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Ann Urol 2001 ; 35 : 237-9 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003-4401(01)00028-6/SSU Organes génitaux externes Orchites xanthogranulomateuses. À propos de sept cas M. Hajri 1 , M. Ben Amna 1 , A. Derouich 1 , M. Ayed 1 , F. Zermani 2 , S. Ben Jilani 21 Service d’urologie, hôpital Charles Nicolle de Tunis, Tunisie ; 2 service d’anatomopathologie, hôpital Charles Nicolle de Tunis, Tunisie RÉSUMÉ L’orchi-épididymite xanthogranulomateuse est une affec- tion bénigne, rare et d’étiologie inconnue. Elle pose des problèmes diagnostiques, étiologiques et thérapeutiques. Elle se présente sous différents aspects cliniques qui font errer le diagnostic. Elle est souvent confondue avec une tumeur maligne du testicule mais parfois, elle prend le masque d’une orchi-épididymite banale. L’orchidectomie est souvent de mise. Nous rapportons sept cas d’orchi- épididymites xanthogranulomoteuses caractérisées par leur résistance aux antibiotiques, leur évolution inéluctable vers la fonte purulente du testicule, imposant une chi- rurgie d’exérèse dans tous les cas. Le diagnostic a été posé dans tous les cas sur l’étude anatomopathologique de la pièce opératoire. Les auteurs discutent les particu- larités cliniques, évolutives et thérapeutiques de la série en fonction des données de la littérature. 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS orchi-épididymite / testicule / xanthogranulomateuse ABSTRACT The xanthogranulomatosis orchiepididymitis. Report of seven cases. The xanthogranulomatosis orchiepididymititis is a benigne and a rare disease. Its etiology is unknown. It creates diag- nosis, therapeutic and etiological problems. The diagnosis is hardly made because of the variability of the clinical fidings. The confusion is mainly made with a malignent tumor, and sometimes with a simple orchiepididymitis. Or- chidectomy is usually performed. We report seven cases of orchiepididymitis caracterized by their antibiotherapic resistance, the destruction of the testis which needed a surgical removal. The diagnosis is established after the Correspondance et tirés à part : M. Hajri, 3 rue Ibn El Moukafaa, 1004 Tunis, Tunisie. Adresse e-mail : [email protected] (M. Hajri). histological study of the testis. The etiology is not yet known. The authors study the clinical evolution and ther- apeutic caracteristics of our serial comparing with the literature data. 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS orchiepididymitis / testis / xanthogranulomatosis L’orchi-épididymite xanthogranulomateuse est une affection bénigne et rare. Elle pose des problèmes diagnostiques, étiologiques et thérapeutiques. Elle se présente sous différents aspects qui font errer le diagnostic. Le but de ce travail est de souligner les particularités cliniques et thérapeutiques des orchi- épididymites xantogranulomateuses à partir d’une étude rétrospective de sept cas recensés dans notre service. PATIENTS ET MÉTHODES Entre janvier 1992 et décembre 1999 nous avons colligé sept cas d’orchi-épididymite xanthogranulo- mateuse. L’âge moyen de nos patients est de 51 ans, avec des extrêmes allant de 30 à 75 ans. Trois de nos patients sont diabétiques, deux opérés dans les deux mois précédents pour un adénome de la prostate, un patient est atteint d’une vessie neurologique. Aucun antécédent de traumatisme ou d’infection scrotale n’a été retrouvé chez nos malades. Tous nos patients ont consulté la première fois pour une symptoma- tologie subaiguë à composante de douleur scrotale avec des signes inflammatoires locaux sans fièvre.

Orchites xanthogranulomateuses. À propos de sept cas

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Ann Urol 2001 ; 35 : 237-9 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservésS0003-4401(01)00028-6/SSU

Organes génitaux externes

Orchites xanthogranulomateuses. À propos de sept cas

M. Hajri 1, M. Ben Amna1, A. Derouich1, M. Ayed1, F. Zermani2, S. Ben Jilani2∗

1Service d’urologie, hôpital Charles Nicolle de Tunis, Tunisie ;2service d’anatomopathologie, hôpital Charles Nicolle de Tunis,Tunisie

