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11 RUE BERANGER 75154 PARIS - 01 42 76 17 89 09/10 AVRIL 11 Parution irrégulière Surface approx. (cm²) : 2740 N° de page : 4-7 Page 1/8 HOUARD 9716387200506/GHC/OTO/1 Eléments de recherche : - GALERIE CATHERINE HOUARD : à Paris 6ème, toutes citations - CATHERINE HOUARD : galeriste, toutes citations LE MAG RENCONTRE uean ïavoiûam L'Wiisiowdste

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LE MAG RENCONTRE

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Page de gauche,dessins derecherche d'AlexTavoularïs, quia travailléen tandem avecson frère Dean.En haut,le capitaineBenjamin L.Willard,interprété parMartin Sheendans ApocalypseNow,(l979);voiture pourTuc/cer (1988)-deux films deFrancis FordCoppola.

Ci-conlre: extraitdu story-boardoriginal de Coupde cœur (1982),de Francis FordCoppola, conçupar DeanTavoularis.DESSINS TAVOULARÏS

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Par BRUNO ICHER

e que je voudrais faire sij'avais 20 ans aujour-d'hui ?» Dean Tavoula-ris, l'un des directeursartistiques les plus ta-lentueux et les plusprolifiques du cinéma,prend tout son temps

pour répondre. D'abord parce qu'il préfèreraconter les innombrables histoires qui ontjalonné sa carrière plutôt que de parler de lui.Il est assis dans la galerie parisienne (I) oùsont exposés les tableaux qu'il peint depuisque le cinéma ne dévore plus la quasi-totalitéde son existence. A côté de ses toiles, les su-perbes illustrations réalisées par son frère,Alex, avec qui Dean a travaillé sur presquechaque film. Une manière pudique de souli-gner que tout est lié : la peinture, le cinéma,la famille...A 79 ans, le concepteur des décors des filmsde Coppola, Antonioni, Friedkin, Penn ouPolanski, goûte désormais le plaisir de la lenteur entre Los Angeles et Paris, aux côtés deson épouse, la comédienne Aurore Clémentrencontrée sur le tournage d'ApocalypseNow, il y a trente cinq ans. Après une mouedubitative, il se lance: «Si j'avais 20 ansaujourd 'hui, je crois que je ferais exactement lamême chose qu 'à l'époque où la question s'estvraiment posée: des études pour devenir architecte et consacrer une partie de mon temps à lapeinture. » Et pas de décor pour le cinéma ?«Non, je ne crois pas. Trop dur. » Ainsi, l'in-venteur du New York du Parrain, du villageindien de Little Big Man, du temple d'Apoca-lypse Now, de la maison de Zabriskie Point oudu sud profond de Bonnie and Cfyde aurait ratétout ça sans le moindre regret ? «Je me suispassionné pour ce métier grâce auquel je pou-

«little Big Man», «le Parrain»«Apocalypse Now»... A l'occasion d'uneexposition parisienne, Dean Tavoularis,brillant chef décorateur d'Hollywood,raconte sur quarante ans de carrière.

Francis Ford Coppola avec Dean lavoularis (non datée). PHOTO COLL PERSONNELLE

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vais donner libre cours à ma curiosité, mais ily a un lourd tribut à payer: le temps qu'on doity consacrer et la somme incroyable de travauxrépétitifs. Et puis, même si ce n'a jamais été uneobsession, !a peinture m'a beaucoup manqué. »Sur les murs de la galerie, chacun peut cons-tater que Dean Tavoularis s'est efforcé de rat-traper le temps évanoui. Aux côtés de story-boards et de croquis essentiellement réaliséspar son frère Alex, des portraits, des collages,des aquarelles ou une série épatante de deadbodies, toiles exécutées sur des photos de vic-times de morts violentes à Los Angeles dansles années 30 ou 40, comme une trace tangi-ble que le cinéma n'est pas si éloigné que cela.D'ailleurs, Dean Tavoularis est aussi à Parisparce qu'il vient de terminer le tournage dufilm de Roman Polanski, Carnage. «Unepro-duction impeccable de bout en bout, et Polanskiest un cinéaste et un homme formidables. Moiqui me suis si souvent plaint des studios et desdifficultés de ce boulot, je dois reconnaître lors-que les choses se déroulent aussi bien. »

