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Université Panthéon-Sorbonne – Paris I UFR de Géographie École doctorale de Géographie de Paris N° attribué par la bibliothèque . . . . . . . . . . . THESE présentée pour obtenir le grade de DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE PARIS I Discipline : Géographie – Option : Géomatique par Aurélie THÉNOT Modèles de données pour l’appréhension et la gestion des risques à Nouakchott (Mauritanie) Une capitale contre vents et marées Sous la direction de Marie-Françoise COUREL Soutenue publiquement le 14/12/2007, devant le jury composé de : Michèle BÉGUIN, Maître de conférences à l’Université de Paris I. Marc BUI, Professeur à l’Université de Paris VIII. Marie-Françoise COUREL, Directrice d’études à l’EPHE. Thierry JOLIVEAU, Professeur à l’Université de Saint-Étienne. Marc LEOBET, Chargé de mission "Systèmes d’information" à la DPPR, MEDAD. Menny OULD EL BAH, Professeur à l’Université de Nouakchott.

Modèles de données pour l'appréhension et la gestion des risques

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  • Universit Panthon-Sorbonne Paris I UFR de Gographie

    cole doctorale de Gographie de Paris

    N attribu par la bibliothque . . . . . . . . . . .

    THESE

    prsente pour obtenir le grade de

    DOCTEUR DE LUNIVERSIT DE PARIS I

    Discipline : Gographie Option : Gomatique

    par Aurlie THNOT

    Modles de donnes pour lapprhension

    et la gestion des risques Nouakchott (Mauritanie)

    Une capitale contre vents et mares

    Sous la direction de Marie-Franoise COUREL

    Soutenue publiquement le 14/12/2007, devant le jury compos de : Michle BGUIN, Matre de confrences lUniversit de Paris I. Marc BUI, Professeur lUniversit de Paris VIII. Marie-Franoise COUREL, Directrice dtudes lEPHE. Thierry JOLIVEAU, Professeur lUniversit de Saint-tienne. Marc LEOBET, Charg de mission "Systmes dinformation" la DPPR, MEDAD. Menny OULD EL BAH, Professeur lUniversit de Nouakchott.

  • THESE

    prsente pour obtenir le grade deDOCTEUR DE LUNIVERSIT DE PARIS I

    Discipline : Gographie Option : Gomatique

    parAurlie THNOT

    Modles de donnes pour lapprhensionet la gestion des risques Nouakchott (Mauritanie)

    Une capitale contre vents et mares

    Sous la direction de Marie-Franoise COUREL

  • Remerciements

    Remerciements

    La rflexion et lcriture sont des plaisirs solitaires quon a loccasion dexprimenter au cours des quelques annes de gestation dune thse. Quand enfin est venu le temps de la reconnaissance, dordinaire aprs une traverse du dsert plus ou moins douloureuse, il reste encore remercier toutes celles et ceux qui, de prs ou de loin, ont contribu faire de cette aventure une victoire sur soi et une dmonstration des ressorts du collectif. Leur soutien et leur confiance ont t dterminants.

    Merci donc Marie-Franoise Courel pour sa patience et son impatience, Michle Bguin pour ses encouragements et sa sollicitude, Philippe Chamard pour son sens de la formule, Jean-Franois Cuenot pour son enthousiasme et son habilet manier ArcGis, Franoise Duraffour pour ses modles, Thierry Husberg pour sa disponibilit, liane Leterrier et Jeannine Le Rhun pour leurs conseils, Frdric Og pour son expertise, aux autres Prodig(es) que jai connus au dtour dun couloir ou au fond dun amphithtre.

    Merci Menny Ould El Bah et tous les partenaires du projet Corus, professeurs de lUniversit de Nouakchott et responsables administratifs, qui ont gnreusement mis en commun leurs connaissances du terrain. Merci ceux qui ont nourri mes rflexions, en particulier Thierno Ba, El Houssein Ben Ahmed El Hady, Yslem Ould Bahada, Guillaume Boehrer, Christophe Breuil, Marjorie Chopin, Philippe Colucci, Bndicte Deschamps, Isakha Diagana, Amadou Diaw, Nalla Gaye, Jade Goris-Creuseveau, Jean-Marie Guichaoua, Abdul Guiss, Franois Kieffer, Sidi Mohamed Lemine, Khalidou Lo, Frdric Marret, Zeinebou Mint Mahjoub, Mohamed Nouh Mouhidine, Sidi Ould Ahmed Chein, Brahim Ould Mohamed Ould Amar, Mohamed Abdallahi Ould Babah, Ata Seck, Mohamed Ould Sidi Ould Ely, Mohamed Lebeid Ould Sidaty, Ahmed Ould Taleb Mohamed, Mohamed Yehdhi Ould Tolba, Yahya Mohamed Sabbar, Yoann Sablon, El Hadj Bocar Lamine Sakho, Mahfoudh Sidi Lemine, Madyoury Tandia, Seydina Aly Tounkara. Milles excuses ceux que jaurais oublis.

    Merci Armelle Choplin, Riccardo Ciavolella, Cline Lesourd, Aurore Mansion, Robert Madjigoto, Nader Abou Dagga et Chlo Buire pour ces moments, tantt insouciants, tantt angoissants, de vie partags. Merci Jennifer Buck pour son inestimable matrise de la langue de Shakespeare.

    Merci ceux qui, dans lombre, mont constamment soutenue et supporte (dans tous les sens du terme), ont veills sur moi depuis toujours ou presque. Merci Ludovic davoir t l, pour le meilleur et surtout pour le pire.

    Enfin, merci aux vendeurs de cartes tlphoniques de Nouakchott, au snack Irak et au caf Clopatra, aux ths la menthe.

    Aux destins croiss, en Mauritanie et ailleurs

    I

  • Organisation de la thse et conventions

    Organisation de la thse et conventions

    Les analyses et annexes sont prsentes dans un volume commun. Un Cd-rom contenant les donnes gographiques manipules et les mtadonnes associes est confi au laboratoire Ple de Recherche pour lOrganisation et la Diffusion de lInformation Gographique (Prodig) auquel nous sommes rattachs. Des encarts prcisent, ici et l, des points de mthodologie ou illustrent nos propos partir dexemples tirs douvrages, de rapports, denqutes personnelles.

    Documents et renvois

    Les tableaux sont intituls Tab., les schmas, cartes et figures diverses Fig., les planches photographiques Planche, les annexes Annexe.

    La numrotation de ces pices est rinitialise pour chaque chapitre, prcde sauf pour lintroduction et la conclusion du numro du chapitre en chiffres romains. Par exemple, [cf. Fig. II-3] renvoie la figure n3 du deuxime chapitre, [cf. Tab. IV-5] au tableau n5 du quatrime chapitre, [cf. Planche 1 b] au clich b de la planche photographique n1.

    Les renvois sont systmatiquement signals entre crochets et prcds de la locution latine confer (cf.) : par exemple, [cf. Chapitre 2] si lon se rfre une partie de lanalyse, [cf. Fig. III-2] sil sagit dune figure dans le texte.

    Les rfrences entre parenthses renvoient aux auteurs cits dans la bibliographie, aux interlocuteurs rencontrs sur le terrain [cf. Tab. II-1] ou aux partenaires du projet [cf. Tab. VI-66]. Les articles de journaux et archives de presse sont galement signals entre parenthses mais en italique, suivis de leur date de publication.

    II

  • Organisation de la thse et conventions

    Choix typographiques et abrviations

    Les annes apparaissent en chiffres arabes (1980) et les sicles en chiffres romains (XXe sicle). Les dcennies sont abrges (annes 70).

    En gnral, les sigles seront composs en majuscules sans points abrviatifs ni espaces entre les lettres (PDU : Programme de Dveloppement Urbain). Cependant, lorsquun sigle se prononce aisment (acronyme), nous le composerons comme un nom propre (Onu : Organisation des Nations Unies), lexception des acronymes ayant une quivalence en franais courant (AMI : Agence Mauritanienne dInformation ; OSA : Observatoire de la Scurit Alimentaire). Lors de son premier emploi, la signification du sigle ou de lacronyme sera spcifie. Un index des sigles et acronymes les rcapitule en dbut douvrage.

    Terminologie

    En dehors des noms de lieux, les termes hassaniyya, haalpulaar et wolof sont transcris en italique (bdiyya, piy, etc.) ; les locutions latines galement.

    III

  • Sigles et acronymes

    Sigles et acronymes

    A AAAS : American Association for the Advencement of Science ACCC : Adaptation aux Changements Climatiques et Ctiers en Afrique de lOuest ADCR : Asian Disaster Reduction Center Adu : Agence de Dveloppement Urbain Afarco : AFrican ARabic bank COmpany AFD : Agence Franaise de Dveloppement Afigo : Association Franaise pour lInformation GOgraphique AFSHP : Association Fminine pour la Salubrit et lHygine Publique Amextipe : Agence Mauritanienne d'Excution des Travaux d'Intrt Public pour l'Emploi AMI : Agence Mauritanienne dInformation AMPF : Association Mauritanienne pour la Promotion de la Famille AOF : Afrique Occidentale Franaise Asecna : Agence pour la SCurit de la Navigation Arienne en Afrique et Madagascar Aster : Advanced Spaceborne Thermal Emission and reflection Radiometer

    B BAD : Banque Africaine de Dveloppement BGS : British Geological Survey BMCI : Banque Mauritanienne pour le Commerce International BRGM : Bureau de Recherches Gologiques et Minires BSA : Bouamatou Socit Anonyme

    C Campus : Coopration avec lAfrique et Madagascar pour la Promotion Universitaire et Scientifique CCRS : Canadian Center of Remote Sensing CDHLCPI : Commissariat aux Droits de lHomme, la Lutte Contre la Pauvret et lInsertion Cedeao : Communaut conomique des tats de lAfrique de lOuest Cedre : CEntre de Documentation, de Recherche et dExprimentations sur les pollutions accidentelle des eaux CET : Centre dEnfouissement Technique CHN : Centre Hospitalier National CHRR : Center for Hazards and Risk Research CIAO : Catalogue dInformation pour lAfrique de lOuest CIEH : Comit Interafricain dtudes Hydrauliques Cilss : Comit permanent Inter-tats de Lutte contre la Scheresse dans le Sahel Cimdet : Centre dInformation Mauritanien pour le Dveloppement conomique et Technique Cirad : Centre de coopration Internationale en Recherche Agronomique pour le DveloppementClaa : Centre de Lutte AntiAcridienne Cnarsa : Comit National dAlerte Rapide et de Scurit Alimentaire Cnerv : Centre National de llevage et des Recherches Vtrinaires CNH : Centre National dHygine Cnig : Conseil National de lInformation Gographique CNORF : Centre National dOrthopdie et de Radaptation Fonctionnelle CNRE : Centre National des Ressources en Eau

