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Nisimazine MARDI 20 MAI 2008 3 Un magazine crée par Nisi Masa, European Network of Young Cinema Les grandes personnes Snijeg Kornél Mundruczó En partenariat avec

Nisimazine Cannes 2008#3-Fr

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Nisimazine Cannes 2008

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NisimazineMardi 20 Mai 2008

3 Un magazine crée par Nisi Masa, European Network of Young Cinema

25TH torino film fes-tival

Les grandes personnesSnijeg

Kornél MundruczóEn partenariat avec

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Lumière est Dieu (en Ray Ban)

Il y a quelque chose de terriblement magique dans le processus cinématographique qui fait qu’une idée transformée en une histoire écrite prenant vie dans une mise en scène complexe humaine et matérielle d’images et de sons organisés en une suite cohérente, compactée dans 5 ou 6 bobines de pellicule se retrouve parfois dans le faste superfêtatoire

du festival de Cannes. Ce long processus implique une très forte hiérarchisation des rôles des intervenants. Le film fini, sélectionné en festival, une nouvelle hiérarchie se met en place. Ceux qui ont des badges et ceux qui mendient des places devant le palais, ceux qui ont des entrées sur les yachts et villas et ceux qui payent leur pinte 6 euros au Petit Martinez. A Cannes, le cinéma et sa célébration n’est pas pour tous, il est pour les apôtres du 7ème art et, hélas aussi pour ceux qui ont du fric qui achète tout. Etrangement, ce côté inaccessible donne au medium son aura. L’immatérialité de cette association de photons et d’ondes sonores créant de l’émotion relève bel et bien de l’expérience mystique. Lui rendre hommage en smoking et champagne est une sorte d’eucharistie éminemment religieuse. Si le strass et les paillettes ont ce côté horripilant, l’émotion du cinéma reste, elle, universelle. Nous, journalistes, sommes là pour en témoigner, tels des évangélistes en Ray Ban.

Editorial Julien Melebeck

NISIMAZINE CANNES Mardi 20 mai 2008

Un magazine publié par l’association NISI MASA

avec le soutien du programme ‘Europe for Citizens’

de l’Union Européenne et du Ministère de la Santé, de la Jeunesse,

des Sports et de la Vie associative. EQUIPE EDITORIALE

Rédacteur en chef Matthieu Darras

Secrétaires de rédaction Jude Lister, Emilie Padellec

Traductions anglaises Jude Lister Traductions françaises et maquette

Emilie PadellecOnt contribué à ce numéro

Esra Demirkiran, Luca Döme, Simone Fenoil, Zsuzsanna Kiràly,

Johanna Kinnari, Mario Kozina, Julien Melebeck, Helena Mielonen,

Delphine Pinatel Ormsby, Sebastiano PucciarelliPhoto de couverture:

Snijeg (Snow) de Aida BegicNISI MASA (European Office)

10 rue de l’Echiquier, 75010, Paris, France.

+ 33 (0)6 32 61 70 26 [email protected]

www.nisimasa.com

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Le sourire de la fille du pirate mélancolique

À l’occasion de ses 17 ans, un père emmène sa fille Jeanne passer des vacances en Suède. Les choses se compliquent quand un malentendu

sur la réservation les oblige à partager la maison louée avec la propriétaire et son amie. Psychorigide, le père a décidé de rechercher le trésor d’un ancien pirate suédois dont il connaît la légende par cœur. Jeanne elle, est à l’âge où l’on sourit aux garçons, où l’on a envie d’expériences vibrantes avec un beau blond local...

Le film est limpide, finement écrit et gracieusement réalisé. Les paysages côtiers suédois sont superbes à la fois exotiques et familiers. Darroussin est comme toujours impeccable. La jeune fille candide interprétée par Anaïs Demoustier est délicieusement craquante dans son personnage de fille gauche voulant être cool. La scène où le père se retrouve seul coincé sur une île et constate que la poursuite de sa chimère l’a mené dans une impasse, augmente d’un cran la tonalité un rien téléfilmesque du propos.

