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PARTENARIATS PUBLIC-PRIVÉ ET ACTIONS LOCALES Par Luc Baumstark Albane Hugé Catherine Marcadier et Catherine Maubert Chef de projet du groupe Racines Avec la participation de Laurent Deruy n° 9 – Juillet 2005

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PARTENARIATS PUBLIC-PRIVÉET ACTIONS LOCALES

Par Luc BaumstarkAlbane HugéCatherine Marcadieret Catherine MaubertChef de projet du groupe Racines

Avec la participation deLaurent Deruy

n° 9 – Juillet 2005

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Depuis quelque temps, un nouveausigle fait fureur dans les discourspublics, qu’ils soient tenus par lesreprésentants de l’État ou des collecti-vités territoriales : PPP. Auparavant cesigle hantait les internautes soucieuxde leurs connexions. La manie dessigles qui sévit un peu partout créeune de ces confusions qui devientcommune. Ainsi les coutumiers del’industrie pharmaceutique ont-ils misquelque temps à comprendre que lesSMR ne désignaient pas un servicemédical rendu, mais des stratégiesministérielles de réforme. Donc, il fautle savoir, désormais, depuis unefameuse ordonnance du 17 juin 2004,les PPP désignent les partenariatspublic-privé et non plus le codaged’une transmission informatique.

L’expression développée ne renseignepas encore sur la vraie nature des PPP.Et, quoiqu’une année se soit écoulée,des exemples concrets n’ont pas enco-re permis d’illustrer le nouveau sigle.Nous devons donc nous en tenir auxtextes, à leurs intentions et commen-taires divers pour savoir de quoi il estquestion. Or quand nous regardons deprès le contenu de ces PPP, nous pou-vons regretter qu’une certaine plati-tude lexicale appauvrisse une vérita-ble innovation dont les enjeux n’ontsuscité aucune forme d’invention oude travail linguistique susceptible d’enfaire comprendre l’identité.

En effet, à travers les marchés publicsou les délégations de service public, ilnous semblait qu’il existait déjà desformes de partenariats entre l’État oules collectivités territoriales et le sec-teur privé. Ainsi pouvait-on qualifier larelation entre l’État et les prestatairesprivés qui ont construit l’admirableviaduc de Millau. Mais il ne s’agit plusde cela, ni même des concessionsconfiées à des grands groupes spécia-listes de l’exploitation des eaux. Lameilleure preuve d’une véritable inno-

vation réside dans les sentimentscontradictoires qu’elle induit . À cetitre, les PPP donnent l’impressiond’être très innovants car les décideurspublics locaux s’en méfient et l’Étatn’en a pas encore donné l’exemple.Autrement dit, face à cette innovation,chacun cherche le piège ou les arrière-pensées.

Je comprends que le groupe de projetRacines se soit intéressé à ces PPP.Mobilisé sur la relation des collecti-vités territoriales avec l’État stratège,ce groupe, conduit par CatherineMaubert, ne pouvait qu’être sensibleaux réactions locales, à l’écriture juri-dique des textes en question et auxeffets attendus de ces nouveaux parte-nariats. L’objectif des PPP est tout à faitclair : faire en sorte que des projets quicorrespondent à des besoins réels dela population ne tardent pas à être misen œuvre, ne soient pas dépendantsd’administrations tatillonnes et soientconduits en pleine responsabilité pardes acteurs privés. Les conditionsd’urgence et de complexité, justifiéespar l’intérêt général et l’utilité écono-mique d’un projet, fondent la légiti-mité d’un PPP et, de ce point de vue,on ne peut que se réjouir que l’Étatsuggère et permette à chacun de pren-dre les moyens de ses objectifs.

À propos des PPP, le débat ne se situeguère entre idéologues habitués à fer-railler sur le thème des privatisationsou des nationalisations. Le fait mêmeque les nouveaux contrats de partena-riat soient l’objet d’une évaluationjuridique et économique préalabledonne une certaine rigueur à ladémarche publique, tout en responsa-bilisant davantage le partenaire privé.Chargé de trouver les financementsnécessaires d’un projet, de choisir sespropres partenaires, de garantir lesdélais et coûts de réalisation, le parte-naire privé prend des risques nonnégligeables qui peuvent l’angoisser à

AVANT-PROPOS

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(*) “Le prix du tempset la décision publique”rapport du groupe d’expertsprésidé par Daniel Lebègue,Commissariat général du Plan,La Documentation française,février 2005.

une époque où la sécurité semble lepremier objectif de maints acteurséconomiques.

C’est certainement l’expérience quinous enseignera l’efficacité des PPP.Mais si le groupe Racines les analyse apriori, c’est qu’il souhaite comprendreles résistances qu’il entend s’exprimerlocalement tout en suggérant des amé-liorations du dispositif qui permettentde lui donner sa pleine efficacité. Lasuggestion qui est, par exemple, faitede dédommager systématiquement lesmeilleurs candidats à un PPP me sem-ble excellente pour obtenir des projetsde qualité, très travaillés et approfon-dis. L’État ou les collectivités localesdoivent effectivement considérercomme un investissement tout letemps passé à leur proposer un servi-ce nouveau qu’ils considèrent eux-mêmes comme d’intérêt général.

Le Plan est directement concerné parles PPP car les processus de décisionpropres à l’État stratège sont plus inté-ressants à examiner et à valider queson essence abstraite. En mêmetemps, nous pensons qu’il n’est paspossible d’isoler cette décision decontracter un PPP sans intégrer d’au-tres dimensions de la décisionpublique. En ce sens, le prix dutemps * doit être comme un soucimajeur de l’État. La récente révision àla baisse du taux d’actualisation –développée dans ce texte du groupeRacines – permet de prendre davan-tage en compte le temps long. Mais ilfaut aller encore plus loin : en inté-grant le calcul économique, en tenant

compte des éléments nouveauxqu’apporte le développement durable,la gestion des risques ou les valeurscroissantes des biens naturels nonrenouvelables, le décideur public nepeut plus s’adresser à ses partenairesprivés dans les mêmes termes. Le pro-blème n’est certainement plus d’êtrele moins cher, ici et maintenant, maisd’être le moins cher sur trente, cin-quante ou deux cent ans selon le pro-jet dont il est question. Autrement dit,une entreprise privée doit pouvoirobtenir un contrat de partenariatquand elle peut démontrer qu’elle estfinalement moins chère sur le longterme au regard du calcul écono-mique.

Ce travail sur les PPP est donc particu-lièrement intéressant et très significatifdu rôle que doit jouer le Plan dansnotre pays : tout doit être mis en cohé-rence et les PPP ne peuvent être isolésd’une stratégie globale de l’État, miseen œuvre dans ses décisionspubliques et comprise par des collec-tivités territoriales qui sont certaine-ment aussi sensibles au temps longque l’État lui-même.

Je tiens donc à remercier le groupeRacines pour cette contribution signi-ficative aux travaux du Plan et en par-ticulier, Laurent Deruy dont la compé-tence juridique a beaucoup comptédans les analyses et suggestions pré-sentes dans ce texte.

Alain Etchegoyen

Avant-propos

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Avec l’ordonnance n° 2004-559 du17 juin 2004, une nouvelle forme departenariats public-privé voit le jour :les contrats de partenariat.

En droit, les partenariats public-privé(PPP) peuvent être envisagés à partirde la définition qu’en donne le livreVert de la Commission européenne du30 avril 2004 : sont en cause “des for-mes de coopération entre les autoritéspubliques et le monde des entreprisesqui visent à assurer le financement, laconstruction, la rénovation, la gestionou l’entretien d’une infrastructure oula fourniture d’un service”. Sur cesbases s’inscrit une relation enracinéedans une durée relativement longue etcaractérisée par une allocation desrisques entre acteurs publics et entre-preneurs. Les PPP regroupent en défi-nitive des associations de personnespubliques et privées tantôt structurel-les (l’économie mixte), tantôt contrac-tuelles (les concessions en sont laforme originelle).

La réforme, qui a donné lieu à denouvelles formes de partenariatspublic-privé – d’abord sectorielles(dans les domaines de la santé, la jus-tice, la police et la défense nationale)puis générales (les contrats de parte-nariat) – a été motivée par l’insuffi-sance des solutions apportées par ledroit de la commande publique pourrépondre aux objectifs des collectivi-tés publiques.

Les montages contractuels classiques(en particulier les marchés publics etles délégations de service public) nepermettent pas de mener à bien tousles projets de construction et demodernisation d’équipements et d’in-frastructures qui sont pourtantindispensables à une relance de lacroissance dans un contexte decontrainte budgétaire forte. Les mar-chés publics, fondés sur une logiqueinsuffisamment incitative, en principe

de courte durée, et dissociant les opé-rations de conception, de constructionet de maintenance tout en prohibantle paiement différé, génèrent descoûts d’interface importants pour lescollectivités tout en créant insuffisam-ment de gains de productivité. Lesdélégations de service public, si ellesconstituent bien des PPP au sens fortdu terme, sont caractérisées par uncertain nombre de rigidités qui limi-tent leur recours : en particulier, ellessont subordonnées à l’existence d’unservice public à gestion délégable etau critère d’une rémunération “sub-stantiellement liée aux résultats del’exploitation”, autrement dit à untransfert obligatoire du risque “volu-me” à l’opérateur privé, qui n’en aque rarement la maîtrise et qui enconséquence en fait payer le prix à lacollectivité et/ou à l’usager.

Face à ces contraintes, se sont déve-loppées de manière diffuse des pra-tiques d’évitement : les marchés d’en-treprise de travaux publics (METP), lerecours à la vente en état futur d’achè-vement (VEFA), montage de droitimmobilier échappant au Code desmarchés publics, puis l’instauration demécanismes favorisant le financementprivé d’équipements implantés sur ledomaine public via les montages fon-dés sur les baux emphytéotiquesadministratifs (BEA) et sur les autorisa-tions d’occupation temporaire (AOT).Elles se sont toutefois avérées insuffi-santes.

Les contrats de partenariat (CP) à l’in-verse associent de nombreux avan-tages compétitifs :

– un objet global défini avec sou-plesse : tout CP implique obligatoire-ment le préfinancement privé, laconstruction et la maintenance/l’ex-ploitation d’équipements ou d’ouvra-ges publics ; à ces éléments peuvents’ajouter le transfert de la conception

RÉSUMÉ OPÉRATIONNEL

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Résumé opérationnel

et de prestations concourrant à l’exer-cice de la mission de service publicdont est en charge la personnepublique ; la réunion de ces éléments– obligatoirement scindés en droit desmarchés publics – favorisera des éco-nomies d’interface et la responsabili-sation des entreprises en phases deconception et de construction ;

– un contrat de longue durée facilitantle financement privé et un régime juri-dique sécurisé pour les investisseurs :le CP introduit des facilités de recoursau crédit-bail, et définit un partage desrisques garantissant sa “bancabilité”, àsavoir la propension des banques às’engager dans le projet et à offrir destaux de financement avantageux ;

– un contrat autorisant le différé depaiement public : les collectivitéspubliques pourront disposer rapide-ment d’équipements tout en suppor-tant le coût principal lors de la phasede maintenance/exploitation ;

– un contrat incitatif : des clauses deperformance sont introduites pourinciter le partenaire à honorer dans lestemps des missions dont la qualité estcontractuellement sanctionnée ; enpratique, sa rémunération comporteraune part variable subordonnée à l’exé-cution rapide et fiable de ses obliga-tions.

Ces avantages se retrouvent égalementdans les PPP sectoriels qui ont précé-dé la réforme de 2004 (cf. LOPSI etLOPJ de 2002 et ordonnance dite“BEH” de 2003). Du reste, ils ne sontpas sans faire écho aux contrats dePrivate Finance Initiative (PFI) britan-niques, qui ont inspiré de nombreuxÉtats avant la France (Pays-Bas, Italie,Espagne, Portugal, Allemagne, Japon,Australie…). Cette exportation géné-rale du modèle britannique doit large-ment à l’efficacité des PFI, qui génére-raient des dépassements de budget etde délais dans trois fois moins de cas

en moyenne qu’en maîtrise d’ouvragepublique (étude du National AuditOffice, 2003).

Fondés sur la recherche de la BestValue for Money, les PFI ne sont enga-gés que lorsque le Public SectorComparator, indicateur du coût globaldes opérations envisagées en maîtrised’ouvrage publique, démontre que leprojet sera réalisé à moindre coût et àmeilleure qualité en PPP. Il s’agit danschaque cas d’intégrer les externalitéspositives qu’on attend du savoir-fairedes opérateurs privés, les économiesd’échelle et d’interface escomptées, etde les confronter au surcoût générépar le financement privé et les coûtsde transaction importants qui caracté-risent la passation de contrats globauxtels que les PFI (recours aux conseilsprivés, indemnisation des entreprisesnon retenues, notamment).

Après l’apparition en 1992 des PFI, ungrand nombre d’États ont adapté detelles solutions pour créer des mon-tages innovants. En ce sens, lescontrats de promoteurs en Italieconstituent une forme originale dePPP, associant initiative privée, paie-ment public différé et financementprivé, de même que les concessions àpéage virtuel (shadow tolls) enEspagne et au Portugal se présententsous la forme de montages concessifsparticulièrement souples, associantpaiement public et transfert du risquede l’exploitation, tout en favorisant lamaîtrise des coûts et des délais et laqualité du service rendu à l’usager parun ensemble de clauses incitatives.

En France, les contrats de partenariatn’ont à ce jour fait l’objet que d’uneseule application par la communed’Auvers-sur-Oise, en matière d’éclai-rage public. Ils suscitent un certainnombre d’inquiétudes chez leurs utili-sateurs potentiels (collectivités publi-ques, entreprises, conseils privés),

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(1) Dans le paysage administratifdes missions d’appui aux PPP,la mission d’appui du MINEFIconstitue l’unique organismegénéraliste. Pour des projetssectoriels, d’autres instancespourront utilement être saisies(par exemple la MAINHdans le secteur hospitalier).La Mission d’appui du MINEFIet la MAINH ont élaborédes guides de bonnes pratiquespour faciliter la passation des PPP.

faute de décisions contentieuses, etcompte tenu de la forte technicité dela procédure d’évaluation qui précèdeleur passation : elle doit attester del’urgence ou de la complexité justi-fiant le recours à cette solutioncontractuelle d’une part, et établir quele contrat de partenariat constituepour le projet en cause une modalitépréférable à la régie et/ou aux autrescontrats administratifs en termes decoût global, de performance et departage des risques. Toutefois, cetteinquiétude n’empêche en rien unintérêt notable pour la réforme :enthousiasme et appréhension vontde pair en l’absence de retoursd’expériences. Ceci est d’autant plusvrai pour les responsables locaux.

Aujourd’hui, la contribution desacteurs locaux dans les dépenses d’in-vestissement publiques occupe unepart largement prépondérante(68,6 %), tendance à la hausse qui seconfirme chaque année (de 1997 à2003, + 4,6 % par an et en moyennede dépenses d’investissement horsdette pour les collectivités locales etleurs groupements à fiscalité propre),ce qui n’est pas sans lien avec laconduite de l’acte II de la décentrali-sation (loi n° 2004-809 du 13 août2004 relative aux libertés et responsa-bilités locales). L’échelon local estdonc particulièrement attentif à laréforme des PPP.

Les champs visés par les contrats departenariat locaux doivent être déli-mités eu égard aux compétences descollectivités territoriales et au périmè-tre des services publics locaux. Denombreux secteurs sont concernés(secteurs de l’eau, des déchets, del’énergie, du chauffage urbain, destransports, du stationnement, des loi-sirs et des TIC, notamment). Pour toutnouveau projet, il faudra donc arbitrerles mérites et défauts comparatifs dela gestion directe (régie + marchés

publics), de la gestion déléguée (délé-gation de service public) et de la ges-tion partenariale (LOPSI/LOPJ, ordon-nance “BEH”, contrats de partenariat).

Par ailleurs, la conduite de l’évalua-tion juridique et économique préala-ble posera dans un premier temps uncertain nombre de difficultés qu’il fau-dra surmonter par le recours auxconseils privés et à l’expertise de laMission d’appui à la réalisation descontrats de partenariat 1.

Si l’évaluation préalable cristallise denombreuses inquiétudes, dans lemême temps, nombreux sont lesacteurs locaux qui s’interrogent sur lesintérêts économiques et financiers dela réforme :

– les coûts de transaction sont-ilsrédhibitoires en contrats de partena-riat ?

– quel coût d’opportunité risqued’avoir à supporter la collectivité ?

– quels avantages peut-on tirer de laglobalité du contrat et de la dissocia-tion rationae temporis de la disponibi-lité de l’ouvrage et du paiementpublic ?

– comment mettre à profit une alloca-tion optimale des risques, élémentcentral de la définition des contrats departenariat ?

– enfin, comment mesurer l’utilitésociale des dépenses publiques – le“prix du temps“ – ?

L’absence de réponse claire à cesquestions ne peut qu’alimenter lesréserves exprimées par les éluslocaux à l’égard du contrat de parte-nariat. Ces réserves trouvent égale-ment d’autres points de justification :

– le doute quant aux innovationsqu’apporte le CP par rapport à laDSP ;

Résumé opérationnel

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– les craintes liées à la transcriptioncomptable des opérations réalisées enCP (alors que la conduite de l’acte IIde la décentralisation comporte déjàune part d’incertitude budgétaire) ;

– les risques juridiques en lien avecleur passation ;

– les asymétries d’information entrecollectivités publiques et partenairesprivés ;

– la crainte d’une évasion des compé-tences locales du fait de l’externalisa-tion des missions ;

– enfin, les déficits d’information, depédagogie et d’exemplarité par l’État.

À ces inquiétudes, nous suggéronsdes réponses pour que les responsa-bles locaux puissent mettre à profit undispositif que l’État a jugé utile d’insti-tuer ; celles-ci passeront pour partiepar :

– une amélioration de l’ordonnance etdu guide des bonnes pratiques duministère de l’Économie, des Financeset de l’Industrie ;

– davantage de pédagogie et d’infor-mation à destination des acteurslocaux ;

– l’indemnisation des candidats nonretenus après le dialogue compétitif ;

– la constitution de pôles de compé-tences pluridisciplinaires (mutualisa-tion de certaines fonctions) ;

– la finalisation du dispositif compta-ble et budgétaire transitoire applica-ble aux collectivités territoriales et àleurs établissements publics.

Dans cette perspective, l’État et lescollectivités locales pourront profiterdes innovations introduites par lescontrats de partenariat dans les modesd’action publique : en particulier lalogique d’évaluation juridique et éco-nomique préalable qui les sous-tendet la logique d’achat non pas d’unouvrage mais d’un service par la per-sonne publique à son partenaire. Cesinnovations, utilisées à bon escient,pourraient constituer un facteur de larelance économique.

Résumé opérationnel

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SOMMAIRE

INTRODUCTION 13

CHAPITRE PREMIERL’émergence des contrats de partenariat 15

1. Le renouveau des partenariats public-privé 152. Présentation comparative des contrats publics 26

CHAPITRE 2Les contrats de partenariat : entre innovation et adaptation 35

1. Les innovations introduites par l’ordonnancesur les contrats de partenariat 352. Les modèles d’inspiration : exemples étrangers 43

CHAPITRE 3Contats de partenariat et collectivités locales : les enjeux 55

1. Les champs concernés 552. Les intérêts économiques et financiers 603. Les enjeux politiques et budgétaires 68

CONCLUSION 79

BIBLIOGRAPHIE 81

ANNEXE 1 83

ANNEXE 2 85

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Dans le cadre de ses missions trans-versales, le groupe de projet Raciness’est saisi du sujet des partenariatspublic-privé (PPP) avec deux viséesprincipales : apporter des élémentsobjectifs de compréhension et d’ap-préciation de ces instruments et mettreen perspective les enjeux révélés dontcelui de renforcer les responsableslocaux dans leur capacité à réaliserdes projets et ainsi conforter le proces-sus de décentralisation.

