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TRIBUNE L’inquiétant principe de précaution en nutrition Gérald Bronner Dr Prévost Jantchou DOSSIER Maladie de Crohn : facteurs de risque alimentaires OBJECTIF LA LETTRE DE L’INSTITUT DANONE N° 103 MARS 2012

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R Maladie de Crohn :facteurs de risquealimentaires

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Tribune

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je crains”. Elle est redoutable parce qu’ellese nourrit des grandes erreurs de l’esprithumain face au risque et à l’incertitude quicaractérisent toute connaissance scienti-fique. La logique ordinaire tend à suresti-mer les faibles probabilités ou à prendreen considération les coûts plutôt que lesbénéfices. Elle a aussi une appétence pour le risque zéro, quand le scientifique honnête doit reconnaître que ce n’est pasun objectif réaliste. Autres sources impor-tantes de cette idéologie : la structurationcontemporaine du marché de l’informationet la méfiance que rencontre aujourd’huitoute forme d’expertise dans l’opinionpublique. Ce qui conduit beaucoup de noscontemporains à penser qu’ils vivent dansun monde empoisonné. Cette concurrencedéloyale entre l’expertise scientifique etl’idéologie précautionniste rend nécessaireune nouvelle ingénierie de la communica-tion scientifique. L’expression publique dela science prendrait une forme qui offriraità la logique ordinaire de reconnaître laqualité de son argumentation et donc derepousser les tentations qu’exercent lesraisonnements captieux.

En attendant, tout se passe comme si,devant leur assiette, nos contemporainsavaient désormais envie de se souhaiter“bonne chance” plutôt que “bon appétit” !

Depuis toujours, un cortège de rumeursaccompagne les innovations alimentaires.La restauration chinoise, les fast-food etmême les sandwicheries “kebab” en ontfait les frais. Ces légendes urbaines, affir-mant que l’on cherche à nous faire mangerdes animaux domestiques ou de la viandede ver de terre, expriment tout à la fois des stéréotypes ethniques et l’extrêmeméfiance des êtres humains concernanttout ce qui pourrait affecter leur alimenta-tion. C’est que cette dernière touche ànotre intimité même et qu’elle présentedes enjeux sanitaires incontestables. Cettesuspicion ne s’exerce plus désormais surles seuls aliments exotiques, elle entendfaire régner la peur sur toute innovationalimentaire (aspartame, OGM…) et, pireencore, sur des produits plus traditionnelscomme l’huile de palme et même le lait.Dans ces domaines, comme en beaucoupd’autres, une nouvelle idéologie pèse surla logique ordinaire : on peut la nommerprécautionnisme. Elle est, en quelque sorte,un dévoiement du principe de précaution,appliqué inconditionnellement et à toutpropos, faisant écho à un célèbre mot deJulie de Lespinasse : “je crois tout ce que

Gérald BronnerMaison des Sciences de l’homme,Strasbourg

L’inquiétantprincipe de

précaution ennutrition

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DOSSIERMalgré les avancées thérapeutiques actuelles, la maladiede Crohn reste source de morbidité importante. La largeutilisation des immunosuppresseurs et des biothérapies a permis d’améliorer le bien-être des patients mais laprobabilité de complications (allergiques, infectieuses,tumorales...) liée à l’usage de ces molécules restepréoccupante. En outre, ces traitements médicamenteuxne semblent pas modifier le risque de résection intestinaleaprès plusieurs années d’évolution de la maladie.L’identification de facteurs de risque de survenue d’unemaladie de Crohn est donc une piste de rechercheimportante pour la prévention de la maladie. Elle pourraitpermettre, en apportant des conseils diététiques auxindividus à risque élevé, d’en modifier le cours.

