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MINISTERE DE LA JUSTICE SERVICE DES AFFAIRES EUROPEENNES ET INTERNATIONALES PARIS LES POLLUTIONS MARITIMES REGIME DES INFRACTIONS ET DES PEINES NOTION DE RESPONSABILITE LE CAS DE LA TURQUIE Etude à jour le 15 mai 2009

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MINISTERE DE LA JUSTICE

SERVICE DES AFFAIRES EUROPEENNES ET INTERNATIONALES

PARIS

LES POLLUTIONS MARITIMES REGIME DES INFRACTIONS ET DES PEINES

NOTION DE RESPONSABILITE

LE CAS DE LA TURQUIE

Etude à jour le 15 mai 2009

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ANALYSE COMPARATIVE DE LA LEGISLATION EN MATIERE DE POLLUTIONS MARITIMES

METTANT EN EVIDENCE LE REGIME DES INFRACTIONS ET DE S

PEINES ET LA NOTION DE RESPONSABILITE

LE CAS DE LA TURQUIE

INTRODUCTION

STATISTIQUES CONCERNANT LES CAUSES DE POLLUTION, LES ZONES ET LES ACTIVITES SINISTREES

I. LE CADRE LEGAL ASSURANT LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT MARIN

A. CADRE LEGAL INTERNATIONAL B. CADRE LEGAL INTERNE

II. LE REGIME DE LA RESPONSABILITE ADMINISTRATIVE ET PENALE

A. SANCTIONS ADMINISTRATIVES B. SANCTIONS PENALES

III. LE REGIME DE LA RESPONSABILITE CIVILE

A. LE DROIT COMMUN B. LE DROIT SPECIAL APPLICABLE AUX POLLUTIONS PAR HYDROCARBURES ET AUTRES SUBSTANCES

DANGEREUSES

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LEGISLATION TURQUE

Constitution turque du 9 novembre 1982

Code de l’environnement - loi n° 2872 du 9 août 1989, Gazette officielle n° 2872 du 11 août

1983

Code des délits, Gazette officielle n° 25772 du 31 avril 2005

Code pénal (TCK) n° 5237 du 26 septembre 2004, entré en vigueur le 1er juin 2005, Gazette

officielle n° 5237 du 26 septembre 2004

Loi n° 2565 sur les Zones Militarisées Fermées et la Sécurité, Gazette officielle n°17552 du 22 décembre 1981

Loi n° 6183 sur les procédures de recouvrement des recettes publiques, Gazette officielle n° 8469 du 28 juillet 1953

Loi n° 2577 sur la procédure en matière de justice administrative, Gazette officielle n° 17580 du 20 janvier 1982

Loi sur les principes d’indemnisation et les réponses à apporter aux cas de pollution marine engendrée par les hydrocarbures et autres substances dangereuses n° 5312 (Gazette officielle n° 25752 du 11 mars 2005) et son arrêté d’application (Gazette officielle n° 26326 du 21 octobre 2006)

Décret-loi n° 383, mettant en place l’Agence de Protection de l’Environnement pour les

Zones Spéciales, Gazette officielle n° 20341 du 13 novembre 1989

Arrêté sur le contrôle de la pollution de l’air d’origine industrielle, Gazette officielle n° 26236 du 22 juillet 2006

Arrêté sur le contrôle des déchets médicaux, Gazette officielle n° 25883 du 22 juillet 2005

Arrêté sur les substances et produits chimiques dangereux, Gazette officielle n° 25883 du 22 juillet 2005

Arrêté sur le contrôle de la pollution des sols, Gazette officielle n° 25831 du 31 mai 2005

Arrêté sur le contrôle des déchets solides, Gazette officielle n° 20814 du 14 mars 1991, amendé par l’arrêté n° 25777 du 5 avril 2005

Arrêté sur le contrôle des déchets dangereux, Gazette officielle n° 25730 du 17 février 2005

Arrêté sur le contrôle de la pollution des eaux, Gazette officielle n° 25687 du 31 décembre 2004

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RAPPORTS ET STATISTIQUES Waste Management Report, National Regulations and Evaluation of Implementation Results

(2007), Turkish Court of Accounts, http://www.sayistay.gov.tr/english_tca/Performance/TCA_Waste_Management_Report.pdf

The National Biological Diversity Strategy And Action Plan (2007), Republic of Turkey

Ministry of Environment and Forestry General Directorate of Nature Conservation and National Parks Department of Nature Conservation National Focal Point of Convention on Biological Diversity, Ankara 2008.

TURKSTAT, Turkish Statistical Institute, http://www.tuik.gov.tr.

BIBLIOGRAPHIE ARIMAN, S., CÜCE, H., ÖZBAYRAK, E., BAKAN, G., BÜYÜKGÜNGÖR, H. (2007)

Tracing Heavy Metal Pollution in Water and Sediment at Mid of Black Sea Coastal Rivers. 7th National Environmental Engineering Congress, Life, Environment, Technology

GÖZLER, K.; “Türk Anayasa Hukuku Dersleri (Lectures on Turkish Constitutional Law)”,

Ekin Kitabevi, 2004 GÜVEN, K.C., ÖZTÜRK, B. (2005), Marine Pollution, Basic Pollutersand Analyz Methods,

TÜDAV Yayınları No:21, Editör: Kasım Cemal OTAY, E.N., YENIGUN, O. (2003), "An Oil Spill in the Bosporus: The Gotia accident,"

Proc. 3rd Intl. Conf. on Oil Spills in the Mediterranean and Black Sea Regions, Istanbul

ÖZTÜRK, B., GÜVEN, K. C. and NESIMIGIL, F. and CUMALI, S.and DEDE, A. (2006),

Oil pollution in the surface water of the Aegean Sea, Journal of the Black Sea / Mediterranean Environment, Vol. 1

TÜTÜNCÜ, A.; Protection of the Turkish Straits from the Ship-generated Marine Pollution,

Annalles XXX, N.54, 2005

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INTRODUCTION

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STATISTIQUES CONCERNANT LES CAUSES DE POLLUTION, LES

ZONES ET LES ACTIVITES SINISTREES

La Turquie est entourée par la mer sur trois côtes : la Mer Noire au Nord, la

Méditerranée au Sud et la Mer Egée à l’Ouest. Il y a aussi une importante mer intérieure au

Nord-Ouest, la Mer de Marmara, entre le détroit des Dardanelles et le Bosphore, voie d’eau

importante qui relie la Mer Noire au reste du monde. En tout, la Turquie a 8 333 km de côtes.

Les rivages de la Mer Noire s’étendent sur 1875 km, ceux de la Méditerranée sur 1577 km

tandis que ceux de la Mer de Marmara font 1089 km de long et ceux de la Mer Egée, 2805

km.

Les installations terrestres constituent majoritairement la cause de la pollution

maritime le long des côtes en Turquie, avec principalement le rejet des eaux usées d’origine

domestique ou industrielle, les polluants drainés des terres intérieures par les rivières, la

pratique de l’agriculture côtière, l’activité touristique, les concentrations considérables de

ports de plaisance et de ports maritimes et, dans une certaine mesure, les installations de

mariculture. En outre, les pollutions trans-frontalières constituent également une importante

source de pollution marine.

1. Pollution d’origine terrestre En 2006, les quantités d’eau usées collectées par les municipalités s’élevaient à 3,37

milliards de m3, dont 64 % étaient traitées. Sur les 36% restants, 45,2 % étaient directement

rejetés à la mer et 54,8% dans les eaux de surface (rivières ou fleuves).

Selon le « Country Environmental Situation Report » publié par le Ministère turc de

l’environnement et de la forêt en 2007, seuls 12 % de la pollution terrestre affectant la Mer

Noire tirent leur origine de la Turquie, les 88 % restants provenant des pays voisins et du

Danube.

