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Modélisation de la congestion sur voie rapide urbaine à Rouen – vers une approche mésoscopique et dynamique Centre d’Etude Technique de l’Equipement Normandie-Centre : Thomas ANSELME, David SAVALLE, Michaël SAVARY 1. Contexte et objectifs La RN 28 qui dessert l'agglomération Rouennaise depuis le nord-est, présente un caractère de voie rapide urbaine et possède de nombreuses bretelles d’entrées et de sorties majoritairement en zone d’entrecroisement. Cette infrastructure subit de fortes pointes de trafic qui génèrent des congestions récurrentes le matin dans le sens entrant : ces perturbations se forment à l'aval du tunnel de la Grand'Mare (tunnel routier de 1 500 m) et peuvent parfois remonter dans l’ouvrage. Pour des raisons de sécurité liées à une problématique d’évacuation des fumées en cas d’incendie, l’exploitant (DIR Nord-Ouest) est contraint de fermer le tunnel en cas de remontée de bouchon à l’intérieur de l’ouvrage. Ainsi, le tunnel est fermé de manière régulière (environ 50 fois par an pour cette raison) provoquant donc une forte gêne aux usagers de la RN 28 et des réseaux secondaires avoisinants. Depuis 2013, l’exploitant s’est doté d’un système de fermeture physique qui lui permet de fermer le tunnel en environ 1 minute. Ainsi, à partir des observations de vidéosurveillance, le système de fermeture est actionné dès que la congestion arrive jusqu’au tunnel. Si l’heure de fermeture est aujourd’hui très bien adaptée à l’heure de remontée de la congestion dans le Congrès ATEC ITS France 2014 : Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 1/10 Figure 1 : plan de situation de la zone étudiée

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Modélisation de la congestion sur voierapide urbaine à Rouen – vers une

approche mésoscopique et dynamiqueCentre d’Etude Technique de l’Equipement Normandie-Centre :

Thomas ANSELME, David SAVALLE, Michaël SAVARY

1. Contexte et objectifsLa RN 28 qui dessert l'agglomération Rouennaise depuis le nord-est, présente un caractère de voie rapideurbaine et possède de nombreuses bretelles d’entrées et de sorties majoritairement en zoned’entrecroisement. Cette infrastructure subit de fortes pointes de trafic qui génèrent des congestionsrécurrentes le matin dans le sens entrant : ces perturbations se forment à l'aval du tunnel de la Grand'Mare(tunnel routier de 1 500 m) et peuvent parfois remonter dans l’ouvrage.

Pour des raisons de sécurité liées à une problématique d’évacuation des fumées en cas d’incendie,l’exploitant (DIR Nord-Ouest) est contraint de fermer le tunnel en cas de remontée de bouchon à l’intérieurde l’ouvrage.Ainsi, le tunnel est fermé de manière régulière (environ 50 fois par an pour cette raison) provoquant doncune forte gêne aux usagers de la RN 28 et des réseaux secondaires avoisinants.

Depuis 2013, l’exploitant s’est doté d’un système de fermeture physique qui lui permet de fermer le tunnel enenviron 1 minute. Ainsi, à partir des observations de vidéosurveillance, le système de fermeture est actionnédès que la congestion arrive jusqu’au tunnel.Si l’heure de fermeture est aujourd’hui très bien adaptée à l’heure de remontée de la congestion dans le

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Figure 1 : plan de situation de la zone étudiée

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tunnel, l’heure de réouverture reste quant à elle assez aléatoire, les opérateurs se fiant à leurs observationsen aval du tunnel (à l’aide de caméras) et à leur connaissance du réseau pour décider de la réouverture del’ouvrage. Sur cette question, la problématique de la DIR Nord-Ouest est de rouvrir le tunnel le plus tôtpossible (pour ne pas provoquer une gêne inutile pour les usagers), tout en évitant qu’une nouvellecongestion se reforme et remonte dans l’ouvrage.

La DIR Nord-Ouest a ainsi confié une mission au CETE Normandie-Centre avec comme principal enjeu dediminuer la gêne occasionnée en limitant le nombre et/ou la durée des fermetures. Plusieurs objectifs ontalors été définis :

• identifier et comprendre l’origine et la formation de cette congestion récurrente,• proposer des indicateurs permettant de déclencher la ré-ouverture du tunnel le plus tôt possible tout

en évitant la formation d’une nouvelle congestion de même importance,• proposer des éventuelles mesures de régulation dynamique du trafic pour éviter la formation de

cette congestion et donc en éviter les conséquences.