Maladie de Crohn : facteurs de risque alimentaires

Dr Prévost JantchouGastroentérologie Hépatologie et Nutrition PédiatriqueHôpital Sainte-Justine, Montréal, Québec

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EpidémiologieChez l’adulte, l’incidence de la maladie deCrohn, après une croissance élevée dansles années 1990, s’est stabilisée dans lesannées 2000. En revanche, l’augmenta-tion de l’incidence pédiatrique se poursuitces dernières années, notamment chez le jeune enfant. A titre d’exemple, enOntario, région où la prévalence de lamaladie de Crohn est la plus élevée dansle monde, les auteurs ont constaté uneaugmentation de 9,5/100.000 en 1994 à11,4/100.000 en 2005. Dans la tranched’âge entre 5 et 9 ans cette augmentationétait statistiquement significative  : 7,6 %par an (p<0,001).De multiples facteurs de risque potentielsont été investigués à la fois chez l’enfantet chez l’adulte (tableau 1). Parmi les dif-férents facteurs incriminés, deux seule-ment sont clairement établis : les antécé-dents familiaux au premier degré de lamaladie et le tabagisme actif. D’autresfacteurs tels l’antibiothérapie périnatale,la prise de contraceptifs oraux, l’appendi-

cectomie, la pollution atmosphériquepourraient être associés à une augmenta-tion du risque, mais le niveau de preuvereste faible ou les résultats controversés.De nombreux arguments plaident, enrevanche, en faveur du rôle de l’alimenta-tion dans la genèse de la maladie deCrohn : l’interaction entre l’alimentation,la muqueuse intestinale et la flore dans letube digestif, l’efficacité des traitementsnutritionnels chez l’enfant. De même, lesmodifications de l’alimentation au fil dutemps dans la même zone géographiquesemblent corrélées à l’augmentation del’incidence de la maladie, tout comme leschangements de mode de vie et d’hygiènealimentaire. On le constate notammentchez les migrants qui acquièrent le mêmerisque que les autochtones.

Alimentation et genèse de la maladie de CrohnAprès les processus de digestion, les par-ticules alimentaires se retrouvent dans l’interface entre la muqueuse et la micro-

Dossier

FOCUSLa maladie de Crohn, décrite pour la première fois en 1932, touche tous lessegments intestinaux avec toutefois une prépondérance pour l’iléon et le côlon droit.Des études épidémiologiques dans plusieurs parties du globe témoignent d’uneaugmentation de l’incidence de la maladie ces dernières décennies.

De multiples études de l’alimentation de malades et de témoins ont été conduites.Pour la plupart rétrospectives, elles peuvent être biaisées par la remémoration. Deplus, en interrogeant un individu déjà malade, on court le risque d’observer desmodifications de l’alimentation qui sont la conséquence et non la cause de la maladie.

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OBJECTIF NUTRITION - MALADIE DE CROHN : FACTEURS DE RISQUES ALIMENTAIRES

flore intestinale. Composée de plus de400 espèces bactériennes différentes,celle-ci joue un rôle important dans lagenèse de la maladie de Crohn. En effet, lanécessité de la présence d’une microfloreintestinale a été démontrée pour l’expres-sion des modèles de colites expérimen-tales chez l’animal. Par ailleurs, les seg-ments digestifs les plus fréquemmenttouchés par la maladie (iléon et côlon) sontles régions où les concentrations bacté-riennes sont les plus élevées (1011 à 1012

bactéries/g de selle). La microflore despatients atteints se révèle différente decelle des sujets sains. L’alimentation inter-agit directement avec la flore intestinale enmodulant celle-ci de façon prolongée.L’homéostasie du système immunitaireintestinal fait intervenir les lymphocytes“T helper” (Th1, Th2 et Th17) et les cellules

régulatrices Treg qui en situation sainesécrètent des cytokines caractéristiques. En situation pathologique, l’augmentation dela perméabilité intestinale, les anomalies dela mucosécrétion, l’augmentation de l’adhé-rence bactérienne sur les cellules épithé-liales intestinales induisent un passageintracellulaire de bactéries et d’antigènes. Il s’ensuit un ensemble de perturbationsinflammatoires conduisant à une augmenta-tion du nombre de lymphocytes T CD4 et à laproduction de cytokines pro-inflammatoires(TNF-�, Interleukine-6, Interleukine-12,Interleukine-23). Dans la maladie de Crohn,on note une augmentation de la productionau sein de la muqueuse de l’interleukine-17par les cellules Th17 et d’interferon-� et duTNF-� par les cellules Th1. L’alimentation pourrait jouer un rôle dansla maladie selon des mécanismes physio-