En ce qui concerne les déchets domestiques solides collectés, une grande partie est

habituellement enterrée directement et sans aucun traitement (enfouissement sauvage). Il y a

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très peu de municipalités dotées de décharges publiques. On estime que 34 % des déchets sont

mis en décharge publique, alors que 66 % sont déversés dans les mers, les rivières, les lacs,

les forêts ou sur les terrains vagues.

Suivant les données recueillies en 2004 (TURKSTAT), seulement 100 000 tonnes (soit

5 %) de déchets dangereux sont produites annuellement, sur un total de 2 millions de tonnes

de déchets. Ces déchets sont incinérés ou enfouis, dans la région de Marmara, sur le seul site

existant en Turquie pour traiter les déchets dangereux. Etant donné que seulement 40 % de

ces déchets dangereux sont récupérés, il apparaît donc que la partie restante est enfouie dans

les décharges classiques avec les déchets domestiques ou directement laissée à l’air libre,

constituant une menace pour l’environnement et la santé humaine.

Durant la dernière décennie, le commerce extérieur de la Turquie a connu un

accroissement significatif en termes d’exportation. Avec l’industrialisation de régions

spécifiques, comme celle de Marmara, les activités industrielles sont devenues une source

majeure de pollution de l’eau. D’après les récentes données de TURKSTAT (2004),

637 756 m3 d’eaux usées industrielles (provenant des secteurs de la chimie, de l’agro-

alimentaire, des tanneries, des activités minières – minerais, métaux – et du secteur médical)

ont été déversées dans l’environnement. Près de la moitié, soit 311 677 m3 l’ont été dans la

mer sans aucun traitement.

Selon les résultats d’une enquête menée entre 2000 et 2004, la quantité totale de

déchets solides produits par l’industrie était d’à peu près 1,2 millions de tonnes. Environ 32 %

de ce total a été recyclé ou réutilisé. Sur les 68% restants, 12 % ont été incinérés, 5 % envoyés

en décharge publique et 83 %, ont fait l’objet d’une prise en charge utilisant « d’autres

méthodes » que l’incinération ou le dépôt en décharge publique.

Un autre problème important est la pollution marine croissante causée par les métaux

lourds, du fait du développement industriel et du processus d’urbanisation. Les dernières

études ont montré que, tout particulièrement dans la région de la Mer Noire, il y a un

accroissement de la pollution aux métaux lourds dû au développement des décharges

domestiques et industrielles non contrôlées (sauvages).

2. Pollution en provenance des navires La pollution émanant du trafic maritime constitue également un très important

problème pour les côtes turques. L’intensité du trafic dans les détroits turcs a occasionné 480

accidents et sinistres dans le Bosphore entre 1953 et 2003. Certains de ces accidents ont été

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catastrophiques et ont occasionné d’importantes marées noires. Parmi ces accidents, un

exemple majeur est celui de l’Independenta (1979) qui a répandu plus de 95 000 tonnes de

pétrole brut dans la mer à l’entrée sud du détroit du Bosphore. Plus récemment, en 1994,

l’accident du Nassia, à la sortie nord du détroit du Bosphore en direction de la Mer Noire, a

provoqué une marée noire de plus de 13 500 tonnes de pétrole brut.

Le 29 décembre 1999, le tanker russe Volganeft -248 qui transportait 4 365 tonnes de

fuel échoua près d’Ambarl en raison de conditions météorologiques difficiles. En

conséquence, environ 3 086 tonnes de fuel ont été rejetées à la mer. Plus récemment, le 6 juin

2002, le tanker GOTLA, portant pavillon maltais, percuta l’Emirgan Pier (détroit d’Istanbul),

laissant s’échapper environ 25 tonnes de fuel. Suite à ces accidents, la pollution aux

hydrocarbures des eaux maritimes et des sédiments mesurée dans ces zones était bien au

dessus des limites internationales admises en matière de pollution maritime (FAO, IMCO,

WO, WAO, IEAE, UNEP 1989).

Outre les déversements accidentels, les dégazages opérationnels en mer sont aussi une

menace et une cause de pollution pour les côtes et les détroits turcs, particulièrement dans la

mer de Marmara et dans la Mer Egée.

Afin de protéger quelques zones sensibles contre la pollution, les activités sont

restreintes dans certaines zones marines de Turquie. Le décret-loi n° 383, mettant en place

l’Agence de Protection de l’Environnement pour les Zones Spéciales, permet la création de

zones côtières et marines protégées. Par l’effet de ce décret-loi, l’Agence de Protection

Environnementale pour les Zones Spéciales (EPASA) est autorisée à prendre toute mesure de

protection de l’environnement des zones déjà désignées comme protégées ou sur le point de

l’être, en tant que Zones à Conservation Environnementale Spéciale. Le Conseil des Ministres

est l’autorité compétente pour classer ces zones, en conformité avec le décret-loi cité plus

haut.

Selon la loi n° 2565 sur les Zones Militarisées Fermées et la Sécurité, des « zones

militarisées fermées » à l’intérieur des eaux territoriales turques sont définies par décision

ministérielle. Toute forme d’activité, y compris le simple passage, peut être restreinte ou

prohibée à l’intérieur de ces zones. Les zones nouvellement définies ou modifiées doivent être

indiquées sur les cartes et faire l’objet d’une publication officielle. Le Commandement des

Garde-Côtes Turcs informe périodiquement les marins à propos de ces zones fermées sur son

site web.

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I. LE CADRE LEGAL ASSURANT LA PROTECTION

DE L’ENVIRONNEMENT MARIN

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A. CADRE LEGAL INTERNATIONAL Depuis le début des années 1950, la Turquie a signé et ratifié la plupart des

conventions internationales sur la prévention de la pollution maritime.

1. Conventions relatives à la lutte globale contre la pollution maritime

a. La Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires telle que modifiée par le Protocole de 1978 (MARPOL 73/78)

La Turquie adhère aux annexes I, II et V de la Convention1. En ce qui concerne les annexes III et IV, les études techniques d’évaluation de leur impacte et l’adaptation constitutionnelle mise en route. Dans le « Programme national de la Turquie pour l’adoption des acquis de l’Union Européenne, 2008 », il est prévu que les annexes III et IV de la Convention devront être ratifiées avant 2011. Ce Programme National ne mentionne pas l’annexe VI. D’après les déclarations de l’administration maritime (Sous-secrétariat aux affaires maritimes – UMA), les études techniques pour l’évaluation de l’annexe VI sont actuellement en cours. Suite à la ratification de la Convention MARPOL 73/78, quelques textes législatifs ont été adoptés conformément aux dispositions des annexes de la Convention.

b. Convention de Montego Bay sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 (CMB, CDM 1982)

La Turquie n’est pas partie à cette convention.

L’actuel régime légal des détroits turcs a été déterminé par la Convention de Montreux du 22 juin 1936. Cette convention instaure la liberté de transit et de navigation dans les détroits turcs mais ne propose aucune mesure concernant la pollution. Dès lors, il est admis que la Turquie puisse, sans entraver le simple droit de passage par les détroits, mettre en place des mesures de contrôle de la pollution.

