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ORGANISME NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS Bulletin tfi 9 Mai 1964 CDAT 15062

NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS

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Page 1: NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS

ORGANISME

NATIONAL DE

SÉCURITÉ

ROUTIÈREPROJECTIONSDEGRAVILLONS

Bulletin tfi 9Mai 1964

CDAT15062

Page 2: NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS

ÉTUDE DES PROJECTIONS DE GRAVILLONSPAR LES VÉHICULES AUTOMOBILES

H. LE GUEN,Licencié es sciences,

Ingénieur E.N.S.P.M.,Chef de service essai banc-route

au Laboratoire de l'U.T.A.C.

L'étude des projections de gravillons par les véhicules automobiles, dont ce bulletinrésume les méthodes et les principaux résultats, a été exécutée pour le compte derO.N.S.E.R. par l'Union Technique de l'Automobile, du Motocycle et du Cycle.

R É S U M É

Les projections de gravillons ont été étudiées à l'aide de procédés cinématographiques per-mettant d'observer les trajectoires des gravillons. Les projections ont en outre été interceptéessur des panneaux collants fixés à l'arrière et sur le côté du véhicule, et sur le bas-côté de laroute, de manière à permettre des analyses quantitatives.Les études ont été limitées aux projections prenant directement naissance dans l'interactionentre les pneumatiques et le sol. Ces projections peuvent être lo îgitudinales ou latérales.Les projections longitudinales restent comprises dans un angle d'environ 20° à l'arrièredes roues, dans un système d'axes liés au véhicule. Par rapport à des axes immobiles, les gra-villons sont soulevés verticalement et non projetés en arrière.Les projections latérales sont expulsées perpendiculairement au plan de la roue. Leur vitesselatérale est voisine de celle du véhicule.Dans les deux cas les gravillons ne se déplacent donc pas dans le sens du mouvement des véhi-cules. Seule la vitesse du véhicule heurtant les gravillons peut fournir l'énergie nécessaire aubris du pare-brise. Cette énergie peut d'ailleurs être inférieure à celle requise pour les essaisde réception, en raison de la localisation de contrainte résultant de la faible courbure des gra-villons qui présentent des arêtes vives, ou parce que les tensions internes du pare-brise en rédui-sent localement la résistance.Pratiquement on peut définir une zone dangereuse autour d'une voiture circulant sur une routefraîchement gravillonnée. Elle est nulle pour des vitesses inférieures à 50-60 km/h. Elle appa-raît ensuite et s'étend à 2,5 m de part et d'autre du véhicule et 25 m en arrière pour une vitessevoisine de 100 km/h.

La perte de visibilité résultant de la rupture du pare-brise d'un véhicule n'occupe pas une place de pre-mière importance parmi les causes d'accidents rou-tiers. Elle n'en constitue pas moins une gêne grave etpar conséquent un facteur d'insécurité.On sait que les ruptures les plus fréquentes se pro-duisent sur des routes fraîchement revêtues de gra-villons, lorsqu'un de ces gravillons, soulevé au pas-sage d'un véhicule, vient heurter le pare^brise d'unautre véhicule proche.L'utilisation de verres ayant un comportement auchoc différent de celui des verres trempés, actuelle-ment en usage, permettrait sans doute de réduirenotablement les risques de perte de visibilité, maisceux qui sont disponibles présentent en cas d'accident,l'inconvénient soit de se fragmenter en débris tran-chants (verres feuilletés), soit d'être une cause sup-plémentaire de fracture du crâne (verres incassables).

Dans ces conditions, l'étude de la projection des gra-villons par les véhicules automobiles reste d'actualité.Par quels mécanismes les particules solides existantà l'état libre sur la surface de roulement sont-ellesmises en mouvement au passage de véhicules ? Quelleest leur trajectoire? Comment la vitesse des véhiculesse relie-t-elle à l'importance des projections; agit-ellesur la granulométrie des matériaux soulevés? Tellessont, parmi d'autres, les questions qu'il convient deposer, et auxquelles le présent rapport s'efforce dérépondre.

En cette matière où les études sont rares, les obser-vations qui vont être présentées ne sauraient autoriserdes conclusions décisives sur tous les points. L'admi-nistrateur et l'usager pourront cependant en tirer desrègles pratiques qui ne relèvent pas toutes, il s'enfaut, du domaine de l'évidence.

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Page 3: NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS

I - LES DIFFÉRENTS TYPES DE PROJECTION

L'observation directe du phénomène permet de serendre compte que les projections de gravillons nenaissent pas toutes selon le même mécanisme. Lesfigures ncs 1 à 3 mettent en évidence.

1) Un jet important de gravillons émis à partir de lasurface de contact entre pneu et surface de roule-ment, dans le sillage de la roue.

2) Un éparpillement de gravillons qui paraît rayonnerde toute la circonférence dés pneus.

3) Des gravillons dégagés latéralement au niveau del'aire de contact entre les pneus et la route.

4) Enfin des éléments dont la trajectoire paraît anar-chique.

Figure 1 - Projection longitudinales par soulèvement.

Ces derniers correspondent à des projections indi-rectes, les trajectoires initiales étant déviées à la suited'un choc contre le véhicule lui-même ou contre unautre obstacle, ou après rebondissement sur la chaus-sée. De nature aléatoire, ces projections se prêtentdifficilement à un examen systématique. Aussi ont-elles été exclues du champ de l'étude.

Les autres types de projections ont leur origine immé-diate dans le mouvement même du véhicule et plusparticulièrement dans l'interaction pneu-route. Cesont des projections directes, dont l'étude impliquequ'elles sont reproductives et soumises à des loisrelativement simples.