FacteurOdds Ratio ou Risque relatif (IC à 95 %)

Type d’étude Référence

Antécédents familiaux • maladie de Crohn• colite ulcéreuse

29,1 (14,4-59)3,0 (0,4-21,6)

Transversale Noble 2008

Tabagisme actif 1,79 (1,37-2,34) Méta-analyse Calkins 1989

Appendicectomie 1,99 (1,66-2,38) Méta-analyse Kaplan 2008

Antibiothérapie périnatale 1,84 (1,08-3,15) Cohorte Hviid 2011

Contraceptifs oraux 1,51 (1,17-1,96) Méta-analyse Cornish 2008

Tableau 1 : Facteurs de risque associés à la survenue de lamaladie de Crohn

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pathologiques variés : ingestion d’alimentsvecteurs de bactéries pathogènes pour letube digestif, production de substancestoxiques lors de la digestion, ingestion de quantités importantes de produitstoxiques (glycoalcaloïdes, nitrates) liés ounon au mode de cuisson des aliments. A l’inverse, l’action prébiotique de certainsaliments favoriserait la production d’uneflore bénéfique.

Rôle des nutriments dans la genèse de la maladiePlusieurs études ont été conduites à la foischez l’enfant et chez l’adulte afin d’analy-ser le lien entre alimentation et maladie de Crohn. Rétrospectives pour la plupart,elles ont abouti à des résultats discor-dants. A ce jour, seulement deux étudesprospectives ont été rapportées : une étudede cohorte française et une étude decohorte multicentrique européenne.

• MacronutrimentsLa première étude cas-témoins concernantalimentation et risque de maladie de Crohn,a été réalisée en 1976 en Allemagne. Ce futla première à retrouver une associationentre forte consommation de sucresrapides et risque augmenté de maladie. Parla suite plusieurs autres études cas-témoins ont reproduit ces résultats mais lesdeux seules études prospectives à ce jour(une française et une européenne) n’ont pasconfirmé cette association.Dans l’étude de cohorte prospective fran-çaise, incluant un suivi de 67 581 femmespendant une moyenne de 10,4 ans, uneforte consommation de protéines totales,plus spécifiquement de protéines animales,était associée à un risque élevé de maladiede Crohn (Hazard Ratio = 3,34 (0,90-12,4)). Ces résultats concordent avec l’hypothèsede Shoda et al. qui trouvent une relationtemporelle entre la hausse de l’incidence

Dossier

POURQUOI N’Y A-T-IL PAS D’ÉTUDES INTERVENTIONNELLES DE PRÉVENTION ?Idéalement une étude randomisée d’intervention représenterait le meilleurniveau de preuve pour établir l’association entre un facteur de risque et lasurvenue de la maladie.

Aucune intervention alimentaire à ce jour n’a été réalisée chez des sujets sainsà risque de développer une maladie de Crohn. Les aspects méthodologiques etla lourdeur d’une telle étude en rendent la réalisation quasi impossible. Cecinécessiterait en effet d’inclure plusieurs milliers de sujets sains randomisés endifférents groupes de comportement alimentaire et de les suivre de façonprospective pendant de nombreuses années.

