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Supervisé par M. Hervé COPPIER (ESIEE Amiens), M. Marco PEZZETTI (CERN) et M. Benjamin BRADU(CERN) 1

Mémoire Projet de Fin d’étudeslordvan.free.fr/RAPPORT_CERN_2009.docx · Web viewJe souhaite tout d’abord remercier Hervé Coppier, professeur à l’ESIEE Amiens et tuteur lors

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Mémoire Projet de Fin d’études

(MAJEURE GENIE DES SYSTEMES DE PRODUCTION Promotion2009Mémoire Projet de Fin d’étudesDéveloppement et Simulation de modèles de procédés cryogéniques sous le logiciel EcosimProVASSEUR Julien Supervisé par M. Hervé COPPIER (ESIEE Amiens), M. Marco PEZZETTI (CERN) et M. Benjamin BRADU(CERN))

REMERCIEMENTS

Je souhaite tout d’abord remercier Hervé Coppier, professeur à l’ESIEE Amiens et tuteur lors de mon stage. Sa passion pour l’automatisme et l’automatique a fait ressortir en moi un intérêt particulier et m’a motivé à m’orienter vers cette voie.

Je remercie également Marco Pezzetti, chef de la section CE (Control and Electricity) au CERN, qui m’a accueilli dans son équipe chaleureusement et qui m’a permis d’acquérir une expérience inestimable.

Ensuite, je suis infiniment reconnaissant envers Benjamin Bradu, doctorant au CERN et ingénieur ESIEE Amiens promotion 2006. Apprendre et travailler sur la thermodynamique et la physique appliquée au côté de Benjamin n’aura jamais été aussi passionnant et enrichissant que durant ce stage. Il m’aura ainsi permis d’apprendre à suivre une démarche, un raisonnement logique en ce qui concerne la recherche et le développement d’une idée pour produire un résultat exploitable.

Je tiens également à remercier Edouard Rogez, Alexandre Moraux et Lionel Wallet, ingénieurs ESIEE travaillant au CERN, pour leur disponibilité. Ils n’ont jamais dénié répondre à mes interrogations sur un fonctionnement ou un tout autre problème lié à la cryogénie. Ils m’ont soutenu tout au long de mon stage à travers leurs conseils et leur présence.

Je remercie Jean-François Bel, Richard Baud, Dominique Legrand, Jean-Marc Quetsch, Roland Guyon, Pascal Fin, Roger Girardot pour leur disponibilité et leur gentillesse au quotidien. Je remercie d’une façon générale l’ensemble des membres de la section CE qui se sont montrés très amicaux et ont rendu le quotidien de mon stage agréable.

Je remercie M. Roger Ceschi, Directeur de l’ESIEE Amiens, et M. Saïd Koutani, sans qui ce stage ne se serait pas réalisé.

Je remercie également M. Antaluca, responsable de la majeure Génie des Systèmes de Production à l’ESIEE Amiens, pour son investissement au quotidien pour les élèves.

Je voulais remercier également le Conseil Régional de Picardie qui m’a aidé à financer ce stage à dimension européenne.

Table des matières

REMERCIEMENTS2TABLE DES FIGURES5TABLE DES ANNEXES71-INTRODUCTION81.1-Thématique81.2-Cahier des charges et objectifs91.3-Plan du mémoire112-CHAPITRE 1 : le CERN et ses expériences sur la physique des particules122.1- Historique122.2- Organisation132.3- La physique des particules142.4- Les expériences du CERN162.4.1- Le fonctionnement du LHC172.4.2- Les détecteurs182.4.3- La supraconductivité212.5- Application en Médecine213-CHAPITRE 2 : Thermodynamique233.1- Les trois principes de la thermodynamique233.1.1- Premier Principe233.1.2- Deuxième Principe243.1.3- Troisième Principe253.2- Les transferts thermiques253.2.1- La conduction thermique253.2.2- La convection253.2.3- Le rayonnement274-CHAPITRE 3 : La Cryogénie284.1- Définition générale284.2- Principe de la liquéfaction et de la réfrigération284.2.1- Utilisation de l’Hélium284.2.2- Cycles thermodynamiques usuels314.2.3- Réfrigération et Cycle de Claude334.3- Les équipements cryogéniques354.3.1- Station de compression354.3.2- Echangeurs Thermiques364.3.3- Turbines384.3.4- Vannes de détente Joule-Thomson394.2.5- Stockage de l’Hélium404.4- Contrôle des installations cryogéniques414.4.1- Les objets UNICOS414.4.2- Les différents modes des objets424.4.3- Les générateurs425-CHAPITRE 4 : Simulation de modèles445.1- Présentation du logiciel EcosimPro445.2- Structure d’un projet/librairie455.2.1- La Structure d’une librairie455.2.2- Librairies CRYO_CERN et PLC535.2.4- Implémentation de la logique sous EcosimPro545.3- Etudes préliminaires555.3.1- Données Constructeur555.3.2- Etude du diagramme T-S et Bilan thermique de la boite froide565.3.3- Estimation des dimensions des vannes585.3.4- Que simule t-on ?585.4- Développement des deux modèles de boites froides595.4.1- Particularités et Procédures de la boite froide TCF50595.4.2- Particularités et Procédures de la boite froide Linde 18kW645.5- Utilisation et domaine d’applications de ces modèles695.5.1- Procédure PROCOS et « Virtual Commissioning »705.5.2- Tester des nouvelles stratégies de contrôle – Exemple735.5.3- Formation des opérateurs84CONCLUSION85BIBLIOGRAPHIE86ANNEXES87RESUME – ABSTRACT………………………………………………………………………………………………………………………136

TABLE DES FIGURES

Figure 1 : Evolution du projet10

Figure 2 : Organigramme général de la Direction du CERN13

Figure 3 : Modèle Standard de la physique des particules15

Figure 4 : Taille des particules16

Figure 5 : Localisation du Tunnel du LHC16

Figure 6 : Les différents secteurs du LHC17

Figure 7 : La chaîne d'accélération18

Figure 8 : CMS19

Figure 9 : ATLAS19

Figure 10 : ALICE20

Figure 11 : LHCb21

Figure 12 : Train à lévitation magnétique21

Figure 13 : IRM22

Figure 14 : Variation d'énergie interne en fonction du système étudié24

Figure 15 : Schéma convection26

Figure 16 : Les différents écoulements26

Figure 17 : Caractéristiques de l'Hélium28

Figure 18 : Les différents états de l'hélium29

Figure 19 : Diagramme T-S de l'Hélium30

Figure 20 : Cycle de Carnot32

Figure 21 : Cycle de Brayton (1,2’,3,4’)32

Figure 22 : Cycle J-T32

Figure 23 : Comparaison entre réfrigération et liquéfaction33

Figure 24 : Les réfrigérateurs issus du cycle de Claude34

Figure 25 : Efficacité isothermale en fonction des caractéristiques du compresseur35

Figure 26 : Compresseur et Régulation de vannes36

Figure 27 : Echangeurs thermiques à plaques38

Figure 28 : Turbine cryogénique38

Figure 29 : Comparaison entre une détente polytropique et une détente isentropique39

Figure 30 : Vanne linéaire ou isopercentuelle (rayon de courbure R)40

Figure 31 : Générateur d'instance43

Figure 32 : Générateur de Logique43

Figure 33 : Interface Visuelle d'EcosimPro45

Figure 34 : Exemple de composant46

Figure 35 : Partition47

Figure 36 : Choix des variables nécessitant des conditions aux limites48

Figure 37 : Récapitulation des variables48

Figure 38 : Schematic d'un procédé cryogénique49

Figure 39 : Consistance et Inconsistance50

Figure 40 : Création d'une expérience51

Figure 41 : Expérience51

Figure 42 : EcosimPro Monitor52

Figure 43 : Régulation de l'ouverture d'une vanne54

Figure 44 : Blocs logiques pour donner une condition de fonctionnement54

Figure 45 : Programmation en Langage EL de toute une logique provenant du programme automate55

Figure 46 : Bilan Thermique - Feuille Excel57

Figure 47 : Paramétrage des échangeurs sous EcosimPro57

Figure 48 : Fiche Excel - Dimensionnement des Vannes58

Figure 49 : Database Excel modifiée pour la simulation59

Figure 50 : Evolution des Températures61

Figure 51 : Evolution du Niveau et du Chauffage dans le séparateur de phase62

Figure 52 : Régulation des vannes J-T63

Figure 53 : Comparaison Diagrammes T-S théorique et simulés64

Figure 54 : Evolution Températures Boite froide 18kW66

Figure 55 : Régulation Hélium liquide dans le séparateur de phase67

Figure 56 : Comparaison Diagrammes TS Constructeurs et Simulés68

Figure 57 : Table excel permettant de calculer l'exergie théorique69

Figure 58 : Calcul de la puissance de réfrigération totale de la boite froide simulée69

Figure 59 : Structure UNICOS70

Figure 60 : Structure PROCOS71

Figure 61 : Organisation Informatique pour le Virtual Commissioning de la boite froide TCF5072

Figure 62 : Echelon constant sur le chauffage73

Figure 63 : Réponse à l'échelon - Niveau du pot74

Figure 64 : Dérivée du niveau pendant un échelon de chauffage74

Figure 65 : Dérivée du niveau pendant l’échelon (zoom)75

Figure 66 : Les impulsions du PRBS76

Figure 67 : Autocorrélation du SBPA76

Figure 68 : Ajout dans EcosimPro77

Figure 69 : Interface principale de la Toolbox77

Figure 70 : Signaux d'entrée et de sortie78

Figure 71 : Boite de dialogue pour estimer le modèle continu79

Figure 72 : Comparaison Process et Modèles Continus Premier et Second Ordre (sans zéro)79

Figure 73 : Comparaison Process et Modèles Continus Premier et Second Ordre (avec zéro)80

Figure 74 : Autocorrélation et Corrélation croisée pour Premier Ordre (bleu) et Second Ordre (Rouge) sans zéro81

Figure 75 : Autocorrélation et Corrélation croisée pour Premier Ordre (vert) et Second Ordre (bleu ciel) avec zéro81