    V

  • Sigles et acronymes

    CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique Comaturs : COmpagnie MAuritanienne pour les Travaux publics et la Salubrit Corpen : Comit dORientation pour des Pratiques agricoles respectueuses de lENvironnement Corus : COopration pour la Recherche Universitaire et Scientifique Cred : Center for Research on the Epidemiology of Disasters CSA : Commissariat la Scurit Alimentaire

    CSE : Centre de Suivi cologique CSVP : Commissariat Spcial de la Voie Publique Cun : Communaut Urbaine de Nouakchott

    D Datar : Dlgation lAmnagement du Territoire et lAction Rgionale DBHU : Direction des Btiments, de lHabitat et de lUrbanisme Dea : Direction de llevage et de lAgriculture DEAR : Direction de lEnvironnement et de lAmnagement Rural DFO : Dartmouth Flood Observatory DHU : Direction de lHabitat et de lUrbanisme DPS : Direction de la Protection Sanitaire DRPSS : Dlgation Rgionale la Promotion Sanitaire et Sociale

    E digo : changes de Donnes informatises dans le domaine de lInformation GOgraphique EGB : Entreprise Gnrale de Btiment EM-DAT : EMergency events - DATabase Enso : El Nio Southern Oscillation ERS : European Remote Sensing Satellite Esmap : Energy Sector Management Assistance Program Esri : Environmental Systems Research Institute

    F FAO : Food and Agriculture Organization FEM : Fonds pour lEnvironnement MondialFema : United States Federal Emergency Management Agency Fiba : Fondation Internationale du Banc dArguin FNRS : Fonds National Suisse de Recherches Scientifiques FNT : Fdration Nationale des Transporteurs de Mauritanie FST : Facult des Sciences et Techniques

    G GIE : Groupement d'Intrt conomique Glide : Global IDEntifier number Gom : Gestion des Ordures Mnagres GPS : Global Positioning System GRDR : Groupe de Recherche et de ralisations pour le Dveloppement Rural Gresarc : Groupe de Recherche sur les Environnements Sdimentaires Amnags et les Risques Ctiers Gret : Groupe de Recherche et dchanges Technologiques

    GSMO : Groupement de Scurit et de Maintien de lOrdre GTZ : Deutsche Gesellschaft fr Technische Zusammenarbeit

    H HKD : Hadya Kaou Diagana

    I Ida : International Development Association IFRC : International Federation of Red Cross and Red Crescent societies IGN : Institut Gographique National Imrop : Institut Mauritanien de Recherches Ocanographiques et des Pches Ineris : Institut National de l'Environnement industriel et des RISques INSPIRE : INfrastructure for SPacial InfoRmation in Europe IPCC : Intergovernmental Panel on Climate Change IRC : Indice de Risque de Catastrophe ISBN : International Standard Book Number ISO : International Organization for Standardization ISSN : International Standard Serial Number Isted : Institut des Sciences et Techniques de lquipement et de lEnvironnement pour le Dveloppement IUCN : International Union for Conservation of Nature and natural resources

    M Maed : Ministre des Affaires conomiques et du Dveloppement Magicc : Model for the Assessment of Greenhouse-gas Induced Climate Change Mapeci : MAuritanienne de Presse et ddition, de Communication et dImpression Mauritel : MAURItanienne de TLcommunications MCD : Modle Conceptuel des Donnes MDRE : Ministre du Dveloppement Rural et de lEnvironnement MEC : Mauritania Engineering Consultants Merise : Mthode dtude de Ralisation Informatique par Sous-Ensemble MHE : Ministre de lHydraulique et de lnergie MIPT : Ministre de lIntrieur, des Postes et Tlcommunications MLD : Modle Logique des Donnes MMI : Ministre des Mines et de lIndustri MNT : Modle Numrique de Terrain Modis : MODerate-resolution Imaging Spectroradiometer Mothy : Modle Ocanique de Transport dHYdrocarbures MPD : Modle Physique des Donnes MPEM : Ministre de la Pche et de lconomie Maritime MSAS : Ministre de la Sant et des Affaires Sociales MSR : Maternit Sans Risque

    N Nasa : National Aeronautics and Space Administration

    VI

  • Sigles et acronymes

    NDVI : Normalized Difference Vegetation Index Nepad : NEw Partnership for Africas Development Noaa : National Oceanic and Atmospheric Administration NTIC : Nouvelles Technologies de lInformation et des Communications Ntipo : Numrisation et Traitement Informatis des Publications Officielles

    O OCDE : Organisation de Coopration et de Dveloppement conomiques Ocha : United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs Oclalav : Organisation Commune de Lutte Antiacridienne et anti-AViaire Ofda : Office of US Foreign Disaster Assistance OFSS : Office Fdral de la Statistique Suisse OIE : Office International de lEau OLM : Observatoire du Littoral Mauritanien OMM : Organisation Mtorologique Mondiale OMS : Organisation Mondiale de la Sant OMVS : Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sngal ONG : Organisation Non Gouvernementale ONS : Office National de la Statistique Onu : Organisation des Nations Unies Orstom : Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-Mer OSA : Observatoire de la Scurit Alimentaire OSS : Observatoire du Sahara et du Sahel Otan : Organisation du Trait de lAtlantique Nord

    P Palm : Plan dAmnagement du Littoral Mauritanien Pam : Programme Alimentaire Mondial PAN : Port Autonome de Nouakchott Panapress : Agence PANAfricaine de PRESSe Pane : Plan dAction National pour lEnvironnement et le dveloppement durable PANLCD : Programme dAction National de Lutte Contre la Dsertification PDSAS : Plan Directeur de la Sant et des Affaires Sociales PDU : Programme de Dveloppement Urbain PED : Pays En Dveloppement Pib : Produit Intrieur Brut Plemvasp : Projet de Lutte contre l'Ensablement et de Mise en Valeur Agro-Sylvo-Pastorale PMLCD : Plan Mauritanie de Lutte Contre la Dsertification PND : Parc National du Diawling Pnud : Programme des Nations Unies pour le Dveloppement Polmar : POLlution MARitime PRCM : Programme Rgional de Conservation de la zone Ctire et Marine en Afrique de lOuest Prodig : Ple de Recherche pour l'Organisation et la Diffusion de l'Information Gographique

    R Ranvec : Recensement Administratif National Vocation dtat Civil

    RGPH : Recensement Gnral de la Population et de lHabitat Rim : Rpublique Islamique de Mauritanie Roselt : Rseau dObservatoires de Surveillance cologique Long Terme RSO : Radar Synthse dOuverture

    S Safege : Socit Anonyme Franaise d'tudes et de GEstion Sam : Socit des Aroports de Mauritanie San : Socit des Abattoirs de Nouakchott Sapeint : Socit Africaine des PEINTures Scac : Service de Coopration et dAction Culturelle Sdau : Schma Directeur dAmnagement Urbain SFPT : Socit Franaise de Photogrammtrie et de Tldtection SGBD : Systme de Gestion de Base de Donnes Shom : Service Hydrographique et Ocanographique de la Marine SIE : Systme dInformation Environnemental Sig : Systme dInformation Gographique Sige : Systme dInformation et de Gestion Environnementale SIGM : Systme dInformation Gologique et Minier Sippe : Systme dInventaire et de Programmation des Points dEau Sipsa : Systme dInformation pour le Pastoralisme au SAhel SMCI : Socit Mauritanienne pour le Commerce et lIndustrie SMSI : Sommet Mondial sur la Socit de lInformation Smuh : Secrtariat des Missions dUrbanisme et dHabitat SNDE : Socit Nationale de Distribution de lEau Snis : Service National dInformations Sanitaires SNLCP : Stratgie Nationale de Lutte Contre la Pauvret Soboma : SOcit des Boissons de MAuritanie Socogim : SOcit de COnstruction et de Gestion Immobilire de la Mauritanie Sogreah : SOcit GRenobloise d'tudes et d'Applications Hydrauliques Somagaz : SOcit MAuritanienne de GAZ Sonader : SOcit NAtionale de Dveloppement Rural Sonelec : SOcit Nationale dEau et dLECtricit Spot :Satellite Pour l'Observation de la Terre SRTM : Shuttle Radar Topography Mission SSPA : Systme de Suivi de la Pche Artisanale

    T TEQ : Toxic Equivalent Quantity

    U UE : Union Europenne UM : Ouguiya UMR : Unit Mixte de Recherche Undro : United Nations Disaster Relief co-Ordinator Unep : United Nations Environment Programme Unesco : United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization UNFPA : United Nations Population Fund UNHCR : United Nations High Commissioner for Refugees Unicef : United Nations Childrens Fund

    VII

  • Sigles et acronymes

    Unido : United Nations Industrial Development Organization Usaid : United States Agency for International Development USGS : US Geological Survey UTM : Universal Transverse Mercator

    V VRD : Voirie et Rseaux Divers

    W WALTPS : West Africa Long-Term Perspective Study WCED : World Commission on Environment and Development WGS : World Geodetic System

    VIII

  • Sommaire

    Sommaire

    PROLOGUE ...................................................................................................................................................1

    INTRODUCTION GNRALE..........................................................................................................................7

    PREMIERE PARTIE MTHODES ET OUTILS .............................................................................16

    CHAPITRE 1 FONDEMENTS OPRATOIRES ET MODLES ASSOCIS .......................................................18

    I UNE ANALYSE INTGRE ........................................................................................................................19

    II LE DVELOPPEMENT DUN MODLE DE DONNES ..................................................................................37

    CHAPITRE 2 COMMUNICATION DES RSULTATS ....................................................................................64

    I DE LINFORMATION GOGRAPHIQUE LA CARTE ...................................................................................65

    II LE SYSTME DINFORMATION................................................................................................................85

    DEUXIEME PARTIE GOGRAPHIES NOUAKCHOTTOISES.................................................104

    CHAPITRE 3 RALITS NOUAKCHOTTOISES ........................................................................................106

    I RALITS PHYSIQUES : UN ESPACE LITTORAL FRAGILE.........................................................................107

    II RALITS HUMAINES : LES FORMES DE CONCENTRATION HUMAINE ....................................................121

    CHAPITRE 4 MENACES NATURELLES : LEAU ET LE SABLE .................................................................160

    I INONDATIONS .......................................................................................................................................161

    II ENSABLEMENT : LE DSERT DANS LA VILLE (VERNET, 1994 : 31) .................................................196

    X

  • CHAPITRE 5 LES POLLUTIONS ET LA SANT ........................................................................................ 219

    I POLLUTIONS......................................................................................................................................... 220

    II LA SANT DES HOMMES ...................................................................................................................... 256

    TROISIEME PARTIE DONNES ET PERSPECTIVES .............................................................. 293

    CHAPITRE 6 MMOIRE INFORMATIONNELLE...................................................................................... 295

    I GESTION DE LA MATRICE DINFORMATION SPATIALE : UNE SPIRALE PROGRESSIVE ET CONTINUE DINFORMATION ET DE CONNAISSANCE (GOUROU, 1972 : 136).............................................................. 296

    II QUALIT DES DONNES ET VALIDATION DES RSULTATS .................................................................... 351

    CHAPITRE 7 PERSPECTIVES ET PROSPECTIVE POLITIQUES ET ORGANISATIONNELLES ..................... 385

    I COMPOSANTES SOCIO-HISTORIQUES DU RISQUE ET DE LA VULNRABILIT .......................................... 386

    II LA GESTION DES RISQUES, CHAMP NOUVEAU DEXPRIMENTATION DUN DVELOPPEMENT DURABLE NOUAKCHOTT ........................................................................................................................................... 398

    CONCLUSION GNRALE ......................................................................................................................... 420

    XI

  • Prologue

    Prologue Petit glossaire de cindynique

    En parcourant la littrature traitant de cindynique (du grec : kindunos, danger), la richesse

    terminologique dploye par les auteurs interpelle. Certes, la matire est riche et complexe.