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de l’affection au Japon et l’augmentationde l’apport alimentaire en protéines ani-males (r=0.908). Depuis la seconde guerremondiale, cet apport a augmenté demanière significative dans quasiment tousles pays industrialisés. À titre d’exemple,en Belgique on retrouvait une augmenta-tion de 50 % entre les années 1950 et 1978ce qui représente une modification de laconsommation de protéines animales parhabitant de 60,8 kg/an à 98 kg/an. Une proportion variable d’acides aminéscontenus dans les protéines animales nesont pas absorbés par l’intestin grêle etatteignent la lumière colique où ils sontmétabolisés par le microbiote en plusieursdérivés. Certains sont toxiques pour lamuqueuse colique (notamment les dérivésphénoliques et l’ammoniaque). Il a ainsi

été suggéré que les sulfites mis au contactdu monoxyde d’azote produit par les bacté-ries anaérobies pouvaient altérer la mem-brane cellulaire des colonocytes.Concernant les lipides, l’étude de cohortefrançaise n’a pas révélé d’associationentre l’apport alimentaire en matièresgrasses et le risque de maladie de Crohn(Hazard Ratio=0,98 (0,25-3,88)).Dans l’étude de cohorte européenne, lesauteurs ont retrouvé un possible lien entreune forte consommation en acide docosa-hexaenoique (DHA) et un risque diminué desurvenance de la maladie : Odds ratio (OR)3ème versus 1er quintile = 0,47 (0,20-1,10),p=0,08. L’hypothèse biologique sous-jacenteest que l’acide docosahexaenoique pourraitavoir une action anti-inflammatoire sur lamuqueuse intestinale.

OBJECTIF NUTRITION - MALADIE DE CROHN : FACTEURS DE RISQUES ALIMENTAIRES

LA NUTRITION ENTÉRALE AU COURS DE LA MALADIE DE CROHN

Des études de traitement nutritionnel ont été conduites chez les sujets déjàatteints de maladie de Crohn afin de mettre en rémission et/ou prévenir despoussées ultérieures. Une méta-analyse récente confirme le rôle bénéfique dela nutrition entérale exclusive par un soluté polymérique dans la mise enrémission. Ainsi chez l’enfant la nutrition entérale exclusive est aussi efficace entraitement d’induction que la corticothérapie.

Le mécanisme d’action de la nutrition entérale dans la mise en rémissionclinique de la maladie de Crohn reste mal établi. Plusieurs hypothèses sontévoquées  : diminution des cytokines proinflammatoires, cicatrisation de lamuqueuse intestinale, diminution de la perméabilité intestinale, diminutiond’antigènes alimentaires, repos intestinal, modification de la flore intestinale,effets anti-inflammatoires...

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• Vitamine DLe principal effet biologique de la vita-mine D est l’augmentation de la minérali-sation osseuse. Mais la vitamine D a aussid’autres actions anti-inflammatoiresnotamment une action suppressive sur laréponse immunitaire T. Un lien possibleentre carence en vitamine D et maladie deCrohn a donc été récemment évoqué.Plusieurs études ont montré que lespatients atteints avaient, au moment dudiagnostic, des taux sériques abaissés devitamine D.Dans la Nurse Health Study, étude de cohorte prospective américaine,104 404 femmes ont été suivies pendant16 années : 104 cas incidents de maladiede Crohn ont été diagnostiqués. En utili-sant un indice de prédiction de la valeursérique de vitamine D, les sujets dans lequartile le plus élevé par rapport auquartile le plus bas avaient un HR de 0,57(0,33 à 1,00) ; p = 0,04.

Par ailleurs, une étude prospective fran-çaise, évaluant les niveaux d’expositionsolaire du lieu de résidence et le risque demaladie de Crohn, a montré une associa-tion inverse entre un fort niveau d’exposi-tion solaire en hiver, marqueur indirect dela concentration plasmatique de vitamineD, et le risque de maladie (HR= 0,46 (0,22à 0.98)).Une étude récente a été réalisée chezl’adulte, incluant 94 patients qui recevaientune supplémentation en vitamine D3 de1200 UI versus placebo. Elle a apporté desrésultats prometteurs : le taux de rechute

à un an était de 13 % dans le groupe traitéversus 29 % dans le groupe placebo (p=0,06).Plusieurs autres études sont en courschez l’enfant et les résultats attendus pro-bablement pour l’année 2012.