Figure 76 : Schéma Simulink82

Figure 77 : Comparaison des régulations avec les paramètres PI initiaux82

Figure 78 : Comparaison ancienne et nouvelle régulation sous Simulink83

Figure 79 : Comparaison ancienne et nouvelle régulation sous EcosimPro84

TABLE DES ANNEXES

1. Boite Froide TCF50 ([email protected]).........................................................................................88

2. Boite Froide Linde ([email protected]).......................................................................................... 90

3. Les Procédures de Simulation……………………………………………………………………………………………..92

4. Quelques modèles de composants……………………………………………………………………………………107

5. Extraction des données sous MATLAB et Affichage……………………………………………………………115

6. Construction et élaboration des diagrammes TS sous MATLAB.………………………………………..116

7. Diagrammes TS des boites froides………………………….………………………………………………………….121

8. Bilans Thermiques des boites froides…………………………………………………………………………………123

9. Procédures rédigées au cours du stage………………………………………………………………………………125

Tableau des noms de variables utilisés :

Variables

Unités

Description

T

K

Température

P

bar

Pression

S

J/kg.K

Entropie

h

J/K

Enthalpie

e

W

Exergie

Q

W

Quantité de chaleur échangée

bar

Chute de pression

kg/m3

Densité

kg/m.s

Viscosité

m ou

kg/s

Débit

nf

-

Coefficient de friction

PisoT

W

Puissance isothermale

R

8,314 J.K-1.mol-1

Constante des gaz parfaits

M

u

Masse moléculaire de l’hélium

Pdis

W

Puissance Décharge

Psuc

W

Puissance Charge

Rendement

E

W

Energie apportée par le fluide

Ed

W

Energie apportée par le fluide au nominal

I

kg*m2

Moment d’inertie du rotor

N

Hz

Vitesse axe turbine

Nd

Hz

Vitesse axe turbine nominale

1- INTRODUCTION1.1- Thématique

L’une des caractéristiques de l’Humanité est de vouloir étendre ses connaissances sur le monde qu’il l’entoure, pour assurer une évolution lui garantissant sa pérennité. Pour avancer dans l’avenir, il faut apprendre du passé, voir du « point initial » où tout a commencé : le « Big Bang ». L’Univers possède une origine de son expansion dans l’infiniment petit correspondant au monde des particules.

Le CERN, laboratoire européen pour la physique des particules, a été créé dans le but de relever ce challenge d’exploration de l’infiniment petit et découvrir de nouvelles particules ou de confirmer l’existence de particules, notamment celle(s) décrivant la masse de la matière.

Cependant, il faut savoir que pour observer ces particules élémentaires, instables et inexistantes à l’état naturel, les physiciens doivent avoir recours à des collisions entre particules stables dégageant une énorme quantité d’énergie dans les accélérateurs de particules. Pour orienter et accélérer les particules, des champs électriques et magnétiques sont mis en jeu dans les supraconducteurs. Les supraconducteurs atteignent leurs propriétés particulières (résistance électrique nulle et annulation du champ magnétique : effet Meissner) uniquement à très basses températures ; de l’ordre de 1,8 K. La cryogénie et ses procédés sont alors utilisés pour effectuer ce refroidissement des aimants supraconducteurs des accélérateurs de particules.

La section TE / CRG / CE du CERN, dans laquelle j’ai effectué mon stage de troisième année de cycle ingénieur, est chargée des projets de contrôle des procédés cryogéniques pour les expériences du CERN. La sureté et la stabilité de l’automatisation et du contrôle des installations cryogéniques sont des points indispensables à la réussite d’un grand nombre d’expériences au CERN.

Par conséquent, lorsqu’une modification, une optimisation ou une mise à jour technologique d’une installation cryogénique est inévitable, celle-ci doit se dérouler en minimisant les coûts matériels et humains. Ceci relève tout l’intérêt et les avantages que l’on peut avoir en faisant appel à la simulation numérique des procédés cryogéniques. Prenons l’exemple d’une migration des technologies automates, où l’installation cryogénique fonctionne en permanence, son arrêt doit être limité. La simulation permet alors de tester et de valider les nouveaux programmes automates avant leur mise en service sur l’installation.

Le sujet de mon projet de fin d’études a consisté au développement et à la simulation de modèles de procédés cryogéniques, plus particulièrement, sur les réfrigérateurs constitués d’une station de compression et d’une boite froide. Les réfrigérateurs permettent de liquéfier de l’hélium à partir de son état gazeux à température ambiante. Les projets réalisés concernent la simulation de deux types de boite froide : l’une de marque Linde et de type TCF50 400 W @ 4,5 K* et l’autre Linde 18 kW @ 4,5 K* (*puissance de réfrigération).

1.2- Cahier des charges et objectifs

Par l’intermédiaire de ce paragraphe, les enjeux et les objectifs de ce projet de Simulation de procédés cryogéniques seront présentés.

La particularité première de la simulation numérique est qu’elle fait appel à de nombreux domaines : les calculs numériques, les équations physiques, la thermodynamique, la mécanique des fluides, les mathématiques, le process réel, le contrôle et la logique d’automatisation associée, le respect des standards, le recueil des données.

· Le premier objectif, et non des moindres, a été de se familiariser avec les principes thermodynamiques appliqués à la cryogénie, comprendre les différents procédés cryogéniques ainsi que les spécifications des programmes automates en terme de structure et de logique. La logique implémentée dans les programmes automates respecte le standard utilisé au CERN : UNICOS, dont une présentation succincte est faite dans le chapitre 3 de ce mémoire. Les diverses simulations du projet sont effectuées par l’intermédiaire du logiciel EcosimPro qui sera décrit en détails dans le chapitre 4. Lors de ce stage, le développement des modèles de boite froide a utilisé des modèles de différents appareils cryogéniques (compresseur, échangeurs thermiques, turbines, vannes…) développés par M. Benjamin Bradu, ingénieur ESIEE et doctorant au CERN, au cours de sa thèse.

· Le second objectif était de réaliser le modèle de la boite froide TCF50 pour le bâtiment 163 du Cryolab en six semaines. Ce premier modèle a permis d’effectuer le test et la validation (« Virtual Commissioning ») du programme PLC, Programmable Logic Controller (en Français, Automate Programmable Industriel), de la boite froide faisant parti du projet de migration ABB vers Schneider du contrôle des installations cryogéniques du Cryolab.

· Le troisième objectif consistait au développement du modèle de boite froide Linde à haute puissance de réfrigération [email protected] pour l’expérience du LHC et destiné à la formation des opérateurs.

L’évolution des différentes étapes est représentée sur la figure suivante :

Figure 1 : Evolution du projet

1.3- Plan du mémoire

La rédaction de ce mémoire a été construite de telle manière à démontrer la multitude de domaines scientifiques à laquelle j’ai pu être confrontée. Dans un premier chapitre, il m’a semblé important de présenter l’environnement de mon stage. C’est pourquoi une présentation du CERN et de ses principales expériences a été réalisée. Ensuite, le rôle et la structure de la section dans laquelle j’ai travaillé seront explicités ainsi qu’un bref aperçu sur le standard UNICOS utilisé pour le contrôle des installations du CERN. Après avoir décrit les bases du contrôle au CERN, je m’attarderai sur l’explication des principes et notions de thermodynamique dont j’ai pu avoir besoin. Je rédigerai, dans le même temps, les liens entre la thermodynamique et la cryogénie. Enfin, je terminerai par le chapitre décrivant l’essentiel de mon travail durant ces cinq mois de stage, c'est-à-dire la simulation des modèles de boites froides en m’efforçant de vous démontrer les choix, les enjeux, les contraintes lors du travail préparatoire d’une simulation.

2- CHAPITRE 1 : le CERN et ses expériences sur la physique des particules2.1- Historique

Quelques années auparavant et pendant la Seconde Guerre mondiale, la physique a connu un véritable essor notamment par l’intermédiaire de la physique nucléaire. Celle-ci s’est manifestée dans le commun des mortels, malheureusement, par l’utilisation de la bombe atomique par les américains à deux reprises : sur Hiroshima et Nagasaki les 6 et 9 août 1945. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la recherche européenne en physique était quasiment inexistante. Alors que l’UNESCO favorisait la création de laboratoires scientifiques régionaux, un Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire (CERN) naissait en 1952 suite à la décision de onze gouvernements européens. Ce n’est qu’en 1954, que la convention CERN est ratifiée officiellement par douze gouvernements européens et porte le nom d’ « Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire ». A l’époque, la recherche en physique fondamentale avait pour principal objectif la compréhension de l’intérieur de l’atome, c’est-à-dire du noyau, d’où l’emploi du qualificatif « nucléaire ».

Aujourd’hui, la compréhension de la matière va au-delà du noyau et le principal domaine de recherche au CERN est la physique des particules, à savoir l’étude des composants fondamentaux de la matière ainsi que des forces auxquelles ils sont soumis. C’est pourquoi, on retrouve une autre dénomination du CERN comme étant un « laboratoire européen pour la physique des particules ».

Le CERN se trouve à la frontière franco-suisse entre le pays de Gex et le lac Léman, juste entre le massif Jurassien et la chaîne des Alpes.

Au sein du CERN, la plus grand machine jamais construite, l’accélérateur de particules LHC (Large Hadrons Collider : Grand Collisionneur à Hadrons), se trouve à 100 m de profondeur et est composée de 9593 électroaimants supraconducteurs répartis sur un anneau de 27 km de circonférence. Cette machine a pour but de recréer les conditions des tous premiers instants de l’Univers et d’en comprendre l’origine dans l’infiniment petit des particules.