    Mais pour viter que ne sinstallent dambiguts et avant que le sujet ne devienne abscons,

    nous prciserons ici quelques concepts fondateurs afin que cette complexit notionnelle du

    risque et des dangers encourus (celle dnonce par J. Dubois-Maury) ninterfre pas dans notre

    argumentation.

    Si le risque n'existe qu'en fonction d'enjeux, i. e. d'lments (patrimoniaux, humains,

    conomiques, fonctionnels, identitaires, territoriaux, politiques) ou de ressources sous la menace

    d'alas de nature varie, il sinscrit surtout dans le contexte dune certaine forme

    dorganisation des socits (Arreghini et Mazurek, 2004 : 243). Selon le Ministre de

    lEnvironnement et du Dveloppement et de lAmnagement Durable franais, la notion

    denjeu recouvre les personnes, biens, activits, moyens, patrimoines susceptibles dtre

    affects par un phnomne naturel. Une terminologie diffrente est adopte par lUnited Nations

    Disaster Relief co-Ordinator (Undro) pour qui les populations ou lments risque ont une

    dfinition voisine de celle des enjeux et le champ dapplication embrasse les risques naturels,

    anthropiques, sanitaires, etc. Toutefois, ce diffrend terminologique est drisoire au regard de ce

    quimplique lenjeu ou llment risque : lun comme lautre suppose en effet que soient

    valus objectivement, quantitativement et financirement les patrimoines, les activits Cest

    1

  • Prologue

    typiquement ce quexige une socit dassurances au moment de garantir un bien : une

    estimation du volume financier que reprsente la perte dusage, partielle ou totale, du bien. Dans

    le contexte mauritanien, a fortiori nouakchottois, linformation relative la valeur des biens est

    peu diffuse et le recours aux socits dassurances encore assez peu rpandu en dehors des

    entreprises denvergure internationale ou dont lactivit (bancaire par exemple) lexige ; les

    vhicules des particuliers, ainsi, sont rarement assurs.

    L'ala on parle aussi de processus ou facteur physique d'endommagement est la

    probabilit d'occurrence, dans un lieu et au cours d'une priode dfinie, d'un phnomne

    d'intensit donne pouvant engendrer des dommages : il peut s'agir d'un processus naturel,

    technologique, social, conomique ou politique. Plusieurs alas peuvent tre invoqus pour

    expliquer la survenue d'un risque. Dans l'ouvrage sur les risques qu'elle dirige, Y. Veyret

    propose une typologie [cf. Fig. 1] du risque selon l'ala (Veyret, 2003). La vulnrabilit

    reprsente la sensibilit d'un territoire ou d'une socit l'endommagement. Elle rvle la

    fragilit d'un systme dans son ensemble et sa capacit surmonter la crise provoque par un

    ala (Dauphin, 2003) ou encore exprime le niveau de consquences prvisibles d'un

    phnomne naturel sur les enjeux (ibid.). Elle est articule autour d'une multitude de critres

    (directs ou indirects) physiques, environnementaux, techniques, fonctionnels, conjoncturels,

    organisationnels, institutionnels, culturels1, des donnes socioconomiques2,

    psychosociologiques, politico-administratives, etc. Son valuation reste souvent qualitative : on

    l'estime en fonction des dommages potentiels pouvant affecter un enjeu tel que le patrimoine

    construit ou la population. Rduire la vulnrabilit d'un systme, c'est diminuer les effets

    possibles et la dure de la crise par la connaissance des processus et la mise en place

    damnagements adapts. Ainsi le Commissariat la Scurit Alimentaire (CSA) en Mauritanie

    dfinit-il la vulnrabilit alimentaire comme la difficult pour une population dvelopper

    une stratgie dadaptation face une situation de risque [i. e. une rduction de son potentiel

    conomique souvent] mettant en pril sa scurit alimentaire (CSA, 2002). Propices aux

    pertes et rgissant la capacit de rponse sociale une crise, trois catgories de facteurs fondent

    la vulnrabilit individuelle et collective [cf. Annexe 1]. Les premiers sont structurels : (1)

    sociodmographiques et conomiques, ils dfinissent la structure et la mobilit des populations

    exposes, les causes d'ingalit et d'instabilit sociales ; (2) socioculturels, ils sous-tendent le

    comportement individuel et collectif devant la catastrophe ; (3) physiques, fonctionnels et

    techniques, ils analysent la qualit du bti et des infrastructures, le rseau et la qualit

    1 Il s'agit notamment des choix fondamentaux concernant les formes de peuplement et les ractions face au risque. 2 Les facteurs socioconomiques augmentent souvent la vulnrabilit des populations menaces. Sil faut voquer le degr d'acceptation du risque fonction du niveau de connaissance, conomique ou de l'ducation , l'absence ou l'existence d'une sensibilisation aux risques et de prparation la crise, il nen est pas moins justifi de reconnatre le poids du tissu social du quartier, de la structure par ge et l'tat sanitaire de la population, de l'accessibilit de la zone (prsence de rseaux de communication, tlphonique et d'informations) dans la construction de la vulnrabilit.

    2

  • TYPE DE RISQUE ALEA REMARQUES

    ENVIRONNEMENTAL

    RISQUE NATUREL

    RISQUE NATUREL AGGRAVE OUPROVOQUE PAR LES ACTIVITESHUMAINES

    SISMIQUE

    GESTION DES RESSOURCES

    RISQUE AGRICOLE

    PRISE DE RISQUE DESENTREPRISES

    RISQUE SOCIAL ETINSECURITE

    VOLCANIQUE

    CLIMATIQUE

    RISQUE ET SANTE

    POLLUTION

    RISQUEALIMENTAIRE

    DROGUE

    RISQUEINDUSTRIELMAJEUR

    EXPLOSION

    FUITE de produittoxique

    INCENDIE

    INDUSTRIEL ETTECHNOLOGIQUE

    ECONOMIQUE,GEOPOLITIQUE

    ET SOCIAL

    Dans de nombreux PED, les effets de ces processus sontdmultiplis par la faiblesse des infrastructures et unepolitique prventive insuffisante.

    Associ l'inscurit alimentaire, ce risque est souventtrait par des parades officielles manant d'organismesinternationaux (aide d'urgence).

    L'conomie est devenue largement dpendante de la"puissance de l'immdiat" (une conomie de spcula-teurs).

    La probabilit d'un tel vnement, li au dysfonctionne-ment d'un systme technique complexe et dont les con-squences sont d'une ampleur considrable, restesouvent difficile dlimiter prcisment dans l'espace etle temps.

    Cas des cyclones, des scheresses rcurrentes, destemptes, des avalanches, etc.

    Cas de la dsertification, des incendies, des pollutions,etc.

    Cas de la qualit des produits consomms, de l'insuffi-sance alimentaire, etc. Cas de la propagation du virus du sida au sein de lapopulation des toxicomanes, etc.

    Le taux de criminalit est un indicateur de la violenceurbaine.

    L'extension urbaine non contrle, la gestion insuffisantedes eaux uses et de pluie sont des facteurs de risque.

    Cas des ressources ptrolires, en eau, etc.

    D'aprs [Veyret, 2003]

    Fig. 1 : Typologie des risques (Veyret, 2003)

    Fig. 2 : Diagramme probabilit-ampleur en Suisse (OFSS, 1996)D

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    NTRE

    PRISE

    LE RISQUE N'EST PAS ACCEPTABLE

    SI LE DOMMAGE POSSIBLE SE SITUE DANS CETTE ZONE,ON PEUT RENONCER UNE TUDE DE RISQUE

    PROBABILIT D'OCCURRENCE10-6 = un accident majeur en un million d'annes

    AMPLEUR DES DOMMAGESRSULTANT D'ACCIDENTS MAJEURS D'

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    122

    -125

    ]

    Prologue

    3

  • Prologue

    oprationnelle des organismes chargs de la prvention et de la protection civile ; (4)

    institutionnels3 et politico-administratifs, ils dcrivent les appareils lgislatif et rglementaire,

    les rouages administratifs de prvention et de gestion des risques. Les seconds sont

    gographiques et conjoncturels : ils tiennent compte des paramtres spatio-temporels de l'impact

    du risque et des caractristiques de la catastrophe. Les derniers, conjoncturels ou contingents,

    sont lis des dysfonctionnements temporaires et imprvisibles. C'est donc bien en dehors de la

    sphre des risques majeurs que sont chercher les fondements de la vulnrabilit. La rsilience,

    enfin, reprsente la capacit d'un systme s'adapter aux changements conscutifs une crise et

    amliorer sa capacit de rponse dans la perspective de catastrophes futures. Et lorsque la

    manifestation catastrophique () dpasse () la capacit de rponse dune socit sinistre,

    elle se traduit habituellement par une crise temporelle, une perturbation socioconomique et une

    dvastation spatiale (Thouret et DErcole, 1996 : 408)...

    Le risque est plus que le simple produit dun ala et dune vulnrabilit. Au-del de la

    complexit des concepts, les dimensions conomiques et sociales ne doivent tre occultes. Il

    n'est pas de relations simples entre lala et le risque et pas forcment de corrlation entre

    l'importance d'un ala et celle des dommages gnrs. Matrialis par un endommagement

    effectif, le risque est une probabilit d'occurrence de dommages ou encore lincertitude

    objectivement probabilise (Godard et al., 2002 : 13) qui dcoule non d'une rencontre

    fortuite entre la nature et le peuplement, mais est le rsultat d'au moins une interaction, au

    moment mme o il se produit, entre des processus physiques d'endommagement [i. e. des

    alas] et des lments de vulnrabilit les plus favorables cet endommagement (Pigeon et

    al., 1998). Au sens analytique, le risque encouru nat de la conjonction d'un ala et d'enjeux

    divers, affects d'une certaine valeur (conomique, patrimoniale, esthtique, affective,

    stratgique, environnementale) et d'une certaine vulnrabilit. Il est prvisible si l'ala met

    des signes prcurseurs ou en raison de la rptitivit du processus. Potentiellement dangereux, il

    doit tre intgr aux choix de gestion, aux politiques d'amnagement des territoires, aux

    pratiques conomiques. Il convient enfin de distinguer le risque de la catastrophe. Sil a un lien

    intime avec celle-ci, le risque ne peut tre rduit la catastrophe : tous les risques [en effet] ne

    se transforment pas en catastrophes, alors mme que toutes les catastrophes naturelles

    prsupposent un risque en amont (ibid.). La catastrophe est une concrtisation du risque en

    tant qu'vnement grave entranant de larges pertes et des dysfonctionnements. Elle se dfinit en

    fonction de l'ampleur des dgts aux personnes et aux biens : selon O. Godard et al., la

    simultanit et la nature des dommages subis joueraient pleinement dans lide de catastrophe

    3 La qualit des facteurs institutionnels est value par l'analyse des textes lgifrant en matire de risque ou de l'impact des textes rglementaires mesur en situation de crise latente et dans l'urgence.