Rôle des aliments dans lagenèse de la maladie de Crohn

• AlimentsTrès peu d’études ont spécifiquementanalysé le rôle des aliments dans lagenèse de la maladie de Crohn. L’une decelles-ci, multicentrique, réalisée chez302 patients et 998 témoins enfants etadultes, retrouvait une diminution nonsignificative du risque de maladie deCrohn chez les individus ayant une forteconsommation de fruits et légumes : OR =0,67 (0,45-1,35). Une autre étude pédiatrique plus récente amis en évidence comme facteur protecteurun apport alimentaire élevé en fruits (OR =0,49 (0,25-0,96)), fibres (OR = 0,12 (0,04-0,37)),ou poissons (OR =0,46(0,20-1,06)).

• Profils alimentairesDans une étude pédiatrique réalisée auCanada, les auteurs ont identifié deux pro-fils associés à la maladie de Crohn : leprofil 1 caractérisé chez les filles par unapport important en viande, aliments graset desserts, était associé à un risque élevéde maladie de Crohn : OR=4,7 (1,6-14,2).Le profil 2 caractérisé par un apport ali- mentaire en fruits, légumes, huile d’olive, poisson, graines et noix était associé à un risque faible chez les filles (OR = 0,3 (0,1-0,9))

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OBJECTIF NUTRITION - MALADIE DE CROHN : FACTEURS DE RISQUES ALIMENTAIRES

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et chez les garçons (OR = 0,2 (0,1-0,5)).Aucune étude à ce jour n’a été publiéeconcernant l’analyse des profils alimen-taires et le risque de maladie de Crohnchez l’adulte.

• Allaitement maternelLa relation entre allaitement maternel etrisque de maladie de Crohn a été analy-sée dans plusieurs études cas témoinsqui ont été colligées dans une méta-ana-lyse en 2005. On y retrouve un effet pro-tecteur de l’allaitement maternel sur lerisque de survenue de maladie de Crohn(OR poolée = 0,67(0,52-0,86)).

Perspectives futures et conclusionsL’identification de facteurs de risque ali-mentaires pourrait représenter une pisteaisément modulable par des conseils dié-tétiques chez les individus à risque élevéde maladie de Crohn (notamment dans les

régions de forte prévalence et plus spéci-fiquement en cas d’antécédents familiauxau premier ou deuxième degré de maladieinflammatoire chronique intestinale).L’excès d’apport alimentaire en protéinesanimales et la carence en vitamine D pour-raient être associés à une augmentation durisque de survenue de maladie de Crohn.Des études futures restent attendues afinde clarifier le rôle de ces facteurs alimen-taires et également celui des profils alimen-taires associés à la maladie de Crohn. Ilconviendra aussi de valider les différentsfacteurs identifiés par des études randomi-sées chez les patients déjà malades pourdéterminer s’ils permettent ou non de limi-ter la fréquence et la sévérité des poussées.

BIBLIOGRAPHIECarbonnel F., Jantchou P., Monnet E. & Cosnes J.; Environmental risk factors in Crohn’s disease and ulcerativecolitis: an update; 2009 ; Gastroenterologie clinique et biologique 33 (3) : S145-57

Benchimol E. I. et al. ; Epidemiology of pediatric inflammatory bowel disease: A systematic review of internationaltrends; 2010; Inflamm Bowel Dis

Hart A.R., for The IBD in EPIC Study Investigators; Total dietary sugar intake and the aetiology of Crohn’s diseasedata from a European prospective cohort study (abstract) (EPIC); 2010; Gut : 59:A60.

Jantchou P, Morois S, Clavel-Chapelon F et al. Animal protein intake and risk of inflammatory bowel disease: The E3N prospective study; 2010; Am J Gastroenterol 105:2195–201.

