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1 L’ARRET DU MOIS p.3 Contrats d’affaires et exclusion d’un groupement d’entreprises BANQUE ET CREDIT p.4 Pas de substitution de caution en l’absence de consentement exprès de la banque ! BAUX p.5 L’influence de l’identification du preneur sur la validité d’un congé pour dénégation du statut des baux commerciaux IMMOBILIER p.5-6 Appréciation de l’enclavement : exclusion d’un simple souci de commodité ! Preuve du trouble anormal du voisinage : le cas de l’élevage à caractère familial PROCEDURES COLLECTIVES p.6-7 L’action rédhibitoire exercée au titre de la garantie des vices cachés échappe à l’arrêt des poursuites individuelles DROIT DES SOCIETES p.7-10 Fixation de la rémunération de gérance et abus de majorité Exigibilité d’une convention de médiation en référé et absence de contestation sérieuse Éviction de l’associée concernée par le vote d’une résolution dans le calcul de la majorité Novembre 2015 Numéro 31

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L’ARRET DU MOIS p.3• Contrats d’affaires et exclusion d’un groupement d’entreprises

BANQUE ET CREDIT p.4

• Pas de substitution de caution en l’absence de consentement exprès de la banque !

BAUX p.5• L’influence de

l’identification du preneur sur la validité d’un congé pour dénégation du statut des baux commerciaux

IMMOBILIER p.5-6

• Appréciation de l’enclavement : exclusion d’un simple souci de commodité !

• Preuve du trouble anormal du voisinage : le cas de l’élevage à caractère familial

PROCEDURES COLLECTIVES p.6-7

• L’action rédhibitoire exercée au titre de la garantie des vices cachés échappe à l’arrêt des poursuites individuelles

DROIT DES SOCIETES p.7-10• Fixation de la rémunération de gérance et abus de majorité • Exigibilité d’une convention de médiation en référé et absence de

contestation sérieuse • Éviction de l’associée concernée par le vote d’une résolution dans

le calcul de la majorité

Novembre 2015

Numéro 31

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ermettant à des opérateurs économiques, dotés de compétences différentes, de

consolider et de mutualiser leurs forces pour apporter une réponse effective à une demande émise par un marché , le groupement momentané d’entreprises reste un système de cotraitance pu connu. Il présente pourtant l’avantage d’espérer remporter des marchés de moyenne ou grande envergure, publics ou privés, auxquels une entreprise seule n’aurait pu être en mesure de répondre. L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Saint-Denis, le 1er avril 2015, offre ainsi l’opportunité de s’attarder sur ce contrat atypique, notamment quant aux interactions qu’il génère entre le droit des contrats et le droit des sociétés. !Le droit à un recours effectif : obstacle à la clause de renonciation à recours contenue dans les contrats de G.M.E.

Au sein des Groupements Momentanés d’Entreprises Solidaires (G.M.E), les parties bénéficient d’une grande liberté pour façonner leur accord qui devient selon le célèbre adage « pacta sunt servanda » la loi des parties. Saisi d’un litige, le juge a donc la charge d'appliquer à la lettre les stipulations contractuelles, dans la limite toutefois, du respect des droits fondamentaux et de l’ordre public. C'est ce que tend à rappeler le présent arrêt. En l’espèce, il s’agissait d’une décision prise par le comité de coordination d’un G.M.E. de procéder à l’exclusion d’une société membre. Déboutée par les premiers juges, la société exclue réclame en cause d’appel l’annulation de la décision et réparation de son préjudice commercial. Les juges du second degré, confirmant la décision rendue en première instance, prennent cependant soin de considérer que la clause contenue dans un contrat de G.M.E. stipulant

que « la décision du comité de coordination n'est susceptible d'aucun recours et ne peut entrainer l'allocation de dommages et intérêts » est contraire au droit à un recours effectif garanti par la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, ainsi qu’à la Convention Européenne des Droits de l'Homme et, sera donc réputée sans effet. Cet arrêt semble faire écho aux solutions retenues en matière de rupture conventionnelle du contrat de travail au sein desquels les clauses de renonciation à recours sont réputées non écrites (Cass.soc. , 26 juin 2013, n°12-15.208). !L’intérêt du Groupement  : point névralgique de l’interprétation des clauses statutaires d’un contrat de G.M.E.