Un climatiseur contre des billetsSur la question des tournages périlleux et desbagarres avec les producteurs, voire les met-teurs en scène, Dean Tavoularis en connaîtun sacré rayon. Témoin actif de la fin del'époque des majors aux pleins pouvoirs,dans les années 60, membre à part entière del'éclosion du nouvel Hollywood, il est désor-mais la mémoire vivante d'une époque pleinede bruit et de fureur dont rien ne dit qu'ellese reproduira un jour. Une anecdote surve-nue sur le tournage de The Brink's Job (distri-bué en France sous le titre affligeant de Têtesvides cherchent coffres pleins) de WilliamFriedkin, en 1977, mesure tout ce qui sépareles films de l'époque de ceuxd'aujourd'hui. Pour les besoins decette histoire de cambrioleurs to-

cards emmenés par Peter Falk, leBoston des années 30 avait été re-produit, et plusieurs scènes en ex-

térieur avaient exigé de masquer tous les si-gnes de modernité dans les rues. Juste avantde tourner, l'équipe remarque qu'un appareilà air conditionné fait tâche à une fenêtre del'immeuble en plein dans le champ. Le pro-priétaire de l'appartement, contre quelquesbillets, accepte d'enlever son climatiseur.«Et le lendemain, la plupart des fenêtres del'immeuble avaient, elles aussi, un climati-seur», sourit Dean Tavoularis. «Aujourd'hui,on l'aurait enlevé à la palette graphique et onn'aurait peut-être même pas construit ni mêmeimaginé les décors. Sur un tournage, fl/aut ab-solument s'occuper de tout. Les décors, les fi-

gurants, les costumes, tout, et même le reste. »La preuve, en souvenir de Liz Taylor qui vientde disparaître, Dean se rappelle de son uni-que rencontre avec la star américaine. «Surïe tournage de Candy de Christian Marquand,à Rome, j'ai croisé quelques grandes personneh'tés de l'époque •• Marlon Brando, Walter Mat-thau, John Huston, James Coburn qui jaisaientdes apparitions dans le film. Et puis un soir, Ri-chard Burton est arrivé. R était accompagné parLiz Taylor, très beaux tous les deux. La conver-sation s'engage, mais Liz ne parlait pas beau-coup, jusqu'au moment où elle lance: "Pasmoyen de trouver une goutte de Wïld Turkeydans cette ville !" Il y a eu un léger froid et puisje lui ai dit que si, justement, une petite boutiquede liqueurs pas loin de là où nous tournions ven-dait son bourbonpréféré. Pendant tout le tempsoù Burton et Taylor sont restés à Rome, j'ai dûleur amener une bouteHJe de WUd Turkey chaquejour. On doit vraiment veiller à tout. »

«Une petite graine»Dans un autre genre, Dean Tavoularis s'estemployé sur des tournages gigantesques,avec d'autres contraintes. «Pour Little BigMan et la séquence de la bataille de Little BigHorn, 300 ou 400 figurants avaient été recru-tés. Pour chacun d'eux, je devais vérifier que lemaquillage des peintures de guerre était bienconforme avec celui que nous voulions. Pas lescouleurs gueulardes habituelles des westernsd'avant mais une palette plus proche des vraiescouleurs qu'utilisaient les Indiens. Je devaisaussi littéralement leur courir après pour qu'ilspassent chez le coiffeur. C'était crevant. » Dansla foulée, Dean Tavoularis se souvient destentes du village indien qu'il avait fait con-fectionner dans une tannerie de Los Angeles,«avec des coutures invisibles et assez fines pourque, la nuit, on puisse voir par transparence lalumière du feu de camp allumé à l'intérieur,comme des lanternes posées sur la prairie».Avec ses proches collaborateurs, dont sonami Angelo Graham, ils campaient à quel-ques dizaines de mètres du champ de bataillede Little Big Horn, «un moment extrêmementémouvant», dit-il simplement.Dean Tavoularis n'a pas oublié les circons-tances qui l'ont amené jusque-là. Pour ce filsd'immigrants grecs du Péloponnèse, né le18 mai 1932 à Lowell, Massachusetts, l'en-fance fut rythmée par les visites dans undrôle de parc d'attractions auquel peu d'en-fants avaient alors accès. Son père, travaillaitdans l'entreprise de distribution de cafécréée par son frère à Los Angeles. Pendant lesvacances, Dean l'accompagnait lors des livraisons de café à travers la Californie avec,comme passage obligatoire, les studios de la

