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1 Origines de la famille Besner canadienne de souche française L'histoire de cette famille coule comme une rivière. Pour la rédiger de manière authentique, il a fallu remonter le temps depuis la génération actuellement active de cette famille en Amérique jusqu'à celle qui est la source de cette famille en France et même au delà. De 1585 à 1752 en Europe, et de 1752 à aujourd'hui en Amérique. L'ANCÊTRE CANADIEN DE NOTRE FAMILLE VENAIT DE LA GASCOGNE P.2 Les Besner à la recherche de leurs origines p.2 Existe-t-il des Besner d'autres origines ? p.6 La première rencontre Besner Bézanère p.8 Généalogie des Bézanère de Gascogne p.11 Une origine française d'origine espagnole p.16 Le contexte de l'émigration de notre ancêtre p.21 L'ANCÊTRE NOTRE FAMILLE FUT D'ABORD UN SOLDAT p.25 Les compagnies franches de la marine p.25 À l'Île de Ré commence l'aventure p.28 La traversée vers le monde nouveau p.30 Curriculum militaire de notre ancêtre p.33 Le surnom militaire de «prêt à boire» p.38 L'ANCÊTRE NOTRE FAMILLE FUT ENSUITE COLON-DÉFRICHEUR p.40 Son enracinement canadien p.40 Les premiers Besner canadiens p.44 Un répertoire des Besner canadiens d'origine française

Origines de la famille Besner canadienne de souche française

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Origines de la famille Besner canadienne de souche française

L'histoire de cette famille coule comme une rivière. Pour la rédiger de manière authentique, il a fallu remonter le temps depuis la génération actuellement active de cette famille en Amérique jusqu'à celle qui est la source de cette famille en France et même au delà. De 1585 à 1752 en Europe, et de 1752 à aujourd'hui en Amérique.

L'ANCÊTRE CANADIEN DE NOTRE FAMILLE VENAIT DE LA GASCOGNE P.2

Les Besner à la recherche de leurs origines p.2 Existe-t-il des Besner d'autres origines ? p.6 La première rencontre Besner – Bézanère p.8 Généalogie des Bézanère de Gascogne p.11 Une origine française d'origine espagnole p.16 Le contexte de l'émigration de notre ancêtre p.21

L'ANCÊTRE NOTRE FAMILLE FUT D'ABORD UN SOLDAT p.25

Les compagnies franches de la marine p.25 À l'Île de Ré commence l'aventure p.28 La traversée vers le monde nouveau p.30 Curriculum militaire de notre ancêtre p.33 Le surnom militaire de «prêt à boire» p.38

L'ANCÊTRE NOTRE FAMILLE FUT ENSUITE COLON-DÉFRICHEUR p.40

Son enracinement canadien p.40 Les premiers Besner canadiens p.44

Un répertoire des Besner canadiens d'origine française

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L'ANCÊTRE CANADIEN DE NOTRE FAMILLE VENAIT DE LA GASCOGNE

LES BESNER CANADIENS À LA RECHERCHE DE LEURS ORIGINES

Le nom de famille « BESNER » est bien particulier à la région du sud-ouest québécois. S'il s'est répandu au dehors, c'est une réalité relativement récente des derniers cinquante ans. Comme cette famille remonte chez nous à un ancêtre arrivé au pays vers la fin du régime français, elle ne compte que sept ou huit générations, et il s'est avéré assez facile de retrouver des liens de parenté entre tous les descendants de ce même et unique ancêtre.

C'est depuis 1960 qu’Hector Besner s'intéresse à ses racines. Lorsqu’il était jeune prêtre, au début des années 1960, il occupait ses journées de congé à scruter les registres paroissiaux de sa région d'origine: Vaudreuil-Soulanges au Québec. Son statut de prêtre constituait un parfait laissez-passer pour avoir accès à ces mines de renseignements. Il avait alors écrit beaucoup de notes qu'il a retrouvées lorsque il a pris sa retraite du ministère en 1991.

D'autres l'ont cependant précédé et des contemporains qu'on ne connaissait pas jusqu'à récemment ont développé la même passion. Avant de raconter l'histoire de la famille il faut d'abord évoquer les noms de ces nombreux intervenants qui ont directement contribué aux découvertes que le présent site essaie de synthétiser pour les partager aux Besner actuels et à leurs descendants.

Au tournant du siècle dernier, entre 1895 et 1900, le Chanoine Alphonse-Charles Dugas était alors curé de St-Clet dans Soulanges. Ce prêtre cultivé et écrivain durant ses loisirs s'intéressa, entre autres, à deux familles prolifiques de sa paroisse, les Besner et les Bourbonnais, dont les rejetons se mariaient allègrement entre eux, Probablement par soucis de mieux connaître ses brebis autant que pour y déceler les nombreux liens de consanguinité qui constituaient alors des empêchements de mariage jusqu'au quatrième degré, il mit sur papier les «généalogies du nom» de ces deux familles. Quelques descendants de ces familles conservent précieusement ces «tableaux» faits de façon professionnelle chez un imprimeur. Ce sont de précieuses reliques, qui heureusement ont été reproduites pour être conservées.

Un autre prêtre, le Chanoine Adhémar Jeannotte, qui fut curé de la paroisse St-Michel de Vaudreuil de 1946 à 1969, berceau des Besner au Canada, était aussi un fervent adepte de la généalogie. Comme les registres de sa paroisse remontaient à 1773, plusieurs chercheurs allaient les consulter pour retrouver leurs racines. Son presbytère voisinait le bureau d'enregistrement du comté. C'est alors que le curé transcrivit dans des cahiers, à la suite, pour chaque famille qui comptait plusieurs données dans ses registres, tous les renseignements qu'il trouvait consignés dans les deux endroits. Avant lui, Monseigneur Guillaume Forbes, pendant qu'il était curé à Ste-Anne-de-Bellevue de 1903 à 1911 (il devint archevêque d'Ottawa en 1928), avait réalisé un travail similaire pour cette autre paroisse souche de plusieurs de nos familles de Vaudreuil-Soulanges. Ces deux manuscrits sont déposés et disponibles pour consultation au Centre d'Histoire La Presqu'Île du Musée régional de Vaudreuil-Soulanges.

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Jusqu'à 1992, tout ce que nous savions des origines de la famille Besner s'arrêtait aux informations que nous livrait l'acte du mariage religieux qu'avait contracté l'ancêtre, le 18 février 1760, acte conservé aux registres de la paroisse Sainte-Anne de-Bellevue, autrefois désignée comme Ste-Anne-du-Bout-de-l'île, sur l'île de Montréal au Québec.

Le notaire Robert Besner (1910-

1970) L'avocat Yvon Besner (1956-) M. Claude Besner

M. André Colin et son épouse Marie-Renée, née Bézanère

Monsieur Alain Costes, archiviste à Rieumes

L'enseignant Laurent

Besner (1950-)

En septembre 1964, Robert Besner (1910-1970), notaire, mais surtout propriétaire et président-directeur-général d'une importante quincaillerie à Salaberry-de-Valleyfield, au cours d'un voyage en Europe, fit un détour pour aller visiter le pays de l'ancêtre. On peut dire que c'est avec lui que les Besner canadiens ont commencé la recherche sur le terrain du pays de leurs origines. Les distances sont aujourd'hui beaucoup plus vite franchies qu'en 1752, tellement qu'on pourrait dire que l'Atlantique est devenu un simple lac comparé à l'océan qu'il a été.

En 1980, un autre descendant canadien, Yvon Besner, alors étudiant, entreprit des recherches aux archives nationales de Montréal. Aujourd'hui, cet homme est avocat, fonctionnaire au ministère fédéral de la Justice du Canada à Ottawa. Il est né à Montréal, en 1956. Il découvrit le contrat de mariage de l'ancêtre, un acte passé devant Louis-Claude Danré de Blanzy, notaire royal à Montréal de 1738 à 1760. Ce contrat date

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du 21 avril 1760, soit après le mariage religieux. Ce fait peut nous surprendre aujourd'hui, mais était courant sous le régime français. Le prêtre présidant le mariage religieux était autorisé à rédiger un contrat civil de mariage qui était par la suite « insinué » en bonne et due forme par un notaire de métier. Cet acte contient essentiellement les mêmes informations que le précédent, à quelques exceptions près. Notons en passant que le dernier acte notarié de Danré de Blanzy au Canada fut signé le 29 avril 1760. Ce notaire est un des nombreux notables qui optèrent pour le retour en France après la défaite.

Yvon Besner s'est rendu à Rieumes en août 1992, au même moment où Madame Colin était à Chambly au Québec. C'est lui le premier à avoir questionné Alain Costes, conservateur aux Archives de Rieumes, en lui demandant de pousser des recherches sur l'origine des Bézanère . Yvon Besner, est retourné en France en juillet 1995, mais, à Versailles, ne disposant que de quelques heures un certain jour où Madame Colin n'était pas chez elle ce jour-là, ils ne purent se rencontrer.

En août 1991, M. Claude Besner, promoteur immobilier résidant alors à Chambly, fit le voyage en France avec, lui aussi, l'intention de trouver le pays de l'ancêtre des Besner et de découvrir s'il s'y trouvait encore des descendants. Grâce à l'annuaire téléphonique, il a pu retracer la mère (veuve depuis 1980) de Madame Colin à qui il a rendu visite. Puis, en août 1992, Madame Colin s'est rendue au Canada, parce qu'elle avait entrepris d'en apprendre davantage sur les Besner et sur leur ancêtre venu de France. Avant de commencer toute recherche généalogique ou autre, elle tenait à rencontrer M. Claude Besner en vue d'obtenir suffisamment d'informations pour tenter de retrouver la trace de l'ancêtre des Besner, Jean Bézanaire. Il lui avait alors remis une photocopie du tableau généalogique de sa famille, celui qu'on doit au Chanoine Dugas, et qui était, chez lui, dûment encadré et accroché au mur de son bureau.

C'est à partir des données de ce tableau que Madame Colin a pu élaborer un document,. Elle a été aidée par Monsieur Alain Costes, conservateur aux Archives de Rieumes, département de Haute-Garonne, région Midi-Pyrénées, en France. Ce document, qui est devenu par la suite la « Bible » sur laquelle nous fondons nos origines françaises, a été édité dans le No 6 de la revue «Archeo en Savès» de novembre 1994, une publication régionale voulant valoriser le patrimoine. Madame Colin en avait envoyé copie à Claude Besner le 6 juin 1994.

