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Numéro SPECIAL N° 1 22 novembre 2000 Sommaire 2° ENTRETIENS DE COLMAR "La tempête: un an après" - La bonne réactivité des services publics - Le discours d'ouverture - Tempête: définition juridique et technique - Les services publics: entre définitions et réalités météorologiques - Coopération européenne:l'exemple d'EDF - Urgence et secours :mise en place des dispositions d'aide - Les entreprises publiques face aux dégâts L' indemnisation - Le dispositif juridique de gestion des effets de la tempête. - Retour d'expériences chez les assureurs - Le cas spécifique des forêts et de la filière bois - Joël Lebeschu: "on ne commande à la nature..." - Médias: "Le journaliste n'est pas un surhomme..." En coulisses - Portrait d'un "grand témoin" atypique - Les étudiants au travail pour le colloque Edito

Numéro SPECIAL N° 1 22 novembre 2000 2° … SPECIAL N 1 entre 8 et … · Des propos auxquels Gérard Binder président de l’Université de Haute Alsace s'est associé ... intervenants

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Numéro SPECIAL N° 1 22 novembre 2000 Sommaire 2° ENTRETIENS DE COLMAR "La tempête: un an après"

- La bonne réactivité des services publics - Le discours d'ouverture - Tempête: définition juridique et technique - Les services publics: entre définitions et réalités météorologiques - Coopération européenne:l'exemple d'EDF - Urgence et secours :mise en place des dispositions d'aide - Les entreprises publiques face aux dégâts L' indemnisation - Le dispositif juridique de gestion des effets de la tempête. - Retour d'expériences chez les assureurs - Le cas spécifique des forêts et de la filière bois - Joël Lebeschu: "on ne commande à la nature..." - Médias: "Le journaliste n'est pas un surhomme..." En coulisses - Portrait d'un "grand témoin" atypique - Les étudiants au travail pour le colloque Edito

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Claude Lienhard,

directeur du Cerdacc (Photo Cerdacc. JoL.)

Les tempêtes qui ont traversé la France et une partie de l'Europe, il y a près d'un an sont encore dans tous les esprits. Serait-on revenu aux temps des grands fléaux? Nos sociétés modernes, si promptes à se croire invulnérables ne seraient-elle pas intrinsèquement fragiles face aux vents et aux raz- de- marée ? Le Cerdacc a pour vocation, dans un souci de prévention, de décoder l'après catastrophe, ce que d'autres appellent la "post-crise". C'est dans cet objectif que se sont tenus, le 14 novembre, dans le cadre du Département Carrières juridiques de l'IUT, les seconds entretiens de Colmar sous forme d' une pleine journée de réflexions et d'échanges consacrée aux "Tempêtes, un an après ".

Le JAC, outil de communication du Cerdacc, a fait le pari de vous rendre compte très rapidement de cette journée dans le cadre de ce numéro spécial valant "actes du colloque". Ce numéro exceptionnel du JAC a été réalisé grâce au concours des étudiants du département Carrières juridiques encadrés par leurs enseignants-chercheurs. Ainsi le retour d'expérience de crise imprègne-t-il les acteurs de demain. L'événement serait alors sans doute que l'arbre tombé hier contribue à la culture de sécurité et de solidarité de demain. Bonne lecture. Claude Lienhard

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Jo Laengy, rédacteur en chef du JAC " Bonne réactivité des services publics..." La seconde édition des “ Entretiens de Colmar ” organisée par le Cerdacc ( Centre Européen de Recherches sur le Droit des Accidents Collectifs et des Catastrophes) répondait à un besoin onze mois après les tempêtes du 26 et 27 décembre 1999 . Sur le thème " Tempêtes , un an après ", une quinzaine d’intervenants se sont succédés le 14 novembre dans l’amphithéatre de l’IUT de Colmar, Place du 2 Février pour réaliser un tour d’horizon sur un sujet ,faut-il le dire, encore largement d’actualité. Comme il se doit, un tel colloque, initié par le Cerdacc et le Département Carrières Juridiques de l’IUT de Colmar, Université de Haute Alsace se devait d’être lancé non seulement par ses promoteurs directs tels Claude Lienhard directeur du Cerdacc ou Marie-France Steinlé-Feuerbach co-directeur, mais encore par des personnalités telles M. Dominique Dubois préfet du Haut-Rhin, M. Gérard Binder président de l’Université de Haute Alsace, M. Guy Michel directeur de l’IUT de Colmar, M. Pierre Vittaz premier président de la Cour d’appel de Colmar et président de la session de l’après-midi du colloque, Jean Paul Sissler adjoint au maire de Colmar et, dans le rôle de "grand témoin", Joêl Lebeschu préfet, président de la Commission nationale interministérielle chargée de veiller au bon déroulement des procédures d’indemnisations. C’est donc à Claude Lienhard qu’il est revenu de saluer une assistance aussi nombreuse qu’intéressée. Etudiants bien sûr dont ceux en DESS Gestion de risques de Mulhouse ou encore ceux en DESS de l'Environnement à Strasbourg, chercheurs, représentants de divers ministères et préfectures, professionnels, au total environ 150 participants pour qui cette journée d’échanges fut à coup sûr l’occasion de mieux appréhender un phénomène aujourd’hui encore et pour une large part inexploré. Rappelant que" l’université était le temple de la parole", Claude Lienhard n’a pas manqué de souligner le caractère exceptionnel des Entretiens de Colmar. Au nom de l’IUT de Colmar, Guy Michel son directeur a tenu à rappeler que la recherche scientifique et juridique était importante et combien il y avait richesse à confronter les idées entre le monde professionnel et socio-économique, lien entre la théorie et l’action. Des propos auxquels Gérard Binder président de l’Université de Haute Alsace s'est associé chaleureusement, souhaitant “ du bon travail ” à toute l’assistance.

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Dominique Dubois préfet du Haut-Rhin et président de la matinée expose son point de vue. ( Photo Cerdacc Lionel Humbert ) Dominique Dubois, préfet du Haut-Rhin depuis peu et qui avait accepté la présidence de la matinée a rappelé pour cerner le sujet un certain nombre de catastrophes naturelles avant d’exposer plus avant celles qui concernaient le département du Haut-Rhin. “ Cette tempête du 26 décembre a été la pire catastrophe de l’an 2000" a-t-il expliqué." Nous avons reçu la première alerte de Météo France le 23 décembre à 15h. Ce qui nous a obligé à prévoir au niveau des préfectures ”. Il a mis en exergue l’excellent réseau des sapeurs-pompiers dont les 6000 volontaires dans le département du Haut-Rhin ce qui explique qu’il n’a pas eu à faire appel aux militaires le moment venu. "Mais" devait-il ajouter, “ quelles consignes claires doit-on transmettre à la population dans un tel cas ? ”. Il a cependant estimé que dans le département du Haut-Rhin, "les services publics ont eu une bonne réactivité face à cette tempête hors normes… ”. Une fois ce constat posé, les débats se sont ouverts comme il se doit par la définition du sujet : c'est quoi au juste une tempête?

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Claude Lienhard, professeur des Universités, directeur du Cerdacc Ouverture du colloque “ Tempêtes, un an après ” 14 novembre 2000 Monsieur le Préfet, Monsieur le Président de l’UHA Monsieur le représentant de la Région Alsace Monsieur le représentant du Conseil Général du Haut-Rhin Monsieur le Maire –Adjoint de Colmar Mesdames, Messieurs, J’ai beaucoup de plaisir à vous accueillir ce matin pour ces seconds "Entretiens de Colmar". Du 26 au 28 décembre 1999, notre pays a été traversé par les tempêtes Lothar et Martin… Un an plus tard, quelle leçon pouvons-nous tirer de ces événements exceptionnels, encore que les récentes inondations que viennent de connaître le Valais suisse et l’Italie permettent de douter du caractère exceptionnel de certains phénomènes ? En vous invitant à partager ce retour d’expérience, le Cerdacc est dans son rôle d’outil de réflexion au service de la société. C’est là un des rôles essentiel assigné à juste titre à l’Université. Le Cerdacc, depuis les précédents entretiens de Colmar en 1997 a grandi et s’est densifié dans ses approches. Ceci grâce au soutien constant de l’UHA et de l’IUT, et la présence ce matin du Président Binder en est un témoignage de plus. Tout comme le partenariat reconduit avec le Centre Régional de Formation Professionnelle des Avocats d’Alsace et l’Ecole Nationale de la Magistrature, ainsi que le soutien renouvelé de la ville de Colmar, du Conseil Général et du Conseil Régional. Décoder les lendemains de tempêtes : à situation exceptionnelle, dispositions et mesures exceptionnelles, voilà l’enjeu de cette journée. L’université est le temple de la parole libre et je sais que chacun des intervenants usera sans frein de cette liberté, pour nous dire clairement, sans langue de bois, ce qui a donné satisfaction dans les dispositifs, mais aussi pour exposer ce qui doit être amélioré. Je sais que ces paroles seront écoutées avec attention par les nombreux participants. Qu’il s’agisse de professionnels, de chercheurs, mais également des étudiants qui sont les acteurs des dispositifs de prévention de demain. Je m’adresse ici plus particulièrement aux étudiants du DESS Gestion des Risques de Mulhouse que nous avons le plaisir d’accueillir ce matin, les étudiants du DESS de l’Environnement de Strasbourg, les étudiants du département Hygiène et Sécurité de Colmar. Cette journée n’aurait pas vu le jour sans l’engagement de l’équipe du Cerdacc. Qu’il me soit permis de citer tout d’abord ma collègue Mme Marie-France Steinlé-Feuerbach, co-directrice du Cerdacc et spécialiste dans notre équipe de tous les phénomènes naturels, de Françoise Geismar, pilier de l'organisation, ainsi que l'ensemble des enseignants chercheurs, de même que les étudiants du département Carrières Juridiques et plus particulièrement ceux de l’Amicale et d’Atout CJ. Je terminerais cette présentation en vous indiquant qu’un compte-rendu sera disponible d’ici 8 jours sous la forme d’un numéro spécial du JAC, le Journal des Accidents et des Catastrophes, notre cyberjournal. Numero réalisé par les étudiants CJ sous la haute autorité de Jo Laengy notre rédacteur en chef. Cette

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utilisation des nouvelles technologies au service de la diffusion de la connaissance est elle aussi une preuve du dynamisme de notre département. Je tiens d’ores et déjà aussi à remercier tous les intervenants qui ont répondu à notre invitation. Et je déclare ouverts les seconds "Entretiens de Colmar".

Une assistance nombreuse et attentive à l'écoute de Claude Lienhard (Photo Cerdacc - Lionel Humbert)

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Marie France Steinlé-Feuerbach, maitre de conférences, co-directeur du Cerdacc

La tempête : définition juridique par Marie-France Steinlé-Feuerbach Le Petit Robert définit la tempête comme une "violente perturbation atmosphérique près du centre d'une dépression ; vent rapide qui souffle en rafales, souvent accompagné d'orages et de précipitations". Mais le terme "tempête" est absent des dictionnaire juridiques ce qui ne signifie pas que la tempête est ignorée par le droit. Il existe de nombreux textes relatifs à la tempête : loi, arrêtés, circulaires sur l'indemnisation notamment par l'assurance. Depuis la tempête de décembre, ou plutôt les tempêtes puisque ont successivement soufflé Lothar d'abord, Martin ensuite (1) de nombreuses circulaires et notes de services ont été rédigées relativement à des enveloppes budgétaires exceptionnelles en particulier pour le déblaiement des routes et des pistes, la création de pistes, routes et places de dépôt indispensables à la mobilisation des chablis ou encore relatives aux règles applicables aux marchés publics qui doivent être suivies pour les prestations à effectuer après la tempête. Signalons encore la circulaire du 31 décembre 1999 du Ministère de l'Intérieur relative à la commission chargée de veiller au bon déroulement des procédures d'indemnisation. Outre la création d'une commission dans chaque département touché, la circulaire a créé une commission nationale à caractère interministériel présidée par monsieur le préfet Joël Lebeschu lequel nous fait l'honneur d'être présent à notre colloque. Par ailleurs ont été pris 69 arrêtés constatant l'état de catastrophe naturelle et notamment pour les départements alsaciens et lorrains. Les tempêtes sont également présentes dans les jurisprudences civile, commerciale, pénale et administrative : les contentieux les plus fréquents sont relatifs soit au régime assurantiel soit à des actions en responsabilité. Les tempêtes, faits générateurs de dommages, posent en effet deux questions principales : - L'indemnisation des dommages par l'assureur de biens - La recherche de la responsabilité en cas de dommages aux tiers

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I. Indemnisation par l'assureur de biens. La tempête et les biens de l'assuré Lothar et Martin ont mis en évidence à la fois l'ignorance dans laquelle étaient beaucoup de personnes du régime d'assurance applicable à leurs dommages et les inconvénients parfois liés au régime contractuel de l'assurance des effets du vents. A. La multiplicité des régimes d'indemnisation en cas de dommages causés par un événement naturel. Dès lors que l'on parle de dommages causés par la nature, on utilise le terme "catastrophe naturelle" lequel fait immédiatement penser à la fameuse garantie "cat-nat" que chacun d'entre nous contracte dès lors qu'il assure ses biens. Suite à d'importantes inondations notamment dans les vallées de la Saône, du Rhône et de la Garonne en 1981 et 82, le législateur avait organisé l'indemnisation des catastrophes naturelles par la loi du 13 juillet 1982 ; celle ci fut complétée par une loi du 25 juin 1990 puis par une loi du 16 juillet 1992 et enfin par la loi Barnier du 2 février 1995 (2). La garantie des catastrophes naturelles n'est toutefois qu'un des volets de l'indemnisation des risques naturels catastrophiques. En effet, contrairement à ce que pourrait faire croire leur appellation, les catastrophes naturelles au sens du droit des assurances, ne correspondent pas à tous les risques naturels et les tempêtes n'y entrent pas car déjà avant 1982 leurs conséquences pouvaient être couvertes par l'assurance classique. Par ailleurs, pour les biens agricoles, lorsque les éléments de la nature se déchaînent sur des cultures au sol, des récoltes non engrangées ou sur du bétail hors bâtiment le régime d'indemnisation applicable est celui des calamités agricoles. Nous avons donc plusieurs régimes d'indemnisation qui fonctionnent selon des principes différents. Lorsque la cause du dommage est incertaine du fait de la conjonction de plusieurs phénomènes naturels, les juges du fond apprécient souverainement si le vent a ou non joué un rôle déterminant afin de connaître le régime applicable. La garantie des effets du vent a fait l'objet d'une loi du 25 juin 1990 et depuis l’article L 122-7 du Code des assurances précise que “ Les contrats d’assurance garantissant les dommages d’incendie à des biens situés en France ainsi qu’aux corps de véhicules terrestres à moteur ouvrent droit à la garantie de l’assuré contre les effets du vent dû aux tempêtes, ouragans et cyclones, (Les TOC !) sur les biens faisant l’objet de tels contrats…En outre, si l’assuré est couvert contre les pertes d’exploitation après incendie, cette garantie est étendue aux effets du vent dû aux tempêtes, ouragans ou cyclones ” . Le régime des catastrophes naturelles et celui des TOC présentent des différences notables. L'indemnisation des catastrophes naturelles repose sur la solidarité nationale, la prime à payer par les assurés ne dépend pas du taux de sinistralité de la région où se situent leurs biens, l'indemnisation est déclenchée par les fameux arrêtés interministériels de catastrophe naturelle et le régime fonctionne avec la garantie de l'Etat. L'indemnisation des tempêtes relève d'un régime assurantiel purement contractuel. Comme la garantie cat-nat, celle des TOC est greffée sur un contrat socle mais alors que la première garantie est acquise dès que l'on possède une garantie dommage au sens large, la seconde est greffée uniquement sur les contrats "incendie". La garantie multirisque habitation comprend nécessairement celle des effets du vent puisqu'elle contient la garantie incendie.