Pour répondre à ces objectifs, l’étude a été menée en trois phases qui structurent cet article : • diagnostic (recueils de données, analyse des phénomènes observés et état de l’art),• mise en place d’un modèle de simulation dynamique,• utilisation du modèle (choix des indicateurs de réouverture, proposition de mesures de régulation).

2. Diagnostic

2.1. Présentation des recueils effectuésLes données recueillies dans le cadre de cette étude sont issues de différentes sources. Dans un premiertemps, la liste des différentes stations permanentes de recueil de données de trafic sur le périmètre del’étude a été effectuée : deux stations SIREDO dans le tunnel (DIR Nord-Ouest), une camera en sectioncourante en aval de l’insertion RN 31, une station SIREDO sur la RN 31 (Ville de Rouen), une stationSIREDO sur le Bd Gambetta (2 sens, Ville de Rouen), des stations SIREDO sur les entrées du pont Mathilde(Ville de Rouen) et une station SIREDO en sortie du pont Mathilde vers le Bd de l’Europe.Les données issues de ces comptages ont été recueillies par période de 3 minutes pour la Ville de Rouen etde 6 minutes pour la DIR Nord-Ouest.Ces comptages ont été complétés par des recueils temporaires (radar ou tube pneumatique) sur l’ensembledes entrées sorties de la zone d’études (7 postes de comptages) ainsi que sur deux tronçons de la sectioncourante.

Les comptages temporaires ont été effectués du 14 au 21 juin 2012. Au cours de cette période, lacongestion est remontée de manière régulière dans le tunnel qui a été fermé une seule fois.

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Figure 2 : Représentation schématique de la zone d’étude et localisation des points de comptages

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2.2. Principaux phénomènes identifiés

2.2.1. Identification de la tête de bouchon

L’analyse des vitesses en section courante montre une apparition de la congestion au niveau du pontMathilde. L’analyse de débits en sortie du pont Mathilde montre une saturation de l’accès à la RD 18E (stagnation desdébits en heure de pointe à 1750 véh/h), contrairement aux deux autres sorties dont les débits sont plusfluctuants.La congestion se crée donc en tête sud du pont Mathilde (cf. Figure 2), au niveau de la voie centrale (endirection de la RD 18E). Cette congestion vient perturber les mouvements d’entrecroisement (sortie vers lesquais bas et mouvement bretelle « Shell » → bd de l’Europe) générant une congestion qui occupent les troisvoies de la partie Sud du pont.

2.2.2. Propagation de la congestion

D’abord, la congestion commence par remonter le long du pont Mathilde en raison d’un débit en sectioncourante qui excède le débit de sortie.

Ensuite, la congestion arrive progressivement au niveau dechacune des bretelles d’insertion présentes entre le tunnel et lepont.Ces bretelles sont relativement fluides, même après remontéede la congestion à leur niveau, ce qui signifie que leur débitd’entrée parvient à s’écouler presque entièrement sur lasection courante aval. Cette insertion s’effectue au détrimentde l’écoulement de la section courante amont, comme l’exposele principe de Dagenzo (zone 2 dans le schéma ci contre).Ainsi, lorsque la congestion atteint une nouvelle insertion, ledébit d’écoulement de la section courante amont chute et estaccompagné d’une baisse de la vitesse du flux.La remontée de file s’effectue donc de plus en plusrapidement, et la congestion est de plus en plus dure au fur età mesure qu’elle se propage.

A partir de l’analyse des débits d’entrée/sortie et de l’application de ce principe, on parvient à expliquer lesdébits observés en section courante en situation de saturation :

Ce phénomène se produit de façon récurrente entre 7h10 et 7h30 le matin, et génère une congestion qui sepropage jusqu’au tunnel en environ 15 minutes à partir du moment où elle atteint la place Saint-Paul.

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Figure 3: schéma de DagenzoSection courante amont

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Figure 4 : schéma de fonctionnement de la RN 28 en situation de saturation

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La congestion se résorbe en quelques minutes, en fin de plage (8h30-9h00), suite à la baisse de lademande.

