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Nathalie Conan Berthomé Psychologue IFSI L’AUTISME ET LES PSYCHOSES INFANTILES

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L’AUTISME ET LES PSYCHOSES INFANTILES

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L’AUTISME ET LES PSYCHOSES INFANTILES

L’AUTISME ET LES PSYCHOSES INFANTILES ......................................................................... 2

L’AUTISME ......................................................................................................................................... 3

DEFINITIONS ET SIGNES CLINIQUES...........................................................................................3HISTOIRE ET DÉFINITIONS DU CONCEPT D’AUTISME.............................................................................................. 3LE TABLEAU CLINIQUE ACTUEL........................................................................................................................ 6-1-les altérations des interactions sociales.............................................................................................. 6-2-les anomalies de la communication verbale ...................................................................................... 6-3-le caractère restreint et répétitif des comportements, et des pôles d’intérêt........................................ 6L’apparition précoce des troubles avant 3 ans........................................................................................ 6LES SIGNES ASSOCIÉS..................................................................................................................................... 6-des perturbations sensorielles ............................................................................................................... 6Les difficultés intellectuelles.................................................................................................................. 7-des troubles du comportement .............................................................................................................. 7AUTISME PRIMAIRE ET AUTISME SECONDAIRE.......................................................................................................8APPROCHE PSYCHODYNAMIQUE DE L’AUTISME...................................................................9+HISTOIRE D’UN NOUVEAU-NÉ........................................................................................................................ 9+LEUR CORPS............................................................................................................................................. 12l’angoisse de séparation........................................................................................................................ 12L’angoisse liée aux orifices.................................................................................................................. 13Angoisses liées à l’absence de peau...................................................................................................... 14+LEURS GESTES.......................................................................................................................................... 15Fonction de décharge ........................................................................................................................... 16Fonction de permanence....................................................................................................................... 16+LEURS OBJETS...........................................................................................................................................16+LEURS LANGAGE ET LES OBJETS AUTISTIQUES.................................................................................................16EVOLUTION DE LA SYMPTOMATOLOGIE............................................................................................................ 17

LES PSYCHOSES INFANTILES ..................................................................................................... 17

LES PSYCHOSES SYMBIOTIQUES................................................................................................17LES PSYCHOSES A EXPRESSION DEFICITAIRE...................................................................... 18LES PSYCHOSES INFANTILE A EXTERIORISATION TARDIVE.......................................... 19Les vraies psychoses tardives............................................................................................................... 20Les états prépsychotiques..................................................................................................................... 20LES PSYCHOSES SCHIZOPHRENIQUES..................................................................................... 21LES PSYCHOSES MANIACO DEPRESSIVE................................................................................. 22DIAGNOSTIQUE DIFFERENTIEL DES PSYCHOSES INFANTILES.......................................22HYPOTHESES PATHOGENIQUES................................................................................................. 22

LA PRISE EN CHARGE DES ENFANTS AUTISTES ET PSYCHOTIQUES ............................ 23

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L’AUTISME

DEFINITIONS ET SIGNES CLINIQUES

Consensus international autour du tableau nosographie et des signes cliniques pour poser le diagnostic.

Il reste en revanche de multiples questions quant à l’étiologie (ens des causes) des troubles.

Ainsi les modèles explicatifs, qu’ils soient issus de la psychologie, de la biologie, de la génétique ou des neurosciences, évoquent encore largement des hypothèses causales et non des causes absolues.En effet, au stade actuel des recherches, aucun mécanisme ou facteur unique ne peut à lui seul rendre compte de l’origine de l’autisme dans sa diversité clinique.Les travaux interdisciplinaires récents expriment plutôt l’idée d’une origine plurifactorielle ; l’autisme serait alors l’aboutissement ou la voie finale commune de facteurs endogènes et exogènes qui ont empêché un processus développemental harmonieux.Restent encore plus d’incertitudes que de certitudes.

HISTOIRE ET DÉFINITIONS DU CONCEPT D’AUTISME

Mélanie Klein De 1920 à 1940 soigne des enfants psychotiques, sans référence nosographique (description ou classification des maladies) précise. Elle met en évidence des concepts et des méthodes de traitement.Léo Kanner (1943) PédopsychiatreDescription de 11 patients qualifiés d’ »autistiques » englobait des réalités individuelles fort différentes et des symptômes variés Il apporte la 1ere description de l’autismeHans Asperger(1944)Rapporte un ensemble de cas qu’il décrit comme présentant des signes proches de ceux évoqués par Kanner et en même temps très contrastés ;

Nous avions déjà là la marque d’une entité clinique complexe, avec un noyau commun de signes majeurs, mais des frontières floues.Ceci est encore d’actualité

« Autisme » mot dérivé du grec autos qui signifie « soi-même »

Pour certains auteurs, l’autisme est une psychose et est encore classé dans cette rubrique selon la Classification Française des Troubles Mentaux de l’Enfant et de l’Adolescent Révisée, (CFTMEA- R Misès et al, 2000).

Divergences entre les partisans d’un regroupement de l’autisme avec les psychoses ou au contraire, les partisans de son individualisation afin de mieux le spécifier dans ses particularités.

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L’autisme demeure largement reconnu au plan internationnal comme faisant partie des « troubles envahissants du développement » (« Manuel statistique et diagnostique des troubles mentaux », APA, 1994, « classification internationale des maladies », WHO, 1993).

Actuellement le terme d’ »autisme » est utilisé pour désigner un trouble du développement altérant essentiellement les interactions sociales et la communication, contraignant la personne à un retrait du monde social, faute de moyens adaptés pour pouvoir communiquer de façon adéquate.

L’autisme est un syndrome qui, à des degrés divers, affecte la vie entière de la personne, au point d’être perçu aujourd’hui comme un handicap à vie. D’ailleurs, même les adultes autistes semblant avoir surmonté des symptômes très invalidants de leur enfance, se déclarent néanmoins toujours autistes,

-notamment dans la gestion de leurs relations interpersonnelles, -dans leur mode de pensée, -dans leurs perceptions sensorielles -ou dans leurs expériences émotionnelles ou socio-affectives,

Comme en témoignent les récits de Temple Grandin (1994,1997).

Définitions et signes cliniques

Kanner soulignait déjà

1-la précocité des troubles (autisme infantile précoce),

2-l’isolement social ou retrait (aloness), Concerne tous les domaines :

sonore (insensible aux bruits et aux voix et souvent attiré par les musiques et le sons de faible intensité)

visuel (insensibilité aux objets et aux personnes, tout en évitant les obstacles. Regard svt périphérique, vague, fixé au loin. Difficulté pour l’interlocuteur d’accrocher le regard, Regard fasciné par les objets scintillants ou tournants.

Sensitif (souvent insensible à la douleur)

moteur (l’enfant manipule des objets sans en faire l’usage. Ex. Cube brûlant avance sa main et la retire comme si impossibilité de contact avec l’objet.

Affects (enfants qui ne rient pas et ne pleurent pas Remplacé par des manifestations d’angoisse, de colère de rage, cris.)

3-le besoin d’immuabilité (sameness), Besoin impérieux de maintenir son environnement stable, invariant, permanent.S’accompagne de vérifications diverses et ritualisées. A la moindre modification : crise de rage.

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Peur de tout changement qui les conduit à d’interminables routines quotidiennes monotones. Dans leur langage, lorsqu’il apparaît, cette répétitivité se manifeste par l’écholalie et les stéréotypies verbales.

4-les comportements répétitifs et compulsifs, Stéréotypies gestuelles, ( mouvements répétés toujours identiques + ou – complexes) comportementales (rites alimentaires, de l’habillage) verbales (constantes si l’enfant a un langage. Répétition de sons, montre comment il peut s’identifier à quelque chose d’autre que l’humain (machine à laver)

5-un langage atypique et quelques talents spectaculaires malgré un développement retardé (îlots d’aptitudes comme l’extraordinaire faculté de mémorisation).