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Rien n'oblige un assureur à accorder une garantie incendie et donc la garantie tempête alors que celle des catastrophes naturelle est obligatoire pour l'assureur. Et puisque le régime des effets du vent est contractuel aucun arrêté interministériel n'est nécessaire pour déclencher l'indemnisation par l'assureur. La tempête est définie par les contrats d'assurance lesquels retiennent principalement deux critères de l'intensité du vent déclenchant la garantie : vents supérieurs 100 km/h, vitesse attestée par la station météo ou encore dommages à d'autres bâtiments de bonne construction dans la commune ou dans les autres communes avoisinantes (3). Sont couverts les dommages matériels causés aux biens par l'action directe du vent ou du choc d'un corps renversé ou projeté par le vent. Sont également garantis les dommages de mouille causés par la pluie lorsque celle-ci a pénétré à l'intérieur du bâtiment mais seulement pour les deux ou trois jours qui suivent la tempête. Ne sont toutefois garantis que les bâtiments de bonne construction, ce qui exclut les constructions non réalisées suivant les règles de l'art, les bâtiments clos au moyen de bâches. Par une loi du 16 juillet 1992 le législateur a clairement exprimé que la garantie des effets du vent dus aux tempêtes, ouragans et cyclones ne relevait pas du régime des catastrophes naturelles. Cela était nécessaire car entre 1982 et 1992 on a assisté à quelques errements administratifs et jurisprudentiels en matière d'indemnisation des dommages causés par les tempêtes. La lecture du Journal officiel de ces années est révélatrice et nombre d'arrêtés sont rédigés de la manière suivante : "A titre exceptionnel, l'indemnisation des dommages résultant des tempêtes survenues le… est acquise au titre de la loi du 13 juillet 1982". Un arrêt du Conseil d'Etat en date du 17 janvier 1996 est également révélateur de cette confusion : le Conseil d'Etat engage la responsabilité de l'Etat pour faute car l'administration avait refusé d'obtempérer après qu'un arrêt antérieur de ce même Conseil d'Etat (10 janvier 1992) ait annulé un arrêté de catastrophes naturelles parce qu'il n'incluait pas les dommages occasionnés par une tempête survenue en 1988. On pensait que le problème de la distinction entre le régime des cat-nat et celui des TOC était réglé. Erreur… la plus grande confusion a régné dans les médias et même dans l'esprit des pouvoirs publics après les tempêtes de 99. Monsieur Jean-Marc Lamère s'indigne dans la revue Risques (4) : "Précipitation et pédagogie sont difficilement conciliables : dès le 30 décembre, le Journal officiel publiait un arrêté interministériel déclarant l'état de catastrophe naturelle pour 69 départements. Or le régime des catastrophes naturelles ne peut intervenir en la circonstance que pour les effets de l'eau (Inondation, raz-de-marée, coulée de boue…). Le sinistre de décembre 1999 est évalué à 32 milliards de francs, dont seulement 3 milliards au mieux au titre du régime des catastrophes naturelles. Mais dans l'esprit du gouvernement et des parlementaires, il fallait que cette tempête d'une grande violence soit qualifiée de catastrophe naturelle. Beaucoup étaient persuadés que ce classement en catastrophe naturelle aurait pour conséquence une meilleure indemnisation… Il a fallu apporter toutes les explications techniques nécessaires pour apaiser les craintes, défaire les idées reçues et éviter que l'indemnisation du régime des catastrophes naturelles ne soit étendue à des biens et pertes non assurés." En fait seulement 10% des sinistres relèvent du régime des catastrophes naturelles. Sachant que la garantie de l’Etat n’est due que pour les catastrophes naturelles au sens strict du terme, le ministère des finances a très rapidement précisé que “ la loi du 25 juin 1990 a

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instauré une garantie d’assurance des dommages causés par le vent ” (Le Monde, 29 décembre 1999). En ce qui concerne les délais, les effets du vent doivent faire l’objet d ‘une déclaration dans les cinq jours. Devant l’ampleur de la catastrophe provoquée par Lothar et Martin, les assureurs ont porté ce délai à dix jours pour finalement accepter les déclarations jusqu’au 31 janvier ; ils ont également simplifié la procédure d’indemnisation. B) Les inconvénients mis en évidence par les dernières tempêtes Les conditions de garantie, le niveau des cotisations et la réassurance des effets du vent ne sont nullement réglementés. Il n'y a donc pas de régime uniforme et chacun est indemnisé en fonction de son contrat. Ainsi les dommages aux véhicules ne sont pris en charge que si celui-ci est assuré contre l'incendie. Divers éléments peuvent ne pas être pris en charge comme les antennes, les clôtures, portails, abris de jardin, vérandas, volets…(5) Par ailleurs, certains professionnels utilisant des moyens de production anciens et de valeur vénale quasi nulle se trouvent en difficulté faute de garantie "valeur à neuf" dans le contrat et très peu de petites et moyennes entreprises sont couvertes pour les pertes d'exploitation consécutive à une rupture d'approvisionnement en électricité (6). Les cimetières ont souffert. Or au sens du droit des assurances, une sépulture ne constitue pas une dépendance susceptible d'être concernée par l'assurance de biens; la tempête a révélé à quel point les risques liés à la sécurité des sépultures soufraient d'un manque de garantie spécifique (7). La multiplication des régimes d'indemnisation applicables en matière de dommages dus aux éléments naturels est certes une source de complication pour les victimes. L'usager est confronté à des régimes différents et se pose la question de l'égalité de traitement suivant le risque naturel. II. La tempête et les dommages aux tiers La tempête peut être également source de responsabilité dès lors que des dommages sont causés à des tiers (8), se pose alors la question de savoir si l'événement naturel est constitutif d'un cas de force majeure exonératoire. A. La tempête cause un dommage à un tiers : Les exemples sont nombreux : une voiture est endommagée par la chute d'un arbre ou d'une cheminée, une branche d'arbre arrachée par le vent blesse un passant, un navire romp ses amarres et aborde un autre navire, le fronton d'un bâtiment communal s'écroule et cause des dommages… Dans ces hypothèses, peut-être recherchée par la responsabilité du propriétaire, du gardien, du constructeur, de l'administration… L'assureur de biens ayant indemnisé son assuré est également justifié à exercer une action subrogatoire contre le responsable. Selon les circonstances, il s'agira de responsabilité civile, administrative ou même pénale. En

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fonction du régime applicable, la responsabilité sera fondée sur une faute ou bien sera objective. Le défendeur peut se dégager de cette responsabilité en démontrant que la tempête est constitutive d'un cas de force majeure. B. La tempête est-elle constitutive de force majeure? Classiquement les critères de la force majeure sont au nombre de trois : l'événement doit être à la fois extérieur, imprévisible et irrésistible. Les tribunaux pourtant ne requièrent pas toujours l'imprévisibilité. Il est des événements qui bien que prévisibles sont absolument irrésistibles car rien ne peut être entrepris pour éviter leurs conséquences. En droit privé, la force majeure "désigne l'événement qui, d'une part, a eu sur la réalisation du dommage, une influence si déterminante qu'il a rendu pratiquement négligeable le rôle des autres conditions et qui, d'autre part, a rendu impossible l'exécution des obligations du débiteur ou le respect des devoirs s'imposant normalement à l'agent" (9). Actuellement, on note une tendance du juge civil à remplacer l'imprévisibilité et l'irrésistibilité par l'inévitabilité. En droit public, l'effet exonératoire de la force majeure peut n'être que partiel. Il en est ainsi chaque fois que les conséquences dommageables d’un événement de force majeure sont aggravés par le fait du défendeur. Pour le juge administratif l'événement est de force majeure s'il est "raisonnablement inattendu et absolument imparable". En matière d'évènement naturel seront essentiellement pris en considération sa violence et son intensité exceptionnelles et imprévisibles qui rendent le dommage inévitable. On enseigne classiquement que les forces de la nature sont constitutives de force majeure, mais une étude à laquelle nous nous sommes livrés nous a démontré qu'il n'en était rien. En cas d'évènement naturel la force majeure est reconnue dans 25% des contentieux en droit civil et dans 11% seulement en droit administratif. Le critère de l'extériorité est rarement invoqué, il est parfois rappelé comme étant un des trois critères de la force majeure mais il est fort peu discuté. L'imprévisibilité de l'évènement est requise car s'il avait été prévisible on aurait peut-être pu le combattre. Pour la Cour d'appel de Toulouse (10), un vent supérieur à 112 km/h est exceptionnel par rapport aux statistiques de Météo France : “ C’est à juste titre que le tribunal a considéré que cette tempête dont le caractère exceptionnel est révélé par les statistiques de Météo France portant sur une durée de 30 ans présentait les caractères de la force majeure et exonérait par conséquent le locataire". La seconde chambre civile de la Cour de cassation (11) avait admis l'imprévisibilité d'un cyclone à Saint-Barthélémy car celui-ci était constitutif d'une anomalie dans la chronologie des cyclones établie depuis plus d'un siècle et que la lente évolution de la situation ne laissait pas présager une formation aussi rapide d'une dépression tropicale. En l'espèce, la force majeure avait conduit l'exonération du gardien d'un conteneur lequel, projeté par le vent, avait endommagé un navire car la soudaineté du phénomène avait empêché que les conteneurs puissent être retirés du quai du fait de la rupture de la voie d'accès. Mais par ailleurs, la Cour de cassation a estimé que l'imprévisibilité n'est pas caractérisée par un temps de retour supérieur à 10 ans (12). De même la seconde chambre civile refuse de considérer comme imprévisible un vent à 216 km/h pendant le passage du cyclone "Firinga", des rafales de vent plus violents avaient été enregistrés moins de dix ans avant et moins de dix

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ans après les événements en cause (13). Le Conseil d'Etat avait refusé de reconnaître un caractère d'imprévisibilité à une tempête survenue à Palavas-les Flots en 1982 et ayant provoqué le décrochement des bateaux amarrés car des vents d'une vitesse au moins égalée étaient déjà survenus en 1952, 1967 et 1968 (14). La Cour administrative d'appel de Nantes (15) a retenu la responsabilité d'une commune pour la chute d'un arbre ayant entraîné des dommages corporels car le vent était habituel dans la région, la commune n'ayant pas établi la preuve de l'entretien normal de l'arbre. S'agissant de l'irrésistibilité, est considéré comme irrésistible l'événement contre lequel l'agent ne peut rien faire lorsqu'il se produit, qu'il ne peut combattre. C'est la violence du vent et sa soudaineté qui le rendent fréquemment irrésistible ce qui lie souvent l'irrésistibilité à l'imprévisibilité. Ainsi le vent est irrésistible si sa soudaineté a empêché toute intervention (16). Est irrésistible également un vent qui est un véritable cyclone affectant 33 communes, déracinant des centaines de chênes parfois très âgés et notamment des arbres en bon état sanitaire solidement implantés depuis plus de cinquante ans dans une propriété du Loiret (17). De même a été qualifié d'irrésistible un vent à 144 km/h, vitesse dépassant celle atteinte en moyenne une fois tous les 110 ans ; alors que les prévisions météo étaient "Orages localement assez forts… vent sud-est" , la Cour d'appel de Paris a retenu que : "La soudaineté et la violence du phénomène naturel - qualifié de tornade- n'ont permis aucune action préventive" (18). Pour une autre tempête à Palavas-les-Flots la première chambre civile de la Cour de cassation (19) admet l'irrésistibilité pour exonérer la commune, bailleur d'un ber, des dommages causés à un navire : "La cause de l'accident résidait dans la tempête qui avait sévi à Palavas-les-Flots et aux environs dans la matinée du 10 octobre 1987, des vents qui atteignaient 122 kilomètres à l'heure, et correspondaient à la force douze sur l'échelle de Beaufort, ayant été enregistrés au moment de la chute du navire." Le refus de l'irrésistibilité est fréquemment lié à une faute, à une absence de précaution, puisque des mesures auraient pu être prises pour empêcher le sinistre. La seconde chambre civile a ainsi jugé que les dégâts étaient normalement évitables, malgré un cyclone d'une violence rarement rencontrée plus d'une fois par siècle dès lors que seules les queues ont provoqué de graves désordres avec un vent de 90km/h avec des pointes à 130 (20). Le Conseil d'Etat a estimé qu'un vent dont la violence n'était pas suffisante ne pouvait être à l'origine de l'effondrement d'un mur de soutènement lequel était dû à un défaut d'entretien (21) . Comme nous venons de le constater, c'est fréquemment la violence du vent qui confère à l'événement son caractère de force majeure exonératoire. Se pose bien évidemment la question de savoir si Lothar et Martin sont constitutifs de force majeure? Nous ne disposons pour l'instant d'aucune décision, aussi ne pouvons-nous que faire des suppositions en confrontant ces tempêtes aux trois critères de la force majeure. L'extériorité ne devrait guère poser de problème. S'agissant de l'imprévisibilité on peut objecter que la tempête avait été annoncée par Météo France, cependant sa violence avait été sous-estimée or la violence est fréquemment un indicateur de la force majeure. Quant à l'irrésistibilité, celle-ci devrait être retenue en raison également de la violence du vent laquelle a dépassé à certains endroits la vitesse de 170 km/h . A Colmar des rafales ont atteint