Le 10 Septembre 2008, le LHC a été mis en opération et a fait circuler un faisceau dans chaque direction de l’anneau à une vitesse correspondante à 99,99% de la vitesse de la lumière. Malheureusement, le 19 Septembre 2008, l’accélérateur LHC a connu une défaillance à cause d’une mauvaise interconnexion entre un aimant dipolaire et un aimant quadripolaire dans le secteur 3-4. Cette interconnexion a perdu sa supraconductivité ce qui a engendré l’apparition d’une tension d’environ 1 V. Une grande quantité d’énergie s’est alors libérée sous forme de chaleur, provoquant des dégâts sur le système de vide et sur la cryogénie. Depuis cette date, le CERN doit réparer ou remplacer les différents aimants touchés par cette panne, effectuer les tests de validation géométrique et électrique de ces aimants. La direction du CERN profite de cet évènement pour renforcer les systèmes de sécurité et ainsi éviter que ce genre de défaillance ne se répète à l’avenir. Le redémarrage de l’accélérateur de particules est planifié pour le mois d’Octobre 2009.

2.2- Organisation

Plus de 8000 techniciens, ingénieurs et chercheurs de plus de 80 nationalités différentes travaillent et coopèrent pour donner une réalité aux théories des physiciens. Les résultats des expériences du CERN sont attendus par l’ensemble de la communauté scientifique internationale, les données issues du LHC sont alors exploitées à travers le monde : ce qui se représente en quelques chiffres par 580 universités et 80 nationalités.

La construction du LHC aura couté pour les vingt états européens membres près de six milliards d’euros. Le Conseil du CERN est l’autorité responsable de toutes les décisions importantes à prendre tant au niveau politique, technique et administratif. Ce conseil adopte les budgets et contrôle les dépenses. Ce conseil « suprême » est assisté dans sa tâche par le Comité des directives scientifiques et le Comité des finances.

Le Conseil nomme également un Directeur général, généralement pour cinq ans, afin de gérer le Laboratoire.

Figure 2 : Organigramme général de la Direction du CERN

L’Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire est répartie en huit départements :

· PH : Physique

· IT : Technologies de l’information

· BE : Faisceaux

· TE : Technologie

· EN : Ingénierie

· HR : Ressources Humaines

· FP : Finance et Achats

· GS : Infrastructure et Services généraux

Chaque département est subdivisé en groupes qui sont eux-mêmes divisés en sections.

Ce projet de fin d’études s’est déroulé dans le département Technologie (TE), dans le groupe Cryogénie (CRG) et dans la section Contrôle et Électricité (CE) dirigée par M. Marco Pezzetti. Le rôle de cette section est la gestion de l’automatisation et du contrôle de la plupart des installations cryogéniques du CERN. Elle doit assurer la réalisation des programmes PLC (Programmable Logic Controller, Automate Programmable Industriel en français), leur optimisation et les modifications demandées par les différents utilisateurs des installations automatisées. La section dispose également d’un certain nombre d’électriciens pour assurer la partie électrique et opérative de l’automatisation : armoires électriques, châssis, câblage… Enfin, la section est également une force de proposition par l’intermédiaire de projets techniques tels que les migrations technologiques des automates ABB vers Schneider ou bien encore l’implantation de laboratoire de simulation pour la formation des opérateurs et comme outil de test des programmes automates avant leur mise en service (perspectives finales du sujet du PFE).

2.3- La physique des particules

Avant de discuter des expériences du CERN, il était intéressant de dire quelques mots sur le domaine de recherche étudié au CERN : la physique des particules.

La physique des particules est la branche de la physique qui étudie les constituants de la matière, les rayonnements et leurs interactions. Dans le paragraphe suivant, nous verrons qu’au CERN, plusieurs dispositifs sont utilisés pour essayer de vérifier les théories des physiciens : accélérateurs et collisionneurs de particules, les détecteurs de particules. La priorité scientifique du CERN est de démontrer l’existence ou non du boson de Higgs. Le boson de Higgs (ou les bosons de Higgs) serait à l’origine de la masse des autres particules. En effet, il interagirait plus ou moins fortement avec toutes les autres particules. Le problème est que l’existence du Higgs est trop brève pour que l’on puisse l’observer directement. Le seul moyen d’observer son existence est de détecter les produits issus de sa désintégration. C’est la raison pour laquelle on utilise des accélérateurs de particules pour faire entrer en collision certaines particules. Puis, les détecteurs doivent permettre d’observer et de recueillir les produits de ces collisions. Lors de l’expérience du LEP (grand collisionneur electron-positron ; utilisation de 1989 à 2000), la masse des bosons intermédiaires W-+ et Z0 a été déterminée précisément et le boson de Higgs aurait peut-être été détecté mais l’incertitude était trop importante : de l’ordre de 8%. Or, pour affirmer une découverte en physique des particules, la probabilité d’erreur doit être de 0.00003%.

En résumé, le CERN doit permettre de vérifier le Modèle Standard utilisé en physique des particules. Ce Modèle Standard permet de décrire les interactions fortes, faibles et électromagnétiques ainsi que l’ensemble des particules élémentaires qui constituent la matière. La Figure 3 résume la classification des particules élémentaires (Modèle Standard) ainsi que les principales questions dont les physiciens attendent impatiemment les réponses.

Figure 3 : Modèle Standard de la physique des particules

A l’aide du schéma précédent, six types de Leptons et six types de Quarks permettent de répertorier la famille des Fermions. Le modèle standard décrit trois types d’interactions auxquelles il faut ajouter la force de gravitation pour obtenir les quatre forces fondamentales de l’Univers. Pour la force d’interaction nucléaire forte, les particules d’échange sont les gluons et pour l’interaction nucléaire faible, il s’agit des W-,W+ et Z0. Les particules affectées par l’interaction forte sont les hadrons alors que les leptons ne le sont pas. Les quarks n’existent seulement qu’à l’intérieur des hadrons car ils sont confinés par un champ de force, il est alors impossible de déterminer leur masse séparément.

Figure 4 : Taille des particules

2.4- Les expériences du CERN

Comme il l’a été mentionné précédemment, le CERN est le plus grand laboratoire sur la physique des particules du monde et depuis bientôt soixante ans, les résultats de ses expériences impatientent toujours autant le monde des physiciens. Au début de ce mémoire, il a été noté que la physique des particules pouvait être appelée « la physique des hautes énergies » et, en effet, il en faut de l’énergie, dans tous les sens du terme, pour donner une réalité pratique aux théories des physiciens. Le dernier moyen mis à disposition des chercheurs est tout simplement la plus grande et la plus complexe machine jamais construite par l’Homme : l’accélérateur de particules LHC.

La construction du LHC (fin 2000) a réutilisé le tunnel du LHC, d’environ 27 km de circonférence et approximativement de forme circulaire.

Figure 5 : Localisation du Tunnel du LHC

L’objectif du LHC est de faire entrer en collision des protons circulant en sens inverse. Ainsi, aux points où les collisions se produisent, différents types de détecteurs permettent de déterminer la présence de certaines particules.

Cependant, la mise en circulation, en accélération ou en collision se font par différents dispositifs. Tout d’abord, un champ magnétique de 8,3 teslas est nécessaire pour réussir à courber le faisceau de protons de 7 TeV. Des électroaimants sont nécessaires pour produire ce champ magnétique énorme. Afin de minimiser l’encombrement, ce sont des électroaimants supraconducteurs qui sont utilisés. Comme leur nom l’indique, ces aimants utilisent la supraconductivité pour permettre de faire parcourir un courant proche de 13 000 Ampères sans dissipation de chaleur. Cette caractéristique supraconductrice permet d’avoir une résistance électrique nulle qui n’apparait qu’à très basses températures -271,3 °C (1,8 K), proches du zéro absolu. Le long des 27 km, 1232 aimants dipolaires de courbure sont répartis autour des deux anneaux accélérateurs lovés l’un dans l’autre. Le LHC est subdivisé en huit secteurs, appelés octant (cf Figure 6). Ces aimants dipolaires sont répartis de façon homogène à raison de 154 aimants par octant. Des électroaimants quadripolaires assurent quant à eux la focalisation des faisceaux de particules.

Figure 6 : Les différents secteurs du LHC

2.4.1- Le fonctionnement du LHC

L’accélération des protons suit une chaîne d’accélérations de plusieurs accélérateurs (cf Figure 7). Tout d’abord, un accélérateur linéaire à protons, Linac 2, alimente un Booster puis les protons sont injectés dans le Proton Synchrotron (PS) qui fait passer les protons de 1.4 GeV à 25 GeV. Puis, les protons sont à nouveau accélérés en passant par le Super Synchrotron (SPS) ce qui va permettre une montée en énergie jusqu’à 450 GeV. Les protons sont alors envoyés au LHC où leur vitesse (proche de la lumière) permettra de parcourir un tour de l’anneau en 89 µs.

Figure 7 : La chaîne d'accélération

2.4.2- Les détecteurs

Quatre expériences principales du LHC permettent d’observer l’infiniment petit des particules. Ces expériences sont réparties au point 1 avec ATLAS, au point 2 avec ALICE, au point 5 avec CMS et au point 8 avec LHCb.

2.4.2.1- CMS

CMS signifiant Solénoïde Compact à Muons (Compact Muon Solenoid) est l’un des détecteurs du LHC et est qualifié de généraliste car il est capable d’étudier tous les aspects des collisions de proton. Son architecture est semblable aux autres détecteurs du CERN, c'est-à-dire qu’il est composé de sous-systèmes, sous-détecteurs, destinés à mesurer différents types de particules. Pour y parvenir, il détecte les différents phénomènes qui se produisent lors des collisions : la position, l’énergie et la quantité de mouvement des muons, électrons ou photons. CMS est composé en plusieurs couches :

- un trajectographe (« tracker »)

- un calorimètre électromagnétique

- un calorimètre hadronique

- des chambres à muons, placées à l’extérieur du détecteur car seuls les muons sont capables de traverser les couches internes de CMS.

Sur la figure 8 ci-dessous, on peut se rendre compte de la taille de CMS, de forme cylindrique de 21 mètres de long et 16 mètres de diamètre. Sa masse est impressionnante : environ 12500 tonnes.

Figure 8 : CMS

2.4.2.2- ATLAS

ATLAS (A Toroidal LHC Apparatus) est la plus grande expérience du LHC avec 46 mètres de longueur et 25 mètres de diamètre (cylindre) dans lequel est contenu un aimant magnétique toroïdal. Autour de son axe central, huit électroaimants supraconducteurs sont disposés en tranche.