Klement E., Cohen R.V., Boxman J., Joseph A. & Reif S.; Breastfeeding and risk of inflammatory bowel disease: a systematic review with meta-analysis; 2004; Am J Clin Nutr 80:1342-1352.

Jørgensen SP, Agnholt J, Glerup H, et al. Clinical trial: vitamin D3 treatment in Crohn’s disease - a randomizeddouble-blind placebo-controlled study. Aliment Pharmacol Ther. 2010;32:377-383.

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Lauréats Que sont-ils devenus ?

Que sont devenus les lauréats de l’Institut Danone ?Interview de Céline Jousse, lauréate du Prix de Projet de RechercheAlimentation et Santé 1999, chercheur à l’INRA au sein de l’Unité de Nutrition Humaine du Centre de Clermont-Ferrand Theix, dans l’équipe de Pierre Fafournoux (Équipe Gènes-Nutriments).

Objectif Nutrition : Sur quoi portaient vosrecherches au moment du Prix Institut Danone ?Céline Jousse : Je travaillais sur la régula-tion de l’expression des gènes par les acidesaminés, un sujet naissant qui était celui de ma thèse. Notre gène modèle était legène CHOP, régulé lors d’une carence enacides aminés. Nous avons mis en évidenceun mode de régulation traductionnelle del’expression de ce gène et en avons décritles mécanismes cellulaires et moléculairesin vitro.

O. N. : Quel a été votre parcours ensuite ?C. J. : Je suis partie en post-doc aux États-Unis dans un laboratoire qui travaille sur lesvoies de signalisation impliquées dans laréponse au stress cellulaire, dont certainessont communes avec la voie de régulationpar les acides aminés. J’y ai plus particu-lièrement étudié le stress du réticulum endoplasmique et ai mis en évidence unephosphatase impliquée dans la déphospho-rylation d’un facteur de traduction enréponse à un stress du réticulum endoplas-mique mais aussi à une carence en acidesaminés. Puis je suis revenue en France, j’ai étérecrutée au CNRS et détachée dans l’unitél’INRA où j’avais fait ma thèse.

O. N. : Vous êtes alors repartie sur une thé-matique nutritionnelleC. J. : Oui, mais en quittant les aspectspurement mécanistiques pour appliquer lesconnaissances acquises sur un modèle in vivo. Depuis 2004-2005, j’ai pris en charge unethématique qui concerne la sous-nutritionfœtale. Nous travaillons sur un modèle desouris soumises à un régime pauvre en protéines pendant les périodes de gestationet de lactation et nous étudions l’impact decette sous-nutrition périnatale sur le phé-notype de la descendance à l'âge adulte.

O. N. : Que cherchez-vous à mettre en évidenceen particulier ?C. J. : Nous cherchons à identifier les méca-nismes épigénétiques mis en place sousl’effet du stress nutritionnel et responsablesdes caractéristiques physiologiques parti-culières observées dans la descendance. Il s’agit d’expliquer comment un événementprécoce, qui a eu lieu in utero ou pendant lapériode d’allaitement, peut entraîner desmodifications persistantes qui vont influen-cer toute la vie de l’individu.

La suite de l’entretien sur le site Internet de l’InstitutDanone : www.institutdanone.org

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Revue de presse

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Existe-t-il une vérité scientifique internationale uniqueet reconnue en alimentation ?