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165 km/h, à Strasbourg, 144 km/h (22). Une tempête annoncée mais dont la violence surprend peut constituer un cas de force majeure exonératoire. La grande majorité des dommages étaient ici inévitables. Pour terminer nous évoquerons un autre aspect de la tempête : EDF est-elle responsable du baby boum survenu 9 mois après la tempête avec un accroissement des naissances atteignant 25% dans certains départements ? Notes: (1) La FFSA s'est rangée à l'avis de Météo France sur la base des relevés effectués en retenant deux événements distincts ce qui n'est pas sans conséquence sur les traités de réassurance (2) Une grande innovation de la loi du 2 février 1995 réside dans les possibilités nouvelles offertes par l'expropriation des biens exposés aux risques dès lors que des vies humaines sont menacées. Il existe trois risques naturels susceptibles d'entraîner un expropriation des biens situés dans les zones à risques : les mouvements de terrains, les avalanches et les crues torrentielles. Le texte est donc presque exclusivement adapté à la montagne. L'indemnisation doit être versée par le biais d'un fonds de prévention des risques naturels alimenté par un prélèvement sur le cotisations finançant le régime cat'nat; voir François SERVOIN, "Les ruines de Séchilienne, un risque au régime juridique incertain", RJ.E, 1/1997 (3) Voir notamment : Philippe Casson, "La tempête, les immeubles et le droit", P.A., n°61 et 66, 28 mars et 3 avril 2000 (4) Jean-Marc Lamère, "Assurance et catastrophe : aujourd'hui et demain", Risques n° 42, juin 2000, p. 107 (5) Document CDIA, FFSA, 4 janvier 2000, "Tempêtes et inondations : les réponses à vos questions" (6) FFSA Infos, 1er janvier 2000 (7) Méziane Benarab, "Tempête sur les cimetières. De la sécurité des cimetière en général et de la responsabilité des maires en particulier", P.A., n° 157, 8 août 2000, 21 (8) Voir Jurisques, Prévention des Risques naturels, Jurisprudence commentée, Ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement, 1ère éd., juillet 2000 (9) Geneviève Viney et Patrice Jourdain, Les conditions de la responsabilité, L.G.D.J., 2ème éd., 1998, n° 392, p. 23 (10) Toulouse, 29 septembre 1998 (11) Civ. 2ème, 5 janvier 1994, l'événement avait été jugé à la fois imprévisible et irrésistible (12) Civ. 3ème, 7 mai 1996 (13) Civ. 2ème, 18 mars 1998 voir également T.G.I. Paris, 6 mars 1981 : "le site de Gravelin classé dans la région. Il correspond à des vitesses normales de vent par mauvais temps de 121,7 km/h et à des vitesses extrêmes de 160 km/h. La vitesse de 133,3 km/h correspond à une tempête non exceptionnelle" et Civ. 3ème, 16 janvier 1985 pour des vents de 125/128 km/h, "les circonstances atmosphériques n'étaient pas exceptionnelles le jour du sinistre, la vitesse des vents étant demeurée inférieure à la vitesse extrême prévue dans la région" (14) CE, 19 juin 1992, Ville de Palavas-les-Flots/M. Combette et autres (15) CAA Nantes, 25 juin 1992, commune de Charge/ M. Perano (16) Civ. 2ème, 5 janvier 1994 (17) Civ. 3ème, 29 juin 1988 (18) Paris, 23 février 1996 (19) Civ. 1ère, 22 novembre 1994 (20) Civ. 2ème, 8 février 1989 (21) CE, 18 décembre 1987, association syndicale autorisée pour la défense contre la mer et l'aménagement de la Garenne de Retz/ M. Touchais (22) Voir le site Internet de Météo France : http://www.meteo.fr/la_une/tempetes.html

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Johannes Dessere et Aurélie Gammaitoni étudiants en 2ème année sous la direction de A. Schneider, professeur associé, membre du Cerdacc

LES SERVICES PUBLICS: ENTRE DEFINITIONS ET REALITES METEOROLOGIQUES Les " Entretiens de Colmar " prévoyaient comme introduction aux thèmes de la journée consacrée aux tempêtes des 26 et 27 décembre 1999 deux interventions destinées à clarifier le terme de tempête. Que recouvre-t-il ? Sur le plan juridique comme sur celui de la météo. Deux intervenants se sont attachés à " mettre à plat " les notions de tempête. Des précisions qu’il n’était pas inutile de donner en guise de coup d'envoi. Ainsi, d’un point de vue strictement juridique, le terme tempête n’est pas défini. Pour autant il n’est pas ignoré par le droit. C’est ce qu’a expliqué Marie-France Steinlé -Feuerbach, co-directeur du Cerdacc et juriste. Il existe bien sûr de nombreux textes relatifs à la tempête : lois, arrêtés, circulaires sur l’indemnisation. Les tempêtes sont également présentes dans la jurisprudence civile, commerciale, pénale et administrative : les contentieux les plus fréquents sont relatifs soit au régime assurantiel soit à des actions en responsabilité. Les tempêtes , faits générateurs de dommages, posent en effet deux questions principales : - l’indemnisation des dommages - la recherche de la responsabilité en cas de dommages aux tiers. Avec un sens pédagogique certain, Marie-France Steinlé-Feuerbach en spécialiste du sujet s’est attachée à décortiquer le sujet. “ Dès lors que l’on parle de dommages causés par la nature dit-elle, on utilise le terme “ catastrophes naturelles ” lequel fait immédiatement penser à la fameuse garantie “ cat’nat ”. Contrairement à ce que pourrait faire croire leur appellation, les catastrophes naturelles au sens du droit des assurances, ne correspondent pas à tous les risques naturels et les tempêtes n’y entrent pas. Le régime des catastrophes naturelles est régi par la loi du 13 juillet 1982. L’indemnisation repose sur la solidarité nationale. Cette indemnisation est déclenchée par la prise préalable d’un arrêté interministériel de catastrophe naturelle. Le régime fonctionne avec la garantie de l’Etat. Par contre, l’indemnisation des tempêtes relève de la loi du 25 juin 1990. C’est un régime assurantiel purement contractuel. La tempête peut être source de responsabilité dès lors que des dommages sont causés à des tiers. Pour cela, l’évènement naturel doit être constitutif d’un cas de force majeure exonératoire. Classiquement, les critères de la force majeure sont au nombre de trois : l’événement doit être à la fois extérieur, imprévisible et irrésistible. Les tribunaux pourtant ne requièrent pas toujours l’imprévisibilité. Actuellement, on note une tendance du juge judiciaire à remplacer l’imprévisibilité et l’irrésistibilité par l’inévitabilité. En effet, en droit civil, on ne retient parfois que le caractère irrésistible de l’événement, lorsque le préjudice est inévitable. Cependant, en droit public, la faute ou la simple négligence de l’agent exclut le caractère inévitable de l’événement : dans ce cas, la force majeure n’est que partiellement exonératoire.

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Se pose bien évidemment la question de savoir si Lothar et Martin (tempêtes du 26 et 27 décembre 1999) sont constitutifs de force majeure ? L’extériorité ne devrait guère poser de problème. S’agissant de l’imprévisibilité, on peut objecter que la tempête avait été annoncée par Météo France, cependant, sa violence avait été sous-estimée. Or, la violence est fréquemment un indicateur de la force majeure. Quant à l’irrésistibiilité, celle-ci devrait être retenue en raison de la violence du vent (rafales à plus de 170 km/h). D’un point de vue technique, l’intervention de Philippe Lamy, représentant de Météo France s’est inscrite dans ce contexte. S’il a présenté dans leurs grandes lignes les missions de Météo-France et ses moyens, il a défini la tempête comme une violente perturbation atmosphérique accompagnée de vents compris entre 90 et 120 km/h. Cependant et non sans une pointe d’auto-dérision, il a bien précisé que “ la météo n’était pas une science exacte et qu’il restait encore des progrès à faire dans ce domaine… ”.

En ce qui concerne Lothar et Martin, la force exceptionnelle des vents est née de la juxtaposition d’une perturbation de surface et d’un jet d’altitude. Pour mémoire, les Centres Départementaux de la Météorologie ont relevé des vents soufflant à plus de 200 km/h ces jours-là. Et des “ vents jets ” de 518 km/h. Il a par ailleurs expliqué que “ des expériences comme celles-ci nous permettent d’avancer ”. Une évidence qui appelle d’ailleurs la refonte des alertes météorologiques. Comment ? Philippe Lamy a souligné qu’un test est en préparation comportant une carte de vigilance à destination des services institutionnels ( SDIS etc…) les médias et le grand public.

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Xavier Latour, maitre de conférences, membre du Cerdacc Nathalie Cloix et Sébastien Herzog étudiants en 2ème année sous la direction de Hervé Arbousset ,maitre de conférences, membre du Cerdacc

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LA COOPÉRATION EUROPÉENNE DES SERVICES PUBLICS FACE À LA TEMPETE : L’EXEMPLE D’EDF

Xavier Latour durant son intervention ( Photo Cerdacc: Lionel Humbert) Dans un contexte économique caractérisé par le développement de la libre concurrence y compris dans des services publics jusque là monopolistiques Sous l’effet du droit communautaire, le marché de l’électricité est progressivement ouvert à la concurrence (directive 96/92 du 19 décembre 1996 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité). Voy. la loi 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité ; Paule Quilichini, “ La modernisation du service public de l’électricité ”, LPA 31 octobre 2000, pp. 10-19. , l’intervention d’électriciens étrangers sur le territoire français à l’occasion de la tempête Pour une analyse globale de la réaction d’EDF face à la tempête, voy. le rapport d’expérience rédigé par EDF. a constitué une forme inédite de collaboration. L’originalité réside, d’abord, dans le nombre d’agents étrangers mobilisés (plus de 1500) et dans la rapidité de leur intervention ; ensuite, dans leur origine géographique variée RFA, Belgique, Espagne, Grande-Bretagne, Irlande, Italie, Portugal, Suisse, Tchéquie. Le Maroc a également participé aux opérations. ; enfin, parce que leur venue a mis en relation des entreprises au statut juridique diversifié (entreprises privées ou publiques – EDF étant un établissement public industriel et commercial EDF est dotée d’une personnalité juridique de droit propre lui conférant une assez large autonomie dans le respect du principe de spécialité et en étant régie par des règles de droit public et de droit privé en raison de son caractère industriel et commercial. -). En faisant appel à des moyens extérieurs, ainsi qu’à l’armée française Olivier Gronier, “ EDF : une mobilisation sans précédent”, Les Cahiers de Riberpray – Zone de Défense Est,Juillet 2000, pp. 33-46., EDF avait pour objectif le rétablissement du réseau dans les meilleurs délais. Il s’agissait d’une exigence commerciale conforme à l’esprit du service public à la française fondé sur la satisfaction de l’intérêt général. Alors que la force majeure autorisait la mise entre parenthèse du principe de continuité CE, 13 juin 1980, Mme Bonjean, Rec. 274., l’usager ne pouvait pas être pour autant oublié. Parce que depuis plusieurs années, le renouveau du service public Voy., par exemple, la circulaire de M. Michel Rocard (à l’époque premier ministre) du 23 février 1989 relative au renouveau du service public. est amorcé et, parce que les usagers sont devenus clients, ces derniers devaient être rapidement soulagés. A cela s’ajoutait une ambition politique pour la direction d’EDF, laquelle, en période de bouleversements du paysage de l’électricité en Europe, devait donner des gages d’efficacité et de compétence. Ainsi, il convenait de

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justifier la notion même de service public en faisant oublier les inconvénients du monopole, voire éventuellement en soulignant son efficacité. Dans un même ordre d’idées, les craintes liées à l’existence d’un oligopole européen devaient sans doute aussi être atténuées 6 compagnies réparties en France, RFA, Italie et Espagne dominent 80% du marché.. Ces objectifs ont été globalement atteints. D’un point de vue commercial et médiatique, la mobilisation des personnels d’EDF, soutenus par leurs collègues étrangers, a permis le rétablissement efficace des lignes 80% des clients dépannés en 24 heures ; 95% en 5 jours.. Pour ce faire, le soutien apporté par les électriciens étrangers a revêtu deux aspects : d’une part, la mise à disposition de personnels ; d’autre part, la fourniture de matériels. A chaque fois, les concurrents sont devenus partenaires. Face à cette situation, le juriste ne peut manquer d’être attentif et de se poser quelques questions : la situation de crise a t-elle justifié l’application d’un droit de crise ? La coopération a-t-elle été développée sur le fondement d’un droit spécifique ou du droit commun, voire sans droit, compte tenu de l’urgence ? Plus concrètement, dans quelles conditions et sur quels fondements sont intervenus les électriciens étrangers ? Enfin, ces événements ont-il servi de leçon pour adapter le droit applicable et les structures à un environnement de crise ? Ces interrogations appellent des réponses nuancées, parfois même surprenantes et déstabilisantes. Il s’avère, en effet, que la coopération s’est initialement développée sans droit (I). Puis, l’urgence s’éloignant, la coopération a été progressivement structurée par le droit (II). I. Une coopération initialement développée sans droit Alors que des entraînements réguliers permettent de préparer les personnels à une situation de crise, rien dans l’environnement juridique d’EDF n’était conçu pour structurer la réaction de l’établissement face à la tempête. De ce point de vue, il s’agit bien d’une crise sans droit (A), ce qui contraste avec d’autres situations pour lesquelles le droit est non seulement présent mais conçu pour faciliter les réactions On songe, notamment, aux obligations pesant sur certains secteurs d’activités en cas de crise civile ou militaire (réquisitions, protection des installations, approvisionnement…).. En l’espèce, le droit paraît davantage avoir été assimilé à un obstacle. Il est alors légitime de s’interroger sur une possible crise du droit (B). A. Une crise sans droit De l’aveu des participants aux structures de crise, les juristes n’ont pas été les plus sollicités. L’application du droit n’était pas une priorité au regard des défis matériels et humains à relever. Si des structures particulières de gestion ont été créées, elles ne pouvaient pas s’appuyer sur un droit propre, ce dernier n’existant pas. Au moment de la tempête, aucun accord, aucune disposition contractuelle entre EDF et les opérateurs étrangers ne prévoyait, ni n’encadrait leur intervention sur le territoire français. Les cellules de crise n’ont donc pas eu à se préoccuper du respect de normes contraignantes mais, en contrepartie, leur tâche n’a pas été favorisée par l’existence de fondements préexistants. Ainsi, le comité de crise (organisé autour du président d’EDF L’expérience de M. Roussely au sein des institutions de défense n’a sans doute pas été négligeable pour l’aider à gérer la crise. et assurant la direction nationale des secours) et les cellules décentralisées dans les différentes collectivités locales concernées (cellules chargées de la distribution Une organisation centrale d’achat a été mise en place entre

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les 27 et 28 décembre, autour de trois niveaux : 4 cellules régionales, 1 cellule centralisatrice de tous les besoins, 4 cellules d’approvisionnement et cellules chargées des transports) ont dû, avant tout, procéder de manière empirique et pragmatique Leur réaction a été facilitée par le contexte du passage à l’an 2000, à l’occasion duquel des moyens exceptionnels avaient été mobilisés et même si par la suite les deux problèmes ont été clairement distingués. Plus exactement, l’appel à l’aide extérieure est, essentiellement, le fruit de la solidarité unissant les électriciens européens. Cette solidarité explique les résultats positifs des contacts pris bien souvent à distance ou par l’intermédiaire des représentants locaux des opérateurs concernés. A l’instar de la solidarité qui caractérise les rapports entre transporteurs maritimes La loi n° 69-441 du 20 mai 1969 sur les transports maritimes d'intérêt national (dite loi TRAMIN) est ainsi connue pour sa souplesse puisqu'elle permet au ministre chargé de la Mer de reconnaître à une forme de transport un "intérêt national", puis de conclure une convention avec le transporteur ou de le réquisitionner (après inexécution ou à défaut d'accord amiable)., les électriciens européens ont rapidement pris conscience de la nécessité de venir en aide à EDF. Il serait, toutefois, naïf de croire que cette solidarité était désintéressée. Au contraire, elle est la conséquence de données très concrètes. Au-delà de la solidarité de métier, il faut rechercher les raisons de la coopération en direction des liens économiques entre les opérateurs. En plus de l’interdépendance entre EDF et ses filiales ou avec les sociétés dans lesquelles elle a des participations, ou encore entre EDF et ses sous-traitants (EDF étant bien souvent un client dominant), l’influence de l’interconnexion des réseaux électriques doit être soulignée. En important de l’électricité de France, certains opérateurs avaient un intérêt évident à ce que le réseau fonctionne à nouveau convenablement. Le très faible degré d’application du droit dans les premiers temps de la tempête pourrait faire l’objet d’une simple constatation d’autant moins préoccupante que la collaboration entre électriciens a fonctionné. Néanmoins, cette façon de gérer l’urgence pourrait, également, traduire un phénomène plus profond et mettre en évidence une crise du droit. B. Une crise du droit ? L’interrogation sur une éventuelle crise du droit part du constat d’un paradoxe. En effet, le droit se voit conférer dans l’environnement de la tempête une place secondaire alors que l’on assiste à une hausse constante de la consommation de droit dans la société, à une “ juridicisation ” des rapports sociaux Olivier Mongin, “ Le recours accru au droit : raisons et portées ” in Le droit dans la société, Cahiers Français, éd. La Documentation française, n° 288, oct.-déc. 1998, pp. 35-41.. Bien que plongeant ses racines dans une tradition historique peu contestable Cela peut s’expliquer, notamment, par la place faite à la loi depuis Rousseau., le développement du contentieux est de plus en plus marqué tout comme la volonté de s’en protéger en anticipant toutes les formes possibles de litige. Sans doute sous l’influence du droit anglo-saxon Gwénaële Calvès, “ France-Etat-Unis : deux cultures juridiques ” in Le droit dans la société, Cahiers Français, op. cité, pp. 28-34., les juges sont désormais placés sur le devant de la scène au point que certains craignent leur gouvernement. Dès lors, les agents économiques sont toujours davantage soucieux de comprendre le droit pour mieux l’utiliser. En d’autres termes, la France, comme de nombreux autres Etats, a développé une véritable “ passion du droit ” Jean Carbonnier, Droit et passion du droit sous la cinquième république, éd. Flammarion, 1996.. Dans ces conditions, il est assez surprenant de constater que face à une situation aussi complexe que celle provoquée par la tempête, le droit n’a pas constitué une préoccupation majeure ; il n’a pas été appréhendé comme un outil pour surmonter la crise. On peut alors penser que les opérateurs ont cherché en priorité la souplesse nécessaire à leur action tandis que, selon eux, une stricte application de la norme aurait sans doute limité, au moins en apparence, leur liberté de manœuvre.