Sa structure est proche de celle de CMS avec plusieurs sous-systèmes :

- un détecteur interne (Tracker) associé à un électroaimant solénoïdal interne qui crée un champ magnétique de 2 Teslas et nécessitant un courant de 7600 Ampères.

- un calorimètre électromagnétique (à échantillonnage) : 70 tonnes de plomb et 45 m3 d’Argon liquide.

- un calorimètre hadronique

- un détecteur de muons avec un électroaimant externe composé de huit tores rectangulaires. Les bobines supraconductrices sont maintenues à -268°C ; elles sont parcourues par un courant de 20000 Ampères.

Figure 9 : ATLAS

2.4.2.3- ALICE

ALICE est l’acronyme pour « A Large Ion Collider Experiment » et est cette fois un détecteur pour observer les collisions entre ions plomb. Comme les autres détecteurs, ALICE possède différentes couches :

- TPC : Time Projection Chamber (Chambre de Projection du temps)

- Inner Tracking System : Silicon Pixel Detector (Détecteur de silicone à pixel)

- HMPID : High Momentum Particule Identification Detector (Détecteur pour l’identification du moment des particules)

- TOF : Time of Flight (Temps de vol)

- PHOS : Photon Spectrometer (Spectromètre à photon)

- TRD : Transition Radiation Detector (Détecteur des radiations transitoires)

- Muon Spectrometer (Spectromètre à Muon)

- Trigger (Déclencheur)

Au côté d’ALICE, il faut associer un certain nombre de calculateurs (« ferme d’ordinateurs ») qui va permettre de traiter les données. Sur les millions d’évènements générés par seconde lors d’une collision, seuls 1000 sont intéressants pour détecter les particules.

Figure 10 : ALICE

2.4.2.4- LHCb

Le LHCb (Large Hadron Collider beauty experiment) a pour but de détecter des désintégrations rares et d’étudier la violation de symétrie CP qui est l’une des trois conditions pour expliquer l’asymétrie matière-antimatière que l’on observe dans l’Univers.

Figure 11 : LHCb

2.4.3- La supraconductivité

La supraconductivité a été découverte par hasard par un jeune étudiant Gilles Holst en 1911. Au cours de cette expérience où du mercure avait été amené à basses températures, il s’est avéré que celui-ci avait perdu toute résistance électrique lorsque la température était en dessous d’une température critique Tc. Un peu plus de vingt ans plus tard, Meissner découvrit une autre propriété supraconductrice, celle de l’exclusion totale de tout flux magnétique de l’intérieur du supraconducteur (valable pour les supraconducteurs de type 1) ; ce qui d’ailleurs portera son nom avec l’effet Meissner.

D’après la loi d’Ohm, nous savons que lorsqu’un courant électrique traverse un conducteur, de l’énergie se dégage sous forme de chaleur, il s’agit de l’effet Joule. Proportionnellement au courant qui traverse les conducteurs formant les électroaimants, il est évident que la chaleur dégagée serait énorme et la section des conducteurs toute aussi gênante. Il faut donc refroidir le matériau supraconducteur en dessous d’une température critique pour qu’il puisse atteindre ses propriétés caractéristiques. Grâce à cette résistance électrique nulle, on peut faire passer des courants de très haute intensité dans des câbles de faible section sans perte par effet Joule.

La supraconductivité est utilisée au CERN mais aussi dans bien d’autres domaines d’applications.

Figure 12 : Train à lévitation magnétique

2.5- Application en Médecine

Les expériences du CERN et les avancées technologiques qui leurs sont associées ne sont pas uniquement bénéfiques aux mondes de la physique des particules. En effet, la cryogénie et la supraconductivité sont présentes dans différents domaines comme l’Industrie chimique, l’Aerospatiale, la Métallurgie et la Médecine.

En médecine, la supraconductivité est utilisée à travers les applications de l’imagerie par résonance magnétique (IRM). En 2008, l’aimant le plus utilisé en IRM est celui de type supraconducteur devant les aimants permanents et résistifs.

Le principe de l’imagerie par résonance magnétique repose sur l’application d’une combinaison d’ondes électromagnétiques à haute fréquence sur une partie du corps et en mesurant le signal réémis par certains atomes (par exemple l’hydrogène qui est très utilisé mais il y a aussi le Carbone 13) alors il est possible de déterminer la composition chimique et donc la nature des tissus biologiques en chaque point volumique observé. A l’aide d’un traitement d’image, il est alors possible de reconstituer une image 2D ou 3D de l’intérieur de la partie du corps examinée.

L’aimant supraconducteur permet d’atteindre des intensités de champ magnétique très importantes. En IRM, l’aimant supraconducteur est constitué d’un bobinage de niobium-titane constamment baigné dans de l’hélium liquide à -270°C (cryogénie). Pour contrer les entrées de chaleur dans l’appareil et ainsi maintenir constant la température du bain d’hélium, un écran contenant un refroidisseur à air ou à eau et un espace maintenu au vide enveloppent l’appareil. Ce système est très important afin d’éviter un « quench », c’est-à-dire la transformation brutale de l’hélium en gaz.

Figure 13 : IRM

3- CHAPITRE 2 : Thermodynamique

Les différentes parties de ce mémoire ont pour objectif de présenter et de démontrer les études et les travaux réalisés lors de ce projet de fin d’études. L’objet du stage repose sur la simulation de procédés cryogéniques. Avant de simuler un process physique, il est indispensable d’en comprendre le fonctionnement et les bases théoriques qui en sont à l’origine. L’origine des procédés cryogéniques vient de la compréhension des phénomènes thermodynamiques, c’est pourquoi il me semblait important de présenter certaines notions thermodynamiques qui m’ont servi de base au développement des modèles de simulation.

3.1- Les trois principes de la thermodynamique

Le comportement des systèmes macroscopiques est régit par des principes généraux, appelés les Lois de la Thermodynamique, qui décrivent le mouvement aléatoire des particules. La thermodynamique a introduit la notion de température T et d’entropie S.

La variation des paramètres macroscopiques définit un état macroscopique du système. Il faut aussi penser à l’état microscopique du système en spécifiant l’énergie ou la position de chaque atome ou molécule. Plusieurs états microscopiques différents peuvent correspondre au même état macroscopique. En effet, il existe différentes répartitions de l’énergie au niveau microscopique. Ce nombre de distribution possible peut être noté w. La probabilité de trouver un système dans un état microscopique particulier est la même que de le trouver dans un autre état microscopique. Ainsi, la probabilité que le système soit dans un état macroscopique donné doit être proportionnelle à w. w est appelé le poids statistique.

3.1.1- Premier Principe

Le premier principe de la thermodynamique affirme que lors de toute transformation, il y a conservation de l’énergie. La variation de l’énergie totale Et d’un système isolé se conserve au cours de ses transformations : .

Le premier principe introduit une nouvelle grandeur d’état extensive (proportionnelle à la quantité de matière) : l’énergie interne U (en Joule). Seule sa variation peut être déterminée.

On a alors :

Avec : énergie cinétique macroscopique

: énergie potentielle associée aux forces extérieures (pesanteur)

U : énergie interne liée à la nature propre du système

L’énergie interne U regroupe l’énergie cinétique microscopique (due à l’agitation thermique des particules) et l’énergie potentielle issue de toutes les forces internes au système : interactions intramoléculaires et intermoléculaires.

La variation peut évoluer à la suite d’échanges de matière et d’énergie avec le milieu extérieur ou à la suite de processus internes au système.

Soit un système réalisant une transformation entre deux états 1 et 2, sa variation d’énergie interne correspond à :

U est une fonction d’état car sa variation est indépendante du chemin suivi pour aller de 1 à 2.

Système

Commentaires

Système isolé

Car

Système adiabatique

Car Q = 0

Système subissant une transformation isochore

Car W = 0

Système quelconque

Figure 14 : Variation d'énergie interne en fonction du système étudié

Par conséquent, le premier principe peut être représenté par la relation (pour une transformation isobare) :

Il est également intéressant de présenter une autre fonction d’état qui dépend de l’énergie interne U et qui sera très utile dans la suite du mémoire : l’enthalpie H. Il s’agit surtout de l’intérêt que nous pouvons tirer en connaissant la valeur de sa variation qui exprime la quantité de chaleur mise en jeu pendant la transformation à pression constante d’un système au cours de laquelle ce dernier reçoit ou fournit un travail mécanique. L’enthalpie s’exprime alors :

3.1.2- Deuxième Principe

Le second principe s’est construit en partant du fait que le premier principe était insuffisant pour distinguer la nature des échanges d’énergie avec l’extérieur. Si travail et chaleur sont équivalents en termes de bilan d’énergie, il apparaît qu’il n’est pas toujours possible d’imposer la répartition de la nature des échanges sous une forme ou l’autre. En d’autres termes, le premier principe ne permet pas de dire si une transformation est réalisable ou non. Le second principe permet de caractériser le sens d’une évolution et de rendre compte de son éventuel caractère irréversible. Il doit utiliser une grandeur dont les valeurs caractérisent le sens de l’évolution, reposant sur une relation d’ordre. La fonction d’état entropie S a alors été introduite pour permettre de caractériser les transformations thermodynamiques. L’entropie S mesure le degré de désordre d’un système au niveau microscopique. S peut aussi être définie en fonction du poids statistique vu précédemment comme avec k une constante.

Les transformations réelles sont irréversibles à cause de phénomènes dissipatifs. Le système ne peut jamais spontanément revenir en arrière. L’énergie perdue par le système sous forme de chaleur contribue à l’augmentation du désordre global (l’entropie S).

Le Second Principe est un principe d’évolution, si une transformation s’effectue avec augmentation du désordre global, il y a alors création d’entropie. Donc dans le cas d’une transformation idéale réversible, il n’y a pas de création d’entropie.

L’expression générale du Second Principe pour un système :

Avec positif ou nul, donne le sens de l’évolution de la transformation

correspond à l’entropie échangée par le système avec le milieu extérieur et :

3.1.3- Troisième Principe

Le deuxième principe ne permet de définir l’entropie qu’à une constante additive près. Le Troisième Principe lève cette indétermination. Au zéro de la température absolue, l’entropie de tout corps cristallisé chimiquement homogène tend vers zéro.

