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Un mensuel au service des intervenants francophones en promotion de la santé Ne paraît pas en juillet - Bureau de dépôt : Bruxelles X - ISSN 0776-2623 n o d’agréation : P401139. NOVEMBRE 2004 195 Editeur responsable : Edouard Descampe, chaussée de Haecht 579 - boîte postale 40 - 1031 Bruxelles. Photo © Burger. PROMOUVOIR LA SANTÉ NUTRITIONNELLE DES JEUNES en p.2 à 7

NOVEMBRE 2004 195 - Education Santéeducationsante.be/media/filer_public/ca/e0/cae0b4bd-d1a7... · 2014. 10. 17. · Un mensuel au service des intervenants francophones en promotion

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  • Un mensuel au service des intervenants francophones en promotion de la santé

    Ne paraît pas en juillet - Bureau de dépôt : Bruxelles X - ISSN 0776-2623no d’agréation : P401139.

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    Composition alimentaire des cartables,messages délivrés par nos lieux d’éduca-tion et offre alimentaire à côté descours : des dentistes bénévoles sont reve-nus des écoles... sans le sourire

    Il n’y aura pas de bulletin de bonne santépour nos enfants sans aussi une bonnesanté dentaire. La dégradation de la den-ture chez des personnes parfois bienjeunes n’est pas anodine en termes debien-être physique et psychologique.Pour éviter les problèmes de caries (et degencives), il n’y a pas de solution miracle- style pilule magique au fluor, impro-bable vaccin ou dentifrice parés des millevertus que vantent leurs publicités. Onrappellera que la carie est une maladieplurifactorielle, et partant, sa préventionrepose sur des actions menées sur plu-sieurs de ces facteurs. Toutefois, unealimentation raisonnée est le facteurcapital dans le maintien d’une bonnesanté dentaire, pour ne pas dire... d’unebonne santé tout court.

    L’expérience-pilote « Sourire pour tous » 1

    récemment menée avec le soutien duministre Demotte a permis à une équipe dedentistes bénévoles de notre Fondation dese rendre compte incidemment des habi-tudes alimentaires actuelles des enfantsdans les écoles visées. Pas n’importe quellesécoles : des écoles primaires choisies caraccueillant les enfants de familles parmi lesplus défavorisées du pays.

    Nos observations et réflexions se sont atta-chées à trois aspects.

    La composition alimentairedes cartablesTant en ce qui concerne le repas de midi, lesboissons, les en-cas (pour les récrés) sansoublier les inévitables friandises, c’est pireque tout ce qu’on pouvait imaginer :absence quasi absolue de fruits et delégumes dans les « boîtes à tartines » de cesenfants. Nous sommes entrés dans l’ère dusuremballage de mini-portions de biscuitsen tous genres. Même le bon pain semblecéder du terrain à des biscuits vitaminésbien plus attractifs.

    Mais le déséquilibre le plus frappant sesitue au niveau des boissons. Quand ce n’estpas la belle canette de 33 cl hypercalorique,ce sont ces briquettes de jus soi-disant defruits qui constituent la boisson-règle.

    En moyenne, un seul enfant par classe ade l’eau toute simple et toute pure dansson cartable.

    Les sacro-saints « 10 heures » suivent lamême composition déséquilibrée. Vous ima-ginez impossible de remettre en cause cettehabitude si ancrée ? C’est pourtant ce qu’afait un groupe de pédiatres dans la revuefrançaise « Archives de pédiatrie » en 2003,sous le titre « La collation de 10 heures enmilieu scolaire : un apport alimentaireinadapté et superflu » 2. Les conclusions dece comité de pédiatres sont sans appel :« En tout état de cause, par sa composition,son horaire, son caractère systématique etindifférencié, la collation matinale actuelle-ment proposée aux enfants en milieuscolaire ne peut constituer qu’une réponseinadaptée à l’absence de petit déjeuner. Elleest superflue et néfaste pour la grandemajorité des enfants de cet âge qui déjeu-nent le matin, et, dans tous les cas, pourraitfavoriser la progression de l’obésité. »

    Le « climat » alimentaire dans l’écoleQuel modèle de consommation alimentaireest présenté à nos enfants ? D’énormesefforts d’information alimentaire ont étéfaits à destination des écoles, avec la colla-boration des enseignants. Une visite in situsuffit pour s’en convaincre. Vous trouverezdes affiches expliquant la pyramide alimen-taire. Vous y trouverez des affichesrappelant l’importance des fruits etlégumes, mais vous ne trouverez pas uneseule épluchure : « Vous comprenez, si jedois éplucher toutes les oranges des enfants,je ne fais plus que cela! » nous confia cetteinstitutrice débordée.

    L’école accueille volontiers du matérielpédagogique mis à sa disposition... par desfirmes alimentaires. Une lecture critique deces documents est-elle faite ? Y trouve-t-on une éducation nutritionnelle réelle, ouplutôt y apprend-on les marques de l’indus-

    trie yaourtière ? Y apprend-on que la sourceprincipale des céréales dans notre alimen-tation n’est pas le pain, mais les Corn Flakesenrichis en vitamines et en sucre ?

    Nos ministres communautaires sortantsavaient eu la bonne idée d’organiser unsymposium sur l’alimentation à l’école.Mais avant même de le commencer, il étaitdéclaré qu’il n’y aurait aucune mesurecontraignante, misant toutes les actionssur une « charte » à élaborer et à adoptersur base volontaire. Nous n’avons pas vutrace de cette charte dans les écoles visi-tées. Nous avons vu des distributeursautomatiques.

    Les écoles n’ayant pas une équipe éducativepointue ne seront donc pas encadrées pardes lignes directrices, pourtant des plus élé-mentaires, définies par circulaires. Aumépris des milieux les plus défavorisés...une fois de plus ?

    L’offre alimentaire de l’écoleElle dépasse bien largement la seule offre del’éventuelle cantine de midi.

    Certaines écoles visitées organisent unevente d’aliments lors des récréations.

    « On a essayé des fruits, mais cela n’avaitpas de succès. Et ils pourrissaient! » nous a-t-on répété. Ce qui est vendu avec succès,ce sont les paquets de chips, les biscuits, lesfriandises et les canettes de sodas. Cettevente est l’initiative d’un professeur, d’uneclasse, voire de la direction elle-même...Vous avez dit « éducatif »?

    Débarquant à l’école pour une journée depromotion de la santé dentaire, nous avonsété surpris de la présence fréquente de dis-tributeurs automatiques de boissons etd’« en-cas ».

    Chacun sait que si on laissait les enfantscomposer eux-mêmes le menu du jour, ony verrait inscrit trop systématiquementfrites, hamburgers et sodas. Laisser au librechoix des enfants un distributeur avecquatre sodas et une eau... Vous imaginezbien sur quelle boisson va se porter lechoix de l’enfant.

    Notre alimentation évolue vers uneconsommation déstructurée. La notion derepas cède du terrain. On mange « sur lepouce », en faisant autre chose. On grignoteet on saute les (vrais) repas. Plus de petit-

    INITIATIVES

    Carie-cola s’invite dans les écoles primaires

    1 Voir les articles ‘Sourire, un privilège ?’, ‘La Belgique aencore de belles dents, mais…’ et ‘La dent dure’, deMyriam Marchand, Education Santé no 188, mars 2004. 2 http://sfpediatrie.com/upload/2/758/collation.pdf

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    déjeuner mais les enfants ont un coup demou à 10 h et des ados se « nourrissent » lemidi d’un paquet de biscuits accompagnéd’une canette.

    L’offre de nourriture et de sodas seretrouve maintenant partout et à touteheure : à la pompe à essence, à la librairie,au cinéma, dans les couloirs du métro,dans les salles d’attente des hôpitaux et...dans les écoles. Le respect de cycles tra-vail/repos est pourtant également valablepour le tube digestif.

    Les distributeurs automatiques entraî-nent la définition d’un nouveau moded’alimentation : manger n’importe quanddes aliments pré-emballés sans possibi-lité de constituer une alimentationéquilibrée, variée, faite de rations adap-tées à chaque âge.

    Mais avec quelle valeur d’exemple ? Nousne parlons pas ici des choix alimentairesd’un adulte informé et responsable mais dece qui est proposé comme aliment-type àdes enfants fréquentant l’école primaire,voire l’école maternelle attenante.Comment un enfant si jeune peut-il résisterà l’attrait d’une machine qui fait deux foissa taille, rétro-éclairée, délivrant le précieuxnectar, faisant de lui un consommateur depurs produits du marketing ?

    A propos de publicité, quelle victoire pources firmes qui sont parvenues à installerdes panneaux éclairés de deux mètres car-rés aux couleurs de leur marque dansl’enceinte des écoles! Toute forme depublicité n’est-elle pourtant pas interditeà l’école ?

    Observez également le petit jeu des enfantsdevant cette machine : il y a ceux qui ontles pièces pour alimenter la machine etceux qui n’en ont pas. On imagine déjà l’en-fant « scier » ses parents pour passer dans lacatégorie de ceux qui ont la thune pourfaire partie du groupe. En termes d’initiés,cela s’appelle du « marketing tribal » : le faitde consommer donne le droit d’appartenirau groupe.

    On pourrait rêver à un autre modèle éduca-tif dans nos écoles. Car rappelons-le, nousparlons de l’environnement scolaire dejeunes enfants fréquentant l’école primaire.

    Il ne s’agit donc pas simplement de la qua-lité de ce qui est vendu : le mode de ventepar machine automatique est tout autanten cause.

    Et ne nous y trompons pas : ces machinesimplantées au sein de l’école primaire sontfacteurs d’inégalités sociales. Les enfantsissus de familles les moins favorisées sontles moins bien préparés à résister à l’at-trait de ces machines à sous. Au détrimentde leur santé.

    Des initiatives ont été menées dans lesécoles pour redonner une place à l’accès àl’eau de distribution, telle l’opération« robinets-fontaines » 3. Lors des visitesdans nos écoles, nous en avons rencontréquelques-uns. Nous avons entendu descommentaires aussi : « c’est pas propre »,« les enfants jouent avec l’eau », « c’esttombé en panne », « les enfants ne boivent

    pas d’eau ». Pas étonnant si le distributeurde sodas est juste à côté...

    En tant qu’acteur de terrain, nous plaidonspour une interdiction pure et simple desdistributeurs automatiques dans l’en-ceinte de l’école primaire. Que cetteinterdiction provienne de l’autorité fédé-rale ou de notre nouvelle ministre de laSanté en Communauté française,Catherine Doyen-Fonck.