La fin confirme la volonté d’un happy end pour tous, mais reste cohérente avec cette histoire qui aurait pu être un peu plus pimentée, un peu moins cinéma sans faute, premier de la classe. Ce qui est plus que bien pour un premier long.

Julien Melebeck

Film du jour Les grandes personnesDe Anna Novion (France~Suède)

Critique Elève Libre

De Joachim Lafosse (Belgique)

© www.thebluehourmovie.com

Jonas, un jeune ado promis à une carrière de tennisman, foire complètement ses études et est contraint à passer son bac au Jury Central comme élève libre. Il est pris en charge par un

trentenaire et ses amis, bien décidés à lui apprendre les maths, la chimie, les langues, mais pas que ça... Rapidement, le coaching dévie vers l’initiation sexuelle de Jonas qui y perd son libre arbitre. L’apprentissage de l’acte sexuel et ses agréments finissent logiquement par des exercices pratiques de plus en plus pervers.

Comme dans Nue Propriété, le rythme du film est très lent. Mais ici l’action est surtout dans les longs dialogues qui squattent la bande sonore et finissent par réduire le film à une froide démonstration. L’aspect débonnaire et désincarnée des personnages accentue ce sentiment de détachement un peu artificiel. L’effet provoquant de certaines scènes fonctionne parfois très bien mais on attend vraiment de savoir où Lafosse veut en venir dans son propos sur la perversion et la fin fait un peu ‘‘plof ’’. L’image est pourtant très belle et les acteurs font de leur mieux, mais comme nous, ils ont un peu l’air de se demander à quoi on joue. Où est donc passée la trituration radicale des tripes de l’âme humaine qui inspirait magnifiquement les précédents films de ce jeune réalisateur talentueux ?

Julien Melebeck

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© «Land of Plenty» by Win Wenders (2004)

Quand tout votre environnement se base sur des clips virtuels, comment pouvez-vous gérer

des émotions très fortes qui surviennent dans le monde réel ?

Les questions de réalité et de détachement émotionnel s’entrecroisent dans le film d’Antonio Campos Afterschool, pouvant être vu comme un film dans le film. Il est composé de tel sorte que le regard du spectateur n’est pas souvent confronté à un personnage en tant que tel, mais plutôt à un moniteur d’écran. Celui-ci nous montre des scènes de souffrance et d’humiliation mais aussi de douceur et d’amour. Il expose alors ce que le monde réel manque – le détachement émotionnel.

Critique Afterschool

De Antonio Campos (USA)

Interview avec: Aida Begić ?? ? ? ?

Mario Kozina

Comment vous est venue l’idée du film ?Beaucoup de femmes ont perdu leur maris et leurs

pères durant la guerre en Bosnie. En seulement un jour, dix milles hommes ont été tués à Srebrenica. Les femmes survivantes ont du soudainement se prendre en charge toutes seules. Il est important de parler de cette tragédie car ces femmes n’ont toujours pas reçu la compassion et le soutien approprié.

Pourquoi avoir appelé ce film « neige » ? La neige est un élément qui à la fois révèle et dissimule. Cette beauté blanche cache les horreurs de ce monde tandis qu’en même temps la neige laisse paraître les traces des bêtes sauvages qui ont marché dans les bois.

Un des principaux thèmes du film est le rapport entre la tradition, la religion et la vie au 21ème siècle.La religion est souvent mal interprétée à travers les traditions et c’est pourquoi je pense qu’elles doivent être différenciées. Alma, le personnage principal, est en faveur de la tradition mais de façon non régressive. Son

comportement œuvre en faveur de la communauté comme une valeur à ne pas négliger. Il tend à briser l’illusion qu’ailleurs est toujours mieux. Alma a le courage et la force de croire au potentiel de son pays.

Bien que les personnages masculins soient en général absent, les femmes dans Snow réussissent plutôt bien sans eux. Cela peut-il être interprété comme une critique de la société patriarcale ?La société patriarcale disparaît avec les personnages masculins mais son esprit est toujours là. Le film lui-même évoque plusieurs thématiques, mais je ne pense pas qu’il fasse l’apologie ou qu’il critique quoi que ce soit. Il présente simplement les points positifs et négatifs de la tradition, qui fait partie intégrante de la vie.

