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SUJET NATIONAL POUR L’ENSEMBLE DES CENTRES DE GESTION ORGANISATEURS CONCOURS EXTERNE D’INGENIEUR TERRITORIAL SESSION 2011 SPECIALITE : URBANISME, AMENAGEMENT ET PAYSAGES Epreuve Rédaction, à partir de l'analyse d'un dossier remis au candidat et portant sur la spécialité, d'une note tenant compte du contexte technique, économique ou juridique lié à ce dossier. Durée : 5 heures Coefficient : 5 ERRATUM Les intitulés des documents du sujet initialement fourni comportent quelques erreurs. Vous trouverez ci-dessous la liste avec les intitulés des documents corrigés. Document 1 : « Quelques impressions sur une machine à penser » - Revue urbanisme, Michel Lussault – Septembre / Octobre 2009 – 4 pages Document 2 : « Une vision de la ville durable à très grande échelle» - Revue urbanisme, Ariella Masboungi – Septembre / Octobre 2009 – 4 pages Document 3 : « Vue du Grand Lyon : la grandeur, question de gouvernance » - Revue urbanisme, Gilles Rabin - Septembre / Octobre 2009 – 1 page

Note urbanisme externe - cdg69- Centre de Gestion du Rhône · sujet national pour l’ensemble des centres de gestion organisateurs concours externe d’ingenieur territorial session

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SUJET NATIONAL POUR L’ENSEMBLE DES CENTRES DE GESTION ORGANISATEURS

CONCOURS EXTERNE D’INGENIEUR TERRITORIAL

SESSION 2011

SPECIALITE : URBANISME, AMENAGEMENT ET PAYSAGES

Epreuve

Rédaction, à partir de l'analyse d'un dossier remis au candidat et portant sur la spécialité, d'une note tenant compte du contexte technique, économique ou

juridique lié à ce dossier.

Durée : 5 heures Coefficient : 5

ERRATUM Les intitulés des documents du sujet initialement fourni comportent quelques erreurs. Vous trouverez ci-dessous la liste avec les intitulés des documents

corrigés.

Document 1 : « Quelques impressions sur une machine à penser » - Revue

urbanisme, Michel Lussault – Septembre / Octobre 2009 – 4 pages

Document 2 : « Une vision de la ville durable à très grande échelle» - Revue

urbanisme, Ariella Masboungi – Septembre / Octobre 2009 – 4 pages

Document 3 : « Vue du Grand Lyon : la grandeur, question de gouvernance » -

Revue urbanisme, Gilles Rabin - Septembre / Octobre 2009 – 1 page

Document 4 : « Vu du Havre : Grand Paris compatible » - Revue urbanisme, Anne-Michèle Donnet - Septembre / Octobre 2009 – 1 page

Document 5 : « Le Grand Berlin, le Grand Londres, le Grand Tokyo, le Grand New York » - Revue urbanisme - Septembre / Octobre 2009 – 5 pages

Document 6 : « L’Ile de France, contrastes d’une métropole mondiale » - Rubrique Comprendre - Les cahiers de l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile de France - numéro 151 – juin 2009 - 5 pages

Document 7 : « Métropole globale : coopération ou concurrence » - Rubrique

Comprendre - Les cahiers de l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile de France - numéro 151 – juin 2009 – 4 pages

Document 8 : « L’urbain métropolisé est en voie de généralisation » - Site

Internet Constructif.fr - Juin 2010 – 3 pages Document 9 : « La gouvernance, un défi pour les métropoles mondiales » -

Site Internet Constructif. fr - Juin 2010 – 3 pages Document 10 : « Quel avenir pour les métropoles » - Site Internet Constructif. fr

- Juin 2010 – 3 pages Document 11 : « Associer les métropoles » - Site Internet Constructif. fr - Juin

2010 – 3 pages

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Document 1 :

« QUELLES IMPRESSIONS SUR UNE MACHINE A PENSER » Revue urbanisme, Michel Lussault – Septembre / octobre 2009

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Le Grand Pari(s)

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Document 2 :

« UNE VISION DE LA VILLE DURABLE A TRES GRANDE ECHELLE» Revue urbanisme, Ariella Masboungi – Septembre / Octobre 2009

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Ceinture verte de l’avenir proposée

Surface bâtie

PROPOSITION : CEINTURE VERTE RECOUVRANT TOUTE L’ÎLE DE FRANCE Afin de ménager une réserve de durabilité à long terme, il convient sans doute de préserver et protéger tous les espaces ouverts de la Région. Cela limitera les développements dans toute la région : chaque nouveau développement devra être contenu dans l’empreinte du bâti existant, soit sous forme de reconstruction, soit avec l’introduction de densités plus fortes. Cette proposition mérite considération sur le long terme.

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COPENHAGUE 500 000

SALZBOURG 520 000

EDIMBOURG 460 000

DUBLIN 505 000

FRANCFORT 670 000

DRESDE 508 000

LIVERPOOL 440 000

STUTTGART 590 000

HELSINKI 565 000

PARIS 2 150 000

OSLO 550 000

ROTTERDAM 580 000

ANVERS 472 000

LYON 467 000

GENES 615 000

SEVILLE 647 000

MALAGA 538 000

FLORENCE 466 000

BOLOGNE 373 000

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Document 3 :

« VUE DU GRAND LYON : LA GRANDEUR, QUESTION DE GOUVERNANCE » Revue urbanisme, Gilles Rabin - Septembre / Octobre 2009

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Document 4 :

« VU DU HAVRE GRAND PARIS COMPATIBLE » Revue urbanisme, Anne-Michèle Donnet – Septembre / Octobre 2009

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Document 5 :

« LE GRAND BERLIN, LE GRAND LONDRES, LE GRAND TOKYO, LE GRAND NEW YORK »

Revue urbanisme – Septembre / Octobre 2009

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Document 6 :

« L’ILE DE FRANCE CONTRASTE D’UNE METROPOLE MONDIALE » Comprendre les cahiers numéro 151

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Document 7 :

« METROPOLE GLOBALE : LA COOPERATION CONCURRENCE » Comprendre les cahiers numéro 151

Ville Région London Grand sud est New york Région des 3-Etats Tokyo Grand Tokyo Paris Ile de France Hong Kong Grand Delata Rivière des

Perles Singapour - Frankfort Région Rhin-Main Chicago « Chicagoland » Miami Floride du sud Madrid Communidad de Madrid Toranto Région du Grand Toranto Johannesburg Gauteng Province Los Angeles Région du Grand Los

Angeles Dubai - Moscou Moscou Oblast Istanbul Province d’Istambul Beijing Beijing-Tianjin-Hebei Shanghai Yangtze River Delta Sao Paulo Région métropolitaine de

Sao Paulo Mumbai Région métropolitaine de

Mumbai

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Londres

New York

Paris

Moscou

Madrid

Francfort

Los Angeles

Chicago

Miami

Toronto

Dubaï

Istanbul

Shanghai

Pékin

Singapour

Hong Kong

Tokyo

Bombay

Johannesburg

Sao Paulo L

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Document 8 :

« L’URBAIN METROPOLITE EST EN VOIE DE GENERALISATION » Site Internet Constructif.fr - Juin 2010

Auteur Michel LUSSAULT

Plus de la moitié de la population du globe vit dans des ensembles urbains. Ainsi, les espaces urbanisés deviennent tout à la fois l'habitat du plus grand nombre d'humains et constituent - parce que l'urbanisation ne va pas se démentir- la sphère sociale et politique au sein de laquelle il nous faudra, de plus en plus, apprendre à saisir les évolutions et à réguler les problèmes.