Me Yvon Besner fit paraître, durant à peine deux mois à partir de décembre 1996, l'essentiel du document de Madame Colin sur un site Internet. Depuis ce moment, l'auteur de ces lignes, grâce à la magie électronique, a repris contact avec tous ces gens, et avec beaucoup d'autres, vérifié les sources connues, dépouillé des archives notariales, complété ce qui paraissait vague, et peut livrer maintenant avec beaucoup d'assurance où en sont nos connaissances sur nos origines Bézanaire-Besner

Laurent Besner, professeur au Cégep de St-Jérôme, a séjourné en France du 4 octobre au 3 novembre 1999. C'était sa deuxième tentative pour découvrir le vrai patelin de notre ancêtre commun. Cette fois fut la bonne. Il a rencontré les Colin (André et Marie-Renée Bézanère) chez eux à Versailles. Cette " cousine " et son époux sont des

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passionnés de nos recherches concernant le pays de notre ancêtre français. Ils ont partagé le fruit de toutes leurs recherches avec Laurent qui m'a rapporté les documents qu'ils ont accumulés à date. Ils ont ensuite pris Laurent en charge au cours d'un voyage de cinq jours en automobile, de Paris à Rochefort-Larochelle jusqu'à Toulouse, en s'arrêtant, bien sûr à Rieumes et à Savères où ils ont rencontré les maires des deux endroits pour parler de nos projets pour 2002. Laurent m'a rapporté également des photos fraîches dont plusieurs sont reproduites dans l'actuelle publication.

La source est trouvée. Les pèlerins Besner qui s'y rendent sont de plus en plus nombreux. À la première Assemblée générale de l'Association des familles Besner tenue à Saint-Clet, QC le 1er octobre 2000, Marie-Renée Bézanère et son époux André Colin, de Versailles en France, étaient, entre autres, présents, de même que Claude et Yvon Besner précités et Claire Besner, la fille du notaire Robert Besner, celui qui a ouvert le chemin. Nous leur disons tous merci.

La ville de Rieumes, département de Haute-Garonne, Région Midi-Pyrénées, France - que

les Besner canadiens ont longtemps cherché en vain sous le nom de «Riomoux» ...

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EXISTE-T-IL DES BESNER D'AUTRES ORIGINES?

Il se trouve actuellement à Montréal des Besner qui sont de langue anglaise et de religion juive. Au cimetière juif du Mont Royal, qui relève de la «Congrégation Shaar Hashomayim» (fondée en 1846), on trouve un lot sur lequel sont installés un monument et des tuiles commémoratives en granit et gravés du patronyme BESNER, des citations bibliques en caractères hébraïques, des étoiles de David et des prénoms typiquement juifs: Aaron, Judah, Seth, Ruth, Sarah, etc. Les dates les plus anciennes qu'on y découvre font état de naissances et de décès datant de la fin du 19 ième siècle jusqu'à aujourd'hui.

Au cimetière juif du Mont Royal, à Montréal au Québec,

un mémorial Besner orné d'Étoiles de David

Au même endroit, des prénoms et des inscriptions typiquement hébraîques

Par d'autres sources on sait que, entre les années 1840 et 1900, le Québec, Montréal en particulier, a reçu une forte immigration juive. Ces fils d'Israël venaient de l'est de l'Allemagne, d'Autriche, et quelques uns de Pologne. Plusieurs des patronymes de ces régions d'Europe se terminent en «er» : Berger, Faber, Wagner, et même Pesner, noms qui survivent jusqu'à ce jour. Bien plus, il s'avère souvent que les adaptations à la langue anglaise de noms issus de langues slaves peuvent donner des résultats aussi étonnants que BesnerÉ

Il y a encore des Besner d'origine allemande et de religion chrétienne. Dans les années 1980, un Besner de Coteau-du-Lac s'est rendu à Lahr, en Allemagne, avec son frère visiter le fils de ce dernier qui faisait alors partie du contingent canadien des soldats affectés à cette base militaire de l'OTAN. Un jour, ils prirent un repas dans un établissement dont l'enseigne affichait clairement le nom du propriétaire: Besner ! - Malheureusement nos touristes n'ont pas photographié la curiosité. Autour de 1995, un Besner des nôtres, de Ville Saint-Laurent, Québec, a vécu en Allemagne pour y établir une succursale de son entreprise. Il a confirmé qu'il se trouve des allemands portant le nom Besner; ils sont rares, et ils sont de religion catholique.

Une recherche sur Internet en 1998 référait à un article consacré à un dénommé Besner, d'origine allemande, immigré en Pennsylvanie au début des années 1800, qui est venu fonder une congrégation Mennonite dans le sud de l'Ontario vers 1850.

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Pour ajouter à la confusion au sujet du patronyme Besner, il faut enfin parler des différentes façons dont ce nom s'est écrit et s'écrit même encore. Les deux ou trois premières générations de Besner canadiens d'origine française ne sachant ni lire ni écrire, l'orthographe de ce patronyme a été couché sur papier de plusieurs manières par divers curés et notaires qui interprétaient ce qu'ils entendaient. On retrouve ainsi des Bazanaire et des Bazanet, des Bézenaire et Bezenère, des Bezner et Beznert, des Bessenaire et Bessner, Au début des années 1900, l'orthographe « Besner » prévalut, bien qu'une famille ayant séjourné en Nouvelle-Angleterre vers 1885-1900 écrit son nom Bisnaire depuis ce temps là.

Alors, comment savoir si nous sommes bien canadiens d'origine française? - Il faut remonter chacun notre généalogie Besner, génération après génération. Si cette recherche nous mène jusqu'à la source que nous vous présentons dans la présente publication, nous le sommes.

En 1999, une recherche sur Internet sur le site 411 de Sympatico, m'a révélé ce qu'il y avait de Besner alors inscrits:

433 Besner au Québec

14 Besner en Ontario

3 Besner au Manitoba

6 Besner en Colombie-

Canadienne

2 Besner au Nouveau-Brunswick

5 Bezner au Canada

23 Bisnair au Canada

25 Bessner au Canada

126 Besner aux États-Unis

195 Bezner aux États-Unis

Le total ferait 960 inscriptions; ces noms n'indiquent pas s'il s'agit d'hommes ou de femmes ou de familles. Mais il serait vraisemblable que ces inscriptions téléphoniques représentent au moins 3,000 personnes vivantes.

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LA PREMIÈRE RENCONTRE BESNER-BÉZANÈRE (racontée différemment des deux côtés de l'Atlantique)

Marie-Renée Colin née Bézanère

Claire Besner

Suite à sa visite de 1964 au pays de l'ancêtre, le notaire Robert Besner de Valleyfield, QC, ne rédigea malheureusement aucun écrit. Sa fille Claire, née en 1943, son unique descendante encore vivante, était trop jeune pour s'intéresser à la généalogie. Elle ne retient que le désappointement de son père suite à cette visite. Un cousin du notaire, Gaëtan Besner (1922-1998), cultivateur, résidant du Ruisseau à Coteau-du-Lac, QC, m'a raconté, au cours d'une conversation le soir du 4 novembre 1996, les souvenirs que lui en avait laissé le notaire Robert.

De référence en référence, le notaire Robert aurait découvert et visité une terre dans le Gers qu'il croyait être la terre ancestrale. Elle était cultivée à ce moment-là par un des descendants de la même famille qui se la transmettaient par héritage. Il y exploitait une industrie laitière. Cet homme aurait déclaré avoir une fille qui étudiait alors le droit et un fils non intéressé à assurer la relève. Il aurait avoué devoir, à regret, liquider l'héritage ancestral.

Me Robert Besner aurait raconté que, au premier contact, le cousin français avait été rétif à recevoir cette visite d'un canadien. Mais, après explications sur les motifs bien désintéressés du visiteur étranger, l'hôte «gascon» aurait avoué sa crainte qu'il s'agissait, surtout de la part d'un homme de loi, de quelque réclamation d'une part d'héritage jamais réglée. Pour divers motifs, le notaire canadien ne goûta pas la rencontre.

Les parents de Marie-Renée Colin, née Bézanère,ici à leur domicile en

1990.

Une maison de ferme typique aux environs de Rieumes, ici, chez Pierre Bézanère, en 2004.

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Cette visite de 1964 s'est cependant avérée fort bien documentée outre-mer. Madame Marie-Renée Colin, née Bézanère, était la fille du « cousin» alors visité, Élie Bézanère dans le département du Gers. Au moment de la rencontre de 1964, Marie-Renée travaillait déjà à Paris à l'Administration des Finances et avait terminé ses études en Droit depuis deux ans. Sa mère, qui n'est décédée qu'en décembre 2000, lui avait déjà donné le récit de ces visites et se l'est fait raconter de nouveau par elle en décembre 1998.

Voici donc le récit de la première rencontre BESNER-BEZANÈRE en 1964. Marie-Renée nous la raconte comme l'ont vécue ses parents qui étaient agriculteurs domiciliés à St-Loube-Amade, mon village natal.

Un jour donc ma mère, occupée en sa cuisine, voit arriver quatre personnes entrées sans avoir frappé auparavant à la porte, d'ailleurs toujours ouverte puisqu'à l'époque j'avais suggéré cette solution vue l'absence de sonnette électrique.

- « Nous sommes vos cousins du Canada»

- « Nous n'avons pas de cousins au Canada», dit ma mère, «mais nous allons demander à mon mari ».

À l'étable mon père, occupé à nourrir les vaches, confirme. Les Canadiens, deux hommes et deux femmes, se présentent : M. Besner, notaire, son épouse , sa soeur et son beau-frère, en voyage en Europe en véhicule Pontiac. Ils déclarent descendre d'un ancêtre originaire de Riomoux, diocèse de Lombez, marié au Canada avec Anne Caglia.

Pour trouver des Bézanère dans le département ils s'étaient adressés à la Préfecture à Auch qui avait trouvé mes parents grâce aux listes électorales. Ils s'étaient auparavant rendus dans une commune nommée La Romieu mais la mairie du village leur avait dit ne connaître aucun Bézanère.

Mes parents n'ont pas été très accueillants pour ces lointains cousins arrivant à l'improviste. À l'époque, je leur avais d'ailleurs reproché leur attitude. Quant à ce Bézanaire émigré au Canada, ils avaient simplement retenu qu'il y avait plus de 2000 descendants.

Ils m'ont expliqué ainsi leur réticence envers ces visiteurs inattendus.

Ils pensaient que si un Bézanère avait émigré au Canada ils le sauraient, donc ce n'était pas une histoire très crédible et les visiteurs ne pouvaient pas être de bonne foi, d'autant que leur nom était Besner... et non Bézanère.