Selon Kanner, le trouble fondamental le plus frappant est l’incapacité de ces enfants à établir des relations de façon normale avec les personnes et les situations, dès le début de leur vie.

Descriptions des parents de leur enfant comme « se suffisant à lui même », « parfaitement inconscient de tout ce qui l’entoure » ; « donnant l’impression d’une sagesse silencieuse » ; « échouant à développer une sociabilité normale ».

Le retrait constaté chez ces enfants n’était pas une rupture de relations préalablement établies et succédant à une participation sociale (comme dans la schizophrénie) mais un repli autistique d’emblée, Ce qui a conduit Kanner à écrire que« les enfants autistes sont venus au monde avec une incapacité innée à développer les contacts affectifs habituels avec les personnes, biologiquement prévues, de la même manière que d’autres enfants viennent au monde avec des handicaps physiques ou intellectuels ».

Kanner souligne que chez les 8 enfants qui ont développé un certain langage (3 étant mutiques) celui ci est resté au stade de la combinaison de mots entendus, stockés grâce à leur grande faculté mnésique, et n’a pas servi à transmettre de message aux autres. L’inversion pronominale « je-tu » ne s’opère pas chez ces enfants, montrant qu’ils ne s’approprient pas la phrase ou ne la modifient pas pour l’adapter à la nouvelle situation (exemple : l’enfant dit : « tu veux ton désert » au lieu de dire « je veux mon dessert »).

De même, l’acquisition de la lecture est décrite comme possible, sans méthode d’apprentissage spécifique, mais les éléments des histoires semblent perçus comme des fragments sans lien et le sens semble échappé en partie aux lecteurs.A l’instar de Kanner, Asperger (1944) suggère aussi l’existence d’une perturbation du contact à un niveau profond de l’instinct, notant également les difficultés de communication de ces enfants, d’adaptation au milieu social, et la présence d’exploits intellectuels dans des domaines restreints à côté de capacités intellectuelles pourtant très lacunaires.Il note aussi la pauvreté du contact visuel, l’empathie et l’anticipation limitées, les altérations des communications.

Enfin, 30 ans après sa publication princeps, Kanner rapporte dans un article (de 1971) le suivi de 11 enfants autistes et leur devenir. Il y souligne l’éventail des évolutions qui vont de la détérioration à une adaptation professionnelle associée à une adaptation sociale limitée.

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Kanner évoque alors ce qui reste encore une réalité : Personne n’a réussi à trouver un environnement thérapeutique, une méthode, un médicament qui aient apporté à tous les enfants autistes qui y ont été soumis, des résultats durables et une amélioration identique ou similaire.

Cette variabilité dans les aptitudes ainsi que les évolutions très inégales au cours de la vie continuent d’être une énigme.

LE TABLEAU CLINIQUE ACTUEL

La triade classique met en avant

-1-les altérations des interactions sociales réciproques qui constituent l’épicentre du trouble autistique,

-2- les anomalies de la communication verbale (langage) mais aussi les perturbations des autres systèmes d’expression (mimiques, regards, gestes...),

-3-le caractère restreint et répétitif des comportements, et des pôles d’intérêt (Notamment la pauvreté du jeu et de l’imagination dans les activités qui sont souvent stéréotypées, ritualisées).

L’apparition précoce des troubles avant 3 ans est aussi un critère supplémentaire.

Ces critères sont ceux des classifications internationales du DSM-IV(APA, 1994) et de l’ICD-10 (WHO, 1993) qui, bien que limitées et forcément parcéllaires, ont eu le mérite d’établir un consensus relatif dans la définition clinique de l’autisme et de maintenir à distance tout pré-supposé théorico-éthiopathogénique.

Ainsi, l’isolement social et la précocité des troubles sont retrouvés dans ces critères, auxquels peuvent s’ajouter différents signes qui seront qualifiés de primaires ou secondaires, ou encore facultatifs, en fonction de la place et l’importance qu’ils occupent dans l’ensemble du tableau clinique (intensité, fréquence), et en fonction de l’âge de l’enfant (âge réel/âge développemental)

LES SIGNES ASSOCIÉS

Ainsi parmi ces divers signes associés, sont fréquemment retrouvés

-des perturbations sensorielles souvent qualifiées de « réactions sensorielles paradoxales » en raison de leur

fluctuation, parfois intolérables par leur intensité, parfois anormalement atténuées voire absentes.

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Chez certains sujets, la réaction à la douleur est altérée au point qu’ils ne réagisent pas à un choc très violent ; pour d’autres, un bruit imperceptible leur sera insupportable tandis que le bruit du marteau piqueur ne les fera pas réagir, ou qu’une porte qui claque ne provoquera aucun sursaut. Pour d’autres encore, le contact tactile sera détesté car douloureux au niveau des récepteurs cutanés. L’intégration sensorielle semble perturbée chez toutes les personnes autistes, parfois dans une modalité, parfois dans plusieurs.La vision et l’audition semblent particulièrement sensibles, avec des hypo- ou des hyper- fonctionnements qui sont des sources de « mésadaptation » et de « surhandicap » social.

Les difficultés intellectuelles

-Le retard mental et les déficits cognitifs sont associés à l’autisme dans la majorité des cas bien que pendant longtemps ces enfants aient pu être considérés comme brillants, notamment en raison des îlots de compétences supranormales dans des domaines électifs ( comme la prodigieuse mémoire) qui leurrent sur les capacités réelles et masquent les problèmes. (Dans 80% des cas, l’autisme est associé à une déficience mentale)

Ainsi, les sujets atteints d’autisme sont rarement indemnes de difficulté intellectuelle associée (environ 20% des sujets avec autisme n’ont pas de retard intellectuel) A ce retard mental peuvent s’ajouter

- des troubles du comportement (Crises, colères, automutilations...) qui viennent bien souvent témoigner de

l’impossibilité qu’a l’enfant à s’exprimer, à se faire comprendre ou à communiquer sa douleur, son désir, son refus. Cette incapacité génère chez l’enfant des comportements déviants qui ne sont pas toujours bien compris ou bien interprétés par l’entourage, souvent mis sur le compte de l’opposition ou de la frustration enfantine, alors qu’il peut s’agir d’une réaction primaire à une situation inexprimable qui devient alors insupportable.

L’absence de langage oral et l’absence de gestes de communication conduisent à des crises dans certaines situations d’interactions, car ne pas pouvoir dire quelque chose à son interlocuteur provoque un stress immense et le seul moyen de le manifester est le cri ou la colère, comme chez de touts jeunes enfants.

Pour d’autres enfants, les problèmes sensoriels les mettent dans un tel état d’excitation qu’ils sont irascibles. Temple Grandin le raconte très bien (in Ma vie d’autiste )

L’autisme, n’est pas une entité nosographique simple et le concept d’autisme permet de désigner des personnes contrastées au plan comportemental.

Un diagnostic précoce peut être salutaire pour engager une prise en charge et des remédiations le plus vite possible.

La prévalence, c’est à dire le nombre de ces d’autisme par rapport à la population générale est de 2 à 5 enfants pour 10 000 naissances pour les formes d’autisme typique (de Kanner). Mais si l’on considère l’ensemble des troubles du spectre autistique, on compte alors 15 à 20 personnes atteintes pour 10 000.