La description succincte des phénomènes, qui a étéprésentée en guise de commentaire des figures n08 1à 3 suggère une classification formelle qui sera adoptéedans la suite de l'exposé. Parmi les projections di-rectes, nous distinguerons :

—les projections longitudinales, dont le début de latrajectoire reste voisine du plan de la roue. Elles ontété subdivisées en projections que nous appelleronstangentielles et radiales. Les gravillons projetés tangen-tiellement (fig. 1) sont.mis en mouvement dans l'in-teraction pneu-sol (1). Les projections radiales (fig. 2et 3) mettent en jeu des gravillons entraînés par lessculptures du pneumatique, puis libérés sous l'effetde la force centrifuge.

— les projections latérales, c'est-à-dire les projectionsdans une direction perpendiculaire à la trajectoiredu véhicule (fig. n08 2 et 3, gravillon entouré d'uncercle).

Si ces distinctions correspondent bien à des mécanismesdifférents, il faut néanmoins prendre garde que lestermes choisis ne doivent pas être pris dans leur sensgéométrique strict : les projections tangentielles n'em-pruntent pas des trajectoires rigoureusement tangentesau pneumatique; à l'inverse, les forces qui provoquentles projections radiales ont certainement une compo-sante tangentielle. Enfin il n'y a pas de scission netteentre les différents modes de projection, plusieursprocessus pouvant se combiner, de sorte que les pro-jections latérales ne sont pas plus rigoureusementperpendiculaires à la trajectoire du véhicule que lesprojections longitudinales ne sont intégralementcontenues dans le plan de la roue.

H - MÉTHODES EXPÉRIMENTALES

Les méthodes d'observation ont été choisies de ma-nière à permettre d'étudier le mouvement des gravil-lons (trajectoire et vitesse) et la nature des projections(poids, granulométrie).

Figure 2 et 3 • Projections longitudinales radiales et pro-jections latérales.

(1) Nous préférons cette formule vague à celle, plus expressive,de frottement et pincement. Elle montre mieux que nous igno-rons la séquence exacte des processus mécaniques, extrêmementcomplexes, qui entrent dans le phénomène d'adhérence despneus sur la surface de roulement.

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Page 4: NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS

Les trajectoires ont été enregistrées par prises de vuescinématographiques. Le laboratoire disposait dedeux caméras.— Caméra BELL et HOWELL 16 mm à cadence deprise de vues fixe de 128 images par seconde, à entraî-nement électrique. Sa vitesse de déroulement est régu-lière, ce qui permet d'utiliser la cadence d'imagecomme base de temps; mais c'est un matériel lourd,d'autant plus que sa mise en action exige une alimen-tation électrique par batterie d'accumulateurs.— Caméra PATHÉ WEBO 16 mm portative à entraî-nement mécanique pouvant dérouler de 8 à 80 images-seconde. Dans cette caméra, la vitesse de déroule-ment dépend de la tension du ressort et n'est doncpas constante.Différents angles de prises de vues ont été choisisafin de faciliter l'observation :— Caméra au sol filmant le passage du véhicule.— Caméra à bord d'un véhicule, filmant le véhiculequi le précède.— Caméra fixée sur le côté d'un vfhjçule et filmantles roues de ce même véhicule.Les difficultés n'en restent pas moins nombreuses.Ainsi, pour les prises de vues à poste fixe, il est néces-saire de disposer d'un fond neutre, f^ute de quoi lesgravillons sont peu visibles sur les films. En pratique,après différents essais, la caméra a été placée aussibas que possible sur le bord de la chaussée et un fondartificiel a été créé sur le côté opposé de •• la route aumoyen d'une toile tendue. D'autre part, si .l'on désiremaintenir le véhicule dans le champ de l'objectif pen-dant tout le mouvement d'un gravillon, il est néces-saire de prendre un recul.tel que les projections de-viennent invisibles sur les. photographies. Enfin, surles routes étroites, les prises de vues doivent êtreorientées presque parallèlement à la route,, dans desconditions,jde contraste très défavorables.Les vues obtenues-^à partir d'un véhicule suiveur sesont en général révélées difficiles à exploiter : lesimages sont souvent mouvantes; leur cadrage, peut,lorsque la chaussée est en mauvais état, être modifiéau point que le véhicule photographié sorte du champde l'objectif. Les difficultés de cadrage sont aggravéeslorsque la route est sinueuse. Dans ce cas égalementles variations d'éctairement sont très sensibles, etles films sont tantôt surexposés, tantôt sous-exposés.L'utilisation d'une caméra fixée au véhicule et filmantles roues de ce véhicule a donné de bons résultatspour l'étude des projections longitudinales, en dépitd'un inévitable manque de contraste.

Il est plus malaisé de trouver un angle de prise de vuesconvenant à l'enregistrement des projections laté-rales sans faire appel à des dispositifs complexes etsans risque d'endommager l'objectif de la caméra.Aussi les films sont-ils plus délicats à interpréter dansce cas.Pour examiner la nature des projections, il étaitnécessaire d'imaginer une technique de récupérationdes gravillons.

Une méthode a été indiquée dans le rapport présentéà la Commission Économique pour l'Europe, Comitédes transports intérieurs. Sous-comité des transportsroutiers. Groupe de travail de la construction desvéhicules - IVe session - (Document W/TRANS/W.P. 29/68 du 22 avril 1960).Elle permet effectivement de recueillir des gravillons,mais la position de leur point d'impact n'est connueque d'une manière discontinue puisqu'ils sont récu-pérés dans un empilage de boîtes, et que certainsd'entre eux peuvent échapper au piégeage. Pour amé-liorer cette technique et permettre de déterminer leplus exactement ; possible le point d'impact du gra-villon, nous avons imaginé de placer sur sa trajec-toire un panneau enduit d'une matière collante per-mettant de fixer le gravillon à l'endroit où il est in-tercepté.

