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www.svmed.ch Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur la fixation et l’adaptation de structures tarifaires dans l’assurance maladie (TarMed) mai 2017

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www.svmed.ch

Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses

et un rationnement des soins

Modification de l’ordonnance sur la fixation et l’adaptation de structures tarifaires

dans l’assurance maladie (TarMed)

mai 2017

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2 mai 2017LA SVM SE MOBILISE

Table des matières3 Introduction

6 Gastro-entérologues

7 Chirurgiens orthopédistes

8 Chirurgiens de la main

10 Ophtalmologues

12 Neurologues

14 Urologues

15 Oto-rhino-laryngologues

16 Cardiologues

18 Centres médico-chirurgicaux

19 Radiologues

20 Dermatologues

22 Chirurgiens pédiatriques

24 Oncologues médicaux, onco-hématologues et radio-oncologues

26 Psychiatres et psychothérapeutes

27 Médecins travaillant en EMS

Société Vaudoise de MédecineDirection: Dr Philippe Eggimann, président de la SVM

M. Pierre-André Repond, secrétaire générale de la SVM.

Coordination Michèle Cassani, responsable communication de la SVM

RéalisationInédit Publications SA, www.inedit.ch

impressum

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3mai 2017 LA SVM SE MOBILISE

Modélisées à partir du projet de révision de la structure TarMed mis en consultation par le Conseil fédéral, les réductions du chiffre d’affaires de nombreuses spécialités provoqueront des modifications en profondeur de la pratique médicale. Le rationnement programmé des prestations ambulatoires représente une menace réelle pour la survie de notre système de santé.

Le débat va bien au-delà des habituelles querelles d’experts du système de tarifi-cation. Alors que les médecins sont en passe d’achever une révision complète du TarMed (TARCO) qui servira de base aux négociations avec les assureurs pour la mise sur pied d’un système de financement adapté aux évolutions des besoins

la population et des progrès de la médecine, nous alertons nos autorités politiques et la population sur les effets prévisibles des mesures tarifaires qui bouleversent profondé-ment de la structure et donc les concepts de financement du TarMed instauré en 2004. Comme démontré par les nombreux exemples concrets, ces mesures qui sont contre-pro-ductives sur le plan des coûts globaux de la santé vont provoquer le développement d’une véritable médecine à plusieurs vitesses, que nous avions réussi à empêcher jusqu’à maintenant.

En donnant la parole à ses groupements de spécialités, la SVM veut montrer l’impact concret de cette révision sur la réalité de la pratique médicale quotidienne et de son financement, particulièrement dans les cabinets médicaux.

Les principaux éléments qui émergent de cette démarche sont les suivants:

Rationnement des prestations ambulatoire et transfert vers l’hospitalier– En réduisant massivement le remboursement de nombreuses prestations,

on atteint, et on dépasse même dans de très nombreux cas, leur seuil de rentabilité. – Comme illustré par les exemples saisissants de nombreuses disciplines,

les prestations qui ne bénéficieront plus d’un remboursement adéquat ne pourront plus être réalisées en ambulatoire. Pour en bénéficier, les patients devront être hospitalisés.

– Les patients au bénéfice d’une assurance complémentaire n’auront probablement pas trop de difficulté à trouver un médecin, une clinique ou un secteur hospitalier privé disposé à les prendre en charge et le désagrément sera surtout lié au séjour hospitalier lui-même et à la quote-part à leur charge. Pour la grande majorité des patients à charge de l’assurance de base et qui devront être hospitalisés dans les hôpitaux publics ou reconnus comme tels, l’infrastructure et le personnel disponible, qui sont déjà chroniquement surchargés dans la plupart des disciplines, ne permettront pas de leur garantir l’accès aux prestations, qui seront de fait sévèrement rationnées.

– Ces mesures toucheront massivement les hôpitaux régionaux. Les médecins agréés, qui y effectuent la majorité des prestations spécialisées dont il est prévu de réduire considérablement la tarification, renonceront à les pratiquer dans les hôpitaux régionaux, qui ne seront dès lors plus en mesure de garantir leur mission dans ces domaines.

Non, pas comme cela, Monsieur Berset!

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LA SVM SE MOBILISE4 mai 2017

Fermeture probable des centres d’urgence ambulatoire– Partant d’une évaluation erronée de la réalité des contraintes particulières liées à ce type

d’activité, l ’abandon de la prestation spécifique à la prise en charge en urgence menace de fermeture les centres d’urgence ambulatoire, qui contribuent pourtant à désengorger 7 j/7 aussi bien les cabinets que les hôpitaux.

Baisse de la qualité globale des soins– L’incroyable qualité de notre système de santé, qui nous est enviée loin à la ronde,

repose sur un équilibre subtil entre les secteurs public et privé et sur la transition rapide de l’hospitalier vers l’ambulatoire, qui va elle-même de pair avec les progrès technologiques souvent coûteux. Le renoncement à ces progrès et le retour vers des prestations stationnaires dans des hôpitaux débordés induiront une baisse rapide de l’accès et de la qualité des soins.

– Les modifications tarifaires proposées ne permettront plus l’accès à certaines prestations très spécialisées qui se sont développées en ambulatoire. Les patients se verront dès lors hospitalisés et pris en charge avec des traitements plus anciens associés à plus d’effets secondaires, mais dont le financement sera par contre garanti.

– Notre système de santé public risque de ressembler très rapidement à ceux des pays qui nous entourent, caractérisés par un rationnement et par une qualité des soins reconnue largement suboptimale, pour des coûts comparables en proportion du PIB.

Incohérences dans le pilotage du système de santé– Le transfert à l’ambulatoire est totalement fondé, du point de vue économique

comme du point de vue médical, avec des techniques de moins en moins invasives. Ce sont les mécanismes de financement qui ne suivent pas, car le virage ambulatoire induit mécaniquement un report complet des coûts à charge de l’assurance maladie. A ce propos, il est par ailleurs très surprenant que l’on n’assiste pas parallèlement à une réduction des coûts de l’activité stationnaire, dont seulement 45% sont à charge de l’assurance maladie, le reste étant financée par l’impôt.

– Parallèlement, nos autorités, qui transfèrent ainsi discrètement une partie de leurs charges sur les primes de caisse maladie, en font porter la responsabilité exclusive sur le corps médical. Paradoxalement, l’arrêt programmé de ce processus induira un recul dans l’utilisation des technologies les moins invasives et un afflux vers les services publics, qui seuls pourront combler les déficits par des subventions. Les coûts globaux de la santé augmenteront encore plus rapidement;

– A contre-sens avec les démarches de prévention telle que le programme de dépistage du cancer colorectal et du sein.

Rapport entre le chiffre d’affaires et le revenu des médecins indépendants– Le chiffre d’affaires des médecins indépendants, qui est régulièrement jeté en pâture

dans les médias, qui le présentent comme un revenu, mérite d’être détaillé. Il permet d’assurer les charges des cabinets (personnel, loyer, charges fixes) et de maintenir l’infrastructure au niveau des exigences découlant de la multiplication des normes concernant tant la sécurité que la qualité des soins.

– Globalement, le revenu brut représente environ la moitié du chiffre d’affaires, avec lequel les médecins indépendants doivent vivre, mais également se constituer une retraite sur une période raccourcie par le temps de formation avant l’installation (en moyenne dix à quinze ans après l’obtention du diplôme de médecin pour la plupart des spécialités). Sur vingt-cinq ans d’activité en moyenne, soit environ un quart de moins que la plupart des cadres dans d’autres domaines, il faut aussi tenir compte

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LA SVM SE MOBILISE 5mai 2017

du temps nécessaire pour constituer la patientèle, celui nécessaire pour rembourser le capital investi à l’installation et celui consacré à la formation continue. Si l’on prend en compte le service de garde et la charge administrative, la durée effective à plein temps de travail hebdomadaire se situe très au-delà des 50 heures.

– Au total, rapporté à leur durée d’activité professionnelle et au temps de travail hebdomadaire durant celle-ci, le revenu effectivement disponible des médecins indépendants ne correspond qu’à environ un tiers du chiffre d’affaires annuel.

NON! ARRÊTONS DE FUSTIGER LES MÉDECINSIl est parfaitement injuste de s’acharner ainsi sur tout ou partie d’une profession, dont la relève est loin d’être assurée, et illusoire d’en attendre un impact sur les coûts globaux de la santé. Plus grave, ce discours simpliste masque l’incapacité à reconnaître les responsa-bilités. Au fil du temps, de nombreux parlementaires ont contribué à rendre notre système de santé ingérable et le maintiennent délibérément dans ce triste état en raison des béné-fices directs et indirects qu’ils tirent de cette situation!

En dépit de cette rhétorique, selon le récent sondage du journal Le Temps, à l ’occasion du Forum des 100 centré sur la santé, la population maintient un degré de confiance élevé dans le système de santé, et, plus particulièrement envers les compétences de leurs médecins et la qualité des soins qu’ils leur prodiguent. Attaché au libre choix du médecin, ils peinent cependant à comprendre les hausses incessantes des coûts de la santé, et plus spécifique-ment celles qui se reportent sur les primes de caisse maladie.

OUI, LES MÉDECINS SONT PRÊTS À EN DISCUTER ET À AGIR POUR LE BIEN DE LEURS PATIENTS!De multiples paramètres expliquent la hausse continuelle des coûts de la santé et de ceux à charge des primes de caisse maladie. Quelles en sont les parts relatives au progrès techno-logiques, au transfert de l’hospitalier vers l’ambulatoire, au vieillissement de la population, à l’amélioration de la qualité de vie, au maintien à domicile?

L’analyse des données à disposition pour le canton de Vaud montre que le chiffre d’affaires des cabinets indépendants, celui de l’ambulatoire hospitalier (hôpitaux publics et reconnus d’intérêt public) et les frais liés à l ’hospitalisation représentent chacun environ un tiers des coûts à charge de l’assurance maladie. Au cours des cinq dernières années, l’augmenta-tion globale des coûts hospitaliers stationnaire et ambulatoire, qui sont sous le contrôle direct ou indirect de l’Etat, est presque deux fois plus rapide que celle des cabinets indépen-dants. Plutôt que de s’invectiver et de se rejeter mutuellement la responsabilité de la hausse des primes de caisse maladie, il est désormais nécessaire d’analyser en profondeur et en commun avec l’ensemble des partenaires de quoi sont faites ces hausses, de manière à pou-voir se concerter sur les mesures susceptibles d’en limiter les effets.

La SVM, son comité, les membres de ses groupements d’activité et de région qui œuvrent quotidiennement au service de la population sont prêts à contribuer activement à ces ana-lyses et à l’étude de mesures qui pourraient être prises dans le cadre du partenariat privé-public que nous avons initiés, développé et que souhaitons maintenir en dépit des difficultés liées aux situations de crise auxquelles nous sommes confrontés. ■

DR PHILIPPE EGGIMANN, PRÉSIDENT PIERRE-ANDRÉ REPOND, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

DE LA SOCIÉTÉ VAUDOISE DE MÉDECINE (SVM) DE LA SOCIÉTÉ VAUDOISE DE MÉDECINE (SVM)

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LA SVM SE MOBILISE 6 mai 2017

Après 50 ans, 1 personne sur 4 développera une lésion pré-cancéreuse du colon appelée polype. Certains polypes évo-

lueront sur dix ans en cancer. Le cancer colorectal est souvent découvert à un stade avancé qui rend son traitement difficile et coûteux. Heureusement, il est possible d’enlever les polypes avant qu’ils ne dégénèrent et c’est l’objectif principal des campagnes de prévention du cancer colorectal qui ont été mises en place depuis quelques années. Une résection de polype sera effectuée chez environ un tiers des Vaudois au cours de leur exis-tence. Cette intervention se fait lors d’un examen appelé coloscopie. La coloscopie est donc efficace pour détecter et préve-nir le cancer colorectal. Avec la révision du tarif TarMed imposée par M. Berset dès janvier 2018, le remboursement d’une coloscopie chutera de 26 à 79%, surtout si des polypes sont enlevés au cours de la même intervention. Avec le nouveau tarif, les gastro-entérologues ne pourront plus maintenir leur infras-tructure au meilleur niveau et rétribuer du personnel qualifié pour les assister dans ce type d’interventions, en particu-

Gastro-entérologuesA contre-sens avec les actes de prévention.

lier pour la surveillance indispensable au cours de la sédation administrée pour réaliser l’intervention. Pour les patients, cela signifiera qu’après une première coloscopie diagnostique, une seconde coloscopie interventionnelle sera néces-saire, avec des délais augmentant le risque de transformation en cancer et des coûts supplémentaires. Faute du financement nécessaire, ces seconds exa-mens seront alors effectués dans une structure hospitalière publique, dont le déficit devra être financé par les impôts.