Le second aspect du litige, toujours en lien avec la décision du comité de coordination de procéder à l’exclusion d’une société membre, portait sur le respect d’un délai de préavis de six mois, prévu en cas de retrait d’une société membre. La société évincée, se prévalant de la méconnaissance de ce mécanisme, obtient gain de cause auprès des premiers juges, et se voit octroyer une indemnisation pour non-respect du préavis. Cette position n’est pourtant pas celle suivie pas les juges d’appel, soulignant que les faits d’espèce laissaient transparaître une exclusion de la société fautive, et non un retrait, comme le prévoyait les clauses statutaires. Concluant donc à une distinction des régimes applicables, la Cour d’appel considère que l’établissement d’un préavis n’était uniquement prévu que pour le cas d’un retrait (volontaire) d’une société membre du groupement.

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L’ARRET DU MOIS

Contrats d’affaires et exclusion d’un groupement d’entreprises (CA Saint-Denis, 1er avril 2015 , n°14/00163) :

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La Cour opte pour une interprétation pour le moins surprenante des clauses statutaires, estimant que l’article qui stipule « que l’exclusion prend et produit ses effets dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves que le retrait » doit être compris comme se référant uniquement à l’article qui prévoit que le retrait ou l’exclusion entraine de facto la perte des droits et des obligations définis dans les accords à la date d’effet du retrait ou exclusion et non à l’article qui prévoit l’application du délai de préavis de 6 mois en cas de retrait. En somme, la Cour d’appel a justifié son interprétation par l’intérêt du groupement, qui est « le départ rapide de contractant défaillant […] qui est incompatible avec l’exécution d’un préavis ». Dans un domaine où le vent de la liberté contractuelle souffle fort, la Cour d'appel de Saint-Denis est venue considérablement en limiter les effets. Tout d’abord en faisant obstacle à la clause de renonciation à recours insérée par les parties au contrat de G.M.E., puis en adoptant une interprétation originale des clauses du contrat (au détriment d’une application à la lettre des clauses, pourtant dépourvues de toute ambiguïté). La prudence reste donc de mise pour les sociétés membres d’un G.M.E., qui devront prendre conscience que les juges du fond n’ont pas d’avis tranché sur la question de faire primer, tantôt les intérêt des cocontractants, tantôt ceux du groupement. (Dévi MOUTOUSSAMY)

!BANQUE ET CREDIT

• Pas de substitution de caution en l’absence de consentement exprès de la banque ! (CA Saint-Denis, 1er avril 2015, n° 12/01792) :

oici qu’une société se porte caution du prêt accordé à l’une de ses filiales auprès d’un établissement bancaire quelques années avant que ladite filiale ne soit cédée. L’entreprise

cessionnaire s’engage contractuellement lors de la cession à fournir au cédant les attestations de mainlevée de l’ensemble des garanties dans un délai de deux mois. Une procédure collective étant ouverte à l’encontre de la société cédée, l'établissement bancaire déclare sa créance et assigne la caution en exécution de son engagement. Par un premier jugement, le cédant est condamné à honorer son engagement en qualité de caution. Il interjette alors appel de la décision entreprise en faisant valoir qu’une novation était intervenue par substitution de caution telle que le prévoyait l’acte de cession des titres de la filiale. Dès lors, l’établissement bancaire n’était pas, selon le cédant, fondé à le poursuivre en qualité de caution, et ce d’autant p lus que la banque avai t connaissance de l’intention des parties à l’acte de cession de procéder à la substitution de garantie. Dans un arrêt rendu le 1er avril dernier, la Cour d’appel dionysienne juge que cette connaissance par la banque de la volonté des parties d’opérer une substitution de garantie ne pouvait s’analyser en un consentement à celle-ci dans la mesure où « l’acceptation par la banque de la substitution de caution ne se présume pas, elle doit être expresse, et non équivoque ». En effet, la jurisprudence estime que la considération selon laquelle le cédant ne détient plus la société débitrice n’a pas pour conséquence de le décharger de son engagement (v. par exemple : Civ. 1re, 27 janv. 2004, n° 02-14.331). En effet, le créancier doit manifester explicitement sa volonté de décharger la caution (Com. 1er avr. 2003, n° 99-18.344). Or, en l’espèce, la preuve n’était pas rapportée que la banque avait donné son consentement exprès à la substitution de caution. Refusant d’assimiler la connaissance par la banque du projet de substitution à un consentement exprès, l’arrêt annoté mérite entière approbation en ce qu’il p rése rve l a fonc t ion de sû re té du cautionnement. !!