    Il faut cesser de tenir des beaux discours ouse contenter de lancer des campagnes d’in-formation. L’heure est venue de poser desactes. L’heure est venue d’être cohérent.

    Prendre cette disposition ne requiertaucun moyen financier. Il suffit justed’avoir la volonté politique. Avant qu’il nesoit trop tard ?

    Michel Devriese, dentiste, Coordinateur dela Fondation pour la santé dentaire

    Pour évoluer vers un système de santé pluspréventif, la Fondation mène des actionsvisant à améliorer la santé dentaire dansdes écoles d’enfants de milieux défavorisés.Son adresse : Fondation pour la santé dentaire, av. De Fré n°191, 1180 Bruxelles. Tél :02 374 85 80. Courriel : [email protected]

    Internet : http://www.sourirepourtous.be

    Article paru sous le titre ‘Zéro pointé pourl’alimentation à l’école’ dans La LibreBelgique du 1/9/2004, pages Débats, repro-duit avec l’aimable autorisation du journal.

    Une école sans distributeursde sodas, c’est possible

    La Ville de Bruxelles a décidé de retirer lesappareils de distribution de limonades et debonbons de ses écoles maternelles et pri-maires à partir du 1er janvier 2005. A laplace, la Ville installera des fontaines d’eaupotable, meilleures pour la santé et ne pro-duisant pas de déchets.

    Michel Devriese saisit l’occasion pour invi-ter directions d’école, professeurs, pouvoirsorganisateurs et parents à entamer undébat sur ce sujet.

    La Fondation pour la Santé dentaire estprête au dialogue : [email protected]

    3 Voir ‘L’eau du robinet, ça nous plaît’, Sylvie Bourguignon,Education Santé no 178, avril 2003

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    Les jeunes, les parents, l’école, les PSE etles PMS, les restaurateurs, l’industrie ali-mentaire, les chaînes de distribution...Chacun a un rôle potentiel spécifique etdifférent à jouer pour promouvoir la santédes enfants et des jeunes. Et ce malgré desenjeux aussi différents que l’autonomie,l’éducation, l’enseignement, la santé, lavente de services, la production et promo-tion de produits alimentaires. La volontéde promouvoir des partenariats en ce senset d’échanger des expériences réaliséesdans les différents pays, a amené le Conseilde l’Europe à organiser un Forum sur lanutrition en milieu scolaire à Strasbourgen novembre 2003 en collaboration avecle bureau européen de l’OMS.

    Pourquoi le Conseil de l’Europe ?Si plusieurs pays 1 ont mené des expériencespilotes pour améliorer l’alimentation àl’école et promouvoir la santé nutritionnelle,des instances européennes comme leConseil de l’Europe, l’OMS-Europe et l’Unioneuropéenne ont contribué à susciter le débatsur la question de l’offre alimentaire àl’école. Différentes recherches ont mis enévidence des tendances sur le plan de laconsommation des jeunes en matière d’ali-ments et de boissons qui présentent desrisques pour leur santé : la façon de se nour-rir, la pratique de régimes et la réduction dutemps d’activités physiques au détrimentd’activités plus sédentaires (TV, consoles dejeu, ordinateur, lecture…) donnent un amal-game peu favorable à la santé. Le « spectrede l’obésité » agite les médias et nourrit lesarticles dans la presse spécialisée.

    La mise sur pied du colloque rentre dans laligne des préoccupations de la Directiongénérale de cohésion sociale du Conseil del’Europe dans sa recherche de solutions auxproblèmes existants. Largement ouvert audébat d’idées et aux échanges d’expériences,il a invité les 45 Etats membres à ce Forum.

    Sa préparation a mobilisé un groupe de tra-vail mandaté par son Comité d’experts ennutrition, sécurité alimentaire et santé desconsommateurs, auquel j’ai eu l’occasion dereprésenter la Communauté française.

    La santé nutritionnelle des jeunes en EuropeAu niveau des chiffres, les résultats de l’en-quête HBSC 2 (Health Behavior inSchool-Aged Children) menée périodique-ment auprès des jeunes entre 11, 13 et 15ans dans plus de 35 pays d’Europe etd’Amérique du Nord, montre qu’un nombreimportant de jeunes ne suivent pas lesconseils nutritionnels actuels. De manièregénérale, la consommation de fruits et de

    légumes est relativement faible et diminuedans ces groupes d’âge.

    Par exemple, sur l’ensemble des pays, lepourcentage de jeunes qui déclarent man-ger des fruits tous les jours va de 38 % dansle groupe des 11 ans et 33 % dans le groupedes 13 ans à 29 % dans celui des 15 ans. Parrapport aux garçons, un plus grand nombrede filles déclarent consommer des fruits. Lesrésultats indiquent aussi que 30 % desélèves consomment des boissons sucréestous les jours dans de nombreux pays et

    2 “Young People’s Health in context”, rapport OMS, bureaurégional de l’Europe, juin 2004. Voir aussiwww.euro.who.int/youthhealth

    3 L’AFSCA a un numéro accessible au public pour répondreaux questions concernant la sécurité alimentaire,s’efforçant ainsi de nouer le dialogue avec leconsommateur. L’Agence organise les contrôles de lachaîne alimentaire, notamment auprès des collectivitésscolaires. Voir le site www.afsca.be

    4 V.Janzyk, A.Husdens, L.Berghmans, Evaluation d’unecampagne médiatique et mobilisation des relais sur lethème de l’alimentation, Observatoire de la Santé duHainaut, Revue Education Santé no 186, Bruxelles, janvier2004.

    Les médias font largement écho ces der-nières années à des questions liées àl’alimentation et pointent les mauvaisesplutôt que les bonnes habitudes alimen-taires des enfants et des jeunes. Le grandpublic est devenu particulièrement sensibleau sujet de la sécurité alimentaire et s’inté-resse à l’équilibre nutritionnel. Entémoignent par exemple les questions desconsommateurs à l’Agence Fédérale pour laSécurité Alimentaire (AFSCA) 3 ou encore lenombre important de brochures (plus de100.000) demandées suite à la campagneaudiovisuelle menée par l’Observatoire duHainaut depuis 2002 4.

    L’industrie alimentaire renforce ses offen-sives de marketing auprès des jeunes pourinfluencer leur choix de consommation. Deleur côté, les politiques – que ce soit auniveau communal, provincial, régional,communautaire ou fédéral - inscrivent lanutrition dans leurs priorités de santépublique et de promotion de la santé enciblant tout particulièrement la préventionde l’obésité.

    Les scientifiques étudient les désordresnutritionnels et se penchent sur les risquespour la santé qu’implique une alimentationdéséquilibrée. Les professionnels de santé

    s’inquiètent des habitudes alimentaires desenfants et des jeunes.

    Quant aux écoles, elles se mobilisent : depuis1999, près de 1200 écoles ont pris contactavec la Coordination Education et Santédans le cadre du programme “Midis à l’école-en parler pour changer” resituant les repasdans leur contexte et invitant au partenariat.Les acteurs et partenaires éducatifs, direc-tions d’école, enseignants, associations deparents, conseils de participation, services desanté scolaire (PSE et PMS), associationsactives dans le domaine de l’alimentation etde la promotion de la santé, déploient desefforts importants pour mettre le sujet àl’ordre du jour et lancer des actions.

    En termes de promotion de la santé nutri-tionnelle, les questions se centrent :

    - sur une identification plus ciblée desbesoins par les acteurs de projet ;

    - sur des stratégies collectives et participa-tives pour amener des changements depratiques alimentaires ;

    - sur les liens à susciter entre santé, estimede soi, activité physique et alimentation;

    - sur l’environnement nutritionnel ;- sur l’éducation aux choix favorables à la

    santé des enfants et des jeunes.

    La nourriture : un sujet sur la table

    1 La Belgique n’est pas en reste à ce sujet : plusieursinitiatives ministérielles (Midis à l’école, A table lescartables, campagne “Motivés.be”…) et des projetsfinancés par la Communauté française ont vu le jourdepuis 10 ans. Au niveau fédéral, tout récemment, laFondation Roi Baudouin en partenariat avec l’AFSCA aorganisé un Week-end de dialogue “citoyen” sur laquestion de la sécurité alimentaire. Le plan fédéral“Nutrition et santé” est en gestation.

    Strasbourg et après ?Un colloque pour améliorer l’alimentation à l’école et les choix sains des enfants et des jeunes

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    plus les garçons que les filles, toutes classesd’âge confondues. Quant au petit déjeunerqui est souvent la cible d’actions santé àl’école : l’étude internationale montrequ’entre 44 % et 89 % des jeunes de 11 ansle prennent quotidiennement avec une pra-tique plus répandue chez les garçons.

    Par contre, l’enquête met en évidence un faitpeu exploré et abordé jusqu’à présent àl’école et dans les lieux de vie des jeunes : lesgarçons comme les filles disent n’être passatisfaits de leur corps et suivre un régimemême si les filles sont beaucoup plus nom-breuses à déclarer qu’elles se trouvent tropgrosses, et qu’elles font un régime ouqu’elles estiment devoir perdre du poids. Cescomportements augmentent avec l’âge chezles filles. En Belgique francophone, plus de15 % des jeunes déclarent suivre un régimepour maigrir et surtout les filles en deuxièmesecondaire alors que pour plus de la moitié,ce n’est ‘objectivement’ pas nécessaire. 5

    La perception négative que les jeunes ont deleur corps semble largement présente selonl’enquête même si elle diffère fortement d’unpays à l’autre. Cet aspect devrait sans douteêtre plus exploré dans les projets relatifs àl’alimentation car il soulève la question del’estime et de la confiance en soi, facteurs

    dont l’importance dans la santé des jeunesest soulignée dans la charte des écoles pro-motrices de santé. Comme le souligne lerapport de l’ULB-Promes 6 analysant l’évolu-tion de ces données entre 1986 et 2002, “laconfiance en soi intervient comme un déter-minant fondamental des comportementsindividuels rencontrés chez les jeunes, que cesoit face à l’influence des pairs, à la rivalitéou à la capacité à faire face à de nombreusessituations problématiques, de même qu’à lagestion de comportements à risque”.

    les propres déclarations des adolescents desdifférents pays, près de 12 % des jeunesâgés de 13 à 15 ans souffriraient de sur-poids, dont 2 % seraient considérés commeobèses 7. Les garçons semblent plus enclinsau surpoids que les filles. Un adolescent de15 ans sur six serait en surpoids et cetteproportion passe à un sur trois dans les paysoù le surpoids est le plus fréquent 8.