A terme, un TarMed inadéquat fera donc surtout le bonheur des assurances, qui n’attendent que cela pour développer des assurances privées ambulatoires autorisées par la LAMal qui couvriront une partie des prestations devenues défi-citaires dans le régime de base. Cette situation dommageable démontre le mépris des progrès et des contraintes d’une médecine moderne dans lequel cette révision étatique des tarifs est conçue, visant à donner le message que les coûts de la médecine sont unique-ment liés aux honoraires des médecins, alors que la hausse des coûts de la méde-

cine à charge des primes d’assurance maladie est bien plus complexe. Sous couvert d’économies qui ne représentent que 1% des coûts globaux de la santé et qui restent à démontrer, les propositions de révisions tarifaires du Conseil fédéral conduisent à un rationnement des soins pour ceux qui ne bénéficient que de l’assurance maladie de base.

En fait, le revenu des médecins, qui ne représente que moins de la moitié de leurs honoraires, dont une part croissante sert à couvrir les frais généraux, parmi les-quels les salaires du personnel de leurs cabinets, ne font que baisser depuis long-temps déjà. Vos gastro-entérologues ont demandé à M. Berset un délai à 2019 afin de terminer les modifications du TarMed qu’il avait lui-même lancées dans le cadre du projet TARCO. ■

Cas illustratif de l’impact de la réduction de

la valeur de l’acte en gastro-entérologie

sur la bonne prise en charge des patients:

l ’éradication de varices œsophagiennes

chez un patient cirrhotique. Monsieur C.,

atteint de cirrhose, est hospitalisé pour rup-

ture de varices œsophagiennes. Une gas-

troscopie a permis la mise en place de

ligatures élastiques. Les recommandations

de prise en charge sont l’éradication com-

plète de ces varices par ligatures, car un

bêtabloquant est contre-indiqué en raison

de la sévérité de sa maladie et du risque de

complications qui pourrait mener à la mort.

Une gastroscopie chez un patient cirrho-

tique comporte des risques hémorra-

giques au moment des ligatures, puis dans

les jours qui suivent. Il est souvent néces-

saire de procéder à plusieurs séances pour

diminuer le risque hémorragique et de

mortalité. Cette intervention nécessite une

expertise pour être pratiquée en cabinet

sans anesthésiste mais sous sédation sur-

veillée par du personnel spécialement

formé, qui augmente le coût de prise en

charge. Avec une réduction de 23% du rem-

boursement du traitement par ligatures

élastiques, l’expertise du gastro-entéro-

logue exerçant en cabinet et les risques

liés aux gestes sont discrédités. Un trans-

fert des patients cirrhotiques pour préven-

tion d’hémorragies digestives vers les

centres hospitalo-ambulatoires entraînerait

un retard dangereux dans la prise en

charge, avec la survenue d’hémorragies

non prévenues, des hospitalisations coû-

teuses, voire des décès qui auraient pu être

évités par le maintien de la capacité de

financement de la bonne pratique médi-

cale, actuellement en cours. ■

EXEMPLE

DR PAUL WIESEL, GROUPEMENT

DES GASTRO-ENTÉROLOGUES VAUDOIS

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La nouvelle tarification fait chuter la valeur des gestes opératoires de 46% en moyenne, toutes opérations confondues, en orthopédie sans la main (y compris celles habituellement non ambulatoires).

Face à cette dérive insensée vers le low cost, mettant le chirurgien au salaire horaire proche de celui du coiffeur, de nombreuses opérations, certes non vitales, mais qui apportent une amélioration fonctionnelle chez nos patients, ne seront plus effec-tuées, ou seulement avec grande parcimonie. On peut citer les arthroscopies du genou pour lésions méniscales, les ablations de matériel d’ostéosynthèse gênant ou encore les cures d’hallux valgus, métatarsalgies et autres cures d’orteils en mar-teau. A défaut, les patients devront payer de leur poche leurs semelles à CHF 400.–, souvent peu efficaces.

Les hôpitaux ayant lourdement investi pour développer l’offre opératoire ambulatoire comme les hôpitaux périphériques verront leur activité fortement baisser et leurs investissements non rentabilisés. Les comptes des hôpitaux publics et ceux reconnus d’intérêt public tomberont dans le rouge. Pourra-t-on toujours solliciter la généreuse aide de l’Etat et donc de nos impôts? La tutelle étatique n’en sera que plus forte.

Il faut aussi relever que les nouveaux tarifs seront inférieurs à ce qui se pratique dans les pays ouest-européens.

Le PIB par habitant de la Suisse est le double de celui de la Belgique (USD 80 000.– pour USD 40 000.– environ), le prix moyen des terrains et des loyers en Suisse est le double ou le triple et celui des médicaments pas loin du quadruple. Pourtant, la valeur d’une arthroscopie du genou, diagnostic et méniscectomie, sera inférieure de près d’un tiers en Suisse. Cherchez l’erreur… (Intervention en Belgique = € 279.– (N250+N60 x € 0,9), soit CHF 307.– (€ 1 = CHF 1,10); en Suisse, on tombe à 233 points TarMed, soit CHF 224.–, soit une différence de –27%.) On a pu constater ces dernières années un afflux de spécialistes venant de l ’étran-ger, en réponse à la demande croissante de prestations orthopédiques de la popu-lation vieillissante. Le sens de la migration va-t-il s’inverser et le rationnement des soins avec? ■

Chirurgiens orthopédistesVéritable dérive vers le low cost?

mai 2017 LA SVM SE MOBILISE 7mai 2017

DRS MICHEL SADOWSKI ET NEDELJKO MAHMUTOVIC,

GROUPEMENT DES CHIRURGIENS ORTHOPÉDISTES VAUDOIS

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LA SVM SE MOBILISE 8 mai 2017

EN PRÉAMBULE La plupart des chirurgiens de la main actuellement installés dans le canton de Vaud ont d’abord obtenu un titre FMH d ’une spécialité chirurgicale «mère» (orthopédie, chirurgie plastique, etc.) et ont ensuite acquis, pendant au mini-mum deux ans, mais souvent pendant trois à cinq années supplémentaires, une formation complémentaire en chirurgie de la main. Ce n’est que depuis 1er janvier 2015 qu’une formation de spécialiste en chirurgie de la main à part entière a été reconnue par la Confé-dération. Tous ces chirurgiens se sont donc formés pendant dix, voire douze ou treize ans avant d’ouvrir leur propre cabinet.

L’activité du chirurgien de la main se fait en partie en salle d’opération, l’autre partie consistant à examiner de nou-veaux patients à son cabinet et à procé-der aux contrôles postopératoires à moyen et long terme, ainsi qu’à prendre en charge des patients ne nécessitant pas de traitement chirurgical, c’est-à-dire en consultant.

Le chirurgien de la main a comme source de revenu ses interventions (facturées selon TarMed, car 95% des interventions se font en ambulatoire; pour les 5% res-tants, la moitié est également facturée selon TarMed, puisqu’il s’agit de cas pris en charge par les assureurs LAA) et les honoraires générés par ses consulta-tions. Contrairement à d’autres (généra-listes ou spécialistes), il ne procède à aucun examen de laboratoire, ECG ou autre examen particulier pouvant être facturé, et rarement à des examens de radiologie, dont la facturation s’ajoute et complète éventuellement les revenus du cabinet. Comme pour tous les cabi-nets, il a des charges, dont les princi-pales sont les salaires du personnel, le loyer et également une assurance res-ponsabilité civile, dont le montant est

Chirurgiens de la mainPas d’intervention sans assistance opératoire.

toutefois fortement majoré au vu de son activité chirurgicale par rapport à un médecin sans activité interventionnelle.

EN PRATIQUEL’introduction du tarif Berset va globale-ment réduire de 50% des honoraires générés par l ’activité chirurgicale du chirurgien de la main, ce qui n’est évi-demment pas acceptable, et condamne une grande partie de cette activité qui ne pourra plus être réalisée en ambulatoire car cela compromet la survie écono-mique de son cabinet.

L’exemple le plus parlant est celui de l’opération du tunnel carpien, très représentative de notre spécialité, puisque plus de 25 000 opérations de ce type se pratiquent en Suisse chaque année, sous anesthésie loco-régionale, ambulatoirement.

Dans le tarif TarMed actuel, le temps permettant de calculer la rémunération de ce geste est de 34 minutes (prestation en soi, préparation, finition et rapport), ce qui est légèrement inférieur à la réa-lité (habituellement, entre l ’entrée du patient en salle d’opération et l ’entrée du patient suivant, il s’écoule 40 à 45 minutes). Mais il ne faut surtout pas que le patient présente le moindre petit problème entravant le bon déroulement de l ’intervention, comme une poussée hypertensive, qui va notablement rallon-ger la durée de l’opération. Il ne faut pas non plus que le patient présente une malformation anatomique ou une pathologie supplémentaire rallongeant le temps opératoire! Si tel est le cas, le temps supplémentaire passé par le chirurgien en salle d’opération, qui peut aller de 10 à 30 minutes, ne peut pas être facturé en plus, et cela peut aller de 10 à 30 minutes!

Ce temps de 34 minutes est de plus cal-culé pour un chirurgien formé, expéri-

menté, et non pour un assistant en for-mation! L’opération est actuellement rémunérée à 177,12 points, soit, pour le canton de Vaud, à CHF 170.–. Aucune amélioration technique pouvant rac-courcir le temps opératoire n’a été déve-loppée au cours des trente dernières années, et en particulier pas depuis l’introduction du TarMed.

Dans la deuxième révision tarifaire proposée par le Consei l ler fédéral Berset, cette opération ne change pas (34 minutes pour la prestation en soi, la préparation, la finition et le rapport); par contre, les honoraires du chirurgien passent de 177,12 à 82,14 points, soit une diminution de 53%. Le chirurgien va toucher CHF 78,85 non seulement pour prendre le risque de léser un nerf essentiel à la fonction de la main, voire des tendons, mais surtout pour passer 45 minutes en salle d’opération, soit un tarif horaire de CHF 104.–!

Si l ’on regarde les chiffres de 2016, 884 interventions de tunnel carpien ont été pratiquées dans deux grandes cliniques lausannoises, par des chirurgiens de la main formés et expérimentés. Ces inter-ventions représentent au minimum 30% des opérations annuelles de chacun d’entre eux.

Au vu des conditions économiques pro-posées aux chirurgiens de la main par le tarif Berset, ces derniers n’auront comme seule solution, pour assumer les charges de cabinet et, simplement, gagner leur vie, que celle de renoncer à pratiquer certaines opérations. A la place, ils devront se résoudre à consulter, activ ité décemment rémunérée (et encore), plutôt que d’opérer.