1 Cabinet des Ministres, décision n° 89/14547 du 13.9.1989, Gazette officielle du 24 juin 1990, n° 20558.

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2. Conventions régionales relatives à la lutte globale contre la pollution maritime

Etant à la fois un pays de la Mer Noire et de la Méditerranée, la Turquie a ratifié les conventions régionales sur la prévention de la pollution maritime dans le cadre du Programme Environnemental des Nations Unies (UNEP). Ces conventions et les protocoles, ainsi que leurs dates de ratification, sont indiqués ci-après.

a. Convention pour la protection de la Mer Méditerranée contre la pollution

Signée le 16 février 1976 et entrée en vigueur le 12 février 1978 cette convention a été révisée à Barcelone le 10 juin 1995 et devenue « Convention pour la protection de l’environnement maritime et de la région côtière de la Méditerranée » (Gazette officielle n° 17368 du 12 juin 1981)2. Plusieurs protocoles ont été signés :

• Protocole pour la coopération dans la lutte contre la pollution aux hydrocarbures et autres substances dangereuses en Méditerranée en cas d’urgence (Gazette officielle n° 25113 du 20 mai 2003)3 ;

• Protocole pour la prévention de la pollution causée par les versement des bateaux et des avions, Barcelone 1976 (Gazette officielle n° 17368 du 12 juin 1981) ;

• Protocole pour la protection de la Méditerranée contre la pollution d’origine terrestre, Athène 1980 (Gazette officielle n° 19404 du 18 mars 1987) ;

• Protocole concernant les zones spécialement protégées en Méditerranée, Genève 1982 (signé le 6 novembre 1986) (Gazette officielle n° 19968 du 23 octobre 1988).

b. Convention pour la protection de la Mer Noire contre la pollution Cette convention (Gazette Officielle n° 21869 du 6 mars 1994) a donné lieu à

l’adoption de plusieurs protocoles :

• Protocole pour la protection de la Mer Noire contre la pollution d’origine terrestre, 1992 (Gazette officielle n° 21869 du 6 mars 1994) ;

• Protocole pour la coopération contre la pollution aux hydrocarbures et autres substances dangereuses en Mer Noire en cas d’urgence, 1992 (Gazette officielle n° 21869 du 6 mars 1994) ;

• Protocole sur la prévention de la pollution par déversements en Mer Noire, 1992 (Gazette officielle n° 21869 du 6 mars 1994).

2 Cf. le site officiel du Ministère turc des Affaires étrangères : www.mfa.gov.tr 3 En execution des obligations incombant à la Turquie en vertu de ce protocole, ont été adoptées la loi n° 5312 relative à la réparation des dommages dans les cas urgents de pollution de l’environnement maritime par les hydrocarbures et autres substances dangereuses et sa loi d’application n° 26326.

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3. Autres conventions dans le cadre de l’Organisation Maritime Internationale (IMO)

a. Convention sur les lignes de charge (Load Line 1 966) et son Protocole du 11 novembre 1988

La Turquie a signé la Convention le 4 mai 1966 et adhéré au protocole de 1988 le 4 septembre 2007. Suite à la ratification de la Convention, la régulation des lignes de charge des navires commerciaux a été réglementée conformément aux exigences de la Convention.

b. Convention sur les régulations internationales e n matière de collision en mer (COLREGs 1972)

La Turquie a adhéré à cette convention le 16 mai 1980. Les règles édictées par la convention ont été transposées en droit national turc avec l’adoption d’un ensemble de règlementations pour la prévention des collisions en mer.

c. Convention sur le sauvetage en mer (SOLAS 1974) et ses Protocoles de 1978 et 1988

La Turquie est partie à la convention depuis sa ratifiant le 25 mai 1980. Bien que la Turquie n’ait toujours pas ratifié les protocoles à la convention, les études techniques ont été finalisées et l’adaptation constitutionnelle initiée dans le cadre du processus d’adhésion à l’Union Européenne. Conformément au « Programme national de la Turquie pour l’adoption des acquis de l’Union Européenne, 2008 », la Turquie prévoit la ratification du Protocole de 1988 avant la fin de 2009.

4. Conventions relatives à la lutte contre des pollutions spécifiques

La Turquie a ratifié les Protocoles de 1992 à la Convention sur la responsabilité civile en matière de dommages causés par pollution aux hydrocarbures (CLC 1992) et la Convention sur la création d’un Fonds International de Compensation des Dommages causés par pollution aux hydrocarbures (FUND 1992). La Turquie a l’intention de ratifier le Protocole de 2003 (Protocole sur les fonds complémentaires) de la Convention FUND et en a fait état lors de la Rencontre pour l’IOPC Fund Protocol (Fonds International pour l’Indemnisation des Pollutions aux Hydrocarbures) qui s’est tenue à Londres.

Concernant la Convention internationale sur la responsabilité civile en matière de pollution aux hydrocarbures pour tous types de navires (BUNKER4 2001), les études techniques sont en cours. La Turquie n’est pas partie de la Convention sur la responsabilité et les compensations pour dommages en relation avec le transport maritime de substances

4 On oppose souvent le “BUNKER”, navire “généraliste” au TANKER, navire “specialise”, à savoir uniquement destine au transport de hydrocarbures.

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dangereuses et toxiques, Londres 1996 (HNS, 1996). Cependant, la Turquie a participé aux études informelles qui ont eu lieu lors de la Rencontre pour l’IOPC Fund Protocol et qui visaient à rendre la Convention HNS intéressante pour le plus grand nombre dans le cadre de l’IOPC Fund.

5. Procédure constitutionnelle turque pour la ratification d’un traité international

Il n’y a pas de disposition spécifique dans la Constitution turque concernant les personnes ayant autorité pour négocier et signer les traités internationaux. Cependant, en pratique, le Président de la République, le Premier Minsitre, le Ministre des Affaires étrangères et les personnes autorisées par le Conseil des Ministres sont considérés comme compétents pour conclure un traité international.

Après leur signature, les traités internationaux sont soumis à ratification. Selon la Constitution turque, le processus de ratification se déroule en deux phases. Tout d’abord, la Grande Assemblée Nationale promulgue une loi pour autoriser la ratification du traité. Cette loi doit être publiée dans la Gazette Officielle turque comme toutes les autres lois. Après quoi, le traité devient susceptible de ratification. La deuxième phase de la procédure est la ratification par le Président de la République. Selon l’article 104/b-6 de la Constitution, seul le Président a le pouvoir de ratifier et de promulguer les traités internationaux au moyen d’un décret qui sera signé par la suite par le Conseil des ministres et le Premier Ministre.

La loi d’approbation et le décret du Président ne font que référence au traité. Ils ne reprennent pas son contenu. Les dispositions du traité seront transposées ultérieurement en droit interne par voie règlementaire ou législative.

B. CADRE LEGAL INTERNE

1. Les textes législatifs

La protection de l’environnement est devenue une préoccupation en Turquie à la fin des années 1970. Selon la Constitution de 1982, le devoir d’empêcher la pollution de l’environnement s’impose à l’Etat comme aux citoyens. En conséquence, une structure organisationnelle a été développée, avec l’adoption de certaines dispositions légales relatives à la protection environnementale et la ratification de plusieurs traités internationaux.

Suite à l’approbation de la candidature de la Turquie comme futur membre potentiel de l’Union Européenne, la mise en conformité avec les normes européennes est devenue une des priorités politiques.

Dans le système juridique turc, le Code de l’environnement (loi n° 2872 du 9 août 1989) constitue la loi-cadre. Son premier chapitre traite de l’objet, des principes et des définitions. Le second présente le cadre administratif et les fonctions du Haut Conseil à l’Environnement. Le chapitre 3 définit les mesures de prévention de la pollution ainsi que les

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interdictions, et le chapitre 4 met en place un fonds pour la protection de l’environnement. Enfin, le chapitre 5 prévoit un volet répressif (amendes). Toutefois, le Code ne comporte aucun article spécifique à la pollution maritime et il faut se référer aux disposions de prévention et aux sanctions prévues dans les textes relatifs aux pollutions plus générales comme la pollution de l’air, la pollution de l’eau, la pollution du sol).

Beaucoup de règlements ont été pris en conformité avec le Code de l’environnement. Le Ministère de l’Environnement et des Forêts est l’institution responsable de l’application de Code de l’environnement.

En Turquie, la protection et l’usage des côtes sont inscrits dans la Constitution de 1982. L’article 43 de la Constitution stipule que « Les côtes sont sous la souveraineté et à la disposition de l’Etat. Concernant l’utilisation des rivages maritimes, des bords de lacs, des berges des rivières ou des bandes côtières le long des mers ou des lacs, l’intérêt public doit prioritairement être considéré. La largeur de la côte et de la bande côtière susceptibles d’être utilisée et les conditions de cette utilisation par les individus doivent être fixées par la loi ».