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Cette réaction soulignerait, avec force et non sans un certain pessimisme, l’inadaptation de la norme. De là à croire que le droit serait réservé à un microcosme, il n’y a qu’un pas aisément franchissable et ce d’autant plus facilement que les apparences n’incitent pas au démenti. Pour ne citer qu’un exemple, il existerait près de 100 000 lois encore en vigueur, signe d’une incontestable inflation législative. Dans ce contexte, le droit deviendrait incompréhensible ; il atteindrait un stade proche du dérèglement et de la saturation, contraire à l’objectif à valeur constitutionnelle d’ “ accessibilité ” et d’ “ intelligibilité ” proclamé par le Conseil constitutionnel DC, 16 décembre 1999, M.-A Frison-Roche et W. Baranès, D. 2000, Chron. P. 361.. Le phénomène n’est pas nouveau, Tocqueville craignant déjà l’apparition d’un “ réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes ” Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique, éd. Garnier-Flammarion, 1981, Tome II, p. 386.. Ce droit complexe et insaisissable serait, par conséquent, inadapté aux situations de crise, surtout lorsqu’elles mettent en jeu des rapports internationaux. Plus qu’une aide le droit serait un obstacle à l’action. A l’inverse, selon une conception plus optimiste, le droit laisserait encore assez de souplesse pour une réaction adaptée. Un droit flexible serait appliqué uniquement lorsque le besoin s’en fait sentir et que l’urgence est passée. Dans le cas plus particulier d’EDF face à la tempête, les sentiments de l’observateur sont partagés. D’un côté, le bon fonctionnement du système improvisé, tel qu’il a servi de fondement à la coopération entre électriciens, est une source de satisfaction. Mais, d’un autre côté, des craintes rétrospectives ne sont pas totalement absentes. Ainsi, quelles auraient été les conséquences en cas de défaillance de la coopération ? Le seul terrain de la responsabilité offre plusieurs hypothèses de contentieux lesquels, sans une bonne utilisation préventive du droit, auraient pu prospérer avec tout ce que cela induit de désagréments, frais et risques. Une multinationale comme EDF a vraisemblablement intérêt à gérer une situation aussi périlleuse en prenant un maximum de garanties à l’égard de partenaires toujours susceptibles de redevenir des concurrents. Le rôle de l’Etat n’est pas non plus à négliger. Parce qu’il exerce sa tutelle sur l’établissement, ne devrait-il pas anticiper et prendre un maximum de précautions ? Gouverner n’est-ce pas avant tout prévoir ? Les craintes sont, également, relatives à l’avenir. Si le système a fonctionné une fois, le pourra-t-il à nouveau ? Rien n’est moins sûr. Or, il serait regrettable de recourir au droit dans l’urgence non pas d’une tempête mais de contentieux. Pourtant, le risque existe de négliger les garanties offertes par le droit et de se trouver acculé par le juge. C’est d’ailleurs cette perception de l’utilité du droit qui a poussé EDF à progressivement mieux structurer juridiquement la coopération internationale développée pendant la tempête ou à l’organiser dans des cas similaires à venir. II. Une coopération progressivement structurée par le droit Dans les grandes lignes, la coopération internationale a pu être lancée en dehors de mécanismes juridiques prédéfinis, mais il est apparu par la suite que l’intervention d’opérateurs étrangers devait, malgré tout, être encadrée par le droit. Or, il s’avère que la situation d’exception a été régie par le droit commun (A). En outre, EDF, tirant les leçons de la tempête, tente d’anticiper de futurs besoins et s’est engagée, à cette fin, dans une recherche difficile d’institutionnalisation de la coopération (B). A. Une situation d’exception régie par le droit commun Il n’était pas suffisant d’obtenir l’accord de partenaires quant à l’envoi d’hommes ou de matériels sans encadrer les actions entreprises. Une fois la coopération acceptée et engagée, l’introduction d’une dose de droit est apparue indispensable. Or, à défaut d’un environnement juridique adapté au cas de force majeure qu’était la tempête, des mécanismes de droit traditionnels ont été retenus.

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Les domaines concernés ne manquaient pas. Parmi les principaux, on peut signaler l’assurance des agents travaillant sur le réseau et des travaux effectués, l’achat ou la location de matériels, le défraiement des personnels… Dans tous ces cas, le seul fait qu’aucune disposition juridique particulière n’ait été utile, mérite d’être relevé. Ainsi, pour s’en tenir au seul exemple des assurances, EDF a appliqué des règles classiques relatives à la responsabilité extra-contractuelle à l’égard des tiers et à la responsabilité contractuelle à l’égard des clients. Quant aux dommages causés aux tiers, EDF a invoqué la force majeure lorsque le préjudice a résulté directement de la tempête. Pour les préjudices postérieurs, les garanties “ responsabilité civile ” ont correctement fonctionné (une vingtaine d’affaires environ). Les dommages subis par les clients ont, également, été traités différemment selon les hypothèses. Pour ceux causés par la tempête, EDF s’est référé aux clauses contractuelles relatives aux phénomènes atmosphériques irrésistibles. Pour ceux causés lors des opérations de rétablissement, l’établissement public a mis en œuvre ses garanties d’assurance, sans volonté systématique d’invoquer la force majeure comme cause d’exonération. Pour les dommages subis par EDF sur son réseau, la situation est plus simple. En effet, l’établissement s’auto-assure en profitant de sa situation de monopole lui permettant, au besoin, d’augmenter ses tarifs. Ces pratiques, rassurantes dans le contexte de la problématique d’une crise du droit, ne sont pas pour autant exemptes de limites. Jusqu’à quand EDF sera-t-elle en mesure de s’auto-assurer ? Parce que la solution des tarifs sera de plus en plus délicate à employer, la coopération de terrain pourrait se transformer en coopération financière adaptée aux situations de crise. En effet, la “ mutualisation ” des risques devenant difficile lorsque les entreprises atteignent des tailles importantes, d’autres formules sont à rechercher. Ainsi, l’extension des liens entre le marché financier et l’assurance par l’intermédiaire de “ cat bonds ” est envisagée. Selon cette formule, les modalités de remboursement d’un emprunt sont conditionnées par la survenue de phénomènes particuliers (cataclysme...). Parallèlement, même si elles ont été satisfaisantes, EDF ne souhaite apparemment pas utiliser des modalités identiques de mobilisation des électriciens étrangers en cas de nouvelle crise. EDF explore, désormais les voies de l’institutionnalisation, ce qui n’est pas exempt de difficultés. B. Une difficile recherche d’institutionnalisation La coopération organisée à l’occasion de la tempête a mis en évidence le besoin de rationaliser l’organisation des secours. Cela concerne, notamment, l’harmonisation du matériel et la normalisation des stocks. Or, cette harmonisation ne se fera vraisemblablement pas par accord entre les différents opérateurs européens mais uniquement sous l’effet des pressions économiques exercées par des opérateurs dominants sur leurs fournisseurs. Différente est la perspective d’une gestion plus efficace des ressources humaines. En effet, influencée par l’expérience des militaires, EDF constitue progressivement une Force d’Intervention Rapide Electricité (FIRE). En l’état actuel des travaux, il ne s’agit pas d’une force spéciale mais d’une planification de la mobilisation des moyens dans chaque centre. Cette force conçue avant tout pour intervenir dans les régions françaises L’intervention de 2300 agents dans le cadre de la FIRE, le 30 octobre 2000, à la suite de vents violents, en est une bonne illustration., pourrait aussi avoir vocation à agir au moins dans l’étranger proche et en collaboration avec les opérateurs locaux ainsi que les filiales d’EDF. La FIRE, dans un premier temps, composée de moyens nationaux, s’ouvrirait à différents partenaires européens. Par ailleurs, l’appel à des renforts étrangers serait lancé uniquement si la moitié du territoire français est touchée.

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Globalement, l’idée est, par conséquent, de développer la coopération non seulement par une meilleure coordination des moyens mais également par l’introduction de plus de droit. Ainsi, une Charte de coopération entre les différents opérateurs constituerait le fondement d’une intervention efficace. Elle servirait de cadre à l’introduction dans la FIRE d’éléments étrangers tout en apportant quelques solutions aux problèmes élémentaires résultant d’une coopération internationale. Par exemple, les interventions croisées entre opérateurs se feraient à prix coûtant ou avec une marge réduite. Toutefois, les perspectives d’aboutissement de cette Charte sont floues. Il est vrai que sa rédaction se heurte d’une part, à des divergences quant à sa valeur juridique (valeur déclaratoire ou quasi-contractuelle ?) et, d’autre part, à la question des statuts des différents opérateurs, publics ou privés. Il semble ainsi que le ministère de tutelle d’EDF entretienne quelques réserves à cause de l’ouverture à la concurrence. Il ne faut, apparemment, pas donner l’impression qu’EDF cherche un moyen supplémentaire de dominer des concurrents en exerçant sur eux une influence trop marquée. En attendant, qu’une coopération efficace soit organisée et dans la perspective de la concurrence, il conviendrait au moins de veiller à ce que les entrepreneurs publics ou privés travaillant dans le secteur de l’électricité soient contraints d’assurer leurs missions de service public, y compris en période de crise grave. Un cahier des charges pourrait être imposé en ce sens et, éventuellement, coordonné à l’échelon européen Voy. Michel Guillot, “ Tempête sur les Vosges ”, Les Cahiers de Riberpray – Zone de Défense Est,Juillet 2000, pp. 63-73.. En définitive, la coopération entre les électriciens pendant la tempête préfigure, peut-être, le futur paysage de l’électricité évoluant sous l’effet des rapprochements et des participations croisées. Le juriste aura sans doute un rôle essentiel à jouer dans cette évolution. Encore conviendra-t-il que les principaux acteurs admettent en la matière l’utilité du droit et que le juriste, pour paraphraser Giraudoux, fasse quant à lui autant preuve d’imagination que le poète en ses heures inspirées.

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Nathalie Cloix et Sébastien Herzog étudiants en 2ème année sous la direction de Hervé Arbousset, maître de conférences, membre du Cerdacc URGENCE ET SECOURS : MISE EN PLACE DES DISPOSITIONS D'AIDE Pour M. Xavier Latour, maître de conférences en droit public et membre du CERDACC, la tempête a donné lieu à une forme inédite de coopération entre EDF et ses partenaires européens en ce qui concerne la remise en état des installations et du réseau électrique français. Cette collaboration est intéressante car elle s’inscrit dans un contexte d’ouverture de l’électricité à la concurrence européenne. L’originalité de cette coopération réside en 3 points : le nombre d’agents étrangers mobilisés, la rapidité de l’intervention et la collaboration entre des entreprises ayant un statut différent, (de droit public et / ou de droit privé). Xavier Latour a souligné qu’à l’occasion de cette collaboration, EDF a eu le souci de légitimer son monopole en prouvant que ce n’est pas un obstacle à une intervention efficace puisque la demande des clients a été globalement satisfaite et que les installations ont été remises en état rapidement. Selon Xavier Latour, on peut alors se poser plusieurs questions : Face à cette situation de crise, a-t-on appliqué des règles de droit commun, un droit de crise ou n’a-t-on pas appliqué de réglementation particulière ? Dans quelles conditions et sur quels fondements les électriciens sont-ils intervenus ? En l’absence de normes et d’un cadre juridique bien défini le ressort de la coopération n’a pas été le droit mais plutôt une “ solidarité de métiers ”. Xavier Latour s’est donc demandé si dans une société où le droit est de plus en plus présent et structuré on n’assiste pas à un manque de règles, voire à une crise du droit en période d’urgence. Le droit serait-il d’avantage assimilé à un obstacle qu’à un atout en cas de situation de crise ? EDF avait pourtant bien compris qu’elle devait s’appuyer sur des règles de droit commun, une fois l’urgence passée. Elle a donc mis en place une Force d’Intervention Rapide d’Electricité (FIRE) avec l’aide et l’expérience de l’armée, et Xavier Latour a remarqué que l’on discute d’une Charte de Coopération pour régler de manière préventive les éventuels problèmes de collaboration future entre les différents pays européens. Mais la mise en place et l’application de cette Charte est difficile et cela pour deux raisons. Tout d’abord, les différents partenaires ont eu du mal à se mettre d’accord sur la valeur même de cette Charte. Ensuite EDF n’a pas souhaité donner l’impression aux partenaires européens que cette Charte pourrait être un moyen de consolidation de sa position dominante. Le juriste a donc un rôle important à jouer et il serait bon pour lui de prendre conscience qu'il se doit d’établir “ des passerelles entre le monde du droit et celui de l’économie ”, selon les termes de Xavier Latour. Mme Annick Wiest, représentante de la Sécurité Civile, a soulevé plusieurs autres problèmes importants. Elle a notamment souligné l’approche différente, selon les divers services, de la notion même de tempête. En ce qui concerne la collaboration avec les autres pays, elle

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préconise également un approfondissement des contacts entre les différents opérateurs et entre les Etats. Pour ce qui est des dispositifs d’aide mis en place par les pouvoirs publics, M. Gilbert Scholly, représentant les collectivités territoriales, a rappelé les principaux domaines d’intervention du Conseil Régional (ainsi que l’enveloppe financière qui leur étaient respectivement réservés : le stockage humide du bois, les aides aux entreprises de première et deuxième transformation du bois, la promotion du bois énergie notamment). L’évocation d’une différence d’information et de prévention en cas d’urgence entre la métropole et les DOM-TOM, régis pourtant par le même service Météo France est aussi apparue au cours du débat qui s’en est suivi. Pour Mme Wiest comme pour le préfet Joël Lebeschu, l’explication réside en partie dans le fait d’une inexistence d’une “ culture du risque tempête ” en France métropolitaine d’où la lenteur de la mise en place d’une procédure d’urgence. Cette “ culture du risque ” devra pourtant se développer dans les années à venir, mais elle ne pourra se faire sans une prise de conscience par les citoyens des dangers et une responsabilisation de chacun.