La croissance de la population urbaine va continuer et sa géographie va évoluer. En effet, le phénomène sera de plus en plus marquant en Asie et en Afrique, là où existent encore des « réservoirs » de population rurale et agricole et où les excédents naturels urbains sont importants. Pour ces deux continents, on escompte un doublement de la population urbaine entre 2000 et 2030. À cette date, plus de 80 % des 5 milliards d'urbains attendus vivront en Afrique, en Asie, en Amérique latine et du Sud. Notons que, contrairement à une idée reçue, la croissance urbaine actuelle est et restera plus rapide, partout au monde, au sein des aires urbaines moyennes (500 000 à 1 million d'habitants) et petites (moins de 500 000 habitants) qu'au sein des « mégapoles » (plus de 10 millions de résidents). Celles-ci ne représentent en effet que 9 % de la population urbaine mondiale, alors que les moyennes et petites unités en accueillent 52 %, proportion qui va croître.

Définir la métropole

Pourtant, en France notamment, l'attention est souvent focalisée sur les villes les plus importantes, celles que l'on nomme les métropoles. Dans l'acception courante, la métropole est une organisation urbaine de grande taille et aux fonctions supérieures. La métropolisation, quant à elle, désigne le processus qui explique la concentration dans des métropoles. On établit ici un lien entre taille, fonctions métropolitaines, économie spécifique, rayonnement et polarisation de l'espace. La métropole s'impose alors comme un pôle d'agrégation et d’interaction spatiale des hommes et d'activités qui affirme son rayonnement sur un territoire élargi - avec une internationalisation de l'influence qui serait l'apanage des vrais ensembles métropolitains. De très nombreux travaux abordent la question des seuils (sans qu'il y ait le moindre consensus, même si la barre du million d'habitants est souvent utilisée pour séparer les métropoles des villes plus petites et celle des 10 millions pour séparer les métropoles des mégapoles), ainsi que celle, liée, des fonctions métropolitaines.

En la matière, la plupart des auteurs se retrouvent pour donner la primauté au développement d'activités qui seraient réellement « métropolisantes » : les sièges sociaux, la finance, les services aux entreprises, l'enseignement supérieur et la recherche, mais aussi la culture et le tourisme. On insiste également sur le rôle du grand projet urbain et architectural, sur la recherche par les pouvoirs locaux de signatures prestigieuses - le prototype pouvant être trouvé dans l'opération qui lie indissociablement Bilbao, Guggenheim et Frank Gehry. On insiste enfin, de plus en plus, sur le rôle de certains groupes sociaux, ceux que Richard Florida dépeint, en une mythologie puissante qui séduit au-delà du raisonnable et qui s'est imposée désormais comme une marque, sous les traits des « classes créatives », qui seraient les acteurs de la sélection des villes qui comptent. À l'inverse, certains analystes insistent plus sur la montée en puissance des clivages sociaux et de la fragmentation sociale et spatiale inhérents à une métropolisation conçue alors comme un processus critique d'adaptation urbaine aux lois d'airain de l'économie mondialisée. Manière de dire que le débat au sujet de la métropole est souvent l'occasion de prendre position quant à l'évolution des sociétés au sein du système mondial.

Même si de nombreuses études, expertises et comparaisons de toutes sortes tentent de classer les différentes « métropoles » avérées ou les villes qui entendent accéder à ce « genre urbain », la notion de métropole me semble en vérité à la fois très utilisée et assez peu fixée et précise. À tel point que l'on pourrait considérer que le mot et la chose renvoient plus au sens commun qu'au domaine scientifique. Cela est renforcé par l'usage du vocabulaire de la métropole et de la métropolisation par les acteurs politiques français. En effet, il n'est pas de maire d'une commune urbaine française d'une certaine taille qui ne souhaite aujourd'hui propulser sa ville dans le « club » des métropoles. La métropolisation est alors le nom utilisé pour définir une stratégie politique spécifique d'affirmation du dynamisme et du rayonnement d'une aire urbaine.

Métropolisation et urbanisation

Du coup, il n'est pas impossible de se demander si l'on ne devrait pas changer la manière de considérer la question. Osons dès lors un double postulat : la métropolisation est une évolution intrinsèque de l'urbanisation mondiale actuelle, qui touche toutes les organisations urbaines ; il existe des logiques générales qui marquent l'apparition d'une urbanisation intrinsèquement métropolisatrice. On peut alors avancer que tout ensemble urbain se métropolise, mais que la mise en

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système de l'ensemble des processus ne se constate qu'au sein des organisations assez vastes pour former une fraction de société complète par rapport à la société de référence. Une telle proposition relativise l'idée de l'existence d'un seuil, puisqu'il y aurait autant de seuils que de situations sociétales nationales : 2 millions d'habitants, cela peut être inframétropolitain en Inde ou en Chine, et très franchement métropolitain en Allemagne.

La métropolisation serait ainsi l'expression la plus spectaculaire de l'urbanisation contemporaine - une « prégnance » qui reconfigure en profondeur les sociétés, les espaces et les modes de vie. Apparaîtrait aujourd'hui, telle une basse continue de l'évolution de l'habitation humaine de la planète, ce que je nommerai l'urbain métropolisé, un type générique dont on peut constater la progression partout dans le monde, dans des villes de toute taille.

L'urbain métropolisé est d'abord marqué par l'illimitation. Le temps des espaces finis est terminé - ce temps paisible où les campagnes et les villes se distinguaient nettement. L'urbanisation a composé des espaces en écume, ou en rhizomes, si l'on préfère. Les « mille plateaux » dont Deleuze et Guattari avaient eu l'intuition sont ceux des organisations urbaines, des systèmes territoriaux, plates-formes aux multiples ramifications, liés en permanence à tous les autres, en même temps que les liens entre chaque composant de chaque système et entre chaque composant d'un système et chaque composant d'un autre système sont aussi maximisés. C'est cela, l'illimitation métropolisée et métropolisatrice : non pas tant un marqueur physique qu'un symptôme de la montée en puissance du principe de la connexion généralisée entre toutes les réalités urbaines.

Une connexion généralisée

Cette prégnance de la connectivité, je l'appelle hyperspatialisation. Ce mot dénote à la fois l'accumulation, la surabondance mais aussi, et surtout, la systématisation de la connexion généralisée (tous les espaces sont liés à tous les espaces, comme on passe d'un site Internet à un autre par un hyperlien). On peut analyser en ces termes le développement effréné de la télécommunication interindividuelle, grâce à des instruments de plus en plus performants. L'hyperspatialisation est donc cette capacité de plus en plus universelle (tout acteur se connecte en tout instant et en tout lieu) qui caractérise l'urbain métropolisé.

L'illimitation est permise par la mobilisation, c'est-à-dire la systématisation de la mobilité des humains, des matières, des idées, des données et des informations comme principe de base de l'urbain métropolisé (en même temps que comme valeur sociale, politique, culturelle même). Une telle mobilisation systématique, qui s'est accompagnée d'une accélération (des échanges et des temps sociaux, marqués les uns et les autres par le nouveau primat de l'urgence), a subverti, on le sait, les cadres des systèmes productifs. La métropolisation est fondée sur la capacité des entreprises à jouer sur des différentiels de localisations relatives et à concentrer des centres décisionnels et de services découplés des unités productives. Elle est aussi fondée sur la circulation incessante des individus, des biens matériels et immatériels.