    N’oublions pas que les Etats-Unisd’Amérique font partie des pays enquêtés etqu’il convient d’étudier les données natio-nales et même régionales quand il s’agit dedégager des priorités. Ainsi chez nous enBelgique, dans la partie francophone 9, lepourcentage de jeunes en surpoids semblediminuer de 16 à 13 % depuis 1994 pour lesgarçons de 13, 15 et 17 ans et semble resterstable chez les filles.

    Les données de cette même enquête indi-quent que quatre jeunes sur cinq ontdéclaré un poids qualifié de normal ; parcontre 5 % sont obèses et presque le mêmepourcentage (4,9 %) présente un déficitpondéral. Les chiffres indiquant un excès depoids (10 %) sont souvent utilisés à tort

    En Belgique francophone, plus de 15% des jeunes déclarentsuivre un régime pour maigrir et surtout les filles en deuxièmesecondaire alors que pour plus dela moitié, ce n’est ‘objectivement’pas nécessaire.

    Les données de poids et taille communi-quées par les jeunes pour cette enquêtepermettent un certain nombre d’observa-tions malgré les réserves d’interprétationque ce mode de collecte implique; d’après

    7 Communiqué de presse, OMS, Bureau régional del’Europe, Copenhague, Edimbourg, 3 juin 2004.

    8 Young I., Egberg Mikkelsen B., Barnekow Rasmussen V.,Healthy Eating at School : A European Forum, BritishNutrition Journal, 2004.

    9 Piette D. et al., op.cit.5 Piette D. et al., “La santé et le bien-être des jeunes d’âge

    scolaire”, ULB-Promes, Bruxelles, décembre 2003. 6 Piette D. et al., op cit.

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    pour parler de problème d’obésité et drama-tiser la situation au risque d’induire denouveaux comportements inadéquats derégime injustifié et une mauvaise percep-tion de son corps par le jeune et la jeunefille en particulier.

    L’enquête internationale montre qu’à l’âgede 15 ans, et ceci même dans le pays quiprésente les chiffres les plus bas, 38 % desjeunes filles déclarent faire un régime, oufaire quelque chose pour perdre du poidsou encore croient qu’elles devraient perdredu poids 10.

    Les jeunes Belges mangent-ilssi mal que cela ?En Belgique, par exemple, la situation estdifférente au Nord et au Sud du pays 11 : lesjeunes ont parfois de meilleures habitudesalimentaires d’une région à l’autre. Parexemple, 83 % des jeunes garçons flamandsde 11 ans disent prendre un petit déjeunertous les jours scolaires contre 77 % chez lesfrancophones; 56 % des filles du même âgedisent consommer des légumes chaque jour(le plus haut pourcentage des 35 pays!)contre 44 % chez les filles francophones.Pour ce type de consommation, la Flandrevient en tête par rapport aux autres pays etceci également pour les filles et garçons de13 et 15 ans. Les francophones, eux, sesituent en 6e place pour les 11 ans et en 4e

    et 3e place pour les 13 et 15 ans dans ce pal-marès de consommation de légumes entrepays ; par contre, pour les fruits, les pour-centages sont nettement plus bas, 27 % desjeunes garçons flamands de 11 ans disentconsommer des fruits une fois par jourcontre 39 % chez les francophones. A 15ans par exemple, une fille sur 2 au moinsdéclare manger un légume tous les joursdans ces deux régions tandis que pour lesfruits, c’est le cas pour une adolescente sur3 (entre 28 et 35 %).

    Si ces chiffres donnent quelque peu le tour-nis, ils ont le mérite cependant de nuancerla réalité et de différencier les comporte-ments alimentaires et de santé selon lesâges. Des données certes utiles à analyseravant de se lancer dans des campagnes àl’échelle locale ou nationale.

    Et pourquoi pas, au niveau d’une école, s’in-former auprès des jeunes de leurs habitudesalimentaires avant de décider (ensemble!)par exemple de faire un petit déjeuner ou de

    mettre sur pied un projet de collationssaines. La démarche prônée par les écolesen santé, les organisateurs et bon nombrede participants du colloque de Strasbourgencourage ce principe fondamental detoute action de promotion de la santé àl’école, à savoir la participation des enfantset des jeunes dans l’élaboration de projetsen lien avec leurs besoins de santé. Elleprône également d’aménager des environ-nements favorables et de donner auxenfants et aux jeunes l’occasion d’exercerleur compétence de choix “santé”.

    Une grande diversité de pratiquesDans un premier temps une enquête 12 a étéfaite afin de dresser un panorama européendes différentes pratiques en matière d’offrealimentaire à l’école. Cette étude a permisd’observer les liens avec l’éducation nutri-tionnelle dans les écoles primaires etsecondaires et d’analyser dans quellemesure ces deux pratiques s’inspirent d’uneapproche globale de promotion de lasanté 13. En conclusion, l’enquête a pointéles défis à relever pour arriver à une offrealimentaire saine dans l’école : - susciter l’intérêt pour une alimentation

    saine de la part des parents, des élèves,des enseignants et des acteurs commu-nautaires et politiques ;

    - favoriser un environnement scolaire sain,une éducation aux choix alimentairessains et l’activité physique dans la luttecontre le surpoids et l’obésité 14;

    - intégrer l’éducation pour une alimenta-tion équilibrée dans une approche scolaireglobale ;

    - établir des partenariats pour promouvoirdes choix alimentaires sains dans lesécoles ;

    - concevoir des systèmes de suivi et d’éva-luation simples, pratiques et participatifsconcernant l’offre alimentaire dans lesécoles.

    Les résultats de cette enquête ont été pré-sentés aux 178 participants de près de 27pays différents. Des élèves, des parents, deschercheurs, des responsables politiques, desproducteurs, des représentants du secteursanté ont échangé durant 2 jours sur ladiversité des réalités dans les écolesd’Europe mais aussi sur les priorités de cha-cun. Les élèves, par exemple, ont installé unforum par Internet et rapporté en séance lespréoccupations des jeunes telles que l’envi-ronnement des repas, le choix de musique,les repas style buffet, les saveurs d’autrespays, l’accès gratuit en classe à des fruitsfrais et de l’eau, ou encore avoir l’occasionde travailler dans les cuisines.

    L’offre alimentaire à l’école et l’implicationde l’Etat, des autorité régionales ou localesvarient fortement d’un pays à l’autre 15.Dans certains pays, la pratique du repaschaud est inconnue; dans d’autres, lepique-nique est une exception. La diffé-rence se marque aussi entre le système derepas à l’école primaire ou à l’école secon-daire où il est plus “dispersé”, les élèvesayant accès à des cafétérias, des distribu-teurs de sodas ou d’aliments sucrés, en plusdes repas chauds ou des pique-nique. Lesdistributeurs de sodas sont interdits dansplusieurs pays à l’école primaire.

    Les politiques nationales ou locales sontaussi variables 16: en Finlande, par exemple,les communes reçoivent des fonds natio-naux pour assurer des repas gratuits àl’école. Certains pays comme la Lituanie oule Royaume-Uni ne subsidient que les repaspour les groupes défavorisés. Douze payssubsidient des programmes pour du lait oudes fruits et légumes, parfois avec le soutiende l’Union européenne, des producteurs etdu Ministère de la Santé. Plusieurs pays ontdes politiques actives pour rendre laconsommation de fruits et légumes plusaccessibles aux enfants et aux jeunes.

    Les pratiques pour améliorer l’alimentationà l’école sont donc tout aussi diversifiéesmais des obstacles ont été identifiés à tra-

    15 voir à ce sujet, Mikkelsen B.E., The role of school foodservice in promoting healthy eating at school- aperspective from an ad hoc group on nutrition in schools,Council of Europe.

    16 Young I Ed., Rapport du forum européen surl’alimentation à l’école-Faire le choix de la santé. Conseilde l’Europe, Strasbourg, 2004.

    12 De Boer Fanny, L’alimentation à l’école, une étudeeuropéenne, Actes du Forum, Conseil de l’Europe,Strasbourg, nov 2003.

    13 Telle que définie dans le document du Conseil del’Europe, il s’agit d’une approche scolaire globale :approche de la promotion de la santé à l’école qui estaxée non seulement sur le programme officiel, mais quiintègre aussi des aspects plus larges de la vie scolairecomme les relations entre l’école et les parents et entrel’école et la communauté locale, la fournitured’alimentation, l’environnement scolaire et les politiquesd’alimentation saine. Cette approche reconnaît qu’on nepeut considérer la nutrition isolément pour comprendreun problème tel que l’obésité ou l’insuffisance pondéralemais qu’il importe d’examiner le degré d’activitéphysique, les facteurs sociaux, la santé émotionnelle, letabagisme ou la prédisposition génétique. Voir aussi lesite de l’OMS Europe et plus particulièrement celui duRéseau des Ecoles Promotrices de Santé.(www.euro.who.int/enhps).

    14 Surpoids et obésité : comme il est difficile de mesurerdirectement la graisse corporelle, un indice de massecorporelle, qui est un simple rapport du poids au carré dela taille (kg/m2) sert pour classer les adultes obèses et ensurpoids. L’OMS a publié des normes internationalesselon lesquelles il y a obésité lorsque l’indice est auminimum de 30kg/m2. Le Groupe spécial international surl’obésité. (IOTF) a maintenant proposé une versionmodifiée du seuil précité pour pouvoir appliquer ladéfinition aux enfants. Le surpoids se définit par unindice de masse corporelle de 25 à 30 kg/m2.

    10 Maes L., Les comportements liés à la santé et la nutritionchez les enfants d’âge scolaire, Actes du Forum européen“L’alimentation à l’école : faire des choix sains”, Conseilde l’Europe, Strasbourg, nov. 2003

    11 Rapport de l’enquête 2001-02, Young People’s Health inContext, www.hbsc.org

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    vers l’Europe : le peu de priorité accordé àune alimentation saine; des environne-ments scolaires inappropriés à des repassains ; un encadrement scolaire peu motivéou trop débordé pour prêter attention ausujet : un suivi et une évaluation des sys-tèmes de repas et de restauration peudéveloppés.

    RecommandationsCes éléments ainsi que les échanges et pro-positions lors du Forum 17 ont donné lieu àdes recommandations développées par legroupe de travail, qui préconise au niveaunational : une révision des pratiques d’ali-mentation à l’école et de leur cohérenceavec une approche de promotion de lasanté, l’élaboration de lignes directrices etde normes nutritionnelles pour les repas àl’école et enfin, l’étude de mesures d’aide auniveau national et régional pour soutenirles écoles.