2.3. Quel outil de prévision utiliser ?La forte sensibilité des modèles de simulation dynamique microscopique au paramétrage très fin descomportements d’insertion n’aurait pas permis d’aboutir à un outil opérationnel pour répondre aux objectifsde l’étude.De même, un modèle macroscopique statique ne peut répondre aux problématiques d’analyse de remontéesde file aux heures de pointe.Par conséquent, le choix de l’utilisation d’un modèle mésoscopique a été retenu. Ce modèle présentel’avantage d’être basé sur des comportements individuels simples tout en étant capable de reproduire lescaractéristiques macroscopiques et dynamiques (débits, remontée de file,...) du trafic.

3. Mise en place d’un modèle de simulation dynamique

3.1. Principes généraux utilisés

3.1.1. Fondements théoriques du modèle

Le modèle utilisé s’appuie sur les développements récents menés par le CETE de Lyon sur l’implémentationd’une plate-forme expérimentale de modélisation mésoscopique du trafic routier.Cet outil s’appuie sur la résolution mésoscopique de plusieurs modèles élémentaires :

• Modèle d’écoulement « simple » issu de la résolution du modèle LWR,• Modèle de convergent de Dagenzo-Newell,• Modèle de divergent FIFO de Newell,• Modèle de remontée de file.

Contrairement à une résolution microscopique classique, il n’y a pas de discrétisation temporelle fixe Δt ; ils’agit d’une résolution événementielle avec une discrétisation véhiculaire.

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Figure 5 : représentation spatio-temporelle des vitesses (jours ouvrés)

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Chaque passage de véhicule à un nœud du réseau crée un événement. La gestion des flux de véhiculess’effectue par le calcul à chaque événement (et donc pour chaque couple nœud-véhicule) d’un temps dedemande dépendant de l’arrivée du véhicule, de son chemin désiré et d’un temps d’offre proposé par lenœud considéré.Le temps d’offre dépend de la capacité du nœud. Celle-ci dépend elle-même de la capacité des liens avals(en prenant en compte la présence éventuelle d’une congestion sur l’un d’eux), et du type de nœud.Chaque événement est traité dans le cadre d’une gestion de « file d’attente » pour chaque nœud. Le tempseffectif de passage du véhicule est alors le maximum entre son temps de demande et le temps d’offreproposé par le nœud.

Dans le cadre de cette méthode, le temps total de calcul d’une simulation dépend du nombre d’événements.Ce nombre dépend uniquement du nombre de nœuds dans le modèle et du nombre de véhicules injectés,ce qui permet d’obtenir des temps de calculs bien inférieurs à la modélisation microscopique « classique ».

3.1.2. Limites identifiées

La plate-forme utilisée ici est un modèle développé initialement à des fins de recherche sur la base desfondements théoriques approuvés jusqu’alors.

La première limite identifiée est l’absence d’un modèle spécifique pour les voies d’entrecroisement. Ceci estcontourné dans le cadre de l’étude par la suppression de certains flux de véhicules (cf. § 3.2.2).La seconde limite concerne l’implémentation du modèle de divergent FIFO. En effet, le temps d’offre dunœud divergent est obtenu en fonction du temps d’offre de chaque lien aval. En présence de congestion surla section courante par exemple, le temps d’offre est contraint par le temps inter-véhiculaire calculé sur labase du lien congestionné. Les véhicules à destination de la sortie fluide sont contraints d’attendrel‘écoulement complet avant de pouvoir s’engager sur le lien souhaité. Dans la réalité, les usagers quittent auplus vite la section courante congestionnée pour rejoindre la voie fluide de l’entrecroisement. Une relaxationde ce modèle de divergent a été introduit pour réduire les temps d’offre pour les véhicules souhaitant quitterla section courante lorsque celle-ci est congestionnée.Enfin, le modèle de convergent fait intervenir une fonction aléatoire pour la distribution des mouvements deconvergence, ainsi que pour l’affectation statique des chemins (en respectant le volume de la matricestatique – cf. § 3.2.2). La fonction interne du logiciel actuellement utilisée pourrait être remplacée par unefonction plus adaptée à la situation. Ceci permettrait d’améliorer la convergence du modèle.

3.2. Mise en œuvre pratique

3.2.1. Codification du réseau

Le modèle mésoscopique a l’immense avantage de fonctionner avec peu de paramètres. Ils correspondentaux paramètres définissant le diagramme fondamental de chaque voie et au paramètre de répartition dumodèle de convergent de Dagenzo.Les paramètres suivants sont utilisés (certains déterminés de manière expérimentale) :

• Longueur des liens : conforme à la réalité,• Vitesse libre (Vl): vitesse mesurée (ou réglementaire par défaut),• Capacité du lien (C) : obtenue sur la base d’un ratio par voie,• Vitesse de remontée de file (w) : valeur arbitraire fixe (5 m/s),• Concentration maximale de véhicules (kx) : déduite des paramètres du diagramme fondamental,• Coefficient de distribution du modèle de convergent de Dagenzo : proportionnel au nombre de voies

concernées par le convergent.La section ainsi étudiée nécessite la définition de seulement 22 nœuds (dont 5 convergents à paramétrer) et21 liens.