Après avoir expérimenté différents produits (colle,résine de pin, glu, gélatine, button...), nous avonsporté notre choix sur une pâte constituée d'oléateset de particules solides fines. Le gravillon frappantun panneau enduit d'une telle pâte sur une épaisseurd'environ 1 cm s'incruste plus ou moins profondé-ment dans la pâte dont la consistance est suffisantepour ..que <le-£aillou reste en place malgré des vibra-tip.ns importantes. Cette pâte est en outre d'un épan-dage faciles adhère bien au bois, et demeure.pratique-ment insensible à la température et à l'humidité pen-

Figure 4 - Dispositif de récupération des gravillons : pan-neaux latéral et arrière fixés au véhicule.

dant un temps suffisamment long. Elle peut être aisé-ment confectionnée à peu de frais.Plusieurs panneaux ont été réalisés au cours desessais; deux d'entre eux étaient fixés au véhicule, untroisième était disposé sur le bas-côté de la. route.Des deux panneaux liés au véhicule (fig. 4), l'un étaitplacé dans le sillage de la roue arrière gauche. Dansune première série d'essais, sa distance à l'axe de cetteroue était de 1,20 m. Les variations de densité desprojections dues aux accélérations et décélérationsse sont révélées très sensibles. Aussi, pour mieuxsélectionner les gravillons recueillis, le panneau a étéreculé de 1,20 m à 1,80 m dans les essais suivants.

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Page 5: NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS

Il a également été monté sur un système basculantpermettant la mise en place du système à une vitesseet sur une distance définies à l'avance.L'autre panneau, d'abord rigidement fixé au véhi-cule, a ensuite été rendu basculant pour les mêmesraisons. Il a été placé sur le côté gauche du véhiculeà hauteur de la roue arrière à 40 cm de la face externede cette roue. Le dispositif présente l'inconvénientd'être encombrant, ce qui en proscrit l'utilisation surune voie étroite ouverte à la circulation publique.

Le panneau disposé sur le bas-côté de la route avaitune hauteur de 1,50 m. Sa longueur a varié au coursdes essais. Lorsque les véhicules passaient devantle panneau, leurs roues les plus proches s'en trou-vaient distantes d'environ 1,20 m.Si le système a, dans son ensemble, donné satisfactionil convient toutefois de signaler qu'aux vitesses élevées,les projections longitudinales les plus basses ont étési violentes qu'elles ont déchiqueté la partie infé-rieure du panneau arrière. Les mesures effectuées surles gravillons recueillis à ces vitesses ont donc étépartielles.Il restait à déterminer le lieu d'essai. Quelques testspréliminaires ayant permis de vérifier que l'absencede liant hydrocarboné modifiait les mécanismes desprojections, les sections expérimentales ne pouvaientêtre choisies que sur des routes incluses dans un pro-gramme annuel d'entretien. Grâce à l'obligeancedu Service des Ponts et Chaussées de la Seine-et-Oise,nous avons pu obtenir le programme de gravillon-nage de plusieurs subdivisions du département. Pourdes raisons de sécurité, ont été écartées toutes lessections situées en agglomération ou sur des voiesde grande circulation. En définitive le choix s'est fixésur le chemin départemental n° 198 près de Thiverval,dont le revêtement a été effectué avec des gravillonsde granulométrie 8-15 mm, et sur la Départemen-tale n° 53, à proximité de Villacoublay, où les gravil-lons employés répondaient à la norme de 3-8 mm.

La première section est étroite (environ 5 m de lar-geur) et sinueuse. Aussi les essais ont-ils été effectuésà faible vitesse et avec un dispositif réduit ne compre-nant pas le panneau latéral de récupération des gra-villons, fixé au véhicule. Les prises de vues ont éga-lement été réduites et se sont d'ailleurs révélées peuexploitables, pour les raisons exposées précédemment.Cette première campagne a néanmoins permis derecueillir des données partielles sur les caractéris-tiques des gravillons projetés. L'expérience acquisea surtout été mise à profit pour améliorer les mé-thodes d'observation utilisées dans les campagnessuivantes.

m - RÉSULTATS DES ESSAIS

1. Projections longitudinales

Les projections radiales dues à l'action de la forcecentrifuge n'ont pas de directions privilégiées. Eneffet, les films montrent que les gravillons peuventêtre libérés du pneumatique en un point quelconque

de la circonférence. On trouve donc des gravillonsqui sont dégagés en avant du pneumatique aussi bienqu'en arrière. Toutefois, ces projections, qui sonttrès importantes à basse vitesse, diminuent au furet à mesure que la vitesse de rotation de la roue aug-mente et disparaissent pratiquement au-dessus de60 km/h : la force centrifuge devient alors supérieureà la force d'adhérence (pénétration du gravillon dansles sculptures ou collage sur le pneumatique par leliant hydrocarboné utilisé pour le revêtement routier).Ces gravillons sont en général rapidement arrêtés parles éléments de la caisse et retombent au sol sansvitesse. Cependant, il peut arriver que le gravillonsoit reprojeté à une hauteur pouvant être gênante,notamment lorsqu'il rebondit sur une arête ou surle flanc de la roue.La plus grande partie des projections longitudinalessur l'extérieur sont tangentielles. D'après les me-sures effectuées sur des agrandissements de films auprojecteur de profil l'angle maximum d'éjection desgravillons est de l'ordre de 25° et cet angle sembleindépendant de la vitesse. La hauteur maximum dela projection de ces gravillons peut atteindre 1 m à1,5 m suivant la vitesse de circulation et le poids dugravillon.Les projections dues aux roues avant sont rapide-ment arrêtées par le soubassement de la voiture. Ilen est en partie de même pour les roues arrière, maisnéanmoins de nombreux gravillons sont libérés enarrière de la voiture.La pression de gonflage des pneumatiques de la voi-ture d'essai a toujours été maintenue à 2,400 kg/cm2