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Ceci donne pour la population française une prévalence comprise entre 30 000 et 80 000 personnes atteintes selon une définition + ou – stricte du syndrome. Le sex ratio est en faveur des garçons : 4 garçons atteints pour 1 fille. Ceci évoque une participation génétique liée au chromosome x ou encore des hypothèses hormonales (testostérone) (8% des ces efts ont une fragilité du chromosome X). Enfin, il semblerait que les filles autistes soient + sévèrement touchées que les garçons avec un handicap mental plus lourd ; ce qui laisserait à nouveau supposer des soubassements organo-génétiques.

AUTISME PRIMAIRE ET AUTISME SECONDAIRE autisme primaire

L’enfant qui, dès les premiers jours de sa vie, semble refuser toute relation, et même refuser de vivre : certains paraissent incapables de téter, comme s’ils n’avaient pas le bagage de comportements instinctifs nécessaires à la survie.Leurs parents cherchent vainement à croiser leur regard, guettent en vain leur premier sourire. On regroupe ces enfants sous le diagnostic d’ »autisme primaire » ;

Les bébés ont très tôt une communication avec leur mère, par le regard, le sourire, et aussi par la manière de se tenir : le nouveau-né tète en fixant son regard sur les yeux de sa mère. Il suit des yeux les objets qui bougent ;entre 4 et 6 mois, il manifeste déjà un certain ajustement aux comportements de sa mère : il tend les bras quand il voit qu’elle veut le prendre. Il se « tient» le dos droit, dans ses bras, bien avant de savoir vraiment se tenir assis.

Cette aptitude à tenir son corps, avec le minimum d’effort des muscles, s’appelle le tonus musculaire, et un jeu très subtil d’ajustements se crée entre le tonus de la mère et celui de l’enfant. Si cet ajustement n’a pas lieu, on a le bébé « poupée de chiffon », mou, qui semble couler entre les bras de l’adulte, ou, au contraire, le bébé hypertonique, raide, qui ne s’abandonne jamais.

Ces bébés souvent ne fixent pas leur regard, ou du moins ne regardent personne. Pourtant, ils ne sont pas aveugles. Ils peuvent aussi paraître sourds : alors qu’un tout nouveau-né tourne la tête vers la voix de sa mère, ils ne réagissent pas à une voix, semblent ne rien entendre ; parfois, au contraire, ils réagissent très fort aux bruits avec des manifestations de panique.

Beaucoup d’entre eux ont des troubles du sommeil. Certains semblent même ne jamais dormir, soit qu’ils se balancent et se frappent la tête pendant une grande partie de la nuit, soit, au contaire, qu’on les trouve à n’importe quelle heure, les yeux grand ouverts dans le noir, parfaitement calmes.

Dans le courant de la première année, on ne voit pas s’installer les comportements sociaux qu’on attend de tous les bébés : sourire, pleurer quand la mère s’en va, se réjouir quand elle revient, plus tard s’inquiéter devant une personne étrangère.Dans les cas les plus graves, l’enfant restera grabataire et d’apparence végétative : incapable de marcher, de prendre un objet, parfois de mâcher et d’avaler une nourriture solide. Sur les enfants qui sont atteints à un tel degré, il n’y a pratiquement aucun support pour nous aider à

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imaginer ce qu’ils pensent et ressentent. Ils sont généralement dans des services hospitaliers spécialisés, soignés par un personnel d’un grand dévouement.

L’autisme secondaire

Il est d’autres cas où le bébé semble commencer une évolution normale, puis tout à coup se retire de toute relation. Quand on interroge ses parents, ils disent parfois que tout s’est arrêté à la suite d’une séparation ; d’une hospitalisation soit de l’enfant, soit de la mère.

Dans d’autres cas, il n’est pas possible d’établir une relation entre le retrait autistique et un événement particulier.

Ces cas de retrait autistique, avec ou sans cause apparente, qu’on appelle « autisme secondaire », se produisent souvent autour de l’âge de 12, 15 mois. C’est un âge où se dessine une étape importante de l’autonomie d’un enfant : la marche et les premiers mots. Il se joue là quelque chose de décisif quant à la maîtrise de la distance et de la séparation. Parfois, l’enfant commence à dire quelques mots, puis s’arrête et ne parlera jamais plus.Dans les antécédents médicaux des enfants autistiques, on y trouve assez souvent des accidents médicaux sérieux dans la petite enfance, tels que des infections graves et des déshydratations aiguës.Faut-il voir le point de départ de l’autisme dans ce choc physiologique, ou dans le choc psychologique lié à l’hospitalisation ? Faut-il, à l’inverse y voir une des manifestations de cet état caractérisé par l’inaptitude à se battre pour la vie ?Il n’y a pas, dans l’état actuel de nos connaissances, de réponse à cette question.

APPROCHE PSYCHODYNAMIQUE DE L’AUTISME

+HISTOIRE D’UN NOUVEAU-NÉ A partir de quand commence l’histoire et les relations d’un enfant ?L’embryon, puis le foetus réagissent à des perceptions : ils ressentent quelque chose des changements de rythme physiologique ou d’humeur de leur mère : leur corps réagit, leur coeur s’accélère ou ralentit ... Ils entendent et réagissent à des sons. Peut-on dire qu’ils sont en relation ?Ils n’ont pas le choix d’accepter ou de refuser les messages qu’ils reçoivent, ni les réponses qu’ils donnent à ces messages. Une relation qu’on ne peut refuser n’est pas vraiment une relation. La possibilité de choisir, de refuser ou de moduler leurs réponses va leur venir peu à peu, à partir de la première séparation qu’ils vont devoir affronter : la naissance.

Naître, c’est vivre une séparation... Etre séparé permet d’entrer en relation.

Mais la séparation de la naissance n’en est qu’une parmi beaucoup d’autres : elle inaugure tout un cheminement, avec des moments d’éloignement et des moments de rapprochement, des progrès dans l’autonomie et des retours en arrière, qui feront peu à peu un adulte capable d’assumer sa relative solitude.

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C’est la manière dont sera vécu ce long chemin de séparations qui conditionnera l’évolution affective de l’enfant.

En effet, si ce chemin est une épreuve trop lourde d’angoisse, l’enfant, puis l’adulte qu’il sera devenu, sera condamné à revivre toute séparation comme un choc insupportable et inacceptable.

Voyons ce qui se passe chez le nouveau né. Le bébé éprouve des sensations et a des comportements qui sont inscrits dans sa nature innée. Ces premières sensations concernent surtout son corps : il a chaud, froid, son estomac est creux et il crie, son estomac est plein et son visage se détend dans un premier sourire. Dans ces premiers temps, plutôt que de parler d’émotions et de sentiments, on parlera de vécus encore « bruts ».

Ces vécus bruts, cris, sourires, gestes, sont perçus par la mère. Et pour la mère, ces premiers éléments de vie affective sont reçus dans une partie de son psychisme qui est prêt à rêver sur l’enfant, à anticiper sur ses aptitudes intellectuelles et sociales (enfant imaginaire, idéalisé).

C’est la mère qui va recevoir ces comportements dans son coeur et leur donner ses d’émotions, de sentiment, de communication : « regarde, il m’a souri ! Tu as faim, tu n’es pas content » Parfois l’entourage en rit, (idée d’un bébé ventre, tube qui ne ferait que manger-dormir).

Pourtant, les mères savent que c’est elles qui ont raison : c’est parce que ces vécus bruts sont accueillis par la mère, sont parlés par elle et renvoyés à l’enfant en termes de sentiments, d’émotions et de relation que l’enfant va être effectivement capable de devenir un être d’affectivité et de relation.Cette capacité des mères est appelée « illusion anticipatrice ». Il s’agit en effet d’anticiper sur des aptitudes intellectuelles et sociales qui vont pousser l’enfant.

