), (p. 3-4). Le tra- vail suscite la reflexion de tout un chacun, qu’il soit membre a part entiere dune institution de soin ou simplement qu’il se considere comme Clement de la Cite.

M. Santiago Delefosse