Cette mobilité accélérée n'atteindrait pas cette importance si elle ne s'accompagnait de la numérisation des sociétés. L'urbain est désormais numérique autant que matériel. Le développement de la sphère immatérielle, qui n'en est qu'à ses débuts, cette prolifération des données et des informations circulant sans cesse, « en temps réel », dans des réseaux dont l'architecture n'a pas grand-chose à voir avec les réseaux techniques matériels, est sans doute l'événement du siècle. D'ores et déjà, aucun fonctionnement urbain n'est envisageable sans le support et le secours du numérique.

Le standard de la séparation spatiale

On pourrait s'attendre à ce que l'espace de ce monde mobile et illimité soit ouvert, lisse, sans entraves, alors qu'il est marqué aussi par le succès planétaire du principe séparatif. La séparation spatiale des réalités sociales s'avère désormais un standard mondial et toutes les grandes activités connaissent une répartition en zones spécialisées où la multifonctionnalité est faible. Et au zoning fonctionnel s'ajoute la ségrégation, qui renvoie aux problèmes de répartition spatiale des groupes sociaux et des individus.

Un tel standard ne résulte pas uniquement de l'absence de volonté des pouvoirs publics de réguler véritablement l'organisation urbaine. Bien sûr, les opérateurs privés jouent un rôle majeur dans l'urbanisation et privilégient la mise en place d'îlots fonctionnels (d'habitat, de commerce, de loisirs...) qui cadrent le mieux avec leur logique économique et technique. Mais les autorités publiques, lorsqu'elles agissent, promeuvent aussi, le plus souvent, un aménagement en cellules fonctionnelles. Ainsi, la tendance forte à la privatisation des espaces n'est pas le seul carburant auquel s'alimente le principe séparatif.

Si le numérique s'annonce comme le phénomène marquant des prochaines décennies, l'individualisation fut celui des précédentes et restera une dimension fondamentale des sociétés urbaines. Il existe une histoire triple : celle de la constitution du soi moderne, du processus d'individuation et de subjectivation (instauration du sujet en tant que moi, doté d'une intimité),

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qui est parallèle et complémentaire de celle du mouvement d'individualisation (construction de l'individu en tant qu'élément de base du social et en tant que sujet de réflexivité) et de celle de l'actorialisation (promotion de l'individu en tant qu'acteur intentionnel, constructeur de son monde d'action). Ce triple mouvement est au cœur de l'urbanisation contemporaine. Accompagnant cette promotion de l'individu acteur, en même temps que procédant de la généralisation de la mobilité, la cosmopolitisation est un autre phénomène marquant. Il s'agit là de souligner que les organisations urbaines, de toute taille, sont marquées par la diversification de leur peuplement : les populations locales viennent désormais de partout, ou peu s'en faut - et l'on sait à quel point ce constat trouble les adeptes des identités de l'enracinement. Une telle ouverture, qui fait de chaque ensemble urbain un monde cosmopolite, n'est pas près de s'atténuer. On peut même penser que la chose va s'accentuer et qu'elle constitue un des indices les plus manifestes de la métropolisation généralisée.

La préoccupation environnementale

Autre processus, l'environnementalisation. Les années qui viennent de s'écouler ont provoqué une convergence des acteurs sociaux les plus variés autour de l'idée que la pensée et l'action urbaines entrent dans une nouvelle ère. On voit poindre les premiers impacts de la prise de conscience d'un impératif catégorique : agis en n'oubliant pas que chaque acte est facteur d'un état de nature urbaine, dont la qualité ou l'indignité pèsera sur l'habitabilité générale des lieux et des places. L'urbain métropolisé est alors à considérer comme une fabrique d'environnements, c'est-à-dire un système organisateur d'un état de nature spécifique, par insertion permanente des éléments biologiques et physiques dans l'arrangement spatial des réalités sociales. La chose n'est donc pas nouvelle, mais ce qui l'est, c'est la manière dont les acteurs sociaux se saisissent de l'objet environnemental pour construire leurs actions urbaines. Il n'y a pas aujourd'hui de pensée métropolitaine possible sans cette prise en compte environnementale et la vraie métropole s'invente sans doute dans une telle revendication et sa traduction en politiques et en stratégies ad hoc.

Puissance et vulnérabilité

L'organisation urbaine métropolisée accumule une puissance de plus en plus impressionnante - puissance à la fois démographique, technologique, économique, financière, politique et culturelle. Pourtant, il est frappant de constater que la vulnérabilité des systèmes urbains croît en juste proportion de cette puissance. Bien sûr, un optimiste insistera à raison sur le fait que peu de crises majeures adviennent. Chaque jour, des milliards d'êtres humains vivent leur vie urbaine, bon gré mal gré, sans drame, sans collapsus collectif notable. Mais un réaliste soulignera que, pour autant, les signes de fragilité de ces systèmes urbains sont manifestes à toutes les échelles et que les incidents systémiques sont peu maîtrisables aisément. Protéiforme, mobilitaire, technologique, économique, sociale, environnementale, la vulnérabilité se dresse en caractéristique majeure de l'urbain métropolisé.

Si la métropolisation est une caractéristique générale de l'évolution urbaine actuelle, seules des organisations capables de mettre en convergence les différentes dynamiques constituent des métropoles complètes. Cette mise en convergence doit être considérée comme le résultat des stratégies des acteurs sociaux, et notamment des acteurs institutionnels. Pour que la métropole existe, à mon sens, il faut qu'un récit métropolitain légitime soit construit et diffusé, qu'il structure la « sphère publique » locale autant qu'il s'exporte à d'autres échelles. Il faut en particulier que ce récit participe de la production de spécificité, c'est-à-dire parvienne à ce qu'une métropole donnée se distingue des autres métropoles et des autres villes, par la mise en scène singulière de ces attributs génériques qu'il est indispensable de posséder si l'on veut appartenir au club des métropoles internationales.

Une métropole serait donc une entité qui n'existe réellement que par les récits collectifs et les images qui la font exister comme telle, comme une « marque » urbaine aisément identifiable, quoique membre d'une même « famille ». Ce qui explique la volonté effrénée des acteurs métropolitains, partout, de construire des événements urbains spectaculaires, d'attirer des signatures architecturales et urbanistiques prestigieuses, de générer des développements économiques high-tech, d'organiser la réputation d'une ville autour d'emblèmes citadins, souvent utilisés par le tourisme. Tout cela fabrique de la métropole, cette ville comme toutes les autres mais qui peut, quant à elle, et c'est là sa différence, produire et médiatiser sa singularité.

1. Je ne peux, dans le cadre de cet article, définir précisément les caractéristiques de ce type générique, me contentant d'indiquer quelques grands processus qui y participent.

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Document 9 :

« LA GOUVERNANCE, UN DEFI POUR LES METROPOLES MONDIALES » Site Internet Constructif.fr - Publié en juin 2010

Auteur Christian LEFÈVRE

Londres, Madrid, New York, Tokyo peuvent-elles servir d'exemple pour l'Île-de-France ? Un tour d'horizon de leurs pratiques en ce qui concerne la place et le rôle de l'État, les relations entre les collectivités locales et les rapports qu'entretiennent les autorités publiques et les milieux économiques conduit à mettre en exergue les singularités de la gouvernance de la région capitale française.

La gouvernance des métropoles est aujourd'hui un sujet inscrit au programme politique de nombreux gouvernements et des collectivités locales, en grande partie parce que la qualité de cette gouvernance serait un atout dans la compétition que se livrent les grandes villes de la planète à l'heure de la mondialisation. Autrement dit, pour gagner cette compétition, les métropoles doivent être capables de mener des politiques publiques et une action collective à même de répondre aux défis auxquels elles sont confrontées et de proposer une trajectoire pour leur avenir. Dans ce contexte, la gouvernance renvoie à la capacité des acteurs métropolitains à travailler ensemble, à s'entendre sur les diagnostics, à codéfinir les réponses et à les mettre en oeuvre. Dans cet article, à travers la confrontation des situations de Londres, Madrid, New York et Tokyo, nous interrogeons donc la gouvernance de la seule métropole mondiale française : l'Île-de-France.