BION, psychanalyste anglais, a proposé les termes de « fonction alpha » de la mère, capacité à « rêver » l’enfant, par opposition à ces vécus bruts qu’il appelle « éléments bêta »La mère rêve l’enfant tel qu’il n’est pas encore, ce qui est indispensable pour l’évolution affective et sociale de celui-ci.

Ex ; du bébé souriant aux anges, à personne donc. Si personne ne disait « il m’a sourit », si personne ne s’illusionnait sur le projet de communication de ce sourire, si personne ne lui répondait comme s’il avait adressé un message, le sourire du bébé s’éteindrait vite. (« Les mères ont bien raison de se tromper »)Même chose sur le plan du langage, tous les bébés gazouillent, même les sourds. Les bébés qui entendent réponse à leur gazouillis continuent, jusqu’à la parole. Les bébés sourds s’arrêtent de babiller au bout de quelques semaines.Il va sans dire que la mère n’est pas seule à rêver son enfant : toute la famille, père, enfants aînés, grands -parents participent à ce rêve créateur, qui commence avant la naissance d’un enfant, souvent avant même sa conception.

Le nouveau-né vit donc des expériences sensorielles brutes, dont il ne sait pas encore qu’elles deviendront des émotions et des sentiments ; il émet des cris, des sourires et des babils dont il ne sait pas, qu’ils deviendront communication et parole. Il ne sait pas non plus qu’il a un corps séparé de celui de sa mère, en particulier que le mamelon du sein dans sa bouche n’est pas une partie de son propre corps.

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Il ne sait pas non plus que son corps a un intérieur et un extérieur.

C’est la relation à sa mère qui va permettre à l’enfant de faire un certain nombre d’acquisitions ;

Petit à petit, savoir que son corps est différent et séparé des autres corps, en connaître et reconnaître les limites, avoir la perception d’une peau qui contient ce corps, le sépare et le défend du monde extérieur et des autres, lui permet d’entrer en relation avec ce monde, par des contacts et des sensations.

Tant que cette séparation n’est pas perçue clairement ; tant que l’enfant ne se ressent pas comme distinct de l’autre dans sa peau à lui, chaque éloignement du sein, du corps de sa mère est pour lui un drame vital, comme la séparation brute de 2 frères siamois. Chaque manque est comme un trou, un grand trou d’angoisse et de dépression où l’enfant peut avoir le sentiment de sombrer, de se vider.

Beaucoup de symptômes autistiques ou psychotiques peuvent être interprétés comme des défenses contre cette angoisse de perte, soit que l’enfant se défende en se collant à l’adulte, soit qu’il se crée une sorte de carapace pour s’éviter de souffrir.

Comment l’enfant peut-il acquérir cette capacité de se séparer qui lui permettra de vivre et de grandir ?

D’abord, bien sûr, en apprenant d’expérience que quand Maman s’éloigne, elle revient, que quand le sein se retire, il reviendra.

Pour que l’éloignement de la mère soit supportable, il faut que les moments de rapprochement soient suffisamment forts et satisfaisants pour compenser, l’emporter sur les moments d’éloignement.

Ce qui permet au bébé d’apporter la séparation c’est d’avoir à l’intérieur de soi une image de bons moments suffisamment gratifiante pour permettre de supporter l’attente, comme pour chacun de nous (photo de ceux que nous aimons nous aide à attendre l’heure de les retrouver.)

Si cette capacité de se créer des images intérieures est insuffisante, il sera impossible à l’enfant de différer la satisfaction d’un quelconque désir.

Par les soins de la mère, ses absences, ses retours, le bébé apprendra à percevoir son corps comme une unité, il saura que les différentes parties de son corps sont à lui et reliées ensemble : il aura la sensation d’avoir une peau.

On emploie depuis peu, à la suite de D.ANZIEU, la notion de « peau psychique » pour désigner l’ensemble des sensations , perceptions qui environnent le corps et lui permettent de se sentir comme une unité capable de se défendre contre les agressions de l’extérieur tout en ayant des échanges avec lui.

Fonction pare excitation

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Tenue par la mère d’abord, puis progressivement par la peau psychique. Cette notion rend compte d’un ensemble de mécanismes de filtrages des messages et agressions venus de l’extérieur, afin d’en atténuer l’effet trop fortement excitant.

+LEUR CORPS

Nous avons vu que le nouveau-né ne connaît pas les limites de son corps, qu’il ne sait pas différencier ce qui est de lui et ce qui est de sa mère : c’est comme s’il se croyait inclus dans une peau commune avec sa mère, voire avec tous ceux qui l’entourent. Cette peau familiale restera dans notre inconscient un rêve très vivant, qui émerge chez chacun de nous dans certaines circonstances : notre vie amoureuse (sentiment, sensation de ne faire qu’un), nos moments de fête et de plaisir de groupe...

Le bébé aura à découvrir qu’il est un corps fermé et séparé de sa mère.

Cette prise de conscience progressive va se faire dans des alternances d’angoisse et de bonheur ; la mère par ses soins et ses caresses, ses paroles, son regard, va peu à peu amener l’enfant à sentir les limites de son corps, et à tirer du plaisir de la perception de ces limites. Par les satisfactions qu’elle donne, elle lui crée un bagage qui l’aidera, le moment venu, à supporter les moments de frustration. Ainsi la peau commune va progressivement se diviser et se refermer sur chacun.

Cette peau psychique se divisera sans trop d’angoisse si les moments de séparation, difficiles à accepter, sont suivis de moments de retrouvailles suffisamment forts et heureux pour compenser et faire accepter les premiers. C’est ce qui se passe pour l’immense majorité des enfants, que leur aptitude au bonheur pousse à profiter des moments de contact heureux pour compenser et réparer les moments de séparation.

L’enfant qui n’est pas encore sûr des limites de son corps vit, et c’est compréhensible, des angoisses, ou, au moins des inquiétudes, que G. internationales, psychanalyste française a proposé de regrouper en trois catégories :-L’angoisse de séparation-L’angoisse autour des orifices-L’angoisse liée à l’absence de « peau »

l’angoisse de séparation

Imaginez l’angoisse d’un enfant qui, chaque fois que le sein se retire, croit sentir son propre corps divisé en deux, sans pouvoir imaginer que sa mère, personne autonome et douée de volonté propre, va revenir. C’est comme si, chaque fois que la mère s’éloignait, elle emportait un morceau de l’enfant dans un grand trou noir.

Cette angoisse du tout petit s’atténue rapidement grâce au retour périodique des moments de plaisir fusionnel, grâce aussi à une certaine régularité de ces retours, qui les rend prévisibles, et qui permet l’apprentissage de cet état qui mêle la tension du désir et la représentation du plaisir : l’ATTENTE.

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L’angoisse de séparation est illustrée par le jeu de cache-cache, le fameux « coucou.ah ! le voilà « dont se délectent tous les petits : vivre un court instant l’angoisse d’être seul, d’avoir perdu la personne qui aime et rassure, pour la retrouver dans un éclat de rire ; expérimenter que c’est bien lui qui contrôle cette angoisse, la faire durer de plus en plus longtemps, l’apprivoiser, faire reculer la limite de l’intolérable, sera pour l’enfant une base pour qu’il se crée une image de lui comme quelqu’un qui a les moyens de ne pas se laisser dominer par la peur.La même angoisse de séparation se retrouve dans nos rêves de chute sans fin. Les petits enfants jouent aussi avec ce genre d’angoisse : être levés très haut dans les bras de papa, lancés en l’air, pour retomber heureux et rassurés dans des bras accueillants. Regardez le visage d’enfants qui s’abandonnent à ces jeux, vous verrez passer un instant fugitif de très grande peur. C’est parce que cette émotion est très courte et se résout dans le bonheur d’être rassuré qu’il s’agisse d’un jeu, où l’enfant peut prendre un très grand plaisir et peu à peu apprivoiser sa peur, apprendre qu’elle peut se résoudre heureusement. L’adulte aventureux renoue avec ce jeu chaque fois qu’il saute en parachute ou s’envole à la perche ou se risque au saut à l’élastique.