    4

  • Prologue

    (Godard et al., 2002 : 367). La socit qui subit une catastrophe peut, de fait, rarement la

    surmonter avec ses seules ressources propres car cette dernire est souvent gre dans l'urgence.

    Elle est source de perturbations socio-conomiques et cologiques durables si le produit du

    phnomne naturel gnrateur de dommages et de la vulnrabilit des lments exposs dpasse

    un certain seuil de tolrance4 du systme naturel et social. Pour lOffice Fdral de la Statistique

    Suisse (OFSS), cest la fois la probabilit doccurrence dun vnement et lampleur des

    dommages [cf. Fig. 2] qui dterminent, concrtement, lacceptabilit dun risque. Quelle soit

    considre comme une discontinuit brutale et parfois dfinitive (Pguy, 1989) ou comme le

    passage d'un quilibre dynamique un autre, la catastrophe dstabilise les systmes daction

    (Godard et al., 2002 : 221).

    4 Le risque est acceptable quand les dgts sont infrieurs au seuil tolr par une socit d'un niveau de dveloppement donn.

    5

  • Introduction

    Introduction gnrale

    Un littoral, autrefois dsert, devenu centre de gravit stratgique du pays

    Le littoral mauritanien stend sur prs de sept cent cinquante kilomtres, de la presqule du

    Cap Blanc lestuaire du fleuve Sngal. Ce milieu naturellement riche a t, certaines

    poques, propice aux implantations humaines. Il les a vu disparatre, mesure que se

    dgradaient les conditions climatiques. Lorsque la ville de Nouakchott par 1807' de latitude

    nord et 1556' de longitude ouest est cre en 1957, le littoral est encore trs peu mis en

    valeur. Mais les grandes scheresses des annes 70 et 80, lattrait pour la vie citadine et ses

    privilges, vont assez vite bouleverser les traditions : la population sinstalle en masse

    proximit du littoral, sur des territoires urbains et priurbains mal dfinis5 et mal connus, se

    densifiant un peu plus mesure que senchanent les menaces climatiques ou conomiques,

    quclatent des conflits fratricides. Nouakchott ne tarde pas tre dborde, au sens propre

    comme au sens figur : aucune politique navait prvu un tel dferlement humain, ni aucun

    observateur une telle fragilit intrinsque du site.

    Cest la fin du vingtime sicle seulement que lon commence prendre la mesure des

    dangers qui psent sur la cte mauritanienne, en particulier dans les priphries urbaines de

    5 Elle profite de la dsorganisation gestionnaire qui rgne alors.

    7

  • Introduction

    Nouakchott et Nouadhibou. Deux tudes environnementales rcentes (Wu, 2003 ; Abou Dagga,

    2007) tablissent ainsi que, dans la capitale et sa rgion, l'cosystme local subit depuis

    plusieurs dcennies de graves atteintes et que cette tendance ne faiblit pas. Le littoral constitue,

    en effet, une zone d'interface grande vulnrabilit o les activits humaines entrent en

    concurrence avec les deux cosystmes sensibles, marin et terrestre. En 1977, peine 11.7% de

    la population nationale (soit 51.7% des urbains) sont tablis Nouakchott et Nouadhibou, ces

    deux grandes agglomrations situes sur une bande ctire aux sols peu volus. Daprs le

    recensement de lOffice National de la Statistique (ONS), ils seraient 25.1% en 2000 soit

    54.1% des urbains sy tre concentrs. Dautres sources avancent des chiffres plus proches

    dun tiers (IUCN, 2002)6, voire dpassant 35% (MPEM7, 2004).

    Si le taux daccroissement de la population sest considrablement ralenti dans la capitale

    administrative depuis quelques dcennies, la ville est dj presque millionnaire en 2000. Elle se

    construit sans modle ni rgle, sans respect de son environnement. Rsolument tourne vers

    locan aprs lavoir longtemps ignor, elle tire la plupart de ses richesses dactivits

    mdiocrement rglementes dans le domaine de la protection environnementale et pourtant

    potentiellement polluantes : le secteur de la pche dgage des profits considrables dune

    ressource renouvelable... entre autres, directement mise en danger par lexploitation (depuis le

    premier trimestre 2006) des champs ptrolifres offshore source nouvelle et temporaire de

    revenu pour le pays. La forte pression dmographique, lappropriation du sol sans plan

    doccupation, les amnagements littoraux hasardeux, les grands travaux influenant la

    dynamique ctire, les pressions conomiques de plus en plus fortes lies la pche, aux

    activits portuaires et industrielles branlent lquilibre dlicat qui caractrise la rgion. Sa

    prservation est dsormais, et plus que jamais, question dactualit.

    Les risques Nouakchott : le dfi () une nature hostile (du Puigaudeau, 1951)

    Nouakchott reprsente un terrain dobservation privilgi des volutions environnementales

    actuelles de louest mauritanien. L o certains attendent un tsunami, dautres programment un

    affaissement (Ould Mohamed Baba, 2004) gnral de la ville et prconisent, le fort des

    pouvoirs publics ntant pas la prvision, la recherche dun refuge Les scnarios-catastrophes

    ne manquent pas pour la capitale attaque de tous cts par les forces de la nature, par le

    sable, par le vent, par la mer (Vernet, 1994 : 183), coince entre le dsert qui avance

    inexorablement et locan qui menace de rompre le faible cordon dunaire et denvahir la

    6 International Union for Conservation of Nature and natural resources (IUCN) : http://www.iucn.org/places/mauritania/palm/. 7 Ministre de la Pche et de lconomie Maritime (MPEM).

    8

    http://www.iucn.org/places/mauritania/palm/

  • Introduction

    dpression ctire (Legrand et al., 1986 cits par Sne, 2001), les uns plus vraisemblables que

    les autres. La menace pourtant est bien relle (Frrot et al., 1998) et le plan de sauvegarde de

    Nouakchott (MDRE, 2004 b : 39) une option prioritaire mettre en uvre en toute hte8.

    Les expertises sont nombreuses qui ont envisag la rgion sous langle des risques ou, tout

    le moins, voqu la question. Inondations (Duchemin, 1951 ; du Puigaudeau, 1951 ; Pitte,

    1977 ; Frrot, 1991 ; Diagana, 1993 ; Courel et al., 1996 et 2003 ; Frrot et al., 1998 ; Tulliez,

    1998 ; Philippon, 1999 ; Sablon, 2000 ; Hubert, 2001 ; Trbossen, 2002 ; Bisson, 2003 ; Wu,

    2003 ; Benedittini et al., 2005 ; CSFD, 2006 ; Bizien et Izabel, 2006 ; Abou Dagga, 2007),

    rosion littorale (Philippon, 1999 ; Trbossen, 2002 ; Wu, 2003), ensablement (Salama et al.,

    1991 ; Meunier et Rognon, 1995 ; Frrot et al., 1998 ; Foucher, 1999 ; Meunier et Rognon,

    2000 ; Maulpoix, 2000 ; Charasse, 2000 ; Sablon, 2000 ; Martella, 2001 ; Sne, 2001 ; Ould

    Diah, 2003 ; Zandonella, 2003 ; Abou Dagga, 2007), risques sanitaires (Bal, 1989 ; Sakho

    Diarry, 1998 ; Ciss et Tanner, 2000 b ; Maulpoix, 2000), salinisation du sol (Maulpoix, 2000),

    dsertification (Chamard et Courel, 1999 ; Nouaceur, 2001 ; Bisson, 2003), pollutions (Mint

    Sidoumou, 1992 et 1996 ; Tall, 1996 ; Nouaceur, 1995 et 2001 ; Oeltzschner, 2000 ; Fall, 2002 ;

    Ould Aloueimine, 2006), il faut dire que le territoire se prte particulirement l'analyse. Il est

    une raison cela : sous peine dtre raye des cartes, Nouakchott quintessence de la grande

    ville mauritanienne a d, ds son invention et toujours dans lurgence, composer avec son

    environnement.

    Pourtant, il ne suffit pas de multiplier les travaux et les articles (dont linventaire prsent

    plus haut ne se veut pas exhaustif) pour prvenir dun danger. Certes, la connaissance est

    primordiale, mais elle nest pas suffisante. Le pouvoir dinformation et daction rside en

    effet dans la capacit articuler entre elles des analyses (au sens large) issues dexpertises

    diffrentes. La re-dcouverte et la re-lecture de documents historiques et contemporains

    sources incommensurables de savoirs sont aussi propices lintervention. Trop disperses

    et/ou parfois altres, les donnes dans les Pays En Dveloppement (PED) se caractrisent

    encore par un accs difficile et inquitable : leur mise en relation et, le cas chant, leur mise en

    conformit, est rarement juge rentable par les gestionnaires nationaux. Or, ngliger

    volontairement ou involontairement des informations nest pas une dmarche acceptable dans

    ces pays du risque (Brunet et al., 1994) auxquels la Gographie Universelle consacre un

    chapitre souvent incapables de supporter seuls le cot de grands projets dtudes, tels ceux

    raliss dans le cadre de la coopration bi ou multilatrale. Comment dans ce contexte,

    renouveler lapproche dtude du site risques multiples de Nouakchott ? La question mrite de

    8 Parmi les vingt-huit options prioritaires (ibid.) dadaptation aux changements climatiques retenues par le Ministre du Dveloppement Rural et de lEnvironnement (MDRE) en 2004 figure, en vingt-quatrime position, la ralisation dun plan de sauvegarde de la ville.

    9

  • Introduction

    toute vidence dtre pose. Car, en dpit des donnes ce jour en notre possession, recueillies

    auprs de la communaut scientifique et institutionnelle implique, et considrant lactualit

    nouakchottoise rcente, aucun enseignement profitable ne semble visiblement avoir t tir de

    plus de cinquante annes dobservation. Le constat est sans appel. Depuis le dbut du vingtime

    sicle, lrection du ksar puis de la ville-capitale a t contrarie par une nature hostile (du

    Puigaudeau, 1951) et quelquefois violente, quune suite de ngligences ou dimprudences de

    la part des administrateurs successifs na pas permis de temprer. Prcisment, elles ont eu

    leffet inverse, fragilisant durablement le site en mprisant certains signes annonciateurs de

    crises majeures le terme de crise9 nous paraissant pertinent pour dcrire quelques uns des

    bouleversements climatiques et/ou humains ayant marqu la Mauritanie dhier et daujourdhui.