Un État toujours très présent

En règle générale, les États demeurent des acteurs essentiels de la gouvernance des grandes métropoles. Le poids démographique et surtout économique de ces vastes espaces urbains ne permet pas que les gouvernements centraux se désintéressent de leurs conditions et de leur devenir. Il en est de même de leur situation sociale qui, bien souvent, pèse lourdement sur celle du pays. Ajoutons à tout cela le fait que certaines d'entre elles sont aussi des capitales politiques, et l'on comprend bien les raisons qui font de ces grandes métropoles des territoires à enjeux pour les États.

Tout d'abord, la présence de l'État s'exprime par le contrôle qu'il garde sur un certain nombre de domaines jugés stratégiques. C'est le cas notamment des grandes infrastructures, comme les aéroports et les transports ainsi que les réseaux d'énergie. Y compris dans des pays où la décentralisation est forte, comme aux États-Unis ou en Espagne, l'État est aux commandes dans ces secteurs. Ainsi, à New York, les États fédérés de New York et du New Jersey contrôlent les autorités responsables des aéroports et des transports comme la Port Authority et la Metropolitan Transportation Authority. À Madrid, la politique relative aux aéroports, aux autoroutes et à la grande vitesse ferroviaire - infrastructures clés pour le développement des grandes villes du monde - reste du ressort de l'État, et ce, malgré un quasi-fédéralisme de niveau régional.

Cette situation est, bien entendu, encore plus vraie dans les pays de tradition centralisatrice comme la France, le Japon ou le Royaume-Uni. À Londres, les grands aéroports sont restés dans le giron de l'État. Si les transports publics ont été confiés à l'autorité du Grand Londres (GLA), les grandes décisions appartiennent toujours au gouvernement central, comme la construction de Crossrail, cette grande infrastructure d'interconnexion est-ouest. À Tokyo, la politique aéroportuaire est définie par l'État et c'est lui qui a arbitré les conflits sur le nouvel aéroport international entre Haneda et Narita. Mais, surtout, l'État est présent grâce au plan de développement de la région capitale, document qui fixe les principales orientations stratégiques d'aménagement pour le Grand Tokyo.

En second lieu, les États interviennent par le biais de structures déconcentrées ou d'agences nationales dans les secteurs les plus divers. À Londres, il existe une « minipréfecture », le Government Office for London (GOL), qui non seulement porte la voix de l'État, mais aussi participe au contrôle de l'action des collectivités locales. L'État britannique est également très présent par sa participation à de nombreuses structures de développement locales comme les development corporations. À New York, les États fédérés ont créé des public benefit corporations pour intervenir directement sur la ville. La plus importante est l'Empire State Development Corporation qui, avec l'aide de plusieurs dizaines de filiales, s'occupe de la rénovation urbaine, de la construction de logements et du développement de plusieurs secteurs de la ville comme le World Trade Center ou Times Square.

Enfin, les États sont omniprésents par leur puissance financière et par les cadres légaux et juridiques qu'ils imposent, avec plus ou moins de concertation, aux villes. À Londres, l'essentiel des ressources de l'autorité métropolitaine provient du gouvernement central et l'aide de l'État s'accompagne de critères et de normes contraignantes que les collectivités doivent impérativement suivre. Ailleurs, malgré la décentralisation, le rôle financier de l'État demeure très important. Partout, y compris aux États-Unis, l'État reste celui qui encadre légalement l'organisation et le fonctionnement des collectivités urbaines. Ainsi, la ville de New York dépend fiscalement du cadre imposé par l'État de New York qui, en 2008, lui a refusé l'introduction d'un péage urbain après lui avoir supprimé la taxe sur les déplacements domicile-travail (commuter tax).

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Cinq métropoles en compétition

La question du leadership territorial

L'une des clés de l'action collective au niveau métropolitain est l'établissement de bonnes relations entre les collectivités locales. Or, dans ce registre, les rapports sont souvent conflictuels, car la question centrale reste celle du leadership territorial, c'est-à-dire de l'institution pouvant légitimement parler et agir au nom de la métropole tout entière.

Dans les villes étudiées, deux cas de figure se rencontrent : soit le conflit domine, soit il y a un leadership de fait, mais celui-ci est mal accepté et donne lieu à des tiraillements.

À Madrid, la lutte pour le leadership oppose la région (la Communauté autonome de Madrid) et la ville-centre, pourtant du même bord politique : les relations sont si mauvaises que les dirigeants respectifs de ces deux autorités locales ne se parlent pas et élaborent, chacun de leur côté, des politiques et des stratégies propres.

À Londres, si les municipalités ne contestent pas la légitimité de la GLA à parler au nom de la métropole, elles s'opposent en revanche à l'augmentation de ses compétences et de son pouvoir. La situation est comparable à New York et à Tokyo, puisque la ville de New York ou le gouvernement métropolitain de Tokyo (TMG) dominent politiquement et économiquement l'aire urbaine, mais ne représentent qu'une partie de la métropole sur le plan démographique (New York regroupe 8 millions d'habitants sur les 18 millions de son aire urbaine et TMG rassemble quelque 12 millions des 35 millions du Grand Tokyo). À ce titre, leur domination est mal acceptée par les autres collectivités locales, même si elles doivent le plus souvent en prendre acte.

Mais la conflictualité de telles situations a conduit un certain nombre de ces métropoles à essayer soit de les pacifier, soit de mettre en place des instruments d'échange et de dialogue pour permettre une meilleure coopération. C'est le cas à Tokyo où, depuis 1981, est organisé deux fois par an le Capital Region Summit, qui rassemble les dirigeants de TMG et des trois régions environnantes qui couvrent l'aire urbaine. Il s'agit d'un outil informel d'échange et de dialogue sur les principaux enjeux auxquels la capitale japonaise est confrontée. À Londres a été créé en 2008, avec le nouveau maire, la London Charter, qui est une charte visant à pacifier les relations entre la GLA et les municipalités. Signée par la GLA et l'association des communes londoniennes en 2009, elle explicite la nature des liens entre les collectivités locales et définit les principes de bonne coopération et de répartition des rôles entre elles.

Rien de tel, en revanche, à Madrid et à New York. À Madrid, l'absence d'instruments de dialogue s'explique par l'animosité personnelle des deux leaders et des désaccords fondamentaux sur l'évolution de la décentralisation espagnole. À New York, c'est la primauté accordée à l'autonomie municipale et l'extrême fragmentation institutionnelle qui expliquent la situation.