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Figure 6 : représentation schématique du réseau étudié (liens et nœuds du modèle)

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3.2.2. Construction de la matrice de demande

Le modèle fonctionne sur la base de débits d’entrée et d’itinéraires affectés à chaque véhicule individuel. Lesorigines et destinations des véhicules sont obtenus grâce à une extraction du modèle multimodal statiqueétabli par le CETE NC sur l’agglomération rouennaise. Cette matrice OD, extraite du modèle HPM, faitensuite l’objet d’un redressement à l’aide d’un algorithme FRATAR afin de la redresser sur les débitsmesurés d’entrée et de sortie de la zone d’étude.Enfin, au niveau des entrecroisements, les mouvements qui n’interfèrent pas avec la congestion de lasection courante ont été supprimés.

3.3. Résultat : reconstitution de la situation actuelle – journée du 14La période de recueil de données a permis de relever une journée (le 14) lors de laquelle la congestion aatteint le tunnel sans qu’une fermeture n’ait été effectuée.Le calage est réalisé sur cette journée présentant une forte saturation du réseau sans toutefois avoir subit deperturbations suite à une fermeture du tunnel.Une analyse visuelle du traficolor de la simulation permet de valider le bon écoulement du flux ainsi quel’origine et la propagation de la congestion par rapport aux observations réalisées sur site.

Par ailleurs, les outils d’analyse proposés par laplate-forme permettent de confronter les débitssimulés aux débits réels pour chaque nœud dumodèle. La courbe de régression linéaire obtenuesur les points de mesures sur section courante etsur les bretelles de sortie présente une allureacceptable mais démontre la présence dequelques points de discordance.

En analysant la reproduction des débits à uneéchelle plus fine (cf. Figure 9), on constate queles débits ne sont pas parfaitement reproduits surtoute la période de simulation. Ce phénomène sereproduit sur plusieurs sections du réseau.

Cette différence peut ainsi s’expliquer par l’absence dedonnées précises sur la structure des flux dynamiques surl’ensemble de la période de simulation. De plus, il est probable,en raison de la configuration maillée du réseau et de laconnaissance des usagers concernés que cette structure soitfortement évolutive en fonction de la dureté constatée de lacongestion. Il devient donc difficile de pouvoir reproduireparfaitement les conditions réelles à partir d’une seule matriceOD statique constante sur la totalité de la simulation.

Bien que présentant des écarts par rapport à la situation réelleétudiée, nous considérons que le modèle reproduit de manièresatisfaisante les phénomènes de création et de propagation dela remontée de file (qui sont les principaux phénomènes quinous intéressent ici) pour pouvoir être utilisé en prospective.

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Figure 7 : traficolor de la simulation

Figure 8 : courbe de régression en débits (30 min) sur lessections courantes et bretelles de sortie

Figure 9 : courbes des débits simulé et réel sur la bretelle RD 18E

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3.4. Comment utiliser un tel modèle ?Après analyse fine des données disponibles sur les deux semaines de recueils effectuées, il apparaît que lavariabilité des données ne semble pas expliquer à elle seule la congestion observée. Les niveaux des débitsd’entrée collectés ne semblent en effet pas indiquer de différence notable entre les jours où la congestion estremontée jusqu’à l’ouvrage, et les jours où la remontée de file a été plus modérée. Cela peut provenir deplusieurs éléments :

• les erreurs de recueils : les données de débits peuvent être faussées si la congestion remontejusqu’aux boucles ;

• la structure du trafic qui diffère selon les jours : cette structure peut générer plus ou moins demouvements d’entrecroisements, tout en conservant des débits de sorties identiques ;

• le caractère aléatoire du trafic : les comportements des usagers peuvent différer selon les jours, etnotamment, certains usagers peuvent faire basculer le système d’une situation normale vers unesituation exceptionnelle.