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La Cour d’appel de Saint-Denis condamne par conséquent le cédant à honorer son engagement de caution, confirmant ainsi la décision des premiers juges. Toutefois, la juridiction d’appel relève que le cessionnaire n'ayant pas obtenu la mainlevée des engagements de caution, alors qu’il y était tenu par l’acte de cession des titres, avait par conséquent commis une faute contractuelle causant un préjudice au cédant. La caution a ainsi la possibilité de se retourner contre le cessionnaire n’ayant pas respecté ses engagements aux fins d’indemnisation (Maréva FORNÈS-MARIN). !!

BAUX• L’influence de l’identification du

preneur sur la validité d’un congé pour dénégation du statut des baux commerciaux. (CA Saint-Denis, 24 avril 2015, n° 13/01576) : !

’article L. 145-1 du Code de commerce accorde le bénéfice du statut protecteur

des baux commerciaux au preneur, propriétaire du fonds de commerce, sous réserve de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) ou au r é p e r t o i r e d e s m é t i e r s ( R M ) . L a jurisprudence est par la suite venue préciser que cette exigence concerne exclusivement le renouvellement du droit au bail (Civ. 3e, 1er oct. 1997, Bull. civ. III, no 179). Lorsque le preneur n’est pas inscrit en nom personnel, il s’expose ainsi à une dénégation du statut des baux commerciaux (v. par ex. : CA Paris, 16e ch. A, 19 nov. 2008, n° 07/18623), c’est-à-dire à une perte du droit au renouvellement et de l’indemnité d’éviction. Ces remarques liminaires ainsi réalisées, il est alors aisé de comprendre l’importance de l’identification des parties à un bail commercial. L’arrêt rendu le 24 avril 2015 par la Cour d’appel de Saint-Denis en constitue un exemple. !En l’espèce, un bail commercial est conclu entre un bailleur et des époux, associés d’une

SARL. Bien que la première page du bail spécifie, sans autres précisions, qu’il est conclu entre le bailleur et les époux, il apparaît néanmoins en dernière page que le signataire de l’acte en qualité de preneur est la SARL représentée par un des époux qui s’avère être le gérant de celle-ci. Surgit alors une question : les époux personnes physiques, destinataires d’un congé pour dénégation du statut, doivent-ils être considérés comme les titulaires du bail commercial litigieux ? L’enjeu est de taille puisqu’une réponse négative conduirait à écarter la validité du congé délivré par le bailleur. En l’espèce, recourant à la méthode du faisceau d’indices (contrat de bail signé par la société ; exploit d’huissier envoyé non pas aux époux mais à la société en sa qualité de preneur ; litige antérieur à l’occasion duquel le bailleur a assigné la SARL en qualité de locataire), la juridiction d’appel en a d éd u i t q u e l e s ép o u x n ’ av a i en t effectivement pas la qualité de preneur. Par conséquent, le véritable locataire étant la SARL, la Cour a jugé que les congés signifiés aux époux sont nuls et de nul effet. L’arrêt analysé invite ainsi les rédacteurs d’actes à être précautionneux dans la détermination des parties au bail commercial. En cas de doute sur l’identité des contractants, c’est au juge qu’il reviendra de trancher (Elodie BOSSY). !!!