Riomoux était un nom parfaitement inconnu d'eux. Mais quelques jours après ils ont pensé que Riomoux n'était autre que Rieumes, à 10 km de chez eux, mais ils ne l'avaient pas compris sur le champ parce que c'était dit en patois gascon incorrectement prononcé.

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Ils ont par ailleurs regretté de ne pas avoir orienté les visiteurs canadiens vers d'autres Bézanère domiciliés près de Rieumes mais ceux-ci, contactés par la suite, ont confirmé tout ignorer de cette aventure.

Je pense qu'ils ont eu du mal à se comprendre du fait de leurs accents très différents. Dans le Midi de la France on parle « plat » et même l'accent parisien (radio, télévision) est parfois mal reçu par des oreilles occitanes. Alors que dire de l'accent québécois... et inversement sans doute l'accent du midi n'est pas bien passé. Trois preuves de ces malentendus :

- pourquoi mes parents ont-ils compris que l'épouse de votre ancêtre s'appelait Anne Caglia au lieu de Marie-Anne Gruzelin ? Et ma mère est formelle, c'est Anne Caglia qu'elle a entendu, compris et retenu.

- la terre ancestrale que le notaire Besner aurait découverte et visitée, donc la ferme de mes parents, a été achetée par mon grand-père en 1905 (grâce à un héritage reçu par son épouse). Si terre ancestrale il y eut, elle se trouve dans la commune de Savères, mais je doute que les Bézanère aient possédé de la terre à l'époque de 1750.

- mon père n'a pas pu déclarer qu'il avait un garçon et une fille puisque je suis fille unique et en 1964 j'avais terminé mes études de droit depuis 2 ans et je travaillais dans l'Administration des Finances.

Post Scriptum ...

Au printemps 1997, le réalisateur du présent site «internet» a eu une entrevue avec Claire Besner, fille de feu le notaire Robert qui avait grandement contribué, bien qu'à son insu, au travail qui nous intéresse tous aujourd'hui. Elle a alors révélé des souvenirs qu'elle n'avait pas encore dits lors de rencontres antérieures... Elle avait 20 ans en 1964 et se rappelle avec combien d'amertume son père était revenu de ce voyage en France dont le but principal était de découvrir ses racines gasconnes... Son épouse en faisait parfois allusion en le raillant, tandis que lui ne voulut jamais en reparler. Elle m'a aussi identifié l'autre couple: il s'agissait du pharmacien Lucien Perron, également de Valleyfield, et de la jeune conjointe qu'il avait élue suite à son divorce. Le notaire Robert Besner ne pratiqua que très peu le Droit, héritier qu'il était d'un grand commerce de quincaillerie qui se transmit jusqu' à la cinquième génération et fonctionna jusqu'en l'an 2002. Le pharmacien Perron était lui aussi devenu davantage un homme d'affaires qu'un professionnel de la santé. Les deux faisaient des affaires en milieu rural avec les cultivateurs de la région et savaient parfaitement évaluer une entreprise agricole.

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GÉNÉALOGIE DES BÉZANÈRE EN GASCOGNE

Les Bézanère de France s'intéressent eux aussi depuis longtemps à leur généalogie. Le plus ancien document portant la signature d'un probable ascendant Bézanère - Besner, se lit «Besaniare» et date de 1585. Elle figure au bas d'un contrat passé à Monblanc, dans le Gers, à 15 km de Savères. La signature se trouve écrite en lettres bâton (lettres majuscules carrées), manière de faire assez courante à l'époque. Le A est écrit de la façon basque, soit avec une ligne horizontale au-dessus de la lettre. Cette généalogie est caractérisée, entre autres, par la très grande fréquence de l'utilisation du prénom Jean, non seulement de père en fils, mais parfois au sein de la même famille; on distingue alors Jean l'aîné de Jean-le-cadet.

La signature d'un Besaniare au bas d'un document datant de 1585

Le Pays de Savès chevauche les actuels départements du Gers et de la Haute-Garonne dans le sud de la France

Les archives de Rieumes nous révèlent qu'en 1643, Guilhem (c'est Guillaume en langage français contemporain) Bessanère, travailleur de Savères, marie son fils Pierre avec

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Peyrone Marsolette, fille de Gaspard Marsolet et de Isabeau Ducassé et, en 1650, son autre fils Jean, avec Gabrielle (illisible), fille de Casemayou; ce Guilhem Bessanère serait donc né vers 1620; puis, en 1649, un autre mariage, cette fois celui de Pierre Bessanère de Savères avec Marguerite Du(illisible).

Ces mariages sont l'objet de contrats conclus par Maître Lavaur à La Bastide: La Bastide des Feuillants sous l'Ancien Régime, aujourd'hui Labastide-Clermont. Les parties aux contrats ne savaient pas signer. Ces documents sont par ailleurs quasiment illisibles. Tout ce qu'on peut en dire, c'est que les Bézanère de France d'aujourd'hui et les Besner canadiens depuis 1760 en sont tous issus.

Un acte daté de 1720 mentionne ensuite un autre prénommé Guilhem Bézanère, cent ans après son homonyme, et probablement un de ses descendants.

Le village de Savères aujourd'hui; depuis toujours on bâtit en briques et tuiles tirées du sol argileux du pays. Voyez la couleur !

Rieumes est sur Internet

http://www.ville-rieumes.fr/

Paysage rural de Savères

La cuve baptismale de l'église Saint-Barthélémy de Savères où l'ancêtre

des Besner canadiens d'origine française aurait été baptisé

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Déjà à l'époque de l'ancêtre canadien, le marché public de Rieumes était réputé; il l'est

encore comme l'atteste cette photo de 1999

Une croix de chemin près de Rieumes; notons le dessin des extrémités et

comparons-le avec le logo de la Région Midi-Pyrénées.

Les Bézanère en France en 1998

Il appert qu'après avoir été relativement nombreux en France au siècle dernier, les Bézanère sont maintenant une espèce en voie de disparition. Ils ont des familles peu nombreuses, constituées souvent d'enfants uniques ou majoritairement de filles. Le nom court le risque de disparaître. Parmi les «mâles» actuels, il y a deux célibataires de plus de cinquante ans.

Une recherche a été faite dans le bottin téléphoniue français "Minitel". La méthode n'est donc pas exhaustive parce qu'elle omet tous les gens qui sont enregistrés sur la liste rouge et sont par conséquent inatteignables.

On en a trouvé dans dans les départements dont les codes sont 92 - 60- 31- 32 Bezanere Daniel - 1 parvis Breuil - 92160 ANTONY

Bezanere Bernard - rte Nationale 330 60100 CREIL

Bezanere Serge - électricien Village 31260 FIGAROL

Bezanere Bernard - La Queille 31430 LE FOUSSERET

Bezanere Guy - La Queille 31430 LE FOUSSERET

Bezanere Michèle - La Queille 31430 LE FOUSSERET

Bezanere Roger - rue Aire 31430 LE FOUSSERET

Bezanere Pierre - 815 chem Antioque - 31370 RIEUMES

Bezanere Albert - Casse d'Antoine - 31370 SAVERES

Bezanere Robert - 22 port St Sauveur - 31000 TOULOUSE

Bezanere Sandrine - 118 av Grande Bretagne - 31100 TOULOUSE

Bezanere Elie - 1 r Marcadieu - 32130 SAMATAN

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Un des derniers Bézanère masculins de France: Albert, ici

accompagné de son épouse Alice

Une vieille borde (ferme) en Savès

Presque tous habitent dans le département de la Haute-Garonne et dans un périmètre de 20 km environ autour de Savères. Le grand-père de Mme Marie-Renée Colin, née Bézanère, y est né en 1869. Tous ceux qu'elle a rencontrés au fil de sa recherche ont été intéressés d'apprendre l'existence de la branche Besner du Canada.

Savères aujourd'hui ne compte guère plus de 150 habitants.

Le château et l'église de Savères

Au cours de l'histoire de la France, le sud a longtemps été un pays à part: le royaume de Navarre, on l'a vu, a depuis longtemps contesté les orientations parisiennes. Pas surprenant, donc que la Gascogne soit le pays du d'Artagnan des films de cape et d'épée; le pays de Cyrano de Bergerac qui déclame sa vantarde tirade aux cadets de Gascogne; pays frontière de l'Espagne qui lui a légué plusieurs de ses traditions; pays de la bonne table, des bons vins, du foie gras et de l'armagnac.

Le piedmont des Pyrénées, au pays de Savès

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Tenant d'une tradition séculaire, cette région est, aujourd'hui, une région de polyculture et il y a peu d'élevage, sauf des volailles : oies et canards pour le foie gras surtout. La densité de population y est faible et les grandes villes, rares, excepté Toulouse qui est la quatrième ville de France, la ville de l'aéronautique, des industries de pointe, et qui possède une université très importante.

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UNE ORIGINE FRANÇAISE D'ASCENDANCE ESPAGNOLE

Le patronyme Bésaniare-Bézanère révèlerait que la famille serait d'origine espagnole. Ceux qui l'ont prétendu et le prétendent encore, y compris Mme Marie-Renée Colin, née Bézanère, basent leur opinion, entre autres, sur l'existence du «z» dans ce nom qui se prononce en espagnol comme le «th» anglais et le «ss» français. En tout cas, l'ancêtre des Besner canadiens, s'il ne savait pas écrire son nom, avait sans doute appris à le prononcer distinctement, puisque, autant le curé qui préside la cérémonie religieuse que le notaire qui paraphe son contrat de mariage, l'écrivent , l'un «Bazanaire», et l'autre «Bézanaire». L'auteur de ces lignes, se rappellant qu'étant jeune sa mère le reprenait lorsqu'il prononçait Bezner au lieu de Besner, en conclut que depuis belle lurette il y eut confusion sur la manière de prononcer cette consonne médiane : ss ou z ?

Le pays d'origine de l'ancêtre des Besner, la Gascogne - le Gers - la Haute-Garonne, se trouve au sud de la France, situé à mi-chemin entre la Méditérannée à l'est et l'Atlantique à l'ouest. On y parlait autrefois, et même jusqu'en 1950, le gascon ou la langue d'Oc, ou encore des patois qui en dérivent. L'occitan, langue apparentée à l'espagnol, connaît une résurrection culturelle actuellement dans cette région. Cela explique qu'encore aujourd'hui les gens y parlent français avec un accent très particulier.

Quant à l'ancêtre des Besner, étant illettré, il n'a pas écrit son nom ni celui de ses parents, mais il les a seulement prononcés, laissant toute liberté aux scribes de l'écrire comme ils l'entendaient, ce qu'ils n'ont pas manqué de faire....