Une ouverture aux milieux économiques

À l'heure où la compétitivité et plus généralement l'attractivité territoriale sont présentées comme le paradigme des politiques publiques, il apparaît logique et légitime que les autorités politiques se tournent vers les milieux économiques pour les impliquer plus fortement dans l'action collective. Assiste-t-on pour autant dans les métropoles à une telle évolution ? La réponse est loin d'être univoque, car chaque ville possède sa propre histoire des relations entre le monde politique et les entreprises, histoire qui structure toujours ces relations, au moins en partie. Des métropoles comme Londres ou Madrid affichent d'excellents rapports avec les milieux économiques. À Londres, il y a eu, depuis la création de la GLA en 2000, la constitution d'une alliance, d'une coalition structurée entre l'autorité métropolitaine et

LONDRES NEW YORK MADRID ILE-DE-FRANCE TOKYO

Superficie (en km²) 1500 (GLA) 17 400 (MSA) 8000 (CAM) 12 000 (RIF) 7000

Population de l’aire métropolitaine (en millions)

7,5 (GLA) 18,1 (South East) 18,7(MSA) 6(CAM) 11(RIF) 35 (Grand

Tokyo)

Nombre de municipalités 32

+ de 800 et + de 1200 autres

collectivités locales

179 1281 95 villes sur 4

régions (préfectures)

Population de la ville-centre (en millions)

Pas de ville-centre 8,2 3 2,1 8,4

Rapport ville-centre/métropole (en %)

Non pertinent 44 50 19 24

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les principales forces économiques. Ainsi, les maires de Londres ont établi des relations étroites en prenant comme conseillers des membres des organisations de représentation des entreprises. Ken Livingstone, maire jusqu'en 2008, a créé au sein de la GLA une unité spéciale chargée de ces relations et a rencontré régulièrement et formellement les milieux économiques dans le cadre de l'élaboration de ses stratégies et de ses politiques de développement. Son successeur, Boris Johnson, a poursuivi la même démarche.

À Madrid, la Communauté autonome a progressivement mis en place un système de gouvernance mésocorporatiste avec les forces économiques, mais aussi sociales. Ce système fonctionne par des conseils, commissions et agences spécifiques auxquelles participent les organes de représentation des entreprises et les syndicats, contribuant ainsi à l'élaboration et à la mise en place d'un certain nombre de politiques publiques dans les secteurs de la formation, du développement économique et autres. Depuis 2003, la municipalité de Madrid s'est lancée dans la même stratégie.

À New York et à Tokyo, les relations entre milieu politique et monde économique font aussi l'objet de dispositifs et d'arrangements spécifiques bien que moins formalisés et moins réguliers. À New York, le maire, Michael Bloomberg, lui-même grand homme d'affaires, entretient des relations étroites avec les entreprises, notamment celles de la finance, des assurances et de la promotion immobilière. Une grande partie des public benefit corporations sont dirigées par des hommes d'affaires, ou alors ces derniers sont bien représentés dans leurs conseils d'administration. À Tokyo, l'implication des entreprises dans la gouvernance de la ville s'effectue par le biais de très nombreuses structures hybrides (comités, groupe de travail) qui, le plus souvent, associent représentants des ministères, membres du TMG et hommes d'affaires. Depuis 2006, il existe même au niveau du Grand Tokyo le Capital Region Forum, qui rassemble autour des grands élus locaux les chambres de commerce et les hauts dirigeants des entreprises. Ce forum joue le même rôle que le Capital Region Summit.

Dans ces quatre métropoles, les relations entre le monde politique et les entreprises apparaissent plutôt bonnes, mais surtout elles sont relativement bien structurées. Cette structuration est rendue possible notamment par une organisation des milieux économiques autour de quelques organismes de représentation qui demeurent légitimes : chambres de commerce à Londres, Madrid et Tokyo, fédérations professionnelles à Londres et à Madrid, organisations puissantes représentant des secteurs clés de l'économie comme la finance (City Corporation à Londres, Partnership for New York City) ou les grandes firmes internationales (London First, par exemple).

Les singularités de l'Île-de-France

À l'issue de ce bref parcours dans la gouvernance de Londres, Madrid, New York et Tokyo, on ne peut qu'être frappé par les similarités et les singularités franciliennes. Du côté des similarités, on retrouve un État très présent, malgré la décentralisation, et qui affirme vouloir jouer un rôle de premier plan parce qu'il reconnaît à l'Île-de-France un rôle moteur de l'économie française dans la mondialisation. Concernant les relations entre les collectivités locales, la question du leadership territorial se pose ici comme ailleurs entre une ville-centre, Paris, puissante et dirigée par un leader politique de niveau national, et une région dont le territoire épouse peu ou prou l'aire urbaine et qui, ne serait-ce qu'à ce titre, est légitime pour la piloter, mais qui ne dispose pas de capacités politiques et financières suffisantes pour y parvenir.

Pour autant, les singularités franciliennes apparaissent plus importantes. Si, comme ailleurs, l'État y est très présent, il y intervient de manière plus brutale, jusqu'à remettre en cause la décentralisation. La multiplication des opérations d'intérêt national (OIN), la création d'un secrétariat d'État chargé du Développement de la région capitale et la loi sur le Grand Paris, qui envisage de créer une société nationale et un nouvel établissement public d'aménagement à Saclay, en sont les manifestations les plus illustratives. Par ailleurs, la question du leadership territorial apparaît plus complexe et conflictuelle du fait, certes, d'un plus grand nombre de prétendants à ce leadership, puisque l'État vient s'inviter dans le jeu, mais surtout parce que les conflits sont nombreux entre les huit départements, la centaine d'intercommunalités et les 1 281 communes, autour, notamment, de l'attitude à adopter face à la mondialisation : mettre l'accent sur la compétitivité francilienne ou sur la réduction des inégalités socioterritoriales.

Mais là où l'Île-de-France se singularise le plus, c'est dans les relations entre le monde économique et les autorités locales. Alors qu'ailleurs elles sont plutôt fortes et formalisées, rien de tel ici, où les rapports entre les deux sphères sont distendus et empreints de défiance. Les explications à une telle situation sont à rechercher dans la culture politique française, qui affirme la prédominance des autorités publiques, dans l'affaiblissement du corporatisme entraînant la contestation des chambres de commerce et dans la fragmentation des milieux économiques qui ont ainsi du mal à se présenter comme un interlocuteur fiable et légitime auprès des pouvoirs publics.

Toutes ces caractéristiques, auxquelles il convient d'ajouter l'absence ou la faiblesse des espaces et des lieux d'échange, de confrontation et de dialogue entre les acteurs, permettent de comprendre pourquoi le système de gouvernance francilien ne parvient pas à mieux réguler les conflits et à produire plus d'action collective.

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DOCUMENT 10 :

« QUEL AVENIR POUR LES METROPOLES » Site Internet Constructif.fr. - Juin 2010

Auteur Pierre VELTZ

Le monde se présente de plus en plus comme un réseau d'aires métropolitaines échangeant entre elles. Ce phénomène est accentué par le développement de l'économie de la connaissance et concerne des métropoles de toutes tailles, pour lesquelles l'avenir passe par une meilleure gouvernance et une bonne qualité de vie.

La métropolisation du monde est en marche. Les grandes villes concentrent une part croissante de la richesse et du pouvoir (et aussi de la pauvreté) sur l'ensemble de la planète : pas seulement les mégapoles proprement dites, les agglomérations dépassant les 10 millions, mais aussi et surtout les villes qui comptent entre 1 et 10 millions d'habitants. Ces villes s'organisent d'ailleurs de plus en plus en grappes formant de grandes régions métropolitaines, regroupant des agglomérations de taille variée au sein de tissus plus ou moins continus (la côte du Japon entre Tokyo et Nagoya ; la région de San Francisco et celle de Los Angeles ; le corridor de la côte est américaine ; la rivière des Perles et Hong Kong en Chine, etc.). Grosso modo, ces grandes régions métropolitaines regroupent un dixième de l'humanité. Mais elles concentrent près de la moitié du PIB mondial et les trois quarts de la création de technologie !

Ainsi, la représentation courante que nous nous faisons de la géoéconomie du monde est largement faussée. Nous continuons à voir le monde comme un assemblage, ou une mosaïque, d'économies nationales, alors qu'en réalité le monde se présente de plus en plus comme un réseau d'aires métropolitaines échangeant entre elles, en ignorant plus ou moins les frontières nationales et en oubliant plus ou moins les régions intermédiaires. Attention : cela ne signifie pas que les États sont hors jeu ; ils restent, de loin, les acteurs les plus puissants du monde, mais ils sont en tension avec les grandes villes, ou bien alors à leur service...