Est-ce que Snow délivre un message politique ?Aujourd’hui il est difficile de faire un film sans une sorte de message politique. La politique fait partie intégrante de nos vies à tel point que nous ne pouvons plus l’éviter. En parlant de politique tout le monde est concerné.

Durant la première partie du film, la syntaxe est innovante et expérimental. La composition des cadres – personnages décentrés et plans fixes de fragments de corps (comme par exemple des jambes) – est souvent quelque peu provocante. Cependant Campos lui-même ne croit pas que le spectateur soit capable de résoudre le mystère dont il parle. Vers la fin, Afterschool tend vers la banalité et l’explication facile, alors que son étonnante façon de raconter l’histoire avait mis sévèrement à l’épreuve la patience des spectateurs.

Mario Kozina

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Portrait

Korn

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Kornél Mundruczó, a young Hungarian director still early on in his career, has already drawn the attention of many critics with one of his first

short films Afta, both in his home country and internationally. At the age of 33 he has now completed his fourth feature film, Delta, which premieres in the official competition at Cannes this year.

He began his university years as an actor, studying dramatic arts, but could never accept limiting himself to being only a performer. Thus right after graduating, as the result of a complex and unconscious process, he started his film directing education. However theatre, being a medium which leaves it mark, remained an influence in his art. He took it as a challenge to overthrow the outdated reign of traditional staging with his experimental works.

He thinks funny the superficial approach through which people judge him - on the basis of legends wherein he is mentioned as a man who throws actors into the cold Danube or makes them sleep with an axe. In spite of public opinion he finds it surprising that a ‘Mundruczó film’ is often identified with something brutal. His claim might be true: the aesthetics he works with may seem realistic and tough - especially in his early films This I Wish and Nothing More and Pleasant Days, which amongst other prizes was awarded the Silver Leopard in Locarno – but if you look deeper into his world you can discover its beauty.

One of his most courageous, daring and original short films was Joan of Arc on the Night Bus - selected in the Directors’ Fortnight in 2003. It was later developed into the feature film Johanna, presented in Un Certain Regard in 2005. “I felt I should direct an opera to see what film could do with it. I admire this genre and still think I have to deal with it in the future. It is good for the soul”, he says. The film has proven that there is a higher interest for opera than was supposed before.

However, these weren’t Mundruczó’s sole visits to Cannes. He was invited to the Cinefondation scriptwriting scholarship in 2003, and the following year his short Little Apocrypha No. 2 was selected for the Cinefondation section. 2003 was also the year he received the Balázs Béla Hungarian national cultural award. Another interesting point in his career was his participation in the project Lost and Found, together with other eastern European directors including Stefan Arsenijvic, Cristian Mingiu and Jasmila Zbanic. The project was based on the idea that the sense of a common bond determined by belonging to a certain generation, and so reaching beyond national borders, opens up new perspectives on traditions, history and one’s own personal experiences.

He says “I have aesthetic aims, to make real emotions come to life on the screen and not to let dramaturgy be the primary engine, a cinema in which things are happening inside the actors, a cinema which has truth and not story.” In Mundruczó’s films we see the human side of the actors. However his visions – as evidenced by his other works – are poetic fictions and not realism. He values most those films which can change one’s attitude towards the universe, give you an experience which allows you to live and think onward, infiltrate into your cells. According to him two good examples of this are Fassbinder’s Fear Eats the Soul (Angst essen Seele auf) and Bergman’s The Silence.

His latest film Delta contains the themes of forbidden love and the lack of tolerance, following the story of a man who returns to his home village after many years of absence and is drawn into an intense romantic relationship with his own sister. While watching it we feel a rhythm through which we can almost breathe in the elements of the film and get inside the characters’ psyche. On the various passionate reactions to his film the director calmly remarks, “The important thing is that every film’s end is created by the viewer.”