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Céline Lesage et Céline Baumann étudiantes en 2ème année, sous la direction de Claudine Delphis maître de conférences LES ENTREPRISES PUBLIQUES FACE AUX DEGATS Si les services publics ont été mis à rude épreuve, les entreprises publiques telles EDF-GDF, France -Télécom ou encore la SNCF ont, elles aussi, payé un lourd tribut à la tempête. Ce qui explique qu'en ce qui concerne l’organisation de l’urgence et des secours, la mise en place des dispositifs d’aide par les pouvoirs publics et particulièrement par le groupe exploitation transport Alsace (Réseau Transport Electricité)et le groupe de distribution EDF a été rapide et efficace. En effet, après que le département ait été touché par la tempête, une mobilisation des agents a été faite dès le dimanche 26 décembre et les premiers dégâts ont été aussitôt diagnostiqués. Jean Michel Colin directeur du Groupe exploitation-transport Alsace d'EDF explique que "le plus important étant l’absence d’alimentation électrique dans les foyers, des renforts ont été immédiatement envoyés par l’EEL et la SPIE TRINDEL. La priorité a été d’assurer la sécurité des tiers et de réalimenter les foyers (dégagement des arbres, haubanage des pylônes…). Le dimanche 26, 700.000 foyers étaient sans électricité. 80% ont été réalimentés en 24 h, 95% en 120h...". Selon Alain Dubois responsable du domaine technique EDF-GDF service Alsace,"le 30 décembre, il ne restait que peu de foyers non alimentés. EDF a décidé suite à cette tempête de créer une force d’intervention, d’éliminer les interactions et de sécuriser les points de livraison. Une collaboration efficace, de l’Etat, de l’armée et une aide internationale, a permis de tout remettre en place rapidement...". En ce qui concerne France Télécom, la réaction a été différente. Bernard Dieu a souligné que France Télécom a dû faire face à deux problèmes distincts : d'une part, les centraux téléphoniques alimentés par EDF étaient en panne, d'autre part, les réseaux aériens ont été durement touchés. Sur le plan national on a dénombré pas moins de 2236 commutateurs sans alimentation (dont 40 an Alsace), 750 relais itinéris hors circuit (dont 10 dans notre département). En ce qui concerne les infrastructures, 85.000 poteaux ont été cassés en France (830 dans le Haut Rhin et le Bas Rhin), 75.000 décalés ; 35.000km de câbles multipaires ont été endommagés et 1.000.000 de foyers étaient en dérangement. Le plan Cristel (crise téléphone) Radial a été mis en place le 26 décembre avec trois phases distinctes:l’alerte qui consiste à faire une évaluation des dégâts et à mobiliser les effectifs nécessaires, l’inventaire qui concerne la création de postes de coordination et d'Etat Majors (dont un en Alsace), enfin l’intervention qui est l’accueil des renforts et le début des réparations qui sont organisées par secteur. Suivi d' un plan post-radial permettant de prévoir les meilleures réparations et de faire les meilleurs choix. Il a été décidé lors de ce plan que 13% des pylônes seraient enterrés et que 87% seraient remis à l’identique. France Télécom a engagé de grands moyens pour agir rapidement et a fait appel à tous ses agents qui se sont déplacés dans les régions les plus touchées.

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légende: J.L.Berdonnier de la SNCF évoque les tribulations de son entreprise. ( Photo Cerdacc.Lionel Humbert) Pour la SNCF, J.L. Berdonnier, adjoint au directeur délégué infrastructure SNCF région Strasbourg est intervenu en donnant quelques chiffres tout aussi impressionnants. Ainsi, fin décembre 1999, le trafic voyageur exceptionnel prévu était de 11 650 trains de grandes lignes du 25 décembre au 3 janvier, soit 8.000.000 de voyageurs. A cela s’ajoutaient 3500 trains de grandes lignes prévus le week-end du Jour de l’An pour transporter 3 millions de voyageurs. Les prévisions ont été atteintes en très grande partie malgré la tempête qui a engendré des dégâts multiples. Qu'on en juge: 40% des installations étaient hors service le 26 décembre et 60% le 27! Par ailleurs il y a eu 15.000 points d’interruptions de circulation. Les coûts engendrés par la tempête ont été de 500 millions de francs dont 300 millions pour l’infrastructure et 200 millions pour la perte de recettes voyageurs et de recettes fret. Tous les cheminots se sont sentis concernés et se sont fortement mobilisés. Toutes les lignes de la région Strasbourg ont été touchées, mais par rapport à d’autres régions, il y a eu peu de chute d’arbres car l’entretien préventif avait toujours été conséquent. D’un point de vue juridique, les phénomènes exceptionnels constatés les 26, 27 et 28 décembre 1999 sont constitutifs d’un cas de force majeure, exonératoire de toute responsabilité tels que définis par la jurisprudence, imprévisibilité et surtout insurmontabilité du phénomène naturel pour le juge civil ; caractère exceptionnel du phénomène naturel pour le juge administratif. En présence d’un cas de force majeure, la victime ne sera pas indemnisée par le tiers en cause qu’il s’agisse de l’Etat, des collectivités territoriales, de la SNCF ou d’une personne privée. L’entreprise SNCF a été amenée à se considérer, à l’instar de l’Etat, comme son propre assureur. Depuis 1998, les services SNCF ont une assurance responsabilité civile qui intervient vis à vis des clients en cas d’accidents grave. En revanche, ils ne sont pas encore assurés contre les dommages aux biens ni contre les pertes d’exploitation.

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Bertrand Pauvert, maître de conférences et membre du Cerdacc LE DISPOSITIF JURIDIQUE DE GESTION DES EFFETS DE LA TEMPETE 0u la transcription juridique de la solidarité C'est, de fait, la solidarité qui me paraît constituer le maître mot du dispositif de gestion des effets de la tempête ; la solidarité s'exprimant lors de la tempête, puis se trouvant au cœur des préoccupations des autorités publiques.

De g. à dr. : Bertrand Pauvert, orateur et Pierre Vittaz, président de séance (Photo Cerdacc - Lionel Humbert) Le constat a été fait par tous, le déroulement de la tempête n'a occasionné que peu de réactions d'égoïsme. Chacun sait pourtant qu'il n'est pas rare que la survenance de telles calamités entraîne le plus souvent un fort sentiment d'égoïsme ; d'aucuns en venant à profiter de ces situations pour réaliser de multiples délits. Ces attitudes compliquent la tâche des secours puisqu'une fraction non négligeable des forces mobilisées doit alors se trouver affectée à la protection des biens abandonnés – et pour cause – par leurs propriétaires. Or, somme toute assez peu de réactions marquées par l'égoïsme au cours de cette tempête et cela est sans doute à mettre au crédit des secours qui sont intervenus rapidement, évitant ainsi que ne perdurent des situations critiques lesquelles auraient assurément provoquées des conséquences sur le lien social. Cette solidarité prit également la forme – habituelle certes, mais d'une ampleur rarement égalée – de la participation des services de secours des collectivités non touchées par la tempête, ainsi que de services de secours étrangers. Il est également possible de dire ici que si la solidarité fut présente au cours de la tempête et plus exactement dans les temps qui suivirent précisément sa survenance elle fut aussi au cœur des préoccupations des autorités publiques. Le dispositif juridique de gestion des effets de la tempête, que l'on désigne également sous le nom de "Mesures gouvernementales pour les victimes des intempéries", en porte clairement la marque, le Premier ministre rappelant dès le 12 janvier 2000, soit moins de trois semaines après le déroulement de la tempête

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(et tandis que plusieurs milliers de Français attendaient encore de pouvoir bénéficier du rétablissement des principaux services publics), à l'occasion de la présentation du plan de mesures arrêtées par le Gouvernement afin de faire face aux effets de la tempête, qu'il s'agissait ainsi "que la solidarité nationale joue pleinement en faveur de nos concitoyens les plus durement touchés". Si un tel propos est sans surprise dans la mesure où il est naturel que la fraternité trouve à s'exprimer lors des grandes catastrophes, on ne peut manquer de constater la rapidité de la réaction publique, laquelle n'allait pourtant pas de soi. Une telle rapidité de réaction de la part des autorités publiques n'allait pourtant pas de soi en raison de l'ampleur de la tempête et des dommages qui en résultèrent. La première chose à noter concernant cette tempête est sans doute qu'elle arrivait à un très mauvais moment – si tant est qu'elle ait pu intervenir à un moment favorable – en effet, imprévue (c'est dans sa nature de tempête), d'une ampleur inconnue de mémoire d'homme elle intervenait de plus au cours dans une semaine où la disponibilité opérationnelle immédiate des différents services publics (et privés) n'est sans doute pas optimale. Cette semaine entre Noël et Saint Sylvestre est d'une manière générale souvent plus profitable aux agapes familiales qu'aux heures supplémentaires ; les services étant de plus désorganisés par l'absence de nombreux personnels en congé. Intervenue au plus mauvais moment, la tempête fut également exceptionnelle par son ampleur. En effet, souvenons-nous que les deux tiers du pays furent alors touchés (69 départements sont concernés par l'arrêté du 29-12-99 portant constatation de l'état de catastrophe naturelle). Les vents qui atteignirent la vitesse de plus de 150 kilomètres par heure firent près de 90 morts firent des dommages immenses et justifièrent que de très importants moyens fussent engagés. La réaction fut à la hauteur de l'ampleur des événements et des dommages, le ministre de l'Intérieur rappelant que si 7 plans ORSEC furent déclenchés parmi les différents départements touchés, c'est au total près de 200.000 sapeurs-pompiers volontaires qui secondèrent plus de 40.000 professionnels dans leurs interventions ; certains départements enregistrant en 48 heures autant d'interventions qu'en une année entière. De même plus de 15.000 agents d'EDF participèrent sur le terrain au rétablissement des lignes ainsi que de nombreuses équipes étrangères, on l'a vu ce matin. Même mobilisation chez les agents de la SNCF, ceux de France Télécom et cela sans passer sous silence la mobilisation d'environ 30.000 agents des DDE et d'une dizaine de milliers de militaires (on a d'ailleurs vu ici encore l'une des nouvelles conséquence néfaste de la fin de la conscription obligatoire, les armées ne disposant plus d'une grande masse de bras disponibles en cas de catastrophe). Si les moyens engagés furent importants, c'est sans aucun doute en raison de l'ampleur des sinistres et des reconstructions nécessaires. En dehors du préjudice causé au patrimoine forestier, lequel est toujours difficile à chiffrer précisément, les dégâts ont été évalués à plus de 40 milliards de francs. On note ainsi plus de 15 milliards pour ce qui touche à la reconstruction du réseau électrique, plus de 2 milliards en ce qui concerne les routes canaux et infrastructures aéroportuaires ; mêmes chiffres vertigineux en ce qui concerne la remise en état des bâtiments publics ou la réparation des atteintes au patrimoine collectif… Les assureurs ont ainsi indiqué que les deux tempêtes firent près de 1,5 million de sinistrés. A situation exceptionnelle, remèdes exceptionnels. C'est sans doute cette formule fort résumée qui exprime le mieux la logique de l'action de l'Etat et il convient de noter la très rapide volonté politique d'apporter une réponse aux effets de la tempête ; il est aussi nécessaire d'envisager les limites juridiques qui paralysèrent la mise en œuvre effective de l'action publique. La volonté politique d'assurer les victimes de la solidarité et du soutien des autorités publiques fut très forte et très rapide. C'est ainsi dès le 28 décembre, soit moins de 48 heures après les premiers souffles que les préfectures reçurent un premier télégramme gouvernemental retransmis vers les communes sinistrées et indiquant d'une part qu'une partie des dépenses non assurables allaient se trouver susceptibles d'être prises en compte au titre du chapitre 67-54 du Budget et d'autre part quels renseignements les communes allaient être amenés à donner dans ce cadre). Ensuite, les "Mesures gouvernementales pour les victimes des

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intempéries" furent présentées dès le 12 janvier, soit à peine quinze jours après la tempête (et immédiatement disponible sur internet, voir la déclaration du Premier ministre, en date du 12 janvier, http://www.premier-ministre.gouv.fr/PM/D120100.HTM tandis que le dossier d'information relatif aux mesures prises en faveur des différentes victimes des intempéries était lui disponible dès le 1er février, http://www.premier-ministre.gouv.fr/DOSSIERS/INTEMPERIES/SOMMAIRE.HTM ). Le questionnaire envoyé aux communes, questionnaire dont il était fait état dans le télégramme du 28/12, leur fut envoyée courant février. Tous ces éléments traduisent clairement une volonté politique d'apporter une réponse forte et rapide (et d'autant plus pourrait-on dire que la gestion médiatique publique de la précédente catastrophe écologique n'avait sans doute pas été optimale)… pour autant cette volonté de réaction rapide ne le fut pas toujours autant que l'on aurait pu le souhaiter, l'action de l'Etat se heurtant à certaines limites. L'une des principales limites, qu'il nous faut de suite évoquer réside dans les règles de la comptabilité publique et dans la lourdeur des procédures permettant la mise en œuvre des décisions rapides de l'Etat. De fait si la décision gouvernementale de subventionner la reconstruction fut diligente, il n'en est pas de même du versement définitif des sommes en jeu. Il est ici possible d'évoquer la situation du Haut-Rhin, locale certes mais qui possède tout de même valeur d'exemplarité ; si plus de 7,5 millions de francs furent accordés aux communes sinistrées dans le cadre d'une indemnisation des dégâts non assurables (pour des travaux recensés portant sur un total de 16 millions de francs), seul 1,5 million était effectivement versé à la fin du mois de juin. Si les règles de fonctionnement du droit budgétaire expliquent aisément cette situation, le délai devient tout de même très long. Le cadre budgétaire est par définition limité et spécialement par le principe de l'annualité ; or si des sommes avaient été effectivement créditées afin de faire face à des dépenses éventuelles dues à des catastrophes, ces sommes ne suffisaient bien évidemment pas à faire face à l'ampleur des dépenses nécessaires pour réparer les dommages causés par la tempête. Présenté dès le 12 janvier 2000, les mesures gouvernementales rendaient donc obligatoire un redéploiement du budget de l'Etat ; les subventions de l'Etat atteindront ainsi, au titre de l'année 2000, la somme de 4 milliards de francs dont la répartition entre les différentes régions sera le fruit d'une réunion du Comité Interministériel d'Aménagement et de Développement du Territoire (C.I.A.D.T.) du 18 mai 2000. C'est ensuite une loi de finance rectificative qui inscrira dans le Budget les nouvelles lignes d'affectation des dépenses. Ce tableau global étant dressé, il convient de se pencher sur les dispositions pratiques mises en œuvre par l'Etat pour répondre aux effets de la tempête, d'envisager le dispositif juridique de gestion des effets de la tempête. La solidarité publique s'est ainsi trouvée mise à contribution, s'exprimant sous deux angles que l'on peut distinguer. Il y a tout d'abord la mise en place d'un cadre normatif spécifique, permettant l'expression de la solidarité publique, c'est ce cadre que nous étudierons dans un premier temps (I) ; il y a ensuite une multitude de dispositions d'aides spécifiques à telle ou telle catégorie de la population, dispositions qui sont toutes empreintes – elles aussi – de solidarité publique et ce sont ces dispositions que nous envisagerons ensuite dans un second temps (II). I- Un cadre normatif expression de la solidarité publique Si le principe de l'indemnisation réside bien dans l'assurance individuelle de chacune des personnes concernées par les dommages liés à la tempête, l'ampleur de celle-ci devait favoriser la création d'un dispositif juridique spécifique afin de porter remède aux conséquences de la tempête. Deux axes majeurs peuvent être distingués de ce point de vue. Nous sommes tout d'abord en présence de dispositions qui visent à assurer la réparation des effets de la tempête, puis un dispositif spécifique se trouve créé afin de traiter les éventuelles difficultés d'indemnisation. A- La réparation collective des dommages publics