On trouve aux actes officiels canadiens d'autres orthographies: Bézenert, Bessenère, Bessenaire, Bézenaire, Bezner et enfin Besner, qui a prévalu du début du 20ème siècle jusqu'à nos jours. Tout au long des trois premières générations canadiennes on rencontre souvent l'écriture du nom incluant un «z»: Bezenert et Bezner. Encore de nos jours, au Canada, bien que l'orthographie du nom ait adopté définitivement le «s», on le prononce fréquemment comme un «z». A l'été 1992, un descendant établi près de Windsor, Ontario, est venu aux sources: pour sa part, il écrivait son nom «Bisnair». Allez voir s'il n'en exite pas d'autres...

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Le sud de la France, pays de la langue d'Oc

Concernant l'Occitanie

http://fr.wikipedia.org/wiki/Occitanie

http://www.occitanie.org/

L'histoire nous encourage à retenir deux hypothèses concernant notre lointaine mais possible origine espagnole.

Nous devons la première hypothèse et la plus vraisemblable à un curé de Savères. Pendant près de cinquante ans, Jean-Louis Bézanère (1888-1957), apparenté à Madame Colin de Versailles, a donné, de son vivant, des informations orales de sa recherche généalogique personnelle. Malheureusement, selon son héritière, Léa Saunier de Rieumes, les résultats écrits de sa recherche ont été détruits à son décès.

Selon cet ecclésiastique, le premier Bézanère serait arrivé d'Espagne en France avant le règne de Louis XIV (1643-1715). Il basait son opinion à ce sujet sur le fait de l'écriture basque utilisée dans le plus ancien document que nous avons concernant cette famille. Puis, son nom aurait été emprunté d'un pic ou d'un village des Pyrénées, cette chaîne de montagnes chevauchant la frontière franco-espagnole.

Cette première hypothèse expliquant l'arrivée d'une famille espagnole en France doit tenir compte du contexte historique des guerres de religion françaises qui battirent leur plein de 1559 jusqu'à 1589 et même au delà. Sous l'influence du calvinisme naissant, plusieurs, dans le sud de la France, s'étaient alors convertis au protestantisme, entraînant la persécution de ses adeptes (massacre de la St-Barthélémy le 24 août 1572) et une guerre civile qui ne prit vraiment fin qu'avec l'Édit de Nantes en 1598.

C'est Henri-IV, grand père de Louis-XIV, d'abord roi protestant de Navarre, qui ramena un peu de tolérance dans ce bourbier. La Navarre chevauchait l'ouest de la frontière entre la France et l'Espagne. La partie nord du royaume de Navarre fut rattachée à celui de France suite à l'accession d'Henri au trône et sa reconversion au catholicisme («Paris vaut bien une messe», aurait-il dit).

La Gascogne, comme d'autres régions du sud-ouest français, avait vu sa population protestante décimée par les guerres de religion. Les nobles français, qui étaient la plupart du temps de grands propriétaires terriens, allèrent alors en Espagne pour inciter des espagnols catholiques à venir s'installer en France à titre de paysans en remplacement de ceux qui avaient disparu.

Une seconde hypothèse est avancée. La date d'arrivée de l'ancêtre espagnol en France aurait pu coïncider avec l'expulsion des morisques et des marranes. Ces qualificatifs

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désignent des juifs et des musulmans refoulés dans la moitié sud de l'Espagne, durant la «reconquista» sous le règne d'Isabelle de Castille, dite Isabelle la Catholique, entre 1481 et 1492, et convertis de force au catholicisme. Il était notoire que ces «convertis» continuaient en cachette à observer les rites de leur religion initiale, et ils se révoltèrent sous le règne de Philippe-II d'Espagne. Ils furent réprimés en conséquence entre 1568 et 1570. Son successeur régla le problème de façon radicale en les expulsant de son pays au début des années 1600. Ils furent alors assez nombreux à s'établir dans le sud-ouest de la France. L'ancêtre des Bézanère français était-il du nombre? Cette hypothèse est moins probable que la précédente, à cause de la géographie des opérations et des dates où elles eurent lieu. Notre plus ancien document remonte en effet à 1585, soit avant l'arrivée massive des morisques et des marranes qu'on situe surtout vers 1610.

Les origines européennes de nos Besner (sources comparées)

Les documents conservés au Québec relatifs à l'ancêtre des Besner canadiens d'origine française comparés à ceux retracés en France nous révèlent des différences notoires. Sans hésitation, nous croyons que ceux de France sont davantage fiables, parce que vérifiables sur une longue période antérieure à 1760. Ils nous permettent de corriger ceux que nous avions jusqu'à maintenant l'habitude de considérer comme infaillibles mais malheureusement écrits simplement « au son ».

D'après l'acte religieux inscrit aux registres de la paroisse Sainte-Anne-du-Bout-de-l'île (de Montréal, Québec) le 18 février 1760 et le contrat de mariage enregistré à l'étude du notaire Danré de Blanzy à Montréal le 21 avril 1760, l'ancêtre Besner canadien était le « fils aîné de Jean Bézanaire (et Bazanaire) et de Marie Anne Nogarole ses père et mère de la paroisse de Riomoux diocèse de Lombez ».

Or, nous avons retrouvé le contrat de mariage des parents de l'ancêtre des Besner canadiens, c'est à dire de « Jean Bézanère, laboureur, de Savères, et de Jeannette Nougaro », passé à l'étude de Maître Villars à Lautignac le 10 septembre 1730.

La mère se prénommait donc Jeannette plutôt que Marie-Anne. Nogarole était prononcé en patois local et devrait se lire plutôt Nougaro. Riomoux était aussi du patois et il faudrait lire Rieumes, une commune encore existante. Le patronyme s'écrivait et s'écrit encore en France « Bézanère ». Le diocèse de Lombez a été dissous mais la ville de ce nom existe encore. Les noms de ces lieux et leurs délimitations ont évolué et nous dirions aujourd'hui « commune de Rieumes, diocèse de Toulouse, département de la Haute-Garonne, région du Midi-Pyrénées, France ».

Le lieu de naissance de l'ancêtre des Besner serait plutôt Savères, modeste mais très ancienne commune située non loin de Rieumes, à 6 km un peu au sud ouest. Tous ces lieux se trouvaient alors faire partie de l'ancienne province de Gascogne.

L'acte de sépulture de l'ancêtre inscrit aux registres de la paroisse Saint Michel à Vaudreuil, Québec, le 3 octobre 1796 mentionne qu'il avait soixante-huit ans à son décès; il serait donc né en 1728. Par ailleurs, le contrat de mariage de ses parents qui est

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conservé en France (1730) nous indique qu'il serait plus vraisemblable de fixer la naissance de l'ancêtre en 1731. Nous n'avons malheureusement pas cet acte de naissance parce que le registre de l'état-civil de Savères, tenu par la paroisse Saint Bathélémy jusqu'à la Révolution française (1789), n'est actuellement disponible qu'à partir de 1740.

La France dans l'Europe

Les régions de la France Le Midi-Pyrénées dans la France

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Les départements du Midi-Pyrénées Le canton de Rieumes dans la Haute-

Garonne dans la Région du Midi-Pyrénées

La Haute-Garonne et ses Cantons

Paysage rural du pays de Savès

Les conditions d'origine de l'ancêtre des Besner sont rurales et très humbles. Sa famille ne semble pas avoir possédé de terre avant le XIXe siècle. De père en fils on était "brassier", c'est-à-dire qu'on louait ses bras; puis, on vivait pauvrement.

Cette habitation ressemble à celle que l'ancêtre des Besner dut habiter

L'âtre était vraiment le centre de la maison

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LE CONTEXTE D'UNE ÉMIGRATION VERS LA NOUVELLE-FRANCE

1752. Voilà l'année où l'ancêtre de nos Besner d'origine française, Jean Bézanaire, de Savères, Haute-Garonne, France, est arrivé en Nouvelle-France, à Québec, centre administratif de la colonie, à titre de soldat de Sa Majesté Louis XV, Roi de France.

Selon une liste d'embarquement relevée aux Archives Nationales de France à Paris, Jean Bezanere, recrue de Montauban, où il exerçait le métier de peigneur de laine. selon le même document, il s'embarqua pour Québec sur le navire La Seine le 17 mai 1752.

Montauban est une localité située à 80 km de Savères, dans l'actuel département deTarn-et-Garonne. Au 18e siècle, c'était un centre lainier qui embauchait jusqu'à 10 000 employés. Les paysans y apportaient la laine de leurs moutons et y travaillaient durant l'hiver comme ouvriers. On y effectuait toutes les étapes de la transformation de cette matière première en tissus de tout genre. Il y avait par conséquent dans cette ville une forte concentration de négociants dont quelques uns qu'on retrouve au Canada au temps de l'Intendant Bigot. Jusqu'en 1760, les entreprises de Montauban ont fourni un tissu de laine spécial et très chaud, sûrement fort apprécié des habitants du Canada pour confectionner leurs vêtements.

Montauban fut fondée en 1144; les

monuments ici présentés remontent au

Moyen-Âge.

Le Pont Vieux à Montauban, ci-haut, et la

salle du Prince Noir de l'actuel Musée

Ingres, à gauche, datent du 14e siècle.

L'église St-Jacques, quant à elle, fut achevée

au 13e siècle.

http://www.montauban.com/

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Les renseignements fournis par le document précité ne correspondent cependant pas, en certains points, entre autres qu'il fût de Montauban et qu'il y exerçât le métier de peigneur de laine, à ce que nous avons jusqu'à maintenant sur la famille de l'ancêtre des Besner d'Amérique qui sont d'origine française grâce aux documents que nous avons cités dans les pages précédentes.

On peut résoudre ces contradictions de trois façons.

a) Il s'agirait, sur cette liste d'embarquement, d'un individu autre que notre ancêtre mais portant le même nom. Cette solution est cependant peu fondée, parce que ce nom de famille ne se retrouve jamais ailleurs dans les archives de Montauban à l'époque qui nous regarde.

b) Le rédacteur de la liste aurait pu compléter les renseignements qui lui manquaient en les inventant. C'est là un phénomène qui a été constaté dans le cas d'autres recrues.

c) Il s'agirait bien de l'ancêtre des Besner, mais il aurait fourni de faux renseignements pour partir à l'insu de sa famille.

C'est cette troisième explication qui est la plus plausible. Un indice qui la favorise est le fait suivant: toute nouvelle recrue devait faire son testament auprès d'un notaire ou d'un prêtre. Mais voilà que, contrairement à la plupart de ses confrères, nous ne trouvons aucune trace de testament à son nom chez les notaires des régions qu'il a parcourues : Rieumes, Toulouse, Montauban, Auch et La Rochelle. Étant donné l'absence de routes et de moyens de transport autres que pédestres, rien ne sert de fouiller plus loin.