Kornél Mundruczó, jeune réalisateur hongrois à l’aube de sa carrière, a déjà attiré sur lui l’attention de nombreux critiques hongrois et internationaux grâce à l’un de ses courts

métrages Afta. Agé de 33 ans, il revient aujourd’hui sur le devant de la scène avec Delta, son quatrième long métrage, présenté en première mondiale en Compétition Officielle.

A l’université, il suit d’abord des cours d’art dramatique avant de se rendre compte qu’il ne pourra pas limiter sa vie aux seules planches de théâtre. Son diplôme en poche, il démarre ainsi un cursus en réalisation. Une décision résultant à la fois d’une mûre réflexion et d’une envie quasi inconsciente. Bien sûr, le théâtre ayant été pour lui une expérience marquante, il demeure une influence importante dans la suite de son œuvre. Se servir des méthodes utilisées dans ses travaux expérimentaux, va notamment lui permettre de tourner le dos au règne obsolète de la mise en scène traditionnelle.

La vision déformée que les gens ont de lui l’amuse – une vision forgée d’après d’étranges légendes. Tel jour, il aurait jeté l’un de ses acteurs dans l’eau froide du Danube. Telle nuit, les voilà forcés de dormir avec une hache à leur côté. A contre-courant de l’opinion publique, les ‘films à la Mundruczó’ sont souvent jugés comme brutal ; ce qui surprend notre homme. Il n’a peut-être pas tort sur ce point car bien que son esthétique semble à première vue réaliste et dure – ceci, particulièrement dans ses premiers films This I Wish and Nothing More et Pleasant Days (qui s’est vu décerné entre autres le Léopard d’argent à Locarno) – en y regardant de plus près, la beauté de son univers se dévoile à nous.

Courageux, osé et original, son court métrage Joan of Arc on the Night fut sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs en 2003. Ce film donna plus tard naissance au long métrage Johanna, présenté lui à Un Certain Regard en 2005.

« J’ai pensé que je devais diriger un opéra et voir comment explorer les liens entre opéra et cinéma. C’est un genre que j’admire et je suis persuadé que je viendrai à retravailler avec dans le futur. C’est bon pour l’âme », dit-il. Contrairement aux idées reçues, le film a montré à quel point l’opéra peut susciter la curiosité. Ce ne fut pas là la seule participation de Mundruczó au festival de Cannes. En 2003, il bénéficie en effet de la bourse de développement de l’Atelier Cinéfondation, et l’année suivante son court métrage Apocrypha No. 2 est sélectionné dans cette même section. 2003 fut aussi l’année où il reçut le prix culturel Hongrois Balázs Béla. Autre point intéressant de sa carrière : sa contribution au film collectif Lost and Found, aux côtés d’autres réalisateurs d’Europe de l’Est, tels Stefan Arsenijvic, Cristian Mingiu et Jasmila Zbanic. Ce projet est basé sur l’idée qu’appartenir à une même génération permet aux hommes de tisser entre eux des liens, au-delà des frontières nationales, leur offrant de nouvelles vues sur l’histoire mais aussi sur leurs traditions ou expériences personnelles.

A ses yeux, ses « objectifs esthétiques sont de faire vivre à l’écran des émotions réelles et non pas de laisser la dramaturgie prendre le dessus, de créer un cinéma où les acteurs vivent des choses à l’intérieur d’eux-mêmes. Un cinéma vrai, authentique ». Dans les films de Mundruczó, l’humanité des acteurs est perceptible. Cependant, son univers penche plutôt du côté des fictions poétiques que réalistes. Il privilégie ainsi les films qui peuvent changer notre attitude face au monde, qui ont le pouvoir de nous faire penser et vivre plus intensément, des films qui atteignent le plus profond de l’âme, Pour lui, deux bons exemples seraient Fear Eats the Soul (Angst essen Seele auf) de Fassbinder et Le Silence de Bergman.

Son dernier film, Delta, traite d’amour interdit et de manque de tolérance. Après plusieurs années d’absence, un homme revient dans son village natal et se découvre une sœur. Une intense relation romantique nait entre eux. En voyant le film, un rythme particulier, un sentiment de proximité, s’infiltrent chez le spectateur, capable alors de s’immiscer dans la psyché des personnages. Interrogé sur les nombreuses réactions passionnées suscitées par Delta, Kornél répond avec calme, préférant mettre en avant le pouvoir créateur du spectateur à donner aux films leur sens final.