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A situations exceptionnelles, remèdes exceptionnels, cet formule de bon sens permet à merveille de décrire le dispositif mis en place afin d'assurer une réparation collective des dommages publics. Le dispositif mis en place, sans aller jusqu'à bouleverser les règles juridiques existantes prévoit de nombreuses adaptations de la règle de droit afin de tenir compte de l'ampleur des dommages subis par les différentes collectivités locales. Cette prise en charge par la collectivité de nombreux dommages publics se manifeste d'abord du point de vue du paiement des dépenses occasionnées par l'intervention des secours, puis de celui de l'aide apportée aux collectivités locales et enfin du point de vue du plan mis en place en faveur du domaine le plus touché par la tempête : la forêt. * Le paiement des secours L'ampleur de la catastrophe devait justifier une prise en charge collective du règlement des frais liés à l'engagement des secours. Intervention des SDIS. En effet, depuis la loi relative à la sécurité civile du 22-07-87, l'intervention des services départementaux d'intervention et de secours (SDIS), dès lors qu'elle se produit en dehors de leur zone d'affectation est mise à la charge des collectivités locales en ayant bénéficié. Afin de ne pas ajouter aux charges de communes déjà sinistrées par les effets de la tempête, les mesures gouvernementales prévoient une prise en charge par l'Etat des dépenses occasionnées par l'intervention des SDIS (soit près de 40 millions de francs) Prise en charge des bénévoles. De la même manière, l'Etat devait annoncer un engagement supplémentaire résultant de sa contribution à la prise en charge des dépenses engagées dans les collectivités locales en faveur de l'intervention des bénévoles (toutefois ce dispositif concerne essentiellement les communes de la côte atlantique touchées par la marée noire due au naufrage de l'Erika, les mesures du plan gouvernemental d'aide s'adressant tout à la fois aux victimes de la marée noire et des tempêtes de fin décembre). * L'aide aux collectivités locales Si nombre des dommages subis par les collectivités locales – et par l'Etat – entrent dans le champ des assurances souscrites par ces collectivités, la tempête a également touché de nombreux biens dits non assurables (voirie communale et départementale, mobilier urbain, éclairage, réseaux d'assainissement et d'eau potable, ponts et ouvrages d'arts, stations d'épuration, parcs, jardins et espaces boisés du domaine publics de ces collectivités…). Ce patrimoine non assurable va ainsi faire l'objet d'une aide spécifique de l'Etat, lequel subventionnera les dépenses liées à la remise en état de ces biens non assurables. La tempête aura pu également avoir pour conséquence de tarir les recettes communales dès lors que celles-ci auraient été fortement liées à l'exploitation de bois endommagés par la tempête ; dès lors, les communes se trouvant dans l'incapacité, du fait de la tempête, d'équilibrer leur budget, bénéficieront également de l'aide publique. L'Etat apporte enfin son aide à la remise en état du patrimoine culturel, lui aussi fortement touché par la tempête. Paiement des dépenses de remise en état. Ces subventions de l'Etat interviennent sur le chapitre 67-54 du ministère de l'Intérieur, lequel est destiné aux collectivités locales dont le patrimoine non assurable se trouve endommagé par des calamités publiques. La réactivité fut ici excellente puisque dès fin décembre, les communes se trouvent informées qu'elles pourront bénéficier de ces subventions (et reçoivent dans le même temps un questionnaire sommaire sur la nature et l'ampleur des dégâts dont elles sont victimes), un second questionnaire, lui plus précis, leur parvenant au mois de février. La subvention gouvernementale atteint en général 50 % des dépenses de la commune, sachant que les communes les moins peuplées et les plus touchées pouvaient voir ce taux monter à 80 % et aller jusqu'à une prise en charge totale pour des situations exceptionnelles (le dispositif fait l'objet d'une description précise, circulaire NOR/INT/B/00/0028/C du 7-02-00, http://www.interieur.gouv.fr/bomi/bomi/1trim00/fin_local/concours/b0000028.htm). Ce dispositif

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rapidement mis en place ne doit toutefois pas éluder certaines difficultés d'application. Tout d'abord les travaux effectués en régie (dès lors que des services municipaux ont assuré eux-mêmes les travaux de réparation) ne sauraient bénéficier de la subvention prévue par l'Etat et il semble bien, spécialement dans de petites communes, que la situation se présente, les maires ayant ordonné à leurs agents de procéder eux mêmes et rapidement à certains travaux de réfection. Autre problème, la règle de l'antériorité de la prescription des travaux à leur réalisation (ordonnancement préalable), de nombreuses dépenses (réparations) ayant en l'espèce été effectuées avant l'octroi de toute subvention ; ce qui se comprend, les sommes n'ayant été distribuées qu'à compter du mois de juin (pour le département du Haut-Rhin) et sans que la distribution soit achevée à ce jour). L'aide de l'Etat atteint ici plus d'un milliard de francs (dont 7,5 millions pour le département du Haut-Rhin). Participation aux dépenses de fonctionnement des communes. De nombreuses communes tirant une partie non négligeable de leurs ressources de l'exploitation de la filière bois ont connu, du fait de la tempête, une baisse importante de leurs ressources, baisse qui ont pu entraîner pour ces communes, des difficultés présenter un Budget en équilibre. Malgré une réticence bien compréhensible de la part de l'Etat, des subventions de fonctionnement ont été versées à ces communes, sur le chapitre 41-52 du ministère de l'Intérieur ; la circulaire d'application de ce dispositif d'aide explique bien qu'il "s'agit d'éviter qu'un nombre important de communes et d'E.P.C.I., confrontés à la disparition de recettes d'exploitation du fait des destructions occasionnées à leur patrimoine forestier, soient pendant plusieurs années, dans l'incapacité de voter leur budget en équilibre, ce qui risquerait d'entraîner une saisine de la chambre régionale des comptes" (Circulaire NOR/INT/B-00/00053/C, du 20-03-00, http://www.interieur.gouv.fr/bomi/bomi/1trim00/fin_local/bud_local/b0000053.htm ; voir aussi la seconde circulaire, en date du 16-05-00 et présentant comment mette en œuvre la précédente, NOR/INT/B/00/00113/C, http://www.interieur.gouv.fr/bomi/bomi/2trim00/fin_local/concours/b0000113.htm ; les modalités précises d'attribution de ces subventions exceptionnelles figurant dans une 3e circulaire du 27-07-00, NOR/INT/B/00/00172/C, http://www.interieur.gouv.fr/bomi/bomi/3trim00/b0000172.htm). Ce dispositif d'aide se trouve enfin relayé par l'octroi de prêts bonifiés (au taux de 1,5%) aux communes non sinistrées par la tempête, afin que ces dernières puissent financer le report des ventes de bois prévues en 2000 ou 2001 (décret n° 2000-251 du 16-03-00, relatif aux prêts bonifiés accordés aux communes forestières et consécutifs aux intempéries des 25 et 29 décembre 1999, JO du 18, p. 4227, http://legifrance.gouv.fr/citoyen/pagetail). Il s'agit bien là d'une manifestation collective de solidarité de la part des communes non touchées par la tempête, puisque le dispositif mis en place n'est qu'incitatif ; or il semble que les communes aient très largement choisi de bénéficier de ces prêts pour ne pas mettre sur le marché de trop grandes quantité de bois (ce qui aurait eu comme conséquence d'aggraver la chute des cours) et ainsi ne pas aggraver la situation des communes déjà sinistrées par la tempête. Patrimoine culturel. Le patrimoine culturel, largement touché par la tempête, fait l'objet d'une aide de la part de l'Etat, des subventions étant accordées aux collectivités à hauteur de 200 millions de francs, pour la restauration du patrimoine historique et culturel endommagé (notons ici que le coût des travaux de remise en état du patrimoine culturel de l'Etat qui fut endommagé par la tempête est estimé à plus de 600 millions de francs). * Le plan forêts L'ampleur des dommages causés par la tempête à la forêt française (au moins 140 millions de m3 de bois abattus) devait justifier la mise en place d'un programme spécifique en faveur de la forêt représentant 2.5 milliards de francs pour l'année 2000 et près de 6 milliards sur 10 ans afin d'assurer la reconstitution des forêts sinistrées. Nature du plan. Le plan national pour la forêt française, annoncé par le Gouvernement dès le 12 janvier et

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mis en place le 3 février a été mis en place afin d'aider l'ensemble des acteurs de la filière forêt et bois. Si des crédits visant à permettre le déblaiement des accès ont d'abord été débloqués, afin de permettre la sortie des bois tombés ( 200 MF), des sommes équivalentes ont été affectées aux travaux de nettoyage des parcelles sinistrées et un système de prêts bonifiés destiné à financer les opérations de sortie et de stockage des bois (12 milliards de francs, voir le D. n° 2000-88, du 1-02-00 [JO du 2, p. 1698 et http://www.legifrance.gouv.fr/citoyen/pagetail.ow?heure=100947117121&rang=2], premier texte suivi par un décret modificatif n° 2000-245, du 15-03-00 [JO du 16 mars, p. 4107 et http://www.legifrance.gouv.fr/citoyen/pagetail.ow?heure=100953202591&rang=2]). Ces éléments sont confortés par le volet fiscal de cette action qui figure dans la loi de finance rectificative de juillet 2000, le taux réduit à 5.5 % de TVA ayant ainsi été affecté aux travaux sylvicoles et d'exploitation forestière ; de même la loi de finance prévoit une exonération temporaire de droits sur les acquisitions de propriétés en nature de bois et forêts et de terrains nus destinés à être reboisés (ainsi qu'un dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les années 1999 et 2000). De très nombreux textes sont ensuite venus préciser les modalités de mise en œuvre du Plan national pour la forêt (pas moins de douze circulaires furent prises entre janvier et août, touchant aux multiples aspects de ce Plan, elles sont toutes consultables sur le site internet du ministère de l'agriculture, http://www.agriculture.gouv.fr/fore/fore/circulaires.htm). Stockage des bois. On peut enfin noter un bon exemple d'une réaction rapide des autorités publiques, à propos du stockage des bois abattus. Ce stockage nécessite en effet une humidité permanente des bois, laquelle ne peut être réalisée que par immersion ou aspersion, or on s'est rendu compte que de tels procédés (spécialement l'arrosage des grumes) pouvait avoir des répercussions négatives sur l'environnement, ceci justifiait donc que les installations de stockage de bois se trouvent intégrées aux autres installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE de la loi n° 76-663 du 19-07-76), ce qui fut fait par la création d'une nouvelle rubrique dans la nomenclature des installations classées, par le décret n° 2000-283 du 30-03-2000 (JO du 31, p. 4959, http://www.legifrance.gouv.fr/citoyen/pagetail.ow?heure=101004293471&rang=2). Toutes ces dispositions visent à assurer la solidarité ainsi que la prise en charge collective des dommages publics et interviennent spécialement pour un ensemble de dommages qui ne figuraient pas dans la catégorie des biens assurables. Pour les autres biens, l'indemnisation des dégâts dus à la catastrophe obéira à des dispositions quelque peu spécifiques. B - Les spécificités de l'indemnisation La procédure d'indemnisation des dommages occasionnés par la tempête est également empreinte de solidarité en ce qu'elle ne laisse pas les victimes seules aux prises avec les assureurs ; l'idée qui fut développée par les autorités publiques résida alors dans l'application des règles communes d'indemnisation, application tempérée par la mise en place de dispositions spéciales visant à éviter de trop grandes contestations. Ainsi, les règles relatives aux procédures d'indemnisation ne se trouvent pas bouleversées, le principe restant celui de l'application des règles de droit commun ; toutefois, l'ampleur des dommages justifiera quelques modifications aux dispositions habituellement mises en œuvre et l'instauration d'un dispositif spécifique, les commissions locales d'indemnisation. * Le principe : l'application des procédures de droit commun La tempête se solde, comme toute tempête, et malgré son ampleur par la mise en jeu normale des clauses des contrats d'assurance. Trois types de situations sont alors envisageables, l'indemnisation du dommage tempête, la constatation de l'état de catastrophe naturelle et enfin la procédure d'indemnisation des calamités

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agricoles. • Assurance tempête. Tout d'abord, en ce qui concerne les dégâts causés par l'effet direct de la tempête

(vents et pluies), ceux-ci se trouvent couverts par l'application des contrats d'assurance multirisques (les clauses relatives aux dégâts des tempêtes doivent figurer depuis 1990 dans les contrats d'assurance, loi du 25-06-90). Il incombe alors simplement aux particuliers comme aux entreprises d'effectuer leur déclaration de sinistre auprès de leurs assureurs ; le délai durant lequel la déclaration pouvait être effectuée (5 jours en principe), ayant été spécialement repoussé, pour intervenir avant la date limite fixée au 31 janvier 2000. Une autre adaptation réside encore dans le fait qu'en ce qui concerne les contrats d'habitation des particuliers, le plafond maximum des franchises fut arrêté à la somme de 1500 francs (la plupart des compagnies d'assurance ne délégueront d'ailleurs pas d'expert, pour des sinistres estimés à moins de 20.000 francs).

• Etat de catastrophe naturelle. Ensuite, en ce qui concerne les conséquences indirectes de la tempête, comme des coulées de boues, des inondations ou encore des affaissements de terrain (mais aussi les chocs mécaniques liés à l'action des vagues), il convenait que l'état de catastrophe naturelle soit préalablement déclaré pour que les personnes assurées puissent s'en prévaloir et obtenir une indemnisation. L'arrêté portant constatation de l'état de catastrophe naturelle a été signé le 29-12-99 (JO du 30-12-99, p. 19784, http://legifrance.gouv.fr/citoyen/jorf_nor.ow?numjo=INTE9900627A) et concerne 69 départements de métropole.

• Calamités agricoles. Enfin, un troisième type d'assurance se trouvait susceptible d'être mise en œuvre, à savoir la procédure d'indemnisation des calamités agricoles, laquelle vise les dommages aux domaines agricoles qui ne sont théoriquement pas indemnisables (récoltes sur pied, stock…). Réunie en février la commission nationale des calamités agricoles, procédera à l'indemnisation, en majorant de 10 points, compte tenu de l'ampleur de la tempête, les taux habituels d'indemnisation (des acomptes se trouvant versés aux différents départements touchés, afin de permettre le versement rapide des indemnités).