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A 79 ans, le chef déco d'Antonioni ou Polanski (ici, à Paris, le 22 mars), consacre désormais davantage de temps à la peinture. PI IOTO r STUQN MYOP

Fox. «J'ai ainsi connu le temple de lajabricatfondesflms, écrit Dean dans un catalogue d'unede ses expositions en 2005. J'ai vu les mer-veilles de ce monde - des figurantes vêtues enbefles du Sud, des monstres aVant déjeuner, leurtête d'insecte rejetée en arrière, découvrant leurvisage humain, des paysages martiens et desgratte-ciel. A12 ans, je n'avais aucune idée dece qu'était la direction artistique d'un/8m, maisje me rends compte que ces visites ont planté enmoi une petite graine. »Pendant ses études, le jeune homme s'inté-resse à deux domaines : la peinture et l'archi-tecture. Le City Collège le jour, une écoled'art le soir. Comme tous les étudiants dansson cas, il tente sa chance dans ce que ces

jeunes gens appelaient alors la Cathédrale del'art - les studios Disney, qui, à sa grandesurprise, l'engagent. Un an à copier les des-sins des autres pour en faire de l'animationmanque de le dégoûter à tout jamais de l'in-dustrie du cinéma mais, au moment où ilprésente sa démission, la direction du studiolui propose de passer au département artisti-que des films avec acteurs. «J'étaisfascinéd'entrer dans ce monde magique. J'ai vu KirkDouglas, James Mason, oh mon Dieu ! On tour-nait Vingt Mille Lieues sous les mers. J'ai toutappris de ia/abricarion d'un film pendant mesannées chez Disney. » Sept ans exactement,durant lesquels Dean Tavoularis continue àpeindre à l'école du soir, «ïibre, détendu».

A l'époque, il découvre aussi L'Awentura etle cinéma d'Antonioni. Un choc visuel et in-tellectuel à travers lequel le cinéma n'appa-raît plus seulement comme le divertissementdu samedi soir. Et puis il a fallu choisir entreun métier et son désir de peindre.Quelques engagements comme assistant dé-corateur sur des productions de Stanley Kra-mer notamment, puis c'est le grand bainquand Arthur Penn, sur les conseils de War-ren Beatty, lui offre la direction artistique deBonnie and Cfyde en 1966. Le projet inaugureune nouvelle époque. Le film, puissant, vio-lent, en rupture avec le vieil Hollywood quicommence à perdre pied, est trop tentant, etDean Tavoularis n'a plus vraiment le choix.

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DeadGirl m a Car (2007), de Dean Tavoularis, acrylique et photographie.TAVOU ARIS

Sans titre (2001), de Dean Tavoularis, crayons de couleur et collage sur papier. TAVOULARIS

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Il fallait participer à ce projet et à tous ceuxqui allaient suivre. La peinture allait êtreoubliée pendant quelques dizaines d'années.«Je n'ai jamais eu l'impression d'avoir vouluêtre ce que je suis devenu, sourit Dean. C'estun enchaînement qui s'est déroulé à toute aHure,j'ai été pris dans le mouvement. »

Drogue et chaleur étouffanteDans le sillage de Bannie and Cfyde, vient larencontre avec Francis Ford Coppola et la for-mation d'un couple qui a fait date dans l'histoire du cinéma. Ensemble, ils tournent unequinzaine de films, Coppola aux manettes entant que réalisateur, producteur ou les deux.«J'ai aussi beaucoup aimé travailler avec Mi-