Luca Döme

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1 livre, 1 film

Johnny Mad Dog

Un jeune garçon vêtu d’une robe de mariée blanche transporte une mitraillette. Son camarade soldat, encore plus jeune, entonne une complainte militaire près du cadavre d’un enfant du même âge,

une paire d’ailes sales attachée au dos. L’incongruité de la scène se veut métaphore de la banalité des guerres et des motivations puériles de ceux qui les mènent. C’est aussi ici l’image d’un monde à l’innocence sacrifiée.

Johnny Mad Dog est l’adaptation d’un roman du même nom écrit par l’auteur d’origine congolaise Emmanuel Dongala. Le récit décrit l’his-toire de Laokolé et de Johnny, deux adolescents grandissant dans un pays

d’Afrique sans nom, déchiré par la guerre. Agés de seize ans, chacun a compris l’absurdité de la guerre ; la différence étant que Johnny fait par-tie du camp des gagnants, une armée de rebels célébrant leur coup par une série de pillages, meurtres et viols. Laokolé lui, fuit pour sauver sa peau.

Dans le livre, les deux garçons se trouvent dans des situations analogues (si ce n’est identiques). A travers elles, Dongala exposent les multiples facettes de la guerre : les manipulations, les destructions, les violences, physiques et psy-chologiques. Malgré la facture brute et dynami-que de la narration, l’utilisation de la première personne lui confère une dose d’humour (le portrait de Johnny Mad Dog) et même d’ironie (notamment lorsqu’il est question de l’implica-tion de l’Ouest).

Dans le film, les analogies tissées entre les personnages sont extrêmement simplifiées et les contrastes intellectuels, émotionnels et idéologiques les distinguant, perdent de leur force. Les images ne viennent malheureusement pas porter cet aspect là. A l’écran, la luxuriance exotique des lieux, riches en couleurs et textures, est mise en opposition avec la brutalité du contexte guerrier grâce à l’utilisation d’une caméra à l’épaule et d’un montage rapide. Regrettons qu’au cours de l’adaptation, l’œuvre filmique se soit délestée d’une part de la force émotionnelle et critique du roman.

Mario Kozina

Into the festivalEuropean network of young cinema

N I S I M A S A CARTE BLANCHE IIIIII NISI MASA IIIIIIIIIIIIIIIAT CANNES IIIIIIIIIIIIIIScreening of European Short Films

47th Critics’ WeekCannes Film FestivalWednesday 21st of May 2008 at 15.00Espace Miramar – 35, rue Pasteur

More information II 33 (0)6 06 89 94 02 02 II [email protected] II www.nisimasa.com

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Reportage Mémoire et espoir: guerres au Liban

Le Liban a subit de longues périodes de conflit durant ces dernières décennies.

Cette année à Cannes deux films parlent de ces guerres mais pas seulement. Ils abordent la question de la mémoire et de l’espoir à travers l’expérience humaine. Waltz with Bashir, un film d’animation entre le documentaire et l’auto-fiction, réalisé par Ari Folman et, Je Veux Voir, un autre documentaire de Joana Hadjithomas et Khalil Joreighe, nous offre deux visions du conflit vécu dans la même région mais à des périodes différentes.

Dans Waltz with Bashir, Folman est hanté par une perte de mémoire qui remonte à 1982, pendant les massacres au sud Liban. La connaissance d’un ancien soldat israélien, le vécu d’un moment difficile en temps de guerre : ces souvenirs lui sont étrangers. Il commence alors à explorer son propre passé à travers une série d’interviews, qui dessine petit à petit le portait d’Ari et les expériences de ses amis. Waltz with Bashir, qui utilise l’animation traditionnelle comme outil narratif, est profondément provoquant - un voyage émouvant au cœur de la mémoire. Je Veux Voir évoque un voyage à travers les ruines de Beyrouth après les lourds bombardements sur la ville en 2006. La