IMMOBILIER

• Appréciation de l’enclavement : exclusion d’un simple souci de commodité ! (CA Saint-Denis, 03 avril 2015, n°11/02475) : !

ur le fondement de l’article 682 code civil, le propriétaire d’un terrain enclavé

(fonds dominant) peut exiger de ses voisins (fonds servant) un passage pour assurer

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la desserte sur la voie publique, sous réserve d u v e r s e m e n t d ’ u n e i n d e m n i t é proportionnelle au dommage causé. Les juges du fond disposent alors d’un pouvoir souverain d’appréciation afin de déterminer si l’assiette du chemin sur lequel s’exerce le droit de passage est suffisante (Cass. civ. 3e, 05 mars 1974, Bull. civ. III, n°102). En ce sens, la Cour d’appel de Saint-Denis est venue rappeler qu’un « simple souci de commodité et de convenance ne permet pas de caractériser l’insuffisance de l’issue sur la voie publique » (Cass. civ. 3e , 24 juin 2008, RDI 2009. 107, obs. Gavin-Millan-Oosterlynck ; TGI Bordeaux, 24 juin 1969, JCP 1969. II. 16109, note Ghestin). En l’espèce, suite à la construction d’un mur par son voisin, un propriétaire prétend ne plus pouvoir accéder à sa propriété que par de multiples manœuvres pouvant causer des dommages à son véhicule. Qui plus est le passage par un camion de secours n’est plus possible. !Constatant d’une part que l’état d’enclave n’était pas démontrée, et d’autre part que le mur litigieux n’était pas un obstacle à l’effectivité d’un engin de secours doté des équipements accessoires usuels, la Cour déboute le propriétaire de sa demande de destruction du mur puisque s’analysant comme une commodité supplémentaire au passage laissé par son voisin. !Afin de prévenir ce type de désagréments, il convient donc de se doter d’une servitude de passage à caractère conventionnelle. (Yannick JAGLALE) !!• Preuve du trouble anormal du

voisinage : le cas de l’élevage à caractère familial (CA Saint-Denis, 24 avril 2015, n°13/01635) :

!l est admis que la mise en œuvre de la responsabilité pour troubles anormaux du

voisinage s’apprécie au regard des c i r cons t ances de l ' e spèce , e t p lus particulièrement du lieu (Cass. 3e civ. 3 novembre 1977, D. 1978. 434, note F. Caballero; Cass. 2e civ. 27 avr. 1979, JCP 1980. II. 19408, note A. Mourocq). Voici un propriétaire qui assigne en responsabilité son voisin en raison de l’exploitation d’un élevage de canard. Le trouble reconnu en première instance est écarté en cause d’appel. En effet, la juridiction du second degré précise que les propriétés sont situées en zone rurale (Dans le même sens, v. CA Riom, 7 septembre 1995, D. 1996, somm. 59, obs. A. Robert ; JCP 1996. II. 22625, note A. Djigo) où il est constant d’avoir un élevage à caractère familial. Qui plus est, aucun élément n’est rapporté afin de démontrer que cet élevage dépasse le cadre s t r ic tement fami l ia l enf re ignant l a réglementat ion sanitaire, ou encore provoquant des nuisances olfactives excédant les inconvénients normaux de voisinage (V. en ce sens Cass. civ. 3e, 24 octobre 1990, Bull. civ. III, n°205). En de telles circonstances, seule la preuve d’un excès peut conduire à démontrer l’anormalité du trouble (V. CA Dijon, 2 evril 1987, Gaz. Pal. 1987, 2, p. 601, note Goguey). (Yannick JAGLALE) !

!PROCEDURES COLLECTIVES

• L’action rédhibitoire exercée au titre de la garantie des vices cachés échappe à l’arrêt des poursuites individuelles (CA Saint-Denis, 03 avril 2015, n° 12/00609) :

oin de former des univers évoluant indépendamment, les disciplines

juridiques s’entrecroisent souvent en vue du règlement judiciaire d’un litige.