3.2- Les transferts thermiques

Précédemment, nous avons vu que la quantité d’énergie échangée mise en jeu (sous forme de chaleur) intervient dans le premier principe de la thermodynamique. Or, cette quantité de chaleur est transmise par trois processus d’échange thermique : la conduction thermique, la convection et le rayonnement.

3.2.1- La conduction thermique

La conduction thermique est un transport de chaleur qui s’effectue sans mouvement moléculaire de translation : de proche en proche, les vibrations moléculaires transmettent l’énergie d’agitation. Par analogie à l’électricité, on aura des matériaux conducteurs (métaux) ou isolants (polystyrène, air). Elle peut s’interpréter comme la transmission de proche en proche de l’agitation thermique ; un atome cède une partie de son énergie cinétique à l’atome voisin.

Deux corps à des températures différentes T1 et T2 reliés thermiquement par un matériau verront leur différence de température diminuer progressivement.

La conduction thermique obéit à la loi de Fourier selon laquelle le flux d’énergie thermique est proportionnel au gradient de température et à la section d’écoulement du flux de chaleur : avec k la conductivité thermique du matériau. Le signe – exprime que la chaleur s’écoule du point le plus chaud au point le plus froid.

3.2.2- La convection

La convection est cette fois un mode de transfert d’énergie thermique à l’échelle macroscopique induit par un déplacement de matière (fluides). La chaleur est alors « convoyée » d’un point à un autre par un élément de masse. La convection peut être de deux types :

- naturelle si le déplacement est du aux différences de densité des fluides (compétition entre les forces de gravité et les forces de viscosité)

- forcée si le déplacement est du à une action extérieure, le régime d’écoulement (laminaire ou turbulent) va caractériser l’échange thermique entre une paroi et le fluide en mouvement.

Le flux d’énergie thermique est cette fois défini par :

où Tp est par exemple la température de la paroi, Tf la température du fluide loin de la paroi et h coefficient de transfert thermique.

Figure 15 : Schéma convection

Figure 16 : Les différents écoulements

L’écoulement laminaire se produit lorsque la viscosité impose le profil de vitesses alors l’écoulement turbulent voit des tourbillons se former. Le passage de l’écoulement laminaire à l’écoulement turbulent se fait pour une valeur critique d’un nombre sans dimension qui caractérise l’écoulement : le nombre de Reynolds :

Avec la viscosité dynamique, la viscosité cinématique et D la longueur caractéristique (diamètre hydraulique, longueur de contact).

3.2.3- Le rayonnement

Le rayonnement est un mode de transfert d’énergie sans support matériel. Tout corps à une température différente de 0 K rayonne de l’énergie sous forme d’onde électromagnétique. La puissance électromagnétique émise par une surface S à la température T est donnée par la loi de Stefan où , est l’émissivité, coefficient caractéristique de la surface du matériau compris entre 0 et 1 ( pour les corps noirs).

Le corps noir est un corps absorbant intégralement les radiations ce qui implique que le flux réfléchi est nul.

Toutes les surfaces réelles ont des comportements qui peuvent être : l’émission, l’absorption, la réflexion-diffusion, la transparence et l’opacité.

Un corps porté à une certaine température convertit son énergie microscopique en rayonnement thermique. Le flux d’émission est une quantité d’énergie émise par unité de temps par une unité de surface. Mais cette unité de surface absorbe également de l’énergie, on a alors un flux absorbé. Ensuite, le rayonnement incident peut être renvoyé par la surface. Ce renvoi obéit alors aux lois de l’optique géométrique (réflexion) et se fait dans toutes les directions (diffusion). Si le milieu est transparent, il peut transmettre intégralement l’onde incidente (par exemple le vide). A l’inverse, un corps opaque ne transmet aucune partie du rayonnement incident.

Ce mode de transfert est souvent négligeable à température ambiante mais important en cryogénie car on peut supprimer les pertes par conduction et convection par le vide mais pas celles du rayonnement ; seule une isolation avec des feuilles de Mylar en diminue efficacement les effets.

4- CHAPITRE 3 : La Cryogénie4.1- Définition générale

La cryogénie est l’ensemble des applications et des sciences faisant intervenir les basses températures, c’est-à-dire les températures inférieures à 120 K (-153.15°C). Cette limite de 120 K correspond à la température à partir de laquelle les gaz contenus dans l’air commencent à se liquéfier. Aujourd’hui, la recherche dans le domaine de la cryogénie arrive à atteindre des températures de quelques dizaines de mK ; sachant qu’il est impossible d’aller au-delà des 0 K car c’est la température pour laquelle les molécules sont privées de tout mouvement (la matière est inerte), et donc l’énergie est nulle. Comme il l’a été mentionnée dans l’introduction de ce rapport, au CERN, les physiciens et les ingénieurs ont besoin de travailler dans les très basses températures (de l’ordre de -271°C) pour rendre supraconducteurs les aimants du LHC. La rédaction de ce chapitre sur la Cryogénie a pour objectif de présenter les différents moyens (théoriques et matériels) utilisés au CERN pour produire de l’hélium liquide à cet ordre de température. Cette partie est d’autant plus importante car elle explique le fonctionnement des différents équipements cryogéniques, qui ont fait l’objet de modélisation dans le cadre de mon projet de simulation de boite froide.

4.2- Principe de la liquéfaction et de la réfrigération4.2.1- Utilisation de l’Hélium

Au CERN, différents fluides cryogéniques sont utilisés selon l’utilisation que l’on souhaite en faire. Ils peuvent être utilisés pour refroidir des détecteurs et être dans le même temps réactifs à certaines particules (exemple argon) ou bien ils peuvent être utilisés pour refroidir les aimants. Dans le cadre de ce projet, le fluide cryogénique étudié fut l’hélium car il est le seul fluide cryogénique liquide aux températures permettant de refroidir les aimants du LHC.

Donnons quelques données intéressantes sur l’hélium à l’aide du tableau suivant :

Caractéristiques

Hélium

Point de saturation (K)

4,22

Température critique (K)

5,20

Pression critique (MPa)

0,23

Température au point Lambda (K)

2,18

Pression au point Lambda (kPa)

5,04

Densité liquide à pression ambiante (kg/m3)

125

Densité gaz à pression ambiante (kg/m3)

16,7

Densité normale (kg/m3)

0,18

Figure 17 : Caractéristiques de l'Hélium

L’hélium a la particularité de ne pas disposer de point triple mais d’un point appelé Lambda qui permet de marquer la transition entre l’hélium normal (He I) et l’hélium superfluide (He II). En effet, deux états de l’hélium sont distingués car, sous certaines conditions de température et de pression, l’hélium voit sa viscosité devenir nulle (plus de frottement) : on le qualifie alors de superfluide. De plus, il faut savoir que l’hélium ne peut se solidifier qu’à des pressions supérieures à 2,5 MPa. La figure suivante permet de représenter les différents états de l’hélium en fonction de la température et de la pression.

Figure 18 : Les différents états de l'hélium

Comme nous l’avons vu, l’hélium liquide est utilisé pour refroidir en permanence les différents aimants du LHC. Le CERN doit disposer d’un ensemble de procédés cryogéniques permettant de produire cet hélium liquide, à températures très basses, à partir d’hélium gazeux à température ambiante. La quantité d’hélium dont le LHC a besoin est énorme et cette ressource est onéreuse. Les procédés cryogéniques doivent donc être fiable et permettre d’utiliser efficacement l’hélium produit.

La production d’hélium liquide et la conception des installations ont fait appel à l’utilisation des cycles thermodynamiques, et en particulier au développement d’un cycle thermodynamique adapté à la cryogénie : le cycle de Claude.

Avant de construire un cycle thermodynamique, l’évolution des différents paramètres (pression, température, énergie) du fluide cryogénique utilisé doit être connue. Parmi les différents diagrammes de phase pour les fluides, le diagramme Température-Entropy (diagramme T-S) est le plus pratique pour illustrer les différentes transformations des cycles thermodynamiques utilisés pour les systèmes cryogéniques fermés. Au cours de ce projet, le diagramme T-S associé à celui de l’hélium a été utilisé à plusieurs reprises pour comprendre le principe de fonctionnement des équipements cryogéniques (Turbines, Compresseur, Vannes J-T…).

Figure 19 : Diagramme T-S de l'Hélium

Sur ce diagramme, les courbes de couleur verte représentent les courbes de même enthalpie (les isenthalpes), les courbes bleues sont les isobares et la courbe rouge décrit la courbe de saturation c'est-à-dire le passage entre l’hélium gazeux et l’hélium liquide. Pour les basses températures, il est plus pratique d’utiliser un diagramme T-S avec une échelle de température logarithmique. Ce diagramme est pratique dans le sens où l’on peut visualiser l’évolution des caractéristiques de l’hélium. Cependant, lorsque des valeurs sont nécessaires, des logiciels calculent les propriétés du fluide. Comme le logiciel HEPAK qui permet d’obtenir 39 paramètres sur l’hélium comme par exemple la pression, la température, la densité, l’enthalpie, l’entropie…Ces paramètres sont obtenus moyennant la connaissance de deux paramètres par exemple pression et température, ou pression et enthalpie. HEPAK possède une application DOS qui permet de récupérer les tables de données pour des intervalles de température. HEPAK fonctionne également sous Microsoft Excel. Par exemple pour connaitre l’enthalpie, la commande suivante est alors écrite dans une cellule EXCEL :

hecalc(9;0;1;11.8*100000;2;110;1) //T=110K et P=11,8bar

La forme générale de la commande est :

HeCalc(Index, Phase, Input1, Value1, Input2, Value2, Unit)

La variable Index correspond à l’un des paramètres dont l’on souhaite connaitre la valeur en fonction des deux paramètres d’entrée Input1 et Input2. Les différents numéros d’Index disponibles sont :

0 QUALITY 14 CP 27 THDIFF

1 PRESSURE 15 CV 28 PRANDTL

2 TEMP 16 GAMMA 29 SURFACE T

3 DENSITY 17 EXPANS 30 DIEL 1

4 VOLUME 18 GRUNEISEN 31 REFR 1

5 PV/RT 19 COMPRESS 32 DT(V)

6 DPTSat 20 VSOUND 33 DT(P)

7 LATENT HT 21 JT COEFF 34 RHOS/RHO

8 ENTROPY 22 DPDD 35 V2S

9 ENTHALPY 23 DPDT 36 V4S

10 ENERGY 24 DHDV*V 37 GORTERM

11 HELMHOLTZ 25 VISCOSITY 38 SFTC

12 GIBBS 26 CONDUCT 39 LLTEMP

13 FUGACITY

4.2.2- Cycles thermodynamiques usuels

Cette partie du mémoire a pour objectif d’expliquer le principe de refroidissement de l’hélium. Cependant, il est utile de présenter la théorie de base qui a servi au développement de la réfrigération pour la cryogénie.