et la charge sur l'essieu arrière était de 630 kg. Dansces conditions, dans un système lié au véhicule, ladistance de projection paraît être d'une vingtaine demètres, à la vitesse de 80 km/h. Cette distance n'atoutefois pu être déterminée avec précision car lesimages prises dans ce système (c'est-à-dire le véhiculeparaissant immobile sur les images) ne contiennentpas toute la trajectoire des gravillons, sauf à prendreun recul tel que les gravillons deviennent invisibfessur les films, ainsi qu'on l'a déjà mentionné.Mesurée sur ces mêmes images, la vitesse des gravil-lons au début de leur trajectoire apparaît sensible-ment égale à la vitesse de la voiture et de sens contraire.Cette vitesse est mesurée par rapport au véhiculepuisque rappelons-le, les images ont été prises ensuivant dans le viseur le véhicule en mouvement. Lanetteté du véhicule par rapport au flou du fond suf-firait à le montrer. Dans un système lié au sol, les gra-villons projetés ne doivent donc être animés d'aucunevitesse horizontale appréciable; ils doivent simple-ment être soulevés. C'est ce qui a été vérifié au coursde la dernière campagne d'essais où les prises de vuesà poste fixe ont été effectuées en maintenant la caméraimmobile. Les figures n08 5 et 6 montrent les trajec-toires types obtenues.

Ce résultat peut sembler surprenant : un observateurdirect croit voir très nettement les gravillons projetésen arrière. En fait il s'agit d'une illusion d'optique,

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VÉHICULE N'2 ô!

Vitesse lie la voilure : 30 km/h rv> i

(Ascension du gravillon :0,60m. '%/

<P Point de chute :0,20m versfl/ r>u\

f Vitesse au départ-, 6 km/h

marche du véhicule

Figure 5 et 6 - Trajectoires-types des projections longitudi-nales fangentielles.

VEHICULE NM7

Vit»» de Ijvailurc : 25km/h

6 hPoint dt chute. 0,10 m «rs AV <~>j Y ̂

Vitesse iu départ : 1 0 k r o / h ^ / y 9

c. i

car l'œil se fixe sur le véhicule, le plus gros mobile, etvoit donc des images dans des axes en mouvementpar rapport au sol; dans ce système, les gravillonssont bien projetés en arrière du véhicule avec un anglede l'ordre de 25°.

Les résultats expérimentaux concordent d'ailleursavec la théorie cinématique simplifiée du phénomène :le mouvement d'un point du pneumatique dans desaxes fixes peut être assimilé à une cycloïde; le vecteurvitesse de ce point, à l'instant où il quitte le sol (fig. n°7)

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Figure 7 - Mouvements d'un point lié à la roue par rapportau sol.

est vertical et dirigé vers le haut. Le gravillon qui estentraîné dans ce mouvement a donc une trajectoirequi, au départ du sol, est sensiblement verticale e'.même dans certains cas inclinée dans le sens du mou-vement du véhicule, s'il est libéré après que son pointde centact avec le pneumatique a quitté le sol.

Bien entendu, il ne s'agit là que d'une explicationsommaire. En particulier, en raison de l'élasticité despneumatiques, la trajectoire des points de leur sur-face n'est pas une cycloïde parfaite. Il est égalementfait abstraction des forces complexes qui agissent pro-bablement sur le gravillon alors qu'il est pressé entrele pneu et le sol. Le schéma présenté a cependantl'avantage de clarifier des constatations à priori sur-prenantes.

L'angle des projections, par rapport à l'horizontale,dans un système d'axes liés au véhicule, est de l'ordrede 18°, les projections les plus denses restant à l'inté-rieur d'un angle inférieur à 10°. Il paraît indépendantde la vitesse du véhicule, et correspond sensiblementau demi-arc sous-tendu par l'aire de contact du pneuavec le sol (fig. n° 8).

Panneau de récupération

-*• 118' N

Zôm de projetUoti maxlà 1,80m du véhicule

Figure 8 - Angle des projections longitudinales tangentielles.

Page 7: NATIONAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE PROJECTIONS DE GRAVILLONS

20km/h30 km/h

25cm 25

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40km/h

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V

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35 cm 35cm , H

50km/h • '

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Figure 9 - Répartition des projections tengentielles enfonction de la vitesse.

Si l'angle des projections dépend peu de la vitesse, iln'en est pas de même de leur distribution à l'inté-rieur de cet angle, comme le montre la répartitionde ceux qui ont été interceptés par le panneau arrière,et qui est reproduite sur les schémas de la figure n° 9.Au cours des essais.le panneau se trouvait à 1,80 mde l'axe de la roue. Il était mis en place une fois quela vitesse choisie était atteinte et maintenue dans cetteposition sur une distance de 100 m.Lorsque la vitesse croît, les phénomènes peuvent êtredécrit de la manière suivante :

Vitesse inférieure à 30 km/hLes projections sont pratiquement nulles. On relèvequelques gravillons isolés à des hauteurs au-dessusdu sol inférieures à 25 cm.

40 km/hLes gravillons récupérés sont plus nombreux maisrestent isolés. La zone intéressée s'étend à 35 cm depart et d'autre du plan médian de la roue et à 30 cmau-dessus du sol.

50 km/hOn distingue deux zones très différentes :1) Une zone basse sur toute la largeur du panneau,

soit 60 cm de part et d'autre de l'axe et s'élevantà 20 cm au-dessus du sol dans laquelle les projec-tions de gravillons sont suffisamment importantespour avoir arraché la matière collante.

2) Une deuxième zone dans laquelle la densité desgravillons décroît pour devenir nulle à 60 cmdu sol.