Quel usage les acteurs pourraient-ilsfaire des contrats de partenariat, nou-veau mécanisme institué par l’ordon-nance n° 2004-559 du 17 juin 2004 ?

Pour répondre à cette question, ilconvient de rappeler le contexte danslequel s’inscrivent les contrats de par-tenariat et éclairer les innovationsintroduites par l’ordonnance : lanécessité d’apporter des solutionsalternatives aux collectivités publiquespour réaliser des équipements ou desinfrastructures et offrir des services.Ces éléments rappelés, on pourra seprononcer sur le point central dudébat : l’appropriation des contrats departenariat par les collectivités locales.

En termes de partenariatspublic-privé, l’existenceprécède l’essence

En dépit du débat autour des partena-riats public-privé qui a émergé dansles mois précédant l’entrée en vigueurde l’ordonnance, force est de consta-ter que des formes de partenariatspublic-privé structurelles (les sociétésd’économie mixte) et contractuelles(la concession, en particulier) existenten France depuis plusieurs décennies.En dehors même d’une logique parte-nariale, un certain nombre de contrats– en particulier les marchés publics –permettent l’association d’opérateursprivés à des projets d’utilité publique.

C’est pourquoi il convient de s’interro-ger sur les motifs de création descontrats de partenariat, alors mêmeque le droit de la commande publiquecomporte traditionnellement une largegamme de mécanismes d’associationdu secteur privé au secteur public. Onmesurera ainsi l’utilité de la réforme àl’aune des potentialités offertes par ledroit des contrats publics classiques.On appréciera aussi de manière cri-tique les différentes formules contrac-tuelles préexistant aux contrats de par-tenariat, au vu des objectifs poursuivispar l’État et les collectivités locales entermes de modernisation et de rénova-tion de leurs infrastructures, bâtimentset services.

L’analyse comparative souligne eneffet que les contrats de partenariats’inscrivent à la fois dans la continuitéet en rupture avec le droit de la com-mande publique : continuité, car leurcréation est le signe de la relance desinvestissements privés dans les projetspublics, rupture, du fait des impor-tantes dérogations qu’ils introduisentau regard du droit de la commande etde la domanialité publiques.

Les apports de la réforme

L’ordonnance sur les contrats de parte-nariat introduit un certain nombred’innovations dans le droit descontrats administratifs, conçues pourfavoriser une meilleure gestionpublique et un emploi optimisé desdeniers publics.

Les caractéristiques essentielles descontrats de partenariat – la globalité deleur objet, leur logique d’évaluationpréalable, la conception qu’ils retien-nent du partage des risques et l’asso-ciation qu’ils opèrent entre préfinance-ment privé et paiement public différé –se retrouvent dans un certain nombred’exemples étrangers ayant servi demodèle aux rédacteurs de l’ordon-nance sur les contrats de partenariat.

13

INTRODUCTION

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Introduction

Un levier d’actionpour les collectivités locales ?

Une fois déterminés le contexte durenouveau des partenariats public-privé français ainsi que les caractéris-tiques essentielles du contrat de parte-nariat, il est possible de se prononcersur l’utilisation qui pourrait en êtrefaite par les responsables locaux.

En l’état, l’appréciation de la réformepar les élus locaux reste globalement

critique. Ces réserves vis-à-vis ducontrat de partenariat trouvent diver-ses explications qu’il convient d’ex-plorer et de discuter.

Afin de compléter les déjà nombreu-ses études et pronostics consacrés auxcontrats de partenariat, il s’agit defournir, au travers d’une approche plu-ridisciplinaire (juridique, économique,sociale, financière et politique), unéclairage nouveau sur les enjeuxlocaux de cette importante réforme.

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L’apparition récente d’une nouvelleforme de partenariats public-privé(PPP) – les contrats de partenariat (CP),issus de l’ordonnance n° 2004-559 du17 juin 2004 –, s’inscrit dans unedynamique de réforme de l’État et desmodes de gestion publics. De fait,ceux-ci sont progressivement apparuslacunaires, alors que la nécessaireredynamisation de la croissance fran-çaise ne peut être pensée sans quel’État et les collectivités locales ne sedotent d’équipements, d’infrastruc-tures et de services pour répondre àleurs ambitions économiques et créerde l’emploi.

Il est apparu nécessaire de compléterl’offre présente en matière de partena-riats public-privé (1.) par des PPP d’unnouveau type (1.1.), étant donné lesrigidités que présentaient les formesclassiques d’association du secteurpublic à des opérateurs privés (1.2.).Ces contraintes avaient toutefois déjàfait l’objet de tentatives de contourne-ment par le recours à un certain nom-bre de mécanismes permettant delever les obstacles inhérents auxmodes de gestion classiques (1.3.).

De surcroît, et plus généralement, lescontrats de partenariat s’inscriventdans la continuité d’une évolution dudroit public français animée par lavolonté d’associer dans des conditionsplus favorables pour chacun d’entreeux les collectivités publiques et lesopérateurs privés (2.).

1. Le renouveaudes partenariats public-privé

1.1. De nouveauxpartenariats public-privé

Les partenariats public-privé (PPP) nefont pas l’objet d’une définition juri-dique stricte, à la différence descontrats de partenariat (CP), définis

par l’article Premier de l’ordonnancen° 2004-559 du 17 juin 2004, qui lesa institués dans l’ordre juridique fran-çais. On désigne par la terminologiede partenariats public-privé un ensem-ble de formes, d’associations des opé-rateurs privés à des projets publics,principalement pour la réalisationd’infrastructures publiques, la gestionde services publics et/ou la réalisationde projets immobiliers.

Les partenariats public-privé compren-nent au sens large une associationd’acteurs publics et privés qui peutprendre la forme de structures ou d’or-ganismes (cf. l’économie mixte, incar-née dans les SEM nationales ou loca-les) ou celle de contrats.

Le regain d’intérêt pour les partena-riats est en partie lié au programmed’“externalisation” lancé par différentsgouvernements et ministères dans unensemble hétéroclite de domaines (enparticulier, la gestion immobilièreinspirée du facility management –c’est-à-dire le fait de confier à un spé-cialiste l’ensemble de la gestion d’unimmeuble –).

En droit, on relève pour autant unetentative de définition du partenariatpublic-privé (PPP) dans le livre Vert dela Commission (Bruxelles, 30 avril2004). Après avoir noté que le PPPn’est pas défini au niveau communau-taire, la Commission précise que “ceterme se réfère en général à des formesde coopération entre les autoritéspubliques et le monde des entreprisesqui visent à assurer le financement, laconstruction, la rénovation, la gestionou l’entretien d’une infrastructure oula fourniture d’un service”. À la suitede quoi, la Commission pose quatrecritères essentiels qui qualifient lesPPP :

– “la durée relativement longue de larelation, impliquant une coopération

15

CHAPITRE PREMIER

L’émergencedes contratsde partenariat

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entre le partenaire public et le parte-naire privé sur différents aspects d’unprojet à réaliser ;

– le mode de financement du projet,assuré pour partie par le secteur privé,parfois par le biais de montages com-plexes entre divers acteurs [étantentendu que] des financementspublics, parfois très importants, peu-vent néanmoins s’ajouter aux finance-ments privés ;

– le rôle important de l’opérateur éco-nomique, qui participe à différents sta-des du projet (conception, réalisation,mise en œuvre, financement) (alorsque) le partenaire public se concentreessentiellement sur la définition desobjectifs à atteindre en termes d’inté-rêt public, de qualité des servicesofferts, de politique des prix, et assurele contrôle du respect de cesobjectifs ;

– la répartition des risques entre le par-tenaire public et le partenaire privé…en fonction des capacités respectivesdes parties en présence à évaluer,contrôler et gérer ceux-ci”.

En France, en première analyse, deuxmodèles relativement purs d’associa-tion du secteur privé dans un cadrecontractuel existent :

– le premier est fondé sur une logiquede fourniture contre paiement d’unprix : les marchés publics (MP), régistant par la loi sur la maîtrise d’ouvragepublique et ses rapports avec la maîtri-se d’œuvre privée (loi MOP) que parle Code des marchés publics ;

– le second est caractérisé par le trans-fert du risque (parfois de la construc-tion et en toute hypothèse de l’exploi-tation d’un service public) à un opéra-teur privé : les délégations de servicepublic (DSP).

Par ailleurs, les expériences étrangèresou internationales offrent égalementdes cadres d’analyse diversifiés desPPP. Un certain nombre de grands pro-jets d’infrastructures associant le sec-teur privé ont été structurés depuislongtemps sous la forme de ce qu’il estconvenu d’appeler un financement deprojet. Ce sont des projets de longuedurée, préfinancés privativement parune société ad hoc créée à cet effet etpayés sur la durée du contrat par lapersonne publique. Les expériencesétrangères dénotent l’existence demontages contractuels alternatifs auxMP et DSP français, l’exemple le plussignificatif étant le contrat de PrivateFinance Initiative (PFI) en Grande-Bretagne (cf. chapitre 2).

Aujourd’hui, la France s’est engagéedans la voie d’une rénovation desinstruments juridiques permettant d’at-teindre les modèles de PPP tels qu’ilssont conçus par les expériences étran-gères et par la définition donnée par laCommission.

1.2. Objectifs poursuiviset contraintes du droitde la commande publique

Les contraintes actuelles sont tellesque les personnes publiques se trou-vent dans la nécessité de répondre àdes besoins de plus en plus importantsquantitativement comme qualitative-ment, avec moins de moyens.

En effet, elles doivent faire face d’unepart, à un besoin de modernisation etd’investissement dans des secteurs trèsvariés (police, justice, santé publiquenotamment), et d’autre part, à unecontrainte budgétaire forte liée auxengagements fiscaux pris par lePrésident de la République actuel,ainsi qu’à la limitation de l’endette-ment public imposée par le traité deMaastricht.

Chapitre Premier

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Enfin, dans le but d’assurer laconstruction et la rénovation de nom-breux édifices publics, le recours àl’externalisation permet une mise àprofit du savoir-faire des opérateursprivés.

Les objectifs poursuivis

L’un des objectifs poursuivis par lesréformes en matière de partenariatspublic-privé découle de la contraintebudgétaire : il s’agit d’optimiser lescoûts sur une longue durée.

Cet objectif ne peut être satisfait quemoyennant la réunion de deux leviersd’action :

– un étalement des coûts budgétairesdans le temps (tant pour parer aux

hypothèses de pression fiscale tropbrutale qu’à celles d’endettementpublic excessif) ;

– la dévolution à un unique opérateurdes opérations de conception, deconstruction et d’exploitation/mainte-nance (tant pour réaliser des écono-mies d’échelles que pour responsabili-ser l’opérateur dans les étapes deconception et de réalisation, souventporteuses de surcoûts d’exploitationlorsque ces différentes phases sontconfiées à des opérateurs distincts etnon interdépendants).

Le second objectif tient à la nécessitéd’attirer des capitaux privés.

Cet objectif ne peut être réalisé quemoyennant l’élaboration d’un partage

L’émergence des contrats de partenariat

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Risques de construction,de performanceet de demande

Concession à la française

Rémunération du partenairepar l'usager

Risquesde construction

et de performance

Contrats de partenariats

Risques à la chargedu secteur public

Marchés publics

Coût du financement/Bénéfices des contrats globaux

Risques de surcoûts (côté public)/Probabilité de consolider (côté public)

Rémunération du partenairepar le secteur public

Transfert de risques du public vers le privé

Panorama des partenariats public-privé

Source : DEXIA

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des risques optimisé entre collectivitéspubliques et opérateurs privés. Ce par-tage des risques est déterminant pourdes raisons comptables. Schéma-tiquement, lorsque les personnespubliques transfèrent l’intégralité durisque – comme en DSP – au secteurprivé, ce dernier ne peut déconsoliderla dette de son bilan, tandis que dansle cadre d’un MP, la consolidations’opère dans les comptes publics. Cetobjectif est en outre lié à l’évolutiondes normes comptables internationa-les. La situation d’endettement denombreuses entreprises privées rendl’objectif de déconsolidation crucial.Pour leur part, les administrationspubliques n’échappent pas à l’exigen-ce de déconsolidation en raison descritères de Maastricht.

Les entraves à l’objectif contractuelpoursuivi

Les contraintes qui pèsent sur l’État etles collectivités publiques et les objec-tifs en termes financiers et d’investisse-ment expliquent pour une large part laréforme contractuelle engagée. Lemode idéal de contrat qui pourraitsatisfaire aux attentes des personnespubliques réunit les avantages sui-vants :

– un contrat souple dans la définitionde l’objet et aussi global que possible,

– de longue durée,

– facilitant le financement privé,

– autorisant le différé de paiementpublic,

– caractérisé par un régime juridiquesécurisé.

Or, le droit public français classiquene permet pas de conclure un telcontrat.

La difficulté en droit français deconclure des contrats globaux

Le droit des marchés publics, issu tantde la loi sur la maîtrise d’ouvragepublique (loi MOP) que du Code desmarchés publics, reste largementréfractaire à l’idée de contrat global.

En revanche, la concession (forme par-ticulière de délégation de servicepublic) rend possible la conclusiond’un contrat global, étant toutefoisprécisé que le recours au montageconcessif souffre d’un critère réduc-teur particulièrement préjudiciable :l’existence nécessaire d’un servicepublic à gestion délégable.

• Le droit des marchés publics fran-çais : un droit réfractaire à l’idée decontrat global

Les marchés publics sont, en l’étatactuel du droit, définis par le décretn° 2004-15 du 7 janvier 2004 portantCode des marchés publics.

Aux termes de l’article Premier duCode, ce sont des “contrats conclus àtitre onéreux avec des personnespubliques ou privées” par un certainnombre de “personnes morales dedroit public (…) pour répondre à leursbesoins en matière de travaux, de four-nitures ou de services”.

Cette caractéristique permet notam-ment de distinguer la délégation deservice public du marché public,puisque dans le cadre du marchépublic, le cocontractant doit simple-

Chapitre Premier

18

• La nouvelle décision d’Eurostat “Ledéficit et la dette – Traitement des parte-nariats public-privé” du 11 février 2004[STAT/04/18] permet de faire sortir dubilan des administrations publiques lesactifs liés aux PPP lorsque (conditionscumulatives) le partenaire privé sup-porte le risque de construction, ainsiqu’au moins l’un des deux risques sui-vants : celui de disponibilité ou celui liéà la demande.

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ment fournir les moyens de fonction-nement d’un service public qu’il n’ex-ploite pas.

La rémunération des marchés publicsse présente sous la forme d’un prix, enprincipe non fonction du risque del’exploitation même si le marché peutcomporter des “clauses incitatives”(article 16), qui du reste sont d’appli-cation rare, compte tenu de la briève-té de la relation contractuelle.

Le droit des marchés publics est, parprincipe, peu compatible avec laconclusion de contrats globaux, la loin° 85-704 relative à la maîtrise d’ou-vrage publique et à ses rapports avecla maîtrise d’œuvre privée (loi MOP),applicable aux marchés publics,disposant, par son article 7, que “pourla réalisation d’un ouvrage, la missionde maîtrise d’œuvre est distincte decelle d’entrepreneur”.

De cet article, il résulte que les collec-tivités publiques, dans leurs relationscontractuelles, doivent respecter unedistinction entre :

– d’une part, le maître d’œuvre(concrètement, l’architecte), qui assu-re toute la phase en amont du projet(la conception, les études d’impact…)ainsi que l’assistance pendant laconstruction ;

– d’autre part, l’entrepreneur (concrè-tement, l’entreprise de BTP), qui assu-re toute la phase en aval du projet (laréalisation des travaux).

Ce principe a pu paraître rigide dansles hypothèses où le développementdu parc immobilier est d’urgence.Pour autant, la loi MOP prévoyait cer-taines atténuations à la règle, enposant une dérogation au principe parson article 18-I, qui vise les marchésde conception-réalisation. Cepen-dant, la dérogation a paru trop limita-tive aux acteurs publics : elle n’est en

effet justifiée que pour des “motifsd’ordre technique [qui] rendentnécessaire l’association de l’entrepre-neur aux études de l’ouvrage”. Lechamp des marchés publics deconception-réalisation est donc parti-culièrement étroit dans le cadre de laloi MOP.

De plus, la porte ouverte sur lesmarchés globaux par le Code desmarchés publics est largement insuf-fisante.

L’article 10 du Code des marchéspublics pose le principe du recours àl’allotissement des marchés. S’il envi-sage la passation d’un marché global,cette modalité perd de son intérêt parla rémunération nécessairement seg-mentée du cocontractant, ce qui pros-crit toute perspective d’économiesd’échelle ou de compensation d’uneopération sur l’autre.

• La délégation de service public : uncontrat global d’application limitée

Les délégations de service public(DSP) comprennent un type de contratqui permet l’association d’opérationsde construction et d’exploitation auprofit d’un unique cocontractant : la

L’émergence des contrats de partenariat

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En effet, aux termes de l’article 10 duCode des marchés publics issu du décretn° 2004-15 du 7 janvier 2004 portantCode des marchés publics :

“(…) Pour les marchés ayant à la foispour objet la construction et l’exploita-tion ou la maintenance d’un ouvrage, sil’acheteur public choisit de recourir à unmarché alloti, la construction fait obliga-toirement l’objet d’un lot séparé. S’ilchoisit de recourir à un marché global,celui-ci fait obligatoirement apparaître,de manière séparée, les prix respectifsde la construction et de l’exploitation oude la maintenance. La rémunération desprestations d’exploitation ou de mainte-nance ne peut en aucun cas contribuerau paiement de la construction”.

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concession. En ce sens, la concessionconstitue bien un type original de PPP.En atteste le cas de la concession pourle financement, la conception, l’ex-ploitation et l’entretien du viaduc deMillau, d’une durée de 78 ans, totale-ment préfinancée par le concession-naire (la Compagnie Eiffage), encontrepartie d’une rémunération surles péages directement perçus auprèsdes usagers. Cependant, la concessionse présente sur le mode d’une alterna-tive limitative : elle ne peut êtreconclue que sur le fondement d’unservice public dont la gestion est délé-gable.

En effet, la délégation de servicepublic, contrat par lequel une per-sonne morale de droit public confie lagestion d’un service public dont elle ala responsabilité à un délégatairepublic ou privé, rémunéré substan-tiellement en fonction des résultats del’exploitation (article 3 de la loiMURCEF – loi n° 2001-1168 du 11décembre 2001 portant mesuresurgentes de réformes à caractère éco-nomique et financier –), a pour objetd’associer le cocontractant de l’admi-nistration à l’exécution même d’unservice public.

Pour que l’on puisse se situer dans lecadre du montage de la délégation deservice public, il faut donc à la fois :

– qu’une activité de service public soitidentifiable ;

– que sa gestion soit effectivementdélégable et déléguée au cocontrac-tant de l’administration.

La concession constitue une formeparticulière de DSP, étant préciséqu’elle seule permet (par contraste àl’affermage et la régie intéressée), deconfier la construction et l’exploita-tion d’un ouvrage ou d’une infrastruc-ture à un opérateur privé. Mais obéis-sant à la définition de la DSP, elle ne

peut porter que sur un service publicdélégable.