Sans posséder l'acte de naissance de Jean Bézanère, nous avons, outre le texte du contrat de mariage de ses parents, deux autres traces officielles de son existence en France.

1o le contrat de mariage de son frère Jean Bézanère, "second de nom", en 1767 (devant le notaire Bouzin)

2o celui du deuxième mariage de sa sÏur Bertrande Bézanère en 1769 (devant le notaire Campardon)

Le 15 décembre 1767 avant midi, lors du contrat de mariage de « Jean Bézanère, fils second de nom », en la juridiction de Goux, métairie du Vergé en Comminges, diocèse de Lombez, sénéchaussée de Toulouse" devant le notaire royal Bouzin, de Montpezat, on note que le marié est "brassier" (qui gagne sa vie avec ses bras, autrement dit journalier), tout comme son père. Ce dernier, sans doute déjà malade, profite du contrat de mariage pour disposer de ses biens et régler sa succession. Ainsi il institue comme « héritier universel et général » ce fils qui se marie et il déclare « lui donner la moitié de tous et chacun des biens meubles et immeubles Éprésents et à venir et sous la réserve de la jouissance pendant sa vie ». C'était le seul fils qui demeurait avec lui à Savères,

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puisqu'il est écrit dans le contrat (dont le déchiffrage est ardu et certains mots franchement illisibles) que ses deux autres garçons Jean et Maurin (du nom d'un saint vénéré en Gascogne ) « sont absents depuis longues années ». Il prévoit cependant leur réserver « la légitime telle que de droit » et « au cas qu'ils sont vivants et qu'ils reviennent », ils demeurent « ses héritiers particuliers » au même titre que leur sÏur Bertrande. Il convient de préciser qu'il appartenait à l'héritier désigné d'attribuer leur part aux héritiers particuliers.

Bertrande Bézanère, veuve de Michel Bérilin, se remarie, elle, en janvier 1769 avec Pierre Trilhe. Dans cet acte passé devant le notaire Campardon, il est écrit: « la dite Bézanère a constitué et constitue sa dot et par conséquent promet au dit Trilhe son fiancé la somme de 300 livres, laquelle somme sera payée à Trilhe, savoir celle de 250 livres par Maurin Bézanère, son frère... et elle donne plein pouvoir à son fiancé de s'en faire payer la somme de 50 livres restantes pour parfaire la dot de 300 livres par Jean Bézanère, son frère aîné, provenant de ses droits légitimaires... ».

Notons d'abord qu'on ne signale plus l'absence de Maurin. Il est indiqué dans son propre contrat de mariage, survenu également en janvier 1769, qu'il habite à Rieumes depuis huit mois. Il est donc réapparu peu après le décès de son père survenu à Savères le 17 février 1768. Maurin, lui, n'était donc pas parti très loin. S'il est fait référence aux « droits légitimaires » non encaissés de Jean, le frère aîné c'est à dire le droit à sa part d'héritage comme le devoir d'honorer les engagements ou les dettes de son père décédé, c'est sans doute parce qu'il était absent, mais aussi parce qu'il pouvait, probablement, toujours prétendre à la succession du père, à condition de se rendre la réclamer.

À partir de ces références, on peut donc conclure que le « Jean Bézanère, peigneur de laine, recrue de Montauban » dont il est question dans la liste d'embarquement du 17 mai 1752 est bien l'ancêtre des Besner d'Amérique d'origine française.

Il est cependant plus difficile de trouver une explication au départ définitif de l'ancêtre des Besner du foyer familial vers l'Amérique en 1752. Qu'est ce qui pouvait bien l'inciter à aller s'installer ailleurs que chez-lui? Pourquoi s'est-il engagé dans une telle aventure à l'âge de 21 ans ?

On peut supposer quelques motifs plausibles :

1o une pauvreté certaine.

Les études référant au contexte socio-économique du monde rural du sud de la France à la fin du 18e siècle confirment cette hypothèse. En s'engageant dans les forces militaires coloniales, le jeune homme pensait probablement se constituer un petit magot avant de revenir dans son village. Il estimait la vie de soldat plus agréable sinon rentable que celle de peigneur de laine à Montauban...

2o un certain goût pour la découverte et l'aventure.

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Il se trouvait dans la fleur de l'âge et jouissait sans doute d'une excellente santé : deux atouts gagnants pour tenter la destinée...

3o un contexte de relations familiales difficiles

La famille immédiate de l'ancêtre des Besner d'Amérique qui sont d'origine française était probablement dominée par un père dur et autoritaire.

Des indices corroborent ce dernier motif. Il y a le fait que son frère Maurin était comme lui absent en 1767, et qu'il est néanmoins de retour à Savères après le décès du père. La main mise paternelle sur les siens transpire aussi dans le texte du contrat de mariage précité de « Jean, fils second de nom », où il est écrit « le dit Bézanère père recevra les époux dans sa maison ... et ils seront tenus de travailler sous l'ordre et (mot illisible ) dudit Bézanère père ».

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L'ANCÊTRE NOTRE FAMILLE FUT D'ABORD UN SOLDAT

LES COMPAGNIES FRANCHES DE LA MARINE

Dans le contexte de ces années de fin de régime français (1750-1760), la vie militaire ne ressemblait en rien à ce qu'elle est devenue sous le régime anglais. La France avait besoin d'hommes pour défendre sa colonie et assurer la sécurité de ses gouvernants. Ceux qui assurèrent ces fonctions, assez tôt dans l'histoire de la Nouvelle-France, étaient les soldats des Compagnies Franches de la Marine.

Les Compagnies Franches de la Marine existaient déjà entre 1670 et 1680. Elles étaient composées de soldats-gardiens, levés et licenciés au gré des besoins. Mais, le 16 décembre 1690, elles furent officiellement créées pour assurer en permanence un service dans les colonies. Elles furent assignées à chacun des ports militaires, en France, d'où chaque compagnie détachait des soldats pour servir sur les navires de guerre. Ces hommes prenaient part à toutes les batailles navales et à de nombreux débarquements. Ce sont ces soldats qui servirent sous d'Iberville, au cours de ses expéditions maritimes. Leurs effectifs furent réduits à aussi peu que 3 000 hommes durant les périodes de paix et augmentèrent à 10 000 durant les guerres.

Le drapeau des Compagnies Franches de la Marine

Une compagnie, cela aurait dû faire autour de cinquante soldats, mais ces compagnies ne dépassaient que rarement le nombre de quarante hommes.

On les désignait du nom de Compagnies de la Marine. La même appellation désignait tant les troupes qui servaient sur les navires que celles qui étaient envoyées aux colonies. Or les affaires des colonies relevaient du ministre de la Marine: d'où le nom attribué aux troupes que ce ministère levait pour ses besoins d'outre-mer autant sur les vaisseaux que sur terre.

Le qualificatif de «Franche» ajouté à ces compagnies signifiait qu'elles étaient indépendantes et non enrégimentées, c'est-à-dire ne dépendant pas des autorités des troupes régulières de la Métropole, comme ce fut le cas pour les soldats du Régiment de Carignan, venus au Canada en 1665, et pour ceux des armées de Montcalm en 1755-1760.

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Soldat des Compagnies Franches de la Marine vers 1740

Soldat des Compagnies Franches de la Marine vers 1750

Les deux images précédentes sont tirées de l'Album no 1 «Le patrimoine militaire canadien» paru chez Art Global, à Montréal

Si la majorité des jeunes gens recrutés étaient originaires du voisinage des grandes villes et des ports de mer donnant sur l'Atlantique, les recruteurs se rendaient aussi dans des coins plus reculés comme la Gascogne, où peu de généalogies canadiennes-françaises ont leur source. À l'époque de l'émigration de notre ancêtre, cette région était en crise économique; l'histoire de la France a retenu qu'il y eut une grande disette en 1752. C'est fort probable que cette circonstance, ajoutée aux autres invoquées ci-devant, l'encouragea à s'enrôler.

Les recruteurs étaient des intermédiaires, soit militaires eux-mêmes, soit simplement civils, qui, moyennant commission, parcouraient la France surtout dans ses régions les plus défavorisées. Ils pouvaient plus facilement rencontrer là des jeunes à l'avenir bloqué qui acceptaient comme une bouée de sauvetage la proposition d'aller vivre au loin une aventure intéressante et payante. Si le recruteur était militaire, il ne manquait pas de tirer avantage du prestige que lui conférait son costume.

On décrivait aux candidats éventuels leur future tâche militaire un peu comme celle que remplissent, en nos temps modernes, les forces de maintien de la paix de l'O.N.U. On garantissait aux recrues qu'elles toucheraient une solde, sans doute modeste, mais accompagnée d'une possibilité de bénéfices marginaux. Si elles en acceptaient la peine, on leur garantissait de voyager comme elles n'en auraient jamais la chance du reste de leur vie si elles restaient en Europe. On leur faisait miroiter les agréments de la vie partagée avec les habitants, partout où elles iraient, et aussi la belle liberté de moeurs des amérindiennes. On leur assurait la possibilité de recevoir gratuitement, à la fin de leur engagement, une terre pour s'établir dans la colonie, s'ils en manifestaient l'intérêt.

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Les volontaires signaient alors un contrat d'une durée de six ans et touchaient immédiatement une prime de départ que la plupart gaspillaient allègrement avant de s'embarquer sur les bateaux.

Selon les archives militaires, l'âge moyen des recrues, à leur départ , se situait dans leur jeune vingtaine. Elles mesuraient en moyenne, en valeurs de nos jours, cinq pieds et quatre pouces, (1 m 62.5), les extrêmes se situant entre cinq pieds et deux pouces (1 m 57.5) et six pieds et deux pouces (1 m 88).

Si les officiers de ces Compagnies occupaient des fonctions importantes dans la colonie, par exemple diriger les garnisons des avant-postes, se charger des relations diplomatiques et de la guerre avec les indigènes, faire de nouvelles explorations dans l'arrière-pays, les simples soldats constituaient en fait une basse classe urbaine. Ils logeaient chez les gens de la ville ou dans les fermes des environs où ils étaient appelés à servir.

Ces soldats étaient armés de fusils. À partir de 1680, l'uniforme fut gris-blanc; doublures, parements, veste, culottes et bas étaient bleus, et les boutons étaient en laiton.

La présence dans les localités de plusieurs centaines de ces jeunes gens soumis à une discipline militaire plutôt lâche devenait facilement cause de troubles: on tient les soldats responsables d'une grande part des larcins et de l'ivrognerie qui se manisfestaient de temps à autre dans les villes; et, à mesure que grossit la population militaire, le nombre des naissances illégitimes monte en flèche dans les endroits où les troupes sont cantonnées.