Toutes proportions gardées, ce monde structuré par de grandes régions urbaines en réseau, souvent maritimes ou liées à de grands deltas, est d'ailleurs proche de celui que décrivent les historiens quand ils s'intéressent aux périodes précédant la révolution industrielle et le formatage du monde en États-nations et en « économies nationales » qui s'est opéré au XIXe siècle et au XXe siècle, et ce, aussi bien en Europe qu'en Asie (Chine, Inde, etc.). Voici le fait majeur : la métropolisation et la mondialisation sont deux faces d'une même médaille. Et, pour des raisons qu'il serait trop long de développer ici, cela est d'autant plus vrai que le centre de gravité de l'économie se déplace vers ce qu'on appelle l'économie de la connaissance. Plus les activités sont à haute valeur ajoutée intellectuelle, plus elles ont tendance à se concentrer. Ces constats posent une multitude de questions, dont certaines sont récurrentes dans le débat public sur ces sujets. Je voudrais ici, brièvement et schématiquement, en aborder trois.

L'Internet ne va-t-il pas inverser cette tendance à la métropolisation ?

Pourquoi continuer à s'agglomérer dans des métropoles, alors que les possibilités de coopérer et de communiquer en ignorant les contraintes des lieux et de la proximité géographique ordinaire sont en pleine explosion ? Il est évidemment impossible de prévoir les répercussions à moyen terme de la révolution numérique, qui est bien un changement global de paradigme. Mais les signes actuels montrent que, loin d'inverser la tendance dominante à la polarisation, l'Internet la renforce. Et s'il fallait parier, je parierais sur le maintien de cet apparent paradoxe plutôt que sur son effacement. On notera au passage que cette situation n'est pas nouvelle. Chaque fois que les moyens de communication ont franchi un nouveau seuil d'efficacité, les experts ont imaginé que cela allait permettre de répartir davantage les activités dans l'espace. Et chaque fois, c'est le contraire qui s'est passé. Le meilleur exemple historique est celui du chemin de fer au XIXe siècle, qui a conduit, notamment dans des pays neufs comme les États-Unis, à une polarisation sans précédent.

Que constate-t-on aujourd'hui ? D'un côté, on voit que la révolution numérique permet une fragmentation organisationnelle et spatiale de plus en plus poussée des activités économiques et des chaînes de valeur, qui forment des écheveaux très ramifiés et perpétuellement mouvants de flux à l'échelle mondiale. Et pourtant, prise

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globalement, cette immense pelote de flux reste géographiquement lisible. Le monde n'est pas un Jackson Pollock ! Car, d'un autre côté, la structuration spatiale s'appuie de plus en plus sur des pôles métropolitains, qui ne sont pas du tout des systèmes économiques ou sociaux fermés sur eux-mêmes, mais au contraire des commutateurs, des hubs, où ces flux se croisent de manière (très) privilégiée. Au passage, on peut noter que l'Internet, qui sait faire ses propres cartographies, observer sa propre évolution, reproduit et confirme ces schémas de hubs. Dans la géographie de l'Internet, certains nœuds ont beaucoup plus de connexions que d'autres.

Pourquoi ? Il y a de multiples raisons. La grande ville permet des connexions et des échanges que les réseaux dits immatériels ne sont pas près de pouvoir reproduire. L'essence de la ville, comme le soulignent François Ascher et Jacques Lévy, c'est la « serendipité » : mot amusant et savant pour signaler l'avantage de trouver par hasard des connexions qu'on ne cherche pas, mais qui deviennent importantes, souvent plus utiles que celles qu'on cherchait au départ, une fois qu'on en dispose. Le brassage urbain permet ainsi aux entreprises de reconfigurer des chaînes d'acteurs (par exemple de sous-traitance) très facilement et très rapidement. La ville est une machine privilégiée pour permettre aux grands acteurs mondialisés de bénéficier des idées et des contributions productives des petits acteurs locaux, de leur créativité et de leur renouvellement incessant, dopé par l'ambiance métropolitaine.

Enfin, pour tout le monde, l'Internet augmente par contraste la valeur de tout ce qui n'est pas « télécommunicable » et qui ne peut passer que par l'efficacité et le plaisir du contact direct. À cet égard, la révolution numérique va sans doute profondément changer le fonctionnement interne des villes. Elle ne fera pas disparaître les villes, bien au contraire. Mais elle va certainement modifier profondément les façons de travailler, d'échanger, de se déplacer, et donc aussi d'habiter les villes. En les rendant plus vivables, elle augmentera aussi leur puissance d'attraction, d'autant plus qu'elle facilite aussi considérablement les possibilités de multirésidence et de temps partagé entre l'univers urbain et la vie à la campagne.

Seules les très grandes métropoles ont-elles un avenir ?

Certainement pas ! Il y a là un risque de glissement dans le raisonnement. Ce n'est pas parce que les métropoles ont (statistiquement, à l'échelle mondiale) le vent en poupe que les villes moyennes, voire les tissus ruraux intermédiaires, n'ont plus d'avenir. On le voit très bien en France. Contrairement à ce qui s'est passé dans les années 1980, où l'Île-de-France a été le grand bénéficiaire de la métropolisation (et de l'internationalisation) de l'économie française, ce sont aujourd'hui les métropoles de second rang qui mènent la danse, alors que la métropole parisienne voit partir un nombre croissant de ses jeunes actifs ; et pratiquement l'ensemble du monde dit « rural » connaît un spectaculaire renouveau de vitalité, surtout lorsqu'il est dans une aire d'influence métropolitaine.

Un petit pays très intégré comme la France vit, bien évidemment, le processus de métropolisation autrement que la Chine, ou même les États-Unis. La véritable révolution, encore sous-estimée, du TGV et l'ampleur des redistributions liées à l'État social et aux mobilités privées solidarisent le tissu français de manière extraordinaire. Il est aujourd'hui possible de continuer à participer à un système d'activité métropolitain en résidant dans des villes où le rapport qualité/coût de la vie est devenu bien meilleur qu'à Paris. L'ambiance métropolitaine elle-même tend d'ailleurs à se diffuser largement et le temps est définitivement clos où il y avait deux France radicalement distinctes, celle de Paris et celle de la province. Cette métropolisation plus répartie est bien entendu une bonne chose, à condition toutefois de ne pas oublier trois faits inconfortables. D'abord, la France n'ayant pas de métropole intermédiaire de la taille d'Amsterdam ou de Munich, le déclin de la région parisienne serait un très lourd handicap pour le pays. La France a plus que jamais besoin d'une métropole de premier rang mondial puissante, créative et rayonnante, qui assure des fonctions que même Lyon, Toulouse ou Marseille ne peuvent pas assurer. Ensuite, la dépendance de nombreuses villes apparemment très dynamiques aux processus publics et privés de redistribution pose le problème de la durabilité de cette situation. Sans locomotive(s) productive(s) puissante(s), la France résidentielle, fût-elle métropolitaine, n'a pas un brillant avenir ! Enfin, il est grand temps de sortir des schémas mentaux si profondément ancrés opposant Paris aux autres métropoles régionales. À l'image du contrepoids (les « métropoles d'équilibre »), il faut opposer celle de la solidarité et de la reconnaissance progressive d'une seule métropole en réseau (dont le TGV est le RER) organisant l'ensemble du pays.

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Y a-t-il des recettes pour le développement métropolitain ?