La difficulté d’associer financementprivé et paiement public étalé surtoute la durée du contrat

D’une part, le droit des contratspublics français constitue une entraveau développement viable de PPP car ilrepose sur des modèles contractuels“purs”.

Les modèles MP et DSP sont en effetdes modèles caractérisés par une cer-taine rigidité. L’association de cesdeux modèles par la pratique compor-te inévitablement un risque de requa-lification du contrat (en raison de laspécificité des règles de passation pro-pre à chaque contrat, toute requalifi-cation est de nature à rendre illégale ladécision d’attribution du contrat).Cette caractéristique rend impossiblela combinaison d’une subventionpublique importante et d’un finance-ment privé.

D’autre part, les règles de paiement duprix en matière de marché public sontcaractérisées par une rigidité qui nuitaux objectifs budgétaires et fiscauxdes collectivités publiques. Elles ren-dent en effet impossible un étalementdes paiements dans le temps, vu lestermes de l’article 94 du Code desmarchés publics qui dispose que : “Estinterdite l’insertion dans un marché detoute clause de paiement différé”. Lesmarchés publics sont donc porteursd’une rigidité importante au planfinancier : l’interdiction du paiementdifféré aggrave la situation de déficitspublics des collectivités publiques,pourtant astreintes aux objectifs dupacte de stabilité.

Enfin, seule la délégation de servicepublic (et en particulier en son sein laconcession) permet d’instaurer unerelation contractuelle de longue durée(environ 20 ans). À cet égard, la DSP,

Chapitre Premier

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aux termes de la loi, doit être d’unedurée suffisante pour permettrel’amortissement des investissementsréalisés par le délégataire, même sicette durée pour un ensemble impor-tant d’opérations doit en tout état decause être limitée à 20 ans : la loin° 95-101 du 2 févier 1995 relativeau renforcement de la protection del’environnement, dite “loi Barnier”,en ce qui concerne les secteurs del’eau potable, du traitement et de l’in-cinération des déchets, prévoit queles délégations de service public nepeuvent avoir une durée supérieure à20 ans sauf autorisation circonstan-ciée du trésorier payeur général. Àl’inverse, les marchés publics sontgénéralement de très courte durée(environ 2 à 3 ans).

Les difficultés dans la mise en placed’un cadre juridique sécurisé

D’abord, la solidité de la qualificationdu contrat pose problème dans lecadre des marchés publics (MP) et desdélégations de service public (DSP),car le distinguo entre ces deux formescontractuelles s’opère par le prismed’une notion extrêmement vague :une rémunération “substantiellementliée aux résultats de l’exploitation”pour la DSP, par opposition à unerémunération par un prix pour le MP.

Ce critère distinctif est potentiellementrisqué car imprécis : on a pu le cons-tater lorsque la Commission euro-péenne a critiqué la qualification enconcession du contrat portant sur laconstruction du Stade de France, esti-mant qu’il s’agissait en définitive d’unmarché public. L’exemple des contratsde mobiliers urbains, in fine considé-rés par le juge administratif commedes marchés publics dans la mesureoù les abandons de recettes publicitai-res s’analysent en un prix, présentaitaussi toutes les caractéristiques del’incertitude de la qualification.

Ensuite, qu’il s’agisse d’un MP oud’une DSP, les principes de l’exécu-tion du contrat en cas de survenued’une difficulté sont difficiles à cernerpour des opérateurs privés, et en par-ticulier étrangers. Alors que le droitanglo-saxon confère aux stipulationscontractuelles une importance déter-minante, dans une logique de prévisi-bilité renforcée, le droit public fran-çais régit les difficultés d’exécutiondes contrats par un ensemble de théo-ries jurisprudentielles qui complètentou suppléent les clauses stipulées parles parties, connues des seuls spécia-listes du droit administratif français(théories du fait du prince, des sujé-tions imprévues et de l’imprévision).

Enfin, le droit des contrats administra-tifs gagnerait à présenter davantage degaranties aux investisseurs privés. Àcet égard, peuvent être un obstacle àl’investissement privé :

– le pouvoir de résiliation unilatérale,source d’inquiétude pour les opéra-teurs privés ;

– dans le cas particulier d’opérationssur le domaine public, la possibilitérestreinte de conférer des droits réelsà l’occupant, ainsi que les contraintesencadrant les cessions de créances etles cessions partielles de contrat.

Un recours à l’expertise privée rendudifficile

À l’exception notable de la conces-sion, le droit des ouvrages publicsfrançais est assez rebelle à la maîtrised’ouvrage privée et encore davantageau fait de confier la maîtrise d’ouvra-ge publique à une personne privée.

En droit privé, le maître d’ouvrage estla personne pour le compte de laquel-le les travaux ou ouvrages sont exé-cutés (article 1787 s. du Code civil).

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En droit public, l’article 2 de la loiMOP dispose que “Le maître d’ouvra-ge est la personne morale (…) pourlaquelle l’ouvrage est construit.Responsable principal de l’ouvrage, ilremplit dans ce rôle une fonction d’in-térêt général dont il ne peut se démet-tre”.

Il résulte de ces textes qu’il existe unprincipe de liaison entre, d’une part,la qualité de maître d’ouvrage, et,d’autre part, la qualité de personnepour laquelle l’ouvrage est construit.La loi MOP telle qu’elle est interpré-tée en jurisprudence pose trois condi-tions cumulatives pour qu’une per-sonne publique soit le maître d’ouvra-ge. Si une seule de ces trois condi-

tions fait défaut, une maîtrise d’ouvra-ge privée est envisageable. Ces condi-tions cumulatives sont les suivantes :

– la construction d’un immeubleentièrement destiné à devenir la pro-priété de la personne publique ;

– un transfert de la propriété de l’ou-vrage dès son achèvement ;

– la direction technique des travauxpar la personne publique.

La satisfaction de ces conditions, pla-çant l’opération dans le cadre de lamaîtrise d’ouvrage publique, excluttout transfert de la maîtrise d’ouvrageau secteur privé. Les personnespubliques dans ce contexte ne peu-

Chapitre Premier

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La domanialité publique est définie dans la jurisprudencepar la conjonction de deux éléments

1. Un élément organique : une personne publique propriétaire du bien ;

2. Un élément matériel : l’affectation du bien à une utilité publique (c’est-à-dire l’affec-tation du bien : soit à l’usage direct du public, soit à un service public – sous réserve,dans ce dernier cas, d’un aménagement spécial dénotant de l’effective affectation auservice public –).

Au fil du temps, la jurisprudence du Conseil d’État a rendu largement inopérant le cri-tère correctif de l’aménagement spécial, tout en développant très largement la notionde service public, ce qui a favorisé une extension importante du périmètre de la doma-nialité publique, soumise à un régime contraignant. En effet, le domaine public est sou-mis au principe d’inaliénabilité, qui implique que les biens du domaine public ne puis-sent être cédés, ni grevés de droits réels (en particulier ils ne peuvent faire l’objet d’hy-pothèque, ni de crédit-bail), ni expropriés ni saisis.

On pouvait alors penser qu’il était toujours loisible aux collectivités territoriales dedéclasser un terrain nu, y faire construire un ouvrage, puis l’intégrer dans le domainepublic en phase d’exploitation du service public. Cette option a été clairement rejetéepar le Conseil d’État, dans un arrêt de principe de 1985 qui a fait naître ce que la doc-trine nomme la “domanialité publique virtuelle” (CE, 6 mai 1985, Eurolat, n° 41589).Aux termes de cet arrêt, dès lors qu’un terrain du domaine privé d’une collectivitépublique fait l’objet de travaux de construction tendant à édifier un ouvrage destiné àune utilité publique, ce terrain doit par anticipation, dès le commencement des travaux,être soumis aux contraintes résultant du régime de la domanialité publique. Cette posi-tion a été reprise dans un avis du Conseil d’État du 31 janvier 1995 : “L’appartenanced’un terrain nu qui est la propriété d’une personne publique au domaine public ne seconcrétise que dans la mesure où ce terrain reçoit une affectation à l’usage direct dupublic ou à un service public moyennant des aménagements spéciaux. Le fait de pré-voir de façon certaine l’une ou l’autre de ces destinations implique cependant que leterrain est soumis dès ce moment aux principes de la domanialité publique”.

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vent donc pas bénéficier d’uneconduite des opérations enrichie del’expertise du secteur privé, d’où leurrecours fréquent à la vente en étatfutur d’achèvement (VEFA), qui permetde lever de tels obstacles (cf. 1.3.).

1.3. Un développementdiffus de pratiquesd’évitement des contraintes

Trois types de pratiques existent :

– celles qui ont été rejetées tant par lajurisprudence que par la loi : les mar-chés d’entreprise de travaux publics(METP) ;

– celles qui se sont développées parune lecture “en creux” du droit admi-nistratif : la vente en état futur d’achè-vement (VEFA) ;

– celles qui ont été avalisées par lelégislateur et qui se sont traduites parl’apparition de nouveaux contrats : lesmontages fondés sur les baux emphy-téotiques administratifs (BEA) et sur lesautorisations d’occupation temporaire(AOT), ainsi que des formules équiva-lentes adaptées à certains secteurs.

Une pratique condamnée : les mar-chés d’entreprise de travaux publics(METP)

Sont en cause des contrats créés par lapratique dans les années 1960-1970que la jurisprudence a d’abord admis,pour les condamner à la fin desannées 1990.

Dans un premier temps, les METP ren-voient à une catégorie sui generisconsacrée et validée par la jurispru-dence. Sont en cause des contrats delongue durée, ayant pour objet deconfier à un cocontractant unique laconstruction d’un ouvrage et sonexploitation, moyennant une rémuné-ration forfaitaire versée de manière

fractionnée par la collectivité publi-que. Ni marchés publics ni déléga-tions de service public, tout en asso-ciant des éléments de définition de cesdeux instruments, les METP vont fairel’objet d’un usage important par lespersonnes publiques (et en particulierles collectivités locales, qui y voientun moyen de financer dans des délaisbrefs des équipements coûteux, sansrecourir à l’emprunt et sans augmenta-tion brutale de la pression fiscale).

Cependant, à partir du moment où lajurisprudence administrative va jugerproblématique l’absence de fonde-ment juridique de ces contrats, elle vales rattacher aux marchés publics, etpartant, les considérer irréguliers, dèslors qu’ils contreviennent à l’interdic-tion du paiement différé et aux règlesd’allotissement (CE, 8 février 1999,préfet des Bouches-du-Rhône c/com-mune de La Ciotat, n° 150931). LesMETP ont encore été sujets à un cer-tain nombre de critiques d’ordre poli-tique : ont été décriés leur opacitéfinancière ainsi que le surcoût présen-té par le financement privé par rapportà l’emprunt public.

Le législateur aurait pu supprimer cetteillégalité en institutionnalisant lesMETP mais cela ne sera pas entrepris,dans un contexte de dévoiement de lapratique des METP : au fil du temps, sesont développés des “faux METP”, àsavoir des marchés bénéficiant desavantages du METP sans pour autantconfier au cocontractant l’exploitationd’un ouvrage, mais seulement sa cons-truction et/ou sa maintenance.

Une pratique d’évitement descontraintes : la vente en état futurd’achèvement (VEFA)

Les collectivités publiques vont setourner vers la maîtrise d’ouvrage pri-vée en imaginant des montagescontractuels faisant échec à l’un ou

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l’autre des trois critères de définitionde la maîtrise d’ouvrage publique.

D’abord, les personnes publiques vontpouvoir faire échec à la premièrecondition – celle de la constructiond’un immeuble entièrement destiné àdevenir la propriété de la personnepublique – en faisant construire desimmeubles accueillant à la fois desouvrages publics et des bureaux privés(d’où la multiplication, par exemple,des crèches en rez-de-chaussée dansles villes nouvelles).

Ensuite, aux fins de réaliser le transfertde la propriété de l’ouvrage dès sonachèvement, les dispositifs de typecrédit-bail ou location avec optiond’achat (LOA) diffèrent l’entrée enjouissance de la propriété pour la per-sonne publique (cf. 2).

Enfin, pour déroger à la condition rela-tive à la direction technique de la per-sonne publique, la formalisation duprojet peut être confiée – au moins enapparence – au partenaire privé.

Ces stratégies d’évitement de la maîtri-se d’ouvrage publique ne sont pasanodines. Elles permettent :

– de sortir du périmètre d’applicationdu Code des marchés publics ;

– de bénéficier du savoir-faire du sec-teur privé dans la direction techniquedes travaux.

L’exemple le plus emblématique de lastratégie d’évitement de la loi MOP etdu Code des marchés publics par lespersonnes publiques s’illustre dansleur recours à la vente en état futurd’achèvement (VEFA).

Montage issu du droit privé, la VEFAconstitue un contrat de vente, parlequel une personne achète immé-diatement un immeuble non construit,à charge pour le vendeur de le

construire et d’en remettre la propriétéà une certaine date, en tout cas posté-rieure à l’achèvement des travaux.L’acquéreur paie par tranches. Lecontrat prévoit une somme, des levéeset remises de fonds et éventuellementdes garanties hypothécaires.

La jurisprudence a admis l’utilisationdu procédé VEFA pour les personnespubliques, sous réserve toutefois durespect de certaines conditions.

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Chapitre Premier

• Aux termes de l’article 1601-3 duCode civil, “La vente en l’état futur d’a-chèvement est le contrat par lequel levendeur transfère immédiatement à l’ac-quéreur ses droits sur le sol ainsi que lapropriété des constructions existantes.Les ouvrages à venir deviennent la pro-priété de l’acquéreur au fur et à mesurede leur exécution ; l’acquéreur est tenud’en payer le prix à mesure de l’avance-ment des travaux. Le vendeur conserveles pouvoirs de maître de l’ouvrage jus-qu’à la réception des travaux”.

• Suivant l’arrêt CE du 8 février 1991,Région Midi-Pyrénées c/Syndicat del’architecture de la Haute-Garonne etautres (n° 57679), “si aucune disposi-tion législative n’interdit aux collecti-vités publiques de procéder à l’acquisi-tion de biens immobiliers en utilisant lecontrat de vente en l’état futur d’achève-ment prévu à l’article 1601-3 du codecivil, elles ne sauraient légalement avoirrecours à ce contrat de vente de droitprivé, dans lequel l’acheteur n’exerceaucune des responsabilités du maître del’ouvrage et qui échappe tant aux règlesde passation, notamment aux règles deconcurrence, prévues par le code desmarchés, qu’au régime d’exécution desmarchés de travaux publics, lorsque,comme en l’espèce, l’objet de l’opéra-tion est la construction même pour lecompte de la collectivité d’un immeubleentièrement destiné à devenir sa pro-priété et conçu en fonction de sesbesoins propres”.

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L’émergence des contrats de partenariat

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De cette jurisprudence, il résulte quela VEFA est un marché public déguisé,et qu’elle est en conséquence illicite,lorsque l’administration l’utilise pour(conditions cumulatives) : (i) laconstruction même d’un immeublepour son propre compte, (ii) conçu enfonction de ses besoins propres, (iii)l’immeuble étant entièrement destinéà devenir sa propriété.

Les inconvénients de la VEFA : limita-tion des opérations concernées

La VEFA n’est pas concevable pourl’immobilier spécifiquement public(ex. : une médiathèque) : en effet, dansce cas, comment l’administrationpourrait-elle prétendre qu’elle ne faitque tirer parti d’une opération privée ?

Les avantages de la VEFA

– Un procédé simple : avocat + no-taire.

– Un paiement progressif (ce qui per-met à la collectivité publique d’équili-brer sa trésorerie et de supporter unmoindre effort financier du fait del’échelonnement).

– Une maîtrise d’ouvrage privée, etpartant, absence de soumission auxobligations de publicité et de mise enconcurrence prévues par le Code desmarchés publics.

La VEFA constitue un montage intéres-sant pour tout bâtiment qui se présen-te sous la forme d’un immeublepublic sans singularité. Il peut mêmes’agir d’un commissariat de police enrez-de-chaussée de bureaux (Conseild’État, Avis des sections de l’Intérieuret des Travaux publics réunies, 31 jan-vier 1995, n° 356960).

•• Les pratiques permises par la loi

Face aux contraintes, le législateur,prenant acte de l’impasse dans laquel-

le se trouvaient les collectivitéspubliques pour présenter à leurs parte-naires privés des conditions contrac-tuelles adaptées à la vie des affaires, acréé des montages contractuels déro-gatoires à la loi MOP et aux principesrégissant le domaine public.

Domanialité publique : les mesures dedéclassement global et l’émergence demontages contractuels dérogatoires

La jurisprudence “Eurolat” a immédia-tement été perçue comme probléma-tique. Plus précisément, avec lajurisprudence “Eurolat”, le champ dela domanialité publique s’étend consi-dérablement, puisqu’il s’agit d’alignerles contraintes de la domanialitépublique sur des terrains qui ne sontpas encore affectés à une utilitépublique, mais qui vont l’être demanière certaine.

C’est dans ce contexte que le législa-teur va intervenir en vue de lever cer-tains obstacles.

L’intervention législative va permettred’opérer le déclassement global devastes ensembles domaniaux pourfaciliter la gestion d’entreprisespubliques (La Poste, France Télécom –avant privatisation –, projet de loi encours pour ADP) ou de biens immobi-liers à l’usage de bureau appartenant àl’État ou à ses établissements publics(cf. ordonnance n° 2004-825 du 19août 2004 modifiant l’article 2 duCode du domaine de l’État pour lesintégrer dans le domaine privé despersonnes publiques concernées).

En matière contractuelle, la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 crée le bailemphytéotique administratif (BEA), quiconcerne l’échelon local et la loin° 94-631du 25 juillet 1994 complé-tant le Code du domaine de l’État etrelative à la constitution de droits réelssur le domaine public crée l’autorisa-

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tion d’occupation temporaire grevéede droits réels (AOT), qui concernel’échelon national (cf. 2.1).

Par suite, vont intervenir d’autres tex-tes qui vont avoir pour effet d’étendreles hypothèses de constitution dedroits réels sur le domaine publicdans des cas qui n’entraient pas dansles prévisions des lois de 1988 et de1994 (cf. 2.2.).

Loi MOP : la création de “déroga-tions à la dérogation”

Alors que la loi MOP limitait la déro-gation des marchés de conception-réalisation à des hypothèses jugéestrop restrictives, cet obstacle va êtrecontourné par la création de “déroga-tions à la dérogation”. Vont être visésdes secteurs sensibles, où la nécessitéde développer le parc immobilier estd’urgence.

Ainsi en est-il des secteurs de la sécu-rité intérieure, de la justice, desarmées, de la défense nationale et dela santé. Des dispositifs sectorielsvont généraliser le modus operandide la conception-réalisation dans descas où pourtant, aucun motif d’ordretechnique ne pouvait justifier sonrecours. En effet, les textes dont il estquestion ont cela de commun qu’ilspermettent de passer un marché por-tant à la fois sur la conception, laréalisation, l’entretien et la mainte-nance de bâtiments ou d’équipe-ments (ou sur une combinaison deces différentes missions), au lieu depasser n + 1 marchés pour chacunede ces missions.

2. Présentation comparativedes contrats publics

Antérieurement à l’institution descontrats de partenariat, le recours despersonnes publiques au secteur privé

pour l’exécution de services ou laréalisation d’ouvrages était envisagea-ble au moyen de divers montagescontractuels à caractère général (2.1.)ou sectoriel (2.2.), qui aujourd’huidemeurent des voies alternatives auxnouveaux partenariats public-privé.