60 km/hLa zone inférieure s'élève jusqu'à 30 cm du sol. Lahauteur maximum est de 70 cm.

70 km/hLa zone inférieure s'élève à 40 cm au-dessus du sol.La projection est ici suffisamment violente pour déchi-queter le bord inférieur du panneau support en boiscompressé. La projection est encore dense à 70 cmau-dessus du sol; elle est nulle à 90 cm (voir fig. 10).La route utilisée ne nous a pas permis de faire desessais à des vitesses supérieures en raison du manquede visibilité pour pouvoir se lancer en toute sécurité.Ces essais montrent donc que la projection de gra-villons ne devient importante qu'à partir de 50 km/h.En effet, à 40 km/h les projections atteignent 30 cmà 1,80 m de la roue, et il semble que d'après leurfaible enfoncement dans la pâte leur force est insuf-fisante pour être projetés très loin.Par contre, pour des vitesses supérieures, ces projec-tions peuvent être dangereuses. Ainsi à 70 km/h lazone de projection dense atteint 40 cm de hauteuret les gravillons s'enfoncent jusqu'au support de lapâte. De plus, on a relevé des gravillons à 90 cm dehauteur. Il semble donc qu'à cette vitesse de circula-tion les gravillons projetés en arrière par la roue peuventavoir une force suffisante pour s'élever à la hauteur d'unpare-brise (environ 1 m) à une distance importante.

— 8 —

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La masse totale des gravillons ne peut être calculéeavec précision étant donné que passé une certainevitesse la projection est telle que la pâte sur le panneauest enlevée et qu'il n'est pas possible d'avoir la totalité

Figure 10 - Projections sur le panneau de récupération arrière.

des cailloux projetés. Cependant, d'après le poids descailloux récupérés, on peut estimer qu'à partir de50-60 km/h le poids des cailloux projetés en arrière duvéhicule à une distance de 2m est au minimum de l'ordredu kilogramme tous les 100 m parcourus et par roue.

,15(1

La vitesse ne semble pas, par contre, affecter la gra-nulométrie des éléments projetés. Le poids moyendes gravillons récupérés sur les différents panneauxest de l'ordre de 0,8 g pour la première campagned'essais et de l'ordre de 0,5 g pour la deuxième. Legravillon le plus lourd pèse 3,9 g. La répartition dé-taillée de l'échantillon prélevé dans la première cam-pagne est donnée sur la figure 11 et le tableau I. Elleest très voisine de celle d'un échantillon de référenceprélevé sur la route, qui est également indiquée surla figure 11. Il semble donc que les projections inté-ressent toute la masse des gravillons, sans opérerde sélection selon la granulométrie.

Tableau I. — Répartition des gravillons récupérés durantla première campagne d'essais.

Poids en grammes

0,00 à 0,250,25 à 0,500,50 à 0,750,75 à 1,001,00 à 1,251,25 à 1,501,50 à 1,751,75 à 22 à 2,252,25 à 2,503,50 à 4

Nombre

Nombre de gravillons récupérésPoids total des gravillonsPoids moyen d'un gravillonPoids du gravillon le plus lourd

de gravillons

63057752915231083 .1

257230 g.

: 0,89 g.3,9 g.

Figure 11 - Granulométrie des gravillons.

2. Projections latérales

Dans la classification adoptée pour les projectionsdirectes, nous avons admis l'existence de projectionsémises dans un plan perpendiculaire à l'axe du véhi-cule. En fait, si les photographies en suggèrent l'exis-tence, il est plus difficile d'en obtenir une confirmationdirecte par l'examen des films. Peu de trajectoires ontpu être enregistrées, d'abord parce que le nombrede gravillons projetés latéralement est lui-mêmefaible, ensuite parce que les conditions de prises devues n'ont pas toujours permis de réaliser des films,suffisamment nets. Enfin l'instant précis de la libéra-tion du gravillon est malaisé à observer en raison dumanque de contraste des clichés.Pratiquement, pour mettre en évidence les projectionslatérales, il est nécessaire de contrôler les conclu-sions suggérées par l'analyse de films en les compa-rant à celles qui se déduisent de l'examen des pan-neaux latéraux de récupération.Supposons à priori que le gravillon ait une trajectoiredont la trace sur le sol soit perpendiculaire au plan

O,

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de la roue dans un système d'axes liés au véhicule(voir plan 10. a). Dans ce cas, en l'absence detoute autre force que celle qui lui a donné son impul-sion initiale, sa trajectoire sera confondue avec latrace du plan vertical passant par l'axe de la roue, etson point d'impact P sera confondu avec O' (fig. 12 a).

TRAJECTOIRE LIÉE AU VÉHICULE - VUE EN PLAN

_ Panneau latéral

aint d'impact P«cdt£Due_ ...

0

xns dumouvement.

braiectoinej " • "

Point dlmp

TRAJECTOIRE LIEE AU SOL - VUE EN PLAN

sens dumouvement

"fi™ 0

Figure 12 (a et b) - Schéma de la trajectoire des projectionslatérales.

En fait, par rapport à des axes immobiles (fig. 12 b),le gravillon est animé d'une vitesse dont la compo-sante parallèle à l'axe de la route est voisine de celledu véhicule. La résistance de l'air dans lequel il sedéplace est donc loin d'être négligeable; la compo-sante Tv de cette force aérodynamique parallèle aumouvement du véhicule et dirigée vers l'arrière, in-curve la trajectoire du gravillon (tracés en pointillésur la figure n° 12) de telle sorte que son point d'im-pact sur le panneau latéral vient en P', à l'arrièrede O'.Bien que la traînée aérodynamique des gravillons nepuisse être calculée avec précision, la position despoints d'impact déterminée expérimentalement estcompatible avec l'hypothèse que certains gravillonssont projetés dans un plan perpendiculaire à la roue,dans un système lié au véhicule.