    Mais il nest plus temps de condamner linclairvoyance du pass dautres lont fait avant

    nous , de maudire le manque de discernement et la lgret avec lesquels ont souvent agi et re-

    agi les politiques de ce pays dont J.-P. Dupuy dirait sans doute quil est install dans le

    temps des catastrophes (Dupuy, 2002 : 10) , de sobstiner, linstar de R. Dumont, susciter

    de salutaires prises en conscience (Ponti et Gaud, 1992 : 14) en exploitant la veine

    catastrophiste traditionnellement invoque par les mdias. Il nest plus temps. Il sagit

    dsormais de construire, ou plutt de permettre de construire nouveau en prenant la mesure

    exacte des risques, des habitants, de leur environnement, des enjeux lis lurbanisation dun

    site impropre laccueil des hommes. Bref, il faut dsormais penser dans lombre de la ()

    [crise] future (Dupuy, 2002 : 14).

    Modliser pour mieux prvoir

    On ne commande la nature quen lui obissant, certes : encore faut-il avoir lusage de cette

    nature et de ses lois. Prendre la mesure des risques Nouakchott et dans sa rgion supposait

    den bien connatre les causes et les effets : force de rigueur et dobstination, il a t possible

    de recueillir, sur le milieu, une somme considrable dinformations actuelles (cf. supra). Or, les

    seules donnes ne suffisent pas. Pour suivre et anticiper, de conserve, lvolution urbaine

    puisque cest bien de cela dont il sagit , il restait concevoir un outil rduisant, organisant et

    diffusant la complexit des expertises rassembles, autrement dit facilitant les prises de

    conscience et de dcision. Car, la mise en garde de A. K. Tibaijuka (sous-secrtaire gnrale de

    l'Onu et directrice excutive de Onu-Habitat) lors du troisime Forum Urbain Mondial de

    Vancouver (19/23.06.2006), rsonne inquitante aux oreilles de la communaut

    9 Pour R. Brunet et al., la crise est un moment dextrme tension, de paroxysme, de conflit, de changement [qui intervient] quand les rgulations et rtroactions du systme ne suffisent plus ou ne jouent plus (Brunet et al., 1993 : 136). La crise accompagne le processus de changement et dadaptation, conduit une nouvelle forme de stabilit. Nous lui donnerons ici un sens dpassant la dfinition strictement cindynique du terme. Cest, du reste, pour cette raison que le terme apparat systmatiquement en italique dans notre texte.

    10

  • Introduction

    internationale : la faon dont nous planifierons et grerons nos villes dcidera si notre avenir

    collectif sera brillant et durable ou au contraire brutal et chaotique (Tibaijuka, 2006). Qui

    souhaite, en effet, des lendemains incertains ses enfants ? Il suffit parfois de quelques

    arbitrages politiques simples pour que soient exprimentes des alternatives salutaires et que

    samorcent des changements dcisifs condition, cela sentend, que lon ait accs aux

    donnes ad hoc. tre averti des alas et des dangers qui psent sur un territoire, rendre

    linformation familire au plus grand nombre, reconstituer et conserver une mmoire, tout la

    fois vivante et virtuelle, des risques naturels et anthropiques, apparat donc essentiel : chaque

    nouvel amnagement prcd dtudes et travaux ncessaires au maintien de la protection des

    usages est une victoire sur le chaos et redonne un sens la dmocratie locale. Les activits

    humaines menacent trop souvent lintgrit et la durabilit dcosystmes fragiles.

    En moins de dix ans, les initiatives internationales en matire de modlisation du risque

    programme Identification of Global Natural Disaster Hotspots10 associant le Center for

    Hazards and Risk Research (CHRR) de lUniversit de Columbia, la Banque Mondiale et

    dautres institutions partenaires de ProVention Consortium ; HAZard US-Multi Hazards11 de la

    Federal Emergency Management Agency (Fema) ; projet Tyndall sur les changements

    climatiques12, etc. ont vu leur nombre augmenter notablement. Les indices et indicateurs

    (indice de vulnrabilit de lenvironnement13, de pnurie deau14, indicateur du dveloppement

    durable15, de lempreinte cologique16, indice de durabilit de lenvironnement17, de

    performance environnementale) valuant les risques de catastrophe et le dveloppement sont

    devenus incontournables (Pnud18, 2004). La Journe mtorologique mondiale du 23 mars

    200619, place sous lgide de lOrganisation Mtorologique Mondiale (OMM), a prcisment

    retenu le thme fdrateur de la prvention des catastrophes naturelles et lattnuation de

    leurs effets. Promouvoir une culture de la prvention (Jarraud, 2006) est pour M. Jarraud,

    secrtaire gnral de lorganisation, devenu urgent20 conformment aux recommandations de

    la deuxime Confrence mondiale sur la prvention des catastrophes qui sest tenue Kobe

    (prfecture de Hyogo, Japon) au mois de janvier 2005.

    10 http://www.proventionconsortium.org/files/hotspots2002/dilley.pdf 11 http://www.fema.gov/hazus/ ; http://nibs.org/hazusweb/ 12 http://tyndall.webapp1.uea.ac.uk/index.shtml 13 http://www.sopac.org 14 http://www.nerc.ac.uk/ ; http://www.ceh.ac.uk/ 15 http://www.iisd.org 16 http://www.redefiningprogress.org/newprojects/ecolFoot.shtml 17 http://www.weforum.org/ ; http://www.ciesin.columbia.edu/ ; http://www.yale.edu/environcenter/ 18 Programme des Nations Unies pour le Dveloppement (Pnud). 19 http://www.wmo.ch/wmd/ 20 En particulier pour les PED : ces dangers frappent [en effet] davantage [c]es pays (), et singulirement les () moins avancs [dentre eux], qui voient leur vulnrabilit augmenter et la ralisation de leurs objectifs de croissance conomique et sociale retarde, parfois de plusieurs dcennies (ibid.).

    11

    http://www.proventionconsortium.org/files/hotspots2002/dilley.pdfhttp://www.fema.gov/hazus/http://nibs.org/hazusweb/http://tyndall.webapp1.uea.ac.uk/index.shtmlhttp://www.sopac.org/http://www.nerc.ac.uk/http://www.ceh.ac.uk/http://www.iisd.org/http://www.redefiningprogress.org/newprojects/ecolFoot.shtmlhttp://www.weforum.org/http://www.ciesin.columbia.edu/http://www.yale.edu/environcenter/http://www.wmo.ch/wmd/

  • Introduction

    Si lon ne peut que saluer les efforts persvrants et fructueux des chercheurs et docteurs de

    lUnit Mixte de Recherche (UMR) Prodig sans oublier leurs partenaires mauritaniens

    concernant le fonctionnement de lenvironnement nouakchottois, leur clairvoyance propos des

    mutations des systmes arrire-littoral (Courel et al., 1996) et urbain (Courel et al., 1998 et

    2003), des dynamiques littorales et prlittorales luvre (Wu, 2003 ; Abou Dagga, 2007), des

    risques dinondation et densablement (Abou Dagga et al., 2004), il nous semble aujourdhui

    regrettable que ces connaissances fondamentales naient encore profit ceux qui elles taient

    lorigine destines : les citadins et leurs dcideurs. Cest ce retard dans linformation presque

    habituel au Sud qui a motiv notre participation au projet Corus. Il sagira en effet, partir de

    lensemble des donnes acquises et dans la suite des travaux prcdemment voqus, de

    formaliser deux modles dorganisation distincts permettant la fois : (1) de dcrire

    lenvironnement rgional et mieux apprhender la formation de sites (historiques et

    contemporains) potentiellement risque ; (2) didentifier prcisment le niveau de danger dun

    territoire circonscrit, compte tenu de sa vulnrabilit et de menaces naturelles ou anthropiques

    varies. Le formalisme entit-relation Merise est, en France du moins, la plus rpandue des

    techniques danalyse de bases de donnes a t adopt. Les tmoignages dinondations,

    densablement, de pollutions, dincendies, daccidents de la circulation, seront ainsi patiemment

    recenss, interprts et confronts afin de valider les modles diagnostiques bauchs avec

    lquipe mauritanienne et les prototypes construits. Ils alimenteront un Systme dInformation

    Gographique (Sig) oprationnel qui orientera, idalement, les amnagements urbains futurs.

    Car, le travail mental de prvision est une des bases essentielles de la civilisation. Prvoir est

    la fois l'origine et le moyen de toutes les entreprises, grandes ou petites. Cest aussi le

    fondement prsum de toute la politique (Valry, 2002 : 211). La matrise de linformation

    gographique et lautonomie des modles exploitant celle-ci, commandent en effet, dune

    certaine manire, lindpendance des dcisions notamment en rduisant les contingences

    dorigine anthropique.

    Cartographier pour mieux gouverner

    Le choix de loutil Sig sest impos naturellement. Instrument danalyse (spatiale) et de

    restitution de lensemble des contraintes et de leurs interactions, il sinscrit dsormais souvent

    dans les projets de dveloppement local convaincant jusquaux pasteurs des rgions

    sahliennes. Le Systme dInformation pour le Pastoralisme au SAhel (Sipsa), expriment en

    2006 au Sngal et en Mauritanie par le Centre de coopration Internationale en Recherche

    Agronomique pour le Dveloppement (Cirad), a ainsi prouv que des acteurs mieux informs

    pouvaient la fois grer les crises court terme, (...) lutter contre la dsertification et ()

    contribuer un dveloppement durable () [de leur activit dans la rgion] (Cirad, 2006)

    12

  • Introduction

    Nouakchott, la modlisation dynamique de lespace que le Sig autorise simplifiera la prvision

    des risques et la planification des interventions conscutives un vnement ou la

    juxtaposition de plusieurs vnements catastrophiques. Certes, lobjet de la prsente thse nest

    pas de persuader de la qualit dun tel gestionnaire de donnes (il reste une solution parmi

    dautres), mais bien de dmontrer comment et dans quelle mesure les prototypes exploratoires

    labors et la structuration de linformation quils impliquent permettent de traiter lordre

    gographique, et plus prcisment les risques dans la rgion nouakchottoise. Quelle validit

    accorder, sinon, une approche de capitalisation-croisement de donnes multi-format et multi-

    date dont la plupart ont t produites dans un autre but ? Les ressources manipules les

    publications scientifiques, archives de quotidiens et hebdomadaires nationaux, documents

    cartographiques, images satellitaires, tableaux statistiques, photographies, etc. sont abondantes

    et requirent, demble, un gestionnaire rigoureux. Dans ce contexte, la carte revt des qualits

    heuristiques videntes en facilitant laccs linformation, la mobilisation de connaissances

    varies, linterprtation des donnes scientifiques (quelquefois absconses ou confuses), la

    communication pr- et post-crise, en favorisant la rflexion, le rappel des souvenirs, etc.