    Le Comité d’Experts en nutrition et santé duconsommateur ainsi que le Comité de santépublique du Conseil de l’Europe examinentune proposition de résolution qui pourraitalors être adoptée par le Comité des

    Ministres du Conseil de l’Europe et commu-niquée aux Etats membres avec une série demesures adaptables à chaque contexte envue de promouvoir des choix sains enmatière d’alimentation à l’école.

    Cela offrira un cadre de travail pour établirdes politiques nationales tout en donnant deséléments concrets de stratégies et dedémarches pour arriver à promouvoir desrepas et une alimentation saine à l’école. Celaencouragera à poursuivre les efforts entreprisen ce sens en Communauté française etnotamment par le soutien à des programmestels que les “Midis à l’école”, l’opération “Atable les cartables”, la campagne “lesMotivés.be”, ainsi que d’autres campagnes etorganismes du secteur associatif et institu-tionnel actifs dans la promotion decomportements alimentaires sains et dechoix plus favorables à la santé de chacun.

    La priorité accordée au milieu scolaire estinscrite dans le nouveau programme quin-quennal de promotion de la santé duGouvernement 18. N’oublions pas que prèsde 50 % du temps d’éveil des enfants et desjeunes s’écoule en milieu scolaire et qu’un àtrois repas sur la journée incluant les colla-tions de 10 heures et de 4 heures pourcertains se passent à l’école.

    L’importance de cette résolution est à lamesure de l’enjeu : une évolution favorablede la santé des 100.000.000 d’écoliers euro-péens. Comme le souligne la Charte duRéseau européen des écoles promotrices desanté, une alimentation inadéquate àl’école n’est pas compatible avec la philoso-phie d’une école en santé englobantl’ensemble de la vie à l’école et pas seule-ment, l’apprentissage et l’enseignement enclasse!

    Cristine Deliens, Coordination Education &Santé-CORDES asbl

    Adresse de l’auteure : CORDES, chaussée d’Alsemberg 284, 1190 Bruxelles.Tél et fax : 02 538 23 73 Courriel : [email protected]

    Un adolescent de 15 ans sur sixserait en surpoids et cetteproportion passe à un sur troisdans les pays où le surpoids est le plus fréquent

    17 Actes du Forum Européen, www.coe.int/soc-sp,Strasbourg, 2003 18 Voir l’article présentant le Programme dans ce numéro.

    1 Institut scientifique de santé publique, www.iph.fgov.be

    Un problème important qui mérite plus d’attentionSelon l’OMS il est estimé que – hors situa-tion de guerre - plusieurs centaines demilliers de personnes sont tuées chaqueannée par les armes à feu.

    Les traumatismes par arme à feu sont devenusun réel problème de santé publique contrelequel il faut lutter pour diverses raisons : - c’est un problème important, facteur de

    mortalité et de morbidité ;- c’est un problème vulnérable contre lequel

    on peut agir et pour lequel il existe dessolutions efficaces ;

    - c’est un problème qui occasionne descoûts élevés pour la société.

    Un problème importantLa problématique des traumatismes pararme à feu, longtemps ignorée par notresecteur, ne bénéficie pas d’une largeconnaissance ni même d’une surveillancesystématique. Pourtant les chiffres dontnous disposons sont accablants 1.

    En Belgique, en 1996, il y a eu 383 décès pararme à feu. Plus de 70 % de ces décès sontdes suicides et 15 à 20 % des homicides.

    En moyenne, 90 % des suicides par arme àfeu sont commis par des hommes. Le grouped’âge le plus touché est celui des 20-39 ans.

    L’arme à feu utilisée dans le cadre du suicideest un moyen très efficace. En effet, avec une

    La prévention des traumatismes par arme à feu

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    arme à feu le taux de létalité est de 92 %alors qu’il est de 35 % avec des médicamentset de 10 % avec un instrument coupant.

    Dans notre pays, l’arme à feu est le troisièmemécanisme utilisé pour se suicider au sein dela population générale mais devient le secondmoyen parmi la population masculine.

    Des populations sont davantage concer-nées par les traumatismes par arme à feu :les policiers, transporteurs de fonds, agentsde sécurité... qui, par leur profession, sontconstamment en présence d’une arme àfeu. Pensons également aux personnes quidans le cadre de leurs loisirs manipulentune arme à feu, comme les chasseurs et lestireurs sportifs.

    Un problème vulnérableUn problème est considéré comme vulnérablelorsqu’il existe des moyens pour le résoudre.

    En ce qui concerne les traumatismes pararme à feu il y a des solutions efficacespour les éviter, notamment réduire la pré-sence d’une arme à feu au domicile, limiterl’accès à l’arme.

    Limiter l’accès à l’arme

    Empêcher le particulier de se procurer unearme à feu permet de diminuer le nombrede traumatismes par arme à feu. Onconstate en effet que c’est dans les pays oùla législation relative aux armes à feu est laplus stricte que le taux de traumatismes pararme à feu est le plus faible (au Royaume-Uni par exemple).

    Eviter la présence d’une arme à feu au domicile

    De nombreuses études ont démontré l’asso-ciation entre la présence d’une arme à feuau domicile et les traumatismes qu’elle peutengendrer 2.

    Le fait de posséder une arme à feu à la mai-son multiplie par 5 le risque de suicide etpar 3 le risque d’homicide.

    La plupart des accidents par arme à feu tou-chant les enfants sont liés à la présenced’une arme au domicile.

    Au Canada comme aux Etats-Unis c’est dansles régions où le taux de possession d’arme àfeu est le plus élevé que le taux de trauma-tisme par balle est également le plus élevé.

    En fait si le propriétaire d’une arme pense seprotéger en gardant celle-ci à domicile il y a43 fois plus de chance qu’il l’utilise contrequelqu’un de sa famille plutôt que contreun agresseur!

    Un problème coûteuxLes coûts occasionnés par les traumatismespar arme à feu sont élevés.

    Au Canada les coûts annuels attribuablesaux décès et blessures par arme à feu ontété estimés à 6 billions de dollars 3.

    En Belgique, faute de données, on ne peutévaluer un tel coût.

    La prévention des traumatismespar arme à feuLes stratégies visant à réduire les trauma-tismes par arme à feu combinent l’éducation,la réglementation et la technique

    L’action préventive se situe à 3 niveaux :l’accès à l’arme à feu, la présence de l’armeau domicile, le rangement de l’arme dans unlieu sûr.

    L’accès à une arme à feuC’est essentiellement la législation qui apour rôle de contrôler et limiter l’accès auxarmes à feu en Belgique. La législationactuellement en vigueur est hélas troplaxiste : les armes de chasse et de sport sonten vente libre, les marchés parallèles sonttrès bien implantés dans le pays et permet-tent à tout individu d’acquérir une ouplusieurs armes.

    Renforcer la législation dans le sens d’uneplus grande rigueur serait une solution pro-metteuse.

    Plaider en ce sens auprès des instances poli-tiques concernées afin de les sensibiliser àcette problématique est une étape essen-tielle si on veut aboutir à un changementdans la législation.

    La présence de l’arme à feu au domicileEviter la présence d’une arme à feu audomicile semble être une mesure préventivelogique.

    Il faut donc envisager de sensibiliser lespropriétaires aux risques associés à la pré-sence de l’arme afin qu’ils prennentconscience que garder une arme à la maisonest un danger permanent pour toute lafamille. Il faut aussi les inciter à s’en séparers’ils n’en ont pas l’usage.

    De même, sensibiliser l’entourage (aussibien la famille que les professionnels de lasanté) d’un dépressif, d’une personne vio-lente est important. Tout intervenant,lorsqu’il est en présence d’une personnemontrant des signes de dépression, de ten-dance suicidaire ou une prédisposition à la

    violence, doit notamment chercher à savoirsi cette personne a accès à une arme à feu.Il est parfois utile qu’un proche veille à reti-rer l’arme à feu du domicile.

    La législation prévoit la suspension ou leretrait de l’autorisation de détention d’armeà feu lorsque la détention d’arme risque deporter atteinte à l’ordre public.

    Le rangement de l’arme dans un lieusûr et le port de l’armeLorsque le propriétaire d’une arme se trouvedans l’obligation de la garder au domicilepour des raisons professionnelles ou lors-qu’il ne souhaite pas s’en débarrasser, il estalors très important que l’arme soit entre-posée dans un lieu sécurisé.

    En clair cela veut dire : - conserver l’arme à feu en tous temps dans

    un endroit hors de portée des enfants :l’arme doit être inaccessible ;

    - conserver une arme à feu non chargée etverrouillée : l’arme doit être inopérante;

    - conserver les munitions dans un endroitdifférent de celui où se trouve l’arme;

    - entretenir ou manipuler l’arme après avoirvérifié qu’elle n’est pas chargée.

    - en cas d’absence, enfermer l’arme à feudans une armoire résistant à l’effraction etconserver les clés en lieu sûr.

    Dans la législation belge on trouve quelqueséléments portant sur le rangement del’arme notamment sur le transport de l’armeentre le domicile et le stand de tir ou le lieud’activité, le port de l’arme au stand de tir.

    La technologie permet également d’amélio-rer le rangement de l’arme. Il existe en effetdes dispositifs de verrouillage des armes.

    De même il est possible de rendre le portd’arme plus sûr : en effet, certaines armesdisposent d’éléments de sécurité incorporésqui permettent d’éviter les tirs accidentels.

    Projet de prévention destraumatismes par arme à feuen Communauté françaiseL’asbl Educa-Santé de Charleroi comptedévelopper un projet de prévention des trau-matismes par arme à feu dans le cadre deson programme quinquennal 2004-2009.

    La finalité de ce projet est de réduire lesrisques de traumatismes par arme à feu.

    Les objectifs poursuivis sont les suivants :- informer et sensibiliser les propriétaires

    d’arme à feu et leur entourage sur lesrisques associés aux armes à feu;

    - inciter les personnes qui n’ont pas usagede leur arme à s’en séparer ;

    - promouvoir et encourager l’achat de sys-tèmes de verrouillage pour les armes à feu;

    2 N. ARYA, ‘Confronting the small arms pandemic,unrestricted access should be viewed as a public healthdisaster’ British Medical Journal, 2002; 324 :990-991

    3 Coalition pour le contrôle des armes à feu,www.guncontrol.ca

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    - informer et sensibiliser les intervenants de lasanté et des services sociaux sur les risquesassociés aux armes à feu et sur les moyenspermettant de réduire l’accès aux personnesdépressives, suicidaires, violentes.