* La dérogation : la mise en oeuvre des Commissions Locales d'Indemnisation L'ampleur des dommages a paru justifier aux yeux des autorités la mise en place d'un dispositif spécifique visant à ériger, dans chaque département "une commission qui examinera les cas d'indemnisation les plus difficiles auxquels les particuliers, les entreprises et les collectivités locales sont confrontées". Pensé dans les heures qui suivirent la tempête, ce dispositif se trouve donc très tôt mis en place ; il s'agit d'en envisager l'organisation, puis d'essayer d'en esquisser un bilan, au moins local. • • Le dispositif des CLI. De telles commissions locales, nommées aussi CODECT (Commission

Départementale d'évaluation des conséquences de la tempête), sont appelées à fonctionner dans chacun des départements touchés par la tempête de décembre. Présidée par le préfet avec la participation du trésorier payeur général, elle possède vocation à réunir l'ensemble des parties concernées (en particulier les services déconcentrés concernés, les armées, les réseaux de services publics et les organismes consulaires) ainsi que les représentants des sociétés d'assurance. Ces commissions furent généralement scindées en quatre groupes distincts, le premier concernant les difficultés rencontrées par les entreprises, le second celles des particuliers, un troisième autour des collectivités locales et enfin le quatrième s'intéressant spécifiquement aux problèmes rencontrés par le monde agricole et forestier (en Alsace, ce dernier groupe de travail fut commun aux deux départements).

• Rôle des CLI. Le rôle de ces commissions locales est essentiellement perçu, en définitive et avant toute remontée d'information, comme un rôle de médiation ; en effet, ces commissions possèdent vocation à être saisies par toute personne (physique ou morale), "victime d'un dommage consécutif aux intempéries et qui estime rencontrer une difficulté dans le règlement de son dossier par sa compagnie d'assurance" (circulaire du 31 décembre 1999). De plus, elle doivent veiller à ce que

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l'indemnisation soit rapidement mise en place par les assureurs, ainsi qu'assurer l'information locale des procédures et mécanismes d'indemnisation. La commission locale possédait enfin pour rôle de faire remonter vers une commission nationale interministérielle présidée par M. le Préfet Lebeschu, des dossiers spécifiques n'ayant pu être réglés au niveau local.

• Bilan des CLI. Leur bilan est – au moins en ce qui concerne le Haut-Rhin – quasi inexistant donc positif ; de fait, le nombre de saisine de la commission a été relativement faible et la très large majorité des dossiers ont pu être traité au niveau local, sans nécessiter de remontée vers la commission nationale. Ces éléments semblent traduire plusieurs choses. D'une part le fait que le dispositif d'assurance a relativement bien fait face au choc que constitua pour lui la gestion de l'après tempête, peu de dossiers faisant finalement l'objet d'un litige. D'autre part le fait que l'on avait peut être surestimé les difficultés à venir, mais l'on ne saurait en l'espèce porter grief aux autorités publiques d'avoir préventivement mis en place un système visant à prévenir et régler les difficultés d'indemnisation. L'expérience acquise dans le cadre de ces commissions est donc incontestablement positive et pourrait trouver à se renouveler dans de semblables situations.

Si le cadre juridique ainsi mis en place traduit bien l'expression d'une certaine fraternité au sein de la nation, cette solidarité publique qui fut manifeste se traduit également par l'adoption d'une multitude de dispositions spécifiques qui visent dans un esprit semblable, mais de manière plus précise, à résorber, autant que faire ce peut les effets de la tempête. II- Des dispositions catégorielles empreintes de solidarité publique L'essentiel – au moins du point de vue de la masse financière – des mesures décrites concerne les collectivités locales, le Gouvernement ayant pour le reste, on l'a vu, mis en place de manière préventive un dispositif visant à faciliter le règlement amiable des cas litigieux. Si l'essentiel de l'indemnisation repose sur les dispositifs d'assurance de chacune des victimes, le Gouvernement a de plus tenu à exprimer, là encore, la solidarité publique en multipliant l'octroi d'aides – essentiellement financières - aux victimes de la tempête. Il est difficile de dégager des lignes générales, dans la mesure où nous sommes en présence d'un véritable saupoudrage de l'ensemble des acteurs (saupoudrage conséquent certes, au vu de l'importance des sommes en jeu, qui atteignent plus d'un milliard de francs). Il est alors possible d'envisager les mesures mises en places et destinées d'une part aux entreprises et d'autre part, celles intervenant en faveur des particuliers. A - En faveur des entreprises L'ampleur des dommages provoqués par la tempête a donc justifié que certaines dispositions du plan gouvernemental d'aide concernent les entreprises. De fait si en ce qui les concerne, on peut noter que les dommages aux bâtiments étaient habituellement couverts par les assurances, il n'en était pas de même le plus souvent pour les éléments extérieurs aux bâtiments, y compris les stocks, ceux-ci n'étant pas assurés. La tempête pouvait également provoquer des difficultés aux entreprises, en terme de pertes d'exploitation, lesquelles sont souvent peu ou mal assurées et leur évaluation posant de plus des difficultés. Le dispositif d'aide aux entreprises emprunte donc une triple direction, certaines aides sont destinées à l'ensemble des entreprises touchées par la tempête, d'autres se trouvent plus spécifiquement allouées au commerce et à l'artisanat, tandis que les dernières sont spécialement mises en place en faveur du monde rural ou agricole. * Aides communes à toutes les entreprises Différentes mesures sont mises en place et doivent bénéficier à toute entreprise victime des effets de la

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tempête, elles concernent d'une part la remise en état de la capacité de fonctionnement des entreprises et d'autre part les conséquences de la tempête sur l'emploi. Aides à la remise en état de fonctionnement des entreprises. L'essentiel des dommages doit en principe se trouver assuré par les polices de chacune des entreprises, mais il a paru nécessaire de débloquer des sommes au plus tôt, afin de favoriser la reprise d'exploitation des entreprises. Le dispositif gouvernemental prévoit ainsi que des avances de trésorerie peuvent être faites par la Banque de développement des PME (BDPME), en faveur des entreprises victimes des catastrophes naturelles ; avances pouvant atteindre jusqu'à 80 % des indemnités d'assurance dues. Ce dispositif destiné aux entreprises dont le chiffre d'affaires annuel est relativement modeste (moins de 500 millions de francs hors taxes) est ainsi destiné à permettre aux entreprises d'attendre le versement définitif par les compagnies d'assurance (ces avances sont au minimum d'une valeur de 50.000 francs, pour trois mois et au taux de 1,5 % ; 40 millions avaient été versés à la fi du mois de janvier). Fonds de garantie de prêts. Les dommages occasionnés par la tempête justifient souvent que les entreprises renouvellent leurs équipements alors même qu'elles subissent une dégradation de leurs recettes due à la diminution de leur activité. C'est pour cela que le Gouvernement a mis en place un programme de "Garantie tempêtes" (d'une hauteur de 200 millions de francs), en vertu duquel la BDPME pourra garantir (à 70 %) les prêts destinés à permettre aux entreprises de reconstituer leur outil de production et leur trésorerie. Les entreprises peuvent enfin demander à bénéficier de délais de paiement de leurs impôts. Les conséquences de la tempête sur l'emploi. L'intervention de l'Etat s'est ici essentiellement produite du point de vue de l'indemnisation du chômage partiel. Les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale ont été invités à prendre facilement en considération les demandes de délais de paiement, ainsi que les retards. De même, des instructions ont été données aux préfets pour que d'éventuelles périodes de chômage partiel (subies par des entreprises dont l'activité est touchée du fait des conséquences de la tempête) soient indemnisées par l'Etat dans les conditions les plus favorables. Sur ce dernier plan, on doit toutefois constater que si l'instruction ministérielle a bien été faite, peu d'entreprises ont demandé à en bénéficier (deux demandes dans le Haut-Rhin, d'après les services de la D.D.T.E.F.P.). Il a pendant un moment été évoqué le fait que pour réparer les conséquences de la tempête, de nombreux salariés (notamment dans la couverture-zinguerie) effectuaient de 50 à 60 heures de travail par semaine. Si une telle charge est illégale au regard du droit du travail les services concernés n'ont toutefois pas reçu d'instructions précises relativement à cette question. Un dispositif de récupération des heures de travail perdues a également été prévu (accord 10 février 2000) de même qu'un arrêté ministériel (25-02-00) est venu porter agrément de l'accord du 7 janvier 2000 (entre les syndicats d'employeurs et de salariés) relatif aux arrêts temporaires d'activité consécutifs aux intempéries et inondations survenues en décembre 1999. * Aides au commerce et à l'artisanat Un fonds de secours dénommé FISAC-tempêtes (Fonds d'intervention et de soutien au commerce et à l'artisanat) destiné aux commerçants et aux artisans dont les entreprises ont subi les dommages de la tempête a été mis en place par l'Etat. Ce fonds, d'une hauteur de 200 millions de francs est destiné à apporter une aide complémentaire à l'indemnisation apportée par les compagnies d'assurance, afin d'aider aux investissements nécessaires à la reprise de l'activité de l'entreprise en cause. * Aides spécifiques en faveur du monde agricole Les entreprises du monde agricole on été particulièrement victimes de la tempête, leur outil de travail – la nature – se trouvant quasi naturellement victime des événements météorologiques. Si l'assurance doit

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d'abord jouer, l'indemnisation résulte également, on l'a vu, de la procédure des calamités agricoles ; toutefois les spécificités du monde agricole devaient justifier tout un volant spécifique d'aides. C'est tout d'abord un large volant de prêts bonifiés qui se trouve mis à la disposition des entreprises (au taux de 1,5 % ; 15,5 millions de prêts bonifiés ayant ainsi été souscrits en ce qui concerne l'Alsace), mais également de nombreuses aides qui interviennent en sus de l'indemnisation des calamités agricoles. D'abord le Fonds d'allégement des charges s'est vu doté de 200 millions de francs de crédits, qui seront destinés aux exploitations les plus endettées et pour lesquelles la tempête aura occasionné de lourdes difficultés financières. 300 millions de francs ont aussi été versés à différents fonds d'intervention agricole (office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture – OFIVAL, office national interprofessionnel des fruits, des légumes et de l'horticulture – ONIFHLOR et office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers – ONILAIT), afin de favoriser l'indemnisation d'installations non couvertes par les polices d'assurances et ne rentrant pas en compte dans l'indemnisation des calamités agricoles (tunnels plastiques, abris pour le petit élevage...). Le dispositif d'aide aux entreprises se comprend dans la mesure où il s'agit, par ces mesures, d'éviter que les dommages liés à la tempête ne soient aggravés par une récession ou par la fermeture de nombreuses entreprises. La solidarité publique justifie cette aide, d'autant plus que si les entreprises poursuivent leurs activités, elles ne se trouveront pas dans l'obligation de procéder au licenciement de leurs employés ; aider les entreprises c'est donc – aussi – aider les particuliers. B - En faveur des particuliers Les aides prévues en faveur des particuliers dans le cadre des mesures gouvernementales pour les victimes des intempéries correspondent d'abord à la mise en place d'aides exceptionnelles ; il s'agit ensuite de favoriser la réparation des dommages subis par les habitations et qui ne seraient pas assurés. Enfin, le dispositif est soutenu par un ensemble de consignes de souplesse fiscale. * Aides exceptionnelles aux victimes de la tempête Ce sont des sommes très importantes qui sont ici débloquées par l'Etat (plus de 500 millions de francs) et qui sont destinées d'une part à l'aide aux personnes les plus démunies et d'autre part à faciliter le relogement, dès lors que celui-ci est devenu impossible, par suite des conséquences de la tempête. Dispositions en faveur des personnes démunies. Il s'agit ici d'une dotation exceptionnelle de l'Etat versée aux services sociaux locaux (en particulier les CCASS) et qui correspond à une contribution immédiate à l'effort de solidarité des communes pour la prise en charge des secours financiers délivrés aux personnes démunies victimes des intempéries. Il s'agit en particulier de porter aide et assistance aux personnes qui ayant vu leur logement (ou leurs biens, leur outil de travail…) détruit, se trouvent en situation précaire. Dispositions relatives au relogement. Les salariés des entreprises du secteur privé (hors le cas des entreprises agricoles) dès lors qu'ils se trouvaient dans l'obligation de se reloger, à la suite des intempéries, pouvaient demander à bénéficier d'aides. Ces aides étaient valables sur l'ensemble du parc locatif et consistaient notamment en l'avance du dépôt de garantie ainsi qu'en l'octroi au bailleur d'une garantie de paiement des loyers et charges locatives. * Réparations des dommages aux habitations Parmi les différentes mesures mises en place en faveur des particuliers victimes des intempéries figure un dispositif de prêts visant à faciliter la réparation des habitations ou éventuellement, dans des conditions plus restrictives, leur reconstruction. Réparation des habitations. Comme l'observait le ministre de l'Intérieur, devant le Sénat, le 9 février, le

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dispositif mis en place par les autorités est empreint d'une volonté forte de porter aide et assistance aux personnes touchées dans leurs biens, ainsi note-t-il, "à travers ces actes et les moyens financiers qui les accompagnent, c'est l'expression de la solidarité national qui se manifeste" (déclaration du Gouvernement suivie d'un débat, sur les conséquences et les suites des intempéries et de la marée noire, voir http://www.senat.fr/seances/s200002/s20000209/sc20000209006.html). Les particuliers ont ainsi pu bénéficier de prêts à taux nul de la part des organismes du 1% logement (d'un montant de 100.000 francs maximum pour une durée maximale de sept ans), afin de financer la réparation de leur logement (en particuliers des éléments non couverts par les assurances : vérandas, clôtures, volets….). Ce dispositif portant sur une somme de 1 milliard de francs ne permet toutefois pas d'assurer la prise en charge de certaines dépenses non assurées (comme les dommages causés aux pierres tombales, ou encore la non indemnisation des dommages des véhicules des personnes assurées au 1/3 si le dommage est une conséquence de la tempête…). Reconstruction des habitations. Dès lors que son habitation principale avait été détruite par la tempête, tout particulier (dont les revenus étaient inférieurs au plafond d'éligibilité au prêt à taux zéro) pouvait bénéficier d'un tel prêt pour l'achat d'un nouveau logement, la condition de primo accédant se trouvant alors supprimée. * Consignes de souplesse fiscale Il est fermement demandé aux services fiscaux de tenir compte, dans leur intervention de la tempête et des conséquences dommageables qu'elle a pu avoir sur le patrimoine des assujettis. Le Gouvernement organise ensuite une procédure de remboursement et de délivrance à titre gratuit de certains documents administratifs. Mesures de clémence fiscale. De la même manière des consignes furent données afin que les victimes de la tempête puissent, le cas échéant, bénéficier de délais pour le paiement des impôts, voire de remises gracieuses (ces dispositions concernant l'impôt sur le revenu, le paiement de la redevance télévisuelle, la taxe d'habitation étaient d'ailleurs également applicables en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés) ; toutefois, les services concernés ne disposent pas actuellement, au moins dans le Haut-Rhin d'un chiffrage précis de ces interventions (sur la moitié des trésoreries de Haut-Rhin contactées, aucune n'avait, au 10 novembre 2000, reçu de demande de remise ou d'allégement fondée sur la tempête). Remboursement des documents administratifs. Intervenu postérieurement au dispositif présenté au public le 12 janvier, c'est une instruction gouvernementale (publiée au Bulletin officiel des impôts du 28-02-00) qui décide que la délivrance de certains documents administratifs détruits ou perdus au cours des tempêtes ne donnera lieu à la perception d'aucun droit ou taxe. Dès lors, les victimes des intempéries ayant demandé la délivrance des documents mentionnés dans ladite instruction (soit les passeports, les duplicata des permis de conduire ou des certificats d'immatriculation, les titres de voyage délivrés aux réfugiés ou apatrides…) peuvent en obtenir le remboursement ou se faire délivrer à titre gratuit de nouveaux documents (les demandes doivent en tout état de cause être déposées avant le 31-12-00, sachant que c'est une note de service du 10-07-00 qui organise cette procédure, dont on peut craindre qu'elle ne soit pas très médiatisée). En définitive, l’examen du dispositif juridique de gestion des effets de la tempête permet de distinguer quelques éléments d’analyse. Du point de vue du fonctionnement de ce dispositif, il est tout d’abord possible de constater que notre système de résorption des catastrophes fonctionne assez bien, malgré – bien entendu – quelques lenteurs inhérentes au système ; de fait l’essentiel des aides et subventions commence à être versé et si toutes les traces de la tempête n’ont certes pas été effacées, cela est maintenant plus dû à l’ampleur des dégâts et des travaux à effectuer qu’à un mauvais fonctionnement du dispositif juridique existant. Le fonctionnement des commissions d’indemnisation apporte également, de ce point de vue, une preuve de la qualité du système d’assurance. Parmi les éléments négatifs, il est possible de noter le manque de liberté fiscale des communes lesquelles, ne disposant pas de ressources propres suffisantes, se trouvent

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forcées d’attendre les subventions publiques ; on pourrait de ce fait imaginer que soient accentuées les possibilités financières d’intervention des collectivités locales et spécialement des communes. Enfin, dans un temps où il est de bon ton de gloser sur l’obsolescence du système français, il est tout de même plaisant de constater que ce système, malgré ses lourdeurs se révèle facilement capable de réactivité en situation exceptionnelle. Au regard de cette bonne réactivité postérieure à la catastrophe, on ne peut que regretter les balbutiements d’une grande politique de prévention des dommages liés aux catastrophes naturelles.