De ce fait, une très grande partie des patients nécessitant une opération de tunnel carpien, ou autre, seront, après une première consultation au

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mai 2017

cabinet du spécialiste en ville, référés au Centre de la main du CHUV, qui bénéfi-cie de subventions publiques. Une nou-velle consultation aura lieu là-bas et, enfin, la date de l ’opération pourra être fixée. Cela va impliquer pour le patient un retard significatif dans sa prise en charge chirurgicale, un allongement de sa période d’inconfort, voire de souf-france, une augmentation de la durée d’incapacité de travail. En plus, pour les cas aigus, va exister un risque augmenté de présenter une atteinte définitive de troubles de la sensibilité de sa main, troubles qui n’auraient pu être que tem-poraires en cas d’intervention rapide. Nous ne parlerons pas du fait que l ’ex-périence professionnelle des chirurgiens de la main installés depuis de nom-breuses années ne sera plus mise à la disposition de ces patients. Cela va aussi augmenter les coûts directement liés à cette pathologie courante, vu l’augmen-tation du nombre de consultations (plus d’intervenants). En outre, ce transfert de patients vers les hôpitaux publics aura pour conséquence inéluctable la fermeture de centres de chirurgie ambu-latoire et, de ce fait, le licenciement du personnel paramédical qui y travaille actuellement.

Cette situation de la prise en charge du tunnel carpien est significative au vu du grand nombre d’interventions de ce type pratiquées chaque année, mais cet exemple doit être transposé à la quasi-totalité des interventions en chirurgie de la main suite aux modifications de tarif proposées.

Il ne faut pas non plus oublier la problé-matique liée à l’assistance opératoire. Dans un certain nombre d ’interven-tions, la présence d’un assistant, méde-cin, spécialiste, est requise pour secon-der le chirurgien dans l’accomplissement de son geste. Sa présence permet ainsi une meilleure qualité de l ’intervention et une diminution significative du temps opératoire, avec pour corollaire une diminution du risque de complication, et en particulier du risque d’infection.

Un autre exemple: l ’arthroscopie «stan-dard» du poignet (24.2490) ne tient pas

compte de l ’aide d ’un assistant, et sa présence à ce stade de l ’intervention n’est pas rémunérée.

En fonction des découvertes préopéra-toires (qui ne peuvent souvent pas être anticipées, malgré les examens préopéra-toires), il peut s’avérer nécessaire de pra-tiquer un geste plus important, comme de procéder à la refixation du ligament triangulaire (24.2510). Dans ce cas-là, la présence de l ’assistant est requise et rémunérée à 43,49 points (CHF 41,75). Dans cette situation, l’assistant (évidem-ment présent dès le début de l’interven-tion) va passer 86 minutes en salle d’opé-ration et être rémunéré CHF 41,75, soit un tarif horaire de CHF 29,12. Il ne sera donc plus possible pour l ’opérateur de trouver un collègue pour l’assister dans ce genre d’intervention, qu’il ne pourra plus effectuer dans le même temps opé-ratoire. Il vaudra mieux pour l’assistant de rester consulter à son cabinet!

L’introduction de ce nouveau tarif aura également comme conséquence, à moyen ou long terme, une diminution dras-tique du nombre de jeunes médecins voulant éventuellement se former dans une spécialité chirurgicale qui se pratique essentiellement de façon ambu-latoire, comme c’est le cas de la chirurgie de la main. Dès lors, mieux vaudra pour eux choisir soit une spécialité chirurgi-cale différente, soit une formation plus courte et avec une prise de risque de tout instant moins grande.

Ainsi, sous prétexte d ’économies de moins de 1% des coût globaux de la santé en Suisse, la pénurie de spécialistes et le rationnement des prestations de chirurgie de la main sont donc program-més. Il est quand même très étonnant que la révision tarifaire que le conseiller fédéral Berset veut imposer par voie d’ordonnance ne tienne pas compte de la spécificité de notre formation haute-ment spécialisée, des risques encourus par le patient comme par le chirurgien lors d ’une opération, dans la fixation de la rémunération des prestations. Ceci est d ’autant plus difficile à com-prendre que notre système de santé nous l ’impose! N’avons-nous pas l ’obli-

gation d’obtenir du patient son consen-tement éclairé avant une intervention, ce qui n’est pas demandé dans les spécia-lités non interventionnelles? Même les assurances tiennent compte de notre spécificité, puisque les primes des assu-rances RC sont sensiblement plus éle-vées dans notre spécialité.

Les chirurgiens de la main vaudois demandent simplement que leur activité soit rémunérée de façon adéquate, en tenant compte de ce qu’ils apportent à leurs patients, de leur disponibilité permanente, de la durée de leur forma-tion, des risques qu’ils prennent et assu-ment chaque jour en opérant, des charges liées à l’activité d’un cabinet, des primes d’assurance responsabilité civile, parti-culière vu le type de leur pratique… Ils veulent seulement gagner leur vie décem-ment, ce qu’une diminution de 50% de leurs honoraires chirurgicaux ne leur permettra plus et qui ne serait, du reste, accepté dans aucune profession!

Pendant des années, les instances politiques ont préconisé le transfert de l ’hospitalier à l ’ambulatoire, ce qui, d’ailleurs, a toujours été le cas de notre spécialité, augmentant ainsi mécanique-ment les coûts à charge exclusive de l ’assurance maladie sans participation de l ’Etat, comme c’est le cas pour le financement hospitalier. Et maintenant, M. Berset veut nous imposer un tarif diminué de moitié, et ce, sans aucune justification, puisque ni la durée d’in-tervention, ni le matériel utilisé en salle, ni la qualité de la formation et encore moins la difficulté de la spécia-lité n’ont changé! ■

DR NICOLAS FAVARGER, GROUPEMENT VAUDOIS

DES CHIRURGIENS DE LA MAIN (GVCM)

LA SVM SE MOBILISE 9mai 2017

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LA SVM SE MOBILISE10 mai 2017

L es ophtalmologues suisses représentent 1% des médecins de ce pays. En Suisse unique-ment, cette spécialité est divisée en deux titres FMH – ophtalmologie médicale et oph-

talmochirurgie –, qui requièrent une formation respec-tive d’au moins cinq et sept ans après le diplôme de médecin. Il s’agit d’une spécialité qui connaît des déve-loppements technologiques importants, qui ont évolué très rapidement au cours des quatre ou cinq dernières décennies. Cette technologie devenue indispensable à la bonne pratique médicale représente un coût qui ne peut être négligé et répond à une demande croissante de la population, puisque ses exigences visuelles sont en constante augmentation dans le monde moderne et pour toute catégorie d ’âge (écrans divers, vision requise pour la conduite automobile, etc.). A cela s’ajoute le vieillissement croissant de la population et la nécessité de prise en charge de pathologies liées à l ’âge de plus en plus fréquentes.

Les allégations de M. le Conseiller fédéral Berset, large-ment colportées par les médias, qui affirment que la durée des interventions ophtalmologiques a diminué drastiquement ces dernières années sont totalement fausses. L’exemple habituellement utilisé, celui de l’opé-ration de la cataracte, est particulièrement démonstra-tif, car la durée de cette intervention n’a pratiquement pas changé depuis les années 1990, soit bien avant l’in-troduction du Tarmed en 2004. De même, il est cho-

quant d’entendre M. Berset dire que l ’utilisation du «femtolaser» aurait réduit le temps chirurgical, alors que cette technique conduit, à l’inverse, à une augmentation du temps et du coût de cette intervention (environ CHF 700.– entièrement à la charge du patient), expliquant ainsi le fait que cette technique n’est que peu utilisée en Suisse. Ces affirmations erronées, utilisées à titre de «faux exemples», sont destinées au grand public comme un justificatif de l ’action du Conseil fédéral. Dans les faits, elles détournent l’attention de la réalité. La réduc-tion arbitraire des temps impartis aux examens ou aux interventions et l ’abolition de la «valeur intrinsèque quantitative» qui, jusqu’ici, différenciait la durée de for-mation nécessaire à la réalisation de gestes complexes aboutissent, dans ce tarif imposé, à des réductions moyennes de 45% de la valeur des prestations chirurgi-cales et d’environ 10% des prestations médicales en ophtalmologie.

Pour donner un exemple, le chirurgien opérant une cataracte, intervention microchirurgicale effectuée sous microscope, se verra rémunéré 67,64 points à CHF 0,96 (312,23 points de 2004 à ce jour). Malgré les progrès technologiques, il est en pratique difficile qu’un même chirurgien puisse opérer plus de deux patients par heure dans une même salle d’opération. De ce fait, les réductions envisagées mettent en péril le système de soins en ophtalmologie et conduiront très probable-ment à la fermeture des hôpitaux et cliniques non uni-versitaires (reconnus comme centres B et C), avec les licenciements de personnel médical, paramédical et administratif que cela implique. Ainsi, un très grand nombre de patients devront affluer vers les hôpitaux publics ou cliniques A, qui ne pourront pas les absorber. Les listes d’attente s’allongeront et la situation pourrait ressembler à celle du Royaume-Uni, où ce type de rationnement des soins conduit à ce que les patients décèdent souvent avant d’avoir pu être opérés de la cata-racte. Si, pour survivre, les ophtalmochirurgiens suisses sortent de remboursements prévus, une médecine à deux vitesses verra le jour, permettant aux plus nantis d’accéder aux soins hors LAMal.

Les personnes souffrant de dégénérescence maculaire liée à l ’âge perdront leur vision centrale en attendant de pouvoir bénéficier des soins capables de stabiliser leur maladie (injections intravitréennes), conduisant ainsi à une morbidité accrue des personnes du 4e âge avec

OphtalmologuesPosition des ophtalmologues vaudois à l’encontre de l’ordonnance fédérale du 22 mars 2017 sur la fixation et l’adaptation des structures tarifaires dans l’assurance maladie.

M. Regamey, chauffeur de poids lourd de 59 ans, pré-

sente une cataracte de l ’œil droit qui a évolué en

quelques mois. Il ne remplit plus les exigences pour le

maintien de son permis professionnel et doit donc être

opéré.

Malheureusement, les listes d’attente pour l’opération

sont telles que, depuis six mois, il attend une convoca-

tion et se trouve en arrêt de travail à 100% depuis lors. Il

reçoit une lettre recommandée lui signifiant son licen-

ciement: son patron, qui dirige une petite entreprise, ne

peut plus attendre qu’il reprenne le travail. Résultat, il se

retrouve au chômage. ■

EXEMPLE

Page 11: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

DRE EVA DE ANCOS,

ASSOCIATION DES OPHTALMOLOGUES VAUDOIS (AOVD)

restriction de leur indépendance et à leur mise en institu-tion plus rapide. Les centres de formation en ophtalmolo-gie seront touchés de plein fouet par ces réductions, puisque la majeure partie des soins qui y sont réalisés le sont en mode ambulatoire et concernent des interven-tions complexes. Ces dernières étant dévalorisées jusqu’à 87% devront être réalisées par les chirurgiens les plus expérimentés, qui n’auront plus de temps à consacrer à la formation de la relève médicale. En outre, il est à prévoir que l’abolition de la valeur intrinsèque conduira à une démotivation des jeunes médecins à acquérir une for-mation chirurgicale de pointe, puisque la nouvelle tarifi-cation ne valorisera ni leur formation, ni leur prise de risque lorsqu’ils devront opérer des cas difficiles. La Suisse manquera, à terme, de médecins spécialisés en nombre suffisant pour faire face à la demande de presta-tion. Les hôpitaux publics verront également leur déficit s’accroître à cause de la disparition de la compensation pour «urgence», prestation qu’ils ne pourront plus factu-rer. Tous ces facteurs additionnés aggraveront inévitable-ment les déficits financiers des hôpitaux publics, qui devront bien évidemment être comblés par les contri-buables. Cette sombre prévision est confirmée par H+.