    Plan de la thse

    Le document sorganise en trois parties. La premire a pour double objectif dexposer la

    mthodologie dploye, dexplorer les bnfices et contraintes de la dmarche de modlisation

    en justifiant la prfrence donne au formalisme entit-association, de fournir les modles

    labors [cf. Chapitre 1] ; de mesurer la confidentialit et linfluence des cartes traditionnelles

    ou numriques et des Sig dans le pays, sachant que nous en prconisons l'emploi tous les

    stades dune crise [cf. Chapitre 2]. La seconde partie, quant elle, sattache offrir une lecture,

    historique, globale et contextualise, de notre terrain dtude sous un double clairage, naturel et

    humain, en conformit avec le systme-risque prcdemment construit [cf. Chapitre 3] ; douvrir

    la comprhension des dynamiques environnementales rcentes en sintressant tantt aux

    risques naturels [cf. Chapitre 4], tantt ceux dorigine anthropique [cf. Chapitre 5]. La dernire

    partie, enfin, dcrit le capital informationnel attributaire et cartographique runi et tudie les

    conditions de sa validation [cf. Chapitre 6] ; elle prsente le contexte socio-politique des risques

    en Mauritanie et conclut sur quelques perspectives moyen terme de ce que pourrait tre le

    dveloppement dans la rgion, propose les cartes du changement [cf. Chapitre 7].

    Retarder la trs classique prsentation de la zone dtude au chapitre trois de cette thse

    peut, prcisment, paratre dplac. Toutefois, nous avons prfr insister sur les qualits

    propres la mthode dveloppe : celle-ci prfigure de grands changements dans la manire de

    grer les donnes et, potentiellement, les risques. Ce troisime chapitre revt, par ailleurs, une

    double vocation : celle de permettre dexplorer plus avant quelques uns des principes physiques,

    13

  • Introduction

    climatiques, historiques et politiques les plus saisissants du fonctionnement du milieu et de la

    socit mauritanienne, de dchiffrer en quelque sorte le dessous des cartes ; celle dintroduire

    aux deux chapitres suivants, plus spcifiquement et exclusivement consacrs aux risques.

    14

  • PREMIERE PARTIE Mthode et outils

    () Nous sommes aveugles, impuissants, tout arms de connaissances et chargs de pouvoirs dans un monde que nous avons quip et organis, et dont nous redoutons prsent la complexit inextricable. Lesprit essaye de prcipiter ce trouble, de prvoir ce quil enfantera, de discerner dans le chaos les courants insensibles, les lignes dont les croisements ventuels seront les vnements de demain. Tantt il essaye de prserver ce qui lui semble essentiel dans ce qui fut, dans ce quil connat et dont il croit que la vie civilise ne peut se passer. Tantt il se rsout faire table rase, construire un nouveau systme de lunivers humain (Valry, 2002 : 199).

  • Chapitre 1

    Chapitre 1 Fondements opratoires et modles associs

    I - UNE ANALYSE INTGRE.........................................................................................................................19

    A - INTELLIGENCE SYSTMIQUE ET APPROCHE GLOBALE.............................................................................19 1 - Une lecture systmique du risque..........................................................................................................19 2 - Pluridisciplinarit et transdisciplinarit pour une approche globale......................................................20 B - DUNE REPRSENTATION VNEMENTIELLE UNE REPRSENTATION CONSTRUITE................................23 1 - Amliorer la gestion de linformation et la prvision des risques : vers llaboration dun outil de synthse pour lorientation des politiques urbaines et laide la dcision .................................................25 2 - De laffichage du risque la rduction de la vulnrabilit ....................................................................31

    II - LE DVELOPPEMENT DUN MODLE DE DONNES...................................................................................37

    A - UN MODLE DE CONNAISSANCE.............................................................................................................38 1 - La construction de la connaissance .......................................................................................................38 2 - Une ralit complexe et approximative .................................................................................................45 B - DU MODLE AU SYSTME.......................................................................................................................52 1 - lcoute du terrain : les reprsentations du rel .................................................................................53 2 - Le systme-risque nouakchottois...........................................................................................................57

    18

  • Chapitre 1

    I Une analyse intgre

    Le rle de l'expertise est d'apporter une information scientifique et technique susceptible de

    prparer les dcisions politiques21 (Badji, 2006), de lgifrer. Le financement et la stimulation

    de projets sont des instruments qui peuvent tre utiliss pour produire des changements (Coburn

    et al., 1993) mais qui font rarement un usage maximum des ressources disponibles localement.

    Traditionnellement rserve lexpert la participation du profane ne contribuant qu plus de

    confusion et dirrationalit , la gestion du risque slabore dans la pratique par des changes

    rciproques et lappropriation de savoirs htrognes, par le montage de projets financirement

    soutenables, par linformation et la formation des populations exposes voire de la socit

    entire, de manire dvelopper une culture du risque et entretenir la mmoire collective

    (Garry et Veyret, 1996 : 441).

    Analyser globalement une menace, cest donc tablir un systme dobservations et de

    concepts permettant de dfinir sa frquence, ses tendances sinon ses lois, une certaine

    potentialit de violence (Gallais, 1994). Mais, sans outil dintgration efficace, cette

    reprsentation objective du risque et les mesures prises sporadiquement ne sauraient tre

    considres comme suffisantes. Le suivi et la capitalisation des pratiques et des donnes sont en

    effet fondamentales. La littrature fait tat dun nombre important dexpriences de mise en

    uvre des techniques Sig pour la gestion des risques, naturels ou anthropiques (nous y

    reviendrons). On peut citer pour exemple et sans prtention dexhaustivit les domaines

    dapplication suivants : (1) la sant publique et, plus prcisment, lpidmiologie (Jarup, 2004 ;

    Nuckols et al., 2004 ; Bni et al.22, 2000) ; (2) la pollution (Hurlock, 2005 ; Isted et al., 2003 ;

    Benot et al., 1997) ; (3) la scurit (Ineris, 2004 ; Huguenin-Richard, 2004) ; (4) lincendie de

    fort (Missoumi et Tadjerouni, 2003 ; Hubschman et al., 1994) ; (5) linondation (Mbaye et

    Sagna, 2006 ; Bessat et Anselme, 2006 ; Yuan, 2005 ; Henry, 2004 ; Isted et al., 2003 ; Mbaye,

    2003 ; Courel et al., 2002) ; (6) la tornade (Yuan, 2005) ; (7) le volcanisme (Wackermann,

    2004), etc.

    A Intelligence systmique et approche globale

    1 Une lecture systmique du risque

    partir des annes 60, lapproche systmique permet de coordonner les acquis en vue

    dune plus grande efficacit de laction : un tout organis, un systme, produit ou favorise

    lmergence dun certain nombre de qualits nouvelles qui ntaient pas prsentes dans les

    21 sans toutefois se substituer aux politiques eux-mmes. 22 Deux tendances sont distingues dans la littrature spcialise : (1) les tudes portant sur les maladies infectieuses tropicales svissant dans les PED et (2) les tudes ralises dans les pays dits dvelopps portant sur laccessibilit aux soins, les effectifs mdicaux, les maladies chroniques et dbilitantes (Bni et al., 2000).

    19

  • Chapitre 1

    parties spares (Morin, 1997). Lexpansion du volume des connaissances se ralise en effet

    non plus par simple juxtaposition des savoirs mais dans la cohrence de ceux-ci. Alors que la

    mthode analytique consiste morceler la ralit en lments distincts, la mthode systmique

    recombine le tout en tenant compte du jeu des interdpendances et de lvolution des lments

    dans le temps (de Rosnay, 1995). Remettant en cause la pense parcellaire, compartimente,

    monodisciplinaire, privilgiant les proximits et interdpendances, rendant possible le dialogue

    entre les sciences, elle a conquis de nombreux spcialistes de cindynique aux prises avec des

    risques globaux ds lors systmiques (Dourlens, 1988 : 6 ; Veyret, 2003). Produits ou

    traductions spatio-temporelles (Wackermann, 2004) des interactions entre un cosystme et

    un sociosystme dusage des lieux et de rponse oprationnelle linstabilit des milieux, les

    systmes cindynognes sont ns. Par souci de clart autant que de cohrence, nous avons

    choisi de structurer notre rflexion autour des critres de la systmique.

    De fait, pour saisir dans sa globalit le fonctionnement de l'environnement nouakchottois et

    mieux apprhender les dangers associs, la solution imagine a consist identifier, dfinir et

    articuler entre eux cinq sous-systmes participant dun systme-risque global, lui-mme sous-

    systme du systme environnemental local dans cette conception, le territoire tant, la fois,

    un lment du systme spatial et le rvlateur de celui-ci. Chaque risque ou sous-systme il

    nest pas question ici de prtendre lexhaustivit mais plutt la pertinence , savoir

    linondation, lensablement, la pollution, lincendie ou laccident, a ensuite t dcompos en

    facteurs signifiants ; mais, la diffrence de la dsagrgation analytique (cf. supra), nous

    naccderons pas, ici, au niveau des composants lmentaires : lun des intrts de l'analyse

    systmique rside dans la formalisation des interactions entre des facteurs partiellement

    interdpendants. Trois types de composants ont t mis en relation : les facteurs hrits, de

    vulnrabilit ou d'origine anthropique, les alas naturels [cf. Fig. I-1].

    Cette modlisation dynamique de lespace tudi a permis de simplifier la communication

    du risque. Elle doit, de surcrot, faciliter la prvision de celui-ci et lgitimer la planification des

    interventions conscutives un vnement, ou la juxtaposition de plusieurs vnements

    catastrophiques. Saisie avec rflexion, la complexit est une richesse en effet ; elle devient une

    catastrophe si on laborde sans distance.