Les cycles thermodynamiques permettent de décrire les transformations successives et répétitives des machines thermodynamiques. Même si dans la pratique, ces transformations ne sont pas réversibles, on les remplace tout de même par des transformations réversibles plus facilement calculables afin d’obtenir des machines idéales nous donnant une première approche du problème.

Le cycle thermodynamique de base est le cycle de Carnot, cycle réversible, permettant de fournir un travail mécanique à partir d’une source chaude et d’une source froide. Le cycle de Carnot comprend deux transformations adiabatiques réversibles (compression et détente) et deux transformations isothermes (figure ci-dessous associé à un diagramme de Clapeyron = f(p,V)).

Figure 20 : Cycle de Carnot

Le cycle de Brayton est également intéressant à présenter. Il possède une détente isentropique, un réchauffement isobare, une compression isentropique et un refroidissement isobare.

Figure 21 : Cycle de Brayton (1,2’,3,4’)

Ensuite, le cycle Joule-Thomson permet d’illustrer l’un des phénomènes pouvant se produire avec les gaz réels. Dans le cas d’une détente isenthalpique, une vanne peut engendrer un refroidissement. Cet effet est appelé l’effet Joule-Thomson mais ne se produit que pour des conditions de température et de pression très limitées (pour le cas de l’hélium). Le cycle J-T comprend un refroidissement et un réchauffement isobares avec une compression isotherme et une détente isenthalpique (Figure 22).

Figure 22 : Cycle J-T

4.2.3- Réfrigération et Cycle de Claude

En cryogénie pratique, les termes de liquéfaction et de réfrigération sont souvent confondus. Un réfrigérateur pur délivre seulement une capacité de refroidissement isotherme à la température de liquéfaction du fluide « chaud » (fluide qui fournit du travail). Autrement dit, le process fournit le fluide liquide à la charge (un aimant), cette charge lui renvoie alors ce fluide à l’état gazeux à température basse. Un liquéfacteur utilise sa capacité de refroidissement pour refroidir une partie du fluide chaud depuis les conditions ambiantes à son point de saturation. En d’autres termes, le process fournit toujours du fluide liquide à la charge mais cette fois-ci avec le renvoi de la charge et les entrées de chaleur externes, du fluide gazeux à température ambiante est retourné au process. Les deux variantes du process sont représentées dans la Figure 23.

Figure 23 : Comparaison entre réfrigération et liquéfaction

Le process en question correspond en fait à une station de compression et une boite froide qui constituent un réfrigérateur. Tous les réfrigérateurs utilisant l’hélium comme fluide sont basés sur le cycle de Claude. Le cycle de Claude est une combinaison d’un ou plusieurs cycles de Brayton et d’un cycle Joule-Thomson à la fin du process. Sur la figure 24, le cycle de Claude est représenté sur un diagramme T-S simplifié et les composants du process figurent schématiquement.

Figure 24 : Les réfrigérateurs issus du cycle de Claude

Ce cycle fermé comprend une compression isotherme, des détentes polytropiques (l’entropie n’est pas constante) permettant de produire le froid, un refroidissement et un réchauffement isobares et une détente isenthalpique. Toutes ces transformations sont réalisées par différents équipements cryogéniques. Ces équipements sont décrits en détail dans la partie suivante.

4.3- Les équipements cryogéniques4.3.1- Station de compression

La station de compression comprend un compresseur (à pistons ou à vis) et un ensemble de vannes contrôlées pour régler la haute pression (sortie du compresseur) et la basse pression (entrée du compresseur).

Le but du compresseur est d’augmenter la pression du fluide entrant par l’intermédiaire d’une diminution de volume due à la géométrie interne du compresseur. De plus, cette compression ne doit pas avoir pour conséquence une augmentation de température (compression isotherme).

On a alors un débit volumique constant  : . La puissance isothermale est exprimée par ou à l’aide de l’enthalpie de sortie, .

Figure 25 : Efficacité isothermale en fonction des caractéristiques du compresseur

Pour y parvenir, le compresseur dispose d’un système d’injection d’huile qui pulvérise l’huile pendant la phase de compression. La surface de contact de l’huile avec l’hélium est énorme ; l’huile absorbe la majeure partie de la chaleur de compression. Bien évidement un système de déshuilage est présent pour éviter la propagation d’un mélange huile-hélium en sortie du compresseur. Ce système de déshuilage comprend un séparateur primaire, des coalesceurs constitués de filtres. Ces coalesceurs permettent d’éliminer les particules d’huile de différentes tailles (de très grosses à très petites) à l’aide de différents processus de capture : par impaction inertielle (grosses particules = forte inertie, collées sur le filtre), par interception directe (moyennes particules) et par mouvement brownien (très petites : < 0.5 µm, collision avec le filtre).

Figure 26 : Compresseur et Régulation de vannes

Les vannes de bypass permettent de contrôler la basse pression. Pour cela, on trouve généralement une première vanne (grand bypass) transférant la majeure quantité de gaz de la haute pression vers la basse pression. La deuxième vanne (petit bypass), positionnée en parallèle, permet un transfert de moins grande quantité ce qui apporte une plus grande précision pour la régulation. Les vannes de charge et décharge contrôlent la haute pression en gérant le gaz envoyé ou provenant du tampon.

Il est tout de même intéressant de noter que la régulation peut se faire de façon inverse. La basse pression peut aussi être régulée par les vannes de charge et décharge pendant que les vannes de bypass régulent la haute pression.

4.3.2- Echangeurs Thermiques

Les échangeurs thermiques permettent un échange de chaleur entre un fluide chaud et un fluide froid (le fluide peut être le même mais à température différente). Dans les échangeurs thermiques à plaques, les fluides ne sont jamais en contact et circulent souvent à contre-courant. Il y a une paroi métallique (aluminium généralement) entre chaque courant de fluide qui représente la surface d’échange. C’est pour cette raison que cette paroi est en forme d’ailettes. Plus la surface d’échange est importante, plus le coefficient d’échange thermique le sera également. Dans une boite froide, l’échange thermique se fait à pression constante pour chaque courant (par exemple à 18 bar pour le premier fluide (haute pression) et 1,1 bar pour le second (basse pression)). Dans le cas idéal, cet échange thermique devrait avoir lieu sans différence de température et sans chute de pression. Or, cette dernière est inévitable due aux frictions de l’hélium sur la paroi métallique.

Plusieurs paramètres sont intéressants à calculer pour représenter les phénomènes qui se passent dans un échangeur thermique : LMTD et UA entre autres.

Tout d’abord, pour donner une estimation du gradient de température pour l’échange thermique, la valeur du LMTD (pour Log Mean Temperature Difference) est calculée. Le LMTD est une moyenne logarithmique de la différence de température entre les fluides chaud et froid de chaque extrémité de l’échangeur. Plus le LMTD est élevé, plus il y a de chaleur échangée.

Pour un échange avec contre-courant, on obtient : avec :

On appelle et , on a alors

Ensuite, UA définit le coefficient d’échange thermique total, son unité est en W/K. On pose préalablement l’expression de la puissance totale On a alors .

Enfin, il est intéressant d’estimer les chutes de pression dues à l’échangeur. Cette chute de pression dépend de la taille et du matériau de l’échangeur thermique.

Cette chute de pression est obtenue à partir de l’équation de friction suivante :

Avec :

En remplaçant ces expressions, on trouve finalement :

En éliminant le terme constant : , on obtient alors l’expression calculant la chute de pression en fonction de celle calculée au nominale (caractéristique « design ») :

Les variables munies de la dénomination d concerne les paramètres « design ».

Sur la figure ci-dessous, la description des différents éléments composants un échangeur thermique à plaque est visible. La compacité d’un échangeur est très importante pour avoir un ratio important entre surface d’échange et unité de volume.

Figure 27 : Echangeurs thermiques à plaques

4.3.3- Turbines

Les turbines sont les équipements cryogéniques fournissant le froid au procédé. Dans une turbine, deux parties peuvent se distinguer. L’une concerne la circulation du débit d’hélium à travers une pale, l’autre partie concerne le fonctionnement du frein (compresseur à gaz associé à une vanne) pour contrôler la vitesse de rotation de la pale. Sur la figure suivante, les différentes pièces composant ces deux parties sont visibles :

Figure 28 : Turbine cryogénique

Le principe de diminution de température repose sur la génération d’un travail extérieur pour une différence de pression donnée. En effet, le débit d’hélium entrant dans la turbine va entraîner la rotation d’une pale munie d’ailettes. Cette mise en rotation de la pale entraîne une génération d’énergie mécanique externe au système et implique une diminution de l’enthalpie de l’hélium : donc . On appelle cette transformation une détente isentropique mais en fait dans le cas réel il s’agit en fait d’une détente polytropique. Sur la figure ci-dessous, la ligne verticale en pointillé représente la transformation isentropique () tandis que l’autre ligne représente la transformation polytropique (. L’angle entre les deux courbes représente le coefficient isentropique, c'est-à-dire l’efficacité de la turbine. Dans les deux cas, on observe bien la diminution de la température de à .

Figure 29 : Comparaison entre une détente polytropique et une détente isentropique

Durant cette détente, la capacité extraite est . Le débit d’entrée est égal au débit de sortie : .