Malgré les réserves exprimées au début de ce cha-pitre, la projection au ralenti des films obtenus avec

la caméra à poste fixe, en position immobile ou enmaintenant le véhicule dans le viseur, permet deconfirmer cette première conclusion et de préciser lesdifférents paramètres définissant la trajectoire-type

Figure 13 • Relevé expérimental de la trajectoire des pro-jections latérales.

des projections latérales. La figure 13 (partie infé-rieure) montre le relevé sur l'écran d'une telle trajec-toire, tracée dans un système d'axes liés au sol. Lerelevé est, bien entendu, en perspective.Le schéma supérieur de la même figure montre latrajectoire du gravillon, tracée dans un systèmed'axes liés au véhicule. Quelques photos témoinstirées du film illustrent cette trajectoire.Sur le relevé de la figure 13 on a représenté les axesd'un trièdre trirectangle o x y de référence définicomme suit :— Origine O étant le point de départ du gravillon.— Axe ox, dans le plan de la route parallèle à l'axede la route et dans le sens du mouvement.— Axe oy, dans le plan de la route et perpendicu-laire à ox.— Axe oz, vertical perpendiculaire au sol (plan o x y)en o.L'échelle sur les différents axes est donnée par desrepères pris sur la voiture (vitesse du véhicule, sonempattement, hauteur du pare-choc) et par la vitessede déroulement du film.Soit C le point de chute du gravillon au sol. La pro-jection sur le sol de sa trajectoire est donc OC. Dansun système d'axes en mouvement, C vient en C telque CC égale OB représentant le chemin parcourupar la voiture. On constate immédiatement que Cest en arrière de Oy, axe perpendiculaire au plan dela roue comme on l'a vu précédemment.Soit A une position du gravillon sur sa trajectoire telque l'arc OA puisse être assimilé à une droite et A' laprojection de A sur le sol. Les coordonnées de A sontAx, Ay, Az représentées sur la figure 13. Elles peuvent

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être calculées par référence aux échelles portées surle graphique :

Ax = 40 cmAy = 29 cmAz = 12 cm.

Connaissant les coordonnées du point A, on peut cal-culer également la vitesse initiale du gravillon. Tou-jours dans le cas étudié, on a trouvé que la vitessemoyenne du gravillon pendant les cinq premièresimages, soit pendant 5/80 s était de l'ordre de 15 m/s.La vitesse du véhicule était au moment des prises devues de l'ordre de 50 km/h, soit 14 m/s. On peut doncdire que la vitesse moyenne du gravillon est légère-ment plus grande que celle du véhicule.

Il est possible également de mesurer l'angle formépar la trajectoire du gravillon avec le plan de la roue.

Dans ce cas particulier, on a trouvé 8 = 78° avec laverticale. Cet angle peut varier considérablementcomme le prouve la position des points d'impactrelevés sur les panneaux mobiles et fixes. Les varia-tions sont liées aux conditions de projection des gra-villons et à la vitesse du véhicule. Voici, en effet, lesobservations faites sur le panneau latéral fixé auvéhicule, à 30 cm du bord extérieur de la roue, aucours d'essais à vitesse croissante.

Vitesse inférieure à 50 km/hOn relève quelques gravillons très dispersés situés enarrière de l'axe de la roue et à des hauteurs faiblesd'environ 30 cm.

50 km/hLa projection de gravillons devient importante ets'étend très largement à l'arrière de la roue.

60 km/hLa forme de la projection est donnée sur le schémajoint (fig. 14). Les gravillons atteignent le panneauà 20 cm en arrière de l'axe de la roue, à 80 cm dehauteur (fig. 15).

sens du mouvement^

: .• . -s.• • o"

. 0,20m .

Projectionde la roue

de \'m

Sol

Figure 14 - Schéma de répartition des projections latéralessur le panneau de récupération lié au véhicule.

Figure 15 - Répartition des projections latérales :En haut : vitesse : 60 km/h En bas : vitesse : 70 km/h.

70 km/hLa forme de la projection est identique à la précé-dente, mais la densité est plus grande surtout dansla zone inférieure (fig. 15).Parallèlement, des relevés ont été effectués sur lepanneau monté sur le bord de la route. Les chiffresdonnés ci-dessous se rapportent à une longueur depanneau de 1 m et à 6 passages.

V = < 50 km/h :Aucune projection.

V = 50 km/h :1 gravillon à 20 cm du sol.

V = 60 km/h : •5 gravillons dont 1 à 75 cm du sol.

V = 70 km/h :4 gravillons dont 1 à 80 cm du sol.

V = 80 km/h :9 gravillons dont 3 à 95 cm du sol.

V = 90 km/h :6 gravillons dont 2 à 1,10 m du sol.

V = 100 km/h :12 gravillons dont 2 à 1,50 m du sol.

V = 110 km/h :8 gravillons dont 2 à 1,25 m du sol.

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De ces essais il résulte donc que les projections laté-rales à grande distance ne prennent de l'importancequ'au-dessus de 50 km/h et qu'à ce moment 1 à 2 gra-villons par mètre parcouru sont projetés à une hau-teur et à une distance suffisantes pour atteindre unpare-brise. La hauteur exprimée en cm à une dis-tance de 1,20 m de la roue est sensiblement représentéepar le même nombre que la vitesse du véhicule expri-mée en km/h.