réalisatrice libanaise Joana Hadjithomas et Khalil Joreige a travaillé avec Catherine Deneuve, qui a souhaité visiter le Liban pour voir l’après-conflit. Dans le film, Deneuve rencontre à Beyrouth un autre réalisateur libanais, Rabih Mroué. Leur périple, à travers l’exploration des souvenirs de l’histoire récente de la région, se transforme alors en procès. Filmé comme un reportage, montrant l’équipe même du film et des bâtiments détruits, Je Veux Voir implique le spectateur de telle sorte qu’il a l’impression de visionner les

rushes de son propre passé.

Un réalisateur retrouvant son histoire personnelle grâce à ses anciens camarades dans Waltz with Bashir contraste avec la visite réaliste de la région où le réalisateur a subit la guerre, dans Je Veux Voir. Les anciens camarades comble les trous de mémoire du protagoniste à travers les souvenirs des autres, tandis que le second explore un lieu « vide » que seul la mémoire individuelle peut remplir – Les rues d’enfance de Rabih n’existent plus. Si la destruction de la guerre a érodé les paysages psychologiques des individus et leur environnement matériel, tôt ou tard le passé remontera à la surface.

Il est certain que le monteur français Tristan Meunier - à qui on attribua le surnom de « serial cutter » lorsqu’il a suggéré de couper la première

scène d’un court métrage sur lequel il travaillait – est pour le moins passionné par son travail.

Il a collaboré avec Eric Rohmer et les frères Dardenne et a monté un nombre incalculable d’autres longs métrages. Après six ans dans les affaires, il comprend pourquoi tant de confrères veulent arrêter. Tous les mois, chaque projet de film est sujet à une nouvelle négociation. « Le montage revient à jouer au ping pong », affirme t-il. « C’est un échange d’idées. Tu renvoies la balle que le réalisateur te lance…J’estime avoir fai mon travail quand le réalisateur dit qu’il a le film qu’il voulait».

On peut imaginer Tristan comme un personnage de contes de fées, qui survient durant la nuit pour raccommoder les chaussures que le cordonnier a besoin de réparer. Il raconte comment dans le montage il est nécessaire d’être à la fois un fin psychologue, diplomate et bon partenaire : « Il y a trois personnes dans la salle de montage – le monteur et le réalisateur, et le film: le bébé du réalisateur ». Comme beaucoup de jeunes monteurs, Tristan a lu Walter Murch (monteur du film Apocalypse Now) afin de saisir les tenants et les aboutissements du travail de monteur aujourd’hui. Cependant, il a sa propre idée sur la question; essentiel lorsque l’on s’enferme dans une pièce sombre afin de faire émerger des histoires.

Atso Pärnänen

Esra Demirkiran & Helena Mielonen

?? ? ??Interview-Ils sont générique... Tristan Meunier

Waltz with Bashir

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Mémoire et espoir: guerres au LibanWork in progress

Réalisé un film sur Andreotti revient à filmer un symbole : peu importe si le personnage principal est toujours vivant. Si cela peut paraître un peu

étrange pour une biographie filmée, mais d’une certaine manière cela convient parfaitement au personnage.

L’un des exemples d’une biographie à l’Italienne (même si ce n’est pas le premier) date de 1974 : l’année où Roberto Rossellini réalisa l’un de ses films les plus controversés, L’an Un. C’est l’histoire d’Alcide De Gasperi, fondateur du parti de la Démocratie Chrétienne après la Seconde Guerre Mondiale. La saga biographique et politique continue avec un autre leader, Aldo Moro (affilié au parti de la Démocratie Chrétienne, comme De Gasperi et Andreotti), avec les films L’Affaire Moro et Good Morning, Night. Le film de Nanni Moretti dédié à Silvio Berlusconi, Le Caïman, termine cette saga.

Ces personnages politiques incarnent l’Histoire. Ils deviennent des symboles – représentation de leur époque et de leur pays. Celle de De Gasperi que Rosellini a filmé évoque le soulèvement d’une nation. Plus qu’un portait de la sanctification d’un politique, il s’agit de la représentation d’un pays défaitiste – ce pays qui apprend à trouver la dignité et l’énergie de se sortir de la crise.