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L’arrêt rendu le 03 avril 2015 par la Cour d’appel de Saint-Denis en constitue une convaincante illustration. À cette occasion, la Cour a eu à répondre à la question suivante : l’interdiction des poursuites prescrite par l’article L. 622-21 du Code de commerce en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde constitue-t-elle un obstacle à l’action en résolution exercée par un acheteur au titre de la garantie légale des vices cachés ? Autrement formulé, la créance en restitution susceptible de découler d’une telle action s’analyse-t-elle en une créance antérieure ou postérieure ? Confirmant la décision des premiers juges, la Cour d’appel prend d’abord le soin, en s’appuyant sur les dires de l’expert, de relever l’existence d’un vice caché en retenant que le bien litigieux présente des défauts de conception « de nature à empêcher une utilisation normale et conforme à sa destination de celui-ci » (v. sur la distinction entre non-conformité et vices cachés : Civ. 1re, 27 oct. 1993, Bull. civ. I, n° 305 ; Civ. 3e, 14 févr. 1996, Bull. civ. III, n° 47). Ensuite, ayant à se prononcer sur l ’ac t ion rédhibi to i re d i l igentée par l’acquéreur, la juridiction d’appel détermine les actions susceptibles d’être exercées et celles qui ne le sont pas. Elle opère une telle ventilation en contemplation du fait générateur de la créance. D’une part, la Cour estime ainsi que la créance de dommages et intérêts ainsi que la créance en restitution d’une partie du prix trouvent leur source dans la date de conclusion de l’acte et que dès lors « doit être considéré comme un créancier antérieur la victime d'un manquement à des obligations contractuelles (…), le contrat étant antérieur au prononcé du jugement de sauvegarde » (v. dans le même sens : Com. 8 juin 1999 : Bull. civ. IV, n° 121). !En d’autres termes, lorsqu’une procédure collective est ouverte à l’encontre du vendeur, l’action estimatoire (C. civ., art. 1644) ainsi que l’action visant à l’obtention de dommages et intérêts au titre d’un vice

caché (C. civ., art. 1645) ne peuvent être intentées par l’acheteur en application de l’article L. 622-21 du Code de commerce. D’autre part, elle juge qu’ « il en va cependant différemment des créances de restitution nées de l’annulation ou de la résolution d’un contrat, qui est censé n’avoir jamais existé ». Ainsi, rajoute la Cour, « dans cette hypothèse, le fait générateur de la créance est la décision constatant la résolution et ordonnant la restitution de sorte que (…) la créance de restitution du prix née de la résolution du contrat de vente (…) est postérieure à l’ouverture de la procédure de sauvegarde et échappe à la règle de l’arrêt des poursuites individuelles ». En définitive, si le Code civil (C. civ., art. 1644) offre en principe à l’acquéreur la faculté de choisir entre l’action rédhibitoire et l’action estimatoire lorsqu’il agit sur le terrain de la garantie des vices cachés, cette option s’efface lorsque le vendeur est sous le coup d’une procédure de sauvegarde. En pareil cas, la seule porte ouverte à l’acquéreur insatisfait est celle de l’action en résolution de la vente, à condition bien entendu que les éléments qui président à l’exercice d’une telle action soient réunis. En tout état de cause, toute autre action serait paralysée en application des dispositions du Code de commerce ! Tel est l’enseignement délivré p a r l e p r é s e n t a r r ê t ( R o b e r t o THIANCOURT). !!!

DROIT DES SOCIETES• Fixation de la rémunération de

gérance et abus de majorité (CA Saint-Denis, 1er avril 2015 , n°14/00567) : !i chaque associé ou actionnaire, quelle que soit sa participation au sein du