En conséquence, il est difficile, voire impossible de constituer un modèle capable de représenter chaquesituation sur les deux semaines de recueil à partir des seules données disponibles.Une première solution, qui aurait constitué à effectuer un recueil de données sur une durée supérieure, a étéécartée car depuis fin 2012 le pont Mathilde a été fermé suite à un incendie. Aucun recueil n’estenvisageable avant sa réouverture prévisionnelle mi-2014.

Il a donc été décidé de procéder différemment : une« demande moyenne » a ainsi été constituée (à partir dela moyenne des débits d’entrée des jours recueillis) et apermis de construire une situation de référence (ci-contre).

Ensuite des variations arbitraires de cette demande(translation, modulation d’amplitude, et modulation envolume) ont été appliquées pour définir au total 53scénarios de trafic possibles. Ces situations sont doncthéoriques dans la mesure où elles ne sont pas baséessur les données d’un jour donné, mais elles sontsuffisamment diversifiées pour couvrir un nombreimportant de situations possibles. Ainsi, si des invariantssont trouvés pour l’ensemble de ces situations, nousfaisons l’hypothèse que ceux-ci sont réalistes et adaptésà la réalité.

4. Utilisation des résultats du modèle

4.1. Construction d’indicateurs pour la réouverture

4.1.1. Méthodologie employée

Le modèle permet de retranscrire la formation de lacongestion sur le secteur d’étude en fonction de lademande appliquée. Il est alors aisé de déterminer lesheures d’apparition et de disparition de la congestiondans le tunnel.Nous avons vu que le barriérrage automatique dutunnel permet de stopper quasi-instantanément le fluxde véhicules dans le tunnel. Aussi, l’objectif est deproposer à l’opérateur un indicateur lui permettant dedéterminer l’heure de réouverture du tunnel quiminimise la durée de fermeture et qui garantitl’absence de formation d’un second bouchon dansl’ouvrage.

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Figure 10: simulation de référence

Figure 11 : fermeture du tunnel nécessaire entre 7h54 et 9h36

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La démarche retenue a été de déterminer l’heure de début et de fin de congestion dans le cas des 53scénarios de demande évoqués précédemment. Ces heures fournissent les bornes extrêmes de fermeturethéorique du tunnel.Pour chaque scénario de demande, de nouvelles simulations ont donc été réalisées en proposant différentesdurée de fermeture du tunnel (avec un minimum de 18 minutes), se traduisant par la suppression des débitsd’entrée correspondants.

Cette opération réalisée de manière automatique permet de fournir pour chaque simulation, la position de laqueue de bouchon résiduelle au moment de la réouverture et de relever l’éventuelle formation d’un secondbouchon dans le tunnel.

4.1.2. Définition d’une grille d’aide à la décision

Le croisement des informations obtenues pour ces centaines de simulations permet de proposer un tableaud’aide à la décision.

On recense le nombre de simulations correspondant à un même triplet « heure de fermeture/heure deréouverture/position du bouchon au moment de la réouverture » et parmi celles-ci le nombre de cas pourlesquels le bouchon est remonté dans le tunnel après réouverture. Cela permet de définir le niveau de risqueassocié à ce triplet. Par exemple, une valeur nulle signifie qu’aucune simulation du triplet n’entraîne decongestion dans le tunnel après la réouverture. A l’inverse, la valeur 1 signifie que tous les cas recensésnécessitent une nouvelle fermeture du tunnel.

Le résultat des simulations ne permet pas d’obtenir un résultat pour la totalité des cas envisageables.Cependant, par la suite, ces premiers résultats pourront être complétés par de nouveaux scénarios d’offre

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Figure 13 : Grille d’aide à la décision (résultats bruts) sur le cas d’une fermeture effective à 8h00

Figure 12: influence de la fermeture du tunnel de la Grand’Mare sur l’évolution de la congestion : de gauche à droite, fermeture de 18 minutes et fermeture de 60 minutes

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pour couvrir une plage de fermeture plus grande mais également par extrapolation pour les cas les plusévidents.Par lecture croisée, l’opérateur peut ainsi déterminer le meilleur moment de réouverture du tunnel enfonction de l’évolution de la congestion à l’aval de l’ouvrage.

4.2. Propositions de mesures de régulationA partir de ce modèle, on peut également chercher à tester des mesures de régulation qui permettraientd’éviter la remontée de file dans le tunnel. On travaille ici à partir du modèle basé sur la demande moyenne, qui suffit à dégager des tendancesintéressantes et suffisantes à ce stade d’étude.