En conclusion, cette ordonnance qui impose des réduc-tions tarifaires actuellement ciblées à des spécialités comme la nôtre ne conduira pas aux économies annon-cées. Par le rationnement induit de nombreuses presta-tions spécialisées ambulatoires, elle déstabilisera le sys-tème de santé. En compromettant la prise en charge des patients, elle conduira à une baisse significative de la qualité des soins en Suisse et réduira inexorablement une grande partie de l’autonomie de la population. Les ophtalmologues demandent aux organisations consul-tées de refuser cette ordonnance, car elle ne respecte pas les principes d’économicité et d’équité (art.46 al. 4 LAMal). Elle ne respecte pas l’article 43 al. 6 LAMal qui dit que les tarifs doivent être fixés d’après les règles appli-cables en économie d’entreprise. Les calculs théoriques d’économies potentielles, qui ne représentent que moins de 1% des coûts de la santé en Suisse, n’ont pas tenu compte des effets pervers qui vont suivre, déplaçant les coûts de la santé des assurances obligatoires des soins vers le financement public (impôts-contribuables). ■

LA SVM SE MOBILISE 11mai 2017

Mme Lang, 83 ans, vit seule et remarque une baisse

rapide de sa vision de lecture avec des déformations

des lettres. Elle consulte immédiatement son ophtal-

mologue, qui constate que la partie centrale de la rétine

présente des altérations importantes. Des injections

dans les deux yeux peuvent stabiliser la situation, qui va

inévitablement empirer sans celles-ci. Ces traitements

doivent se faire dans des locaux stériles et pouvaient

autrefois être pratiqués en clinique. Depuis la modifica-

tion du Tarmed au 1er janvier 2018, les cliniques y ont

renoncé, car les remboursements sont insuffisants pour

couvrir leurs frais. L’ophtalmologue essaie d’envoyer

Mme Lang à l’hôpital public; malheureusement, la liste

d’attente est telle qu’on ne peut la recevoir rapidement.

Lorsqu’elle est enfin prise en charge, sa vision a telle-

ment diminué qu’elle est devenue malvoyante. Plus

aucun traitement ne peut l’aider. Elle doit être placée en

institution. ■

EXEMPLE

Page 12: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

LA SVM SE MOBILISE12 mai 2017

Cette révision a pour but une économie de 700 millions de francs (soit moins de 1% du budget national de la santé). Force est de constater un acharnement du monde poli-

tique, et plus particulièrement du conseiller fédéral Berset, sur la pratique de la médecine ambulatoire de cabinet, qui ne représente que environ un tiers des coûts à charge de la LAMal, sous le couvert d’écono-mies financières qui demeurent à démontrer.

Dans un contexte tarifaire complexe, on observe un conseiller fédéral qui n’attend pas les conclusions d’un travail qu’il a lui-même autorisé (démarches pour la nou-velle tarification TARCO) et qui fixe par ordonnance, grâce à une compétence subsidiaire aussi obsolète que le TarMed lui-même, des tarifs qui aboutissent à des diminutions tous azimuts, en particulier dans le domaine de la neurologie.

Le groupement que je représente a déjà subi une dimi-nution de la valeur du point technique (PT) pour l’en-semble des prestations de 8,5% en 2014, destinée à la revalorisation de la médecine de premier recours. En tant que spécialistes, nous avons été considérés comme un groupe cible pour cette démarche, alors que le revenu moyen d’un neurologue est équivalent, sinon inférieur, à celui d’un médecin de premier recours.

Cette deuxième révision va ajouter une baisse globale du chiffre d’affaires de l’ordre de 8%, alors que l’étude de l’évolution des charges sociales (locaux, personnel, matériel, etc.) de plusieurs cabinets lausannois révèle leur augmentation de 25% entre 2005 et 2015. Nous relevons que les arguments avancés pour justifier les modifications du PT ne reflètent pas l’évolution des coûts à notre charge.

La nouvelle tarification du point médical (PM) se justi-fie, en partie, par l’uniformisation de la valeur intrin-sèque à 0,968. Tout aussi discutable que puisse être cette décision, nous relevons qu’elle s’applique sans que la durée de la formation postgraduée n’ait été uniformi-sée dans le même temps.

Par ailleurs, en analysant de plus près les nouveaux tarifs, les mathématiques seules n’expliquent que diffi-

cilement les variations, qui oscillent entre +1% et –22,65% pour les prestations que nous utilisons réguliè-rement. Ceci est vrai pour toutes les spécialités, et plus particulièrement pour les spécialités chirurgicales avec lesquelles nous collaborons étroitement. Une très grande partie des prestations réalisées par les neurolo-gues sont non interventionnelles (dites intellectuelles) et, néanmoins, le chiffre d’affaires (CA) global d’un neu-rologue indépendant va diminuer de l’ordre de 9-10% et son revenu de 18 à 20%.

Certaines prestations vont être l’objet de restrictions de facturation (nombre limité sur un temps donné) et ceci nous inquiète. Il ne va plus être possible, par exemple, de surveiller un patient au cabinet plus de 60 minutes (maximum quatre fois 00.1370 par séance). Cela signi-fie qu’il faudra soit renoncer au geste associé à cette surveillance et adresser le patient à l ’hôpital, soit l ’ef-fectuer comme requis par la bonne pratique (après une ponction lombaire, une perfusion de médicaments…) et renoncer alors à un remboursement adapté. Dans le pire des cas, nous serons forcés de renvoyer prématu-rément le patient à domicile, avec le risque de complica-tions qui en découle. C’est naturellement contraire au principe d’économicité et, plus important encore, cela pourrait conduire à ne plus pouvoir placer la sécu-rité du patient en premier lieu.

Une part de l’activité ambulatoire d’un médecin com-prend de multiples tâches administratives et d’organisa-tion au bénéfice direct du patient. Ces activités s’effec-tuent en l’absence du patient. La réduction de 50% de l ’enveloppe de ces prestations nous apparaît comme extrêmement défavorable au patient lui-même et parti-culièrement inadaptée à la situation administrative des cabinets, dont la charge n’a fait qu’augmenter au cours de ces cinq-dix dernières années. Vouloir restreindre ce type d’activité équivaut à réduire la qualité de la prise en charge de nos patients, ce qui est inacceptable.

Les craintes du groupement des neurologues sont triples. Nous craignons la dérive vers une médecine à deux vitesses, au vu de la baisse de la valeur de l ’en-semble des prestations liées à la neurologie, dont le montant s’approche dangereusement de la non-rentabi-lité avec la révision proposée du TarMed 1.09.00, alors

NeurologuesLe groupement des neurologues vaudois a bien pris note des modifications prévues par l’ordonnance sur la deuxième révision du TarMed 1.09.00, qui devrait prendre effet au 1er janvier 2018.

Page 13: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

LA SVM SE MOBILISE 13mai 2017

qu’il franchit très nettement cette frontière pour cer-taines spécialités chirurgicales. Il semble incongru qu’un conseiller fédéral socialiste puisse être à l’origine d’une telle évolution du monde de la santé!

La baisse programmée du chiffre d’affaires des neurolo-gues compromet le financement nécessaire au maintien du matériel d’examen à niveau et risque de conduire à une pénurie de neurologues. La jeune génération n’osera pas prendre le risque financier lié à une pratique indépen-dante dans de telles conditions. Actuellement, la relève des neurologues dans le canton de Vaud fait déjà défaut. Toute l ’activité au bénéfice d’une population vieillissante et qui augmente chaque année qui ne pourra pas être absorbée par les neurologues indépendants en activité va être reportée vers l’activité hospitalière.

Il en va de même pour les expertises, pour lesquelles ilest déjà difficile dans certains cantons de trouver des prestataires spécialisés qui acceptent d’effectuer ce type de travail. Diminuer ce type de prestations en grande partie intellectuelles est simplement un mépris de la valeur de ce travail.

Le groupement des neurologues exerçant en cabinet est très inquiet au sujet des répercussions de l ’entrée en vigueur de la nouvelle tarification, car elle va mettre en danger le fonctionnement, non seulement du réseau neurologique ambulatoire, mais également, par voie de conséquence, les institutions hospitalières, avec une surcharge de patients et ses corollaires, à savoir les risques de complications précoces, le retard de prise en charge, les erreurs de diagnostic ainsi que les délais d’attente aux urgences. Risquer un tel démantèlement et un rationnement des prestations ambulatoires pour une économie de 1% des dépenses liées à la santé nous apparaît comme injustifié.

La démarche consiste en un flamboyant paradoxe dans le contexte de la stratégie Santé2020, qui préten-dait viser exactement l ’inverse et favoriser l ’activité ambulatoire! ■

DR JULIEN MORIER,

GROUPEMENT DES NEUROLOGUES VAUDOIS

Page 14: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

LA SVM SE MOBILISE14 mai 2017

L’objectif de cette deuxième révi-sion est l’économie de 700 mil-lions de francs dans le domaine de l ’ambulatoire. Un véritable

débridement du TarMed actuel, avec des retenues différenciées croissantes selon les volumes de points et les valeurs intrinsèques qui permettent de compen-ser le temps nécessaire à l’acquisition des compétences spécialisées.

Décision arbitraire, technocratique, prise sans concertation avec les médecins, dont les conséquences s’observeront à deux niveaux: l’activité en cabinet et l’ac-tivité chirurgicale ambulatoire.

Concernant l’activité de consultation en cabinet, une baisse du chiffre d’affaires de 10% est programmée du fait de l’uni-formisation de la dignité, mais dès que des examens ou explorations spécialisés seront pratiqués, la chute atteindra près de 20%.

Concernant l’activité chirurgicale ambu-latoire, la baisse programmée est elle aussi très significative, jusqu’à plus de 60% pour les prestations les plus tech-niques. Cette proposition ne se basant que sur des considérations économiques mathématiques, il est alors légitime de se poser la question: qui aujourd’hui, dans le monde économique, accepterait de telles conditions?

Compte tenu de la proportion élevée du chiffre d ’affaires consacrée aux charges, il est évident que la survie des centres de chirurgie ambulatoire, affiliés ou non aux hôpitaux régionaux, est en jeu. Les effets pervers et non souhaité mais néanmoins prévisible de cette révi-sion tarifaire sont une diminution de la qualité des soins et leur rationnement.

Depuis l ’introduction du TarMed en 2004, les charges n’ont cessé d’augmen-ter, liées, entre autres, aux exigences

UrologuesLa concertation et le dialogue sont à privilégier.

DR KARIM KELLOU,

GROUPEMENT DES UROLOGUES VAUDOIS

La maladie lithiasique: un calcul rénal ou

urétéral en cours de migration peu

symptomatique et sans retentissement

sur le haut appareil urinaire pose l’indi-

cation à un traitement endoscopique

ambulatoire. Comme ce traitement ne

pourra plus être financé, ni en ambula-

toire, ni dans un hôpital dans lequel

l’urologue agréé est rétribué à l’acte sur

la base du TarMed, le patient sera

orienté vers l’hôpital universitaire qui,

débordé, ne pourrait pas le prendre en

charge dans un délai raisonnable. De ce

fait, le calcul, lors de sa migration, risque

de devenir obstructif, douloureux, et de

se compliquer d’une infection potentiel-

lement sévère. Le patient se présenterait

en sepsis aux urgences. Comme l’at-

tente serait longue, il serait enfin pris en

charge, alors qu’un choc septique

nécessite un séjour aux soins intensifs.