Parallèlement, ces deux films sur Aldo Moro ne décrivent pas vraiment l’homme ni son parcours en tant que politicien, mais prennent en compte les différents évènements de sa vie (son enlèvement par un groupe de révolutionnaires à la fin des années 70 par exemple) comme un prétexte pour décrire ce moment particulier de l’histoire de la République. L’Affaire Moro (Giuseppe Ferrara) est une reconstitution précise de son enlèvement et de sa mort. Good Morning, Night (Marco Bellocchio) tente d’expliquer le sens profond de ce qui arriva, présentant l’échec d’une idéologie. Dans les deux cas, l’histoire personnelle d’Aldo Moro est mise de côté. Ce qu’il a fait, ses actions politiques, tout cela semble moins significatif que ce qui lui arrive. Sa mort tragique lui donne une nouvelle importance, si conséquente que cela lui hôte sa part d’humain. Peut-être est-ce la vrai destinée de certains des ces hommes politiques. Ils deviennent un symbole et perdent leur humanité.

Le Caïman est la représentation parfaite de cette idée. Ce n’est pas un film sur Berlusconi mais sur la représentation de cet homme - plusieurs visages lui sont attribués à la fois vrais et faux. Quand l’Italie devient un pays “berlusconien”, la figure politique, l’homme devient difficile à décrire d’une seule et unique manière. De la sorte, quelle symbolique de Giulio Andreotti émanera de Il Divo? Dans

Le charme ambigu

Simone Fenoil

le film de Rossellini sur De Gasperi, la controverse est née des différentes interprétations des faits historiques qu’il propose. Concernant Andreotti au contraire, les faits historiques sont dès le départ incertains, éphémères…

Il a été nommé Premier Ministre sept fois (son dernier mandat s’est achevé en 1992) et a fait partie de presque tous les gouvernements de ses quarante premières années de la République dont en 1948, l’année où il co-écrit la constitution italienne. Sénateur à vie depuis 1991, il a failli devenir Président de la République mais l’assassinat de Falcone et les premières rumeurs sur ses supposés liens avec la Mafia l’oblige à abandonner son rêve.

Sur ce point de nombreux aspects sont ambigus et obscurs : il fut mis en examen pour le meurtre d’un journaliste (condamné puis déclaré innocent), d’association de malfaiteurs (jugé coupable mais non condamné car les faits étaient trop anciens). Par ailleurs, il a été suspecté de contacts suspects avec le plan du « groupe Borghese » (un coup d’état raté) dans les années soixante-dix.

Si le cinéma a toujours été le miroir de la société, il est très intéressant de voir le reflet de l’Italie contemporaine, qui semble avoir un besoin particulier de créer des héros, tout en étant profondément charmé par les aspects les plus ambigus des hommes de pouvoir.

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Coin du court

Rose bonbon des lèvres au scooter, la jeune amélie-poulanesque Virginie (Jeanne Cherhal) est la note acidulée du magasin de reprographie de son

patron, le bien nommé mais taciturne M. Conforme (Serge Riaboukine).

Cet univers grisâtre devient, le temps d’un instant, celui du souvenir d’un amour évanoui : une femme dont la seule trace restante est une vieille photographie.

Oscillant entre la comédie musicale et le drame, Nicolas Engel habille son deuxième court-métrage d’un florilège de références assumées. On pense notamment à L’Amour en fuite de Truffaut, au penchant naturaliste de Jacques Demy, ou aux aspects ludiques de Rivette.

Toutefois, ces belles promesses sont un brin décevantes. On regrette le manque de cohérence esthétique et narrative, qui donne parfois l’impression d’assister à une juxtaposition de saynètes dissonantes.

L’intrigue n’atteint jamais l’intensité dramatique escomptée (pourtant fortement soulignée par la direction artistique – mise en scène et bande son), et se perd malheureusement en afféteries.