2.1. Les instruments généraux

Les instruments généraux sont dedeux types.

D’une part, il s’agit de contrats quisont enracinés dans le droit françaisdepuis plusieurs siècles : les déléga-tions de service public (DSP) et lesmarchés publics (MP). Encore faut-ilpréciser que seules les DSP instituentune relation de partenariat à la foisparce qu’elles confèrent souvent unemission globale aux opérateurs privésmais aussi parce qu’elles transfèrentune responsabilité dévolue à la per-sonne publique alors que le titulaired’un marché public assure la founi-ture de moyens pour le service publicet n’est pas investi d’une missionglobale.

D’autre part, on observe des schémascontractuels de création récente (findes années 1980, début des années1990) qui remettent en cause un cer-tain nombre de principes jusqu’alorsparfaitement ancrés dans le droit descontrats publics : il s’agit de montagesfondés sur les baux emphytéotiquesadministratifs (BEA) et sur les autorisa-tions d’occupation temporaire dudomaine public (AOT).

Les conventions de délégation de ser-vice public (DSP)

•• Les inconvénients

Outre le fait que la délégation de ser-vice public tombe – comme le mar-ché public – sous le coup du délit defavoritisme (encore dit “délit d’avan-

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tage injustifié”, cf. article 432-14 duCode pénal), ses inconvénients princi-paux résident :

– dans la restriction de son objet à unservice public délégable ;

– dans une définition fondée sur larémunération du cocontractant quidoit être substantiellement liée auxrésultats d’exploitation, critère suscep-tible d’appréciation et, par suite, d’in-sécurité juridique.

•• Les avantages pour la collectivitépublique

Une forme particulière de DSP – laconcession – permet de confier laconstruction d’une infrastructurepublique et la gestion d’un servicepublic par un même contrat à unmême cocontractant (le concession-naire), qui se voit transférer la maîtrised’ouvrage. L’affermage se distingue dela concession par la fourniture deséquipements par la collectivité, d’où,en principe, une maîtrise d’ouvragepublique suivie d’une exploitationprivée.

La concession est un contrat de longuedurée (liée à l’amortissement desinvestissements réalisés par le conces-sionnaire, elle est limitée à 20 ansdans les secteurs de l’eau, de l’assai-nissement et des déchets), dans lequella responsabilité juridique et lesrisques de gestion sont supportés parle cocontractant, qui bénéficie toute-fois de deux séries de protection :(i) une exclusivité dans la gestion duservice – objet du contrat, et (ii) undroit à l’équilibre économique pre-nant la forme d’une indemnisationlorsque survient un bouleversement denature à remettre en cause l’économiegénérale du contrat, que cet événe-ment perturbateur provienne du fait dela personne publique (théorie du faitdu prince) ou de circonstances impré-visibles au moment de la conclusion

du contrat et étrangères à la volontédes parties (théorie de l’imprévision).

•• Secteurs concernés par le montage

La distribution de l’eau en France esttrès majoritairement assurée en ges-tion déléguée, montage qui concerne75 % du nombre d’usagers desservis.Trois acteurs majeurs sur le marché del’eau : la Lyonnaise des Eaux, VeoliaEnvironnement (via sa filialeCompagnie générale des Eaux), et laSAUR (ex-filiale du groupe Bouygues).

L’assainissement et la gestion desdéchets font l’objet d’affermages leplus souvent.

En revanche, la concession va typi-quement intervenir dans la construc-tion de parcs de stationnement oud’autoroutes, dans la mesure où leconcessionnaire va pouvoir se rému-nérer par les péages et redevancespour service rendu, disposant le plussouvent d’un droit d’exclusivité luigarantissant des recettes suffisantespour compenser les dépenses qu’ilengage, dans l’hypothèse où il gèreconvenablement le service et où lerisque de la demande n’est pas trophandicapant. Globalement, le princi-pe est que la concession trouve sondomaine d’intervention de prédilec-tion dans des activités générant uneexploitation rémunérative. Le caséchéant, ce montage n’est pas viablepour le concessionnaire, attendu lecritère obligatoire de la rémunérationsubstantiellement liée aux résultats del’exploitation (d’où la quasi-absencede DSP dans le secteur des servicespublics sociaux).

Les marchés publics (MP)

•• Les inconvénients

La procédure d’attribution des mar-chés publics est indéniablement per-çue comme la plus contraignante.

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L’émergence des contrats de partenariat

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Malgré un effort de simplification, lenouveau Code introduit la notion demarchés passés selon une “procédureadaptée” en lieu et place de la notionde “sans formalités préalables”, en cequi concerne les marchés dont les prixsont inférieurs aux seuils fixés par leCode (ex. pour les marchés de tra-vaux : 230 000 € HT). Dès le premiereuro dépensé, les marchés sont sou-mis à un certain nombre de principesénoncés par l’article Premier du Code(liberté d’accès à la commandepublique, égalité de traitement descandidats, transparence des procédu-res, définition préalable des besoinspar l’acheteur public, respect des obli-gations de publicité et de mise enconcurrence et choix de l’offre écono-miquement la plus avantageuse).

En outre, les marchés sont des contratsd’assez courte durée, et qui en princi-pe ne peuvent pas concerner une opé-ration globale – sauf dispositifs secto-riels (cf. 2.2.) –. Autrement dit, sil’objet du marché est multiple, il fautpasser autant de marchés qu’il y a decatégories de compétences requises.

Enfin, le marché public tombe sous lecoup du délit de favoritisme.

•• Les avantages

Contrairement à la délégation de ser-vice public, il permet à l’administra-tion de répondre à ses besoins pro-pres, en matière de fournitures, detravaux et de services.

Étant donné que la personne publiquedemeure le maître d’ouvrage, et quece montage sépare la conception de laréalisation, le marché public favorisela qualité des études préalables. Lesdeux aspects sont dissociés : si uneopération implique de la conceptionpuis de la réalisation, elle fera l’objetde deux marchés successifs (un mar-

ché avec un maître d’œuvre puis unmarché avec une entreprise de BTP).

•• Opérations concernées par le mon-tage

Elles sont diverses et relativement pré-cises du fait du principe du non-recours aux marchés globaux. Parexemple :

– marchés de fournitures : fourniturede produits pharmaceutiques pour unhôpital public ;

– marchés de services : études de fai-sabilité, appel à des géomètres pourrelevés topographiques ;

– marchés de travaux : installationd’un réseau de télécommunications.

Les baux emphytéotiques adminis-tratifs (BEA)

Le BEA a été créé par la loi n° 88-13du 5 janvier 1988, codifiée aux arti-cles L. 1311-1 et suivants du Codegénéral des collectivités territoriales(CGCT).

Seuls sont habilités à passer un BEA :

– les collectivités territoriales,

– les établissements publics locaux,

– les groupements de collectivités ter-ritoriales.

Il s’agit d’un contrat administratifinspiré du droit rural qui permet à unepersonne publique de faire financerdes équipements publics par une per-sonne privée – le preneur –, maîtred’ouvrage de l’opération (d’où déroga-tion à la loi MOP). À cette fin, la loi de1988 permet de déroger partiellementaux principes régissant le domainepublic : inaliénabilité, imprescriptibili-té, insaisissabilité et incessibilité. Eneffet, le mécanisme du BEA confère àson titulaire – le preneur – un droitréel pouvant faire l’objet d’hypo-

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thèque et susceptible d’être consentipendant une durée de 18 à 99 ans.

Mais le recours au BEA est étroitementconditionné par la sphère de compé-tences des collectivités locales. Cesdernières ne peuvent s’engager danscette voie que pour des immeublesdont elles sont propriétaires et seule-ment aux fins de satisfaire un intérêtgénéral ou immobilier entrant dansleur domaine de compétences. Il enrésulte, a contrario et en pratique,qu’une collectivité ne saurait en aucuncas, par exemple, conclure un BEA envue de la construction d’une universitésur ses dépendances domaniales, dansla mesure où, se faisant, elle empiéte-rait sur les compétences de l’État. Deplus, si le dispositif BEA est en principeopérationnel sur le domaine public, ilest néanmoins exclu pour toute dépen-dance du domaine public relevant duchamp d’application des contraven-tions de voirie (article L. 1311-2 duCGCT). Cette exclusion vise toutes lesdépendances du domaine public flu-vial, aéroportuaire et routier, ainsi queles voies ferrées locales.

En conférant des droits réels au pre-neur, le BEA permet la cession etl’hypothèque de ces droits, ce qui faci-lite le financement par des établisse-ments de crédit.

Cette modalité de droit commun a tou-tefois été adaptée dans le but d’assurerune protection efficace de l’affectationdu domaine public. En effet, l’hypo-thèque du droit réel du preneur ne peutêtre accordée que :

– moyennant l’agrément de l’établisse-ment de crédit par la collectivité terri-toriale bailleresse ;

– et à la condition que les empruntsainsi garantis aient pour seul objet definancer la réalisation ou l’améliora-tion des ouvrages situés sur la dépen-dance louée.

Au surplus, l’article L. 1311-3 préciseque la collectivité territoriale (ou l’éta-blissement public local, ou l’EPCI) a lafaculté de se substituer au preneurdans la charge des emprunts en rési-liant ou en modifiant le bail “et, le caséchéant, les conventions non détacha-bles”. L’ensemble contractuel constituépar le BEA et la convention non déta-chable permet au preneur à bail deconfier l’exploitation de l’ouvrageconstruit (ex. : un incinérateur) à unesociété d’exploitation ainsi investied’une mission de service public.Cependant, la convention non déta-chable ne doit pas s’analyser en uneDSP, auquel cas le risque d’annulationcontentieuse s’applique à l’ensemblecontractuel : il s’agirait en effet d’uneDSP conclue sans application des pro-cédures de passation requises, et par-tant, entachée de nullité.

•• Les inconvénients du BEA

Outre le fait que le montage BEAexclut une catégorie importante d’opé-rations (champ des contraventions devoirie), surtout :

L’émergence des contrats de partenariat

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La notion d’hypothèqueen droit des sûretés

et des garanties du crédit

En droit des sûretés et des garanties ducrédit, on distingue les sûretés personnel-les des sûretés réelles, selon que le créan-cier dispose d’un droit contre une person-ne autre que le débiteur principal, ou d’undroit sur une chose dont le débiteur estpropriétaire.

Au titre des sûretés réelles, un mécanismeessentiel : l’hypothèque. Ce mécanismeprésente de nombreux avantages. L’hypo-thèque a pour assiette le droit de proprié-té portant sur un immeuble (bâti ou nonbâti). Elle permet au créancier de prêterdes sommes d’argent importantes tout enayant la certitude de disposer de la possi-bilité, le cas échéant, en cas d’insolvabili-té du débiteur, de se rémunérer par lavente de l’immeuble.

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– il encourt un risque de requalifica-tion en DSP ;

– et le cas échéant, lorsque la conven-tion non détachable d’organisationdu service public n’est pas requali-fiée, c’est un dispositif peu favorable àun contrôle de la pérennité de l’opé-ration par la collectivité publique (illui sera difficile d’imposer des obliga-tions de service car le motif impulsifdu BEA consiste simplement àconclure un contrat pour octroyer unavantage contre un programme d’in-térêt général).

•• Les avantages du BEA

C’est un contrat de longue durée (de18 à 99 ans), qui permet de faciliter lefinancement privé grâce aux droitsreconnus à l’emphytéote sur ledomaine public.

Les autorisations d’occupation tem-poraire (AOT)

L’AOT constitue le pendant pour l’Étatet ses établissements publics du BEApour les collectivités territoriales,leurs groupements et leurs établisse-ments publics. Ce mécanisme a étéintroduit par la loi n° 94-631 du 25juillet 1994 complétant le Code dudomaine de l’État et relative à laconstitution de droits réels sur ledomaine public, codifiée aux articlesL. 34-1 et suivants du Code dudomaine de l’État. Il résulte des ter-mes de l’article L. 34-1 du Code dudomaine de l’État que les personnespubliques à l’échelon national peu-vent octroyer des autorisationsd’occupation du domaine, soit unila-téralement, soit par voie contrac-tuelle, assorties de droits réels au pro-fit de leur bénéficiaire.

Comme dans le mécanisme BEA,l’occupant est maître d’ouvrage :

– parce qu’il est propriétaire jusqu’auterme du contrat des ouvrages qu’ilédifie ;

– parce qu’il assure la direction tech-nique des actions de construction.

Et à l’instar du BEA, l’AOT permet deconfier aux prêteurs des garanties deleur financement sous forme d’hypo-thèques. Ces dernières, cependant, nedoivent pas porter atteinte à l’affecta-tion du domaine et doivent avoir pourseul objet de permettre le finance-ment d’opérations immobilières pré-vues par l’AOT.

En revanche, contrairement au BEA,l’AOT permet la conclusion par sontitulaire de contrats de crédit-bail por-tant sur les ouvrages, constructions etinstallations qu’il réalise.

L’article L. 34-7 du Code du domainede l’État vise cette modalité de finan-cement qui présente en particulierl’avantage d’être “déconsolidant”pour la collectivité. Ainsi, le titulairede l’AOT peut, sous réserve de l’agré-ment de l’État, conclure des contratsde crédit-bail portant sur les ouvra-ges, constructions et installations qu’ilréalise.

•• Les inconvénients de l’AOT

Il est impossible de recourir au crédit-bail pour les ouvrages, constructionset installations :

– affectés à un service public et amé-nagé à cet effet, (ou)

Chapitre Premier

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•• Le crédit-bail est un mécanisme prévuaux articles L. 313-7 à L. 313-11 du Codemonétaire et financier. Il s’agit d’uneconvention par laquelle un établisse-ment de crédit (le bailleur) met à ladisposition d’un client (le preneur),moyennant le versement d’un loyer, desbiens d’équipement ou du matérield’outillage ou un immeuble à usage pro-fessionnel dont cet établissement restepropriétaire, sachant que le preneurpeut, en fin de bail, soit relouer, soit res-tituer, soit racheter par un prix fixé àl’origine ces biens.

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– affectés directement à l’usage dupublic, (ou encore)

– réalisés pour une personne publiquedans un but d’intérêt général.

Autrement dit, le recours au crédit-bail dans le cadre de l’article L. 34-7est caractérisé par un périmètre extrê-mement restreint.

Par ailleurs, le domaine public naturelest exclu du dispositif de constitutionde droits réels (article L. 34-9 du Codedu domaine de l’État).

•• Les avantages de l’AOT

L’AOT peut être accordée pour unetrès longue durée pouvant aller jus-qu’à 70 ans.

De plus, l’AOT a un champ d’applica-tion plus large que celui du BEA : lespermissions de voirie sont intégréesdans le dispositif constitutif de droitsréels sur le domaine public de l’État.

Enfin, le dispositif AOT a été interpré-té par le Conseil d’État comme sus-ceptible d’être combiné avec unetechnique de financement particuliè-rement efficace : la location avecoption d’achat (LOA). Dans son Avisdes sections de l’Intérieur et desTravaux publics réunies en date du 31janvier 1995 (n° 356960), le Conseild’État interprète la loi n° 94-631 du25 juillet 1994 comme ne s’opposantpas à ce qu’il soit fait usage du droitréel conféré par l’AOT “en vue de laréalisation d’un ouvrage qui seraitmis, par voie de bail, à la dispositionde la personne gestionnaire du domai-ne de l’État”. Cette modalité permetun paiement différé de l’ouvragepublic tout en respectant l’affectationd’utilité publique, dans la mesure oùle contrat de location comporte uneclause d’option d’achat susceptibled’être levée par l’État à tout momentde l’exécution du contrat. Ce montage

a notamment fait l’objet d’une appli-cation pour la construction et la ges-tion de l’hôtel de police deStrasbourg : une AOT a été octroyéepar l’État à une société civile immobi-lière, assortie d’une conventiond’occupation d’un immeuble bâti auprofit de l’État, reposant sur une loca-tion avec option d’achat (LOA),contrats auxquels s’est ajouté un mar-ché de conception-réalisation. Cemontage a permis de faire assurer lefinancement, la conception, la cons-truction et la gestion technique del’hôtel de police. Cependant, on a puobserver que ce cadre juridique avaitété jugé peu sécurisant par les inves-tisseurs, notamment étrangers, qui à laréflexion, ont refusé de s’y engager.

2.2. Les instruments sectoriels

Les BEA dérogatoires : LOPSI/LOPJ etordonnance BEH (baux emphytéo-tiques hospitaliers)

•• Domaines concernés

Par dérogation à l’économie généralede la loi sur les BEA et aux disposi-tions de la loi MOP, il existe depuisquelques années des BEA sectorielsqui se caractérisent par un régimejuridique nettement plus favorableaux investissements privés et qui per-mettent la conclusion de marchés glo-baux.

Les domaines concernés sont :

– la justice, la police et la gendarme-rie nationale (loi n° 2002-1094 du 29août 2002 d’orientation et de pro-grammation pour la sécurité intérieu-re dite LOPSI et loi n° 2002-1138 du9 septembre 2002 d’orientation et deprogrammation pour la justice diteLOPJ) ;

– la santé publique (ordonnancen° 2003-850 du 4 septembre 2003portant simplification de l’organisa-

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tion et du fonctionnement du systèmede santé ainsi que des procédures decréation d’établissements ou de servi-ces sociaux ou médicaux-sociauxsoumis à autorisation dite ordonnanceBEH).

Aux termes de l’article L. 1311-2 duCGCT modifié par les lois et l’ordon-nance précitées, tout bien immobilierappartenant à une collectivité territo-riale peut faire l’objet d’un BEA envue de la réalisation d’une opérationd’intérêt général liée aux besoins de lajustice, de la police et de la gendar-merie nationales, ou d’un établisse-ment public de santé ou d’une struc-ture de coopération sanitaire dotée dela personnalité morale publique.

•• Innovations introduites par les BEAsecteurs spéciaux

Ces BEA secteurs spéciaux, d’unepart, réalisent une extension duchamp du droit commun des BEA et,d’autre part, sont dérogatoires à la loiMOP et au Code des marchés publics.

Sur l’extension du périmètre des BEA

D’abord, les opérations visées par lesBEA secteurs spéciaux, même si ellesentrent dans le champ des dépendan-ces dont les collectivités sont proprié-taires, sont destinées à mettre desimmeubles à la disposition de l’État.Ensuite, les BEA sectoriels autorisentla conclusion de contrats de crédit-bail sans restrictions liées auxcontraintes classiques de la domania-lité publique.

Sur la dérogation à la loi MOP et auCode des marchés publics

Ces contrats sont des marchés glo-baux, portant à la fois sur la concep-tion, la réalisation, l’entretien et lamaintenance d’ouvrages et d’équipe-ments publics.

•• Économie générale du BEH

Le bail emphytéotique hospitalier(BEH) comme tout BEA est caractérisépar une durée comprise entre 18 et 99ans. Il permet de déroger aux articles7 et 18 de la loi MOP, en prévoyant lapossibilité pour un établissementpublic de santé ou une structure decoopération sanitaire de passer unmarché portant à la fois sur la concep-tion, la réalisation, l’aménagement,l’entretien et la maintenance des bâti-ments et équipements nécessaires auservice public de la santé, ces diversesmissions pouvant être combinées par-tiellement.

Il s’agit donc d’un marché public glo-bal assorti d’un BEA dérogatoire, etqui est caractérisé par des procéduresde publicité et de mise en concur-rence simplifiées.