Imaginons maintenant ce que peut éprouver un enfant qui n’a pas su dominer cette peur : si vous avez déjà fait lors d’un rêve une de ces chutes qui n’ont pas de fin, vous pouvez approcher ce que peut ressentir un enfant qui est en permanence dans ce cauchemar.Dans la mesure où l’enfant n’a pas terminé de manière satisfaisante sa séparation, la division se passe souvent à l’intérieur de son propre corps.G internationales cite ce petit garçon qui disait constamment « Est-ce que mes fesses sont bien collées ? » Cette crainte d’être séparé en 2 s’exprime parfois dans des activités stéréotypées où l’enfant colle et décolle indéfiniment deux boîtes, ouvre et ferme un objet à charnière.

L ‘enfant qui n’a pu apprendre à jouer avec la distance, à accepter les départs grâce à l’attente des retours, en est réduit à s’opposer à, toute distance.

Certains enfants autistiques restent collés à l’adulte, cherchant à toujours toucher quelqu’un, et font de véritables crises de colère angoissée chaque fois qu’on essaie de les éloigner. Les éloigner physiquement ne sert donc à rien qu’à mettre en situation impossible et l’enfant et l’adulte.

L’enfant commencera à se décoller progressivement s’il vit dans un milieu où on s’appliquera, longuement à le rassurer.

L’angoisse liée aux orifices

L’enfant qui n’est pas sûr de ses limites se trouve en permanence affronté aux craintes liées aux ouvertures de son corps.Tous les enfants sont passés par ce type de crainte : à propos de ce qui entre et ce qui sort du corps ;

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Comme l’entrée des suppositoires, ou du thermomètre, la sortie des selles est une occasion d’inquiétude : quel est le morceau de moi qui se sépare de moi ?Est-il encore un morceau de moi une fois qu’il est sorti ?Que va t-on en faire ?S’il est avalé à grand bruit par la cuvette des W.C. est-ce que moi aussi, tout-entier, je peux être avalé ? Toutes inquiétudes normales par lesquelles passe un enfant.

Chez certains psychotiques, cette curiosité inquiète sur les entrées et les sorties de leur corps est poussée jusqu’à la fascination. (Crainte que tout le sang s’en aille à la moindre écorchure par ex, ou que le corps se vide de sa substance en faisant pipi ...) d’où l’insupportable paradoxe quand à la fois envie d’uriner et peur de le faire.

Importance de l’accompagnement des infirmiers qui puissent par ex accepter de tenir la main de l’enfant pendant qu’il urine pour le protéger de sa peur de partir dans les WC avec l’urine, et l’accompagner jusqu’à la cuisine aussitôt après pour que l’enfant puisse y boire plusieurs verres d’eau (besoin de remplacer ce qui s’est vidé)Quand les infirmiers ont compris cette angoisse et accepté d’en tenir compte permet d’e limiter l’angoisse de l’enfant qui danse sur place, jusqu’à l’accident.

Une caractéristique fondamentale de ces enfants c’est que l’expérience vécue ne fait pas le poids devant l’imaginaire.

Certes ces enfants ne sont pas les seuls à régir ainsi : tous ceux d’entre nous qui ont éprouvé des peurs réitérées de prendre l’ascenseur, de sauter dans la piscine, d’aborder une personne, ont vécu ces situations où l’image qui est dans notre tête est plus forte que l’expérience d’avoir survécu ; il nous est cpdt possible de négocier avec nos craintes, d’en parler, éventuellement de demander l’aide de quelqu’un pou les dominer.

Les enfants psychotiques vivent ces craintes de manière brute et totale, à chaque fois comme si c’était la première fois.Angoisse. d’éclatement et d’explosion : le pet qui va faire sauter toute la maison ou l’éclatement de la bouche au moment de la première tentative d’émettre un mot.

Autres orifices : les yeux. Ils apparaissent comme des orifices. mais n’en sont pas vraiment, comme les vitres d’une fenêtre. Leur paroi faussement transparente, laisse croire à l’enfant qu’il va pouvoir entrer dans le corps de l’autre.

Angoisses liées à l’absence de peau

Certains enfants ont peur d’entrer dans l’eau, c’est une peur raisonnable....Certains enfants autistiques ont des peurs paniques à l’idée même de prendre une douche. Il faudra à certains des mois et des mois pour passer un doigt sous la douche, puis un bras, puis au bout d’un an y entrer tout entier puis dans la piscine. Il faut des mois voire des années de patience aux éducateurs et infirmier pour convaincre ces enfants qu’on ne leur veut que du bien en lui proposant cette expérience.Derrière cela pour eux : peur de fondre comme un morceau de sucre ou d’être pénétré par l’eau qui leur tombe dessus

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L’enfant qui n’a pas la certitude que sa peau interdit l’entrée en lui du monde extérieur vit des expériences terrifiantes : tout contact pou lui est une menace vitale.Cf « signe de l’objet brûlant » si on leur met un objet dans la main, ils le lâchent et le laissent tomber comme s’ils s’étaient brûlés

Comment peuvent-ils se défendre de leur peur ? Nous verrons qu’ils ont utilisent des cpts que nous avons tous, en situation de danger, plus d’autres qui leur sont particuliers.

Certains refusent obstinément de se déshabiller. Senti d’ouvrir son ventre en ouvrant la chemise. Certains refusent de toucher les objets, refusent de se laisser prendre dans les bras. Il faut parfois accepter, pendant des mois et des mois d’accompagner un effet en s’interdisant de le toucher.

D’autres manières de se défendre sont + mystérieuses pour nous

Cette armure d’insensibilité va jusqu’à protéger ces enfants des maladies courantes de l’enfance : rhumes, angines et autres petites misères leur sont souvent étrangers.

Ces effets qui ne savent pas qu’ils ont une peau en sont réduits à vérifier leur propre existence, l’existence de leur corps et des limites de celui-ci en se livrant à des exercices parfois effrayants à voir qui paraissent destinés à stimuler leurs sens : certains poussent des cris, d’autres se balancent, d’autres agitent leurs mains devant leurs yeux comme pour provoquer des sensations de papillotement lumineux. Certains se mordent ou se griffent, peuvent se provoquer à eux-mêmes de graves lésions, sans parler des risques d’infection.

Ils éprouvent aussi souvent leurs sensations internes ; Nous avons tous joué à tourner sur nous-même jusqu’à nous donner le tournis, cela passe. Plus tard nous avons valsé ou dansé le rock... Certains adoptent ces conduites pouvant s’approcher de danger de mort comme un jeu avec les frontières et la vie et la mort

Tous les enfants se posent des questions sur l’intérieur de leur corps, en particulier quand ils découvrent que dans la poitrine quelque chose bouge et cogne en complète indépendance de leur volonté Cette inquiétude peut être liée aux doutes quant aux fermetures de leurs corps, mais ces questions et ces inquiétudes se muent très vite dans leur revers positif qui va les lancer vers sur les sentiers de la connaissance et de la science. Hélas trop d’angoisse empêche de s’orienter vers une curiosité créatrice.