capital social d’une structure, est libre de S

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voter comme il l’entend, son droit ne doit pour autant pas être exercé de manière abusive. Tempérament souvent mis en exergue par les associés minoritaires, il permet t ra i t de l imi ter les associés majoritaires dans la jouissance de leurs pouvoirs, notamment face au risque d’adoption de résolutions destinées à répondre à des fins personnelles. Le présent arrêt marque ce constat. A l’occasion d’un contentieux entre deux associés (composant à eux-seuls la totalité du capital social d’une société), l’associée minoritaire sollicita, sur le fondement de l’abus de majorité, la nullité de plusieurs résolutions adoptées en assemblée générale, portant notamment sur les modalités de rémunération de la gérance, dont les fonctions sont assurées par l’associé majoritaire. !Déboutée par la juridiction de première instance, l’associée minoritaire interjette appel, invoquant d’une part, que les modalités de rémunération de gérance adoptées étaient disproportionnées au regard de la santé financière de la société, d’autre part, que cette prise de position par le gérant associé majoritaire était constitutive d’un abus de majorité, causant une atteinte à l’intérêt social des associés. Confirmant pourtant la position des premiers juges, la Cour d’appel de Saint-Denis rejette la qualification d’abus de majorité, en interprétant le raisonnement de ses prédécesseurs (Voir en ce sens, Cass.com, 18 avril 1961, Bull.civ. III, n°175 : « la résolution prise contrairement à l’intérêt général de la société et dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité »). Sur l’atteinte à l’intérêt social d’abord, la Cour considère que la rémunération de gérance étant une charge normale de la vie d’une société, elle ne saurait paraître comme étant abusive, ni constitutive d’un abus de majorité. Sur la rupture d’égalité entre associés ensuite, qui ne pouvait se démontrer, puisque les

modalités de rémunération du gérant n’étaient pas disproportionnées au regard des chiffres d’affaires réalisés par l’entreprise sur les derniers exercices. (Adeline CALTEAU). !!• Exigibilité d’une convention de

médiation en référé et absence de contestation sérieuse (CA Saint-Denis, 14 avril 2015, n°14/00736) : !i en matière de référé, les dispositions de l’article 809 alinéa 2 du Code de

procédure civile, relatives au référé-provision, ne sont soumises à aucune condition d’urgence, encore faut-il être en mesure de rapporter au « juge de l’évidence », l’existence d’une obligation non sérieusement contestable, sur le fondement de laquelle la provision est demandée. Ce rappel étant d’autant plus significatif lorsque la source des contestations provient d’un accord commun, comme en l’espèce. Détentrice de droits sociaux au sein d’une société civile de moyens et au sein d’un droit de présen ta t ion de pa t ien tè le , une kinésithérapeute souhaite se retirer des affaires au sein de l’Ile de La Réunion. Pour cela, elle sollicite de ses deux autres associés, le rachat de l’ensemble de ses parts. Les parties ne trouvant aucune issue favorable à cette situation, une conciliation, prévue à l’article R. 4321-99 du Code de la santé publique, est menée entre les parties, sous l’égide du président du conseil de l’ordre des masseurs kinésithérapeute. Estimant que les modalités de la convention de médiation n’ont pas été honorées par ses associés, l’associée cédante assigne ces derniers devant le juge des référés, aux fins de voir sa situation se régulariser sous quinzaine et sous as t re in te . Condamnés , les assoc iés réfractaires de ce rachat forcé interjettent appel de la décision, en avançant d’une part, une fin de non recevoir fondée sur l’absence

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d’obligation de rachat des droits sociaux de l’associée cédante. Confirmant l’ordonnance délivrée par le juge des référés, la Cour d’appel de Saint-Denis certifie pleinement l’obligation de rachat qui devait s’imposer aux appelants. Pour cela, elle rappelle d’une part, que la circonstance selon laquelle la mise en place de la procédure de conciliation ne résultait pas de l’initiative de l’associée cédante est sans incidence quant à sa régularité, et qu’en ce sens, la fin de non recevoir avancée ne pouvait prospérer. D’autre part, qu’un accord sur la chose, le prix, et les modalités de règlement du prix ressortait clairement de la convention de médiation adoptée, et que dès lors, l’obligation de rachat ne pouvait être considérée comme étant sérieusement contestable.( DjamilaVINGADASSALOM)

!• Éviction de l’associée concernée par

le vote d’une résolution dans le calcul de la majorité (CA Saint-Denis, 3 avril 2015 , n°14/00386) : !éfinie par la jurisprudence constante c o m m e « l a r é s o l u t i o n p r i s e

contrairement à l’intérêt général de la société et dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité » (Voir en ce sens, Cass.com, 18 avril 1961, Bull.civ. III, n°175), l’abus de majori té permettrai t de protéger la communauté des associés, face au risque d’adoption, par l’associé majoritaire, de résolutions destinées à répondre à des fins personnelles. Encore faut-il, pour appliquer ce mécanisme, prendre en considération les spécificités s’imposant dans les calculs de majorité, lors de l’adoption de résolutions d’assemblée générale. C’est ce que tend à rappeler le présent contentieux.