    2 Pluridisciplinarit et transdisciplinarit pour une approche globale

    Si lintrt propre dune inondation ou de tout autre dsastre fait facilement perdre de vue

    ses effets (le regard sur lensemble), les comportements tendent nanmoins changer. Agir dans

    20

  • Fig. I-1 : Matrice des facteurs de risques Nouakchott

    1

    2

    3

    4

    5

    6

    7

    8

    9

    10

    11

    13

    14

    15

    16

    17

    18

    19

    Ia

    Ib

    II

    IIIa

    IIIb

    IV

    22

    23

    24

    25

    26

    27

    28

    29

    30

    31

    32

    33

    34

    35

    38

    39

    40

    41

    Topographie

    Morphopdologie

    Gologie

    Hydrographie

    Prcipitations

    Vent

    Mare

    Temprature

    Houle

    Drive littorale

    Pression atmosphrique

    12 Crise climatique

    CHARGE DE LA NAPPE PHREATIQUE

    REMOBILISATION DU SABLE

    AUGMENTATION DE LA SALINITE

    DISPARITION DU COUVERT VEGETAL

    FRANCHISSEMENT DU CORDON PAR LA MER

    RECUL DU TRAIT DE COTE

    20

    EUSTATISME

    21

    DEGRE DHUMIDITE

    CRUE HISTORIQUE

    * par rupture du cordon littoral

    * par battance de la nappe phratique

    * atmosphrique

    * de la nappe phratique et des sols

    * risque sanitaire

    ENSABLEMENT

    SANTE

    Prlvement de matriaux

    Prlvement de bois de feu

    Elevage

    Activits de transport

    Marachage

    Dchets mnagers

    Eaux uses

    Effluents hospitaliers

    Effluents des activits commerciales

    Effluents industriels

    Engrais et pesticides

    Densit humaine

    Densit du bti et des infrastructures portuaires

    Niveau de vie

    Rseau viaire

    Rseau dassainissement

    Rseau AEP

    Centres de sant

    RIS

    QU

    EA

    LEA

    NA

    TU

    RE

    LH

    ER

    ITA

    GE

    PR

    OC

    ES

    SU

    S P

    HY

    SIQ

    UE

    D'E

    ND

    OM

    MA

    GE

    ME

    NT

    *

    *

    *

    *

    *

    *

    Conditions de tempte

    POLLUTION

    INONDATION

    36 Ractions

    37 Rglementation

    A C T I V I T E S

    R E J E T S E T I N T R A N T S

    C R I T E R E S S O C I O - O R G A N I S AT I O N N E L S

    I N F R A S T R U C T U R E S E T E Q U I P E M E N T S

    FAC

    TE

    UR

    DE

    VU

    LNE

    RA

    BIL

    ITE

    Chapitre 1

    21

  • Chapitre 1

    un esprit pluri- et transdisciplinaire23 (Lacombe, 1976 ; Minvielle et al., 1996 : 768 ; Salem,

    1998 : 301) au besoin rompre certaines rigidits disciplinaires (Ponti et Gaud, 1992 : 279)

    et venir bout de lsotrisme svissant dans certains laboratoires24 est devenu, en effet,

    indispensable la comprhension de la plupart des risques environnementaux. Lapproche

    spatiale traverse maintenant tous les mtiers, irrigue tous les domaines (Joliveau, 1996). Quid

    de la sacramentelle culture corporatiste des producteurs de donnes, nous rpliquerez-vous ?

    Disparue. Les prises de conscience et mouvements de concertation des responsables territoriaux

    tentent, dsormais, de rassembler les comptences afin de constituer une force de proposition

    influente. Les notions de continuit dans l'action et de dveloppement durable sont de plus en

    plus fermement invoques : le risque requiert, selon G. Wackermann, une constante

    articulation rciproque entre tous les domaines de la gographie dune part, entre celle-ci, ()

    les autres sciences () [et] la dynamique gnrale des activits dautre part (Wackermann,

    2004) car chaque discipline ne donne voir quune reprsentation partielle, oriente, de la

    ralit (Lacoste, 1984 : 12). Le partage de linformation est la premire condition dune

    coopration efficace entre acteurs : la mosaque de savoirs disperss (de Rosnay, 1995 : 37)

    que produit la dmarche analytique conduit souvent un problme de communication et retarde

    lmergence dune vision synthtique. Telle est, pour citer P. Gourou, la loi commune de ceux

    qui ne se cantonnent pas dans une activit classificatrice (Gourou, 1982 : 406).

    Dans la perspective dune analyse intgre de lenvironnement nouakchottois, garantir

    lobjectivit du diagnostic et la non dispersion des sources dinformation a paru essentiel. Aussi

    le choix de partenaires au Sud sest-il orient vers des enseignants de lUniversit de

    Nouakchott les plus mme, semblait-il alors, de sinvestir durablement et avec profit dans le

    projet, linstar du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) au Nord. La

    mobilisation et le maintien dune quipe pluridisciplinaire, dun rseau de comptences, est par

    ailleurs commande par lvolutivit prvue de lapplicatif Sig. Gologues, biologistes,

    gographes, physiciens ont donc t consults, collectivement lors de ltape de modlisation,

    puis par spcialit. Lors de ces assembles formelles et autres entretiens informels, on a tout

    particulirement insist sur les bnfices attendus dun tel dispositif pluridisciplinaire, de

    ladoption dun langage et dun vocabulaire communs sans lesquels, ds le dpart, nous

    risquions de nous mprendre sur les nuances : dans cette Afrique ambigu, dont G. Balandier a

    nourri son ouvrage ponyme, les mots nont pas la mme paisseur, ne sinscrivent pas

    toujours dans le mme champ smantique lorsquils sont nos instruments de communication et

    23 La transdisciplinarit concerne ce qui est la fois entre les disciplines, travers les diffrentes disciplines et au-del de toute discipline. 24 Un des handicaps des sciences africaines, cest leur caractre sotrique. () Plus la dcouverte tait neuve, plus elle tait cache (). Cette mise en rserve constitue un risque important pour le progrs de la science en Afrique puisquelle ne favorise pas laccumulation des savoirs (Ki-Zerbo, 2004 : 108).

    22

  • Chapitre 1

    lorsquils deviennent ceux dun Africain de langue franaise (Balandier, 1957 : 56)25 Or,

    malgr tous nos efforts, la communication entre dminents spcialistes de disciplines pourtant

    voisines a souvent t interrompue ds que lchange dpassait le cadre strictement conceptuel

    et fait le jeu de la multidisciplinarit plutt que de linterdisciplinarit. Certes, cette volution

    dans les mthodes et les mentalits ne peut senvisager sans heurt : lhyperspcialisation des

    systmes de formation a rarement privilgi les changes transdisciplinaires (Bni et al., 2000).

    Nanmoins, une implication plus grande des universitaires, en particulier, aurait t souhaitable,

    permis dassurer une certaine continuit et oprationnalit de lapplicatif et mis dfinitivement

    un terme aux ghettos disciplinaires et micro-nationaux, au cloisonnement de bureaux un mal

    rcurrent dans beaucoup de pays, un risque majeur (Bakis, 1993 : 121) selon H. Bakis. Cet

    esprit de partenariat et ce sens du partage qui ont manqu ici26 sont devenus (rappelons-le) la

    principale obsession de milieux dcisionnels soucieux de rationaliser les ressources financires

    et techniques alloues (ibid.).

    Les dplacements sur le terrain qui, lorigine, napparaissaient pas indispensables dans la

    mesure o beaucoup de donnes taient disponibles sur support papier ou numrique auprs des

    partenaires du Nord, nous ont permis de tisser des liens (la plupart phmres certes, si lon

    examine la situation contemporaine) entre des chercheurs rarement mis en contact : les

    rencontres ont lavantage en effet de prenniser les relations, physiques et lectroniques. Ils ont

    t loccasion, par ailleurs, de saisir la complexit du rel, de contextualiser les donnes et

    rflexions, autrement dit de donner de la substance ce qui naurait pu tre, en dfinitive, quun

    inventaire (un atlas) sans grande originalit [cf. Fig. I-2].

    B Dune reprsentation vnementielle une reprsentation construite

    La quantit dinformations articuler entre elles et la varit des producteurs imposent de

    recourir un instrument dadministration et de traitement suffisamment gnraliste et flexible.

    Lexploitation gomatique des donnes recueillies et sauvegardes dans la base de donnes du

    projet se justifie donc sans peine. Car sil est encore frquent quune catastrophe fasse prendre

    conscience, la population et aux pouvoirs publics, dun risque (reprsentation vnementielle),

    les expriences de rationalisation cartographique du danger ou de reprsentations construites du

    risque ont montr leur robustesse : la gographie, et lanalyse spatiale tout particulirement,

    permettent de librer le risque dune approche purement circonstancielle en privilgiant sa

    dimension structurelle (Dupont, 2004).

    25 Si la rfrence date, elle nen est pas moins encore dactualit quelque cinquante ans plus tard. 26 et l : le mme reproche est faire aux prtendues collaborations intra- et interinstitutionnelles.

    23

  • ENVIRONNEMENT

    NOUAKCHOTT

    MOUGHATAA

    QUARTIER

    Donnes cartographiques, terrain,donnes de tldtection, donnes

    universitaires

    Donnes cartographiques, mdias,terrain, donnes de tldtection,donnes universitaires, Sig, basesde donnes, donnes statistiques

    Mdias, terrain, enqutes

    Terrain, enqutes

    DONNES ECHELLES MTHODES RSULTATS

    Etats de l'environnement, flux de pollutions,sensibilit du substrat la battance, ressourcesmenaces, etc.

    Zonage de risques, contamination de la nappeet des sols, cartographie des "points chauds"de la circulation, etc.

    Typologie des activits polluantes, populationsmenaces, etc.

    Infrastructures et btiments menacs, etc.

    ANALYSE SPATIALE

    ANALYSE SPATIALE

    ET STATISTIQUE

    ANALYSE SPATIALE

    ANALYSE SPATIALE

    Fig. I-2 :

    chelles spatiales, mthodes et donnes

    Chapitre 1

    24

  • Chapitre 1

    1 Amliorer la gestion de linformation et la prvision des risques : vers llaboration dun outil de synthse pour lorientation des politiques urbaines et laide la dcision

    Dans la perspective dun dveloppement conomique durable, attendu que ltablissement

    de politiques de prvention nest pas encore vraiment dactualit, la ralisation de zonages des

    risques Nouakchott est un prambule indispensable pour l'aide aux dcisions d'amnagement

    urbain ( loccupation du sol en particulier), de dveloppement conomique et social et de

    protection des populations. De fait, la publication de cartes des risques trs prcises (Ayad,

    2006 b) tablies par le Groupe de Recherche sur les Environnements Sdimentaires Amnags

    et les Risques Ctiers (Gresarc) constitue un prcdent historique (Bizien et Izabel, 2006). Le

    document cartographique est, en quelque sorte, limage dun territoire qui se construit dans la

    ngociation. Il est le support incontournable de la spatialisation, de la reprsentation des alas,

    risques et vulnrabilits, de la diffusion des connaissances cindyniques. Organe de perception,

    il donne voir et interprter les dangers. Car, scuriser les espaces de vie et les activits

    conomiques, stabiliser le peuplement, permettre une mise en valeur contrle des zones

    menaces, limiter les impacts humains et conomiques des catastrophes travers une meilleure

    prise en charge des populations et des services de qualit davantage accessibles, sont dsormais

    invitables.

    Des cartes pour comprendre les alas et les dangers

    La cartographie dun risque consiste dlimiter son extension spatiale maximale en

    confrontant reconstitutions historiques et modles empiriques [cf. Fig. I-3]. La hirarchisation

    des niveaux de danger repose sur une pondration de lintensit du phnomne value au

    regard de sa capacit dendommagement et de sa probabilit doccurrence, tablie partir de

    frquences et caractristiques dvnements rcents [cf. Tab. I-1]. Les sries dobservations

    disponibles sont, toutefois, trop brves pour autoriser une estimation prcise de la probabilit

    d'apparition d'un vnement extrme.

    En dpit dincertitudes propres aux phnomnes tudis (extension, intensit, occurrence),

    les cartes produites permettent, en ltat actuel des connaissances : (1) de localiser les enjeux et

    analyser, voire quantifier, les risques de pertes potentielles ; (2) de mesurer lcart existant entre

    une reprsentation scientifique de la menace et celle, plus subjective, des populations exposes ;

    (3) dtre un support de la prvention des risques : le retour dexprience post-crise constitue

    une source de connaissance de la menace et fournit souvent loccasion d'un nouvel

    amnagement ou dun usage intgrant mieux le risque.