+LEURS GESTES

Presque tous les autistes (et psychotiques ) présentent des stéréotypies, C.A.D. des gestes ou sons répétés incessamment, tout particulièrement dans des situations tendues ou nouvelles. La différence avec le tic, c’est que lui, a eu à un moment donné une utilité : remonter une manche, une mèche, renifler, puis se geste se perpétue par lui-même alors qu’il a perdu toute utilité.La stéréotypie est un geste original dont l’utilité n’a aucune évidence pour l’observateur extérieur. Elle n’a de sens que dans la représentation que ces enfants ont d’eux-mêmes et du

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monde qui les entoure. Souvent : gestes comme : battements des mains /bras comme bat. d’aile de papillon ou attitudes ou positions : marcher sur la pointe des pieds...Ils ont plusieurs fonctions :

Fonction de décharge De l’excitation

Fonction de permanenceElle répond à un désir de non-changement. Tout changement dans ce qui les entoure bouleverse le peu de certitude qu’ils ont sur leur propre personne.Ils essaient de maintenir autour d’eux un monde immuable et prévisible

+LEURS OBJETS

Chez les enfants qui vont bien, l’objet transitionnel (Winnicott), est utile à la séparation (doudou, nainain) comme si l’enfant emportait un petit bout de sa mère, introjectée en lui. On conserve un peu de ça à l’âge adulte (mouchoir, grigri, rituels pour le coucher, photo en l’absence...carte postale)L’objet transitionnel correspond à une étape fondamentale, dans une fonction importante, que va atteindre le sujet : l’accès à la symbolisation.Permet de remplacer l’objet par une représentation, d’intégrer la présence dans l’absence. Si je ne vois plus ma mère, elle continue d’exister tout de même.Permet accès au langage, dessin, jeux...faire semblant...

Les autistes n’y accèdent pas ou très mal.

Ils ont eux des objets autistiques, ressentis comme une carapace, qui peuvent être interchangeables et n’aident pas à la relation. C’est plus un rempart. Parfois, c’est même une partie de leur corps qui joue ce rôle.

Une caractéristique notable des objets autistiques, c’est que l’enfant les utilise d’une façon qui ne correspond pas à leur fonction. Ils ne s’en servent pas non plus comme des jouets.

Ils possèdent une fonction de protection, d’évitement. Contrairement à l’objet transitionnel qui aide l’enfant à supporter, exprimer et maîtriser l’absence, et les sentiments que les expériences font naître en lui, l’objet autistique constitue une protection contre le monde extérieur.O.T : Pont entre soi et le monde extérieurO. Autistique : Barrière. Il évite d’éprouver un sentiment de manque. Lutte contre l’angoisse.

+LEURS LANGAGE ET LES OBJETS AUTISTIQUES

Certains restent mutiques.Le terme muets : réservé à ceux qui ne peuvent parler par handicap physique.D’autres prononcent quelques mots mais en dehors de la vocation habituelle du langage qui est d’être adressé à quelqu’un.Il est rare que ces enfants posent des directement les questions qui les préoccupent, disent directement ce qu’ils ont à communiquer. Parfois, ce qu’ils disent est facile à comprendre, parfois impossible.

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EVOLUTION DE LA SYMPTOMATOLOGIE

Se prononcer sur l’évolution de la symptomatologie se fait principalement en fonction d’un facteur majeur : l’acquisition précoce du langage ou non.

Près de la moitié des sujets autistes qui ont acquis le langage avant 5 ans parviennent à une certaine adaptation sociale. Ce pourcentage tombe à 5% chez ceux qui ne parlent qu’à l’âge de 5 ans.

Une étude menée en 1972 sur 96 sujets autistes a constaté qu’environ 10% d’entre eux étaient parvenu à l’âge adulte à un comportement social satisfaisant. Tous ceux qui avaient progressé avaient bénéficié d’un soutien familial (dans leur propre famille ou une autre), de sorte qu’ils n’avaient été traités ni en institution psychiatrique, ni en établissement spécialisé pour déficients mentaux.

LES PSYCHOSES INFANTILES

Le terme de psychose infantile recouvre un ensemble vaste et polymorphe du point de vue clinique et évolutif.2 caractéristiques communes à tout ces états :1- l’installation pré pubertaire2- un ensemble de perturbations sévères de la personnalité, avec une altération de la

perception de la réalité.

LES PSYCHOSES SYMBIOTIQUES

Concept de M internationales en 1952Ces psychoses se distinguent de l’autisme parce qu’elles représentent une fixation ou une régression à un stade plus différencié de la personnalité. Dès lors, les aspects cliniques sont plus complexes, nuancés et variables.

Sur le plan clinique, on observe :- Dans les 2 premières années des nourrissons pleurnichards, hypersensibles avec troubles

du sommeil. Bébés difficiles à calmer, mais les symptômes sont difficilement repérables.- Ces troubles augmentent vers 3-4 ans et deviennent particulièrement intenses au

moment du conflit œdipien et lorsque l’enfant est confronté à une séparation maternelle qui peut être réelle ou virtuelle (entrée en classe maternelle, hospitalisation de la mère, triangulation œdipienne.)cela induit une désorganisation psychique qui se traduit par :

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1- Des angoisses massives de séparation et d’annihilation. Sujet non différencié d’autruiVulnérabilité extrême du moiRéaction extrême aux échecs mineurs, réaction de panique immotivée

2-Des manifestations plus psychotiques qui traduisent l’absence ou la perte de frontière entre lui et autrui (gestes magiques)

3- A un stade plus élaboré, manifestation d’écho : écholalies, échopraxies, échomimies (répet.mimiques d’autrui)

4-Ces enfants présentent souvent des symptômes psychomoteurs, une inadaptation tonique.M. MALHER a décrit ce syndrome en le relativisant à la fin de sa vie. Elle a ensuite considéré que dans la pratique on a souvent une association de traits autistiques et symbiotiques.

Echolalies : répétitions de mots ou de phrases

Echopraxies : répétition des gestes d’autrui

Echonimies : répétition des mimiques d’autrui

Margaret internationales nous a permis de comprendre que dans le développement du petit être humain, une période primitive et bénéfique de symbiose avec la mère est normale et indispensable ? Pour elle, l’enfant atteint de psychose symbiotique prolonge une symbiose car il ne veut pas y renoncer, l’autiste, lui, nie le besoin normal de symbiose.

LES PSYCHOSES A EXPRESSION DEFICITAIRE

Introduit par Mises en 1963 pour décrire les enfants touchés à la fois par des perturbations psychotiques et une symptomatologie déficitaire.Description reprise par l’OMS en 1967.

Misès précise qu l’on ne peut pas élargir ce cadre à l’ensemble des psychoses de l’enfant, mais seulement quand leur évolution présente une atteinte intellectuelle.

A la fois une insuffisance mentale sévère quelque fois d’origine organique qui prédispose à des troubles de la personnalité.

Ce tableau ne permet ni d’affirmer, ni d’exclure une cause organique.

Il mène des recherches sur l’organicité des troubles et la psychogenèse.

Chez ces enfants on va voir

1- quelques premiers développements puis un retard global homogène.

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On perçoit -des troubles psychomoteurs avec anomalies tonico-postural, une absence d’orientation temporospatiale,

-des anomalies de langages (avec stéréotypies, retard à l’apparition) -et troubles du cpt (colère, instabilité, auto/hétéro agressivité)

2- ou on est devant un retard précoce mais partiel et dysharmonique avec des acquisitions paradoxales.

Ce qui peut révéler les difficultés sont le troubles du comportement, la vulnérabilité, une tendance au repli, des manifestation auto ou hétéro agressives.Les versants déficitaires et psychotiques peuvent évoluer variablement.

Dans la recherche des antécédents on retrouve souvent une dépression maternelle, avec une absence de corrélation entre le désir et le déroulement de la grossesse.