En l’espèce, deux sociétés commerciales se portent associées égalitaires d’une société

civile de construction-vente, dont l’une d’elle assurera les fonctions de la gérance. Laissant sans réponse un appel de fonds en corrélation avec l’accomplissement de l’objet social, en application de l’article L.211-3 du Code de la construction et de l’habitation, l’une des deux associées voit ses droits sociaux faire l’objet d’une mise en vente par adjudication, suite à des résolutions adoptées par assemblée générale extraordinaire. Considérant que les conditions requises pour l’appel de fonds n’étaient pas remplies, et que l’adoption des résolutions relatives à l’adjudication de ses parts sociales était constitutive d’un abus de majorité l’associée évincée sollicite des premiers juges, la nullité de la vente réalisée aux enchères publiques, ce qu’elle ne manque pas d’obtenir. Contestant néanmoins la portée de cette solution, qui même si prononce la nullité de l’adjudication des parts sociales, n’annule pas l’ensemble des résolutions adoptées lors de l’assemblée générale litigieuse, l’associée évincée forme un appel incident (en réponse à un appel principal qui sera entretemps suivi d’un désistement d’instance), sur le fondement de l’abus de majorité. Si les juges d’appel s’engagent dans une position similaire, en prononçant la nullité de l’adjudication des parts sociales, ils tiennent néanmoins à préciser que celle-ci n’est due qu’à l’absence des conditions relatives à l’appel de fonds, et non à un abus de majorité ou une irrégularité de l’assemblée générale litigieuse. !Sur le défaut d’abus de majorité d’abord, où la Cour prend appui sur les dispositions de l’alinéa 4 de l’article L. 211-3 du Code de la construction et de l’habitation, pour mettre en évidence que les parts détenues par un associé à l’encontre duquel la mise en adjudication est à l’ordre du jour de l’assemblée ne sont pas prises en compte

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pour le calcul des majorités requises. Qu’en ce sens, le président de l’assemblée générale de la société civile de construction-vente n’a commis aucune irrégularité en ne prenant en compte, lors du vote des résolutions, que les parts de l’associée non affectée par l’appel de fonds.

!Sur l’absence d’irrégularité de l’assemblée générale ensuite, où la Cour relève que celle-ci ayant été tenue de manière régulière et dans les formes légales, il n’y avait aucun intérêt à procéder à son annulation intégrale. (Mirella AMEYEN)

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IMPRESSION : SERVICE REPROGRAPHIE L’UNIVERSITE DE LA REUNION

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,035(66,21���6(59,&(�5(352*5$3+,(�'(�L’UNIVERSITE DE LA REUNION

&RQWDFW���DVVRFLDWLRQ�DOGD#JPDLO�FRP

5('$&7,21��- M. le Professeur Jean-Baptiste SEUBE

- Max VERBIER- Toioumina MADI SOUFFOU

- Lauriane ADELER- Isabelle BOISMERY

- Valère HEYE- Djamila VINGADASSALOM

- Anne-Audrey MAILLOT- Roberto THIANCOURT

- Brendan GEORGES-SKELLY

0,6(�(1�3$*(��-XOLHQ�7,5(/

&255(&7,21��- Brendan GEORGES-SKELLY

- Yannick JAGLALE- Roberto THIANCOURT

- Jeremie AKHOUN

REDACTION : Dévi MOUTOUSSAMY

Maréva FORNÈS-MARIN

Elodie BOSSY

Yannick JAGLALE

Roberto THIANCOURT

Adeline CALTEAU

DjamilaVINGADASSALOM

Mirella AMEYEN !

CORRECTION :!

Le professeur Jean-Baptiste SEUBE!Brendan GEORGES-SKELLY

Yannick JAGLALE

Roberto THIANCOURT

Jeremie AKHOUN

MISE EN PAGE : Nicolas DYALL