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Axel Boulehouat et Aude Florentin, étudiants de 2ème année, sous la direction de Hervé Arbousset maître de conférences et membre du Cerdacc. INDEMNISATION: RETOUR D'EXPERIENCE CHEZ LES ASSUREURS Présidée par Pierre Vittaz premier président de la Cour d'Appel de Colmar, l'après-midi fut consacrée pour une large part à l'indemnisation des dommages. Tant du côté juridique que du côté des hommes du terrain, les assureurs. A sa façon faite de modération, Pierre Vittaz a mené les débats rondement.

De g. à dr. : Claude Dolle, Roland Nussbaum, Bertrand Pauvert, Pierre Vittaz, Marie-France Steinlé-Feuerbach, Joël Lebeschu, Guy Daesslé (Photo Cerdacc - Lionel Humbert) Avec tout d'abord l'intervention circonstanciée de Bertrand Pauvert, maitre de conférences et membre du Cerdacc. Il explique à l'auditoire que, dans un monde à forte tendance individualiste, durant la tempête, l’Alsace a brillé par sa solidarité, renforcée par la réaction rapide de l’Etat. Cependant, ses limites apparaissent dans la lourdeur des procédures et la distribution tardive des subventions. Sur le terrain de l’indemnisation et malgré la situation exceptionnelle, le droit commun des assurances a été appliqué sous trois formes : assurances tempête, assurances catastrophe naturelle, et régimes des calamités agricoles. Cette situation a également donné jour à un droit dérogatoire mis en œuvre par les commissions départementales d’indemnisation chargée notamment de régler les litiges éventuels entre assurés et compagnies d’assurance. Néanmoins ces commissions ont été très peu saisies. Dans l’ensemble, le dispositif a bien fonctionné malgré la lourdeur du système et l’ampleur des dégâts. Toutefois, la situation apparue à la suite de la tempête a révélé le manque de liberté fiscale et de ressources propres des communes, ce qui les rend tributaires des aides de l’Etat. Globalement, le système est capable de réactivité bien que subsiste un problème de prévention des dommages. Une véritable “ culture du risque ”mérite d’être développée. Pour sa part, Guy Daesslé, de par ses fonctions de maire de Wintzenheim et d’assureur, était doublement confronté aux conséquences de la tempête : En sa qualité d’assureur, il déplore les difficultés rencontrées pour l’application de certaines clauses.

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Certains dossiers ne sont pas réglés en raison du retard des experts , ainsi que des clients qui n’ont pas encore pu obtenir ni devis ni facture, les entreprises étant débordées. En sa qualité de maire, il explique que la distribution des subventions demandait de faire un choix, mais que la célérité des élus et des entreprises a permis une réduction des coûts. A l’avenir il faudrait, souligne l’intervenant, s’appuyer bien davantage sur l’expérience des hommes de terrain, et lutter contre le " millefeuille législatif " afin de consacrer des modalités d’indemnisation plus simples. Et Claude Dolle, directeur d’assurance à GROUPAMA de présenter à l'aide de transparents évocateurs les diverses évolutions des dossiers de son groupe. Celui-ci s’appuie sur une enquête de satisfaction pour tirer un bilan positif de sa gestion de la crise. La tempête a permis le recours à 600 volontaires formés et dépêchés auprès de la clientèle sur le terrain. Il suggère la recherche d’un accord entre assureurs et entreprises pour éviter la flambée de leurs tarifs. Enfin, Roland Nussbaum, directeur de la Mission des Risques Naturels (MRN) créée en mars 2000, expose le retour d’expérience ayant pour objectif d’ouvrir l’assurance au reste du monde et surtout de faire collaborer les acteurs de la prévention et de l’indemnisation. L’enjeu réside dans la place du modèle français de l’assurance selon lequel le rôle des assureurs est triple : - indemniser les victimes - rendre prioritaires les Plans de Prévention des Risques - développer des outils tels que des bases de données et des actions thématiques en partenariat avec des collectivités.

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Delphine Melchior et Emmanuel Bedut, étudiants en 2ème année sous la direction de Claudine Delphis maître de conférences LE CAS SPECIFIQUE DES FORETS ET DE LA FILIERE BOIS Le 26 décembre 1999, la France a connu une dévastation massive de son trésor naturel : la forêt. Celle-ci couvre environ 14 millions d’hectares soit un quart de la superficie du territoire français. En introduction à ce sujet, Hubert Ott, vice-président du centre régional de la propriété forestière de Lorraine-Alsace apporte des informations sur la forêt privée en France. Elle représente 70% de la forêt nationale. Tandis qu'en Alsace, la forêt privée représente 20% de la surface forestière totale. Dans le pays, 76.000 propriétaires se répartissant 74.000 hectares, force est de constater une grande atomisation de la propriété privée. Après une telle tempête, les autorités se devaient de répondre à des besoins sécuritaires, qui se sont traduits au travers de trois points principaux : il fallait d'une part assurer la protection des personnes en interdisant l’accès temporaire aux forêts pour éviter d’éventuels risques d’accidents ; d’autre part mettre en place des stages de préventions pour les personnels d’exploitation pour les informer sur les nouveaux risques liés à l’exploitation de forêts dévastées, et ensuite sauvegarder les biens privés en dégageant les chemins accidentés qui permettent l’accès aux parcelles et établir rapidement une estimation des dégâts. Une grande majorité des forestiers privés ne sont pas assurés, les primes d’assurance étant trop élevées par rapport à la faible rentabilité de la forêt (à titre d'exemple, il est bon de rappeler qu'il faut 170 ans pour qu’un chêne soit exploitable). Si le plus beau bois a pu être vendu, le bois resté en forêt engendre une forte perte de capital pour le propriétaire forestier. Le marché restera longtemps perturbé avant la reconstitution d’une véritable forêt. Les propriétaires privés vont donc devoir faire preuve de patience et d’imagination. Il est actuellement difficile pour eux de trouver aussi une réelle motivation, d’autant plus qu’ils redoutent pour l'avenir une loi forestière plus contraignante que dans le passé. Quant à Pierre Grandadam, président de l’Association des Maires des communes forestières du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, il a, lui, donné l’impression de relativiser la gravité des dommages causés par la tempête. En effet, Pierre Grandadam a établi des comparaisons entre l’Alsace et le reste de la France. Si l'Alsace a été nettement moins touchée que certaines autres régions de France, on ne peut néanmoins passer sous silence la question de la perte des revenus (le prix du bois a baissé de moitié), ni celle du patrimoine ainsi que la notion de perte purement affective. Dans son intervention, Pierre Grandadam a mis en valeur les atouts de l’Alsace : une solide industrie du bois (le premier scieur français est alsacien), une régie forestière établie depuis de nombreuses années (au lendemain de la catastrophe, 800 bûcherons ont été opérationnels); si à l’échelon mondial la vente du bois alsacien s'est dans son ensemble bien déroulée malgré la catastrophe, et si la demande reste toujours aussi forte en raison de la très haute professionnalisation des personnels alsaciens dans ce domaine, il réfute néanmoins avec vigueur l’idée répandue par certains médias selon laquelle la tempête de décembre 99 serait purement et simplement une chance de régénérescence pour la forêt : ces derniers oublient trop facilement la catastrophe économique vécue par les professions du bois. Selon lui, “ la forêt doit rester non seulement un lieu de production mais aussi un espace naturel et un espace d’agrément. Elle doit rester vierge de toute pollution et de toute agressivité et toutes les actions en cours sont axées désormais sur la reconstitution d'une forêt naturelle dans laquelle nos enfants et petits enfants pourront se retrouver...".

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Axel Boulehouat et Aude Florentin étudiants en 2ème année sous la direction de André Schneider, professeur associé, membre du Cerdacc

Joël LEBESCHU : "on ne commande à la nature qu'en obéissant à ses lois ..." Le fin mot de cette journée pleine d'enseignements a été donné par Joël Lebeschu, préfet mais également président de la Commission interministérielle chargée de veiller au bon fonctionnement des procédures d’indemnisation. Dans un style où humour et précision alternaient en permanence, Joël Lebeschu a relevé tout d’abord que l’expérience positive de l’Alsace n’est pas transposable car elle a été moins touchée que les autres régions, les Alsaciens ayant fait preuve de plus de civisme qui s’est traduit par une grande solidarité. Non sans une pointe d'ironie , Joël Lebeschu a indiqué que "la tempête a révélé que l’Etat était prompt à créer une profusion de textes dans l’urgence. Heureusement, les lacunes de ces textes sont atténuées, sur le terrain, par une prise en charge des assureurs pour des situations particulières". En réponse à la critique de “ saupoudrage des crédits ” par l’Etat, M.Joël Lebeschu explique qu’il s’agissait d’un problème de gestion du temps et de sécurité. Il a rappelé que le système d’indemnisation a bien fonctionné malgré le contexte concurrentiel entre les assureurs. En effet, tous ont mobilisé leur personnel, consenti des gestes commerciaux et fait un réel effort d’information. Enfin il faut constater l’inégalité des assurés devant la catastrophe. Les agriculteurs, habitués aux clauses de calamités agricoles, ont été plus au fait des aides possibles de l’Etat que les artisans, commerçants ou industriels. Dans un tout autre registre, Joël Lebeschu observait que "la sécurité civile a besoin d’une vraie réflexion stratégique, seule capable de mettre en place une prévention, laquelle implique une évolution des mentalités vers une culture de crise". Il entend par là distinguer les principes de solidarité et d’indemnisation à celui d’assistanat. Et de conclure que: -les progrès à faire résident dans la prévention et non dans les subventions -la culture du secours est celle de l’humilité puisque le “ pire n’est jamais certain ” -“ on ne commande à la nature qu’en obéissant à ses lois ”, ce qui pose la question de la responsabilité de l’Homme dans les phénomènes climatiques.

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Céline Baumann et Céline Lesage élèves en 2ème année sous la direction d'André Schneider, professeur associé, membre du Cerdacc. "Le journaliste n'est pas un surhomme..." La table ronde des médias n’a pu avoir lieu hélas dans les conditions prévues. En effet, l'absence d'un journaliste de FR 3 Alsace pressenti , le départ de celui de l’Alsace, Francis Guthleben pris par d'autres rendez-vous ont empêché un vrai débat . Seul Christian Bach , responsable de la rédaction de Colmar des Dernières Nouvelles d’Alsace est intervenu. En l'absence d'un véritable échange entre les trois représentants des médias, Christian Bach a cependant improvisé un court exposé à propos de la profession de journaliste. Précisant notamment " qu'un journaliste n'est pas un surhomme et que, comme tout un chacun, il est faillible". S’en est suivi un dialogue avec un auditeur qui évoquait la nécessité d’avoir des interlocuteurs spécialisés dans certains domaines et qui “ ne découvrent pas tout quand ils arrivent… ”. Rappelant que l’histoire du journalisme a débuté il y a quelques siècles et qu’au fil des années se sont développées des rubriques au gré de l’évolution de la société, Christian Bach n'a pas caché pour autant que " le métier se spécialise mais il ne sera pas possible d’avoir un journaliste spécialisé dans un domaine précis comme l’indemnisation des tempêtes étant donné que les journalistes sont en principe plutôt des généralistes. Ils savent écouter et ont pour fonction de valider ce qu’ils comprennent . Le journaliste travaille dans l’urgence, un article est une parole qu’ on livre au public un jour donné ”. Pour conclure, Christian Bach a fait preuve d’une grande humilité en soulignant qu’un journaliste se trouve confronté le plus souvent à l’urgence et qu’un événement en chassant un autre, à J + 4 d’une tempête par exemple, “ on passe déjà à autre chose …" C’est sur cette dernière évocation que les “ Entretiens de Colmar ” prirent fin, Claude Lienhard directeur du Cerdacc organisateur de la manifestation souhaitant encore au dernier carré de participants un bon retour.

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Jo Laengy, rédacteur en chef du JAC LES ETUDIANTS DANS LE COLLOQUE Grâce aux étudiants de l'Amicale et d'Atout CJ, le colloque s'est déroulé à la satisfaction générale. Encadrées par Mmes. Françoise Geismar et Annette Schwindenhammer, des équipes se sont constituées pour assurer l'accueil, les inscriptions, le service durant les pauses et même le pilotage pédestre jusqu'au restaurant. D'autres, sous la houlette de plusieurs professeurs, se sont acquittés d'une rude tâche: prendre des notes et les restituer sous forme de "papiers journalistiques" destinés au JAC spécial. Sans oublier le photographe de service, lui aussi étudiant.

Les étudiants de Atout CJ et de l'Amicale au travail (Photo Cerdacc - Lionel Humbert) Avec l'enthousiasme qui caractérise les membres de ces deux associations du département Carrières juridiques, à l'évidence toutes et tous des futurs leaders, les étudiantes et étudiants ont donné le meilleur d'eux-mêmes non seulement le jour même du colloque mais encore pour les préparatifs comme pour la rédaction des articles. Sourires et efficacité, sérieux et disponibilité. Tout au long de la journée et quels que soient les problèmes rencontrés, chacune et chacun a mis la main à la pâte, s'acquittant de la tâche acceptée ( presque) comme des vrais pros. Dans la bonne humeur , les étudiantes et étudiants ont mis un point d'honneur à donner du département "Carrières Juridiques" la meilleure image qui soit. Qu'ils en soient remerciés ici très chaleureusement..

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Après le travail, la détente pour l'équipe (Photo Cerdacc - Lionel Humbert)