Concernant le développement psychomoteur, on repère des épisodes d’anorexie sévère. Elle est structurée, durable, et a des conséquences sur le développement pondéral.On recherchera des insomnies persistantes et non concomitantes avec les angoisses du 9 e mois.Ces enfants ont des troubles du tonus avec la non apparition des organisateurs de Spitz (sourire réponse, angoisse du 8e mois, période du nonOn retrouve souvent la description d’un enfant « trop calme »

L’évolution, c’est que le versant déficitaire et le versant psychotique vont se combiner variablement avec généralement une aggravation progressive de la pathologie déficitaire.

En 1966, RETT précise un syndrome qu’il nomme « Le syndrome de Rett » avec un tableau précis :-Une atrophie corticale-Des troubles autistiques majeurs-Un retard mental-Une évolution mortelle-Une élévation du taux d’ammonium sanguin : NH3, hyperamoniémie-Enfant de sexe féminin

Vers 1980, d’autres auteurs retrouvent les mêmes observations sauf hyperamoniémie.Depuis la dimension génétique a été prouvée

LES PSYCHOSES INFANTILE A EXTERIORISATION TARDIVE

A partir de 4 - 5 ans

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Les vraies psychoses tardives

L’enfant est parvenu à une maîtrise plus élaborée de la communication, notamment le langage oral et est parvenu à une adaptation sociale jusqu’ici relativement satisfaisante.

Puis on repère un isolement, avec un retrait autistique, un évitement du contact, une angoisse relationnelle et une inhibition globale.

Ou, à l’opposé de ce tableau, on peut avoir une instabilité majeure, une dispersion mentale et physique. Et dans certains cas l’impression d’une alternance d’éléments maniaques et d’éléments dépressifs.

Après l’âge de 6 ans, on peut observer des productions imaginatives, complètement incontrôlées qui posent la question du délire chez l’enfant et qui témoignent d’une profonde altération de la perception de lui-même et autrui.

Confusion réel/imaginaire-Ces productions imaginaires peuvent concerner le corps, le fonctionnement des organes et souvent l’identité sexuée. Elles ont parfois une tonalité persécutrice (empoisonnement....) Mais ces idées n’ont jamais le caractères construit que l’on peut voir chez les adultes. Enfants qui présentent une impression d’omnipotence avec des pouvoirs de transformation et des récits fantastiques.

-En plus de ces attitudes psychotiques, il y a des attitudes caractériellesMouvements de violence, impulsivité qui donnent une impression d’étrangeté, de froideur

-Ces enfants expriment aussi des troubles instrumentaux sous forme de dysphasie, dyspraxie

-Manifestations d’allure névrotique : phobique -obsessionnelle (qui sont à rapprocher de l’immuabilité)

-L’inhibition

Les états prépsychotiques

Certains auteurs parlent de parapsychose (Lang)Misès parle de dysharmonie évolutive à versant psychotique

Pré-psychose : avantPara psychose : à côté Dysharmonie : état proche de Etat limite : entre les deux

Sur le plan clinique, on a :

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L’association dune symptomatologie e surface et des altérations plus profondes, avec : -des aspects pseudo caractériels-des symptômes pseudo névrotiques

On peut avoir une hyper adaptation de surface ainsi que des bizarreries comportementales.Les angoisses sont archaïques : angoisse De destruction, dévoration, d’annihilation, alors qu’à cet âge l’enfant a plutôt des angoisse de séparation, castration œdipienne. Ces angoisses et leur aspect envahissant s’expliquent par un Moi faible. Cette fragilité renvoie aux anomalies du processus de séparation, individuation.

Concept de « faux self » de Winnicott

Notion de personnalité « as if » Hélène Deutch

Ces altérations psychotiques de la personnalité n’envahissent pas toute la personnalité

Le développement de l’enfant est par conséquent dysharmonique et les apprentissages sont discordants, avec des spécialisations d’intérêts.La gravité de la situation est variable d’un enfant à l’autre. le plus souvent on peut craindre une évolution vers un déficit intellectuel.Souvent l’organisation devient relativement stable avec le plus souvent une névrotisation obsessionnelle.Il arrive que l’évolution se fasse vers un état limite border line, bien distinctes des pathologies névrotiques et psychotiques, avec un fonctionnement mental organisé autour d’un narcissisme pathologique.

Ces adultes vont évoluer avec des alternances de périodes d’allure psychotique et des périodes d’allure dépressive. On en parle parfois en disant « psychose cicatrisée sous un mode obsessionnel »

LES PSYCHOSES SCHIZOPHRENIQUES

Association d’autisme et de délire.

Cela est rare avant l’adolescence. Mais on peut la voir à partir de 11-12 ans de manière tout à fait exceptionnelle ;Il y a des dysharmonies évolutives sur des psychoses de l’enfance qui semblent évoluer très tôt (9-10 ans) vers une organisation de type schizophrénique.

La schizophrénie est plus caractéristique de l’adolescence ou de l’entrée dans l’âge adulte. Si la schizophrénie est composée de symptômes « négatifs » qui pourraient présenter des similitudes avec certains signes d’autisme (désintérêt, indifférence sociale), elle présente en revanche des symptômes « positifs » qui ne se manifestent en principe pas dans l’autisme (délires et hallucinations sur fond d’imagination fertile).

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LES PSYCHOSES MANIACO DEPRESSIVE

Sujets sans problème de psychiatrie, qui accumulent des épisodes de dépressions soignées puis des épisodes maniaques.

L’intervalle entre les deux est variable d’un sujet à un autre, de quelques mois, années à plusieurs décennies.

Traitement est fait par prescription de LITHIUM

Peut-on entrevoir chez l’enfant et ado des états de PMD ?

Quand on rencontre un état dépressif chez l’enfant, on fait l’hypothèse que c’est le seul de sa vie et on tente de le soigner.

Il n’y a pas de traitement spécifique de PMD pendant l’enfance. On aborde toujours les états dépressifs de l’enfance et de l’ado comme étant des dépressions de nature névrotique, ou des dépression dans un cadre de dysharmonie évolutive.

DIAGNOSTIQUE DIFFERENTIEL DES PSYCHOSES INFANTILES= Les pathologies à éliminer

1- La surdité totale. C’est indiscutablement un facteur favorisant l’évolution psychotique.2- La dépression anaclitique qui peut donner l’impression d’un tableau autistique.3- Avec les aphasies. L’enfant atteint d’aphasie n’acquiert pas le langage alors qu’il n’y a pas

de surdité ni d’état mental pathologique. Eux sont capables de jeux symboliques ; et d’acquérir rapidement des méthodes de communication non verbales.

HYPOTHESES PATHOGENIQUES

Certaines encéphalopathies se compliquent d’une évolution psychotique.

Depuis une vingtaine d’années, les enfants psychotiques dépistés bénéficient plus systématiquement d’une investigation neurologique et on finit par faire un scanner ;On trouve parfois une absence de commission inter hémisphérique. Cette agénésie est plus fréquente chez les sujets psychotiques que chez les autres. Certains ont cette agénésie sans aucun problème ; La part de cette agénésie est très controversée.

Hypothèses relationnelles

On ne retrouve pas chez tous les parents de troubles psychotiques évidents. Par contre plus fréquemment des anomalies de caractère et des troubles de la personnalité tels que : caractère hyper protecteur, dominateur anxiété, rigidité ou à l’inverse, immaturité affective.

Ces tableaux caricaturaux sont complétés par des observations plus fines : ambivalence par rapport à l’enfant, incapacité à assumer l’individuation de l’enfant, injonctions paradoxales...

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LA PRISE EN CHARGE DES ENFANTS AUTISTES ET PSYCHOTIQUES

Poser le diagnostic ne suffit pas. Compte tenu de la diversité des comportements et du degré de sévérité des troubles. Il faut grâce à l’évaluation, orienter la prise en charge en fonction du profil individuel de chaque enfant, de son environnement et des attentes de parents.