Conséquence: mise en danger de la vie

du patient, explosion des coûts, alors

qu’un traitement endoscopique simple

réalisé sans délai en ambulatoire aurait

pu éviter cela. ■

EXEMPLEqualité et à l’évolution du matériel médi-cal, nécessitant une mise à jour continue, et ce, dans l’intérêt et la sécurité de nos patients. Il est alors évident que cette décision technocratique de réduction des tarifs sans consultation entre les acteurs du système de santé va profondément modifier le flux des patients, et met en péril le système de santé dans son ensemble, qui n’est pas préparé à le sup-porter. Le mode de financement va gui-der la façon dont le patient sera pris en charge, avec un transfert rapide vers l’hospitalier public de prestations deve-nues au fil des années ambulatoires, au détriment des équilibres actuels entre l’ambulatoire et l’hospitalier, le privé et le public. En période de difficultés écono-miques, la concertation est préférable à l’arbitraire. ■

Page 15: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

Les lasers utilisés depuis très longtemps dans le domaine ORL n’ont pas raccourci les temps opératoires, mais ils ont permis

d’effectuer des gestes jusque-là impos-sibles ou traumatisants, donc d’améliorer l’évolution postopératoire.

Actuellement, les améliorations techno-logiques visent essentiellement la sécu-rité – systèmes de neuronavigation, détecteur de nerf, loupes et microscopes performants, voire robots opérateurs –, avec comme conséquence, un temps de préparation supplémentaire, avec un allongement de la durée totale de l’inter-vention. Ces améliorations importantes de la sécurité du geste opératoire et de sa précision, la diminution du traumatisme opératoire et permettant une meilleure évolution du patient et un raccourcisse-ment de la convalescence et donc globa-lement des coûts y relatifs.

Ces dernières années, les interventions complexes rendues possibles par ces pro-grès technologiques ont vu leur temps d’intervention s’allonger, contrairement aux dires de M. Berset, les autres inter-ventions n’ont pas vu leur temps se rac-courcir, si ce n’est de part l’expérience du chirurgien.

QU’EN DÉCOULERA-T-ILPOUR LES PATIENTS?Les médecins spécialistes ORL, y com-pris ceux agréés dans les hôpitaux péri-phériques, sont inquiets des consé-quences qu’impliquent les révisions tarifaires proposées par M. Berset. Les baisses de rémunérations, prévues ne leur permettront plus d ’assumer les charges financières liées à la gestion de leurs cabinets et la baisse effective de leur revenus de se constituer un plan décent de prévoyance. Dans ce contexte, ils sont découragés, et ils ne pourront plus assumer les risques de certaines

Oto-rhino-laryngologuesDepuis des années, les interventions ORL n’ont que peu évolué; il n’y a pas eu de grandes modifications des techniques opératoires.

interventions, si ce n’est la plupart, qui leur feront perdre du temps pour une rémunération devenue dérisoire, dévalo-risant de fait leur longue formation et leur expérience.

Les patients seront ainsi adressés au centre de référence, soit le CHUV, dont le ser v ice d ’ORL sera tota lement débordé. Ce service est spécialisé dans la prise en charge des traitements des cas lourds et notamment tumoraux, qui mobilisent les salles d’opération jusqu’à plus de 12 heures dans certains cas. Il n’y aura ainsi pas de salles d’opération disponibles pour les cas légers, qui devront attendre peut-être plusieurs mois avant de se faire traiter. Ces cas seront par ailleurs opérés par des collè-gues en formation moins expérimentés. Aura-t-on la même qualité? Nous en doutons fortement.

Avec la révision tarifaire, il sera plus avantageux et moins problématique pour les médecins ORL du canton de consulter au cabinet.

Je rejoins l ’avis de nombreux collègues d’autres disciplines selon lequel la qualité de la médecine et de la prise en charge des patients va s’altérer et que l’on va voir se profiler une médecine antisociale à plusieurs vitesses.

Il n’y aura en réalité aucune économie sur le budget globale de la santé. Peut-être que les coûts ambulatoires vont diminuer – j’ai des doutes –, mais le report sur l ’hospitalier, notablement plus cher, va faire exploser ledit budget, en contradic-tion avec la doctrine entrée en vigueur avec les DRG depuis plusieurs années.

Je vois se profiler une paupérisation de la population des médecins, avec une pénu-rie médicale et un rationnement des soins, dont les conséquences seront

DR ARIDO AGRIFOGLIO,

GROUPEMENT DES OTO-RHINO-LARYNGOLOGUES

VAUDOIS

lourdes pour les patients. On nous repro-chera, une fois de plus, sous prétexte d’âpreté au gain et d’opposition de prin-cipe, d’anihiler tout effort de modération des coûts de la santé. Personne n’ose dire que certains cabinets devront licencier du personnel et qu’un certain nombre devront fermer. Verra-t-on des médecins au chômage? Quelle vision surréaliste! Tant que ça?

Verra-t-on à nouveau des patients décé-der d’une hémorragie nasale, de la gorge ou d’un problème respiratoire aigu parce qu’il n’y aura plus assez de médecins ORL de proximité disponibles et qu’il aura fallu se déplacer au CHUV engorgé? Situations que nous avons réussi à éviter jusqu’à ce jour. Le tableau dépeint n’est même pas noirci, hélas!

Finalement, ces mesures interviennent alors que les sociétés médicales faîtières sont en train d’élaborer TARCO, sous l’égide de la FMH, ce dont M. Berset fait fi de manière un peu méprisante. ■

LA SVM SE MOBILISE 15mai 2017

Page 16: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

LA SVM SE MOBILISE16 mai 2017

Les modifications de la structure tarifaire pour les pres-tations médicales (TarMed) envisagées par le Conseil fédéral et mises en consultation jusqu’au 21 juin 2017 auront des conséquences très significatives sur la qua-

lité et l’efficacité des soins offerts à la population vaudoise dans le domaine de la cardiologie. S’il est approuvé dans sa mouture actuelle, ce projet provoquera inéluctablement une déstabili-sation profonde et durable de notre système de santé. Dans le canton de Vaud, 50 à 60% de la totalité des gestes techniques en cardiologie sont réalisés hors du CHUV par des médecins agréés indépendants, au bénéfice d’une formation complexe et coûteuse, lesquels doivent, pour les besoins de leur pratique, être assistés par du personnel compétent et disposer d’une infrastructure de pointe, elle aussi onéreuse.

Or il est indiscutable qu’en raison de la dévalorisation très importante sinon majeure de leurs prestations (laquelle peut, suivant les cas, atteindre jusqu’à 67%), certains cardiologues n’auront d’autre choix que de renoncer purement et simplement à les réaliser, le remboursement desdites prestations étant clai-rement insuffisant pour couvrir ne serait-ce que les charges qu’elles induisent.

Cette dévalorisation sévère et injustifiée ne tient aucunement compte, en outre, de la responsabilité endossée par le cardio-logue lors des interventions, ainsi que des risques qu’il doit assumer pour sa propre santé, notamment l’exposition régu-lière aux radiations qu’exigent certains gestes techniques.

Un arrêt brutal de la pratique des interventions cardiologiques invasives dans les structures privées et les hôpitaux publics régionaux par des médecins agréés engendrera inévitablement des conséquences très néfastes sur l’efficacité et la qualité en général de notre système de soins vaudois, comme cela ressort clairement des exemples concrets ci-dessous.

Dans la version révisée du TarMed telle que mise en consulta-tion, les patients, dont on ne perdra pas de vue qu’ils doivent impérativement demeurer au cœur des réflexions portant sur notre système de santé, seront directement pénalisés, car significativement restreints dans le choix de leur cardiologue et du lieu de leur traitement, voire privés de tout choix. En effet, les patients devront systématiquement être transférés au CHUV pour toute prise en charge invasive, avec un risque réel d’engorgement des structures d’urgence et/ou d’accueil de l ’hôpital public.

En conclusion, on assistera du jour au lendemain à un ration-nement très contraignant de l’offre de soins dans notre canton et à une prolongation inévitable des délais d’accès aux procé-dures invasives cardiologiques. Cela constitue à nos yeux une dégradation dangereuse et inadmissible de la qualité de notre système de soins, néfaste tant pour le patient et le praticien que pour le personnel soignant en général. Enfin, le projet mis en consultation induira inévitablement des défi-cits importants, voire majeurs dans le budget des hôpitaux, ce qui comportera assurément son lot de répercussions négatives sur la qualité de la formation des médecins. ■

CardiologuesLes cardiologues vaudois contestent vigoureusement le projet de modification, mis en consultation jusqu’au 21 juin 2017, de l’Ordonnance du Conseil fédéral sur la fixation et l’adaptation des structures tarifaires dans l’assurance maladie.

DRS DIDIER LOCCA ET VINCENT GANIÈRE,

COMITÉ DU GROUPEMENT DES CARDIOLOGUES VAUDOIS

Mme M., âgée de 62 ans, a souffert d’un infarctus il y a quelques

années. Depuis deux mois, elle ressent occasionnellement

des douleurs dans sa poitrine quand elle monte deux étages

d’escaliers. Son médecin traitant effectue des examens qui

laissent penser qu’une des artères de son cœur s’est à nouveau

rétrécie. Une coronarographie s’impose. Dans un tel cas, le car-

diologue est amené à ponctionner une artère et à manipuler

des cathéters dans le cœur et dans des artères, qui mesurent

quelques millimètres de diamètre. Pour cette intervention, et si

le projet de M. le Conseiller fédéral Alain Berset devait entrer en

vigueur, le cardiologue percevrait moins de CHF 200.– pour

cette opération jugée délicate. Mme M. obtient un rendez-vous

pour cette opération, dans trois mois; les délais d’attente sont

désormais longs. Lors d’une réunion de famille, Mme M. informe

sa sœur jumelle, qui souffre également du même problème.

La sœur de Mme M. est au bénéfice d’une assurance complé-

mentaire et pourra quant à elle bénéficier de la même opéra-

tion, la semaine suivante déjà. ■■

Position TarMed 17.0710 – valeur du point à CHF 0,96 en vigueur dans le canton de Vaud.

EXEMPLE

Page 17: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

mai 2017

M. R., âgé de 52 ans, est très essoufflé depuis quelques

semaines. Après avoir souffert d’un malaise, il se décide

à consulter un centre d’urgence à Yverdon-les-Bains. Les

médecins suspectant un problème cardiaque, M. R. est trans-

féré aux Urgences de l’Hôpital. Sur place, on lui diagnostique

un épanchement péricardique, soit une accumulation de

liquide autour du cœur compromettant son pronostic vital;

un risque de décès dans les heures qui suivent existe en effet

si le liquide en question n’est pas extrait rapidement. Le cardio-

logue, qui est en consultation, est appelé pour prendre en

charge M. R. Il lui faudra, en urgence et avec toute la précision

requise, introduire une aiguille dans ladite poche de liquide,

tout en évitant de perforer le cœur. Il s’agit d’une intervention

délicate, nécessitant un haut niveau de formation. Au vu de

l’urgence, le cardiologue n’a d’autre choix que d’interrompre

sur le champ ses consultations. Si le projet de M. le Conseiller

fédéral Alain Berset devait entrer en vigueur, alors le cardio-

logue dont il est question ne serait rémunéré qu’à hauteur

de CHF 84,60 pour une telle intervention, jugée délicate. Dans

ces conditions, il est permis de se demander si on peut encore

raisonnablement exiger du cardiologue qu’il laisse tomber ses

consultations et s’impose un tel niveau de stress, sachant

qu’avec une telle intervention, il ne pourra pas même espérer

rentrer dans ses frais. ■■

Position TarMed 17.1710 – valeur du point à CHF 0,48 en vigueur dans les hôpitaux publics vaudois.