Dans le monde nouveau qui émerge, le capital physique et les infrastructures restent des facteurs de croissance importants. Mais les facteurs essentiels sont désormais différents : c'est précisément cela que les économistes appellent l'économie de la connaissance. Ces facteurs sont : les idées, les institutions (et la confiance qu'on leur accorde), la démographie et le capital humain. La confiance dans les institutions et leur qualité sont au centre de l'efficacité comme de la compétitivité. Beaucoup d'indicateurs montrent que la société française est l'une de celles où la confiance est le moins partagée. Or, plus l'économie est ouverte, plus ces facteurs immatériels ont de l'importance. Les métropoles qui s'en sortent le mieux sont et seront celles qui disposent d'une gouvernance efficace, souvent appuyée sur des facteurs culturels et socio-historiques.

À Bilbao, ce n'est pas le musée Guggenheim qui explique le spectaculaire renouveau d'une des villes européennes les plus durement meurtries par la crise ; c'est la qualité de la gouvernance, appuyée sur la cohérence culturelle basque, malgré le cancer terroriste, qui explique ce renouveau, dont le Guggenheim n'est qu'un élément parmi beaucoup d'autres. Je suis donc de ceux qui pensent que la clé de la réussite des métropoles françaises est dans la réforme de leur gouvernance. Elle passe notamment par l'émergence d'un véritable pouvoir d'agglomération, avec un président élu au suffrage universel direct.

L'autre point essentiel est de comprendre qu'il est désormais plus important de savoir attirer et retenir les personnes, les talents, que les capitaux. À court terme, les salariés suivront les entreprises dans leur choix de localisation ; mais à moyen terme, ce sont les entreprises qui suivront les choix de vie et donc de résidence de leurs collaborateurs. La mondialisation, du reste, ne s'appuie pas seulement sur les mouvements de capitaux, mais aussi, de plus en plus, sur les mouvements de personnes et la création de communautés transnationales. Ce ne sont pas les capitaux étrangers qui expliquent l'essor de l'Inde dans l'informatique, mais le mouvement de retour massif des ingénieurs ayant étudié dans les universités américaines. C'est pourquoi il est essentiel pour les métropoles de figurer sur la carte mentale des migrants potentiels les plus qualifiés et donc aussi d'afficher une ouverture culturelle forte. Mais, dans tous les cas, la question des équipements, de la qualité urbaine et du cadre de vie devient cruciale. Ce n'est plus une question annexe par rapport à celle de la stratégie économique des villes. C'est une question centrale.

Les villes ont besoin d'attirer des entreprises, certes, mais de plus en plus les entreprises ont besoin des villes, pour faire la différence en termes de qualité de vie. Parallèlement, bien sûr, les métropoles, lorsqu'elles sont de taille moyenne, ont impérativement besoin d'afficher une politique de différenciation : elles doivent choisir leurs créneaux et se concentrer sur leurs atouts. Mais, dans une perspective de développement durable, la recherche de la qualité urbaine, notamment environnementale, et la stratégie de développement économique sont désormais indissociables.

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Document 11 :

« ASSOCIER LES METROPOLES » Site Internet Constructif.fr - Juin 2010

Auteur Gérard COLLOMB

La nouvelle organisation spatiale se caractérise par une concentration des pôles urbains majeurs, reliés entre eux, et, à l'échelle locale, par le développement d'espaces multipolaires formant réseau. D'où l'importance pour la France de disposer d'une armature de quelques villes de dimension européenne agissant comme de véritables pôles de développement.

Jusqu'aux Trente Glorieuses, on a assisté à l'avènement de l'État-nation. Puis le progrès, l'émergence des nouvelles technologies, l'accélération des échanges ont conduit au développement d'un phénomène de mondialisation entraînant l'affaiblissement des États au profit des villes. Ce nouveau format historique bouleverse nos rapports au monde, au temps, à l'espace, à la nature et change la donne géostratégique. Aujourd'hui, la planète est en voie de réorganisation autour de nœuds métropolitains gigantesques. La nouvelle organisation spatiale va, d'une part, vers une concentration des pôles urbains majeurs, reliés entre eux, et, d'autre part, à l'échelle locale, vers des espaces multipolaires formant réseau.

Les enjeux du rayonnement

Dans cette configuration, la question du rayonnement d'une ville ou d'une métropole passe : - d'abord, par la compétition avec, dans un premier temps, la nécessité de l'intégration de la métropole dans un réseau à l'échelle continentale ou mondiale et, dans un second temps, le passage d'un niveau d'intégration à un autre dans la hiérarchie des métropoles ; - ensuite, par l'organisation, sur le territoire métropolitain, d'un espace multipolaire reliant les différentes

agglomérations qui le composent, dans le but de renforcer l'attractivité globale et le potentiel de chacune, mais également d'assurer une plus grande solidarité entre les territoires.

Immanquablement, les villes se retrouvent donc à la fois dans une logique de compétition et de mise en réseau. Quant à la compétitivité des pays, elle est inévitablement liée à celle de leurs grandes métropoles. « Associer les métropoles » revêt finalement deux sens : les associer en réseau à l'échelle mondiale pour porter l'expertise des villes sur la scène internationale face aux grands enjeux du XXIe siècle ; les associer également, au sein d'un même État - et là, je pense au contexte institutionnel français - pour que puissent émerger de vrais pôles métropolitains, moteurs des pays dans la compétition internationale.

Les métropoles en « coopétition »

Je me suis particulièrement intéressé à la notion de Michael Parkinson alliant coopération et compétition (1), qui veut qu'une ville se développe sans que ce soit au détriment d'une autre. Je dirais même que dans les grands réseaux de villes, à l'instar d'Eurocities ou des CGLU (Cités et gouvernements locaux unis) dont Lyon est membre à part entière, la compétition est plutôt ressentie comme une incitation permanente à se réinventer et à se développer. C'est cet esprit de « coopétition » qui, sur une thématique précise, contribue à accroître la compétitivité de chacune des métropoles et à renforcer le poids de l'ensemble sur la scène mondiale. Pierre Veltz a développé le concept de « ville globale ». Pour lui, et je partage largement son point de vue, l'économie mondialisée est en fait une économie d'archipel, c'est-à-dire qu'elle ne correspond pas aux États, mais aux nœuds où se concentrent la matière grise et les flux, qu'ils soient physiques - aéroport, TGV - ou bien virtuels - Internet - et que c'est là que se concentre la compétitivité économique. La force de nos territoires se trouve donc aussi dans cette capacité qu'ils ont à nouer en leur sein des collaborations, à agréger l'ensemble de leurs forces vives autour d'un objectif commun. Ils sont l'échelle propice pour susciter à la fois initiatives individuelles et intelligence collective.

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Le rôle des collectivités dans le développement durable

Cela est vrai en matière d'innovation et de recherche, qui sont, nous le savons bien, les facteurs clés de différenciation à l'échelle mondiale. Mais ça l'est aussi dans bien d'autres domaines. Dès qu'il s'agit du développement durable, par exemple. Et le sommet de Copenhague en a été particulièrement symptomatique. Si le texte adopté à cette occasion a démontré une difficulté des gouvernements à aboutir à une vision partagée de la lutte contre le réchauffement climatique, on a tout de même assisté à l'émergence d'un nouvel état d'esprit : celui de la mobilisation de l'échelon local dans l'effort mondial de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Car si l'enjeu écologique est planétaire, il concerne là encore en premier lieu les villes. Si elles sont en partie à la source du problème, elles sont également les lieux où peuvent s'élaborer concrètement les solutions et s'inventer une nouvelle urbanité à l'aube du XXIe siècle.