Les hospitalisations à temps plein sont rares et justifiées seulement dans le cas de troubles graves du comportement ou quand le support familial est absent.

Les voies de la rencontre par la parole ne sont pas ou plus possibles pour ces enfants ; et les soignants qui les accueillent se trouvent alors à inventer un cadre, une relation thérapeutique qui ménage leurs fragilités et leur souffrance.

Pour ceux touchés par l’autisme, leur vécu corporel semble fait de sensations éparses qu’ils tentent à grand peine de réunir pour lutter contre des menaces d’aspiration, d’anéantissement qui les assaillent.Ce vécu reste brut, inaccessible à une mentalisation qui les rendrait représentables et donc communicables.Ainsi, ce mode d’être les coupe de la relation avec un environnement humain.On observe toute une symptomatologie corporelle : souvent des cris lancinants, odeurs corporelles, grattages et lésions de la surface cutanée, coups sur les parties osseuses (la tête, les mains notamment), morsures, ou dans le registre moteur : balancements, rotations incessantes, déambulations, stéréotypies…

Pour les patients psychotiques, dans des registres peut-être moins déficitaires, la construction de l’identité repose sur un vécu corporel un peu plus structuré et contenant et sur une possibilité d’élaborer un monde psychique interne.Toutefois cette construction reste précaire et exposée aux aléas émotionnels de la relation à l’autre.La capacité à établir une relation suffisamment différenciée Moi/non-Moi est très fragile et le risque d’anéantissement ressurgit très fréquemment sous forme d’angoisses de morcellement, menaces d’engloutissement dans l’autre, d’angoisses massives de destruction, de persécution qui vont s’exprimer dans des crises pouvant devenir agressives.La relation par le langage avec ces patients est possible puisque des contenus psychiques sont présents, donc communicables, mais le corps reste l’élément central de leur vécu de souffrance.

Tous ces comportements sont le plus souvent très pénibles à vivre pour les soignants, ils sont cependant une fonction essentielle pour le patient : l’aider à se sentir exister et lutter contre l’envahissement d’angoisses mortifères invivables.

S’il faut bien sûr tenter d’en limiter les dangers potentiels pour le sujet et son entourage, un seul abord comportemental, éducatif de ces symptômes reste bien souvent illusoire. Et la relation thérapeutique uniquement verbale le plus souvent insuffisante, et parfois inopérante.

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Le projet thérapeutique pour ces patients autistes et psychotiques plus ou moins déficitaires doit donc intégrer la dimension corporelle et ce, de multiples façons et à l’aide de diverses médiations.Avant tout, l’approche corporelle passe par les actes habituels de la vie quotidienne : bouger, dormir, manger, éliminer, se laver, se vêtir, se déplacer, occuper des espaces…Cette quotidienneté peut sembler évidente, « mécanique », elle met pourtant en jeu le fragile vécu corporel de ces personnes.

Ces « nécessités » du quotidien requièrent donc un accompagnement thérapeutique attentif et soutenu dans lequel la place essentielle est occupée par la sécurisation du patient.Ces choses simples et rituelles que sont les toilettes, les repas, l’habillage, les promenades engagent pourtant une proximité avec le corps qui, pour eux, est difficile à supporter.La répétition de ces gestes avec des soignants connus, habituels, offre une trame, un socle rassurant, stable et contenant pour les aider à investir cette réalité sans qu’elle soit trop dangereuse pour leur intégrité corporelle et psychiqueA côté de cette quotidienneté, d’autres temps thérapeutiques peuvent être proposés :-Les traitements médicamenteux. Ils limitent l’aspect envahissant des angoisses mais trouvent leurs limites. Le recours à l’isolement et la contention (nécessaires parfois pour pallier les dangers que présentent notamment les comportements auto-agressifs et la violence envers l’entourage) n’offre pas de perspective thérapeutique à long terme.

-Les techniques de thérapie à médiation corporelle : C’est une ressource intéressante pour tenter d’aider ces patients à retrouver les limites de corporelles et psychiques qui leur font défaut.Connues avant l’arrivée des neuroleptiques, elles étaient utilisées pour apaiser les malades agités : douches, bains chauds ou froids. Leur application pouvait cependant avoir un caractère violent, agressif. Ces techniques ont évolué.En leur redonnant un sens qui s’appuie notamment sur l’idée de « régression » que procure le bain. Régression favorable à un réaménagement des fonctions mentales et relationnelles perturbées par la maladie.Les connaissances apportées les psychanalystes qui se sont intéressés au vécu du nourrisson ont été décisives pour mieux comprendre comment la dimension corporelle est essentielle dans l’élaboration de l'identité (D. Winnicott, Mélanie Klein, Bion, Ester Bick, Frances Tustin, Geneviève internationales…) Didier Anzieu (cf. le Moi peau) a fait un parallèle entre l’enveloppe cutanée, corporelle et le Moi. Il a montré qu’ils fonctionnent avec les mêmes principes de contenance, de protection et d’échange avec l’extérieur.

Ex. de thérapie corporelle : le bain thérapeutique. Technique utilisée dans ce type de soins psycho corporels.Quel que soit le contenant : baignoire, piscine, jacuzzi, ou bassin de balnéothérapie…. Cette technique a l’intérêt de proposer un enveloppement d’eau qui permet de délimiter parfaitement la surface du corps, ses contours, en réduisant les effets de la pesanteur et procure des effets de détente musculaire (eau chaude). De plus, le contenant, quel qu’il soit délimite un dehors et un dedans ; distinction très opérante pour ces patients vivant dans la confusion Moi-non Moi, dedans-dehors.

Mais ces effets physiques ne seraient d’aucune utilité s’ils n’étaient le support d’une relation avec un soignant. Ils s’inscrivent sur un lien qui se noue dans le partage d’une expérience commune, (par immersion avec le patient dans le même bain si nécessaire) et par les mots qu’il pose sur ce qui se passe avec le patient dans la situation thérapeutique.

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On trouve encore : les massages, le packing… ou encore l’équithérapie Etc.

Ainsi, il faut souligner l’importance et l’intérêt de la pluridisciplinarité des professionnels qui permet de croiser les observations diverses autour de ces patients et de proposer des interventions complémentaires. Le travail institutionnel a une importance considérable, pouvant opérer comme un véritable « appareil à penser » et aider les patients à filtrer, décoder les éprouvés bruts et pouvoir apaiser leur souffrance.

Les actes techniques infirmiers sont peu nombreux, l’essentiel de son activité est centré sur l’observation de l’enfant, les soins d’hygiène et de confort. Sa présence auprès de l’enfant est constante. Lorsqu’un traitement est mis en place elle en surveille l’efficacité ainsi que l’apparition des effets secondaires. Son aide est indispensable pour l’accompagnement de ces enfants dans la vie quotidienne et parfois à des R.D.V pour des examens (EEG…) pour réduire l’anxiété qu’implique toute modification de l’environnement. Elle participe aussi au travail à visée thérapeutique dans les ateliers.

La relation avec les parents est très importante. Car la qualité de ces rencontres va favoriser –ou non- leur prise de conscience de la nature exacte des difficultés de l’enfant et va permettre d’estimer ce qu’ils sont capables d’entendre du diagnostic. Une aide est apportée aux parents dans la prise en compte de leur difficulté à partager le quotidien avec leur enfant et les aider à favoriser son évolution.

La prise en charge des enfants autistes et psychotiques est donc multi-professionnelle dans une équipe où chaque membre apporte sa compétence. Si les rôles se chevauchent parfois, la spécificité de chacun est respectée. L’acceptation du diagnostic par les parents, leur engagement dans la démarche de soin repose en grande partie sur le groupe, pour une alliance thérapeutique réelle.

Nathalie Conan Berthomé IFSI