En temps de paix on pouvait les engager comme journaliers, et ceux qui s'adaptaient au pays pouvaient tenter d'obtenir leur licenciement pour se marier et s'établir, ce qui fut le cas pour Jean Bézanaire. De toutes façons, ces unités militaires furent dissoutes en 1761 par les nouveaux maîtres du pays.

Les données techniques et historiques ci-devant énoncées, sont tirées de deux ouvrages pertinents: - «Le patrimoine militaire canadien» paru chez Art Global, à Montréal en 1993 et 1995; et - ¨Histoire générale du Canada¨ édité sous la direction de Craig Brown de Toronto, en traduction française chez Boréal Compact de Montréal en 1990.

Pour ceux que cela intéresse, voici un lien qui mène à un site Internet traitant des Compagnies Franches de la Marine.

http://www.compagniedelacorne.org/

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À L'ÎLE DE RÉ COMMENCE L'AVENTURE DE NOTRE ANCÊTRE CANADIEN

Madame Marie-Renée Colin, née Bézanère, nous a partagé les trouvailles qu'elle a faites aux Archives nationales de France, section des Archives de la Marine à Rochefort, référence 1 E 149 et 150.

La liste d'embarquement des recrues dont faisait partie l'ancêtre des Besner canadiens a été signée par un Monsieur Gignoux . Il était lieutenant-colonel d'infanterie, spécialement chargé d'organiser le recrutement de troupes pour les colonies. Une lettre qui lui était adressée en date du 17 juin 1751 nous apprend des détails sur les circonstances et conditionnements de sa tâche. Cette lettre le désigne, en effet, pour des «opérations dont vous êtes chargé pour les recrues des colonies... ordre du roi qui vous commet pour en faire la levée et pour en avoir le commandement avec une instruction que je vous ai aussi expédiée sur la conduite que vous aurez à tenir sur ces deux objets. Il me reste à vous expliquer ce que vous avez à faire pour vous mettre en état de travailler aux levées... assemblées à l'île de Ré... rapporté à vous pour le choix tant des sujets que des deux officiers qui pourront vous être nécessaires à l'île de Ré pour la discipline et l'exercice des recrues, persuadé que je suis que vous n'en prendrez qu'autant que vous serez assuré de leur intelligence et de leur exactitude à tous égards.»

La même lettre dit aussi : «un traitement sera versé aux soldats durant le séjour qu'ils feront à l'île de Ré... Quant au nombre des recrues il est à propos que vous les portiez à trois cent ou quatre cents et comme il est important que vous ayez d'abord une vingtaine de soldats au dessous de la taille de cinq pieds deux pouces (il s'agit de valeurs françaises d'alors, un peu inférieures aux valeurs anglaises) et ceci pour une durée de six ans... les recrues seront amenées à l'île de Ré... vous ne négligerez rien pour les former à la discipline et à tous les exercices militaires.»

Jusqu'à 1760, la formation des recrues pour les colonies, dont le Canada, se déroula à l'Île de Ré. Il se poursuivit pour la Martinique, Saint-Domingue, la Louisiane et le Sénégal jusqu'en 1781. À cette date, les compagnies de dépôt de l'Île de Ré ont été transférées à L'Orient (aujourd'hui Lorient). L'état sanitaire des recrues y arrivant était déplorable : poitrinaires, scorbutiques, ulcéreux, beaucoup sont morts pendant leur formation.

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St-Martin de Ré et sa citadelle aujourd'hui. L'ancêtre des Besner canadiens dut franchir cette porte de l'entrée de cette Forteresse qui exitait cent ans avant lui

On trouve ensuite un document faisant état de l'opération à la date du 6 novembre 1751. Monsieur de Gignoux est aidé par six officiers, qui ont les titres suivant: un aide-major- capitaine, trois lieutenants et deux enseignes en pied. Chaque soldat arrivant à l'île de Ré se voit attribuer six sols par jour jusqu'à l'embarquement; ils partent avec leur uniforme et leur armement, à l'exception des épées laissées à l'île de Ré pour d'autres nouvelles recrues. "Il est indispensable de donner dans l'hiver le chauffage aux recrues ainsi que la fourniture de souliers avant l'embarquement". Arrivant à Rochefort, les recrues seront "présentées par les officiers qui les conduisent, soit au bureau des troupes à Rochefort, soit aux...de la Marine à La Rochelle, pour y être passées en revue, leur signalement pris, leurs engagements vérifiés et pour en tenir registre au bureau des troupes à Rochefort" . Madame Colin n'a pu, hélas! mettre la main sur ce registre des troupes.

Une autre note interne du 21 janvier 1752 mentionne que "les nouvelles recrues sont mises en dépôt à la tour de la Lanterne, à La Rochelle, en attendant leur passage à l'île de Ré".

Site internet de l'Île de Ré

http://www.charente-maritime.org/ile-de-re/accueil/re.php

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LA LISTE D'EMBARQUEMENT

Des cent hommes recrutés par Monsieur de Gignoux et qui apparaissent sur la même liste que Jean Bezenere (c'est la façon qu'il est alors écrit), neuf sont portés comme étant nés à Montauban, et huit d'entre eux travaillaient la laine. Cette liste concerne le deuxième convoi des recrues acheminées au Canada à partir de l'Île de Ré. Le premier convoi était parti en mars 1752. Pendant l'année 1752, sur quatre cent cinquante recrues envoyées au Canada, quatre-vingt-six d'entre elles étaient dites originaires de Montauban, et neuf sur dix environ travaillaient la laine à titre de peigneurs ou tondeurs. On peut déduire que les recruteurs savaient que de nombreux paysans venaient travailler l'hiver dans cette ville, et que le travail des recruteurs en était facilité. C'est là que Jean Bezanaire a été recruté, et il n'a sans doute plus donné signe de vie à sa famille. Des 97 recrues embarquées, au moins six se seraient mariées au Canada selon le Dictionnaire Généalogique des Familles Canadiennes de Mgr Cyprien Tanguay.

La Charente-Maritime abritait plusieurs ports ouvrant sur l'Atlantique: La Rochelle, Rochefort, l'Île de Ré

Un transatlantique dans le style de ceux des années 1750

La traversée vers le nouveau monde

L'ancêtre des Besner canadiens s'embarqua donc pour Québec le 17 mai 1752 sur le navire La Seine. Incroyable mais vrai, nous possédons même la description et l'histoire de ce navire.

C'était une «flûte», construite en 1719 à Toulon par Le Vasseur, charpentier, suite à un ordre du Roy du 6 septembre 1718 à l'effet de construire deux flûtes, La Seine et La Loire. Une flûte, c'était un navire de charge, à fond plat, large, gros et lourd. Ses dimensions étaient les suivantes (en mesures françaises du temps, bien sûr) : «125 pieds de l'étrave à l'étambot; 32,6 pieds de large, 12,3 pieds de profondeur, 16 pieds de tirant d'eau, jaugeant 650 tonneaux, armé de 50 canons, soit une batterie de 22 canons de calibre 12, une batterie de 24 canons de calibre 8, une batterie de 4 canons de calibre 4». Ses qualités? «marche assez bien pour une flûte».

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Ce bateau anglais construit en 1774 est du même type que la flûte La Seine sur laquelle s'est embarqué l'ancêtre des Besner canadiens.

Dessin montrant l'ossature d'un navire du XVIIIe siècle

Une lettre du 11 mai 1752, venant de Marly, siège du ministère de la Marine, donne des instructions au Sieur de Vautron, qui succède à Mr Garnier, lieutenant de vaisseau, commandant la flûte du Roy, La Seine, destinée au Canada. Elle lui fait savoir que Mr de la Jonquière, commandant en chef au Canada, reviendra en France sur La Seine... Hélas! il sera mort avant.

Une autre lettre du 6 octobre 1752, à l'occasion du retour de La Seine en France dit que le Ministère se réjouit que le voyage à l'aller, comme au retour, se soit parfaitement bien déroulé.

La traversée n'avait alors rien de commun avec les croisières d'agrément de notre vingtième siècle. De vieux documents relatifs aux immigrants irlandais au Canada à peine soixante ans plus tard, et donc opérée dans des conditions semblables, peuvent nous donner une idée de l'épreuve. «Le voyage vers Québec dure de quarante à cinquante jours, un mois et demi dans des conditions de vie inconfortables et parfois funestes. À bord, l'espace est fort restreint. Pour dormir, on dispose de deux, parfois de trois rangées de couchettes mesurant chacune six pieds sur six. On y loge jusqu'à six personnes. Le plafond est haut de slx pieds au maximum. La ventilation n'est possible que par trois écoutilles. Durant les tempêtes, elles sont toujours fermées. La réserve alimentaire est constituée de porc, de pain ou de gruau. La ration est d'une livre par adulte, un tiers de livre par enfant. Et il y a les pommes de terre, qui sont le bien propre du passager. On n'oublie pas son vinaigre pour améliorer l'eau potable. La promiscuité engendre des tensions. L'ennui s'en mêle...» dans «La grande mouvance» pp 115-143, livre publié sous la direction de Marcel Bellavance, aux Éditions du Septentrion, Sillery (Québec), 1990.

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Coupe d'un navire du XVIIIe siècle

Emplacement des canons sous le pont principal d'un navire armé du XVIIIe siècle

Malheureusement, pour toute la durée du régime français en Amérique du nord, nous ne possédons aucune liste des simples soldats oeuvrant dans les troupes. Il n'est question que des officiers et sous-officiers. Le soldat était considéré comme une pièce amovible sur un jeu d'échecs. Il est alors bien difficile de retracer l'itinéraire militaire de l'ancêtre des Besner canadiens. Si, cependant, nous pouvions savoir avec exactitude sous quel ou quels officiers il a servi, nous y arriverions. Ce qui suit nous en livre des bribes.

L'ancêtre des Besner canadiens en arrivant à Québec en 1752 a dû contempler le même panorama du haut du Cap Diamant

Le Vieux Québec a conservé ou restauré le charmede son passé français du XVIIe et XVIIIe siècles. Ici, c'est "Le petit Champlain", un quartier vieillot non loin de la place Royale.