Les avantages du BEH sont nombreux :

– raccourcissement des procéduresd’attribution ;

– étalement des paiements sur unelongue période ;

Chapitre Premier

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•• L’article L. 1311-4-1 du CGCT, introduitpar la loi LOPSI et l’ordonnance BEH,dispose que “Jusqu’au 31 décembre2007, les collectivités territoriales et lesEPCI peuvent construire, y compris surles dépendances de leur domainepublic, acquérir ou rénover des bâti-ments destinés à être mis à la dispositionde l’État pour les besoins de la justice, de

la police ou de la gendarmerie nationa-les ou d’un établissement public desanté ou d’une structure de coopérationsanitaire dotée de la personnalité mora-le publique (…) Les constructions men-tionnées au présent article ainsi que cel-les qui sont réalisées dans le cadre decontrats de partenariat peuvent donnerlieu à la conclusion de contrats de cré-dit-bail. Dans ce cas, le contrat compor-te des clauses permettant de préserverles exigences du service public”.

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– délégation à un tiers unique de lamaîtrise d’ouvrage de projets immo-biliers importants ;

– externalisation à la carte (les opéra-tions dévolues au cocontractant peu-vent être choisies au sein d’une listeexhaustive conformément aux besoinsdes hôpitaux).

Une Mission nationale d’appui à l’in-vestissement hospitalier (la MAINH) aété instituée pour mettre à dispositiondes acteurs publics concernés unguide pour le choix et la mise enœuvre des modalités offertes par l’or-donnance BEH du 4 septembre 2003.

Partenariat public-privé sectoriel, ledispositif BEH connaît un grand suc-cès depuis sa première utilisation parle centre hospitalier universitaire(CHU) de Caen, qui a lancé le 8 mai2004 un appel à candidatures pourune extension de ses bâtiments pourun BEH d’une durée de 25 ans. Grâceau montage BEH, le CHU envisage uninvestissement total de 430 millionsd’euros, dont seulement 100 millionsd’euros seraient investis par le CHU àcourt terme (le restant de la sommepouvant être payé de manière diffé-rée, par des loyers versés mensuelle-ment par le jeu du bail emphytéo-tique). Le financement est favorisé parla possibilité du recours au crédit-bail.

•• Économie générale du BEA –LOPSI/LOPJ

La LOPSI comporte un volet intéres-sant l’État (v. supra) et un volet inté-ressant les collectivités locales. LaLOPJ en revanche ne concerne queles collectivités locales. Cependant,cela n’a guère d’incidence car laLOPSI comprend un volet à la foisnational et local sur la justice.

Les collectivités locales peuvent parti-ciper, si elles le souhaitent, jusqu’au

31 décembre 2007, à la réalisationd’opérations immobilières liées auxbesoins de la justice, de la policenationale ou de la gendarmerie natio-nale, et à cet effet, sont autorisées àconclure un bail emphytéotique surun bien immobilier leur appartenanten vue de réaliser une telle opération.Le BEA – LOPSI/LOPJ permet aux col-lectivités territoriales de construire,acquérir ou rénover des bâtimentsaffectés à la justice, à la police ou à lagendarmerie, sachant que par déroga-tion au droit commun des BEA, lesdroits réels nés de ces baux spéciauxpeuvent faire l’objet d’un contrat decrédit-bail.

Ce dispositif présente pour les collec-tivités territoriales l’avantage d’êtreéligibles au fonds de compensationpour la taxe sur la valeur ajoutée(FCTVA) : selon les textes, le concoursdes collectivités locales à la réalisa-tion d’opération immobilières entre-prises avant le 31 décembre 2007relatives à des bâtiments affectés àl’usage de la justice, de la police oude la gendarmerie nationales, ouvredroit à l’éligibilité au FCTVA, sousréserve que les bâtiments concernéssoient mis à disposition de l’État àtitre gratuit.

Les AOT – LOA sectorielles : LOPSI etloi de programmation militaire

•• Domaines concernés

Dans des secteurs spéciaux, des loisont eu pour effet d’amender le Codedu domaine de l’État, en prévoyantdes AOT dérogatoires :

– ouvrant droit à un recours au crédit-bail dénué des conditions qui habi-tuellement restreignent considérable-ment son périmètre d’application ;

– autorisant des contrats globaux.

L’émergence des contrats de partenariat

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Les domaines concernés sont :

– la justice, la police nationale, lagendarmerie nationale (loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d’orientation etde programmation pour la sécuritéintérieure dite LOPSI) ;

– l’armée, les services du ministère dela Défense (loi n° 2003-73 du 27 jan-vier 2003 relative à la programmationmilitaire pour les années 2003 à 2008dite loi de programmation militaire).

•• Innovations introduites par les AOT– LOA secteurs spéciaux

Le recours étendu au mécanisme ducrédit-bail

Dérogeant au premier alinéa de l’arti-cle L. 34-7, le “crédit-bail LOPSI etprogrammation militaire” n’est aucu-nement exclu pour les ouvrages,constructions et installations :

– affectés à un service public et amé-nagés à cet effet, (ni)

– affectés directement à l’usage dupublic, (ni même)

– réalisés pour une personne publiquedans un but d’intérêt général.

La dérogation à la loi MOP

Ces contrats sont des marchés glo-baux : par ce mécanisme, l’État et sesétablissements publics peuventconfier à un même cocontractant laconception, la construction, l’aména-

gement, l’entretien et la maintenanced’immeubles affectés soit à la policeou à la gendarmerie nationales, soitaux armées et aux services du minis-tère de la Défense.

•• Une référence explicite à l’AOT –LOA

La LOPSI et la loi de programmationmilitaire prévoient un mécanismed’AOT d’une durée de 70 ans aumaximum, associé à un contrat delocation avec option d’achat (LOA).

Une fois ces divers dispositifs secto-riels adoptés, et compte tenu de lanécessité de faciliter le financementprivé dans de nombreux autresdomaines, le Gouvernement avait lechoix :

– soit de créer de nouveaux dispositifssectoriels dérogatoires à la loi MOP etaux principes de la domanialitépublique ;

– soit de créer un dispositif général,intégrant les dérogations admisespour certains secteurs.

L’institutionnalisation du contrat departenariat (ordonnance n° 2004-559du 17 juin 2004) démontre que c’estcette seconde option qu’il a privilé-giée (cf. chapitre 2).

•• Aux termes de l’article L. 34-7-1 duCode du domaine de l’État, modifié parles mêmes lois précitées, “Par dérogationaux dispositions du premier aliéna del’article L. 34-7, le financement desconstructions mentionnées à l’articleL. 34-3-1 ou réalisées dans le cadre descontrats de partenariat peut donner lieuà la conclusion de contrats de crédit-bail. Dans ce cas, le contrat comportedes clauses permettant de préserver lesexigences du service public. Les disposi-tions du deuxième alinéa de l’articleL. 34-7 sont applicables”.

•• Aux termes de l’article L. 31-3-1 duCode du domaine de l’État, modifié parles lois programmation militaire etLOPSI, “L’État et le titulaire d’une AOTdu domaine public peuvent conclure unbail portant sur des bâtiments àconstruire par le titulaire pour lesbesoins de la justice, de la police natio-nale, de la gendarmerie nationale, desarmées ou des services du ministère dela Défense et comportant, au profit del’État, une option lui permettant d’ac-quérir, avant le terme fixé par l’autorisa-tion d’occupation, les installations ainsiédifiées. Dans ce cas, le bail comportedes clauses permettant de préserver lesexigences du service public”.

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Les contrats de partenariat s’inscriventdans la perspective d’innover par rap-port aux mécanismes juridiques quileur préexistent en droit de la com-mande publique (1). Les logiques quiles caractérisent résultent d’uneappropriation originale de solutionsétrangères en partenariats public-privé (2).

1. Les innovationsintroduites par l’ordonnancesur les contrats de partenariat

1.1. L’économie générale descontrats de partenariat

Le contrat de partenariat (CP), non-obstant l’originalité de sa définition etde ses caractéristiques, se distingue leplus fortement des autres contratspublics par le sort qu’il réserve àl’évaluation et au partage des risques.

Définition des contrats de partena-riat

Dispositif ouvert, le contrat de parte-nariat permet de confier à un uniquecocontractant (ou à un unique grou-pement de cocontractants) tout oupartie des missions, de l’amont jus-qu’à l’aval d’une opération immobi-lière (autrement dit, de la conceptionà l’entretien/maintenance/exploita-tion, en passant par la construction etla rénovation). À la périphérie dumarché public et de la délégation deservice public, il peut comprendre àla fois des missions ayant trait à l’un età l’autre de ces montages contrac-tuels, tout en associant financementprivé et paiement public différé.

Ce nouveau contrat peut être passétant par l’État et ses établissementspublics que par les collectivités territo-riales, leurs établissements publics etleurs groupements (article L. 1414-1et suivants du CGCT, modifiés par l’or-donnance du 17 juin 2004).

Un instrument contractuel novateuraux atouts nombreux

•• Un atout budgétaire : un paiementdifféré lié à des objectifs de perfor-mance sur une opération globale

Aux termes de l’article Premier del’ordonnance sur les contrats de parte-nariat, “la rémunération du cocontrac-tant fait l’objet d’un paiement par lapersonne publique pendant toute ladurée du contrat”. Concrètement,cela signifie que si une personnepublique confie à son partenaire laconception, la construction puis l’en-tretien d’une infrastructure, le paie-ment de la conception et de laconstruction continuera à s’éche-

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CHAPITRE 2

Les contratsde partenariat :entre innovationet adaptation

•• Aux termes de l’article Premier del’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin2004 sur les contrats de partenariat, prisesur le fondement de l’article 6 de la loin° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitantle Gouvernement à simplifier le droit :

“Les contrats de partenariat sont descontrats administratifs par lesquels [unepersonne publique] confie à un tiers,pour une période déterminée en fonctionde la durée d’amortissement des investis-sements ou des modalités de finan-cement retenues, une mission globalerelative au financement d’investisse-ments immatériels, d’ouvrages oud’équipements nécessaires au servicepublic, à la construction ou transforma-tion des ouvrages ou équipements, ainsiqu’à leur entretien, leur maintenance,leur exploitation ou leur gestion, et, lecas échéant, à d’autres prestations deservices concourrant à l’exercice, par la

personne publique, de la mission deservice public dont elle est chargée.

Le cocontractant de la personnepublique assure la maîtrise d’ouvragedes travaux à réaliser (…)”.

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lonner jusqu’à la fin du contrat (doncpendant l’entretien). Cette caractéris-tique des CP favorise une bonne ges-tion budgétaire des collectivitéspubliques, qui n’auront pas à s’appau-vrir par des emprunts excessifs pourfinancer le paiement de lourdes opéra-tions de construction. À cet égard, lecontrat de partenariat favorise unmeilleur respect de nos engagementseuropéens (cf. pacte de stabilité).

Enfin, il faut relever qu’en permettantla dévolution d’opérations globales,les économies d’échelle qui en résul-tent bénéficient tant au partenaire qu’àla collectivité publique.

Ce type de rémunération est donc par-ticulièrement avantageux par compa-raison avec celui qui caractérise lesmarchés publics, dans la mesure où :

– les marchés publics ne peuvent, enprincipe, faire l’objet d’un paiementdifféré (à l’exception notable des mar-chés passés pour les besoins de ladéfense nationale),

– les marchés publics ne favorisent pasd’économies d’échelle puisqu’ils sonta priori soumis à la loi MOP, qui posele principe de la séparation entre laconception et la construction.

Au total, “de ce contrat, à la fois globalet de long terme, on peut attendre lesgains suivants : intégration dans uneprocédure unique de contrats norma-lement séparés, réduction des risquesd’interface entre conception, réalisa-tion et exploitation ou gestion, écono-mies d’échelle potentielles sur desséries longues et gains de productivitétenant au recours à une gestion privéedont la qualité est contractualisée etfinancièrement sanctionnée” (cf.Institut de la gestion déléguée (IGD),note sur la conduite des simulationsdu groupe de travail “Dimensionsmacro-économiques des partenariatspublic-privé”, fondée notamment sur

les observations de Noël de Saint-Pulgent).

•• Un outil efficace pour générer unfinancement privé : les facilités derecours au crédit-bail

Cet article a en outre pour effet majeurde modifier l’article L. 34-7-1 du Codedu domaine de l’État pour ajouter lesCP à la liste des contrats susceptiblesde faire l’objet d’un recours au crédit-bail. L’extension du recours au crédit-bail pour les CP est également com-prise dans les dispositions intéressantle domaine des collectivités locales(cf. CGCT, article L. 1311-4-1).

Les CP permettent donc d’étendre unefacilité de financement qui avait étémise en place dans des domaines cir-conscrits (police, justice, gendarmerienationale, armée, services du ministè-re de la Défense, santé publique) à deshypothèses dont l’objet n’a pas voca-tion à être limité.

•• La viabilité fiscale des CP locaux :l’éligibilité des collectivités territoria-les au FCTVA et l’exonération de taxefoncière sur les propriétés bâties

L’ordonnance s’attache à assurer laviabilité fiscale des contrats de parte-nariat, pour favoriser leur recours parles collectivités territoriales.

Chapitre 2

36

•• Aux termes de l’article 13 de l’ordon-nance sur les contrats de partenariat :

“Lorsque le contrat emporte occupationdu domaine public, il vaut autorisationd’occupation de ce domaine pour sadurée. Le titulaire du contrat a, saufstipulation contraire de ce contrat, desdroits réels sur les ouvrages et équipe-ments qu’il réalise. Ces droits lui confè-rent les prérogatives et obligations dupropriétaire dans les conditions et leslimites définies par les clauses ducontrat ayant pour objet de garantirl’intégrité et l’affectation du domainepublic.”

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Par ailleurs – au plan national commelocal –, le contrat de partenariat per-met l’exonération de taxe foncière surles propriétés bâties des immeublesconstruits, sous réserve de la réunionde trois conditions :

– que l’immeuble construit par le par-tenaire soit, à l’issue du contrat, incor-poré au domaine de la personnepublique,

– que l’immeuble soit affecté à un ser-vice public ou d’utilité générale,

– et que l’immeuble soit non productifde revenus pour la collectivité proprié-taire (cette dernière condition signifieque les collectivités publiques nepourront pas bénéficier de l’exonéra-tion de la taxe foncière dans le cas oùle contrat stipule une clause de retourgratuit au domaine de la personnepublique de l’immeuble).

•• La mise à profit des apports des nou-velles directives “marchés publics” :le critère de l’offre économiquementla plus avantageuse et la procédure dudialogue compétitif

Tirant profit des nouvelles directivescommunautaires sur les marchés

publics (n° 2004/17 et n° 2004/18 du31 mars 2004), le contrat de partena-riat – marché public au sens du droitcommunautaire – intègre deux deleurs caractéristiques essentielles.

D’une part, le choix de l’offre écono-miquement la plus avantageuse pré-sente l’avantage d’être plus souple quecelui de l’offre la moins disante. En cequi concerne les CP, la référence àl’offre économiquement la plus avan-tageuse est essentielle, encore biendavantage qu’en ce qui concerne lesmarchés publics. En effet, l’intérêt despersonnes publiques pour tirer lemeilleur parti de la relation parte-nariale n’est pas nécessairement derémunérer le moins possible leurcocontractant, mais plutôt d’optimiserle partage des risques. De plus, un par-tenariat est un contrat de longue durée(au moins 10-15 ans, en toute vrai-semblance), et il faut donc d’autantplus s’assurer de la qualité du projetprésenté par le partenaire, et de saviabilité sur le long terme. Il s’agitdonc d’accorder une place détermi-nante à l’évaluation qualitative del’offre.

D’autre part, la procédure du dialoguecompétitif constitue une solutionadaptée à la conclusion de marchéscomplexes tels que les contrats de par-tenariat. En effet, elle optimise la défi-nition de ses besoins par la personnepublique. Concrètement, il s’agirapour la personne publique d’établir unprogramme fonctionnel, où elle décri-ra ses attentes et ses exigences. Unefois ce document rédigé, la personnepublique émet un avis d’appel à laconcurrence. Peut alors s’ouvrir le dia-logue entre candidats et acheteurpublic : à partir des attentes de l’ache-teur public, les candidats vont propo-ser des solutions détaillées, que le sec-teur privé est plus enclin à concevoirpour répondre à la complexité desopérations objet du CP. L’acheteur

37

Les contrats de partenariat : entre innovation et adaptation

•• Par dérogation au principe posé parl’article L. 1615-7 al. Premier du CGCT,les collectivités territoriales recourant aucontrat de partenariat peuvent bénéfi-cier du fonds de compensation sur lataxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) “surla part de la rémunération versée [aupartenaire] correspondant à l’investisse-ment réalisé par celui-ci pour lesbesoins d’une activité non soumise à laTVA”, l’éligibilité au FCTVA étant toute-fois “subordonnée à l’appartenance dubien au patrimoine de la personnepublique ou à la décision de la person-ne publique d’intégrer le bien dans sonpatrimoine conformément aux clausesdu contrat” (nouvelle rédaction de l’arti-cle L. 1615-12 du CGCT).

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public pourra ainsi choisir le projetqui lui semble le mieux répondre à sesbesoins, dont il n’avait pas nécessaire-ment déterminé les conditions optima-les de satisfaction.

Cette procédure, désormais introduitedans le Code des marchés publics,constitue une dérogation au principede définition préalable de ses besoinspar l’acheteur public. Alors qu’elledemeure une voie d’exception qui doitêtre rigoureusement justifiée dans lesmarchés publics, elle apparaît commela procédure de droit commun dansles contrats de partenariat, étant préci-sé qu’elle est de mise pour tout projetcomplexe, alors que la procédured’appel d’offres réside à titre subsidiai-re dans les cas a priori moins fréquentsoù le projet est uniquement caractéri-sé par l’urgence (cf. article 5 de l’or-donnance).

•• La possibilité d’une initiative privée

L’article 10 de l’ordonnance sur lescontrats de partenariat dispose que lapersonne publique peut être “saisied’un projet par une entreprise ou ungroupement d’entreprises (et envisa-ger) d’y donner suite en concluant uncontrat de partenariat”.

Cette modalité, qui ne fait pas l’éco-nomie des procédures de passationd’usage, constitue une opportunitépour les acteurs publics qui peuvent sevoir proposer par le secteur privé unprojet d’intérêt général qui ne seraitpas entré dans leur champ de prévi-sions.

Les clauses obligatoires du contrat departenariat

Au nombre de 12, elles sont énumé-rées par l’article 11 de l’ordonnancen° 2004-559 du 17 juin 2004 sur lescontrats de partenariat. Cet articleillustre combien le contrat de partena-riat a été conçu comme un instrument

caractérisé par un fort degré de prévi-sion : cela en fait un outil d’optimisa-tion de la sécurité juridique des rela-tions contractuelles entre les person-nes publiques et leurs partenaires,notamment étrangers.

Sans énumérer ici toutes les clauses,on peut néanmoins mettre en exerguecertaines d’entre elles, telles que lesclauses relatives :

– à la durée du contrat (qui doit êtreliée à l’amortissement des investisse-ments ou aux modalités de finance-ment retenues),

– au partage des risques entre la per-sonne publique et son cocontractant(v. supra),

– aux objectifs de performance assi-gnés au cocontractant (sanctions etpénalités y afférant en cas de non-respect),

– à la rémunération du cocontractant,

– aux modalités de la sous-traitanced’une partie du contrat s’il y a lieu(notamment aux PME).