Afin de préserver les caractéristiques culturelles et naturelles des côtes, et de fixer les principes concernant leur utilisation par le public, la loi « côtière » n° 3621 a été adoptée le 4 avril 1990, en conformité avec la Constitution de 1982. Elle a été modifiée en 1992, en 2003 et en 2005. En vertu de ce texte, les activités qui modifient la structure des côtes sont a priori interdites. Aucune construction ne peut être entreprise à moins de 100 mètres du rivage sans qu’elle ne s’intègre dans un « plan de développement local ». D’une manière générale, ce document administratif comportant une carte définit l’affectation qui doit être donnée à chacune des parcelles qui composent une zone géographique déterminée (parcelle résidentielle, commerciale, industrielle, espace vert…). Ce plan constitué par les municipalités ou les administrations d’Etat en charge de la gestion des territoires doit également intégrer les principaux éléments relatifs à tout aménagement (informations cadastrales, nature de la construction, plan au 1/1000ème, affectation, voies d’accès, densité humaine, etc.).

Suite à l’adoption du Code de l’environnement, un grand nombre de textes « redondants » ont été abrogés. D’autres textes qui complètent le Code restent en vigueur :

•Arrêté sur le contrôle de la pollution des eaux (GO n° 25687 du 31 décembre 2004)

•Arrêté sur le contrôle de la pollution de l’air d’origine industrielle (GO n° 26236 du 22 juillet 2006)

•Arrêté sur le contrôle de la pollution des sols (GO n° 25831 du 31 mai 2005)

•Arrêté sur le contrôle des déchets solides (GO n° 20814 du 14/03/1991, amendé le 5 avril 2005 par arrêté n° 25777)

•Arrêté sur le contrôle des déchets médicaux (GO n° 25883 du 22 juillet 2005)

•Arrêté sur les substances et produits chimiques dangereux (GO n° 25883 du 22 juillet 2005)

•Arrêté sur le contrôle des déchets dangereux (GO n° 25730 du 17 février 2005).

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L’article 15 de l’arrêté sur le contrôle de la pollution des eaux fixe les normes de qualité pour l’eau de mer et les eaux côtières. Les articles 33, 34 et 35 règlementent les décharges en eaux profondes et l’article 42 établit la procédure d’obtention des permissions pour ce type de décharge. Le non-respect de ces normes tombent entraîne l’application du régime général de responsabilité définit par le Code de l’environnement.

Afin d’améliorer la sécurité du trafic maritime et de protéger l’environnement de la pollution à l’intérieur des détroits turcs et de la région de la Mer de Marmara, le Système d’Information et de Gestion du Trafic Maritime dans les Détroits Turcs (VTMIS) a été mis en place en 2003 sous l’autorité du Conseil d’Administration au Ministère des Transports pour la Sécurité des Côtes (KEGM). Le KEGM assure des services de sauvetage ainsi qu’un service de surveillance et de pilotage. En outre, le Système d’Identification Automatique (AIS) a été mis en place, couvrant une zone de 100 à 200 miles nautiques à partir des côtes turques. Le système est complètement opérationnel depuis le 9 juillet 2007 et permet au Sous-secrétariat aux Affaires Maritimes (UMA, Ankara) d’effectuer la surveillance du trafic maritime à l’intérieur de la zone.

2. Les principes du droit de l’environnement

Le Code turc de l’environnement pose les principes du droit environnemental et notamment le principe du pollueur-payeur, de l’accès à la justice, de la participation citoyenne, de l’obligation d’évaluer l’impacte environnemental des nouvelles activités économique, de la protection des droits des générations futures.

a. Le principe du pollueur-payeur

Selon l’article 3 du Code de l’environnement, les coûts requis pour prévenir, limiter, éliminer la pollution et remettre l’environnement en état doivent être pris en charge par le pollueur. Conformément à la loi sur les procédures de recouvrement des recettes publiques n° 6183 (GO n° 8469 du 28 juillet 1953), lorsque le pollueur ne prend pas les mesures nécessaires pour arrêter, éliminer ou réduire la pollution ou les dégradations, ou si de telles mesures doivent être directement prises par les autorités compétentes, les dépenses engagées devront être remboursées par le pollueur.

L’article 8 précise que dans les situations où il y a un risque de pollution, les parties impliquées doivent prévenir cette pollution ; dans les situations où la pollution a déjà eu lieu, il est exigé du pollueur qu’il prenne les mesures nécessaires pour arrêter cette pollution, l’éliminer ou en réduire les effets.

b. L’accès à la justice

Suivant le 1er paragraphe de l’article 30 du Code de l’environnement, toute personne qui subit ou a connaissance d’une activité qui pollue ou dégrade l’environnement, peut exiger que les mesures nécessaires soient prises ou qu’il soit mis un terme à la susdite activité en s’adressant aux autorités compétentes.

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Plus généralement et conformément à l’article 125 de la Constitution de la République Turque et aux articles 2a, b, 12 et 13 de la loi n° 2577 sur la procédure en matière de justice administrative (GO n° 17580 du 20/01/1982), toutes les actions et les procédures entreprises par les autorités administratives peuvent faire l’objet d’un recours en justice à la demande des personnes intéressées.

Selon l’article 10 de la loi n° 2577 sur la procédure en matière de justice administrative, toute personne concernée peut exiger d’une autorité administrative qu’elle applique une loi, y compris par le biais d’une action en justice. Avant d’introduire une telle action, la personne peut demander l’abandon ou la modification de la procédure administrative contestée ou la mise en place d’une nouvelle procédure la remplaçant en s’adressant à l’autorité administrative hiérarchiquement supérieure ou à défaut à l’autorité chargée de faire appliquer la loi concernée (art. 11).

Les personnes dont les droits ont été violés par une action administrative peuvent introduire deux types d’actions contre l’Administration, à savoir l’action en annulation et la demande en dommages et intérêts (art. 2). L’action en justice doit être précédée d’une demande gracieuse adressée à l’administration compétente à qui il est demandé de rectifier. Le rejet de la demande gracieuse par l’administration ou l’absence de réponse pendant un délai de 60 jours autorise le demandeur à introduire l’action en justice (art. 13). Les deux types d’actions peuvent être conduits ensemble ou successivement. Les juridictions concernées sont la « Cour d’Etat », les tribunaux administratifs et les tribunaux “fiscaux” (art. 12).

Les personnes physiques comme les personnes morales sont autorisées à saisir la justice administrative.

c. Le principe de la participation citoyenne

L’article 3 du Code de l’environnement précise que le droit à la participation citoyenne est un principe fondamental du processus d’élaboration de la politique environnementale. Le Ministère de l’Environnement et de la Forêt et les autorités locales ont la responsabilité d’assurer la réunion des conditions permettant aux chambres professionnelles, aux syndicats, aux ONG et aux citoyens d’exercer leurs droits en matière d’environnement.

L’article 9/a dispose que la protection de la biodiversité et de l’écosystème qui abrite cette biodiversité étant essentielle, les principes de sa mise en œuvre doivent être définis en prenant l’avis des administrations locales, des universités, des ONG et des institutions concernées.

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d. L’obligation d’évaluer l’impact environnemental des nouvelles activités économiques

L’article 10 du Code de l’environnement énonce : « Les organisations, les institutions et les entreprises qui pourraient causer des problèmes environnementaux en raison des activités qu’elles projettent d’exercer ont la responsabilité de la préparation d’un Rapport d’Etude d’Impact Environnemental et d’un dossier sur leur projet de développement ». Conformément à cet article, à moins d’une décision actant l’Evaluation Positive de l’Impact Environnemental ou indiquant que « l’Evaluation de l’Impact Environnemental n’est pas requise », l’approbation, l’autorisation, l’octroi d’avantages fiscaux, d’incitations financières ou la délivrance d’un permis de construire en rapport avec le projet ne peuvent être validés. Il faut néanmoins noter que les activités ayant trait au pétrole, aux ressources géothermiques et aux mines ne sont pas concernées par cette règlementation.

e. La protection des droits des générations futures

Afin de protéger les droits des générations futures, l’article 3 indique que lors de la prise de décisions sur l’utilisation des ressources et l’évaluation des projets doivent prendre en considération le principe du développement durable. Les bénéfices de l’activité économique et son impact sur les ressources naturelles sont à évaluer dans la perspective du développement durable.