EXEMPLE

Mme H., âgée de 77 ans, vient de perdre connaissance ce

samedi matin. Sa hanche est fissurée; elle est transportée

à l’Hôpital de Nyon. Son cœur est lent et, par moment, il s’arrête

durant six secondes; il faut implanter un pacemaker rapide-

ment. Cette intervention nécessite un médecin spécialement

formé. Cette opération, qui implique notamment le recours

à des rayons X et nécessite la prise de précautions particulières

pour protéger le patient et le médecin (port, entre autres, d’un

tablier en plomb), n’est pas anodine. Si le projet de M. le Conseil-

ler fédéral Alain Berset devait entrer en vigueur, ce médecin

serait rémunéré à hauteur de CHF 149,30 pour cette interven-

tion, alors qu’on estime sa durée à une ou deux heures de tra-

vail suivant les cas. Dans ces conditions, il est légitime de se

demander si on peut encore raisonnablement exiger de ce

médecin qu’il prenne en charge cette opération, sachant qu’il

est par ailleurs père de famille et travaille en moyenne plus

de 60 heures par semaine. Dans la négative, la patiente devra

être transférée à l ’Hôpital cantonal: dans ce cas, il y a fort

à parier qu’elle ne pourra pas être prise en charge avant plu-

sieurs jours car, faute de place, il n’est pas possible de l’accueil-

lir plus rapidement. ■■

Position TarMed 17.1540 – valeur du point à CHF 0,48 en vigueur dans les hôpitaux publics vaudois.

EXEMPLE

LA SVM SE MOBILISE 17mai 2017

Page 18: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

LA SVM SE MOBILISE18 mai 2017

I l s’agit là d’évoquer l’impact de la suppression de la possibilité de facturer les positions 00.2510 du TarMed et suivantes (indemnités forfaitaires de dérangement en cas d’urgence) pour les centres d’urgences, sans autre forme de compensation

financière, sous prétexte que ceux-ci, organisées en tant que tels, ne sont de fait pas «dérangés» par ces urgences dans leur organisa-tion habituelle.

Si le sens que revêt la notion d’urgence peut prêter à discussion, il faut ici citer l’article 59c de l’OAMal, qui précise les éléments sui-vants: le tarif couvre au plus les coûts nécessaires à la fourniture efficiente des prestations.

Il convient en premier lieu de comprendre la vocation d’un centre d’urgences, d’en relever les spécificités et, pour cela, s’arrêter sur certains éléments fondamentaux qui justifient largement la com-pensation financière que la révision tarifaire vise à supprimer:– Fonctionnement avec des horaires élargis (généralement de 7 h

à 21 h, 22, voire 23 h), 7 j/7, 365 jours par année, comportant une proportion élevée d’horaires de travail en dehors des heures ouvrables;

– Engagement d’un personnel hautement qualifié, spécialisé pour gérer des potentielles urgences vitales, avec par conséquent des coûts d’exploitation sensiblement plus onéreux que ceux des cabinets organisés pour des consultations essentiellement électives;

– Infrastructures médico-techniques onéreuses spécifiques indis-pensables à cette mission, qui n’est en aucune façon comparable aux besoins d’un cabinet de médecin privé.

Le concept d’un centre d’urgence, regroupant médecins urgentistes, médecins de premier recours, médecins spécialistes, accueillant des urgences ambulatoires de tout type et de toute gravité, répond clai-rement à l’évolution du besoin de la population, de plus en plus urbaine, qui ne cesse de croître et dont le mode de vie ne comprend plus la référence traditionnelle à un médecin traitant.

Nos autorités reconnaissent depuis plusieurs années que les méde-cins de premier recours, installés en sous nombre, n’arrivent pas à absorber toutes les urgences ambulatoires, avec comme conséquence une surcharge chronique des hôpitaux publics, dont la spécificité fondamentale est la prise en charge des urgences graves et vitales, nécessitant des soins stationnaires.

Les centres d’urgences ambulatoires, pour la plupart indépen-dants, offrent donc des prestations spécifiques hautement spécia-lisées au service de la population, et sont ainsi devenus un élément indispensable à une couverture adéquate pour répondre à la

DR MICHEL EDDÉ,

CENTRE MÉDICAL DE VIDY, LAUSANNE

Centres médico-chirurgicauxImpact sur le fonctionnement des centres médico-chirurgicaux des modifications de l’ordonnance sur la fixation et l’adaptation des structures tarifaires.

demande croissante en soins de notre population. Les trois centres d’urgences du groupe Vidy Med (Centre médical de Vidy, Centre médical de La Source, Centre médical d ’Epalinges) assument actuellement plus de 70 000 consultations « urgentes» par année.

L’entrée en vigueur des propositions de révision tarifaire de l’or-donnance du Conseil fédéral limitera drastiquement la possibilité de facturer ces prestations de prise en charge en urgence. En l ’état, cette situation nous contraindrait très probablement à fermer nos centres d’urgences, avec les conséquences prévisibles suivantes:– Le transfert sur les structures publiques (hôpitaux) de

70 000 consultations ambulatoires par année, alors que le CHUV prend actuellement en charge environ 40 000 cas par an dans son centre des urgences;

– La suppression potentielle de plus de 50 postes de travail dans nos centres d’urgence;

– Le risque de disloquer un groupe médical dans lequel plus de 80 médecins et autres prestataires de soins contribuent en synergie à fournir des soins de haute qualité à notre population.

Notre revendication n’est malheureusement pas spécifique aux centres d’urgences du groupe Vidy Med. En effet, une récente et sommaire enquête faite en Romandie relève que plus de 200 000 patients sont pris en charge chaque année dans seulement 18 des centres médicaux indépendants répertoriés par nos soins, fonc-tionnant avec un centre d’urgences. Nous sommes donc à la veille d’une probable catastrophe de santé publique, dont nos autorités ne semblent pas avoir pris la mesure.

Notre position n’est pas de maintenir forcément la prestation actuelle de tarification de l’urgence, mais d’obtenir une compen-sation financière légitime en rapport avec les particularités de fonctionnement des centres d’urgences.

Enfin, M. Berset affirme que les hôpitaux publics ne sont pas auto-risés à facturer des indemnités de dérangement en cas d’urgence. C’est inexact. Ces derniers disposent en effet d’une prestation spé-cifique, la position 35.0610, qui valorise financièrement l’admis-sion en urgence dans un service reconnu par l’Etat. Il y aura donc à ce niveau un clair avantage de traitement en faveur des hôpitaux publics, ce qui ne saurait être admis dans le cadre du principe d’égalité de traitement. ■

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Cette baisse sera obtenue principalement par une dévalorisation massive (50% en moyenne) de la prestation médicale, moindre (environ 10%) de la part technique. Le revenu

des radiologues en sera évidemment affecté, mais comme plus de la moitié du chiffre d’affaires est consa-cré aux charges, le personnel technique (techniciens en radiologie médicale) et administratif (secrétaires) indispensable au fonctionnement d’un service de radio-logie subira aussi certainement à terme une forte pres-sion sur ses salaires.

Cette décision aura un impact sanitaire direct sur l’en-semble de la population. Par exemple, les examens par CT-scanners sont responsables de 40% de l’irradiation médicale des patients. Des progrès techniques récents permettraient de diminuer d’au moins 50% cette irra-diation, mais nécessitent le changement des scanners, ce qui n’est pas encore réalisé dans tous les instituts. Ce renouvellement sera certainement retardé par le nou-veau tarif, imposant donc une irradiation inutile et évi-table de la population, par décision politique. En IRM, il y a un risque que les examens soient abrégés, avec une diminution de leur qualité.

Les examens invasifs comme les infiltrations, biopsies ou angioplasties ne seront plus rentables, nécessitant leur transfert dans des services publics subventionnés qui sont déjà surchargés actuellement. De plus, le tarif 2018 ne reconnaît toujours pas le remboursement de nouvelles procédures comme les ablations percutanées de tumeurs, qui sont beaucoup moins lourdes pour le patient que leur traitement chirurgical, avec la même efficacité. Ces procédures sont actuellement assimilées à des biopsies, et donc très mal compensées, en raison de leur complexité et de leur durée.

Les services de radiologie des hôpitaux publics et/ou pri-vés reconnus d’intérêt public deviendront déficitaires, ce qui les rendra moins attrayants pour engager des radiolo-gues motivés et compétents, alors que ces structures ont déjà des difficultés à conserver leurs radiologues.

Il y a donc un grand risque de dégradation de la prise en charge radiologique des patients, avec comme conséquence des retards de diagnostic et de traitement et probablement des pertes de chances de guérison pour certains patients.

Ci-dessous, trois exemples de baisses significatives de facturation de prestations guidées par imagerie nécessi-tant la présence d’un médecin radiologue pour la réali-sation de l’acte, qui ne permettront plus aux instituts de radiologie de financer leurs charges et qui risquent de les inciter à renoncer à les réaliser en ambulatoire. ■

DR LAURENT CHAPUIS,

GROUPEMENT DES RADIOLOGUES VAUDOIS

RadiologuesL’imagerie médicale sera durement touchée par la baisse annoncée du tarif des examens, en particulier le CT-scanner et l’IRM.

Drainage d’un abcès pelvien sous CT

a) Avant: 220,77 PM + 655,21 PT = 875.98

b) Révision CF: 98,90 PM (–55,2%) + 597,54 PT (–8,8%) =

696,44 (–20,5%)

La prestation médicale est divisée par deux!

Biopsie mammaire sous IRM

a) Avant: 243,27 PM + 831,99 PT = 1075,26

b) Révision CF: 122,1 PM (–49.8%) + 756.64 PT (–9%) =

878.74 (–18.3%).

Infiltration sous CT

a) Avant: 220,77 PM + 706,48 PT = 927,25

b) Révision CF: 98,90 PM (–55,2%) + 643,68 PT (–8,8%) =

742,58 (–19,9%). ■

TROIS EXEMPLES

LA SVM SE MOBILISE 19mai 2017

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LA SVM SE MOBILISE20 mai 2017

Voici quelques cas vécus qui illustrent les difficultés à venir avec l’intervention tarifaire.

PATIENTE PRÉSENTANT DES DÉMANGEAISONSPatiente de 85 ans, qui a des démangeai-sons depuis plusieurs semaines. Elle consulte son médecin traitant à plusieurs reprises. Il lui propose des crèmes à base de cortisone et fait un bilan sanguin. Elle ne va pas mieux et consulte les urgences un week-end. On lui suggère d’arrêter le seul médicament qu’elle prenait au long cours, en lui disant que c’était probable-ment la cause de son problème. Après cette visite, elle demande un bon de délé-gation pour consulter un dermatologue. De manière urgente, les démangeaisons l’empêchant de dormir…

Pour le dermatologue, le diagnostic est vite posé: il s’agit d’une maladie bulleuse auto-immune. Il faut mettre en route un traitement immunosuppresseur au long cours, associant la cortisone au métho-trexate. Il s’agit d’un traitement potentiel-lement dangereux, surtout à son âge, qui nécessite de multiples contrôles sanguins et médicaux. Le premier mois, les consul-tations doivent se faire toutes les semaines, ensuite une fois par mois, ou plus si elle fait des complications impré-vues. La patiente est un peu confuse, elle refuse de retourner chez son médecin trai-tant et ne veut en tout cas pas être hospi-talisée. Des soins à domicile sont organi-sés (pour appliquer les crèmes, surveiller la prise correcte des médicaments), ainsi que des prises de sang à domicile par un laboratoire. La famille et les voisins sont mobilisés pour l’aider, notamment lors des transports au cabinet. La situation a rapi-dement bien évolué, malgré quelques com-plications au début. Elle n’a plus de déman-geaisons, mais doit continuer à prendre ses médicaments des mois durant, au risque de voir sa maladie réapparaître.