1.2. L’enjeude l’évaluation préalable

Pour la première fois en droit français,le choix d’un contrat doit être précédéd’une évaluation préalable. Deuxvolets :

– un volet intrinsèque : le recours aucontrat de partenariat est-il possible ?

– un volet extrinsèque : le recours aucontrat de partenariat est-il plus avan-tageux que celui d’autres contrats ?

L’article 2 de l’ordonnance du 17 juin2004, décrit le processus itératif endeux temps qui caractérise l’évalua-tion préalable :

Chapitre 2

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“Les contrats de partenariat ne peu-vent être conclus que pour la réalisa-tion de projets pour lesquels une éva-luation, à laquelle la personnepublique procède avant le lancementde la procédure de passation :

1. Montre, ou bien que, compte tenude la complexité du projet, la person-ne publique n’est pas objectivementen mesure de définir seule et à l’avan-ce les moyens techniques pouvantrépondre à ses besoins ou d’établir lemontage financier ou juridique du pro-jet, ou bien que le projet présente uncaractère d’urgence ;

2. Expose avec précision les motifs decaractère économique, financier, juri-dique et administratif, qui l’ont condui-te, après une analyse comparative,notamment en termes de coût global,de performance et de partage desrisques, de différentes options, à rete-nir le projet envisagé et à décider delancer une procédure de passationd’un contrat de partenariat. En casd’urgence, cet exposé peut êtresuccinct”.

Les conditions du recours auxcontrats de partenariat : l’urgence etla complexité

Le législateur avait envisagé les CPcomme une troisième voie : un contratà vocation générale qui complète l’of-fre contractuelle pour les acheteurspublics (marchés publics et déléga-tions de service public). Cependant,saisi de la conformité à la Constitutionfrançaise de l’article 6 de la loin° 2003-591 du 2 juillet 2003 habili-tant le Gouvernement à simplifier ledroit, le Conseil constitutionnel adécidé de limiter la possibilité derecourir à de tels contrats.

L’article 6 de la loi d’habilitationdispose :

“Dans les conditions prévues par l’arti-cle 38 de la Constitution, le Gou-vernement est autorisé à prendre parordonnance les dispositions nécessai-res pour (…) créer de nouvelles for-mes de contrats conclus par des per-sonnes publiques ou des personnesprivées chargées d’une mission de ser-vice public pour la conception, laréalisation, la transformation, l’exploi-tation et le financement d’équipe-ments publics, ou la gestion et le finan-cement de services, ou une combinai-son de ces différentes missions (…)”.

Le Conseil constitutionnel, par la déci-sion n° 2003-473 DC en date du 26juin 2003 (loi habilitant le Gou-vernement à simplifier le droit), vacertes admettre que le Gouvernementpuisse, par ordonnance, créer lescontrats de partenariat. Mais cepen-dant, il va dans le même temps réser-ver l’usage des CP à des circonstancesparticulières. Autrement dit, alors quele contrat de partenariat était pensécomme un montage alternatif à ladélégation de service public et aumarché public, il devient, à la suite dela décision du Conseil constitutionnel,un instrument subsidiaire.

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Les contrats de partenariat : entre innovation et adaptation

En effet, après avoir énoncé qu’aucunerègle ni aucun principe de valeur consti-tutionnelle ne s’opposait à l’attribution àun même cocontractant d’une missionglobale, ni au recours au crédit-bail et àl’option d’achat anticipé pour préfinan-cer un ouvrage public, le Conseil consti-tutionnel relève (cf. considérant n° 18)que :

“(...) toutefois, la généralisation de tellesdérogations au droit commun de lacommande publique ou de la domania-lité publique serait susceptible de priverde garanties légales les exigences cons-titutionnelles inhérentes à l’égalitédevant la commande publique, à la pro-tection des propriétés publiques et aubon usage des deniers publics ; quedans ces conditions, les ordonnances

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Comment interpréter ces conditionsalternatives (urgence et complexité),que l’ordonnance sur les contrats departenariat a intégrées à la suite decette décision ?

•• La condition de l’urgence

Comme le note l’IGD “l’urgence doitêtre objective et ne doit pas résulter apriori du fait de l’administration”.Autrement dit, les personnes publi-ques ne sauraient alléguer l’urgencelorsque le retard en cause résulte deleur seule carence à agir.

Le Conseil d’État a pu préciser lacondition d’urgence lorsqu’il a étésaisi d’un recours pour excès de pou-voir contre l’ordonnance n° 2004-559du 17 juin 2004 sur les contrats departenariat (CE, Sect., 27 octobre2004, M. Sueur et autres, n° 269814,v. considérant n° 10) : l’urgence pro-pre à justifier le recours aux CP “résul-te objectivement, dans un secteur ouune zone géographique déterminés,de la nécessité de rattraper un retardparticulièrement grave affectant laréalisation d’équipements collectifs”.

Le Conseil d’État pose le principed’une appréciation locale descirconstances de l’urgence. De plus, lejuge du Palais-Royal relève la gravitédu retard justifiant l’urgence. Ce der-nier point a pu être critiqué car il seraitsusceptible d’induire que “l’État et lescollectivités locales ne pourraient ainsi

avoir recours au contrat de partenariatqu’à condition de se trouver dans unesituation de pénurie et de vétusté deleur parc immobilier susceptible demettre en cause la qualité, voire lacontinuité, des services publics cor-respondants” (S. Braconnier, 2004).C’est seulement à l’épreuve du tempset des contentieux, qu’on pourraconstater la réalisation ou pas de cescénario d’une interprétation réduc-trice de l’urgence sui generis descontrats de partenariat. Cette questionest importante car si l’urgence et lacomplexité venaient à être interprétéesavec trop de rigueur, bien des projetsen matière de tourisme, de sport et deloisirs pourraient ne pas pouvoir fairel’objet d’un CP.

•• La condition de la complexité

Sur cette condition, le Conseil d’État,dans sa décision “M. Sueur et autres”,s’est borné à reproduire les énoncia-tions du Conseil constitutionnel, c’est-à-dire “la nécessité de tenir comptedes caractéristiques techniques, fonc-tionnelles ou économiques d’un équi-pement ou d’un service déterminé”.

L’IGD relève qu’“un projet est com-plexe lorsque la personne publiquen’est pas objectivement en mesure dedéfinir elle-même les moyens tech-niques pouvant répondre à ses besoinsou d’établir le montage financier oujuridique du projet”. Les auteurs s’ac-cordent en l’état sur cette définition dela complexité.

Il n’est pas étonnant que la complexi-té ait été fixée comme condition justi-fiant le recours au CP, étant entenduqu’elle justifie également le recours àla procédure du dialogue compétitifdans les marchés publics (d’où lecaractère subsidiaire de la procéduredu dialogue compétitif dans les mar-chés publics, par contraste à la procé-dure de l’appel d’offres). Cependant,

Chapitre 2

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prises sur le fondement de l’article 6 dela loi déférée devront réserver de sem-blables dérogations à des situationsrépondant à des motifs d’intérêt généraltels que l’urgence qui s’attache, en rai-son de circonstances particulières oulocales, à rattraper un retard préjudicia-ble, ou bien la nécessité de tenir comp-te des caractéristiques techniques, fonc-tionnelles ou économiques d’un équipe-ment ou d’un service déterminé”.

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un contrat de partenariat peut être jus-tifié par la seule urgence : cela signifiequ’il ne faut pas prêter à la complexi-té un sens trop générique, car au senslarge, tout contrat de partenariat est uncontrat complexe (en effet, il associe,aux termes de l’ordonnance, au moinstrois éléments : le financement d’in-vestissements immatériels, d’ouvragesou d’équipements nécessaires au ser-vice public ; la construction ou latransformation des ouvrages ou équi-pements ou d’autres investissements –y compris immatériels – ; leur entre-tien et/ou leur maintenance et/ou leurexploitation et/ou leur gestion).

Plus précisément, la complexité duprojet, “condition objective”, pourra“prendre des formes très variées pou-vant inclure l’incapacité de la person-ne publique à dégager les solutionstechniques répondant à ses besoins oul’inaptitude de la collectivité à formu-ler une solution de financement ou unmontage juridique permettant destructurer les réponses à ses besoins.La complexité pourra dans ces condi-tions être liée à l’absence de précé-dent, à la technicité caractérisant leprojet (haute technologie…) ou enco-re à la diversité des éléments compo-sant le projet” (L. Deruy, S. Lagumina,2005).

Évaluation comparative en termes decoût global, de performance et departage des risques

Comme le relève l’article 2 de l’or-donnance, l’évaluation préalable,après avoir établi l’urgence et/ou lacomplexité du projet, “expose avecprécision les motifs de caractère éco-nomique, financier, juridique et admi-nistratif, qui l’ont conduite, après uneanalyse comparative, notamment entermes de coût global, de performanceet de partage des risques, de différen-tes options, à retenir le projet envisagéet à décider de lancer une procédure

de passation d’un contrat de partena-riat”, étant précisé qu’“en cas d’urgen-ce, cet exposé peut être succinct”.

L’analyse comparative devra exposerles différents modes juridiques envisa-geables pour le projet – éventuelle-ment combinés – (marché public, ges-tion en régie, délégation de servicepublic, bail emphytéotique adminis-tratif, autorisation d’occupation tem-poraire), pour ne retenir l’option“contrat de partenariat” que si compa-rativement aux solutions présentéespar les autres montages, elle sembleplus optimale en termes, notamment :

– de coût global,

– de performance,

– et de partage des risques.

L’acheteur public le plus souvent pour-ra se contenter de présenter unique-ment un montage contractuel alterna-tif (le plus optimal outre le CP) et/ou lasolution de la régie directe, pour lescomparer à la solution du partenariatpublic-privé.

Parallèlement, la présentation desavantages induits par la solution du CPne saurait être exagérément détaillée :le contrat de partenariat demeure uncontrat complexe auquel les person-nes publiques recourent faute desavoir quelles solutions permettraientde répondre au mieux à leurs objec-tifs. Un chiffrage des gains escomptéssemble, au moins dans un premiertemps, peu envisageable, même si parailleurs les personnes publiques nesauraient s’exonérer d’une présenta-tion circonstanciée des mérites com-paratifs de la solution partenariale.

On peut en l’absence de jurispruden-ce se demander quel type de contrôleexercera le Conseil d’État sur, d’unepart, les critères juridiques d’urgenceet de complexité, et, d’autre part, l’é-valuation performantielle du montage.

Les contrats de partenariat : entre innovation et adaptation

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Il semble néanmoins fort probablequ’un contrôle de l’erreur manifested’appréciation sera exercé sur lesconditions d’urgence et de complexi-té, et qu’un contrôle moins approfondile sera sur la phase aval de l’évalua-tion.

1.3. L’enjeu du partage des risques

Le partage des risques est un élémenttrès important dans les contrats de par-tenariat. Outre le fait qu’il constitue uncritère de l’évaluation préalable, uneclause obligatoire de tout contrat departenariat (article 11 de l’ordonnan-ce) et un sujet majeur de négociations,il permet d’assurer au mieux l’équili-bre économique et financier ducontrat.

La constitution de la matrice desrisques

À titre liminaire, les personnespubliques doivent élaborer une matri-ce des risques, c’est-à-dire des “événe-ments probabilisables” susceptiblesd’affecter l’exécution du contrat(T. Kirat, 2003).

Concrètement, la matrice des risquesporte sur tous les volets des missionsconférées au partenaire, de l’amont àl’aval : risques de la conception, de laconstruction et de performance enrapport avec les obligations d’entre-tien et de maintenance.

Le contrat de partenariat rompt avec lalogique concessive, qui tend à polari-ser les débats sur le risque de fréquen-tation (risque volume), condition del’équilibre économique du contrat.Dans un contrat de partenariat éligibleaux critères posés par la décisiond’Eurostat du 11 février 2004, aumoins deux types de risques sonttransférés au partenaire, l’un concer-nant la construction et ses phasesamont le cas échéant, l’autre concer-

nant la disponibilité de l’ouvrage ou lademande (notons cependant qu’on nesaurait trop recommander aux acteurspublics de transférer l’intégralité durisque demande, sauf à risquer unerequalification du contrat de partena-riat en délégation de service public ; ilfaut en effet bien réaliser que la déci-sion d’Eurostat concerne tous types dePPP, et qu’étant à vocation commu-nautaire, elle occulte nécessairementles dichtomies subtiles du droit publicfrançais) :

– par exemple, en ce qui concerne laseule conception, il faudra déterminerles risques naturels (géologiques,archéologiques et météorologiques),notamment tout ce qui a trait à ladéfaillance des relevés topogra-phiques ou des études des sols ;

– en ce qui concerne la construction,les prévisions du contrat de partenariatpeuvent comprendre des items trèsvariés, y compris même l’exercice dudroit de grève par les employés dupartenaire ou de ses sous-traitants,mais aussi des retards de livraison, ladéfaillance technique d’un construc-teur, la sécurité et la sûreté du site ;

– enfin, le risque de disponibilitéimplique en particulier que le parte-naire soit sanctionné s’il n’assure pasdans un délai donné des prestations demaintenance déterminées.

Concrètement, la matrice des risquesse présente sous la forme d’un docu-ment pouvant aller jusqu’à une cin-quantaine de pages, véritable grilled’analyse qui donnera les moyens à lapersonne publique de contrôler sonpartenaraire de manière objective,transparente et rigoureuse en phased’exécution du contrat, facteur deforte incitation à mieux exécuter sesobligations pour le partenaire. Elle estfinalisée autant que possible par unchiffrage des risques (leur taux de pro-

Chapitre 2

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babilité et leur coût en cas de surve-nue).

L’allocation optimale des risques

Les contrats de partenariat doiventfaire l’objet d’une distribution optima-le des risques car seule celle-ci peutpermettre de maximaliser les avan-tages notamment financiers qu’atten-dent les personnes publiques et pri-vées de ces contrats (notamment pourdes raisons de comptabilité). La distri-bution optimale ne consiste pas, pourla personne publique, à tenter de met-tre à charge du partenaire le plusgrand nombre de risques : les parte-naires – à raison – exigeront en consé-quence une rémunération significati-vement augmentée, que les ressourcespubliques dans un contexte de raré-faction budgétaire ne permettent pasnécessairement d’allouer.

En définitive, un partage optimal desrisques consiste à mettre à charge lesrisques sur celui des cocontractantsqui peut le plus efficacement y répon-dre. Par exemple, les risques liés à unchangement de normes de construc-tion devront en principe être assuméspar la personne publique, puisqu’ils’agit de risques résultant du compor-tement des personnes publiques (celamême si les personnes publiquesconcernées ne sont pas celles qui ontconclu le CP).

Trois types d’allocation des risquesdevront être combinés :

– la distribution de risques à la chargedu partenaire,

– la distribution de risques à la chargede la personne publique,

– la distribution de risques à la chargeconjointe du partenaire et de la per-sonne publique.

En synthèse, de l’optimisation du par-

tage des risques résulte tant l’optimisa-tion de la rémunération du partenaireque celle de la sécurité juridique pen-dant l’exécution du contrat. Elle estégalement au cœur de la notion de“bancabilité du projet”. En effet, lesbanques vont procéder à un examenscrupuleux des matrices des risquesretenues et des partages qui en résul-tent pour évaluer la bancabilité duprojet (cf. troisième partie, 2.2.).

2. Les modèles d’inspiration :exemples étrangers

Si les contrats de partenariat n’existentdans l’ordre juridique français quedepuis la promulgation de l’ordonnan-ce n° 2004-559 du 17 juin 2004 surles contrats de partenariat, l’analysecomparative démontre qu’un nombreimportant d’États ont adopté le mon-tage partenarial avant la France, àcommencer par la Grande-Bretagne.

Le fait que la France ait adopté tardi-vement le dispositif n’est d’ailleursguère étonnant : “Il n’y a pas de modè-le universel pour les PPP en Europe.Dans chaque pays, la structure juri-dique et contractuelle retenue a dûs’adapter aux exigences du cadre juri-dique existant. Nulle part, cette néces-sité n’a été aussi importante qu’enFrance” (P. Lignière, S. Ratledge).

Le modèle étranger le plus connu estcelui des contrats de Public PrivatePartnerships – Private FinanceInitiative (PPP/PFI) en Grande-Bretagne (2.1.), modèle dont on peutnoter “l’extraordinaire fortune (…) au-delà des frontières britanniques”(M. Long), dans la mesure où il s’ana-lyse en un montage contractuel inno-vant qui va rapidement devenirl’exemple à suivre pour les autres payseuropéens : Italie (2.2.), Espagne etPortugal (2.3.), notamment, s’appro-prient la logique PFI sous des modali-

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tés singulières. Ces différentes formu-les constituent autant d’instrumentsque le législateur français s’est réap-proprié partiellement dans la perspec-tive d’instituer des partenariats public-privé efficaces.

2.1. Le modèle britannique :les contratsde Private Finance Initiative

Si aujourd’hui, la Private FinanceInitiative (PFI) désigne une forme géné-rique de contrats qui a inspiré les PPPeuropéens, cette dénomination visaitoriginellement un programme poli-tique, succédant à l’apparition decontrats de partenariat sectoriels (àl’image des mécanismes nés desLOPSI et LOPJ en France).

Généalogie de la “PFI” : d’un pro-gramme gouvernemental à une formegénérique de contrats

En 1990, une première loi va créer descontrats globaux dans le domaine dela santé, permettant de confier au sec-teur privé la conception, la construc-tion, la rénovation, l’entretien et lagestion d’hôpitaux (National HealthService and Community Care Act). En1991, une loi similaire intervient dansle domaine de la justice criminelle,pour favoriser le développement desinfrastructures carcérales (CriminalJustice Act).

À la suite de ces législations sectoriel-les, le programme de la PFI voit le jouren 1992, à l’occasion du discoursannuel du budget du chancelier del’Échiquier de l’époque, NormanLamont. Ce dernier annonce un pro-gramme du gouvernement ambitieux,dont l’objet est de concilier un certainnombre d’impératifs potentiellementcontradictoires :

– augmenter la capacité de finance-ment du secteur public,

– améliorer la qualité des infrastructu-res et des services publics,

– diminuer la dépense publique.

Auparavant, le gouvernement deMargaret Thatcher avait entrepris desvagues de privatisations jugées défavo-rables par l’opinion publique : lelevier de la privatisation devait doncêtre utilisé avec circonspection. Dansle même temps, il convenait de résor-ber les déficits publics, contrainte quiprend d’autant plus d’acuité avec lanécessité de respecter les critères deconvergence de l’UEM. Enfin, lesinfrastructures et équipements publicsétaient en proie à la vétusté.

C’est dans cette perspective qu’appa-raît le programme de la PFI, qui créeun nouveau montage contractuel pourapporter une réponse à ces diversenjeux. Rapidement, le contrat de PFIva revêtir une existence autonome,ayant vocation à survivre au program-me de la PFI et par conséquent augouvernement de l’époque (ce quis’est vérifié par son usage sous le gou-vernement travailliste de Tony Blair).

Définition et caractéristiques essen-tielles des contrats de “PFI”

•• Des modalités de rémunérationdiversifiées

Les contrats de PFI ne sont pas unmodèle mais des modèles contrac-tuels.

On en dénombre plusieurs formes ;ainsi, distingue-t-on les contrats de PFIsuivant l’origine de la rémunération :

– certains font l’objet du versementd’un prix par l’administration (les ser-vices Sold to the public sector),

– d’autres font l’objet du versementd’un prix perçu sur les usagers (lesFinancially freestanding).