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II. LE REGIME DE LA RESPONSABILITE

ADMINISTRATIVE ET PENALE

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La Turquie n’a commencé à prendre en compte la pollution issue du trafic maritime

que très tardivement. La législation existante se cantonne malheureusement à réguler le trafic maritime tandis que la question de la responsabilité des pollueurs est traitée par le Code de l’environnement qui n’impose principalement que des sanctions administratives et comporte un seul article édictant des sanctions pénales. Le Code des délits (GO n° 25772 du 31 avril 2005) introduit lui aussi des amendes administratives pour des actes de pollution environnementale. Les sanctions pénales imposables aux pollueurs ont été mises en place avec l’adoption du Code pénal turc (TCK) en 2004.

A. SANCTIONS ADMINISTRATIVES L’article 20 du Code de l’environnement sanctionne les rejets illégaux de substances

polluantes dans les mers étant sous la souveraineté de la Turquie, ou à l’intérieur des zones où s’exerce son autorité, par des amendes administratives différenciées selon le type de bateau et la nature des substances polluantes déversées.

● Ainsi, les bateaux-citernes (tankers) qui effectuent des déversements d’essence ou de produits pétroliers encourent les amendes suivantes : jusqu’à 1000 tonnes de jauge incluses5, 40 TL (Lire Turque = 0,5 euros) par tonne ; entre 1000 et 5000 tonnes de jauge incluses, 10 TL additionnelles par tonne ; et au dessus de 5000 tonnes de jauge, 0,1 TL additionnelles par tonne. En cas de « dégazage » sauvage (nettoyage des ballasts) effectués par des tankers dans les zones citées ci-dessus, les amendes sont les suivantes : 30 TL par tonne jusqu’à 1000 tonnes de jauge incluses, plus 6 TL additionnelles par tonne pour les tankers entre 1000 et 5000 tonnes de jauge incluses et plus 0,1 TL additionnelles par tonne pour les tankers au dessus de 5000 tonnes de jauge.

Pour les autres types de navires, en cas de déversements ou de « dégazage » de ballasts, les amendes sont les suivantes : jusqu’à 1000 tonnes de jauge incluses, 20 TL par tonne ; entre 1000 et 5000 tonnes de jauge incluses, 4 TL additionnelles par tonne ; et au dessus de 5000 tonnes de jauge, 0,1 TL additionnelles par tonne.

● En cas de déversement ou de rejet à la mer de n’importe quelle substance dangereuse, l’amende à payer sera 10 (dix) fois supérieure à celle prévue pour le rejet d’essence ou de produits pétroliers.

● Enfin, l’article 20 prévoit des amendes pour les tankers et tous les autres types de navires et de transports par mer qui déversent des déchets solides ou leurs eaux usées. Les

5 Mesure de tonnage d’un navire faisant l’objet d’une norme internationale de l’OMI (Organisation Maritime Internationale)

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amendes sont les suivantes : jusqu’à 1000 tonnes de jauge incluses, 10 TL par tonne ; entre 1000 et 5000 tonnes de jauge incluses, 2 TL additionnelles par tonne ; et au dessus de 5000 tonnes de jauge, 0,4 TL additionnelles par tonne.

Si le pollueur assure le traitement de la pollution qui résulte de l’incident par ses propres moyens, il ne sera redevable que du tiers de l’amende.

A la première récidive des mêmes actes de pollution, par le même bateau, survenue à l’intérieur d’une période de 3 ans, le montant de l’amende correspondant aux nouveaux faits est augmenté du montant de la première amende. A la seconde répétition des faits ainsi qu’aux suivantes, le montant de l’amende correspondant aux faits nouvellement perpétrés est égal à deux fois le montant de l’amende correspondant à la première récidive.

A moins que l’amende soit payée immédiatement ou qu’une caution soit versée6, le vaisseau sera immobilisé auprès de l’autorité portuaire la plus proche. Il est possible de contester l’amende en saisissant le tribunal administratif dans les 30 jours qui suivent l’incident.

Le régime de responsabilité mis en place par le Code de l’environnement ne fait pas de distinction entre les actes intentionnels et les actes commis par négligence. En conséquence, même si le déversement est consécutif à un accident, les amendes s’appliqueront. Le pollueur ne peut évoquer qu’une seule circonstance atténuante, à savoir le fait qu’il a remédié à la pollution en la traitant par ses propres moyens, ce qui entraîne la réduction de l’amende due à un 1/3 seulement du montant autrement applicable.

Cependant, ces amendes ne semblent très dissuasives. Ainsi dans le cas, par exemple, où un bateau de 55 000 tonnes de jauge déverse de l’essence, des produits pétroliers ou « dégaze » ses ballasts dans la mer, le montant de l’amende s’élèvera à 41 000 TL soit moins de 20 000 €.

Outre le Code de l’environnement, le Code des délits instaure des amendes administratives pour des infractions mineures. Ainsi, l’article 41 du Code punit d’une amende de 20 TL toute personne qui déverse ses déchets ménagers ailleurs que dans les décharges autorisées, disposition qui peut trouver application en matière de pollution maritime.

B. SANCTIONS PENALES Les sanctions pénales pour des faits de pollution sont essentiellement prévues par le

Code pénal. Cependant, le Code de l’environnement (art. 26) introduit une obligation spécifique d’information, en matière de protection de l’environnement, sanctionnée par une peine d’emprisonnement. Ainsi, les « personnes concernées » doivent partager la documentation et les informations qu’elles détiennent avec les autorités d’inspection et de contrôle. Le cas échéant, ces personnes doivent en outre fournir des informations concernant les déchets ou les substances qu’elles ont déversés. A défaut, elles sont passibles d’une peine

6 L’autorité administrative n’accepte que les cautions bancaires et les « P&I Club Letters of Undertaking » (Assurance Mutualisée Protection et Indemnités).

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de prison allant de 6 mois à 2 ans. Le Code de l’environnement n’apporte pas de définition claire de la notion de « personnes concernées ». On peut néanmoins supposer que les cadres présents sur le navire (le commandant, ses adjoints, le machiniste…) ainsi que le propriétaire ou l’affréteur sont tenus de cette obligation de partage d’information avec les autorités publiques.

Le nouveau Code Pénal Turc (TCK) a été adopté le 26 septembre 2004 et est entré en application le 1er juin 2005. Les articles 181/1 et 182/1, relatifs à la protection de l’environnement, sont entrés en application seulement le 13 juin 2006. Le Code pénal incrimine des faits contraires aux règles assurant la protection de l’environnement, mais ne mentionne pas spécifiquement la pollution due au trafic maritime. Néanmoins, ses dispositions s’appliquent à tous les comportements entraînant une pollution des eaux territoriales de la Turquie.

1. Les faits incriminés et les sanctions applicables

Les articles 181 et 182 du Code pénal incriminent les actes polluants, tels que les déversements « sauvages » de déchets dans l’environnement, commis avec intention ou négligence. Les articles 183 et 184 sanctionnent la pollution due au bruit et la pollution causée par l’urbanisation irrégulière.

a. Les faits de pollution intentionnels Le paragraphe 1er de l'article 181 du Code pénal turc incrimine les faits de pollution

intentionnels. L’infraction est constituée seulement en présence de l'intention définie comme « la réalisation consciente et volontaire des éléments d'une infraction tels que mentionnés dans sa définition légale » (art. 21). Ainsi, toute personne qui introduit ou déverse des déchets dans et sur le sol, dans l'eau ou dans l'air intentionnellement et en violation des normes légales encourt une peine d'emprisonnement allant de 6 mois à deux ans.