En rapprochant les résultats des différentes méthodesd'observation, on peut reconstituer approximative-ment le schéma des projections latérales : projectionstrès denses atteignant environ 50 cm de hauteur et1 m de part et d'autre de la route; au-dessus et au-delà, la densité des projections diminue rapidement.Mais étant donné que nous avons observé des gra-villons à 1,5 m du sol, nous pouvons admettre quecertains d'entre eux, 2 pour 6 passages ou encore1 tous les 3 m, peuvent atteindre une hauteur supé-rieure à 1 m à une distance de 1,20 m de la roue pro-jëctricë et ceci pour des vitesses de circulation supé-rieures à 70 km/h. En dessous de cette vitesse, il nesemble pas qu'un gravillon puisse atteindre unehauteur suffisante pour frapper un pare-brise.

La granulométrie des projections latérales ne semblepas différer de celle des projections longitudinales, nide celle. des gravillons répandus sur la route. Mais,au total, leur importance est bien moindre que celledes projections longitudinales ; le poids des gravillonsrécupérés sur le panneau latéral lié au véhicule ne dé-passe pas 250 g tous les 100 m parcourus, à une vitessesupérieure à 50 km/h, alors qu'il a été évalué à 1 kgpour les cailloux interceptés par le panneau arrière.

IV - FACTEURS LIÉS AUX PROJECTIONS

Les observations décrites précédemment font claire-ment apparaître l'influence de la vitesse du véhiculesur l'importance des projections émises. Elles montrentégalement que, les gravillons n'étant pas animésd'une vitesse appréciable parallèlement à l'axe de laroute, l'énergie nécessaire au bris d'un pare-brisene peut être fournie que par la vitesse du véhiculeaccidenté.

D'autres facteurs, que l'étude permet seulementd'entrevoir, doivent également être considérés. Ainsien est-il de la structure des pneumatiques et de leurpression de gonflage : au cours des essais, on a puobserver que les véhicules lourds travaillant sur lechantier ne projetaient pratiquement pas de gravillonsbien qu'ils eussent à rouler sur le revêtement fraîche-ment réalisé. Or on sait que leurs pneumatiques sontgonflés à haute pression et surtout que les sculpturesde ces pneumatiques sont plus profondes et pluslarges que celles des pneus à basse pression.

De ce fait, un gravillon qui peut s'insérer dans le pneuà basse pression ne peut que se coller sur le pneu àhaute pression et, par suite, dans le premier cas, la

vitesse de départ du gravillon sera beaucoup plusgrande que dans le deuxième. Ainsi les projectionsdirectes dues à la force centrifuge sont pratiquementinexistantes dans le cas du pneu à haute pressionpour lequel il ne subsiste que le soulèvement dû àl'interaction pneu-sol.

D'autres facteurs sont liés aux caractéristiques desgravillons répandus et aux conditions du revêtement.L'importance des projections diminue évidemmentavec la prise du revêtement et au fur et à mesure quele nombre de véhicules ayant circulé augmente : lorsde la première campagne d'essais faite par temps fraiset humide et avec une circulation faible, les pro-jections étaient encore notables 48 h après la posedu revêtement; bien que très faibles et non utilisablespour nos essais, elles n'étaient pas encore nulles5 jours après le répandage. Par contre, dans la deuxièmecampagne pour laquelle les conditions de pose étaientplus favorables (temps sec et chaud) et la circulationrelativement importante, les projections étaient pra-tiquement nulles 48 h après la pose. Les différencesde granulométrie peuvent d'ailleurs expliquer enpartie ces variations.

La granulométrie, précisément, est un facteur impor-tant sinon de la densité des projections, du moins deleur nocivité. Sur le premier point, les essais effec-tués n'apportent pas d'éléments décisifs : ils ontdonné des résultats comparables au cours des cam-pagnes successives alors que le calibrage des gravillonsétait différent (8-15 et 3-8). L'importance des projec-tions était du même ordre dans les deux cas. Il convienttoutefois de signaler que des observations directesfaites sur des routes gravillonnées avec un calibreplus petit ont paru donner naissance à des projec-tions peut-être aussi fournies, mais retombant plusrapidement.

La nocivité des gravillons projetés est liée à leur masseet à la courbure de leurs arêtes. Au cours des épreuvesde réception, les verres pour pare-brise sont soumisà un essai de rupture dans lequel une bille de 3 mmde diamètre tombe sur l'échantillon d'une hauteurdéterminée. La rupture ne doit pas se produire pourune hauteur de chute inférieure à 0,75 m. En assi-milant les gravillons à des cailloux sphériques, ontrouve que l'énergie communiquée à un gravillonmoyen de calibre 5-5 est environ 20 fois plus petiteque l'énergie minimum correspondant à l'essai deréception. Elle est encore 5 fois plus petite dans lecas d'un gravillon 8-15. Mais les échantillons pré-levés dans les stocks de gravillon à répandre conte-naient aussi des gravillons d'un poids voisin de 4 gayant encore les caractéristiques dimensionnelles dugravillon de 5-75 et il est vraisemblable qu'il s'ytrouvait des gravillons d'un poids encore plus élevé,le Cahier des Charges admettant une tolérance de3 % par rapport aux limites spécifiées. De tels gra-villons peuvent avoir une énergie suffisante pourbriser un pare-brise.

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D'autre part, ces comparaisons supposent que lesgravillons sont parfaitement sphériques. En réalitéils présentent des arêtes vives dont le rayon de cour-bure est inférieur à celui de la bille utilisée dans lesessais de réception. Des relevés effectués au projec-teur de profil ont montré que les rayons de courburedes arêtes des gravillons varient dans de grandesproportions. Des rayons de courbure de l'ordre de2/10 de mm sont néanmoins fréquents. En reprenantalors les essais de rupture avec des billes de diamètredécroissant on trouve que pour une bille ayant lamême courbure que les gravillons, la hauteur de chutenécessaire au bris de l'échantillon est seulement de0,20 m. L'énergie disponible est 16 fois plus petiteque dans l'essai normalisé. On voit donc dans quellesconditions la rupture du pare-brise par des gravillonsest possible, même à des vitesses relativement ré-duites : il suffit qu'un gravillon touche le pare-brisepar une pointe.