chelangelo Antonioni, soupire Dean Tavoularis.Sur Zabriskie Point, mais aussi sur trois autresprojets qui n'ont, hélas, jamais vu le jour. C'estun homme qui m'a beaucoup appris en termesartistiques. Tous ses projets étaient un travailsoigné, impeccable, parfaitement planifié. Unpeu le contraire de Francis», plaisante-t-il.Avec Coppola, tout commence sur le tour-nage du Parrain, en 1972. Dean venait de ter-miner Candy, de Marquand, où il avait sym-pathisé avec Brando. «Beaucoup de gens ontraconté l'histoire de Brando et du Parrain, moij'ai assisté à la scène. Francis travaillait al'adaptation du livre de Puzzo qui avait été unbest seller, et tout le monde se demandait quiserait le Parrain. Jusqu'au jour où Francis m'a

dit qu'il avait fait son choix: Marlon Brando.Comme je le connaissais, il m'a demandé d'organiser une rencontre. J'étais enthousiaste,mais la Paramount qui finançait le film a ditqu'il n'en était pas question. Brando était tropcompliqué, trop cher. On s'est quand même retrouvés à un dîner avec Francis, Marlon Brandoet Christian Marquand, qui habitait chez Marlonà Los Angeles. C'était au Chianti, un restaurantitalien. Francis parlait du film, de l'histoire, durôle, et Marlon était passionné. Jusqu'au moment où il a dit qu 'il avait déjà une petite idée.H a commencé à parler avec cette voix érailléeen se coijfant ïes cheveux en arrière. R amis en-suite des serviettes en papier dans ses joues et,en cinq minutes, nous avons vu naître le Parrain.Francis était surexcité, il a demandé s'il pouvaitle filmer en vidéo. Marlon a repondu oui, biensûr, aucun problème. C'est amusant d'ailleursque tout le monde raconte que Brando était ca-pricieux, insupportable, méprisant ou alcooliquealors qu'il était vraiment le contraire de toutcela. En tout cas, après, avec sa vidéo, Francisa convaincu tout le monde. »Pour les décors, l'affaire n'a pas été simple.«La Paramount voulait qu 'on tourne tout dans

leurs studios de Hollywood. Francis et moin'étions pas d'accord, mais on a visité quandmême et, comme nous le pensions, ça ne collaitpas. On leur a dit alors que, pour tourner là, il/allait rehausser tous les immeubles de deuxétages car, à New York, les immeubles ont aumoins six étages. Ensuite, Us ont voulu que noustournions à Saint-Louis. C'est une jolie ville,mais elle ne ressemble pas du tout à New York.D'une manière générale, si nous avions suivi lesordres des studios, le Parrain n'aurait pas étéce film iconique, mais un film de gangsterscomme les autres. »Se bagarrer contre desproducteurs, résister auxpressions financières, nepas se laisser faire, tel aété le quotidien de DeanTavoularis pendant prèsde quarante ans. Même sicertains films ont été, dece point de vue, bienmoins éprouvants,comme le Parrain II oùCoppola, auréolé du triomphe du premier, apu imposer toutes ses idées sans discussion.En revanche, toujours avec Coppola, rien nepourra sans doute égaler et encore moins dé-passer la folie d'Apocalypse Now, les catastro-phes à répétition : la chaleur écrasante desPhilippines et de la Malaisie, le typhon quioblige à tout reconstruire, le renvoi de Har-vey Keitel, remplacé par Martin Sheen, vic-time pendant le tournage d'une crise cardia-que sévère, l'hystérie qui s'est emparée de lamoitié de l'équipe et la drogue qui circulaitcomme dans les bataillons de GI embourbésau Vietnam. «J'aime répéter que j'ai célébrétrois de mes anniversaires pendant ApocalypseNow, s'amuse Dean Tavoularis. Quand nousavons fait la fête des cent jours de tournage, onse disait que ça aUait bientôt se terminer. Et puison a fait la fête des deux cents jours, et on nesavait plus alors s'il y aurait une fin. » Cetteméthode baroque, qui a fait la folie et le géniede Coppola, est devenue une sorte de label ducinéaste.Au printemps 1983, il tourne The Outsidersà ïulsa, Oklahoma, et réserve une surprisedu chef à son équipe. «Nous étions installés àTulsaparce que le roman de S.E. Hinton, dontle film s'inspire, s'y déroulait. Nous avionsprévu de tourner avant l'été, terriblement chaudlà bas. Une semaine avant le dernier plan, alorsque nous pensions tous rentrer chez nous, Fran-cis annonce que nous restons là pour faire unautre film, et que je serais inspiré de commencerà réfléchir aux décors. » Une intuition dingueet contraire à tout ce qui se fait, qui donna un