Le paragraphe 2 du même article incrimine le transport illégal des déchets. Ce paragraphe précise que la personne qui transporte des déchets à l'intérieur de la Turquie sans avoir eu l’autorisation de le faire encourt une peine d'emprisonnement pouvant aller de 1 à 2 ans. Lorsque la pollution présente un caractère persistant dans l'eau, le sol ou l'air, les sanctions peuvent être doublées.

En outre, quand les faits de pollution décrits dans les deux premiers paragraphes impliquent des déchets qui sont susceptibles de causer des maladies à l'homme ou à l'animal, d’affecter les capacités de reproduction ou d’entraîner des modifications des caractéristiques naturelles des plantes, l'infraction peut être sanctionnée soit par une peine de 5 ans d'emprisonnement, soit par une amende.

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b. Les faits de pollution commis par négligence L’article 182 incrimine les atteintes à l’environnement commises par négligence.

Selon l’article 22 du Code pénal, « la négligence consiste dans la réalisation d’un acte sans avoir envisagé le résultat décrit dans la définition légale de l’infraction, et en violation de l’obligation de diligence ». Les faits incriminés consistent dans le fait d’introduire ou de déverser des déchets sur ou dans le sol, dans l’eau ou dans l’air et cause ainsi un dommage à l’environnement. La peine applicable est l’amende « judiciaire ». Le montant de l’amende sera déterminé, conformément à l’article 52 du Code pénal, en multipliant le nombre de jours par le montant « journalier ». Le nombre de jours à déterminer par le juge peut aller de 5 à 730 et le montant « journalier » de 20 à 100 Lires turques (TL), suivant la situation personnelle et économique de la personne concernée. Le juge pourra également accorder un délai d’un an pour le paiement de l’amende. A défaut de paiement, l’amende judiciaire peut être convertie en peine de prison par le juge. Pour les infractions de l’article 182, le tribunal doit fixer le montant de l’amende en considérant l’étendue des dommages causés et les effets de l’infraction sur l’environnement.

Lorsque la pollution ainsi causée présente un caractère persistant dans l’eau, le sol ou l’air, une peine d’emprisonnement allant de 2 mois à un an peut être prononcée. Si les faits affectent la santé humaine ou animale, ou déforment les caractéristiques naturelles des plantes, ils seront punis par une peine d’emprisonnement allant de un à cinq ans.

Le domaine d’application de la loi pénale turque dans l’espace est défini à l’article 8 du Code pénal. La loi turque s’applique à toutes les infractions commises en Turquie. Lorsque les faits incriminés sont partiellement ou totalement commis en Turquie ou que leurs conséquences se sont produites en Turquie, l’infraction est considérée commise en Turquie. Par conséquent, si l’infraction a été commise, partiellement ou totallement :

a) à l’intérieur du territoire turc, à l’intérieur de son espace aérien ou des eaux territoriales turques ;

b) en haute mer ou dans l’espace directement au dessus de ces eaux et dans, ou en utilisant, les navires et les avions turcs ;

c) dans, ou en utilisant, les véhicules militaires turcs maritimes ou aériens ;

d) sur une plateforme érigée sur le plateau continental turc ou dans une zone économique de Turquie

ou si ses conséquences se sont produites dans les zones énumérées ci-dessus, alors l’infraction est considérée comme ayant été commise en Turquie.

Suivant l’article 51, l’auteur des faits peut bénéficier d’une peine d’emprisonnement avec sursis assortie d’une mise à l’épreuve d’un an à trois ans, à condition que :

- la peine prononcée soit inférieure à deux ans ou à trois ans si l’auteur est âgé de moins de 18 ans et de plus de 65 ans ;

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- l’auteur n’ait pas déjà été condamné à plus de 3 mois de prison pour une infraction commise de manière intentionnelle ;

- le comportement du condamné permet au juge de retenir qu’il regrette ses actes.

Le bénéfice du sursis peut être accordé sous condition d’indemnisation de la victime.

Lorsque, durant cette période de mise à l’épreuve, la personne commet une nouvelle infraction ou ne respecte pas les règles imposées par la loi ou le juge, elle pourra être tenue d’exécuter partiellement ou totalement sa peine.

2. Les auteurs

a. Le cas des personnes morales Les personnes morales peuvent être tenues pour responsables de ces infractions. Elles

encourent pour ces faits l’application de peines pénales spécifiques, les « mesures de sécurité ».

Ainsi :

« (1) L’autorisation donnée à la personne morale - celle-ci agissant sur la base d’un permis accordé par une autorité publique - doit lui être retirée lorsque ses organes ou de ses représentants, en abusant du pouvoir qui leur a été confié ont commis une infraction et en ont été condamnés.

(2) Les dispositions relatives à la confiscation doivent s’appliquer aux personnes morales lorsqu’il apparaît que l’infraction a été commise en leur faveur.

(3) Quand il apparaît que l’application des dispositions des paragraphes ci-dessus a des conséquences encore plus graves que l’acte perpétré lui-même, le juge peut alors renoncer à l’application de ces dispositions. » (art. 60 « Mesures de sécurité à l’encontre des personnes morales ») ;

(4) Les bénéfices matériels tirés de la commission de l’infraction ou constituant l’objet de l’infraction ainsi que les gains économiques obtenus par leur placement ou leur conversion seront confisqués ;

(5) Quand les bénéfices matériels ne peuvent pas être saisis par l’autorité compétente, des avoirs d’une valeur équivalente seront confisqués. » (art. 55 « Confiscation des bénéfices »).

b. L’identification du « pollueur » La définition légale du « pollueur » se trouve non pas dans le Code pénal, mais à

l’article 2 du Code de l’environnement où le pollueur est défini comme toute personne physique ou morale qui cause directement ou indirectement une pollution environnementale pendant ou en conséquence de l’exercice de son activité.

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En outre, le Code pénal turc ne comporte pas de précision particulière concernant l’identification des personnes responsables. A défaut, on peut considérer que le capitaine, l’équipage, la compagnie, le pilote et l’affréteur peuvent être tenus pour responsables des actes de pollution.

La question de la nationalité de la personne ayant perpétré l’infraction est régie par les articles 11 et 12 du Code Pénal. L’article 11 traite des infractions commises par les ressortissants turcs à l’étranger :

(1) si un citoyen turc commet, dans un pays étranger, une infraction qui est également une infraction en Turquie et si celle-ci donne lieu à une peine d’emprisonnement dont le minimum est supérieur à un an, et le citoyen, présent en Turquie, n’a pas été condamné pour la même infraction dans un pays étranger et les poursuites sont possibles en Turquie, alors il fera l’objet d’une sanction prévue par la loi turque, sauf en ce qui concerne les infractions définies à l’article 13 (infractions sanctionnées sans distinction de nationalité) ;

(2) quand l’infraction susmentionnée donne lieu à une peine d’emprisonnement dont le minimum est inférieur à un an, les poursuites ne peuvent alors être engagées que sur plainte d’une victime ou d’un gouvernement étranger, déposée dans les 6 mois à compter de la date d’entrée du citoyen turc auteur de l’infraction en Turquie.

Concernant les infractions commises par les non ressortissants turcs, l’article 12 du Code Pénal dispose :

(1) Quand un non citoyen turc commet une infraction (autre que celles définies à l’article 13) au détriment de la Turquie, dans un pays étranger, qui constituerait une infraction selon le droit turc et que cette infraction peut donner lieu à une peine d’emprisonnement dont le minimum est supérieur à un an, et que ce non citoyen turc est présent en Turquie, il peut alors faire l’objet d’une sanction pénale en Turquie. Les poursuites pénales ne peuvent être initiées que sur requête du Ministère de la Justice.

(2) Quand l’infraction susmentionnée est commise au détriment d’un citoyen turc ou au détriment d’une personne morale constituée selon le droit civil turc et que le délinquant est présent en Turquie et qu’il n’y a pas été condamné dans un pays étranger pour la même infraction, alors, sur plainte de la victime, le délinquant peut faire l’objet d’une sanction prévue selon le droit turc.