    Pour réaliser un tel projet Educa-Santé arecours à des stratégies d’action intersecto-rielle nationale et internationale,d’information et de développement desaptitudes individuelles.

    Dans ce but, Educa-Santé a déjà développédes partenariats avec différents secteursnotamment : - le Secrétariat permanent à la Politique de

    prévention;- les contrats de sécurité et de prévention de

    plusieurs villes de Communauté française;

    - les services d’assistance policière auxvictimes ;

    - les zones de police.Les membres de ces secteurs ont déjà eul’occasion d’être sensibilisés à la probléma-tique des armes à feu lors d’un débat sur laprévention du suicide par arme à feu orga-nisé en novembre 2002 à Charleroi enprésence de Robert Simon directeur ducentre de prévention du suicide deChicoutimi au Québec.

    La prévention des traumatismes par arme àfeu s’inscrit dans le cadre d’un projet plusvaste de promotion de la sécurité.

    A ce titre, l’asbl Educa-Santé a organisé enjuin 2004 une journée de formation sur lethème de : ‘l’amélioration de la sécurité par

    milieu de vie’. Cette journée était animéepar Pierre Maurice et Renée Levaque del’Institut national de santé publique duQuébec.

    De plus, Educa-Santé se propose de publierun guide de ‘sécurité dans les milieux de vie’destiné aux Communes. Ce guide présenteune stratégie visant à améliorer la sécuritéde la population et aborde la sécurité dansune approche globale.

    Martine Bantuelle et Marie-Christine VanBastelaer, Educa-Santé

    Adresse des auteures : Educa-Santé, avenue Général Michel 1b, 6000 Charleroi.Tél.: 071 30 14 48. Fax : 071 31 82 11. Site : www.educasante.org

    2 Cf. p.9 d’Agir en promotion de la santé : un peu deméthode..., 1997.

    1 Cf. p.8-9 d’Agir en promotion de la santé : un peu deméthode..., 1997, ainsi que la p. 91 de Education pour lasanté, « Education pour la santé et promotion de la santé ».

    De l’éducation pour la santé à la promotion à la santé

    1997 marque l’entrée officielle, décrétalemême, du concept de promotion de la santéen Communauté française. D’éducateurspour la santé, de nombreux professionnelssont devenus par la magie des mots « pro-moteurs de la santé », avec une extensionthéorique de leur champ de compétencequi donne le vertige.

    Au fil des années, cette mutation et lesconcepts qui l’accompagnent ont soulevébien des interrogations. Soucieux de quitterquelques instants nos préoccupations opé-rationnelles, de prendre un peu de recul parrapport à nos pratiques quotidiennes, leService communautaire de promotion de lasanté – asbl Question Santé a sollicité unregard extérieur au secteur de la santé, celuide la philosophie. Voici donc la trace écritelaissée par des entretiens libres au cours des-quels Samantha Crunelle, philosophe, apartagé avec nous divers questionnements.Ces quelques réflexions exigeront sans douteun petit effort de la part du lecteur, maisnous pensons que cela peut être fécond.

    Le premier article présente quelquesnotions fondamentales, le second, àparaître prochainement, s’intéressera auconcept incontournable (mais l’est-ilvraiment ?) de la participation.

    SCPS – Question Santé

    Dans une étude réalisée en 2001 par leMinistère des Affaires économiques, l’Etatbelge posait la question suivante à nos com-

    patriotes : « Etes-vous en bonne santé ? ».Nous avions pour tout choix de réponse uneéchelle d’appréciation allant de bonne santé àfaible santé, en passant par moyenne santé.

    Nombreux sont ceux qui, déconcertés, hési-tèrent avant de répondre en toutehonnêteté à cette question du recensement.

    De la santé...Cette question posée, parmi tant d’autres,pouvait sembler très simple, voire triviale.Mais derrière l’évidence apparente, elle nerenvoyait pas moins d’une part, à considérerpour chacun quel était son état de santé etd’autre part, par conséquent, à pouvoir défi-nir ce que pouvait bien être la santé à unmoment donné de l’histoire de notre platpays... Questions de santé qui nous fontparfois prendre conscience de l’abîme d’im-précisions, de réponses toutes faites oud’absence de réponses sur ce sujet.

    La question de la santé, et de la santépublique, s’avère bien entendu complexe,malgré les essais de définitions, donnéesentre autres par les dictionnaires, les spé-cialistes et chartes diverses sur le sujet 1. Deces diverses définitions, on peut néanmoinsdégager un tronc commun, un commundénominateur et envisager quelles en sontles implications pour la promotion de lasanté et quelles questions cela soulève.

    On sait que « la santé » ne recouvre pasqu’une étendue biomédicale et qu’elleimplique le contexte socioculturel ainsi quetout le contexte subjectif de « niveau de vie ».Déjà, on se trouve devant une dimension sienglobante que cette notion peut redevenirfloue, imprécise, voire décourageante.

    Comme il ressort de diverses lectures, lanotion de santé est à mettre en parallèleavec celle de changement 2. En effet, la santéest changeante, fluctuante, et nos concep-tions et appréciations envers elle sont àchaque fois à réaménager, car la vie est elle-même dotée des mêmes atouts demodification et de mouvement. Mais enmême temps, on sait que tout systèmehumain ou simplement vivant tend à l’ho-méostasie, à l’harmonie. On se trouve icidevant un des nombreux aspects paradoxauxde la santé : elle tend à être réconciliation duchangement et de l’harmonie, « tout simple-ment »… Cette dualité montre à quel point lasanté est une notion en perpétuelles ten-sions, qui porte en elle deux dimensionsinconciliables et qui pourtant vont de pair.

    ...à l’intelligenceMais ce dualisme montre aussi que la santéa peut-être un synonyme peu connu, celuid’intelligence. En effet, n’est-ce pas unedes définitions de l’intelligence que « lacapacité à utiliser au mieux ses potentiali-

    RÉFLEXIONS

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    tés dans une adaptation modulée au mondeextérieur », qu’on peut aussi appliquer à lasanté 3 ? Il est dès lors intéressant de tra-vailler la santé à l’aide de cette mise enavant de l’intelligence.

    Cette approche permet de faire comprendreaux gens, dans le domaine de la promotion dela santé, qu’il existe une sorte de “quotientintellectuel” de santé et que le travailler, lerespecter c’est aussi le réalimenter. Elle estégalement pertinente dans la démarched’« alarme » aux populations : « c’est uneaffaire d’intelligence publique, voire mon-diale, et puisque nous savons que vous n’êtespas stupides, nous vous en faisons partcomme aux spécialistes, afin que vous réagis-siez de la façon la plus sage qui soit…».

    Dans cette notion de la santé « adaptative », lecaractère d’activité est à souligner. La santéne semble pas être un état d’équilibre obtenude manière passive : cette finalité (éphé-mère ?) n’est pas inerte mais dynamique; apriori, elle veut vivre, elle est, comme tout êtrevivant, une vie voulante, concept schope-nauerien qui lui colle bien à la peau.

    Et ce que déclarait déjà Schopenhauer, àsavoir que toutes ces « vies voulantes » enarrivaient toujours à s’entrechoquer, à gri-gnoter sur la santé de l’autre, peut être unargument contemporain aux détracteurs del’éducation à la santé : à quoi sert d’édu-quer les gens à la santé alors qu’il s’agitd’une affaire fataliste, qu’il y en aura tou-jours qui s’en sortiront mieux que d’autres,car ils sont plus malins et qu’ils utilisent lesmeilleurs moyens ?

    Une remarque encore serait pour souligner lepréjugé fallacieux (?) du caractère naturel dela santé : celui qui considère que, de toutefaçon, la santé est une affaire innée, natu-relle, qui s’autorégule d’elle-même sans avoirbesoin d’assistances extérieures, sinon trèspeu, car tout ou presque est désignéd’avance. Que rétorquer à ce genre d’argu-ment ? Que faire sinon savoir qu’on ne jouerapas le jeu de la promotion de la santé avecceux qui tiennent ce type de discours ?

    Cette digression à caractère déterministepeut en amener une autre, plus fondée peut-être : comment s’inscrire dans la promotionde la santé qui représente, pourrait-on dire,une démarche « de gauche », dans des socié-tés ouvertement plus libéralesqu’auparavant, où l’individu tend à primersur la collectivité, où l’individu entend deplus en plus se considérer comme un électronlibre dans une société qu’il envisage pluscomme un canevas où déambuler quecomme un filet de soutien à lui-même et aux

    autres ? Est-il encore réaliste de promotion-ner cette vision solidaire de la santé ?

    Les limites de la démarcheholistiqueCeci nous amène à examiner une dimensionprimordiale de la promotion de la santé, sadémarche holistique. « Holisme : expliquer lesphénomènes de manière globalisante à partird’une prédominance du Tout sur les parties » 4.On est clairement dans une « prise de vue » 5

    qui démarre de l’horizon pour aboutir à unélément de cet horizon, élément qui devrait setrouver par là éclairci et clarifié. J’insiste unefois encore sur le fait que cette « prédomi-nance du Tout » n’est plus tout à fait à la modeaujourd’hui... mais continuons.

    Il est incontournable d’étudier la santé àl’aide de ce présupposé, à savoir qu’elle estun élément en rapport avec tant d’autres quine sont pas toujours de même nature, maisqu’on ne peut ignorer pour ne pas fournir uneapproche biaisée du phénomène.

    Cette prise en compte globale et systé-mique, très à la mode dans les domainesscientifiques (que ce soit en sciences éco-nomiques avec la systémique de gestion, ensciences sociales depuis longtemps…) etnon scientifiques (en psychologie avecBateson et toute l’école de Palo Alto, enphilosophie depuis le vieux rêve deDescartes en passant par Nietzsche et sagénéalogie, Foucault, Deleuze et sa philoso-phie du rhizome ou réseau, à Bruno Latouret sa construction d’un collectif) est aujour-d’hui inévitable si on veut présenter uneétude digne de ce nom. Mais elle est por-teuse de nombreuses difficultés.

    Premièrement, la tâche s’avère gigantesque,presque infinie, si on ne décide pas d’arrêterson regard à un moment donné. En effet, sile chercheur ne veut pas se limiter à poserdes questions sans y apporter de réponses, ilfaut bien qu’à un moment donné, il arrêteson investigation, son « champ d’imma-nence » pour s’atteler à le travailler demanière fertile. Pas simple.