La vitesse de l’axe de la turbine est exprimée de la façon suivante : avec :

4.3.4- Vannes de détente Joule-Thomson

Les vannes Joule-Thomson sont des vannes très particulières pour les procédés cryogéniques car elles permettent la dernière détente afin d’obtenir de l’hélium liquide. La transformation Joule-Thomson est une détente isenthalpique En effet, pour une certaine condition de température et de pression (détente), si l’on suit la courbe de même enthalpie (l’isenthalpe) sur le diagramme T-S, de l’hélium liquide s’écoulera en sortie de la vanne. L’hélium devient liquide lorsque les conditions de température et d’entropie sont réunies et franchissement la limite représentée par la courbe de saturation de l’hélium (cf figure 22 et 24).

Profitons de ce paragraphe sur un type de vanne pour rappeler l’expression du débit en fonction des caractéristiques de la vanne : avec

Si

Figure 30 : Vanne linéaire ou isopercentuelle (rayon de courbure R)

4.2.5- Stockage de l’Hélium

Pour le stockage de l’hélium, il existe plusieurs types d’appareils selon l’utilisation que l’on souhaite en faire et la localisation de ces appareils. Comme il est mentionné au paragraphe précédent, dans les boites froides, les vannes de J-T sont connectées à un séparateur de phase. Ce séparateur de phase permet la circulation de l’hélium gazeux entre la haute pression et la basse pression (sortie g_out). Cet appareil permet aussi de stocker l’hélium liquide qui arrive en entrée et s’accumule dans le fond par gravité. Une sortie d’hélium liquide (sortie l_out) est alors disponible pour envoyer l’hélium vers les clients (LHC, distribution, stockage…). Un chauffage (ou plusieurs chauffages pour différents seuils) permet de réguler le niveau d’hélium liquide, cette régulation de niveau est généralement associée à une régulation PI.

Plusieurs équations permettent de décrire le fonctionnement d’un séparateur de phase :

L’équilibre des masses : avec M la masse totale à l’intérieur du séparateur de phase et les différents débits.

L’équilibre énergétique de la paroi (Wall) :

Ce type d’appareil est fortement soumis aux pertes thermiques par radiation, la quantité de chaleur associée est alors : . Pour calculer la pression dans le séparateur, il faut prendre en compte la pression hydrostatique induite par le volume d’hélium liquide : avec la masse volumique, g la constante de gravitation et z l’altitude.

Au niveau du fluide, il est indispensable de faire l’équilibre énergétique :

4.4- Contrôle des installations cryogéniques

Les installations cryogéniques s’avèrent très complexes et leurs niveaux de sécurité et de fiabilité demandés sont très élevés. L’automatisation de ces installations est donc un point névralgique pour assurer le bon fonctionnement des installations. C’est pourquoi, le CERN a développé un standard interne de programmation automate appelé UNICOS (UNnified Industrial COnstrol System). UNICOS permet d’apporter des solutions dans l’ensemble de la chaîne du contrôle-commande : aussi bien au niveau de la programmation des automates mais aussi pour la supervision des installations automatisées. La philosophie d’UNICOS tend à apporter une architecture de programmation orientée objets.

De plus, étant donné la quantité d’objets à automatiser, il n’est pas envisageable de faire les programmes de façon totalement manuelle. UNICOS produit aussi des outils de génération automatiques qui permettent de générer du code, de faire le lien entre toutes les broches de connexion et les objets.

4.4.1- Les objets UNICOS

La philosophie d’Unicos implique l’utilisation de différents objets :

· Les objets I/O font le lien entre les objets de la partie opérative, ceux structurant l’installation (PCO) et le procédé. Ces objets peuvent aussi bien manipuler des grandeurs numériques que des grandeurs analogiques.

· Les objets Fields sont les objets décrivant les différents éléments de l’installation : les objets manuels (Local), tout ou rien (OnOff), analogiques, analogiques-digitales (pilotés par un signal analogique mais délivrent une sortie numérique sous forme d’impulsions MLI).

· Les objets Control envoient les ordres aux objets Fields en fonction du comportement et du statut d’autres objets. Deux catégories répertorient les objets Control : les objets Controller et les objets Alarmes. Les objets Controller possède un algorithme de régulation, comme l’algorithme d’un PID classique. Les Alarmes permettent de donner des informations à la supervision. Ces signaux envoyés permettent de prévenir que le procédé ne se trouve pas dans un mode de fonctionnement normal. Par exemple, dans UNICOS, il y a des informations particulières, appelées Interlock génériques, qui sont des ordres empêchant l’objet en question de démarrer (Start Interlock) ou bien de le figer dans une certaine position de sécurité (Stop Interlock). Les alarmes permettent alors de distinguer la cause de l’interlock qui a été généré.

· Les Process Control Objects (PCO) sont des modules qui permettent de générer des ordres, et de les envoyer à plusieurs Field Objects ou plusieurs autres Process Control Objects et ceci de façon homogène.

4.4.2- Les différents modes des objets

Il existe quatre modes de pilotage des objets :

- Le mode Forcé permet aux ingénieurs de process de manipuler les entrées d’un objet depuis une Operating Work Station (OWS), de forcer manuellement une valeur sans que le système de contrôle commande ne puisse repasser en mode Auto.

- Le mode Auto laisse l’objet être piloté par un objet de contrôle (PCO).

- Le mode Manuel laisse le contrôle de l’objet à l’opérateur depuis l’OWS mais le mode Auto reprend la main s’il y a un problème (situation d’Interlock).

- Le mode Local Drive signifie que l’objet est piloté localement sur le terrain.

4.4.3- Les générateurs

L’un des objectifs d’UNICOS est de faire gagner du temps de programmation pour les développeurs des programmes automates. Quatre outils permettent ce gain de temps : la Database (Spécification Excel), un générateur d’instance, un générateur de logique et la Spécification UNICOS (Spécification Word).

La feuille de spécification Excel permet de dresser la liste des entrées/sorties de l’installation de manière à répertorier l’ensemble des signaux. Elle recense l’intégralité des objets à créer, sous forme de tableaux. Chaque feuillet se réfère à un type d’objet, on dresse ensuite la liste des objets de ce type présents dans l’installation et on leur attribue une série de paramètres en fonction de l’objet.

A l’aide de Microsoft Office Access, un générateur d’instance a été développé permettant de produire la base de données constituée de l’ensemble des objets et de leurs broches de connexions associées à l’installation à automatiser. Lorsque le développeur crée un projet sous Unity ou S7 (PLC Schneider ou PLC Siemens), il fera appel à l’importation de cette base de données.

Figure 31 : Générateur d'instance

Afin de structurer la programmation, un générateur de logique permet de générer des sections de code pour chaque Process Control Objects (PCO). Ce générateur utilise alors la database et des fichiers templates génériques pour chaque type d’objet. En effet, les sections de code sont différentes selon le type d’objet c’est pourquoi il faut en tenir compte.

Figure 32 : Générateur de Logique

Enfin, afin de préparer au mieux la programmation de l’automate, la procédure UNICOS prévoit la rédaction d’une spécification Word suite à l’analyse fonctionnelle de l’installation. Ce document décrit toute la logique de fonctionnement du procédé tout en respectant l’écriture du standard UNICOS.

5- CHAPITRE 4 : Simulation de modèles

La majeure partie du travail effectué lors de ce projet de fin d’études concerne le développement de modèles pour la simulation dynamique. Dans ce chapitre, le logiciel utilisé, EcosimPro, sera décrit ainsi que la structure générale indispensable à la création d’un modèle. Les études préliminaires à ces développements seront également expliquées afin de démontrer l’étendue des recherches et des domaines étudiés. Enfin, les particularités des projets réalisés seront explicitées afin de mieux saisir les enjeux de l’utilisation de tels modèles. Les deux projets réalisés concernent le développement de modèles de réfrigérateur. Le premier projet concerne la boite froide TCF 50 et la station de compression associée qui fait parti du Cryolab et fournit de l’hélium liquide à 4,5 K. Le second projet a pour objet la boite froide Linde 18kW fournissant de l’hélium liquide au LHC.

5.1- Présentation du logiciel EcosimPro

Pour élaborer le modèle d’un procédé industriel, il y a deux approches :

· L’approche paramétrique

· L’approche physique

L’approche paramétrique permet d’obtenir un modèle général du procédé. L’approche physique permet d’obtenir un modèle plus détaillé du procédé. Tout d’abord, tous les équipements du procédé sont modélisés par leurs équations différentielles et ensuite ils sont interconnectés dans le modèle. Plusieurs logiciels de modélisation existent sur le marché comme MathModelica, Dymola, Hysis et EcosimPro. Au CERN, les sections EN-ICE et CRG-CE utilisent le logiciel de modélisation EcosimPro.

Le logiciel EcosimPro est un outil mathématique permettant de modéliser n’importe quel process physique à partir des équations algebro-différentielles.

Il permet de modéliser des évènements continus et discrets. EcosimPro intègre un environnement visuel permettant un apprentissage rapide et simple. La construction d’un modèle est basée autour d’une approche orientée objets et non causale. Des bibliothèques de composants peuvent être créées et permettent de réutiliser les symboles de ces composants à chaque réalisation de modèle.

La modélisation de ces composants implique le calcul d’un grand nombre de variables sous forme d’équations algebro-différentielles. Toutes ces équations permettent de donner l’évolution du système physique par pas d’intégration. Pour résoudre ce système algebro-différentiel, EcosimPro dispose de « solvers » numériques comme le solver DASSL. Le solver DASSL donne les approximations des dérivées temporelles au premier ordre ce qui permet d’obtenir un système algébrique non-linéaire. L’algorithme de Newton-Raphson permet alors de résoudre ce système non linéaire à l’aide d’une Jacobienne qui le linéarise. Par défaut, EcosimPro utilise une méthode DASSL normale si le pourcentage de zéros de la matrice Jacobienne est inférieur à 93%. Sinon, EcosimPro utilise une version du solver DASSL dite éparse (pourcentage de zéros supérieur à 93%) qui effectue une décomposition LU de la matrice Jacobienne pour scinder la matrice. Ceci permet un gain de temps conséquent lors du process d’intégration.