En effet, ce sont bien les métropoles qui définissent et gèrent les politiques d'urbanisme, de logement ou de mobilité permettant de limiter l'étalement urbain ainsi que de réduire l'impact des transports et de l'habitat sur le réchauffement climatique. C'est pourquoi il serait irréaliste de penser que les objectifs de l'Union européenne (à savoir, réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre et la consommation d'énergie et porter à 20 % la part d'énergies renouvelables dans la consommation totale d'ici à 2020) pourraient être atteints sans l'implication des collectivités locales.

Ainsi, en 2008, les villes membres du réseau Eurocities avaient-elles déjà décidé de défendre ensemble cette position et signé à Lyon, la « déclaration Eurocities des maires sur le changement climatique ». Ce qui nous a permis depuis - comme on l'a vu à Copenhague - de fédérer et de diffuser nos actions, mais aussi de mettre en commun nos réflexions et nos meilleures pratiques. Cette initiative a d'ailleurs été amplifiée par la Commission européenne au travers du Covenant of Mayors, désormais rallié par d'autres villes non européennes.

Se pose alors la question des moyens dont disposent les territoires français pour mettre en œuvre ces politiques. Une évaluation du Grenelle de l'environnement menée par le cabinet BCG estime à 100 milliards d'euros le coût que les collectivités locales auraient à supporter si nous mettions en œuvre l'ensemble des mesures prévues. L'État, quant à lui, nous y aiderait à hauteur de milliards d'euros seulement.

Je pense aussi à la réforme de la taxe professionnelle, qui risque de distendre fortement le lien entre nos territoires et nos entreprises, notamment nos grandes industries. En ces temps où, comme je le disais, l'heure est à la mobilisation générale pour préserver la compétitivité de notre pays dans la nouvelle donne économique mondiale, je ne peux qu'être inquiet de la voie choisie par le gouvernement.

Ouvrir la voie de l'excellence à nos territoires

C'est une conception très centralisatrice de l'État qui semble aujourd'hui sous-tendre l'action du président de la République, pour qui l'efficacité de l'action publique doit passer par une centralisation des décisions. Cette vision pyramidale avec, d'une part, la planète, d'autre part, l'Europe puis la nation et, enfin, le local est aujourd'hui daté. Car la grande révolution, c'est désormais, comme je l'expliquais, de savoir s'inscrire dans un monde de réseaux.

Les politiques gouvernementales actuelles constituent un recul net face à la décentralisation, à ses acquis démocratiques et un coup d'arrêt au développement des territoires, porteurs de croissance pour tout le pays. En tant que sénateur, mais aussi que président du Grand Lyon et de l'Association des communautés urbaines de France, je me suis donc engagé avec vigueur dans les débats autour de la réforme du territoire français.

Je défends depuis longtemps une vision à la fois pragmatique et ambitieuse du territoire national autour d'une armature urbaine constituée de quelques villes de dimension européenne agissant comme de véritables pôles de développement et irriguant leurs territoires ruraux limitrophes. C'est en effet à une échelle de 2 à 3 millions d'habitants que se joue aujourd'hui la compétition internationale entre les grandes agglomérations, qui souhaitent devenir les futurs centres d'innovation et d'intelligence économique. C'est la condition indispensable à leur visibilité et à leur attractivité, à leur capacité à accueillir et à garder les entreprises créatrices de richesse et d'emplois.

Aujourd'hui, la France a besoin de trois ou quatre de ces métropoles d'intérêt européen, que j'appelle les MIEU. Aux côtés de ces MIEU, il s'agit de favoriser l'émergence de MIN, métropoles d'intérêt national, de véritables capitales régionales qui se situeraient sous un seuil d'environ 400 000 habitants. Cette nouvelle organisation a

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également besoin des communes, qui doivent conserver un rôle de proximité auprès des citoyens ; mais aussi des départements dans les zones rurales pour assurer le lien social et le rôle indispensable de chef de file.

La réforme des institutions françaises doit donc s'adapter à la diversité des territoires, qu'ils soient urbains ou ruraux, si l'on veut que la France joue un rôle essentiel dans l'économie mondialisée. Le Sénat a voté, le 5 février dernier, en première lecture, le projet de loi sur la réforme territoriale. J'ai obtenu à cette occasion, par la voie du travail parlementaire, de nombreuses améliorations du texte initial. Les débats ont notamment permis la création du pôle métropolitain, qui répond à la nécessité d'un statut adapté à ces métropoles de dimension européenne que j'appelle de mes vœux.

Basé sur le volontariat et la coopération entre les différentes agglomérations qui le composent, le pôle devra mener des actions en faveur de l'amélioration de la compétitivité et de l'attractivité de son territoire. Elles porteront sur le développement économique, écologique et éducatif, la promotion de l'innovation, l'aménagement de l'espace et le développement d'infrastructures et de services de transport performants.

Au niveau de la région lyonnaise, nous avons tous conscience que la concurrence se joue désormais à l'international, et non pas entre les agglomérations. Il n'y a aujourd'hui aucune rivalité entre Saint-Étienne, le Nord-Isère et le Grand Lyon, mais une volonté partagée de coopérer. Nous avons une ambition commune : répondre aux attentes des habitants et développer nos territoires dans le respect de leur diversité, qu'ils soient ruraux ou urbains. Nous avons signé un protocole de coopération métropolitaine avec Saint-Étienne Métropole et la Communauté d'agglomération Porte de l'Isère pour construire un territoire multipolaire à l'échelle de notre bassin de vie. Demain, la Communauté d'agglomération du Pays viennois nous rejoindra.

Quatre grands défis

Nous avons quatre grands défis à relever, correspondant à quatre domaines stratégiques :

- celui de la planification urbaine, pour organiser un développement durable du territoire en évitant que nos grands pôles urbains ne se déploient de manière tentaculaire en mitant les espaces naturels et agricoles, comme cela s'est fait en région parisienne ;

- celui des déplacements et de la mobilité, pour à la fois renforcer l'accessibilité internationale de l'eurométropole et mailler le territoire avec un réseau de transports en commun efficace et adapté ;

- celui de l'économie, de la recherche, de l'université et de l'innovation, pour renforcer la compétitivité et l'attractivité internationale du territoire en valorisant les potentialités respectives des agglomérations et en fédérant les ressources au niveau d'une taille critique suffisante ;

- enfin, celui de la culture, du sport et des loisirs, pour renforcer notre rayonnement, encourager la création et favoriser le sentiment d'appartenance à un même bassin de vie.

Si, sous tous ces angles, « associer les métropoles », c'est faire que la ville française, la ville européenne, puisse redevenir un modèle pour le monde, un modèle porteur à la fois de progrès urbain, économique et social, un modèle qui soit véritablement soutenable, alors oui, cela vaut la peine de tout mettre en oeuvre pour incarner ce modèle. C'est ce à quoi je continuerai à m'employer, au sein de la métropole lyonnaise, ainsi qu'au niveau national, dans la poursuite des débats sur la réforme territoriale. 1. Michael Parkinson et al., Competitive European Cities : Where Do the Core Cities Stand ?, Liverpool , European Institute for Urban Affairs, 2003. 2. Pierre Veltz, Mondialisation, villes et territoires : l'économie d'archipel, PUF, 1996. Voir aussi

SUJET NATIONAL POUR L’ENSEMBLE DES CENTRES DE GESTION ORGANISATEURS

CONCOURS EXTERNE D’INGENIEUR TERRITORIAL

SESSION 2011

SPECIALITE : URBANISME, AMENAGEMENT ET PAYSAGES

A LIRE ATTENTIVEMENT AVANT DE TRAITER LE SUJET

Ce document comporte : un sujet de 2 pages et un dossier de 36 pages.

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