Chapitre 2

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Le champ des PFI est donc plus vasteque celui des contrats de partenariatfrançais, pour lesquels la rémunéra-tion ne peut consister qu’en un prixversé par l’administration. Les PFI, aucontraire, visent à la fois nos PPP etnos concessions (tout du moins s’agis-sant du critère de la rémunération),même si la plupart des contrats de PFIsont des services Sold to the publicsector, le montage concessif étantréservé à de très grands projets (cas dumétro londonien).

En revanche, comme dans les contratsde partenariat français, la rémunéra-tion du cocontractant dans les contratsde PFI est fondée sur des clauses per-formantielles. Le contrat stipule touteune série d’objectifs à atteindre en ter-mes de disponibilité d’équipements etde qualité des services en fixant desdates butoir. Ces clauses sont appli-quées avec rigueur : le cocontractantsubira des pénalités financières en casde non-respect des termes du contrat.

•• L’objet des contrats de PFI

Les contrats de partenariat en Grande-Bretagne sont indifféremment nom-més :

– contrats de PPP (Public PrivatePartnerships),

– contrats de PFI (Private FinanceInitiative),

– contrats de DBFO (Design, Build,Finance and Operate) – nonobstantd’autres formes plus restreintes dansleur objet et plus anciennes : essen-tiellement les BOT (Build OperateTransfer), qui sont purement immobi-liers mais qui restent le modèle le plusutilisé –.

L’aspect le plus marquant du montagePFI est l’aspect “financement du pro-jet” : un PFI est un contrat dans lecadre duquel l’entité privée a la char-ge du financement (en général, 10 %de financement par la société de pro-jet sur ses fonds propres, le reste étantassuré par les banques).

Compte tenu de son objet et de sesautres caractéristiques, le modèle leplus typique (le plus global) du contratde PFI (c’est-à-dire le “PFI – DBFO –Services sold to the public sector”) estun contrat :

– de longue durée (environ 20 à 30ans ; 40 ans maximum pour les col-lectivités locales et sans limite dedurée pour l’État, la durée étant cal-culée compte tenu de la nécessitéd’amortir les infrastructures édifiées etgérées),

– conclu par une autorité publiquepour la conception, le financement, laréalisation d’ouvrages et la gestion deservices dont ils sont le support,

– avec un consortium rémunéré par unprix payé à échéances régulières parl’administration, ce prix étant basé surdes critères performantiels et de dispo-nibilité des ouvrages réalisés,

– les paiements commençant unique-ment lorsque le service reçoit undébut d’exécution.

Ce dernier point constitue un élémentqui permet de distinguer PFI et PPPfrançais : dans le montage PPP fran-çais, le paiement peut commencer dèsla construction, alors que dans le casbritannique, tant que l’infrastructuren’offre pas un service ouvert aupublic, aucun paiement public n’estconcevable.

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•• Un montage contractuel tripartite

La PFI se présente sous la forme detrois contrats qui réunissent trois typesd’acteurs :

– un contrat principal (le contrat dePFI), passé entre une société de projetet une personne publique,

– un contrat de financement, passéentre la société de projet et un établis-sement de crédit,

– un accord direct (direct agreement),passé entre l’établissement de crédit etla personne publique.

Les banques financent ainsi les opéra-tions de construction (et de concep-tion, le cas échéant) et se remboursentsur les flux financiers, c’est-à-dire lespaiements de l’administration.

Dans un ensemble contractuel de typePFI, deux des acteurs sont réunis dansun consortium : la société de projet etl’établissement de crédit (ou plusgénéralement les financiers, qui peu-vent être multiples). Par ailleurs, leconsortium va comprendre un certainnombre de sociétés (“entreprisesmembres”) qui vont assurer chacunetelle ou telle autre partie de laconstruction, à la demande de lasociété de projet.

En cas de défaillance des sociétés(entreprises membres et société deprojet), les banques peuvent :

– soit rompre le contrat, auquel casl’administration cherchera un nouvelexploitant et indemnisera les finan-ciers (conformément aux clauses dudirect agreement),

– soit se substituer à la société de pro-jet (clause de step-in), en assurantfinancièrement les engagements prispar celle-ci (applications en France :Stade de France, périphérique nord deLyon et Tunnel sous la Manche).

On relèvera que les prêteurs disposentd’un certain nombre de garanties dontl’une des plus importantes est le droitde préférence sur le cash-flow. Celasignifie que les banques disposentd’une sûreté sur les recettes généréespar l’exploitation du projet une foisamortis les coûts d’exploitation.

•• Des contrats de common law

Les PFI sont des contrats de commonlaw. Cela s’explique par l’unicité dudroit anglais, qui ne consacre pas ladichotomie droit public/droit privé quirégit l’ordre juridique français.

Par suite, ces contrats ne font pasl’objet d’un régime d’exécution dis-

Chapitre 2

Coût

DuréeInvestissement(construction)

Fonctionnement(entretien)

(1) (2)

Paiements de l’administration

Coût

DuréeInvestissement(construction)

Fonctionnement(entretien)

DuréeInvestissement(construction)

Fonctionnement(entretien)

(1) (2)

Paiements de l’administration

(1) Dans les contrats de partenariat français, les paiements de l’administration peuvent êtreeffectués dès le début des travaux(2) La logique de la PFI anglo-saxonne implique que les paiements liés à la conception –réalisation ne débutent que lorsque le service reçoit un commencement d’exécution

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tinct de celui qui prévaut en présencede contrats passés entre personnes pri-vées. Il n’existe pas en Grande-Bretagne d’exorbitance du droit admi-nistratif comme en France, même si lanotion de public law irradie de plus enplus le droit des contrats enAngleterre, le droit français ayant pus’exporter en partie à l’étranger.

Deux conséquences résultent de laqualification de contrats de commonlaw :

– la liberté de contracter (freedom ofcontract) : il en résulte que tout peutêtre délégué au privé, excepté les mis-sions régaliennes,

– l’inviolabilité du contrat (sanctity ofcontract) : elle est absolue et notam-ment l’administration ne dispose enaucun cas – au contraire de ce qui pré-vaut en France – d’un droit de modifi-cation unilatérale ; il en résulte que lecontrat de PFI doit tendre à être un“contrat complet”, comportant toutesles dispositions utiles en cas de surve-nue de risques en phase d’exécution.

Sur le terrain de l’inviolabilité ducontrat, on peut noter que le montagedu PPP français s’aligne largement surcelui du PFI anglo-saxon : un contratcomportant des clauses très détailléesest rédigé de sorte à soumettre si pos-sible intégralement l’exécution à la loides parties.

•• Évaluation comparative et partagedes risques : la recherche de la bestvalue for money

Le concept de la best value for money(qui correspond à l’idée du meilleurrapport qualité/prix) va jouer un rôledéterminant dans le recours auxcontrats de PFI.

Cette notion succède à celle de cost-effectiveness (efficience des coûts), quiétait le référentiel dans le choix d’unedélégation contractuelle des activitéspubliques dans les années 1980, sousl’empire des règles posées par un hautresponsable de l’administration desfinances, Sir William Ryrie (les RyrieRules). En filigrane de ce concept, il yavait l’idée suivant laquelle l’adminis-tration ne devait pas offrir à soncocontractant des garanties que le sec-teur privé n’aurait pas pris le risque deproposer. C’est donc une notion quitient de l’économie des denierspublics, à l’image du critère du moins-disant, consacré jusqu’en 2001 par ledroit des marchés publics français.

Désormais, avec la PFI, on raisonne entermes de best value for money. Ceconcept permet de réaliser l’évaluationpréalable des contrats de PPP. Il s’agitde déterminer en amont si le recoursau secteur privé présente ou non unmeilleur rapport qualité/prix que lagestion directe par l’administration.

Si “l’administration peut, théorique-ment, réaliser une infrastructure pour

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•• Les théories du fait du prince, de l’im-prévision et des sujétions imprévuesdevraient trouver un champ d’applica-tion plus limité dans les contrats de par-tenariat, l’allocation des risques ayantpour objet de solutionner dans le contratles conséquences de la survenue d’évé-nements imprévisibles (même s’ilconvient en cas de contradiction avecles stipulations des parties de s’interro-ger sérieusement sur la valeur d’ordre

public ou supplétive de ces théories descontrats administratifs).

La proposition est toute autre s’agissantde la théorie de la force majeure : celle-ci étant fondée sur des événements nonpas risqués ou imprévisibles mais incer-tains et non probabilisables, on peut rai-sonnablement penser qu’elle aura voca-tion à pleinement s’appliquer dans lesnouveaux PPP.

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un coût inférieur au secteur privé, dufait notamment de taux d’empruntplus réduits”, cependant, cette écono-mie réalisée s’accompagne de “sur-coûts dus à des délais d’exécution desinfrastructures, une mauvaise gestionlatente, un manque d’initiative et d’in-novation, l’impossibilité de réaliser deséconomies d’échelle”, surcoûts qu’onne retrouve pas en situation de gestionprivée (P. Cossalter, 2001). Au demeu-rant, contre l’argument du coût supé-rieur de l’emprunt privé, il a pu êtreobservé que “la plupart des projets enpartenariat public-privé sont notés aumême niveau de risque que les dettessouveraines par les agences de rating”(F. Marty, S. Trosa, A. Voisin, 2003).

Un bilan coûts-avantages est réalisé parréférence au Public Sector Comparator(PSC), qui est un indicateur du coûtglobal des opérations envisagées enmaîtrise d’ouvrage publique. L’évalua-tion va donc consister à comparer pourune opération donnée le résultat duPSC avec les coûts prévisionnels ducontrat de PFI projeté, dont on a déter-miné l’économie générale de l’alloca-tion des risques.

Les retours d’expérience en Grande-Bretagne ont démontré que chaquetype de risque doit être transféré à lapartie la mieux adaptée pour l’assu-mer. Cette conception n’a pas toujoursprévalu : au commencement, dans laconstruction et la gestion des prisons,les autorités britanniques ont cherchéà transférer le plus possible de risquesau secteur privé, notamment le risquevolume (c’est-à-dire le taux de rem-plissage des prisons). Ce fut uneerreur, car le secteur privé fait payertrès cher un risque d’une nature tellequ’il ne peut le contrôler.

Aujourd’hui, les personnes publiquesont bien réalisé que de l’optimisationdu partage des risques, dépend l’opti-misation de la best value for money.

Par ailleurs, le système du recours à laPFI se veut pragmatique et opération-nel. En la matière, il n’existe pasd’obstacles juridiques qui viendraiententraver l’analyse de la best value formoney. On sait qu’en droit français,les contrats de partenariat au contraireont manqué de devenir la troisièmevoie pour se présenter sur le mode demontages subsidiaires (vu les condi-tions restrictives de l’urgence et de lacomplexité). Rien de tel n’existe àl’endroit des PFI, qui peuvent mêmeêtre déclenchés sans PSC en casd’indisponibilité du capital nécessaireà financer le projet escompté dans lecadre d’une gestion publique (Guidedu Trésor, 1995), dès lors que l’utilitésocio-économique du projet estavérée.

•• Un régime de passation fondé surune procédure négociée

Le régime de la passation des contratsde PFI consiste en une procédurenégociée, partant du postulat queseule la négociation permet de tendrevers la best value for money.

La passation fait l’objet d’une succes-sion en plusieurs étapes visant à rete-nir la meilleure offre :

– une fois opérée l’évaluation préala-ble (fondée sur les prévisions duPublic Sector Comparator), un avisd’appel à candidature est publié au“Journal Officiel de l’Union euro-péenne” (outre la publication de l’avissur Internet et dans la presse spéciali-sée), sous la forme d’un cahier descharges en termes de résultats souhai-tés (output specification) ;

– les offres qui résultent de cet appel àcandidature vont être triées pouraboutir à une short list (c’est-à-direune liste restreinte de candidats :généralement trois candidats vont êtreretenus) lors de la “phase de pré-qua-lification” ;

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– les candidats de la short list entrenten “phase de négociation” avecl’administration ;

– à l’issue des négociations, chaquecandidat présente une offre définitive,de sorte que l’administration puissefaire son choix ultime en faveur d’uncandidat et d’une offre.

Cette procédure a pu poser problèmeau regard des exigences du droit com-munautaire, mais aujourd’hui, depuisla consécration par la directiven° 2004-18 du 31 mars 2004 du systè-me du dialogue compétitif, il semble-rait bien que toute incompatibilité soitproscrite. Force est de constater que sielle est moins rigide que l’appel d’of-fres, la procédure négociée n’a pas eupour effet d’exclure les opérateursétrangers en privilégiant les capitauxnationaux, loin s’en faut. En effet, onconstate que les grands groupes étran-gers, et en particulier français, ont lar-gement bénéficié des partenariatspublic-privé britanniques. En conclu-sion, s’il y a pu avoir une incompatibi-lité formelle au droit communautairependant un certain nombre d’années,cela n’a en rien empêché le respectdes objectifs substantiels du droitcommunautaire : l’absence de barriè-res à l’entrée et l’exercice d’uneconcurrence effective dans des mar-chés ouverts.

Bilan de la pratique des contratsde “PFI”

En décembre 1999, des analyses ontété produites par le Treasury Taskforce(composé de nombreux experts éco-nomistes et financiers) sur 29 mon-tages PFI en cours d’exécution. Seloncette étude, les PFI permettraient deréaliser une économie de 17 % parrapport au pilotage d’opérations simi-laires par les services de l’administra-tion (prestations in house).

Une autre étude, réalisée par leNational Audit Office (NAO) – homo-logue de notre Cour des comptes –met en évidence en 1998 une écono-mie de 10 % sur le coût des prisonsfinancées par le Public PrivatePartnerships par rapport à la gestiondirecte. Le NAO, plus généralement,publie des rapports annuels où il rendcompte du contrôle qu’il exerce,depuis 1992, sur tous les projets enamont et en aval de la PFI, selon lesrègles de la comptabilité publique etau regard du critère de la value formoney.

Enfin, les PPP favorisent la maîtrise descoûts et des délais. Un rapport duNAO de février 2003, procédant àl’analyse de 37 projets de constructionen PFI en comparaison avec des pro-jets publics similaires, relève que seuls22 % des projets en PPP dépassent lebudget prévu contre 73 % des projetspublics, et que les délais ne sontdépassés que dans 24 % des cas enPFI contre 70 % des cas en projetspublics (PFI : Construction Perfor-mance, NAO, Londres, février 2003).

D’un point de vue général, le bilan desPFI est plutôt positif. Preuve en est queles collectivités publiques s’engagentde plus en plus dans cette voie, etnotamment les collectivités locales(depuis la création en 1996 du “4P’s”(Public Private Partnerships Program-me) par l’association des autoritéslocales d’Angleterre et du Pays deGalles, qui a une fonction de promo-tion et de conseil dans l’usage de laPFI). Toutefois, une réserve à pu êtreémise concernant l’application des PFIaux secteurs sujets à des évolutionsrapides. Steve Trueman, directeur de4P’s, estime qu’ “on s’est rendu comp-te que les PFI étaient totalementinadaptés au secteur des hautes tech-nologies, dont le matériel – et le prix –évoluent trop vite. C’est pourquoi lesPFI initiés dans ce secteur se sont qua-

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siment tous soldés par des échecsretentissants”. Tout dépend en lamatière de la rapidité de création deproduits de substitution crédibles dansles marchés concernés (on entend icipar “produits de substitution” desbiens ou services qui présentent descaractéristiques en termes de prix, dequalité, de fonctionnalité, telles queles utilisateurs abandonnent progressi-vement mais durablement le produitpréexistant sur le marché en cause).

2.2. Le modèle italien :les contrats de promoteur

Un type de contrat retient l’attentionen Italie : les contrats de promoteur.

Apparus dans un contexte requérantune optimisation du financement privédes infrastructures et ouvrages publics,ces contrats ont cela de particulierqu’ils s’analysent en un montageconcessif de travaux et/ou de servicespublics, mais d’initiative privée.

Économie générale des contrats depromoteur

• Définition

Les contrats de promoteur sont définispar la loi-cadre sur les travaux publicsn° 109 du 11 février 1994 (leggeMerloni) modifiée par la loi L. 415/98du 18 novembre 1998, portant nou-velle réglementation en matière detravaux publics en concession deconstruction et gestion avec apport decapitaux privés (Project financing).

Ils s’analysent comme des contrats deconcession de construction et de ges-tion d’infrastructures publiques et ilsprésentent les avantages suivants :

– une souplesse dans la déterminationde la durée du contrat (jusqu’à 30ans) ;

– une latitude importante du point devue de l’objet du contrat (aux termesde la loi : “le projet définitif, le projetexécutif et l’exécution des travauxpublics ou d’utilité publique et de tra-vaux qui lui sont structurellement etdirectement liés, ainsi que leur gestionfonctionnelle et économique”) ;

– une structure tarifaire modulable,associant paiement public et finance-ment privé ;

– une maîtrise des délais et des coûtscontractuellement sanctionnée ;

– la prise en charge du risque de ges-tion de l’ouvrage par le concession-naire ;

– une initiative privée susceptibled’être à l’origine de la concession(article 37 bis et suivants).

•• Une concession caractérisée par unobjet souple

De manière tout à fait exceptionnelleen Europe, la concession italiennepeut porter sur “des ouvrages destinésà l’utilisation directe par l’administra-tion publique, lorsqu’ils représententune utilité fonctionnelle pour la ges-tion des services publics, à conditionque subsiste à la charge du conces-sionnaire l’aléa économico-financierde la gestion de l’ouvrage” (article19-2 ter de la loi de 1994 modifiée).

Cette disposition illustre la volonté dulégislateur italien de ne pas circonscri-re la concession au périmètre degestion des services publics. En effet,la concession italienne peut êtreutilisée :

– tant pour un service dont les desti-nataires sont les usagers du service(comme en France),

– que pour un service à destination del’administration – cliente, qui assure

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conjointement la prestation en faveurdes usagers (ce qui en droit français,vu la dichotomie entre délégations deservice public et marchés publics nepourrait entrer que dans le champ dela dernière catégorie).

•• Les modalités de l’initiative privée

Fait rare dans les droits nationauxeuropéens, le contrat de promoteur estun contrat de délégation initié par despersonnes privées (entreprises ougroupements d’entreprises), dénom-mées “entrepreneurs” ou “promo-teurs” depuis 1998. Depuis lors,l’Espagne a transposé la modalité del’initiative privée, même si les formesen sont moins sophistiquées (pas decadre de projet public en amont), parune loi du 23 mai 2003. Il n’endemeure pas moins vrai que laconcession d’initiative privée histori-quement apparaît pour la premièrefois dans la loi italienne et que c’est lalégislation italienne qui en consacre laforme la plus aboutie.

Le procédé est le suivant : l’adminis-tration publique rend compte de sesorientations en termes d’urbanisme etd’aménagement du territoire, et sur lefondement de ces indications généra-les, disponibles sur les sites Internetinstitutionnels, un promoteur est fondéà proposer la réalisation d’un projetd’équipement ou d’infrastructure.Attendu le caractère privé de l’initiati-ve, il incombe à l’entrepreneur deréaliser les études de conception.Dans un dossier remis à la collectivitépublique, le promoteur opère uneétude de faisabilité, définit le projetcompte tenu des besoins de l’adminis-tration et des usagers du service, etpropose un système de tarification etun mode de préfinancement (viabilisépar accord avec un institut de crédit).