Notons cependant l’exploitation poétique du cadre urbain (Angoulême ‘popartisée’...) et les notes de fraîcheur atténuant le sentiment de confusion émanant du film.

De Nicolas Engel (France)La copie de Coralie

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Photo du jour Delphine Pinatel Ormsby

Attention à ce que vous demandez.

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Christophe Rossignon, producteur

francais, porte un regard très pragmatique sur sa profession. Le cinéma, c’est du commerce avant tout. Un producteur met à disposition l’infrastructure de sa société et rassemble les forces collectives nécessaires à la réalisation d’un film. Au delà de

l’aspet financier, il doit aussi prendre en compte l’individualité de chaque artiste avec qui il travaille. Mais plus une société grandit, plus les responsabilités et les productions à gérer augmentent, ce qui l’empêchera malheureusement de soutenir les jeunes talents et leurs premiers films. Néanmoins, l’approche

personnelle de Christophe Rossignon est d’agir avec l’esprit d’un créatif, car il veut voir naître des histoires racontant la richesse de la vie, sans juger, sans se répéter. Quand on lui demande de donner conseil à des jeunes réalisateurs, il leur répond de suivre simplement leur propre chemin.

Zsuzsanna Kıràly

Rencontre professionelle

Trois questions à

Première fois à Cannes ?Je suis venue l’année dernière, mais seulement pour un jour. Comme je

n’avais pas d’endroit où loger, j’ai dormi sur la plage. Je n’avais pas d’accréditation, alors pour pouvoir voir Ocean’s 13, je suis passée par le parking situé derrière l’entrée principale. Incroyable mais vrai, personne à l’horizon !

Très dans l’esprit du film donc… Cette année, il y a des films en particulier que tu veux absolument voir? Comme j’aime beaucoup les films de Kusturica, j’ai hâte de voir son documentaire sur Maradona. Le problème c’est que je n’aime pas le football ; voyons donc si le film parviendra à me faire surmonter mon manque d’intérêt pour son sujet.

Selon toi, es-tu une “cinéphile”? A l’origine, ce mot était fortement lié à l’iespoir de changer le monde à travers le cinéma. Tu crois que c’est toujours d’actualité aujourd’hui ? Je peux me considérer en effet comme une cinéphile: vu que je travaille pour un cinéma, je peux visionner tous les films qui me font envie. A propos de changer le monde via le cinéma… Cannes est un bon exemple, rassemblant des gens venus du monde entier, pour leur donner la chance d’exprimer et de partager ce par quoi ils ont été touchés dans un film.

Tania Laniel

Même si Tania, 19 ans, étudiante en cinéma à Rennes, vient de décider de mettre de côté son rêve d’être actrice, elle à déjà un pied dans le monde du cinoche. Elle peut même vous apprendre comment déjouer les contrôles pour entrer dans le palais…

Christophe Rossignon

© Photo by Johanna Kinnari

Je veux voir Joana Hadjithomas & Khalil Joreige (Liban~France)

Si la mère Deneuve veut voir les dégâts du sud Liban,

très bien. Mais pourquoi nous imposer ce road movie prétentieux entre docu et fiction qui à tous les coups sonne faux ? Tous les protagonistes ne semblent pas très bien savoir quoi faire et versent inévitablement dans le ridicule. Le tout est alourdi par des travellings répétitifs flingués par les commentaires édifiants de Catherine Deneuve adressés à l’acteur-chauffeur libanais,

style: « Ah, chez vous au moins on peut encore fumer partout ! », « Vous n’avez pas mis votre ceinture ! », ou « Quand allez-vous redevenir un peu disciplinés dans votre pays ? ». Si c’est pour tenir de tels propos parigo-réacs nauséabonds mieux vaut faire de la télé (ou rien du tout) et laisser au cinéma des films comme Waltz with Bachir.

Julien Melebeck

petites & grandes

arnaques

Par Sebastiano Pucciarelli

(Producteur)

Page 11: Nisimazine Cannes 2008#3-Fr

À Cannes RivieraStand WBI - A2T +33 (0) 4 92 99 88 11

Le Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel

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T +32 (0)2 413 22 19

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