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«C'était au Chianti, un restaurant italien.Coppoïa parlait du film, du rôle. MaiionBrando a pris cette voix éraillée en se coiffantles cheveux en arrière. Il a mis des serviettesen papier dans ses joues et, en cinq minutes,nous avons vu naître le Parrain. »Dean Tavoularis

film en noir et blanc vaporeux, aux confinsde l'expressionnisme, réalisé sur l'énergiepuisée au fond de chacun : Rumble Fish, rebaptisé Rusty James en français. Suivrontd'autres films avec Coppoïa, émaillés de sou-venirs emballants comme le décor extrava-gant de néons dans Coup de cœur, commeConversation secrète et une amitié avec GèneHackmann, ou plus délicats comme Hammeftde Wim Wenders, produit par Zoetrope, lasociété de Coppoïa. «R y avait une curieuseambiance. J'ai l'habitude d'arriver très tôt surle plateau. Là, alors que tout était éteint,l'équipe arrivait peu à peu et on se regardait,silencieux, tandis que dans une pièce du fond,on entendait le cliquetis de la machine à écriresur laquelle Francis et Wim réécrivaient les scè-nes que nous allions tourner le jour même. »

«Une véritable abomination»Au cours de la frénésie des années 80, DeanTavoularis envisage même de tourner sonpropre film. «Avec .Roger Birnbaum, qui estdevenu depuis l'un des pontes de la MGM,j'avais acheté les droits de Sérénade, un romande James Gain jamais adapté, et j'avais confiél'écriture du scénario à Jim Harrison. Pas mal,non ? Mais le film n 'a pas pu se faire pour desraisons de financement. » L'argent n'est pas lesujet favori de Dean Tavoularis. Toujoursdans le catalogue de l'exposition de 2005, ilécrivait : «Le budget, îa comptabilité, les éven-tuels mensonges sont pour moi une véritableabomination. Je ne commence a me rendrecompte qu 'aujourd 'hui que cet aspect du travaila pris la haute main, et que le processus de fa-

brication d'un film s'enfonce dans une sorte decauchemar affairiste. » Quand il rédige ces lignes, Tavoularis n'a plus travaillé pour le ci-

néma depuis quatre ans, et il lui faudra encore six ans pour y revenir - cette année -,et encore parce que Polanski l'a convaincu.Le même Polanski qui définissait ainsi sontravail de directeur artistique : «Quand on aquelqu'un comme Dean, on le laisse faire. Rya chez lui une impression que tout est tournédans des décors naturels. Et ça ne se remarquepas. C'est le plus difficile à faire, parce que fairedes décors où on reconnaît l'auteur, c'est beau-coup plus simple. »Depuis 2001, Dean Tavoularis est donc pein-tre. Il aime retrouver la solitude de son atelierle matin, l'odeur de la peinture et la toilelaissée la veille. Hormis l'intermède Polanski,il n'est pas sûr de revenir au cinéma. «Je dé-teste jouer au vieux sage, mais le cinéma de lapalette graphique ne m'intéresse pas beaucoup.Tout comme ces énormes productions à effetsspéciaux qui s'enchaînent l'une derrière l'autre.En revanche, je crois plus que jamais à une nou-velle génération qui viendra bousculer ce systerne comme notre génération l'avait fait. » Enattendant, après l'exposition à Paris, DeanTavoularis retournera a la tranquillité de sonatelier. Pour assouvir cette curiosité quel'exercice de la peinture ne cesse de renouve-ler chez lui. Il dit encore: «R m'arrive souventde penser au mot que l'acteur George Sandersavait laissé avant de se suicider: "Cher monde,je m'en vais parce que je m'ennuie. " Moi, je nem'ennuie toujours pas. » •*•

(i) «Outside», galerie Catherine Houard,75, rue Saint-Benoît, 75OO6 Jusqu'au 27 mai.fiens • O9542O2749