À Rochefort, Charente Maritime, France, depuis 1993, on procède à la reconstruction d'un vaisseau de 1780. http://www.hermione.com/francais/visite/default.htm

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CURRICULUM MILITAIRE

1- de la Compagnie de Pierre Boucher de Boucherville 1752-1758

Depuis son arrivée en Nouvelle-France en 1752 jusqu'à 1757, nous ne savons rien des engagements militaires de Jean Bézanaire. Il était sûrement sous les ordres d'un Capitaine. Dans le contexte du fonctionnement interne des Compagnies Franches de la Marine en Nouvelle-France, il changea probablement plusieurs fois de supérieur.

Nous le trouvons aux archives pour la première fois à Montréal le 18 juillet 1757 pour passer l'acte notarié de la vente d'une terre située dans l'actuelle région de Terrebonne. Il est alors désigné comme suit: «Jean Bazanet dit prêt à boire soldat de la Compagnie de Boucherville en garnison en cette ville...».

Il s'agit de Pierre Boucher de Boucherville (juin 1689-septembre 1767, (cf DBC vol III pages 85-86). En fin de carrière militaire, en 1748, il était en garnison à Montréal où il fut nommé capitaine en 1749, poste qu'il conserva jusqu'au 1 janvier 1758; après 56 ans de service dans les Compagnies franches de la Marine, il reçut à cette occasion la croix de Saint-Louis.

Il n'est pas invraisemblable que l'ancêtre des Besner canadiens d'origine française ait alors été sous ses ordres depuis 1752 ... Lorsqu'il y avait un danger ou une urgence quelque part dans la vaste colonie, les Capitaines «prêtaient» leurs hommes, au moins temporairemet, à d'autres officiers. S'il est vrai que l'ancêtre des Besner canadiens a réellement gagné sa solde sous les ordres d'hommes du type de ceux que nous énumérons ici, il y a de grandes chances qu'il ait parcouru les mêmes interminables voyages à travers « l'Empire français d'Amérique », et connu les mêmes dangers. Ces troupes dites canadiennes avaient appris beaucoup des amérindiens parmi lesquels elles vivaient et combattaient. En toute saison, même l'hiver, ses soldats se déplaçaient rapidement, souvent sur de grandes distances, la plupart du temps en canot sur les lacs et rivières avant qu'ils ne glacent, et à pied autrement ; ils savaient aussi survivre dans la nature quand ils étaient livrées à eux-mêmes.

2- de la Compagnie de Pierre Daneau De Muy de janvier à mai 1758

Puis, il fit partie de la Companie de Monsieur Daneau de Muy. Ce qui nous permet d'affirmer cela, c'est le fait que Monsieur Le Borgne succède à ce dernier lorsqu'il meurt à Détroit le 18 mai 1758, moins de deux ans avant le mariage de l'ancêtre des Besner canadiens.

Il est intéressant de suivre la carrière de cet officier, puisque l'ancêtre des Besner canadiens, de 1752 à 1758, marcha probablement sous ses ordres ou sous ceux d'un officier ayant le même profil.

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Jacques-Pierre Daneau de Muy, est né à Boucherville en octobre 1695, fils de Nicolas Daneau de Muy et de Marguerite Boucher. Il épousa Louise-Geneviève Ruette d'Auteuil à Montréal en janvier 1725. Il se consacra à la vie militaire, mais la longue période de paix que connut l'Amérique du Nord de 1713 à 1744 signifia pour lui et ses confrères professionnels une montée désespérément lente dans les rangs des officiers. Il n'est promu capitaine qu'en 1748. Il est appointé commandant du Fort Chambly de 1752 à 1754. Au cours de cette dernière année, on lui concède une seigneurie sur la rive est du lac Champlain, ce qui n'en faisait pas le seul seigneur en même temps officier militaire.

Il était tout de même impatient de retourner dans «l'ouest», comme on appelait alors tous les territoires français situés autour des Grands Lacs, la vallée de l'Ohio et le pays des Illinois. Il ne fut exaucé qu'en mai 1754 ,alors qu'il fut promu au commandement de Fort Pontchartrain à Détroit en remplacement de Céloron de Blainville. Pour ses grandes qualités et sa loyauté, il avait été décoré de la croix de Saint-Louis le 1er avril de la même année.

Un ordre de bataille, établi au Fort St-Frédéric (Crown Point, N.Y.) en 1755, nous apprend que la compagnie de Monsieur de Muy appartenait alors à la deuxième brigade de Monsieur Louis Liénard Villemonde de Beaujeu, le père du héros de la Monongaëla.

Daneau de Muy exerca son métier de militaire à la façon canadienne, façon que Montcalm réprouva tellement; une «petite guerre» estimaient les officiers qui arrivaient d'Europe. Une guerre de frontières, faite de nombreux coups de main qui n'avaient rien à voir avec la théorie traditionnelle de l'art militaire. Une guerre menée de concert avec des alliés amérindiens de qui on empruntait les méthodes parfois cruelles et qu'on encourageait presque à les commettre: le scalp, par exemple. Une guerre où les uniformes étaient mis de côté. Une guerre, enfin, que les historiens américains désignent comme «the French-Indian War», alors que les européens la nomment «la Guerre de Sept-Ans».

Les miliciens étaient des habitants qu'on obligeait à défendre le pays

Tout au long de frontières à défendre, des "fortifications" étaient construites

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Le Fort Chambly est un endroit que l'ancêtre des Besner canadiens a probablement fréquenté; il y a peut-être séjourné quelque temps

3- de la Compagnie de Paul Le Borgne 1758-1760

L'acte de mariage de l'ancêtre des Besner canadiens nous informe que le soldat Jean Bézanaire faisait partie, à ce moment-là, de la Compagnie de Monsieur Le Borgne. Il y eut deux militaires de ce nom sous le régime français.

Il y eut le Chevalier Le Borgne, arrivé au Canada avec les armées de Montcalm et décédé en France en 1767. Né en France en 1717, arrivé au Canada en 1744 et mort en France en 1789. Tout indique que l'ancêtre Besner ne servit pas sous celui-là.

Puis, il y eut Paul Le Borgne, un militaire de carrière, promu enseigne en second en 1753, puis enseigne en titre en 1757. Il devint lieutenant en 1758 et capitaine en 1760 dans les Compagnies Franches de la Marine au Canada.

On l'a décrit comme homme de beaucoup de mérite, intelligent et capable de tout ce qu'on voulait bien lui confier, exact et d'une probité remarquable. Le 8 juillet 1755, il eut un bras cassé lors de l'engagement qui se solda par la défaite des armées anglaises du général Edward Braddock au Fort Duquesne (Pittsburgh, Pennsylvanie., où il était lieutenant de la compagnie du capitaine Daniel-Hyacinthe Liénard de Beaujeu qui y perdit la vie. Cette célèbre victoire canadienne, dite de «la Monongaëla», (« La Malengueulée » disaient les Français) fut gagnée par une centaine de soldats des Compagnies Franches de la Marine qui ont lutté aux côtés de 150 miliciens canadiens et de 600 amérindiens alliés et ils ont anéanti une armée d'environ 1,500 hommes.

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Le Nouveau Monde

La Nouvelle-France se trouvait sur des territoires aujourd'hui partagés entre le Canada et les États-Unis; au moment de la Guerre franco-indienne (1750-1760) les territoires ici en blanc se réclamaient de la France

On retrouve Paul Le Borgne parmi les officiers qui dirigent le "Régiment de La Marine", ce contingent de 500 soldats des Compagnies Franches de la Marine que le gouverneur général, le Marquis de Vaudreuil, décida d'adjoindre aux troupes régulières du Marquis de Montcalm, en juillet 1757, pour mieux faire face aux difficultés militaires grandissantes.

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Le Fort Duquesne, en haut à gauche, a précédé le Fort Pitt à Pittsburgh

En 1758, il remplace le capitaine Daneau De Muy, mort au combat à Détroit. Une dernière mention de monsieur Le Borgne au Canada le cite, en février 1760, au camp d'hiver de la Pointe-aux-Trembles (Neuville dans Portneuf) avec les armées du Maréchal de Lévis qui s'y étaient retranchées après la défaite des Plaines d'Abraham en septembre 1759.

Les places fortes sous le Régime français

- Fort Niagara

http://www.oldfortniagara.org/

- Carillon devenu Ticonderoga

http://www.fort-ticonderoga.org/

l'ancêtre des Besner canadiens a certainement dû affronter plusieurs fois les dangereux rapides du Coteau...

...tout comme il dut bivouaquer sur cette pointe de Coteau-du-Lac, lieu de séjour des amérindiens et portage obligé des voyageurs

Voir le site de la Société d'histoire de Coteau-du-Lac

http://www.societedhistoire-coteau-du-lac.com/

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LE SURNOM DE «PRÊT À BOIRE», UN SOUVENIR DE SA VIE MILITAIRE

Dans son acte de mariage, le 18 février 1760, il est déjà mentionné que l'ancêtre des Besner canadiens portait le surnom de ¨Prêt à boire¨. Certains historiens prétendent que dans les troupes on distribuait les surnoms un peu au hasard, simplement pour identifier plus rapidement les soldats, ceux-ci étant issus de différentes régions et parlant des patois différents. Au fil des listes de noms des soldats de l'armée de Montcalm, on retrace au moins vingt autres fois ce surnom de «Prêt à boire».

Une première interprétation relève du fait qu'on attribuât à l'individu un sobriquet ou taquinerie révélant un trait de son caractère ou une de ses manières d'agir ( décrivant soit une qualité, soit un défaut, soit une caractéristique physique ou morale. Certains surnoms sont devenus des noms propres canadiens: Vadeboncoeur, Ladouceur, Lavigueur, Lavertu, Vaillant, etc.). Si tel est le cas, l'ancêtre des Besner canadiens ne devait jamais se faire prier pour prendre un «petit coup». Cela confirme donc la réputation que les militaires en ces années-là avaient d'être portés sur la dive bouteille...

Une autre interprétation de ce surnom voudrait qu'on signifiait par là qu'il ne savait pas nager, et donc qu'il était prêt à boire... de l'eau s'il lui arrivait un accident en naviguant.

Une dernière interprétation est tirée d'un vieux dictionnaire français; on disait d'un vin parvenu à maturité, bien vieilli, qu'il était «prêt à boire». Or, notre ancêtre est devenu soldat à l'âge de 22 ans ... âge plus élevé que celui de la moyenne de ceux qui s'enrôlaient alors; peut-être avait-il aussi une maturité supérieure à celle de ses compagnons ? - Cette dernière interprétation est nettement plus positive que les deux autres et mériterait qu'on la retienne comme la plus probable.

Louis XV, roi de France en 1750; l'ancêtre des Besner d'origine française fut

militaire sous son drapeau.