(3) Si la victime n’est pas citoyen turc, le délinquant peut faire l’objet de poursuites pénales, sur la requête du Ministère de la Justice, si les conditions suivantes sont remplies :

a) l’infraction fait l’objet d’une peine d’emprisonnement dont le minimum ne peut être inférieur à 3 ans selon la loi turque ;

b) il n’y a pas d’accord d’extradition ou l’extradition a été refusée par le gouvernement du pays où l’infraction a été commise, ou par l’Etat dont le délinquant est le ressortissant.

L’article 9 précise que toute personne condamnée dans un pays étranger pour une infraction commise en Turquie doit faire l’objet d’un nouveau procès en Turquie.

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III. LE REGIME DE LA RESPONSABILITE CIVILE

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Le droit commun de la responsabilité civile (A) s’étant révélé insuffisant pour assurer la réparation des dommages environnementaux, des règles spéciales ont été posées (B).

A. LE DROIT COMMUN Le Code de l’environnement a adopté le principe de la responsabilité pour faute, a été

adopté par En conséquence, ceux qui polluent ou dégradent l’environnement en sont responsables qu’ils aient agi intentionnellement ou par négligence (art. 28). Pour les autres conditions de la responsabilité et les modalités de réparation du dommage, le Code renvoie aux « dispositions générales » de la loi sur les obligations (art. 41 à 55).

Ainsi, la personne qui cause un dommage de façon intentionnelle, par négligence, par imprudence ou en raison d’un comportement illégal ou immoral, devra indemniser la victime. La charge de la preuve incombe au demandeur. Dans les cas il est impossible d’apporter des éléments de preuve démontrant la réalité du dommage, il appartient au juge de l’évaluer avec impartialité en se fondant sur les situations habituelles rencontrées en la matière et en tenant compte des précautions prises par la partie lésée (article 42).

Toujours en matière de dommages à l’environnement, la responsabilité pour autrui et plus particulièrement la responsabilité des employeurs pour leurs employés, régie par l’article 55 de la loi sur les obligations, peut trouver application. Aux termes de ces dispositions, l’employeur est civilement responsable des dommages causés par ses employés pendant l’exécution de leur travail. Cependant, l’employeur peut s’exonérer en faisant la preuve qu’il a déployé toute la diligence nécessaire pour prévenir les dommages ou que les dommages se seraient produits même s’il avait mis en œuvre toutes les précautions possibles. L’employeur a un droit de recours contre la personne qui a causé les dommages.

Le montant des dommages et intérêts est fixé souverainement par le juge en fonction des spécificités de l’affaire (art. 43).

Conformément au Code de l’environnement, l’action en réparation des dommages causés se prescrit par cinq ans.

Le système mis en place par le Code de l’environnemental et la loi sur les obligations s’est vite révélé insuffisant, notamment pour la réparation des dommages de pollution causés par les très gros tankers. Pour répondre à cette carence, ont été adoptés la loi sur les principes d’indemnisation et les réponses à apporter aux cas de pollution marine engendrée par les hydrocarbures et autres substances dangereuses n° 5312 et son arrêté d’application (respectivement en 2005 et 2006).

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B. LE DROIT SPECIAL APPLICABLE AUX POLLUTIONS PAR HYDROCARBURES ET AUTRES SUBSTANCES DANGEREUSES

La loi n° 5312 comporte d’une part des dispositions relatives aux réponses d’urgence à apporter en cas de pollution de l’environnement marin par des produits pétroliers ou des substances dangereuses et d’autre part des dispositions régissant l’indemnisation des dommages, en prenant en compte « les droits et les obligations découlant des lois internationales et nationales sur la mise en place de la sécurité maritime et la prévention de la pollution marine ». La loi pose (art. 1er) :

a. les principes de prévention et de réponse à appliquer pour éviter, éliminer ou limiter la pollution occasionnée par les bateaux et les installations côtières en cas d’urgence ;

b. les principes d’identification et d’indemnisation des dommages ;

c. les principes relatifs à la détermination des responsabilités qui émanent des conventions internationales ;

d. les devoirs et les responsabilités des personnes et des autorités en charge des institutions, des navires ou des installations qui entrent dans le champ d’application de la loi.

1. Champ d’application

La loi n° 5312 s’applique à tout navire de plus de 500 GRT (Gross Registrer Tonnage - volume interne des navires) transportant des produits pétroliers ou d’autres substances dangereuses. Les bateaux plus petits échappent au domaine d’application de la loi même s’ils causent des dommages graves.

L’arrêté d’application définit la pollution comme « le déversement de pétrole ou d’autres substances dangereuses dans l’environnement marin portant atteinte aux ressources et à la vie marine, menaçant la santé humaine ou ayant des conséquences préjudiciables telles que d’empêcher les activités maritimes incluant la pêche et d’autres activités légales ou de modifier la qualité de l’eau de mer et l’équilibre écologique ». Les « dommages » incluent « les coûts induits par la pollution ou les risques de pollution en conséquence d’un incident, tels que les coûts de nettoyage, les coûts afférents aux mesures de protection, les dommages causés aux ressources et à la vie marine, les coûts de réhabilitation, les coûts de ramassage, de transport et d’élimination des polluants, les dommages causés aux propriétés privées, les dommages liés aux blessures et aux décès des personnes affectées, les pertes de revenus, les autres coûts associés à l’identification et à l’indemnisation des dommages et à la résolution des litiges. »

Le terme « hydrocarbures » est utilisé pour les substances listées à l’appendice 1 de l’annexe 1 de la Convention MARPOL 73/78 ainsi que pour le pétrole brut, le carburant, le cambouis (vidange), les produits raffinés et autres composés hydrocarbures obtenus naturellement et non mentionnés dans cette liste. L’expression « autres substances dangereuses » désigne les « substances listées aux appendices 2 et 3 de l’annexe 1 de la

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Convention MARPOL 73/78 ainsi que les autres substances, à l’exclusion des substances radioactives, non listées dans les annexes et les appendices cités ».

2. Identification des dommages

Dans cette matière, le Ministère de l’environnement et de la forêt assure un rôle de coordination générale. En conséquence, il est chargé de préparer les plans de réponse d’urgence, d’identifier le type et l’impact de la pollution, d’identifier ultérieurement l’étendue des dommages à l’environnement, et d’organiser la réhabilitation des zones polluées.

Le Sous-secrétariat aux Affaires Maritimes (UMA) est responsable, pour sa part, de la mise en application des plans de réponse d’urgence, de l’avancement de la préparation, de la réponse à apporter à la pollution, du versement des dommages et intérêts.

a. La Commission d’évaluation des dommages (DEC) Afin d’évaluer les dommages de pollution, une « commission d’évaluation des

dommages » est instituée par le Ministère de l’Environnement et de la Forêt (art. 10, loi n° 5312). Cette commission est composée de gouverneurs (Kaymakam : représentant local de l’Etat), de représentants du Sous-secrétariat aux Affaires maritimes, des représentants du Commandement des Gardes Côtes, de la Direction Générale de la Sécurité Côtière et du Sauvetage en Mer et des municipalités concernés.

La structure et le mode de fonctionnement de cette commission diffèrent selon l’importance de la pollution traitée (importance jugée selon le classement de la pollution dans l’un des trois niveaux légaux).

La commission se réunit à la demande de son président. Elle décide sur la base de la majorité simple. En cas d’égalité de votes, la voix du président prévaut. La commission peut s’adjoindre des experts ou des représentants de certaines administrations si elle l’estime nécessaire, mais ces personnes n’auront pas le droit de vote.

La Commission est chargée d’estimer (art. 39, arrêté d’application) :

� les coûts du nettoyage de la pollution ;

� les coûts induits par les mesures de protection ;

� l’étendue des dommages causés à la vie marine ;

� les coûts de la réhabilitation de l’environnement, du nettoyage et du transport des polluants ;

� l’importance des atteintes à la propriété privée, les blessures infligées aux particuliers ainsi que les décès causés ;

� l’atteinte aux capacités de gain des particuliers ;

� les autres dommages causés au secteur public.