DermatologuesLe coût du traitement est un poste bien plus important que le coût de la consultation.

Le nouveau tarif ne nous accorde plus que 30 minutes d’examen clinique par patient sur un trimestre, ainsi que 30 minutes de consultation en l’absence du patient par trimestre (le travail que nous effectuons pour organiser les soins à domicile, remplir des documents pour les infirmières, discuter avec la famille, faire des ordonnances pour que la phar-macie livre les médicaments à domicile, etc.). Dans son cas, ces quotas ont été dépassés dès la première semaine!

Que va-t-il se passer avec le nouveau tarif?– La patiente sera dirigée directement

vers un centre universitaire, où elle sera peut-être hospitalisée.

– Je peux aussi laisser le médecin trai-tant se débrouiller, une fois que le dia-gnostic est posé, et attendre qu’il la renvoie dans trois mois pour un nou-veau concilium. Il n’est probablement pas très familier avec cette maladie rare de la peau, mais il peut la voir le nombre de fois qu’il faut pour faire un suivi correct de son traitement.

Economie pour le système de santé? Aucune, toutes ces solutions sont bien plus chères que de m’occuper moi-même de la patiente.

Qu’en pense la patiente?Moins elle voit de médecins et moins elle doit se déplacer et mobiliser son entou-rage, mieux elle se porte. Elle veut juste se débarrasser de ces démangeaisons invalidantes.

PATIENT PRÉSENTANT DES CANCERS CUTANÉS MULTIPLESPatient de 50 ans, diabétique, dix ans post-greffe de rein, trois ans post-greffe de pancréas. Comme tous les patients immunosupprimés, il a un risque élevé de faire des cancers de la peau, potentiel-lement mortels. Depuis trois ans, il est

contrôlé tous les trois mois, car il déve-loppe en moyenne une dizaine de cancers par année, qui sont excisés au fur et à mesure. Six semaines après le dernier contrôle, il vient sans rendez-vous le matin au cabinet, car il a constaté l’appa-rition d ’un nodule tumoral frontal à croissance rapide et, à juste titre, il s’in-quiète. Il s’agit d’un nodule profond, de 2 cm. Il sera biopsié tout de suite. La consultation de la matinée ne faisant que débuter, un retard certain est à prévoir!

Dans les deux jours, la pathologie confirme un cancer profond, agressif, à haut potentiel métastatique. J’ai la chance de collaborer avec un excellent dermatologue, spécialisé en chirurgie dermatologique. Il connaît les implica-tions d’une telle situation. Il a les capaci-tés d’enlever le nodule avec des marges suffisantes et est disposé à faire des heures supplémentaires. Le patient sera opéré dans la foulée.

Le chirurgien propose une radiothérapie adjuvante, la situation va être discutée avec le centre de transplantation au CHUV, qui organise dans les semaines qui suivent un colloque multidisciplinaire et décide que le patient est trop jeune pour une radiothérapie adjuvante. Vu sa double greffe d’organes, son immunosuppression ne peut pas être ajustée, pour limiter les tumeurs cutanées. Le CHUV propose sim-plement un suivi dermatologique «serré».

Ce cas soulève plusieurs problèmes avec le nouveau tarif: le suivi le plus serré que je puisse faire consiste à voir la patiente une fois par trimestre.

En cas d’urgence, dois-je l’adresser au CHUV?A un autre collègue qui ne le connaît pas?Vais-je encore trouver en ville un chirur-gien qui a les compétences et la disponi-bilité requises dans une telle situation?

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DRE SONJA VOLLENWEIDER ROTEN,

GROUPEMENT DES DERMATOLOGUES VAUDOIS

Dans tous les cas, les délais seront trop longs, ce qui est extrêmement dangereux dans la situation du patient.

Que va-t-il se passer avec le nouveau tarif?Les cas compliqués seront adressés au CHUV et les délais de prise en charge seront nettement plus longs, ce qui peut être crucial pour certains patients.

Economie pour le système de santé? Aucune! La prise en charge au CHUV ne sera pas moins chère. De plus, si le patient fait des métastases, la prise en charge sera d’autant plus chère.

Qu’en pense le patient? Il est indépendant, malgré son lourd suivi médical. Moins il perd de temps, mieux il se porte. Il est conscient des aléas de sa santé et souhaite une prise en charge optimale. Dans son cas, le risque de métastases est réel et le fac-teur temps est primordial pour éviter des complications dangereuses pour lui, et coûteuses pour le système de santé et la collectivité.

PATIENTE PRÉSENTANT UNE MALADIE CHRONIQUE DE LA PEAUPatiente de 42 ans suivie de longue date pour un psoriasis en plaques étendues, maladie chronique de la peau qui peut être très généralisée et invalidante. Elle a déjà reçu de la photothérapie et de mul-tiples traitements avec des crèmes. Devant la persistance des lésions cuta-nées, elle a fini par accepter un traite-ment par voie interne.

Depuis trois ans, elle est sous métho-trexate. Les lésions cutanées ont disparu. Les traitements immunosuppresseurs par voie interne nécessitent au minimum un contrôle tous les trois mois. Lors du dernier contrôle, la patiente signale une douleur à la mobilisation de son pouce.

Elle est adressée à un collègue rhumato-logue. Celui-ci propose alors d’augmenter le dosage du médicament. Peu de temps après, elle revient en urgence chez moi, pour des ulcérations buccales: c’est une infection herpétique qui doit être traitée. Elle revient à nouveau dans les quinze jours qui suivent en urgence, pour des brûlures dans la bouche et une per-lèche. Cette fois-ci, c’est une candidose. Le traitement local ne fonctionne pas et il faudra la revoir encore une fois pour lui donner un autre médicament.

Nous avons de nouveau largement dépassé les quotas alloués par M. Berset.– Qu’aurait dû faire cette patiente lors de

la survenue de complications du traite-ment?

– Aller voir son médecin traitant, qui ne l’a pas revue depuis des mois?

– Aller aux urgences?– Attendre le prochain contrôle dans

trois mois?

Les dermatologues sont les médecins de premier recours pour les dermatoses chroniques (patients greffés, immuno-supprimés, patients à haut risque de mélanome ou de cancers cutanés, psoria-sis étendus et eczémas graves). Ces prises en charge peuvent s’avérer lourdes et nécessiter plus d’un contrôle trimestriel.

Que va-t-il se passer avec le nouveau tarif?Dans le cas présent comme pour tous les patients avec un psoriasis sévère, j’ai décidé d’introduire le méthotrexate, par souci de coût pour le système de santé, pour donner une chance à ce trai-tement bien reconnu et peu coûteux, avant de passer à un traitement immu-nosuppresseur moderne (biologique).

Le suivi médical d ’un traitement au méthotrexate est néanmoins plus lourd, et peut engendrer plus de visites en

urgence. La solution de facilité avec une limitation des consultations? Passer rapi-dement à un traitement biologique, dont le suivi est bien plus simple, mais nette-ment plus coûteux pour la collectivité.

Un traitement de méthotrexate coûte CHF 2000.–/an, alors qu’un traitement biologique revient de CHF 20 000.– à 30 000.–/an, à vie. Le coût des consulta-tions du dermatologue est similaire dans les deux cas (<CHF 100.–/trimestre) et reste négligeable par rapport au prix du traitement! Au total, en limitant le suivi clinique de ces patients, on risque d’inciter les dermatologues à utiliser plus vite des médicaments qui coûtent dix fois plus cher.

Qu’en pense la patiente?Elle me considère comme son médecin de premier recours, son seul problème de santé majeur étant son psoriasis. ■

LA SVM SE MOBILISE 21mai 2017

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LA SVM SE MOBILISE22 mai 2017

Il convient tout d ’abord de préciser qu’une partie importante des prestations chirurgicales prodi-guées aux enfants relèvent de l ’assurance invalidité et non de l ’assurance obligatoire des soins. C’est

toutefois le TarMed qui sert de tarif de référence pour ces prestations, seule la valeur du point étant diffé-rente. Les prestations découlant d’accidents ne sont pas à la charge de l ’assurance accident comme chez l ’adulte, mais bien à celle des caisses-maladie. La situation de la chirurgie pédiatrique ne peut donc pas être simplement transposée à celle prévalant en méde-cine adulte et doit donc faire l ’objet d ’une réflexion séparée, également au niveau économique. La chirurgie pédiatrique nécessite des coûts d’infras-tructure et de personnel comparativement plus élevés que les prestations équivalentes prodiguées à des adultes (temps nécessaire, patient peu collaborant, anamnèse par un tiers, calculs de doses, personnel nécessaire pour des gestes de base tels que prise de sang, matériel disponible dans de nombreuses tailles, etc.). C’est sur cette base que, par exemple, les hôpitaux pédiatriques du réseau Allkids ont obtenu un base-rate plus élevé dans le financement du domaine hospitalier. Toutefois, en ambulatoire, cet état de fait ne se traduit que partiellement, et uniquement dans l ’activité de consultation, qui est valorisée d’une position supplé-mentaire (00.0040) pour les enfants de moins de 6 ans. Or la chirurgie pédiatrique a été pionnière dans le transfert de l ’hospitalier vers l ’ambulatoire et la très grande majorité des interventions se fait actuellement déjà sur ce mode. Ainsi, les revenus provenant des assurances complémentaires privées/mi-privées sont largement inaccessibles aux chirurgiens pédiatres. Le TarMed, pourtant historiquement inadapté au monde pédiatrique car conçu sans lui, est donc au cœur de notre pratique, et constitue la source quasi exclusive de nos revenus, nous distinguant là encore d’autres disci-plines chirurgicales. De nombreuses prestations chirurgicales réalisables en cabinet chez l ’adulte imposent chez l ’enfant une anesthésie générale, difficile à envisager en dehors un bloc opératoire, ce qui impose un objectif de rentabilité minimale et, pour l ’opérateur, une perte de producti-vité importante qui ne peut pas être complètement intégrée dans la facturation ambulatoire. Les positions TarMed qui ont été définies pour une population

adulte et ne reflètent pas la réalité pédiatrique. Par exemple, l ’ablation d’une tumeur cutanée de 2 cm chez un adulte est facilement réalisable en anesthésie locale au cabinet et prend peu de temps. La même tumeur de 2 cm située sur la joue d’un enfant de 2 ans repré-sente une opération de chirurgie plastique complexe sous anesthésie générale, qui est pourtant facturée de la même manière que dans le premier cas, soit aux alentours de CHF 65.– selon le canton. Ainsi, dans le TarMed actuel, les prestations de chirurgie pédiatrique sont généralement sous-éva-luées. Les structures qui les offrent travaillent sou-vent à la limite de la rentabilité, voire à perte, encore plus dans le secteur public, dont l ’efficience est notoi-rement plus faible que dans le secteur privé. Même en pratique libérale, ces structures sont peu attirantes pour les investisseurs et, qui privilégient d’ores et déjà des spécialités plus rentables. De plus, il n’est pas à négliger que la dévalorisation de l ’acte par le biais de sa rétribution est un signal extrêmement négatif sur la valeur attribuée aux compétences de celui qui le réa-lise. Toute baisse du remboursement des prestations telle que prévu par la révision du TarMed proposée par le Conseil fédéral menace donc à très court terme la survie d’une partie importante de l ’activité de chirur-gie pédiatrique. On craint donc la disparition de ces structures de soins indépendantes et la raréfaction des spécialistes. Dans ce contexte, la suppression de la marge de 10% sur les consommables facturés ajoute à la criticité de la situation: il nous est indispensable de stocker des pro-duits de première nécessité de différentes tailles, par-fois périssables ( les pansements durcissant par exemple), ainsi que des instruments et médicaments de réanimation, que nous souhaitons ne jamais devoir utiliser. La suppression de marge prévue, justifiée fal-lacieusement par une réévaluation des coûts de stoc-kage, se fonde sur des hypothèses erronées. Elle creu-sera le déficit de fonctionnement des structures de soins ambulatoires et met encore plus en danger leur existence même.