La Tour de la Lanterne à La Rochelle, point de ralliement pour les troupes en partance

pour le Nouveau Monde

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Le blazon royal de Louis XVI, une sculpture de Pierre-Noël Levasseur datant de 1727 (Musée du Québec)

Un groupe d'amateurs fait revivre l'époque des Compagnies Franches de la Marine

Les deux photos précédentes "Parcs Canada/Jean Audet"

Après la cession du Canada à l'Angleterre, un protocole franco-anglais signé en novembre 1760, stipulait que les Français restant dans la colonie ne pourraient être forcés de porter les armes contre la France et qu'ils continueraient à être gouvernés suivant la coutume de Paris sans être assujettis à d'autres impôts. De nombreux soldats ont préféré rester dans la colonie plutôt que de rentrer en France. Jean Bezanaire était de ceux-là; et sonsurnom militaire lui resta.

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L'ANCÊTRE NOTRE FAMILLE FUT ENSUITE COLON-DÉFRICHEUR

L'ENRACINEMENT CANADIEN

C'est deux ans après son mariage qu'on découvre que Jean Bézanaire se fait concéder une terre dans la seigneurie de Vaudreuil, plus précisément en date du 5 novembre 1762. André Grasset de St-Sauveur agit comme procureur du gouverneur, le Marquis de Vaudreuil, alors que Louis Saint-Ange Charly agit comme procureur de Rigaud de Vaudreuil, frère du précédent. La Seigneurie de Vaudreuil, concédée en 1702, est située à l'ouest de l'île de Montréal au Québec. Cependant, comme l'acte passé devant le notaire Simonnet mentionne que le Marquis de Vaudreuil est «gouverneur», nous sommes probablement en présence d'une officialisation après le fait d'un acte passé déjà sous le Régime français; la conquête a sans doute bousculé les coutumes juridiques, et il fallut un certain temps pour rétablir un état de droit. Cette terre est située dans la seigneurie de Vaudreuil, dans l'Anse de Vaudreuil, et aurait été le no 11 selon les anciens papiers terriers de la seigneurie.

Le Canada est une confédération de 3 Territoires et de 10 Provinces dont le Québec

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Le Québec s'est développé surtout le long du Fleuve Saint-Laurent où ont

pris racine les Seigneuries

Dans la région de Montréal, dans un triangle aux frontières de l'Ontario et de l'État de New

York, on trouve la sous-région du Suroît

Les seigneuries du sud-ouest du Québec

Dans la Seigneurie de Vaudreuil, l'ancêtre des Besner canadiens a vécu sur les terres ici

soulignées en couleur

Lors d'un recensement ordonné par le nouveau gouvernement en 1765, on attribue à l'ancêtre des Besner canadiens le nom de «Jos.Bézener» et on décrit sa situation sociale. Il a une maison, une femme, deux filles en bas âge; sa terre couvre 60 arpents, comme toutes celles de ses voisins, mais il n'y a que 8 arpents d'ensemencés, le reste étant probablement non encore défriché; comme bestiaux, une seule vache, une tauraille, un mouton et trois cochons, pas de boeuf ni cheval comme ses voisins en ont. Voilà de bien modestes origines!

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On apprend pour la première fois officiellement, en 1765, lors du baptême d'un de ses enfants, consigné aux registres de Sainte-Anne, qu'il était cultivateur, de Quinchien. Par cette désignation de « Quinchien », nom d'un cours d'eau qui irrigue la région, on désignait alors tout le territoire occupé aujourd'hui par la municipalité de Vaudreuil-Dorion. Cette occupation de «cultivateur » est confirmée dans un acte de donation passé le 23 décembre 1791 et dans son acte d'inhumation. L'ancêtre des Besner canadiens fut donc cultivateur le reste de sa vie.

Les minutes du Notaire Gabrion de Soulanges révèlent que, le 27 novembre 1768, «Jean-Baptiste Bezenaire» achète la terre no 29 à la 3ième Concession (au nord du rang) , dans la «petite côte» de Vaudreuil. Il occupait probablement déjà la terre portant le même numéro 29, mais sise au sud du rang. Il enrichissait le patrimoine familial. Athanase, un de ses arrière-petits-fils, passa sa vie sur le lot 29 nord, et un autre, Félix, sur le lot 29 sud, sur une partie duquel est bâti, de nos jours un quartier de la ville de Dorion connu comme le «Dorion Gardens».

La tradition veut que cette terre soit située dans «la Petite-Côte», alors nommée «Côte des Français», parce que plusieurs des concessions qui y furent faites par le seigneur, le marquis de Vaudreuil, Pierre de Rigaud de Vaudreuil de Cavagnal, alors gouverneur général de la Nouvelle-France, le furent en faveur de soldats français démobilisés au cours des déboires accompagnant la perte de la colonie. Les premières concessions dans cette seigneurie se situaient perpendiculairement à la rivière des Outaouais et d'un chemin, encore nommé Quinchien puis rue St-Charles. Quand on ouvrit la «Petite Côte», c'était, dans les plans de l'arpenteur, un «rang double», c'est à dire comportant des concessions de terre de part et d'autre d'un chemin, la deuxième concession en étant située au sud de ce rang, la troisième au nord.

Ces terres ancestrales se trouvent sur l'actuelle route 342, nommée route Harwood dans l'actuelle ville de Vaudreuil-Dorion, non loin de l'autoroute 20. Mais celle dont nous avons le plus de détails est celle de la 3ème concession ou côté nord. À cet endroit, le motel Hill Top se trouve sur le sommet de la côte et voisine une maison ordinaire, entourée de gros arbres, qu'on rejoint par un chemin de pierraille qui grimpe la colline en diagonale. Depuis 1996, une halte routière est construite près de cette maison.

Au milieu des année 1960, l'auteur est entré en contact avec un descendant d'Athanase-IV Besner, fils de Michel-III, qui occupait une parcelle de la terre ancestrale. Il lui a confirmé que son voisin vivait sur le site d'une demeure ancestrale. C'était un belge qui occupait les lieux à ce moment-là, et il lui a confirmé, à son tour, que sa chaîne de titres de propriété remontait à Jean Bazanaire. C'est de lui que l'auteur a appris que la maison qu'il occupait, datant des années 1950, était édifiée sur des vieilles fondations de pierre de 5 pieds de large, probablement celles de l'antique maison bâtie par Jacques-II. De ce site, le coup d'oeil sur Dorion, Vaudreuil et la rivière Outaouais est exceptionnel. L'auteur y est retourné avec un cousin Dubeau en septembre 1994: ils n'ont pu aller bien loin, car il y avait là un comité d'accueil composé de gros méchants chiens et de gens venus au devant eux pour leur signifier qu'ils n'étaient pas les bienvenus. Ils y ont appris que le propriétaire était le même que celui du Motel adjacent. À leurs questions, les

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jeunes occupants ont confirmé qu'en effet le sous-sol de leur maison reposait sur un très large mur de pierres

Samedi le 24 janvier 1997, l'auteur a rencontré Richard Besner, un jeune « pot-à-boire » intéressé à ses origines; il a en sa possession un film de la maison d'origine dont il est ci-devant question avant qu'elle ne soit démolie. Il tient ce «super-8» de son grand'oncle Armand Besner, un pharmacien, et daterait de 1943. Ces images nous font voir une maison canadienne de pièces sur pièces, avec une cheminée décentrée à l'intérieur de la façade ouest. Convertir en images fixes quelques extraits de ce film en photographies-couleur a représenté un défi et n'a pas donné des résultats spectaculaires.

Ces photos remontent aux années 1940; à gauche, au premier plan, je crois que c'étaient les vestiges de la première maison de l'ancêtre; à droite, et ci-bas, il s'agit de la maison neuve qu'aurait construite Jacques sur le coteau.

Les deux sont disparues.

Il y a un Musée doublé d'un centre de recherche à Vaudreuil.

http://www.mrvs.qc.ca

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LES PREMIERS BESNER CANADIENS

Tous les enfants de Jean Bézanaire et de Marie-Anne Gruzelin sont nés à St-Michel de Vaudreuil, mais les premiers baptêmes sont consignés aux registres de Ste-Anne-de-Bellevue et quelques uns à St-Joseph de Soulanges (Les Cèdres). Ont atteint l'âge adulte, huit filles et un seul fils, prénommé Jacques, né et baptisé à Vaudreuil, le 9 juillet 1768. Étant le seul garçon de la famille, ce dernier hérita des terres paternelles et du surnom de «Prêt à boire». Son mariage eut également lieu à Vaudreuil, le 19 janvier 1792. Son épouse se nommait Angélique Poirier, fille de Michel Poirier et de Marie-Louise Génus. Jacques « Besenert » est décédé le 12 décembre 1827, âgé de 59 ans et fut inhumé sous l'église, du côté droit, ce qui dénote une certaine aisance, puisqu'on ne réservait cet honneur qu'aux nobles ou bourgeois, les gens du commun étant enterrés dans l'enclos du cimetière, les uns à la suite des autres.

Jacques Bezner réalisa une étonnante revanche des berceaux: il eut une seule fille mais neuf garçons ! L'un d'eux, Michel, hérita des terres ancestrales et fut le seul qui habita Vaudreuil dans ce qui est aujourd'hui Dorion. Sept de ses frères s'identifièrent à Coteau-du-Lac entre les années 1815 et 1850 et l'autre, Jacques, y mourut à 19 ans d'une maladie contractée aux Fortifications où il travaillait. Six des Besner de cette troisième génération y développèrent des terres, et cinq y ont laissé des descendants. A la génération suivante, deux fils de celui de Vaudreuil vinrent y rejoindre leurs oncles et cousins. Cette famille est du nombre des pionniers de Coteau-du-Lac.

La région de Vaudreuil-Soulanges au Québec est réputée pour sa terre lourde

et fertile

C'est dans la seigneurie de Soulanges, spécialement à Coteau-du-Lac et à Saint-Clet

que les Besner furent les plus prolifiques

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Le coeur du "vieux" Vaudreuil

Les débuts institutionnels de Saint-Ignace de Coteau-du-Lac

Le surnom « prêt à boire » a évolué en «Pot-à-boire», et seuls les descendants de Benjamin-III , de la troisième génération, dont je suis moi-même issu, le portent comme distinctif de ceux de ses frères, ceux de Paul-III étant surnommés les «Paulais», ceux de Pascal-III, étant surnommés du prénom de leur père, tout comme les «Michel», les «Antoine»; puis il y a les «Benjamin», qui sont en fait les descendants de Jean-Baptiste et doivent leur surnom au prénom de l'un de ses fils.

FIN DE L'HISTOIRE DES BESNER CANADIENS D'ORIGINE FRANÇAISE

Un répertoire des Besner canadiens d'origine française