Toutefois, la probabilité pour qu'un gravillon d'unpoids suffisant frappe un pare-brise dans une posi-tion favorable à la rupture reste faible el ne peutexpliquer la totalité des ruptures de pare-brise cons-tatées sur les routes fraîchement gravillonnées. Il estvraisemblable que dans de nombreux cas un affaiblis-sement général ou localisé du pare-brise contribueà permettre la rupture par des gravillons ayant uneénergie faible. Cet affaiblissement peut être provoquéde différentes manières et notamment dans les cassuivants :

— Affaiblissement local, par exemple zone de sépa-ration de trempe dans le verre BISECURIT ou dé- .faut de construction.

— Contrainte permanente due au montage ou à unedéformation de la carrosserie par un choc.

— Contrainte dynamique due au mouvement desroues et à la carrosserie ou au travers de la suspension.

— Contrainte due à des dilatations de carrosserie.Il ne nous a pas encore été possible de vérifier systé-matiquement ces différents points, mais cependantnous indiquerons qu'une enquête nous a permis deconstater que plusieurs conducteurs ayant vu leurpare-brise se briser ont reconnu que le véhicule avaitété accidenté peu de temps auparavant.

CONCLUSIONS

En résumé, il apparaît que les ruptures de pare-brisepar des projections de gravillons impliquent la contri-bution de nombreux agents : — celle, d'abord, desconducteurs, qui choisissent la vitesse de leur véhi-cule. De cette vitesse dépend la densité des projec-tions, pour le véhicule « émetteur », et l'énergie dechoc, pour le « véhicule-récepteur ». C'est sur cetteinfluence de la vitesse que les essais conduisent auxconclusions les plus précises, qui seront reprises plusloin.

— celle, ensuite, des gravillons : leur masse inter-vient dans l'énergie du choc; leur degré d'acuité déter-mine des variations du niveau d'énergie nécessairepour provoquer la rupture du pare-brise. Mais sil'absence d'arêtes vives est une qualité de ce pointde vue, elle a des conséquences fâcheuses pour laglissance de la chaussée.

— celle, enfin, du véhicule. Les caractéristiques despneumatiques, la position des roues sous la caisse dela voiture sont des facteurs qui agissent directementsur les projections; d'autre part l'état de tension dupare-brise lui-même, lié par exemple à la températureet aux déformations du véhicule, commande sa sus-ceptibilité aux chocs.

En définitive, c'est le conducteur, qui, de tous cesagents, est le plus adaptable. C'est à son usage quesont ici résumés les faits qui le concernent le plusdirectement :

1) Contrairement à ce qui est généralement admis, lesgravillons ne sont pas projetés en arrière du véhi-cule, mais soulevés verticalement avec une tendanceà décrire une trajectoire dans le sens de la marchedu véhicule. Ceci implique que, seule la vitesse duvéhicule suiveur peut apporter l'énergie nécessaireau bris de son pare-brise par un gravillon soulevépar le véhicule le précédant.

2) La distance de projection ou plus exactement ladistance parcourue par la voiture pendant la duréedu soulèvement du gravillon est de l'ordre de 20à 25 m pour les projections arrière et de 2 à 3 mpour les projections latérales.

3) La hauteur des projections arrière et latérale dé-passe 1 m à partir de 60-70 km/h.

4) La qualité des gravillons ne semble pas avoir d'im-portance sur les projections tout au moins dans lagamme des granulométries étudiées.

5) Les gravillons projetés ont une granulométriemoyenne, identique à celle des gravillons consti-tuant le revêtement.

6) La quantité totale de gravillons projetés est del'ordre de 30 à 40 kg par kilomètre parcouru, à lavitesse de 60-70 km/h.

On peut donc, d'après ces essais, définir une zone« dangereuse » autour d'une voiture en circulationsur une route fraîchement gravillonnée. On admettraa priori qu'un gravillon peut être dangereux s'ilatteint une hauteur supérieure à 75 cm, hauteur mi-nimum de la base d'un pare-brise actuel. Dans cesconditions, la zone dangereuse peut être considéréepratiquement comme nulle pour des vitesses infé-rieures à 50-60 km/h, au-dessus, elle s'accroît progres-sivement pour atteindre 2,5 m de part et d'autre duvéhicule et environ 25 m en arrière pour des vitessesde l'ordre de 100 km/h.

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SUMMARY

The purpose of the study is to détermine how gravels are projected by vehides passing on theroad and can break the windshield of following vehides. Caméras hâve been used to recordthe trajectory of the gravels. In addition, pebbles hâve been collected on boards coated withglue, which were attached to the back and the side of the car or erected on the edge of the road.Some pebbles deviate from their direct trajectory, after hitting some part of the vehicle. Theirstudy has not been attempted. The main direct projections fall into two catégories : gravels arerushed out behind the wheel or their are ejected sideways.In a System of axis linked to the moving vehicle, rear projections are contained in an angleof about 20 degrees. Their speed is equal to the vehicle speed. Therefore, in relation to theground gravels jump vertically.Side projections seem perpendicular to the wheel. Hère again their speed, which compareswith the speed of the vehicle, has no component paraUel to the road axis.In both cases it can be shown that the amount of energy required to break a windshield is pro-vided by the speed of the following vehicle. This amount may be less than required for glasstests : pebbles hâve sharp angles whose curvature is much less than the radius of the standardbail used for such tests. Internai tensions in the windshield may also Iocally weaken its résis-tance.For practical purposes, it is possible to define a zone of danger around a vehicle speeding on anewly gravelled pavement. Such zone is non-existent for speeds less than 30-40 mph. It extendsas far as 8 feet sideways and 75 feet to the reer of the car when the speed reaches 65 mph.

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