Medical doctors’ attitudes and beliefs aboutdiet and health are more like those of theirlay countrymen (France,Germany, Italy, UKand USA) than those of doctors in othercountries. Leeman R.F., Fischler C., Rozin P.; Appetite2011; 56(3):558-563

Une étude franco-américaine a comparéles croyances et les attitudes des médecinsde différents pays sur la relation alimenta-tion et santé. Il était intéressant d’analysersi les croyances et les attitudes des méde-cins étaient influencées non seulement par leur formation médicale mais aussi par leur appartenance à un pays et à saculture. Jusqu’où l’imprégnation culturelleétend-elle ses effets ? Quelles relationsexistent entre le savoir populaire et le dis-cours savant ? Les questions portaient sur la valeur santéde certains groupes d’aliments, les vita-mines et les compléments alimentaires.Environ 60 médecins et 60 non médecinsont été interrogés par téléphone dans cha-cun des pays. Dans les réponses recueil-lies en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis,la préoccupation santé était primordiale.En France, en Italie et dans une moindremesure en Allemagne, l’alimentation étaitplutôt associée aux notions de plaisir etconvivialité. Dans chaque pays, les méde-cins ne se distinguaient pas significative-ment de leurs concitoyens profanes même

pour des questions où la compétencescientifique joue un rôle déterminant. Siles croyances et attitudes des médecinssur les liens entre alimentation et santésont proches de celles de leurs compa-triotes, elles apparaissent plus éloignéesde celles de leurs collègues médecins desautres pays de l’étude.

Objectif Nutrition, La Lettre de l’Institut Danone

Directeur de la publication :Pr. Jean-Philippe Girardet, AP-HP, Hôpital ArmandTrousseau, Paris.Rédacteur en chef :Dr Jean-Laurent Le Quintrec, AP-HP, Hôpital Ste Périne,Paris.Rédactrice en chef adjointe :Tiphaine Gimbert, Danone Produits Frais France, Paris.Secrétaire de rédaction : Amandine Gunther de Francqueville, Eficom Santé.Comité de rédaction :Dr Brigitte Boucher, Paris ; Pr. Pierre Bourlioux, Facultéde Pharmacie, Paris ; Dr Béatrice Dubern, AP-HP, HôpitalArmand Trousseau, Paris ; Pr. Michel Vidailhet, Nancy ;Pr. Fernand Lamisse, Tours ; Dr Martine Pellae, AP-HP,Hôpital Bichat, Paris.Conception-réalisation : Agence Louisiane.Chef d’édition :Jean-Charles Fauque. Photogravure/Impression : Altavia. Dépôt légal : 1er trimestre 2012. Nº ISSN : 1166357X.

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Créé en 1991, l’Institut Danone rassemble des scientifiques, des médecinset des personnalités du monde de la nutrition.

Il a pour mission :- d’encourager la recherche dans le domaine de la nutrition et de l’alimentation ;- d’informer et de former les professionnels de santé sur tous les sujets

liés à l’alimentation ;- de participer, par des actions d’éducation et d’information, à l’amélioration

de l’alimentation de l’ensemble de la population.

L’Institut Danone est une association régie par la loi de juillet 1901.Ses publications ne contiennent aucune information à caractère commercial.

150-152 boulevard Victor-Hugo - 93589 Saint-Ouen Cedex - [email protected]

XXèmes Rencontres Scientifiques de Nutrition Polluants alimentaires : quels effets sur la santé ?

Le 7 décembre 2011, l’Institut Danone a organisé ses XXèmes Rencontres Scientifiques deNutrition, dans le cadre des Journées Francophones de Nutrition, à Reims.

La conférence sur “Polluants alimentaires : quels effets sur la santé ?” animée par GérardPascal (INRA, Paris) et Robert Barouki (INSERM, Paris) a regroupé plus de 200 personnes.

Aujourd’hui, cette conférence est aussi visible en ligne, en partenariat avec Elsevier-Masson.Vous pouvez retrouver l’intégralité de la conférence en vidéo, naviguer par conférences et/oupar visuels ou mots-clés.

Polluants alimentaires : quels effets sur la santé ?

• Polluants synthétiques et polluants naturels(Pr. Gérard Pascal, INRA, Paris)

• Polluants, obésité et maladies métaboliques(Pr. Robert Barouki, INSERM, Paris 6)

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Rendez-vous sur www.institutdanone.org