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b. Le dommage réparable Aux termes de la loi, les « parties responsables » des navires et des installations

côtières à l’origine de l’incident sont personnellement tenus des dommages causés et doivent prendre en charge :

• les coûts de nettoyage,

• les coûts induits par les mesures de protection,

• la réparation des dommages causés aux ressources vivantes et à la vie marine,

• la réhabilitation de l’environnement pollué,

• le transport et l’élimination des polluants ramassés,

• la réparation des dommages causés aux ressources naturelles et vivantes considérées comme des moyens d’existence,

• la réparation des dommages causés aux personnes (décès, blessures)

• la réparation des dommages causés à la propriété privée,

• l’indemnisation des pertes de revenus, de l’atteinte aux capacités de revenu des particuliers,

• la réparation des autres dommages causés au secteur public.

3. Identification des responsables

L’existence d’une assurance de responsabilité civile ne saurait faire disparaître la responsabilité de l’auteur des faits dommageables qui devra indemniser tout dommage qui n’est pas couvert par l’assurance. A son tour, l’assureur a un droit de recours contre son assuré.

La loi n° 5312 rend obligatoire l’assurance de responsabilité civile des navires, conformément aux exigences des conventions internationales auxquelles la Turquie est partie. Cette assurance doit être souscrite auprès d’une compagnie d’assurance agréée par le Sous-secrétariat au Trésor (UT) ou auprès d’un Fonds constitué par ces mêmes compagnies d’assurance agréées. Les navires qui ne répondent pas à ces exigences ne peuvent se voir autoriser l’accès aux eaux intérieures ou aux eaux territoriales turques, sauf en cas de force majeure (problèmes de santé de l’équipage, avaries sérieuses, dangers climatiques…). Les navires déjà présents dans les eaux turques en seront expulsés ou devront, dans un délai de 30 jours se conformer à cette exigence.

En absence de définition de l’expression « parties responsables » dans la loi n° 5312, on peut utilement se référer à ses textes d’application qui visent à ce titre « les propriétaires, les machinistes, capitaines, gérants, affréteurs, possesseurs et garants du navire ou des installations côtières ». Le « garant » est quant à lui défini comme étant « la personne, l’institution ou l’Etat qui assume la responsabilité financière de l’indemnisation à la place de

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la partie responsable, et qui fournit le document qui établit cette responsabilité financière, conformément aux dispositions de la loi ».

Ce système de responsabilité est moins restrictif que celui de la Convention sur la responsabilité de 1992 qui précise, que seul le propriétaire du navire à l’origine d’une pollution est tenu de réparer les dommages causés par cet incident.

Lorsque le responsable n’est pas connu, une enquête sera menée par les services du Ministère de l’Environnement et de la Forêt. Des analyses permettront de comparer des échantillons de produits issus de la zone de pollution à ceux prélevés auprès de navires ou d’installations côtières suspects.

4. Procédure d’indemnisation

Lorsque le pollueur n’est pas identifié, le Sous-secrétariat aux Affaires Maritimes prend les mesures pour endiguer la pollution et en concertation avec le Ministère de l’Environnement et de la Forêt et le Ministère des Affaires Etrangères, sollicite la coopération de l’Etat d’où le navire pollueur est originaire (pavillon du navire) pour permettre l’indemnisation des dommages causés (article 11).

Les principes et les procédures applicables en matière d’indemnisation et de paiement sont contenus dans l’arrêté d’application. Le Sous-secrétariat aux Affaires Maritimes (UMA) doit recenser les demandes d’indemnisation déposées dans la zone touchée par la pollution (article 42/2). Les demandes d’indemnisation doivent lui être adressées. Elles doivent être écrites et mentionner l’identité et l’adresse du demandeur, la description et l’importance de la pollution subie, l’identification des activités touchées, et peuvent être utilement accompagnées de photos et de rapports d’expertise. Les demandes d’indemnisation des frais associés aux mesures de prévention de la pollution doivent préciser la localisation du site concerné, la durée des mesures, l’identité des parties ayant conduit ces mesures et l’identification des équipements et matériaux utilisés.

Le Sous-secrétariat examine les demandes en tenant compte, entre autres, des documents et des informations fournis par le demandeur. Il décide s’il y a lieu à dédommagement et propose le montant qu’il fixe avec l’aide de la Commission d’évaluation des dommages.

__________________________________________ Ministère de la Justice – SAEI

Pollutions maritimes, Turquie, à jour le 15 mai 2009 CNRS-JURISCOPE

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION............................................................................................................................................... 5

STATISTIQUES CONCERNANT LES CAUSES DE POLLUTION, LES ZONES ET LES ACTIVITES SINISTREES.................. 5 1. Pollution d’origine terrestre ........................................................................................................... 5 2. Pollution en provenance des navires ......................................................................................... 6

I. LE CADRE LEGAL ASSURANT LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT MARIN .............. 8

A. CADRE LEGAL INTERNATIONAL ...................................................................................................................... 8 1. Conventions relatives à la lutte globale contre la pollution maritime ........................... 8

a. La Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires telle que modifiée par le Protocole de 1978 (MARPOL 73/78)......................................................................................................................... 8 b. Convention de Montego Bay sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 (CMB, CDM 1982).............................. 8

2. Conventions régionales relatives à la lutte globale contre la pollution maritime ..... 9 a. Convention pour la protection de la Mer Méditerranée contre la pollution........................................................... 9 b. Convention pour la protection de la Mer Noire contre la pollution....................................................................... 9

3. Autres conventions dans le cadre de l’Organisation Maritime Internationale (IMO)..................................................................................................................................................................... 10

a. Convention sur les lignes de charge (Load Line 1966) et son Protocole du 11 novembre 1988 .......... 10 b. Convention sur les régulations internationales en matière de collision en mer (COLREGs 1972) ....... 10 c. Convention sur le sauvetage en mer (SOLAS 1974) et ses Protocoles de 1978 et 1988 ...................... 10

4. Conventions relatives à la lutte contre des pollutions spécifiques ............................... 10 5. Procédure constitutionnelle turque pour la ratification d’un traité international .... 11

B. CADRE LEGAL INTERNE................................................................................................................................ 11 1. Les textes législatifs ....................................................................................................................... 11 2. Les principes du droit de l’environnement............................................................................. 13

a. Le principe du pollueur-payeur ........................................................................................................................ 13 b. L’accès à la justice ............................................................................................................................................ 13 c. Le principe de la participation citoyenne ........................................................................................................ 14 d. L’obligation d’évaluer l’impact environnemental des nouvelles activités économiques .......................... 15 e. La protection des droits des générations futures.......................................................................................... 15

II. LE REGIME DE LA RESPONSABILITE ADMINISTRATIVE ET PENALE.................................... 16

A. SANCTIONS ADMINISTRATIVES..................................................................................................................... 16 B. SANCTIONS PENALES.................................................................................................................................... 17

1. Les faits incriminés et les sanctions applicables.................................................................. 18 a. Les faits de pollution intentionnels .................................................................................................................. 18 b. Les faits de pollution commis par négligence................................................................................................ 19

2. Les auteurs ........................................................................................................................................ 20 a. Le cas des personnes morales ....................................................................................................................... 20 b. L’identification du « pollueur » ......................................................................................................................... 20

III. LE REGIME DE LA RESPONSABILITE CIVILE ................................................................................. 22

A. LE DROIT COMMUN....................................................................................................................................... 22 B. LE DROIT SPECIAL APPLICABLE AUX POLLUTIONS PAR HYDROCARBURES ET AUTRES SUBSTANCES

DANGEREUSES................................................................................................................................................... 23 1. Champ d’application ....................................................................................................................... 23 2. Identification des dommages......................................................................................................24

a. La Commission d’évaluation des dommages (DEC).................................................................................... 24 b. Le dommage réparable .................................................................................................................................... 25

3. Identification des responsables.................................................................................................. 25 4. Procédure d’indemnisation........................................................................................................... 26