RÉSUMÉL’orchi-épididymite xanthogranulomateuse est une affec-tion bénigne, rare et d’étiologie inconnue. Elle pose desproblèmes diagnostiques, étiologiques et thérapeutiques.Elle se présente sous différents aspects cliniques qui fonterrer le diagnostic. Elle est souvent confondue avec unetumeur maligne du testicule mais parfois, elle prend lemasque d’une orchi-épididymite banale. L’orchidectomieest souvent de mise. Nous rapportons sept cas d’orchi-épididymites xanthogranulomoteuses caractérisées parleur résistance aux antibiotiques, leur évolution inéluctablevers la fonte purulente du testicule, imposant une chi-rurgie d’exérèse dans tous les cas. Le diagnostic a étéposé dans tous les cas sur l’étude anatomopathologiquede la pièce opératoire. Les auteurs discutent les particu-larités cliniques, évolutives et thérapeutiques de la sérieen fonction des données de la littérature. 2001 Éditionsscientifiques et médicales Elsevier SAS

orchi-épididymite / testicule / xanthogranulomateuse

ABSTRACTThe xanthogranulomatosis orchiepididymitis. Reportof seven cases.The xanthogranulomatosis orchiepididymititis is a benigneand a rare disease. Its etiology is unknown. It creates diag-nosis, therapeutic and etiological problems. The diagnosisis hardly made because of the variability of the clinicalfidings. The confusion is mainly made with a malignenttumor, and sometimes with a simple orchiepididymitis. Or-chidectomy is usually performed. We report seven casesof orchiepididymitis caracterized by their antibiotherapicresistance, the destruction of the testis which needed asurgical removal. The diagnosis is established after the

∗ Correspondance et tirés à part :M. Hajri, 3 rue Ibn El Moukafaa, 1004 Tunis, Tunisie.Adresse e-mail :[email protected] (M. Hajri).

histological study of the testis. The etiology is not yetknown. The authors study the clinical evolution and ther-apeutic caracteristics of our serial comparing with theliterature data. 2001 Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

orchiepididymitis / testis / xanthogranulomatosis

L’orchi-épididymite xanthogranulomateuse est uneaffection bénigne et rare. Elle pose des problèmesdiagnostiques, étiologiques et thérapeutiques. Ellese présente sous différents aspects qui font errer lediagnostic. Le but de ce travail est de souligner lesparticularités cliniques et thérapeutiques des orchi-épididymites xantogranulomateuses à partir d’uneétude rétrospective de sept cas recensés dans notreservice.

PATIENTS ET MÉTHODES

Entre janvier 1992 et décembre 1999 nous avonscolligé sept cas d’orchi-épididymite xanthogranulo-mateuse. L’âge moyen de nos patients est de 51 ans,avec des extrêmes allant de 30 à 75 ans. Trois de nospatients sont diabétiques, deux opérés dans les deuxmois précédents pour un adénome de la prostate, unpatient est atteint d’une vessie neurologique. Aucunantécédent de traumatisme ou d’infection scrotalen’a été retrouvé chez nos malades. Tous nos patientsont consulté la première fois pour une symptoma-tologie subaiguë à composante de douleur scrotaleavec des signes inflammatoires locaux sans fièvre.

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Figure 1. (HE 10× 40) cellules histiocytaires à cytoplasmemicroalvéolaire spumeux.

L’interrogatoire n’a pas trouvé la notion d’écou-lement urétral ni de brûlures mictionnelles. Le côtégauche a été intéressé dans cinq cas (71 %). Lediagnostic d’orchi-épididymite banale a été posé etune double antibiothérapie associant bêtalactamineset aminosides visant les germes banaux a été ins-taurée. L’examen cytobactériologique des urines aisolé unEscherichia colidans trois cas seulement.L’évolution à été marquée dans tous les cas parl’apparition de signes cliniques de suppuration intra-scrotale, malgré une antibiothérapie prolongée de40 jours en moyenne. Le diagnostic de suppura-tion a été clinique. L’échographie scrotale n’a étéréalisée que chez deux malades. Cette présomptionclinique a été confirmée par les constatations per-opératoires, avec découverte d’une fonte purulenteorchi-épididymaire dans six cas imposant l’orchi-épididymectomie et une suppuration épididymaireisolée dans un cas, indiquant l’épididymectomie.L’étude bactériologique du pus prélevé en peropéra-toire a isolé unEscherichia colichez un seul malade.Le diagnostic positif a été posé sur l’étude anato-mopathlogique de la pièce opératoire objectivant unedestruction parenchymateuse, avec présence d’un in-filtrat inflammatoire polymorphe riche en grandescellules spumeuses(figure 1). Les suites opératoiresétaient favorables dans tous les cas avec un séjourmoyen de quatre jours.