    En outre, cette prise en compte de diversfacteurs en relation avec la santé, mais nonreliés directement les uns aux autres, nerisque-t-elle pas de paraître artificielle,simulée ? Ne tombe-t-on pas, comme pourla santé, dans une définition si large 6, auxinfinies ramifications, que l’on se dit qu’il

    faut vite arrêter ce concept aux casconcrets envisagés ? Et dès lors, le conceptde santé varierait-il au gré des cas étudiés,ce qui en deviendrait à nouveau paradoxal ?

    Il est un fait certain : le novice, voire le pro-fane, trouvera ces concepts trop abstraits« dans l’absolu ». Si on prend les notionsintroduites dans la charte d’Ottawa parexemple, elles ne deviennent prenantes etsignifiantes qu’en les appliquant à des castangibles, à des projets matériels, des pro-blématiques et des mesures concrètes.

    Nous entrons alors dans la problématique(encore une) des démarches propres à toutcollectif se rapportant à la santé.

    Légitimité des acteurs et méthodes de la promotionde la santéEn promotion de la santé, il est question depromotion ou d’éducation pour autrui(autrui étant soit un individu, soit un public,soit encore une masse). Le problème qui sepose est celui de la décision pour autrui :les promoteurs de santé ou éducateurs à lasanté doivent en effet prendre la décisiond’informer, d’éduquer ou de présenter uneproblématique de santé privée ou publique,alors que la ou les personnes concernées oupouvant être concernées... ne le sont juste-ment pas, ne se sentent pas concernés. C’estdonc d’une part la question de la responsa-bilité de ces « hauts parleurs » de santé quiest soulevée, celle aussi de leur bien-fondé,de leur altruisme, de leur finalité. Ces édu-cateurs ou promoteurs de la santéseraient-ils des « révélateurs » de faitscachés, « pénombrés »?

    Toutes les questions éthiques de la diffé-rence entre ce que l’on ne (nous) dit pas, ceque l’on ne sait pas et ce que l’on ne veutpas savoir se posent ici avec acuité 7.

    Et en ce qui concerne les méthodes, la promo-tion de la santé procède parfois par descampagnes de communication. Si lesméthodes utilisées s’avèrent dotées desmêmes attributs de conviction que la publicitécommerciale, comment l’individu, la sociétéou la masse doivent-ils réagir face à une com-munication paradoxale de deux messagescontradictoires sur un même sujet traité ?Peut-être serait-il judicieux, pour bien faire ladifférence, d’effacer justement celle qui existeentre promotion de la santé et publicité enrevenant au sens premier de publicité, celuidonné par Kant : rendre public, au plus grandnombre afin d’éveiller les consciences etrendre l’homme maître de lui-même...

    3 Ibid.7 Cf. le « droit de ne pas savoir » en bioéthique, sur les

    maladies familiales par exemple.

    4 Dictionnaire Le Robert, c’est moi qui résume et quisouligne.

    5 Je reprends la définition de ce qu’est « être de gauche »selon Gilles Deleuze dans son abécédaire.

    6 Cf. la définition de la communication de l’école de PaloAlto : « la communication est la matrice dans laquellesont enchâssées toutes nos activités »; ou encore « unindividu ne communique pas, il prend part à lacommunication dès sa naissance » (!)

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    Les êtres humains sont-ils dès lorscondamnés à la santé, voués à s’arracherde la Caverne afin de vivre bien ? Nousretombons dans la problématique du librearbitre qui se trouve doublée de la diffi-culté de la démarche globalisante à

    adopter : l’individu (société, masse)devrait-il se rendre compte de l’étendue dela démarche holistique ainsi que de latotalité de l’impact de la santé afin de« choisir une bonne direction de santégénérale et holistique »?

    Nous entrons ici dans une autre probléma-tique inhérente à la promotion de la santé,celle de la participation. Nous y revien-drons dans un second texte.

    Samantha Crunelle

    1 Education Santé n’est probablement pas le meilleurendroit pour vider une polémique de ce genre. Pour votrebonne information, disons simplement que NicoleMaréchal s’est exprimée à ce sujet dans Le Journal dumédecin, et qu’elle rejette les critiques formulées parCatherine Fonck. Nous renvoyons ceux de nos lecteursque cela intéresse aux deux articles ‘Des cadavres dansles placards’, de Vincent Liévin et Vincent Claes (no 1611 du3/9/2004) et ‘Tempête budgétaire autour de 585.000euros’, de Vincent Liévin (no 1614 du 14/9/2004).

    2 Voir la présentation du ‘Programme quinquennal depromotion de la santé 2004-2008 de la Communautéfrançaise Wallonie-Bruxelles’ dans ce même numéro.

    Synergie, recentrage et cohérence. Tels sontles leitmotive de la nouvelle ministre de laSanté à la Communauté française,Catherine Fonck, pour qui une politiqueefficace de prévention et de promotion de lasanté à l’échelle de la Communauté passepar la redéfinition de priorités budgétaire-ment réalistes.

    Le secteur de la santé a besoin de cohérencenon seulement au niveau de l’exercice descompétences de la Communauté française,mais aussi entre les actions menées par lesdifférents niveaux de pouvoir, afin de définirles grands axes d’une politique efficace deprévention des risques de santé. Ainsi s’ex-prime Catherine Fonck, nouvelle ministre dela Santé en Communauté française, dans sanote d’orientation politique en août dernier.

    « Il y a beaucoup trop de ministres de lasanté », estime Catherine Fonck. « Il y aaujourd’hui moins de ministres, c’est déjàbien, maintenant l’idéal aurait pu êtred’avoir des ministres de la santé qui soientréunis. Ceci étant, compte tenu du décou-page politique belge, je pense qu’en matièrede santé, il est essentiel de travaillerensemble. L’important, c’est la cohérencedans le travail, c’est d’avoir une approche desanté qui soit transversale entre les diffé-rents niveaux de pouvoir. »

    Et de donner l’exemple du Plan Nutritionlancé tout récemment par le ministre fédéralde la Santé Rudy Demotte. « Chapeauter lesactions au niveau fédéral est une démarchetrès positive qui permet une approche glo-bale, une couverture plus large et uneefficacité plus importante », commente laministre qui rappelle que l’essentiel « est ceque chacun peut finalement en tirer entermes de réduction d’incidence et de préva-lence des maladies (obésité, diabète,maladies cardiovasculaires…) et en termesde mortalité et de morbidité. »

    Sus à la dispersion, place au recentrage« La dispersion est quelque chose qui m’afrappée quand je suis arrivée ici », raconteCatherine Fonck. « Je crois qu’à partir de cemoment-là, il y a des recouvrements ouencore des choses qui ne sont faites qu’àcertains endroits, et je pense qu’en termesd’efficacité à l’échelle de la Communautéfrançaise, on y perd. La promotion de lasanté et la prévention sont un travail à longterme. Mais qui dit politique à long terme ditpolitique logique avec une couverturelarge. » La ministre prône donc un « recen-trage » des priorités de santé publiquecorrespondant aux capacités budgétaireslimitées de la Communauté, mais elle tientà ajouter : « On ne va pas tout changer en unjour parce que derrière tous les projetslocaux, il y a une motivation, un dynamisme,des gens qui sont structurés. Mais peut-êtrequ’à partir de ces projets, il y a des pistespour avoir une approche plus large, àl’échelle de la Communauté française. C’estmon objectif. Tout en respectant et valori-sant toutes ces associations qui font untravail de terrain et qui ont un investisse-ment personnel important et déjà toute uneréflexion. Ce sont des acteurs essentiels auniveau de la promotion de la santé. »

    Mais... Première pierre d’achoppement pournotre nouvelle ministre, ces associations seplaignent, justement. Selon Catherine Fonck,plusieurs d’entre elles auraient reçu durant lemois de juillet un avis favorable de l’ancienneministre en charge de la Santé pour laCommunauté française, Nicole Maréchal,pour toute une série de projets, alors que lesdossiers n’avaient pas suivi la procédurelégale, n’étaient pas passés par l’Inspectiondes Finances et chez le ministre du Budget 1.« Par ailleurs, des réponses favorables ont étédonnées là où le Conseil supérieur de promo-

    tion de la santé (CSPS) et l’Administrationavaient donné des avis défavorables »,explique encore la ministre. « Enfin, elle adonné un feu vert largement au-delà de cequ’il lui restait comme budget pour 2004, cequi représente un dépassement de 350 à400.000 euros. Nous avons donc fait la listedes associations pour lesquelles il y a un grossouci, pris contact avec elles, et leur avonsexpliqué ce qui s’était passé. Une décisiondevrait être prise rapidement », affirmeCatherine Fonck qui conclut : « Faire croireque c’est Saint-Nicolas et qu’on va délivrerbeaucoup plus, c’est aussi faire beaucoup dedéçus au bout du compte. Donc je pense quece n’est pas travailler de façon responsable. »

    Pour une efficacité à l’échellede la CommunautéUne chose est claire : c’est sur base de don-nées objectives de santé publique queCatherine Fonck compte redéfinir des priori-tés qui détermineront des choix stratégiquesen matière de promotion de la santé. « Leprogramme quinquennal 2, on peut tout ymettre », s’inquiète la ministre. « Si on avaittrois fois le budget qu’on a aujourd’hui enmatière de santé, le programme quinquennalce serait parfait. Mais à un moment donné, çava devenir un cahier de revendications qui nerentrera jamais dans le budget. »

    C’est dans cet esprit que la ministre rencon-trera les quatre Services Communautaires

    Catherine Fonck, une main de fer dans un gant de velours

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    de Promotion de la Santé (SCPS), en charge duPlan Opérationnel Communautaire (POC)prévu dans la révision du décret Promotion dela santé en 2003, afin d’évaluer la nécessitééventuelle de « rétrécir un peu le champ duprogramme quinquennal », compte tenu desobjectifs prioritaires à suivre en matière desanté publique, et compte tenu aussi du bud-get disponible. « Je voudrais préciser ladirection que va prendre le Plan opérationnelcommunautaire pour pouvoir mettre en œuvreune politique cohérente et efficace », expliqueCatherine Fonck. « Parce que quand on toucheà tout de façon ponctuelle, je ne suis pas sûrequ’on soit efficace. Le but n’est pas de rétrécirpour rétrécir mais de se fixer des priorités qu’onva pouvoir mener à plus grande échelle et doncde façon probablement plus efficace. »