Comme on le voit, non seulement la baisse de tarif pro-grammée ne respecte pas les principes de l ’économie d ’entreprise tels que prévu par la loi, mais elle condamne irrémédiablement les structures de soins

Chirurgiens pédiatriquesVoici, à notre avis, les conséquences que pourraient avoir les modifications du TarMed prévues par le Conseil fédéral sur la pratique de la chirurgie pédiatrique.

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LA SVM SE MOBILISE 23mai 2017

ambulatoires du secteur pédiatrique. Son entrée en vigueur aura pour conséquence:– La disparition de nombreuses prestations de chirurgie

pédiatriques réalisées en ambulatoire pour le plus grand bénéfice des patients dans les structures indé-pendantes;

– Un rationnement de ces prestations du fait de l’im-possibilité des structures publiques subventionnées d’absorber l’augmentation de l’activité ainsi reportée;

– Le développement d’une médecine à deux vitesses, dans laquelle seuls les patients au bénéfice d’une assu-rance complémentaire pourront être pris en charge sur une base stationnaire. ■

DR CHRISTOPHE GAPANY,

GROUPEMENT DES CHIRURGIENS PÉDIATRIQUES VAUDOIS

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LA SVM SE MOBILISE24 mai 2017

Ces dernières années, une avancée signifi-cative dans la prise en charge des patients oncologiques a été l ’approche pluridiscipli-naire en collaboration étroite avec les

chirurgiens, chirurgiens gynécologues, radio-oncolo-gues, radiologues et pathologistes. Parallèlement, la situation des patients s’est complexifiée, et nous pre-nons désormais en charge des patients plus âgés, pré-sentant de nombreuses comorbidités. Les traitements sont également plus complexes, associant souvent une chimio-thérapie standard à un traitement ciblé (anti-corps monoclonaux dirigés spécifiquement contre les cellules tumorales).

Ces progrès et ce type de prise en charge pluridiscipli-naire ont un prix: les consultations standards chez un oncologue durent de 30 à 45 minutes par patient en moyenne. En effet, les patients doivent être examinés, non pas de manière superficielle et ciblée, mais souvent de manière approfondie, à la recherche d’une évolution (favorable ou défavorable) de la maladie et pour la sur-veillance d’éventuels effets secondaires des traitements. L’organisation de tumor boards pluridisciplinaires prend également du temps, mais donne une garantie au patient que son problème oncologique a été appréhendé dans sa globalité et que les diverses approches ont été évaluées considérant son état de santé global et ses pré-férences thérapeutiques.

La modification du tarif médical imposée par le projet d’ordonnance du Conseil fédéral risque de mettre très sérieusement en péril les progrès décrits ci-dessus. En lieu et place d’économies, nous craignons une aug-mentation des coûts, car les médecins, dont le temps de consultation serait réduit, auraient recours à davan-tage d’examens de laboratoire et de radiologie pour avoir une «meilleure idée» de l’état et de la situation de leurs patients. La complexité des traitements actuels nécessite des contrôles réguliers, fréquents, car les effets secondaires peuvent parfois conduire à une hos-pitalisation si la surveillance est trop lâche. Il est impé-rieux que la nouvelle tarification permette de financer correctement le suivi ambulatoire des patients de manière approfondie. Le projet prévoit des limitations

dans l’utilisation de plusieurs de nos principales posi-tions tarifaires. Sont en particulier concernées: les limitations relatives à la consultation médicale, plus encore celles relatives aux nouvelles positions en l’ab-sence du patient, la position plus spécialement dédiée à nos spécialités médicales (oncologie, hématologie...) et finalement celles relatives à l ’examen clinique du patient et tout particulièrement au «grand examen clinique», réservées aux seuls médecins de premier recours. L’ensemble entraîne une diminution très significative du temps pouvant être consacré aux patients, et donc à la qualité, voire à la sécurité de sa prise en charge. De plus, l ’acquisition des connais-sances nécessaires à la prise en charge des patients souffrant de tumeur nécessite une formation appro-fondie. Pour la prise en charge d’une population vieil-lissante, polymorbide, de solides bases de médecine interne sont nécessaires. On ne parle plus du cancer, mais de multiples types de cancer. Pour garantir la prise en charge des patients, les médecins doivent suivre des formations longues dans les différentes sous-spécialités d’oncologie médicale et de radio-onco-logie, ils doivent effectuer des tournus dans les diffé-rents services d’oncologie. Le nouveau tarif ne recon-naît plus les formations approfondies à leur juste valeur (normalisation de la valeur intrinsèque!). ■

Oncologues médicaux, onco-hématologues et radio-oncologues Un domaine en pleine évolution brimé pour une soi-disant question d’économie?

DRS LUCIEN PEREY, JEAN-PHILIPPE GROB ET PROF. OSCAR MATZINGER,

GROUPEMENT DES HÉMATOLOGUES, ONCOLOGUES, RADIO-ONCOLOGUES,

INFECTIOLOGUES ET PATHOLOGISTES VAUDOIS

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LA SVM SE MOBILISE 25mai 2017

Le Conseil fédéral propose par ailleurs la réduction ciblée

du minutage de certaines positions tarifaires. Cela affecte,

entre autres, la radiothérapie stéréotaxique (SBRT). La rai-

son invoquée est le temps de traitement qui aurait nette-

ment diminué depuis l’introduction du TarMed.

Toutefois, le temps consacré à la préparation ainsi qu’au

contrôle de qualité de ce type de traitement a tout simple-

ment été oublié.

Un traitement de SBRT nécessite en effet une préparation

pluridisciplinaire longue et complexe, incluant médecins,

physiciens et techniciens. Les plans de traitements une fois

calculés doivent tous être mesurés sur un fantôme et les

mesures comparées avec les valeurs simulées par l’ordina-

teur de planification. En cas d’écarts, la planification doit

être recalculée et être à nouveau mesurée. Ces contrôles

de qualité individuels sont indispensables afin de garantir

la sécurité nécessaire à un traitement dont la visée est

localement ablative.

Cette approche n’a pas changé depuis la création du Tar-

Med. Contrairement à l’argumentation du Conseil fédéral, il

n’y a pas de gain de temps lié aux ordinateurs plus puis-

sants, car la complexité du traitement, le contrôle de posi-

tionnement ainsi que le nombre de paramètres à vérifier

augmentent de façon constante. L’ensemble de ces

mesures de qualité indispensables, a toujours été intégré

dans le minutage de la SBRT, car il n’y avait aucune position

spécifique prévue à cet effet dans le TarMed.

En diminuant le minutage du traitement pour la SBRT, le

Conseil fédéral a tout simplement oublié le « package »

que cette dernière position comportait. Le risque de cette

proposition est une diminution dangereuse de la qualité de

la prise en charge. Il est même probable que le finance-

ment prévu ne permette plus de proposer aux patients ce

type de traitements hautement efficaces avec un risque de

toxicité minimisé.

Pour toutes ces raisons, nous pensons que le nouveau tarif

remet en question les avancées thérapeutiques de ces

dernières années et pourrait de plus compromettre la

sécurité de la prise en charge des patients souffrant d’af-

fections oncologiques. ■

IMPACT SUR LES PRESTATIONS HAUTEMENT SPÉCIALISÉES DE RADIOTHÉRAPIE

Page 26: Modification de l’ordonnance sur la fixation et l ... · Les médecins dénoncent une médecine à deux vitesses et un rationnement des soins Modification de l’ordonnance sur

LIMITATION DES «PRESTATIONS EN L’ABSENCE DU PATIENT»Contrairement à une légende urbaine qui circule parmi les politiciens, elle ne servent pas uniquement à «étudier le dossier». Elles servent aussi et surtout à rémunérer le temps passé à discuter et prendre en charge des situations complexes : contacts avec les multiples acteurs du système de santé, participation à des réseaux autour d’un patient ou d’une famille, partage d’informations entre collègues. Ceci touche tous les domaines de la psychiatrie, et particulièrement la pédopsychiatrie et la psy-chiatrie de l’âge avancé (dont le nombre de demandes va en augmentant, vu le vieil-lissement de la population, tendance qui va logiquement durer), ainsi que les situa-tions psycho-sociales «lourdes» en psychiatrie adulte. En effet, dans ces domaines de la psychiatrie, le réseau qui entoure le patient et avec lequel nous travaillons est très large et les contacts sont essentiels dans des perspectives de soins qui vont dans le meilleur intérêt du patient et qui soient équitables, économiques et en accord avec les bonnes pratiques cliniques. Concrètement, de par cette limitation des «presta-tions en l ’absence», c’est toute la prise en charge des situations psychologiques et sociales qui est compromise. Ce rationnement équivaut à une baisse significative de la qualité et, à terme, à un effet contraire potentiel allant plutôt vers une augmen-tation de la facture sociale globale.

La baisse de 5 % du chiffre d’affaires, indépendamment de la baisse prochaine probable de la valeur du point tarifaire. Cela peut paraître peu, mais si l ’on prend en compte les charges inhérentes à l ’activité d’un cabinet médical, cette baisse correspond en réalité à une réduction de 8 à 10% du revenu. Cela continue à rapprocher le tarif des médecins psychiatres de celui des artisans. Nous n’avons aucun mépris pour les artisans, mais nous estimons que les douze années de formation – au minimum – et le poids des responsabilités assumées méritent une meilleure reconnaissance. Une telle dévalorisation de l’acte intellectuel n’est pas propice à éveiller des vocations. Ce qui n’est pas une bonne chose, en période de pénurie de médecins et en particulier de psychiatres. Nous souhaitons plutôt une revalorisation de l’acte intellectuel. ■

Psychiatres et psychothérapeutesLe groupement des physchiatres et psychothérapeutes vaudois déplore la proposition de révision tarifaire mise en consultation par le Conseil fédéral pour les raisons suivantes.

DRS SYLVAIN JUILLAND ET OLIVIER SPINNLER,

GROUPEMENT DES PSYCHIATRES ET PSYCHOTHÉRAPEUTES VAUDOIS

LA SVM SE MOBILISE26 mai 2017

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LA SVM SE MOBILISE 27mai 2017

Le bureau du Groupement des médecins travaillant en EMS (GMEMS) a analysé l’impact des mesures tarifaires proposées par la révision du TarMed. Nous craignons une atteinte à la qualité de la prise en charge:

– La limitation de la durée des consultations à 20 minutes est très contraignante pour les médecins d’EMS, car les personnes âgées demandent généralement plus de temps pour être examinées et pour s’exprimer, par rapport aux personnes non ins-titutionnalisées.

– La limitation de la position «en absence du patient» à 6 x 5 minutes pour trois mois est très limitante pour l’activité du médecin en EMS, car il passe généralement beau-coup de temps à discuter en équipe de la situation du résident (colloque d’équipe) et cela posera sûrement un problème de facturation du temps réellement passé pour le résident.

– Enfin, la possibilité de facturer les visites en urgence à l’EMS doit être maintenue. ■

Médecins travaillant en EMSUne prise en charge concertée autour d’un même patient est primordiale.

DRE TOSCA BIZZOZZERO,

GROUPEMENT DES MÉDECINS TRAVAILLANT EN EMS

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mai 2017