5.2- Structure d’un projet/librairie

L’intérêt de cette partie est de présenter la structure à respecter pour développer un modèle de procédé physique sous EcosimPro. Par ce biais, les librairies et les différents composants utilisés lors des projets réalisés y sont également explicités. Une fois le développement de modèle décrit, la procédure de simulation et les outils de visualisation des données sont présentés.

5.2.1- La Structure d’une librairie

L’élaboration d’un modèle implique de créer une librairie dans le « Workspace », dont le nom est représentatif du projet (CRYO_LHC ou ESSAI_BAT163 dans le cas présent). Dans l’espace de travail, les librairies CRYO_CERN et PLC doivent y être intégrées car ces bibliothèques contiennent la programmation des modèles des différents composants ; par exemple les équipements cryogéniques comme les vannes, les échangeurs thermiques, les turbines (CRYO_CERN) ou les outils de contrôles ou de logique (PLC). Sur la figure ci-dessous, vous pouvez observer l’interface visuelle du logiciel EcosimPro avec le Workspace, la rubrique « Output messages » qui affichent des informations ou l’état d’une compilation, et les différentes vues disponibles : « Code View », « Schematic View » et « Simulation View ». Les applications associées à ces vues sont décrites dans la suite de ce paragraphe.

Figure 33 : Interface Visuelle d'EcosimPro

5.2.1.1- Code View

Cette vue permet, comme son nom l’indique, d’écrire des programmes en langage EL pour développer le modèle des composants cryogéniques (dans notre cas) et de logique (fonctions logiques, opérations, comparaisons, régulateur PID…). Les composants présents dans les librairies CRYO_CERN et PLC ont été développés dans le cadre de la thèse de Benjamin Bradu, ancien élève de l’ESIEE et doctorant au CERN. Au cours des projets menés, diverses modifications de la programmation de ces composants ont été nécessaires pour permettre la résolution de certains problèmes (oscillations vannes, démarrage turbines, état diphasique de l’hélium…). Sur la figure ci-dessous, un exemple de composant est donné, ici le début du programme concernant les échangeurs thermiques (Heat eXchanger : HX communément) :

Figure 34 : Exemple de composant

Dans ce genre de programme, on retrouve plusieurs sections :

· USE

· COMPONENT / END COMPONENT

· PORTS

· DATA

· DECLS

· INIT

· CONTINUOUS

· SEQUENTIAL / END SEQUENTIAL

USE permet de faire appel à l’utilisation d’autres librairies comme la librairie MATH qui permet d’utiliser plusieurs fonctions mathématiques (exponentielles, logarithmes, les puissances…). COMPONENT permet de signaler le début de la description du composant alors que END COMPONENT sa fin. A l’issue de la programmation d’un composant, il est possible d’en générer un symbole qui sera utilisé dans le Schematic. Ce symbole possède des entrées et des sorties, qui peuvent être des entrées/sorties de fluide (physique), ou être des signaux analogiques ou numériques. La définition de ces entrées/sorties se fait dans la rubrique PORTS du programme. Ensuite, les composants ont souvent besoin de connaitre la valeur de certains paramètres entrés lors de l’élaboration du modèle. Ces paramètres sont présents dans la rubrique DATA et une valeur par défaut leurs est assignée. Certaines variables locales au programme sont parfois nécessaires, c’est pourquoi il faut les déclarer dans DECLS. Pour initialiser les paramètres et les variables locales, la rubrique INIT est utilisée. Afin d’exécuter le code du programme, les modes CONTINUOUS ou SEQUENTIAL peuvent alors être sélectionnés.

La section « Code View » permet également la création de partition (Figure 35 : Partition). Cette étape est indispensable avant toute simulation. La partition permet d’assigner certaines variables du système à des conditions aux limites (positions de vanne, paramètres de contrôle).

Figure 35 : Partition

EcosimPro propose automatiquement les variables qui nécessitent d’en déterminer la valeur (conditions aux limites). L’utilisateur doit alors les sélectionner et le logiciel affiche une fenêtre qui récapitule toutes les variables – conditions aux limites (Figure 36 et Figure 37).

Figure 36 : Choix des variables nécessitant des conditions aux limites

Figure 37 : Récapitulation des variables

5.2.1.2- Schematic View

La vue Schematic est celle permettant la représentation du procédé physique que l’on souhaite simuler. Le Schematic est construit à partir de l’interconnexion entre les différents symboles des composants (Figure 38) par « Drag and Drop » (avec la souris).

Figure 38 : Schematic d'un procédé cryogénique

Dans les Schematics, plusieurs types de composants apparaissent, représentés par un code couleur :

· Composants « Volumes » : les tuyaux, les réservoirs, les séparateurs de phase, les adsorbers (filtres composés de charbon actif permettant d’éliminer des impuretés pouvant être présent dans le fluide). Composants de couleur jaune dominante. Pour ces composants, le volume n’est pas négligeable ce qui impose une certaine pression. Les débits d’entrées/sorties de ces composants sont des conditions aux limites.

· Composants « Débits » : les vannes, les turbines, les compresseurs. Composants de couleur bleue dominante. Pour ces composants, le volume est négligeable et le débit est imposé. Les pressions d’entrées/sorties sont des conditions aux limites.

· Composants « Hybrides » : les échangeurs thermiques qui sont composés d’éléments de volume et de débit.

· Composants « UNICOS » sont généralement les capteurs et les signaux de contrôle électriques (AI/AO/DI/DO, PID, ANALOG).

Lors de la construction du Schematic, plusieurs points demandent une attention particulière, notamment au niveau de la consistance entre les composants (Figure 39 en anglais). Entre deux éléments de débit, un composant de volume est indispensable pour fixer la pression.

Figure 39 : Consistance et Inconsistance

Ensuite, il faut veiller à placer un mixer lorsque plusieurs flux de fluide convergent vers un même point de l’installation. Ce composant mixer est essentiel du point de vue du calcul numérique car il permet d’éviter une division par zéro. En effet, lors du calcul de l’équilibre énergétique, l’enthalpie issue de la convergence des flux d’hélium doit être calculée comme ceci :

Or, si l’installation est arrêtée, alors il n’y a pas de débit d’où la division par zéro. C’est la raison pour laquelle, dans le modèle du mixer, un epsilon très petit (1.10-8) fait son apparition dans ce calcul :

Enfin, les paramètres (DATA) de tous les composants doivent être renseignés dans le schematic selon les différents calculs expliqués dans la partie 5.3- Etudes préliminaires.

Une fois les composants physiques intégrés dans le schematic, la logique de contrôle issue des programmes automates doit être implémentée pour assurer le passage en régulation des contrôleurs en fonction des bonnes conditions (température, pression, sortie régulateur, position vannes) ou obtenir les positions correctes des vannes.

5.2.1.3- Simulation View

La vue « Simulation » permet de créer une expérience à partir d’une partition générée pour un schematic donné (Figure 40). Une expérience correspond à une procédure de simulation dans laquelle figure la valeur des conditions aux limites et l’enchainement des évènements chronologiques : ouverture de vannes, passage en régulation des contrôleurs, démarrage des turbines… Cette procédure doit respecter les séquences (principalement de démarrage) présentes dans le programme automates (Unity).

Figure 40 : Création d'une expérience

Le fichier d’expérience est composé de différentes sections :

· DECLS

· INIT

· BOUNDS

· BODY

La partie DECLS permet de déclarer des variables locales à l’expérience. Généralement ces variables correspondent à des temps, où des évènements auront lieu comme les démarrages des turbines ou l’ouverture de certaines vannes par exemple. La catégorie INIT permet l’initialisation de variables s’il cela s’avère nécessaire. La partie BOUNDS permet de fixer les conditions aux limites. Enfin, la fin de l’expérience, le BODY, regroupe toutes les informations que l’on souhaite sauvegarder via les REPORT_TABLE, tous les évènements générés pour des temps précis, la valeur du pas d’intégration (CINT) ainsi que la sauvegarde d’état du modèle pour reprendre une simulation postérieure à partir de cet état enregistré (Figure 41).

Figure 41 : Expérience

Une fois la procédure de simulation achevée, l’exécution de la simulation peut avoir lieu et le « Monitor » s’ouvre alors dans une nouvelle fenêtre : Figure 42. Cette interface se décompose en trois parties. Une première partie permet de créer des graphiques représentant l’évolution des variables choisies (l’ouverture d’une vanne, une température à un point donné, la consigne d’un régulateur…). Cette partie peut posséder plusieurs onglets qu’il est possible de nommer et chaque onglet peut avoir plusieurs graphiques. Grâce à ces graphiques, l’analyse du comportement du procédé permet d’apporter les corrections nécessaires pour correspondre au plus proche au comportement du procédé réel. D’ailleurs la correspondance entre procédé simulé et données constructeurs ou procédé réel est analysée à l’aide de l’exploitation des données sous Matlab. EcosimPro permet d’enregistrer les valeurs des variables à chaque pas d’intégration (report_table). Au CERN et pour le LHC tout particulièrement, les données des installations automatisées sont archivées dans des bases de données. Une application JAVA, appelée TIMBER, permet aux utilisateurs du CERN de récupérer ces données dans des tables EXCEL, graphiquement ou simplement obtenir quelques données statistiques (valeurs minimale et maximale, valeur moyenne). Sous Matlab, la comparaison des dynamiques du procédé simulé et du procédé réel (ou données constructeurs) est réalisée pour valider le modèle. Pour les boites froides, l’évolution des températures permet de se rendre compte de la dynamique. Le temps nécessaire pour liquéfier l’hélium lors d’un démarrage à température ambiante est une donnée importante pour valider le modèle.

Figure 42 : EcosimPro Monitor

Sur la droite de la fenêtre « Watch variables », l’affichage de variables sélectionnées permet d’observer leur valeur à chaque pas d’intégration. En bas du monitor, la section « Output messages » affiche les différents pas d’intégration effectués (permet de se rendre compte de la vitesse de calcul de la simulatio