    Pour une hygiène de vie au quotidienParmi ses priorités, l’hygiène de vie. « Tout lemonde sait que le diabète de type 2 est entrain d’exploser. On suit les Américains 10 ou15 ans après. On parle d’obésité mais il fau-drait parler d’une maladie de société quinécessite à la fois un équilibre de la nutrition,de l’hygiène de vie, et une activité physiquerégulière. Et cette maladie de société, comptetenu de toutes les affections qu’elleengendre, me semble être une priorité. Noussommes devenus et donnons aujourd’hui auxenfants un modèle de sédentaires hyper-assistés. On prend la voiture, les escalators,l’ascenseur... Les médias jouent aussi un rôleimportant par rapport aux mauvaises habi-tudes alimentaires des enfants. »

    Pour Catherine Fonck, c’est l’image du sportqu’il faut changer auprès des jeunes. « Jen’aime pas parler de sport pour les jeunes. Ilfaut aussi des sportifs de haut niveau, c’esttrès bien. Mais l’image qu’on donne du sportchez les jeunes, c’est une image de rende-ment, de compétitivité, de performance. Etqui dit performance dit dérive possible versle dopage. Je trouve qu’il faudrait essayer defaire passer l’idée que faire du sport peutêtre un plaisir, une détente, un loisir. Enmatière de promotion de la santé, il s’agitplutôt de parler d’une activité physique quo-tidienne que d’une compétition. »

    La promotion de la santé à l’école« Une dynamique globale doit être lancée auniveau des écoles », insiste la ministre qui sou-ligne le rôle des services de Promotion de laSanté à l’Ecole (PSE), « instruments qui doiventêtre utilisés régulièrement pour orienter, aider,entourer, stimuler cette dynamique desécoles ». Selon sa note d’orientation politique,la première année de la législature devra per-

    mettre d’évaluer la réforme des services PSE etdevrait être suivie d’adaptations.

    « J’aimerais d’abord voir où en sont les PSE,voir un peu ce qu’ils ont mis en œuvre »,explique Catherine Fonck. « Les PSE sont uninstrument formidable. Mais il faut aussi voirla réalité de leur travail de tous les jours, ilsn’ont pas des horaires extensibles à l’infini, onne peut pas leur demander de tout faire oualors il faut doubler le budget des PSE et leurdonner deux ou trois fois plus de personnel. »

    Dépister le cancer du sein, une urgenceEn matière de cancer du sein, le mammo-test on le sait, n’engrange pas encore unfort taux de participation des femmesciblées (entre 50 et 59 ans). Seules 10 à20 % d’entre elles, selon les provinces,répondent à leur convocation et font leurmammotest. « C’est une urgence.Clairement. », déclare Catherine Fonck.« L’objectif est d’avoir 70% de couverturepour espérer avoir une réduction de morta-lité, et on en est loin. Mais il est encore troptôt pour tirer des conclusions définitives destaux de participation car il faut du temps àla fois pour convaincre les femmes de parti-ciper au dépistage et pour convaincre lesmédecins du bien-fondé du recours aumammotest plutôt qu’au bilan sénologiqueclassique (30 à 50% de couverture). »

    Pour la ministre, cette situation s’expliquepar plusieurs facteurs. « Il subsiste un facteurde résistance chez les femmes. Je crois que lapolitique de l’autruche existe encore quel quesoit le niveau socio-économique des femmes.Certaines préfèrent ne pas savoir, par peur dela maladie et du fait que ça touche à la sym-bolique de la femme. » Un problème à ne pasnégliger, estime Catherine Fonck.

    « Par rapport à ça, il faut rapidement - et lebut est de le faire au premier semestre 2005 -mettre en place des campagnes de sensibilisa-tion orientées sur les facteurs de résistancedes femmes. » Elle reproche par ailleurs à lalégislature précédente d’avoir lancé le pro-gramme dans la précipitation, sans avoirpréalablement finalisé l’outil informatiquedevant gérer le programme ni convaincuassez les médecins de la valeur du mammo-test, et sans avoir défini assez clairement lesresponsabilités respectives des différentsacteurs du programme (Communauté, Centrede référence communautaire, provinces,Institut scientifique de santé publique) et lecadre juridique dans lequel ils doivent agir.

    La ministre affirme donc vouloir s’atteleraujourd’hui à suivre de près le processus definalisation du système informatique déve-loppé par l’ISSP, à faire progresser leconsensus scientifique sur le bien-fondé du

    mammotest comme moyen de dépistage demasse, à redéfinir le rôle de chacun desacteurs du programme et à en améliorer lacoordination opérationnelle. Une liste detoutes les conventions à conclure ou renou-veler entre les différents acteurs est en cours.

    Concernant le cancer du col de l’utérus,Catherine Fonck soulève une question defond compte tenu de l’arrivée probable unjour ou l’autre d’un vaccin contre le papillo-mavirus (virus directement lié à ce cancer)destiné aux adolescentes : faut-il investirdans un dépistage gratuit pour tout le mondeou se positionner pour pouvoir être capable àun moment donné de vacciner les jeunes ?« En tout cas, je ne me précipiterai pas vers undépistage gratuit du cancer du col de l’utéruschez toutes les femmes », affirme la ministre.

    Tabac : il faut être radical« Je pense qu’aujourd’hui la première droguec’est le tabac. Il a été valorisé et il faut le dénor-maliser », affirme Catherine Fonck. « Ça faitdix ans qu’on fait de la politique de préventiontabac et c’est d’une inefficacité redoutable :premièrement, le nombre de fumeurs ne dimi-nue pas et deuxièmement, c’estcatastrophique au niveau des tranches d’âges.Au niveau des jeunes et des femmes jeunesparticulièrement. Moi je prône un peu derigueur et je prône surtout l’exemple d’autrespays européens (France, Royaume-Uni et paysscandinaves) qui montrent clairement qu’onpeut diminuer le nombre de fumeurs. »

    Selon la ministre, il y a deux moyens effi-caces pour cela : augmenter le prix du tabacpar paliers importants et diminuer lenombre de points de vente. La Belgique encompte 70.000 et la France 30.000, avec ladifférence de superficie et de populationque l’on connaît... « Ces éléments-là, on n’yéchappera pas. Si on ne le fait pas, dans 15ans, il y aura toujours autant de fumeurs enBelgique », insiste Catherine Fonck. « Leplan Demotte, c’est bien, toutes les proposi-tions de loi ont été déposées mais ce qu’il enest effectivement ressorti sur le plan desdécisions, c’est l’interdiction aux moins de16 ans, et c’est tout! Empêcher les jeunes defumer c’est bien mais ne faire que ça, c’estinsuffisant. Il faut être radical. On a tous lesoutils pour mettre ça en place, c’est facile. Ilsuffit d’avoir une volonté politique pour lefaire. Mais c’est un levier fédéral. »

    Quant au Fonds antitabac annoncé par RudyDemotte au début de l’été, « il n’existe tou-jours pas », indique la ministre. « C’est uneligne budgétaire et la difficulté de la lignebudgétaire, c’est qu’à la prochaine loi pro-gramme, elle pourrait sauter du jour aulendemain. Moi je n’attends qu’une chose,c’est qu’on finance un fonds concret, mais

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    pourquoi pas aussi un fonds pollueur/payeur ?Par pollueur, j’entends les entreprises dutabac. Je vais me faire stigmatiser par le lobbydu tabac. Mais si on veut être efficace entermes de santé publique, il faut savoir cequ’on veut et prendre des décisions politiquesqui ne vont pas plaire à tout le monde. »

    Par rapport aux autres drogues, CatherineFonck soutient une approche plus préventiveque répressive. « Les actions de responsabili-sation de la consommation de drogues etd’alcool sont à poursuivre, à l’égard desjeunes prioritairement, mais aussi à l’égard del’ensemble de la population. »

    Vaccination, du painbudgétaire sur la planche« Grâce aux instruments formidables quesont l’Office de la Naissance et de l’Enfance(ONE) et les services PSE qui permettent detoucher tous les enfants à plusieurs momentsde leur vie, l’enfance bénéficie aujourd’huid’une bonne couverture vaccinale qui devraitporter ses fruits dans les cinquante pro-chaines années », se réjouit Catherine Fonck.Elle constate cependant dans la populationadulte, un «échappement de la vaccinationau fil de la vie ». Face à ce problème, une pisteintéressante serait, selon la ministre, d’in-clure la vaccination des adultes dans leDossier Médical Global (DMG) du médecintraitant. « C’est une hypothèse de travail »,insiste-t-elle, rappelant que le DMG est de lacompétence du fédéral. « Cela doit se négo-cier avec le ministre fédéral de la Santé ettous les acteurs du secteur. »

    Plus avant dans sa réflexion, Catherine Fonckimagine l’introduction d’une véritable« consultation de prévention » annuelle, quipermettrait au médecin d’aborder avec sonpatient des questions telles que l’hygiène devie, la prévention cardiovasculaire et biensûr, la vaccination. La consultation seraitgratuite pour le patient à partir de 40 ou 50ans, afin de le stimuler à s’y rendre effective-ment au moins une fois par an, etremboursée au médecin dans le cadre duDMG. « Si on fait ça et que c’est bien fait, c’estune piste de travail dont on peut sortirgagnant à long terme, grâce au gain budgé-taire obtenu au niveau curatif. »

    La répartition budgétaire est d’ailleurs uneautre question que la ministre de la Santésouhaite aborder au cours de sa législature.Pour rappel, la vaccination est actuellementfinancée pour 2/3 par le fédéral et 1/3 par lesCommunautés. « C’est vrai que c’est de laprévention, mais de la prévention par rapportà des maladies qui engendreraient des coûtsimportants pour l’INAMI ». Elle bénéficiedonc au fédéral... « La répartition actuellerend-elle bien compte de ce que représente la

    vaccination comme gain de budget au niveaucuratif, en tenant vraiment compte du travailréalisé au niveau de la Communauté fran-çaise ? », se demande la ministre. « Je croisqu’à un moment donné, tout cela devra êtreremis sur la table et rediscuté. »

    Mais les discussions portent surtout aujour-d’hui et de façon très concrète sur unproblème éminemment budgétaire qui pour-rait mettre en péril la gratuité du vaccinhexavalent 3, actuellement supportée par lesCommunautés (à raison d’1/3 du budgetnécessaire) et le fédéral (2/3). Ce vaccin a faitl’objet d’un accord avec la firme qui le com-mercialise. Un accord remis en question pourraison de... non paiement. « Le tiers dû par laCommunauté française pour 2004 est effec-tivement payé », affirme Catherine Fonck.Mais « il y a une difficulté par rapport auxdeux tiers qui doivent être pris en charge parle fédéral et qui n’ont effectivement pas étépayés pour 2004 ».