    25

  • 1.50 M D'EAU LE 08.12.1950

    RSIDENCE DU GOUVERNEUR

    FORT DE 1903(RUINES)

    FORT DE 1929

    2.0

    1.0

    CLICH DU 06.01.1951

    Nouakchott vers 1950

    Extension venir

    Isohypse

    Nappe inondante

    Cote d'altitude2.0

    vers Rosso

    vers Boutilimit

    vers

    Akj

    oujt

    1830

    1800

    1730

    1700

    Sebkha de N'Drhamcha

    NOUAKCHOTT

    Jreda

    Tiguent

    Marais de Toumbos

    0 km 10

    N

    Tin Maham

    Ijder

    Tivourvourt

    Tefourts

    Tamzah

    Twedermi(saline)

    Lagochichi

    N'Terert(saline)

    Tinimaten

    Chria

    D'aprs [Bonnet-Dupeyron, 1950], [Duchemin, 1951], [Pitte, 1977], [Hubert, 2001], [MPEM, 2004]

    Fig. I-3 : Reconstitution de l'inondation du 08.12.1950 Nouakchott

    SEUIL

    BAISSE DU NIVEAUDES EAUX

    EMERGENCES DETERRAIN

    TERRES NON SUBMERGES

    BAISSE DU NIVEAUDES EAUX

    Sebkha

    Nouakchott vers 2000

    Ville, village

    Limite de la nappeinondante

    Route

    Axe de l'inondationen 1950

    Chapitre 1

    26

    A

  • Chapitre 1

    Tab. I-1 : Classe dintensit des inondations Nouakchott

    ANNE TYPE INTENSIT EXTENSION DE LA PRCIPITATIONS MARE BRCHE VICTIME CLASSE DCRITE LAME DEAU MOIS HIVERNAGE

    1890 B Exceptionnelle : 1906 B Forte : 1932 B Exceptionnelle ~ 76.6% 191.0 : 191.0 III 1950 B Exceptionnelle ~ 86.6% 0.0 : 181.3 1.35 m Aucune III 1954 I : 184.4 1955 B Forte : 192.5 II 1965 B Forte ~ 22.9%* : 184.6 II

    Au-del de cette date, les eaux de crue du fleuve Sngal ont dfinitivement trouv un autre exutoire

    1985 I Forte ~ 7.1%* Tr. : 37.1 1.51 m 1 II 1986 I : 54.2 1 1987 I 0.0 : 54.2 1 1991 I Forte ~ 6.5%* : 91.5 6 II 1992 I 1.0 : 27.0 1 I 1995 I Exceptionnelle ~ 28.2%* 117.9 : 224.5 1.34 m Plusieurs III B Forte 0.0 : 224.5 1.63 m II 1997 I Forte 0.0 : 71.1 1.69 m Plusieurs Plusieurs III 1998 I Exceptionnelle ~ 32.7% 121.4 : 155.7 1.73 m 6 III 1999 I Forte Tr. : 99.9 1.35 m Plusieurs II B Forte ~ 7.4%* 38.5 : 99.9 1 II 2001 B Moyenne : 1.34 m I B Forte ~ 9.0% 53.0 : 1.60 m II 2002 B Moyenne 20.5 : 2004 B : B : B Moyenne 11.0 : 1.51 m I 2005 I : B Moyenne 4.9 : 1.63 m I B Moyenne 26.0 : 1.53 m I 2006 I Forte : 1.76 m 1 II B Moyenne : 1.45 m I

    B : battance de la nappe phratique. I : incursion marine. * : sous-estimation probable due au manque de donnes.

    Des cartes pour connatre les vulnrabilits

    La carte de vulnrabilit a pour objectifs de reflter le degr dexposition aux risques dune

    socit donne et daider la mise en place de mesures prventives efficaces. Elle relve dun

    processus complexe, dpassant la seule description dlments exposs un ala ou un danger

    sur un espace dtermin, cette lecture passive (Wackermann, 2004) dnonce par F. Lone

    et T. Lesales. Dans ce contexte, lenjeu reprsente un facteur de vulnrabilit socitale :

    prcisment, la dpendance dune socit envers un enjeu cr une vulnrabilit [cf. Prologue].

    En introduisant des fonctions dendommagement, afin dajuster les risques de pertes potentielles

    la nature des lments exposs et lintensit des menaces, il sera possible de saisir une

    variabilit spatiale de lintensit du risque (Wackermann, 2004). Prfigurant, avec une

    certaine marge derreur, les effets attendus dune catastrophe future, le support cartographique

    sera un outil efficace de communication du risque et de la vulnrabilit des populations, partant

    de gestion et de prvention. Autorisant des lectures complmentaires du territoire lune

    minutieuse et analytique (enjeux), lautre davantage synthtique , il sacquitte de son rle de

    rfrentiel acceptable du paysage (Cambrzy et de Maximy, 1995).

    27

  • Chapitre 1

    Linventaire ci-contre [cf. Tab. I-2] apporte un clairage nouveau sur les vulnrabilits

    nouakchottoises. Si exhaustif soit-il, il nest toutefois produit qu titre provisoire car les

    donnes associes sont encore trop htrognes et pour la plupart qualitatives. Peu

    dinformations fiables, actualises sont disponibles en effet. Celles testes procdent de choix

    empiriques, destins pallier momentanment les insuffisances du systme tout en validant la

    dmarche entreprise. En consquence, les cartes publies ne prjugent en aucun cas de la qualit

    finale de la base de donnes qui pourra tre enrichie une date ultrieure. L'information

    statistique occupant une place majeure dans la dfinition du risque, elle doit tre suffisante et

    fonde sur des donnes homognes et stables.

    Tab. I-2 : Inventaire des couches dinformations lmentaires relatives aux enjeux

    VARIABLE ENJEU SOURCE VALIDIT TYPE

    Btiment Humain (Kibily, 1998), (BSA27 Ingnierie, 2000), 1998/2005 Vectoriel (Ould Mohameden, 2001), (Adu28, 2003 a), (Adu, 2003 b), (BSA Ingnierie, 2003), (Buire, 2005), (Cimdet29, 2005) Occupation du sol Humain (ONS, 2002 b), (Adu, 2003 a) 2000/2003 Vectoriel Administration Administratif/politique (BSA Ingnierie, 2003) 2003 Vectoriel Lieu de dcision et de pouvoir Administratif/politique (BSA Ingnierie, 2003), Internet 2003/2005 Vectoriel Borne-fontaine Stratgique (Adu, 2003 b), (Adu, 2004) 2003/2004 Vectoriel Carrefour Stratgique (Buire, 2005) 2005 Vectoriel tablissement scolaire Stratgique (Adu, 2003 b), (BSA Ingnierie, 2003) 2003 Vectoriel Ouvrage Stratgique (Adu, 2003 b), (Adu, 2004), (CNRE, 2005) 2003/2005 Vectoriel Ouvrage dexhaure Stratgique (CNRE, 2005) 2005 Vectoriel Rseau AEP Stratgique (Maulpoix, 2000), (Adu, 2003 a) 2000/2003 Vectoriel Site militaire Stratgique (Adu, 2003 a) 2003 Vectoriel Station-service Stratgique (BSA Ingnierie, 2003) 2003 Vectoriel Transport en commun Stratgique (Adu, 2003 a) 2003 Vectoriel Voirie Stratgique (Prodig, 2002 c), (Adu, 2004) 2002/2004 Vectoriel Infrastructure de sant Sanitaire (BSA Ingnierie, 2003), (Adu, 2003 b), 2003/2005 Vectoriel (MSAS, 2004), (Buire, 2005) Banque conomique (BSA Ingnierie, 2003) 2003 Vectoriel March conomique (Lacassagne, 1996), (Kibily, 1998), 1996/2003 Vectoriel (Diagana, 1999), (Adu, 2003 a), (Adu, 2003 b), (BSA Ingnierie, 2003) Zone dactivits conomique (Lacassagne, 1996), (Kibily, 1998), 1996/2005 Vectoriel (Diagana, 1999), (BSA Ingnierie, 2000), (Ould Mohameden, 2001), (Adu, 2003 a), (Adu, 2003 b), (BSA Ingnierie, 2003), (Buire, 2005), (Cimdet, 2005) Lieu de culte Culturel (BSA Ingnierie, 2003) 2003 Vectoriel Site archologique Culturel (Petit-Maire, 1994) 1994 Vectoriel

    : donne hors modle.

    Lvaluation : les territoires du risque

    Le systme dinformation construit nest pas seulement destin reprsenter, grer et

    restituer cartographiquement des donnes : il doit aussi en faciliter lanalyse. La position et

    lemprise gographiques des objets contenus dans la base sont, de fait, considres comme les

    rvlateurs de structures et de formes dorganisation spatiale sous-jacentes rcurrentes,

    27 Bouamatou Socit Anonyme (BSA). 28 Agence de Dveloppement Urbain (Adu). 29 Centre dInformation Mauritanien pour le Dveloppement conomique et Technique (Cimdet).

    28

  • Chapitre 1

    autrement dit de rgles gnrales dorganisation de lespace (Pumain et Saint-Julien, 1997) : le

    terme danalyse spatiale recouvre un ensemble de mthodes, doutils et de concepts ceux de

    distance, dinteraction, de stratgie spatiale, etc. trs clectique. Et puisque les rouages du Sig

    et ses fonctionnalits (spatiales) nont souvent plus de secrets pour la plupart des thmaticiens

    quils soient gographes ou non une littrature abondante et spcialise y est consacre , il ne

    reste plus ceux-ci qu circonscrire prcisment leurs domaines (thoriques et spatiaux)

    danalyse et de comptences.

    Lvaluation des territoires nouakchottois du risque sest, ici, inspire de la dmarche

    maximaliste et dterministe habituellement observe par les services de ltat en France,

    prenant systmatiquement en compte les effets maxima des accidents. Si lon a, parfois, t

    tent dy associer (voire dy substituer) quelques unes des hypothses de recherche anglo-

    saxonnes au Royaume-Uni, la densit de population et le contexte gographique entrent dans

    la dfinition de la probabilit doccurrence dun vnement , il na gure t possible de

    poursuivre longuement lexprience dans le contexte mauritanien : davantage de donnes fiables

    auraient t ncessaires en effet pour que la tentative savre profitable Lanalyse spatiale des

    risques [cf. Fig. I-4] dinondation, densablement, de pollution, dincendie et daccident par

    croisement de couches dinformations a toutefois permis disoler les zones gographiques les

    plus exposes ainsi que les perturbations attendues des principales fonctions urbaines

    (infrastructures, rseaux, etc.). Des points de faiblesse ont pu tre dsigns en fonction de

    plusieurs scnarios catastrophiques. Un cot humain, social, conomique, patrimonial et