Dans un premier temps, on pourrait chercher à limiter le débit en amont du tunnel, en fermant par exempleune voie sur les deux dans le tunnel. Concrètement, dans le modèle, on écrête à 1800 uvp/h les débitsentrant dans le tunnel. Les résultats obtenus sont les suivants :

Les résultats sont très peu probants : la congestionremonte quand même dans le tunnel, quoiquelégèrement plus tard que dans la situation de référence(cf Figure 10) Cela n’est pas surprenant dans la mesureoù les débits 6min ne dépassent les 180 uvp que sur 6plages de 6min, donc la mesure n’a que peu d’effet.Cela est d’ailleurs confirmé par le diagnostic, qui montrebien que ce n’est pas le débit amont qui génère leproblème, mais les entrées successives sur la RN 28 quifont chuter les débits de la section courante et doncdurcir la congestion. En fait, cette mesure avait ététestée sur le terrain en octobre_novembre 2007 et avaitété inefficace, ce que confirme bien le modèle.

A la lecture du diagnostic, on peut raisonnablement penser qu’il faut plutôt agir sur les débits d’entrée enaval du tunnel, en particulier sur les entrées situées immédiatement en aval du tunnel. Il a donc été décidéde tester l’effet d’une régulation sur l’entrée Grieu (qui consisterait, grâce à l’utilisation d’un feu tricolore, àstocker les véhicules en amont de cette entrée de façon à diviser par deux les débits entrant entre 7h30 et9h30), puis une régulation sur l’entrée RN31 (même mesure). Les résultats sont les suivants :

Dans un cas comme dans l’autre, on arrive bien à empêcher la remontée de file dans le tunnel. Néanmoins,la réalité technique de ces solutions n’a pas été vérifiée ici. Par ailleurs, on pourrait imaginer une réductiondes débits inférieure, des fermetures complètes pendant certaines périodes etc… A ce stade, le modèlepermet donc simplement de pointer des pistes de solution à envisager, qui devront être analysées de façonplus poussée dans une étude de faisabilité ultérieure.

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Figure 15 : exemples de régulation d’accès : entrée « Grieu » et entrée « RN 31 » (7h30 - 9h30)

Figure 14 : réduction du tunnel à 1 voie (7h30-9h30)

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5. ConclusionLa problématique et le fonctionnement du secteur d’étude ont été identifiés à l’aide de recueil de données etdes interprétations des modèles d’écoulement admis à l’heure actuelle. Ce diagnostic a mis en évidence unecongestion qui se forme à l’extrémité sud de la section étudiée et se propage vers l’amont en s’amplifiant àchaque insertion jusqu’à atteindre le tunnel forçant ainsi l’exploitant à procéder à sa fermeture.

Pour reproduire cette situation et étudier un certain nombre de mesures d’exploitation en prospective, uneplate-forme mésoscopique développé CETE de Lyon à des fins de recherche a été utilisé sur ce casopérationnel. Cette utilisation a permis de mettre en évidence la simplicité de la codification du réseaus’appuyant sur peu de paramètres reprenant les caractéristiques macroscopiques du réseau.A l’inverse, la faible qualité des données disponibles et l’hétérogénéité des situations rencontrées enpratique n’ont pas permis de réaliser un calage sur l’ensemble des situations rencontrées.

Cependant, le modèle a permis d’étudier de nombreuses situations définies de façon théorique à partir devariation autour de la situation moyenne rencontrée et d’en tirer un certain nombre de conclusions à partirdes invariants recensés. Des tableaux d’aide à la décision pour la réouverture « optimale » du tunnel ontainsi été proposés et des mesures de régulation des bretelles d’accès aval ont également été testées.

Les suites de cette étude consisteront à tester ces différentes mesures en situation réelle en lien avec lesopérateurs de la DIR Nord-Ouest.

6. BibliographieBuisson C., Lesort J-B., Comprendre le trafic routier : méthodes et calculs, Ed. du CERTU, 2010

Daganzo C.F., The cell transportation model, part II : network trafic, Transportation research part B, 1995

Duret A., Hétérogénéités du trafic routier : identification, quantification, modélisation et impact surl’écoulement, rapport de thèse, ENTPE, 2010

Leclercq L., Becarie C., A Meso Ligfthill-Whitham and Richards (LWR) Model designed for NetworlApplications, proceedings of the transportation Research Board 91st Annual Meeting, Washington DC, 2012

Rapport d’étude CETE Méditerrannée et Normandie-Centre, Etude RN 28 Tunnel de la Grand Mare : traficRoutier, 2010

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