    En fait de difficulté, il s’agirait d’un désac-cord financier sur la convention de basepassée avec la firme. Un problème auquel laministre devra s’atteler d’urgence, par undialogue avec le ministre fédéral de la Santéet la firme en cause. « Clairement pour moi,les entreprises pharmaceutiques ne sont pasdes œuvres philanthropiques et ce n’est pasce qu’on leur demande. C’est un marchéimportant pour elles. Donc, il faudrait discu-ter avec elles et évaluer les faisabilitésbudgétaires pour qu’un accord soit réalisableet qu’au bout du compte, cette vaccinationreste accessible à chacun des enfants, y com-pris dans les familles socio-économiquementplus faibles. C’est important. »

    Enfin, par rapport à l’éventuelle introduc-tion du vaccin contre le pneumocoquedans le calendrier vaccinal du nourrisson,Catherine Fonck reste prudente, soulignantune réalité budgétaire difficile. Avant toutedécision, « il faut suffisamment d’argu-ments scientifiques clairs et précispermettant de prouver un gain en termes demortalité et de morbidité ».

    Le respect, une autre forme de prévention du sidaLa prévention du sida, en ce compris la dis-tribution de préservatifs dans les centres deplanning familial et dans les boîtes de nuit,« doit s’accompagner d’une autre dimensionqui est celle du respect de la personne »,affirme Catherine Fonck. « L’ouverture à la

    sexualité, c’est autre chose. L’école est-ellele lieu idéal où en parler ? Les familles sont-elles demandeuses ? Je ne sais pas. Je ne mesuis pas encore penchée sur ce dossier. »

    Prévenir le suicide, un défi à relever« Le suicide me fait peur », déclare la ministrede la Santé qui rappelle que c’est la premièrecause de mortalité chez les hommes de 25-44 ans et la deuxième (après les accidents dela route) chez les jeunes de 15-20 ans. Unfameux défi à relever, mais les centres desanté mentale relèvent de la compétence desRégions. « Madame Vienne est quelqu’un detrès ouvert et je pense qu’on pourrait menerune politique commune par rapport à ça. Entout cas, c’est à ne pas négliger. »

    Dans sa note d’orientation politique, laministre vise particulièrement la mise enplace d’un protocole de prise en charge despersonnes à risque suicidaire (intégrant lesurgences psychiatriques, les centres de santémentale, les PSE, les PMS, les services d’ac-tion en milieu ouvert et les plate-formes decoordination en santé mentale), ainsi que lerenforcement de l’accueil de la détresse psy-chiatrique. « On créera des structurespost-crise afin de diminuer de façon signifi-cative le risque et le taux de récidive qui estactuellement de plus de 30%. »

    3 Depuis le début de l’année, les nourrissons peuvent êtregratuitement protégés contre six maladies par un seulvaccin, administré en 4 doses à 2, 3, 4 et 15 mois. Leprotocole d’accord entre l’autorité fédérale et lesCommunautés porte sur les vaccinations recommandéespar le Conseil supérieur d’hygiène.

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    Préserver les personnes âgéesde la maltraitanceL’accueil d’une personne âgée au sein de safamille n’est pas toujours aisé. Son arrivée ausein d’un foyer peut engendrer ou renforcer desproblèmes de logement, des difficultés finan-cières ou professionnelles. Pour pallier ceproblème, il faut tout faire pour que la personneâgée reste autonome mais il faudrait également« créer plus de possibilités pour la personneâgée », estime Catherine Fonck, qui pense à desstructures d’accueil de jour par exemple. Detelles possibilités donneraient aux familles lapossibilité de souffler un peu et donc de tenir à

    plus long terme dans de meilleures conditions etde meilleures relations avec la personne âgée.« Préserver de la maltraitance, c’est d’abord pré-server de tout ce qui peut amener à de lamaltraitance. » Pour ce faire, la ministre tient àtravailler de concert avec les ministres de l’em-ploi et du logement, notamment.

    Handicap et intégrationBien que le handicap soit de la compétencedes Régions, Catherine Fonck milite pour uneintégration plus importante de la personnehandicapée, et notamment des enfants, ausein des milieux d’accueil tels les crèches etles milieux d’accueil extra-scolaires.

    Des projets pilotes devraient être mis sur pieddans ce sens en 2005, selon la note d’orienta-tion politique de la ministre. « Il faut plus depersonnel, j’entends bien. Mais c’est un appren-tissage important que celui d’apprendre à vivreensemble dans le respect de la différence. »

    Reste à souhaiter à notre nouvelle ministre dela Santé la mise en œuvre de tous ces projetset la concrétisation de toutes ces bonnesintentions dans un esprit de bonne coopéra-tion interministérielle. Le chantier est vaste...

    Myriam Marchand

    Définitions

    Promotion de la santé : processus qui viseà permettre à l’individu et à la collectivitéd’agir sur les facteurs déterminants de lasanté et, ce faisant, d’améliorer celle-ci, enprivilégiant l’engagement de la populationdans une prise en charge collective et soli-daire de la vie quotidienne, alliant choixpersonnel et responsabilité sociale. La pro-motion de la santé vise à améliorer lebien-être de la population en mobilisant defaçon concertée l’ensemble des politiquespubliques.

    Médecine préventive : méthodes de pré-vention conformes aux dispositions légalesrégissant l’exercice des soins de santé et lesmodalités d’organisation des services desanté, pour contribuer à éviter les affectionsmorbides ou pour découvrir le plus rapide-ment possible dans la population ceux deses membres qui sont réceptifs ou atteintsd’une de ces affections, dont l’existenceconstitue un risque de détérioration gravepour l’état de santé du malade lui-même,parfois aussi un risque de propagation de lamaladie à l’entourage du malade et enfinsouvent un risque de dégradation de lasituation matérielle et sociale du malade etde sa famille.

    Extrait du préambule du Programme quin-quennal 2004 – 2008, p 3

    Le Programme quinquennal de promotion de la santé 2004-2008 de la Communauté française Wallonie-Bruxelles

    Le 2e Programme quinquennal depuis le votedu décret de 1997 a été arrêté le 30/4/2004(Moniteur belge du 7 juillet dernier). Il couvrela période du 1er janvier 2004 au 31décembre 2008. En voici les grandes lignes.

    PréambuleLe rappel des textes législatifs précise lescompétences de la Communauté françaiseen matière de santé, ainsi que le dispositifdécrétal qui intègre depuis 2003 méde-cine préventive et promotion de la santé(il y faut encore une traduction concrètedans des arrêtés d’application); s’y ajou-tent les réformes de l’Inspection médicalescolaire en promotion de la santé à l’école,et du contrôle médico-sportif en promo-tion de la santé dans le sport, quitémoignent d’un véritable souci de cohé-rence de la part du législateur.

    Le programme quinquennal s’appuie sur ladéfinition de la charte d’Ottawa (1986), quireste un texte fondateur pour la promotion dela santé près de 20 ans après son élaboration.

    Le Plan communautaire opérationnel défi-nira des indicateurs permettant d’évaluer ledegré de réalisation des objectifs duProgramme quinquennal.

    Grands principes, acteurs et thématiques prioritairesTrois axes ont été retenus pour guider ladéfinition des priorités, chacun de ces axesse déclinant selon les nécessités apparuesau cours d’un long processus de concerta-tion et maturation.

    Principes d’action1. Adapter les stratégies pour faire face auxinégalités devant la santé.2. Intégrer les stratégies de médecine préventivedans une approche de promotion de la santé.3. Promouvoir la participation citoyenne,impliquer les populations concernées.4. Développer le travail en réseaux et le par-tenariat intersectoriel.5. Développer des procédures d’assurancede qualité.6. Augmenter les compétences et les capa-cités d’action par l’éducation permanenteet la formation.7. Articuler le champ de la promotion de lasanté et les autres champs d’action politique.

    Acteurs prioritaires1. Les acteurs des milieux de vie.Les milieux d’accueil des jeunes enfants, leslieux de soins et d’hébergement, les famillessont visées. En outre, le milieu scolaire feral’objet d’une attention particulière, ce quiva de soi étant donné la compétence desCommunautés en matière d’enseignementet la ‘disponibilité’ du public de 6 à 18 anssoumis à l’obligation scolaire.

    2. Les membres des collectivités locales.On trouve ici le tissu associatif particulière-ment dense au niveau local, ainsi que lesressources et dispositifs développés depuisplusieurs années, qu’il s’agisse des centreslocaux de promotion de la santé ou duréseau des mandataires communaux.

    3. Les relais auprès des populations les plusvulnérables.

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    Priorité aussi incontestable que difficile àrendre pleinement opérationnelle, vu que lepublic bénéficiaire a peu accès aux pro-grammes et interventions classiques de santé.

    Problématiques de santé prioritairesDans ce vaste chantier (il a bien fallu selimiter, et pourtant 10 priorités, c’est déjàbeaucoup), une attention particulière seradonnée aux facteurs de vulnérabilité parrapport à ces problématiques, et aux indivi-dus, groupes ou populations les plusexposés à ces facteurs.

    Pour chacune de ces problématiques, leProgramme quinquennal précise le contexteet les objectifs en termes de promotion de lasanté et de prévention.

    1. Prévention des assuétudes2. Prévention des cancers3. Prévention des maladies infectieuses (enparticulier promotion de la vaccination,prévention du sida et des MST, lutte contrela tuberculose)4. Prévention des traumatismes et promo-tion de la sécurité5. Promotion de l’activité physique6. Promotion de la santé bucco-dentaire7. Promotion de la santé cardiovasculaire

    8. Promotion du bien-être et de la santémentale9. Promotion de la santé de la petite enfance10. Promotion d’un environnement sain

    Un chapitre du Programme est spécifique-ment réservé à la question de l’évaluation, àla lumière de difficultés apparues lorsqu’il afallu étudier les avancées et manquementsdu Programme quinquennal 1998 - 2003.

    Pour être complet, notons aussi troisannexes relatives- aux critères de qualité auxquels les pro-

    grammes doivent souscrire en matièred’objectifs, de moyens et d’évaluation;

    - aux critères de qualité des programmes deformation continue;

    - et enfin à la Déclaration de Namurconcernant le rôle que les communes peu-vent jouer grâce aux leviers dont ellesdisposent sur plusieurs facteurs détermi-nants de la santé.

    Sur la base de cet ambitieux Programme,un plan communautaire opérationnel depromotion de la santé sera arrêté. Il préci-sera notamment les objectifs opérationnelsprioritaires, y compris en médecine préven-

    tive ; les st