DISCUSSION

Le terme de xanthogranulomatose est une défini-tion histologique d’une lésion caractérisée par la

présence d’un granulome inflammatoire riche engrandes cellules surchargées en graisse, dites cel-lules spumeuses, associé à un potentiel destructifimportant [1]. L’orchi-épididymite xanthogranulo-mateuse à été décrite pour la première fois parGrumberg en 1926 [2 – 4]. C’est une affection bé-nigne et rare, puisqu’elle ne représente que 2 % del’ensemble des orchiépididymites [2]. Elle survientsurtout chez des patients de plus de 40 ans [2, 3, 5, 6],rarement chez le jeune adulte. Les facteurs de prédis-position n’ont pas été définis dans la littérature. Dansnotre série, le diabète et les antécédents urologiquesvésicoprostatiques sont marqués, mais la relation decause à effet ne peut être confirmée sur un nombreaussi réduit de malades.

Cette pathologie n’a aucune particularité cliniquepropre ni signe pathognomonique. Elle évoque cli-niquement en premier lieu une néoplasie imposantl’orchidectomie par voie inguinale [1 – 3, 6], maiscela n’a pas été le cas dans cette série. Elle peut en ef-fet reproduire tous les signes d’une orchiépididymitebanale. Le tableau infectieux a été toujours au pre-mier plan, la résistance à une antibiothérapie doubleet prolongée est caractéristique [6].

L’évolution constante vers la fonte purulente del’organe ne nous laisse pas le choix thérapeutiqueimposant la chirurgie d’exérèse. Le diagnostic po-sitif est histologique montrant souvent une atteinteprédominant au niveau de l’épididyme. Des formesépididymaires pures ont été décrites [1], nous enrapportons un cas. Sur le plan histologique, cetteaffection est caractérisée par des microabcès détrui-sant le testicule, l’épididyme, le tissu fibromuscu-laire et parfois la peau. Il existe une accumulationde la graisse neutre dans les tubes séminifères as-sociée a une disparition de la lignée germinale etdes spermatozoïdes. La présence de cellules géantesplurinuclées riches en graisses, associées à un in-filtrat inflammatoire variable est pathognomonique[1, 2, 6]. Il est important de noter l’absence decorps de Michaelis Gutman, caractéristique de lamalakoplakie et de nécrose caséeuse évoquant latuberculose [2]. Sur le plan étiologique, le débatreste encore soulevé. Si certains incluent sous ceterme les lésions granulomateuses à germes spé-cifiques, comme la tuberculose, la syphilis et labrucellose [2, 6], il semble plus logique de réser-ver cette dénomination aux formes idiopathiques [7].Ces formes idiopathiques soulèvent de nombreuseshypothèses pathogéniques, la plus plausible semble

Orchites xanthogranulomateuses 239

celle avancée par Russel et Fredman [6, 8]. Cesderniers ont produit une réaction xanthogranuloma-teuse par des injections sous-cutanées de sperme.Une réaction immunitaire à médiation essentielle-ment cellulaire active sur un antigène lipidique dela tête du spermatozoïde a été constatée [2, 6]. Surle plan clinique, les microtraumatismes et les in-fections épididymaires seraient responsables d’uneextravasation de spermatozoïdes avec invasion dutissu interstitiel épididymaire. Cette extravasation vaconstituer le point de départ d’une cascade de réac-tions immunitaires et inflammatoires aboutissant àdes lésions xanthogranulomateuses [1, 6]. Ces trau-matismes passent souvent inaperçus comme dansnotre série.

Sur le plan thérapeutique, une chirurgie d’exérèseest de règle. Elle se fait par voie inguinale dans lesformes tumorales et par voie scrotale dans les formesinfectieuses [1 – 3, 5].

CONCLUSION

L’orchi-épididymite xanthogranulomateuse est uneaffection rare d’étiologie incertaine. Elle peut simu-ler une tumeur scrotale ou une orchi-épididymite ba-

nale. Dans les formes infectieuses, l’évolution vers lasuppuration est inéluctable. La biologie et l’imageriesont peu spécifiques et l’orchidectomie quasiment derègle.

RÉFÉRENCES

1 Wiener LB, Riehl PA, Baum N. Xanthogranulomatous epidi-dymitis. J Urol 1987 ; 138 : 621-2.

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3 Sporer A, Seebode JJ. Granulomateuse orchitis. Urology1982 ; 19 : 319-21.

4 Scott RF, Bayliss AP. Ultrasound in the diagnosis of granu-lomatose rchitis. Br J Radiol 1985 ; 58 : 907-9.

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6 Kahn RI, Amimch GW. Granulomatose disease of the testis.J Urol 1980 ; 123 : 868-71.

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8 Robert I, Kahn J, McAninch W. Granulomatose disease ofthe testis. J Urol 1980 ; 123 : 868-71.