Après examen du dossier du promo-teur, la collectivité dispose d’une alter-native :

– soit elle juge que le projet est insuf-fisamment sérieux ou ne présente pasd’intérêt significatif,

– soit elle lance une procédure deconsultation basée sur l’étude du pro-moteur, susceptible de modificationsrelativement substantielles, de sorte àbénéficier d’une mise en concur-rence.

La procédure de consultation permet àla collectivité publique d’optimiserson choix contractuel, en retenant lameilleure offre et le candidat qui pré-sente le plus de garanties profession-nelles, techniques et financières. Lepromoteur primitif, s’il n’est pas rete-nu, est indemnisé par son concurrentayant remporté la procédure deconsultation, à hauteur du coût desétudes réalisées.

•• Une structure tarifaire modulable,associant paiement public et finance-ment privé

L’introduction d’instruments favorisantle financement privé : le droit desconcessions italiennes permet depuis1998 que le concessionnaire puissecréer une société de projet (la “SPV”),susceptible d’émettre des obligations,source majeure de préfinancementprivé.

Un paiement public susceptible d’êtredifféré : l’article 9 du décret législatifn° 190 du 20 août 2002 d’applicationde la loi n° 443 du 21 décembre 2001(legge obiettivo) apporte un certainnombre de précisions quant auxconcessions de construction et de ges-tion d’infrastructures. Il énoncenotamment que si le concessionnairepréfinance l’ouvrage public, encontrepartie, il peut l’exploiter etbénéficier d’“une somme payée entout ou en partie après l’achèvementdes travaux”.

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Une procédure ritualisée dans le pay-sage juridique italien à la faveur del’échelon local

•• Une initiative privée intervenantdans le cadre d’une offre ouverte

Aux termes de l’article 37 bis de la loi-cadre sur les travaux publics, avant le30 juin de chaque année, des “promo-teurs” peuvent présenter aux collecti-vités publiques leurs projets interve-nant dans le cadre d’un contrat deconcession.

L’article 37 ter de la même loi disposequ’avant le 30 octobre de chaqueannée, les administrations adjudicatri-ces se prononcent sur la faisabilité desopérations proposées.

Pour les opérations jugées viables etd’intérêt public, une mise en concur-rence est organisée avant le 31 décem-bre (article 37 quater). La présélection,qui conduit à l’établissement d’uneshort list (le promoteur et deuxconcurrents) s’opère compte tenu ducritère de l’offre économiquement laplus avantageuse. À son terme, la col-lectivité publique négocie avec lesmembres de la short list pour retenir etaméliorer l’offre la plus convaincante,dans la lignée du projet initié par lepromoteur primitif.

•• Bilan de la pratique du contrat depromoteur : un atout pour les collec-tivités locales

Ce contrat, apparu en 1998 (loi modi-fiant la loi-cadre sur les travauxpublics), s’est rapidement développé.Ce dispositif est essentiellement d’usa-ge local : régions et communes en sontles principaux utilisateurs. Cela n’estguère étonnant compte tenu du princi-pe de décentralisation de la compé-tence d’entreprendre les travauxpublics en Italie.

En 2001, on dénombre en phased’étude pour les collectivités localesenviron 150 ouvrages d’initiativeprivée, d’un montant moyen de 15millions d’euros (de 500 000 € pourdes petits projets à 1 milliard d’eurosdans le cadre du projet du tunnel sou-terrain milanais). En avril 2002,l’Institut des grandes infrastructuresnote que déjà 19 projets de promo-teurs ont été adjugés, d’un montanttotal de 2,5 milliards d’euros. Ces pro-jets concernent des réseaux de distri-bution urbains (gaz, égouts), des équi-pements sportifs et de loisirs, des par-kings et des hôpitaux, et pour le plusimportant, une liaison autoroutièreentre Rome et Pescara.

Des cas concrets d’application de cedispositif ont été étudiés par le groupede travail Dimensions macro-écono-miques des partenariats public-privéde l’IGD, notamment celui de la rési-dence universitaire à Pise. Ce cas estriche d’enseignements pour différentesraisons. D’abord, il révèle la tendanceitalienne – que l’on ne retrouve pas enGrande-Bretagne – à favoriser un par-tenariat accessible aux PME et artisans(en l’occurrence le promoteur devenuconcessionnaire était un consortiumcomposé d’une centaine de petitesentreprises). Ensuite, il dénote de lasouplesse de la procédure italienne,souplesse accrue lorsque le choixpublic porte sur le candidat – promo-teur primitif : l’administration lors desnégociations a demandé à ce derniertoute une série de modifications, quiin fine ont été acceptées. Enfin, ce casillustre la filiation étroite qui existeentre la PFI et la concession italienne :le cocontractant assure ici la concep-tion, la construction (3 ans), la gestionet la maintenance du site (30 ans), etsurtout le préfinancement de la phaseamont, dans la mesure où le paiementpublic n’intervient qu’à la réceptionde l’ouvrage ; enfin, des clauses depénalité et d’incitation sont stipulées

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de sorte à assurer maîtrise des délais etdes coûts et qualité du service.

2.3. Espagne et Portugal :le système des concessionsà péage virtuel

Un montage concessif original

•• Un modèle contractuel associantmontage concessif et paiement public

Inspirées par l’expérience britannique,la pratique espagnole (aujourd’huiconsacrée par le législateur, cf. loin° 13/2003 du 23 mai 2003 relativeau contrat de concession de travauxpublics) et la loi portugaise (décret-loin° 267/97 du 2 octobre 1997 portantcréation des concessions sans paie-ment par l’utilisateur – les contrats ditsSCUT –) ont créé un nouveau modèlecontractuel, caractérisé par l’associa-tion d’un montage concessif avec uneformule de versements directs par lacollectivité publique pour remplacer,ou compléter le cas échéant, les droitsperçus sur les usagers.

Via le mécanisme du péage virtuel(shadow tolls) – encore dit “péage fic-tif” – le concessionnaire assume l’obli-gation de concevoir, construire, finan-cer et exploiter une infrastructure(généralement routière) pendant uncertain nombre d’années, en contre-partie de versements périodiquespublics, calculés en référence d’unrisque trafic. Ce mode de paiementpeut le cas échéant compléter un paie-ment perçu sur les usagers (péage réel+ péage virtuel). L’avantage tient dansla capacité de l’État et des collectivitéslocales de moduler le rapport entrefinancement perçu sur l’usager etfinancement perçu sur le contribuable(cette seconde voie, plus diffuse, fai-sant l’objet de moindres contestations,même si elle n’est pas de nature àfavoriser l’équité et la responsabilisa-tion des usagers, en cas de péage

purement virtuel).

Dans tous les cas, le paiement a celad’avantageux qu’il est étalé dans letemps et qu’il est de nature à inciter leconcessionnaire à de meilleures per-formances, qui peuvent aussi consti-tuer des objectifs d’ordre qualitatif.

•• Un système favorisant maîtrise descoûts et des délais et qualité du servi-ce rendu à l’usager

Le péage virtuel (shadow tolls) estversé en fonction du trafic réel, grâceà des systèmes de comptage, afin d’yintéresser l’entreprise. Autrement dit,la rémunération du concessionnaireest subordonnée, tout au long ducontrat, à la circulation effective. Uneconséquence majeure y est associée :le cocontractant devra autant que fairese peut éviter les perturbations du tra-fic lors des travaux de réparation. Lecontrat pourra ajouter des clauses depénalité en ce sens pour renforcerl’effet dissuasif.

En outre, il est d’usage, dans ce typede concessions, de stipuler que lesversements ne commencent que lorsde l’ouverture à la circulation de l’in-frastructure routière ou autoroutière.C’est là un facteur d’incitation à lamaîtrise des délais d’achèvement destravaux pour le cocontractant.

Enfin, la loi espagnole du 23 mai 2003introduit une “clause de progrès” obli-geant le concessionnaire à maintenirdurant toute la durée du contrat l’ou-vrage public en conformité aux nor-mes applicables (techniques, environ-nementales et de santé) et à améliorerle service rendu aux usagers comptetenu du progrès scientifique.

Applications du dispositif

Le dispositif de la concession à péagevirtuel a été assez largement appliqué

Les contrats de partenariat : entre innovation et adaptation

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en Espagne (en l’absence même d’uneloi spéciale l’instituant jusqu’en mai2003) et au Portugal. En France, ilsemblerait qu’il soit envisageable,compte tenu du primat que le jugeadministratif accorde aujourd’hui aucritère du risque d’exploitation, entant que critère substitutif à celui de larémunération perçue sur l’usager. Pourautant, les opérateurs publics et privésfrançais n’ont jamais mis en œuvrecette modalité, en grande partie parcrainte, en l’absence de précédents,d’une probable annulation conten-tieuse.

Au Portugal, les opérations lancéesdans le cadre du programme SCUT(acronyme signifiant “sans paiementpar l’utilisateur”) sont d’une ampleurremarquable. Non moins de 7 auto-routes ont été concédées pour unepériode de 30 ans. Chacun de ces pro-jets comporte des sections à construi-re par le concessionnaire ainsi que destronçons déjà réalisés, dès lors soit àréhabiliter, soit à reprendre en l’état.La Banque européenne d’investisse-

ment (BEI) a largement contribué à laréussite de ces opérations, finançant àprès de 50 % le programme SCUT.Trois des projets autoroutiers ont étéremportés par le groupement menépar Eiffage et comprenant CDCProjets, EGIS Projects et l’entrepriseportugaise Contacto.

Ce système a pu être utilisé en outreau Pays de Galles, au profit d’unesociété commune constituée par VinciConcessions et Morgan SindallInvestments, qui a obtenu l’autorisa-tion de mise en service du contourne-ment routier du sud de Newport. Leprojet de type PPP, d’un coût estimé à79 milliards d’euros, a permis deconfier à la joint-venture le finance-ment, la conception, la construction etl’exploitation du contournement rou-tier, sur une durée de 40 ans, encontrepartie d’une rémunération tota-lement assurée par un mécanisme depéage virtuel (donc un prix progressif,fonction du risque trafic). Le finance-ment du projet a été assuré moyennantun prêt courant sur 38 ans.

Chapitre 2

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Aujourd’hui, la contribution desacteurs locaux dans les dépensespubliques d’investissement occupeune part largement prépondérante. Siles collectivités territoriales ne sontpas directement soumises aux critèresde Maastricht (c’est l’État qui répondde ses obligations vis-à-vis de l’Unioneuropéenne, quand bien même le cal-cul du déficit public intègre bien évi-demment les budgets des collectivitéslocales), les élus sont conscients de lanécessité d’équilibrer les budgets dontils ont la responsabilité et de fournir àla collectivité des services publics per-formants tout en assurant la cohésionterritoriale et les conditions d’une éco-nomie pérenne.

Les contrats de partenariat (CP) visentl’échelon national et l’échelon local :l’ordonnance qui les institue est eneffet à l’origine de nouvelles disposi-tions du Code général des collectivitésterritoriales (CGCT, article L. 1414-1 etsuivants).

La spécificité de l’échelon local obligeà s’interroger sur l’utilisation de l’outilpartenarial par :

– les collectivités locales : communes,départements, régions ;

– et leurs groupements : établisse-ments publics de coopération inter-communale (EPCI) à fiscalité propre(communautés de communes, com-munautés d’agglomérations, commu-nautés urbaines) et syndicats inter-communaux (SIVOM, SIVU).

Ce questionnement, aujourd’hui pro-spectif, est envisagé sous trois angles :les champs concernés par les CPlocaux (1.), les intérêts économiqueset financiers déterminant le recoursaux CP pour les collectivités locales etleurs groupements (2.), les enjeuxpolitiques et budgétaires propres àfavoriser ou, le cas échéant, contrain-dre l’usage des CP par les responsa-

bles locaux (3.).

1. Les champs concernés

Cette dimension est analysée comptetenu des variables suivantes : compé-tences des collectivités territoriales etpérimètre des services publics locaux(1.1.) ; degré d’expertise des collectivi-tés dans la conduite de l’évaluationpréalable du montage partenarial(1.2.).

1.1. Les compétencesdes collectivités territoriales

Les collectivités locales et leurs grou-pements ont en charge de répondre àun certain nombre de besoins collec-tifs. Cette réponse se traduit par lamise en œuvre de politiques et par lacréation et la gestion (directe ou délé-guée) de services publics locaux.

Les services publics locaux concer-nent un ensemble de secteurs de pro-ximité dont la tendance est à l’élargis-sement compte tenu :

– d’une part du transfert de nouvellescompétences au profit de l’échelonlocal (cf. Acte II de la décentralisation,cf. loi n° 2004-809 du 13 août 2004relative aux libertés et responsabilitéslocales) ;

– et d’autre part de l’apparition denouveaux besoins collectifs liésnotamment au progrès technique.

Secteurs concernés

Sans prétendre à l’exhaustivité, sontconcernés :

– l’eau (distribution et assainissement) ;

– les déchets (collecte et traite-ment/épuration) ;

– l’énergie (distribution de gaz etd’électricité) ;

CHAPITRE 3

Contrats de partenariatet collectivités locales :les enjeux

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– le chauffage urbain (gestion desréseaux) ;

– le stationnement ;

– les transports (en termes d’équipe-ments et d’infrastructures) ;

– les services funéraires et crémato-riums ;

– les TIC (télécommunications, Inter-net moyen et haut débit dans lesconditions fixées par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confian-ce dans l’économie numérique,cf. article L. 1425-1 du CGCT) ;

– les loisirs (tourisme, sport, activitésculturelles) ;

– la restauration collective et scolaire ;

– les équipements accueillant des ser-vices publics sociaux (à destinationnotamment de populations âgées, pré-caires ou en incapacité).

Modes de gestion

Schématiquement, les activités de ser-vices publics locaux, qu’ils soientadministratifs (SPA) ou industriels etcommerciaux (SPIC), font l’objet d’unegestion par les collectivités locales etleurs groupements qui peut être :

– directe (régie + marchés publics) ;

– déléguée (délégations de servicepublic) ;

– partenariale (baux emphytéotiquesadministratifs avec convention d’ex-ploitation du service adossée ; bauxemphytéotiques sectoriels issus de laloi n° 2002-1094 du 19 août 2002 dite“LOPSI”, de la loi n° 2002-1138 du9 septembre 2002 dite “LOPJ” et del’ordonnance n° 2003-850 du 4septembre 2003 portant création desbaux emphytéotiques hospitaliers dits“BEH” ; contrats de partenariat issusde l’ordonnance n° 2004-559 du17 juin 2004).

• Dans le premier modèle, la gestiondes services publics est dite directedans la mesure où :

– soit la collectivité locale assure elle-même la prestation, de l’amont àl’aval ;

– soit elle assure le service et assumeles risques qui y sont liés, mais passedes marchés de conception, de tra-vaux, de fournitures et/ou de servicespour associer le secteur privé à la four-niture des moyens du service public,ce qui juridiquement implique la com-binaison de la régie et du droit desmarchés publics (MP), régi par lesdispositions du décret n° 2004-15 du7 janvier 2004 portant Code des mar-chés publics et de la loi n° 85-704relative à la maîtrise d’ouvragepublique et ses rapports avec la maîtri-se d’œuvre privée (dite “loi MOP”).

L’avantage de ce modèle est que lapersonne publique maîtrisera l’infor-mation notamment relative aux coûtsdu service. Différents facteurs favori-sent cette information : la mise enconcurrence fréquente des marchéspublics, leur courte durée, l’étroitcontrôle dont ils font l’objet (du fait dela logique de prestation contre unprix). La contrepartie de cet avantageinformationnel réside dans le fait queces contrats tendent à cantonner laresponsabilité du titulaire du marché àl’exécution de ce dernier. Cette rela-tion de courte durée avec la personnepublique est rarement incitative enterme de réduction des coûts d’exploi-tation et donc peu favorable à l’effica-cité. Enfin, le paiement d’une presta-tion facturée par l’entreprise à la per-sonne publique n’opère aucun trans-fert de risque.

• Dans le deuxième modèle, la gestiondes services publics est dite déléguée,le délégataire assumant en général lerisque lié à la gestion du service public

Chapitre 3

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(sauf cas particulier des concessionsde travaux où seuls les risques d’ex-ploitation sont délégués outre la mis-sion de construction).

Il s’agit d’un système extrêmementincitatif : tout gain de productivitéréalisé profite à l’entreprise cocontrac-tante et à l’usager. En contrepartie decet avantage, la personne publiqueaccepte d’abandonner à son déléga-taire une “rente informationnelle”. Enpratique, en dépit de la procédure durapport d’information remis annuelle-ment par le délégataire à la collectivi-té locale délégante (article L. 1411-3du CGCT), on constate que les déléga-tions de service public ont peu favori-sé le contrôle par les personnespubliques de la conduite des missionsassignées à leur cocontractant privé.

• Enfin, le troisième modèle, partena-rial, est constitué d’un ensemble deformules hybrides, toutes caractériséespar la recherche d’une répartition desrisques entre collectivité publique etopérateur privé.

L’idée, dans la formule partenariale, vasimultanément consister :

– à lever des obstacles et rigiditésd’ordre juridique qui caractérisent lesmodèles MP et DSP (cf. chapitrePremier) ;

– à rechercher une conciliation entredeux objectifs rarement réalisés demanière conjointe : obtenir une infor-mation précise et fiable d’une part, etinciter son partenaire à offrir demeilleures prestations d’autre part.

L’application du montage partenarialaux technologies de l’information etde la communication (TIC)

Les contrats de partenariat pourraientprésenter des avantages compétitifsimportants par rapport aux marchés

publics et aux concessions dans lesecteur des TIC, en termes de bancabi-lité comme de service rendu à l’usa-ger.

Les TIC constituent des services qui nepeuvent être assurés que moyennant laconstruction préalable d’une infrastru-cutre essentielle coûteuse (le réseaude fibre optique). Aujourd’hui, l’initia-tive privée fait défaut dans la construc-tion de cette infrastructure essentielle,les opérateurs privés concentrant parsouci de rentabilité leurs activités dansles services qui s’y rattachent. Cettepolitique stratégique des entreprisesconduit à l’existence de nombreuses“zones blanches” non desservies parles nouvelles technologies.

Avant l’apparition des contrats de par-tenariat, l’intervention de la puissancepublique pour mettre un terme à cesinégalités territoriales entre usagers duservice public pouvait se traduire enthéorie par différentes options :

– la régie ;

– les marchés publics (soit un marchéglobal alloti, soit un marché de travauxpublics suivi d’un marché deservices) ;

– une maîtrise d’ouvrage publiquepour les travaux suivie d’un affer-mage ;

– la concession.

Cependant, ces différentes optionsprésentent des inconvénients majeursdans le secteur des TIC : la régie et lamaîtrise d’ouvrage publique se heur-tent à la technicité des opérationsenvisagées et à l’important finance-ment qu’elles requièrent ; les marchéspublics, de courte durée et fondés surune logique forfaitaire, sont peu inci-tatifs et créent des coûts d’interfacepréjudiciables ; enfin, supportant lerisque d’exploitation, le concession-naire a tout intérêt à ne pas desservir

Contrats de partenariat et collectivités locales : les enjeux

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les zones blanches, et si l’autoritépublique délégante le subventionne àces fins, le contrat de délégation deservice public encourt la requalifica-tion en marché public.

Le contrat de partenariat pourrait àl’inverse présenter en la matière denombreux avantages. Tout d’abord,s’agissant d’opérations nécessitant delourds investissements, les banquesaccepteront plus aisément de s’enga-ger dans la transaction (la bancabilitéd’un projet étant subordonnée à uncertain ratio “coût du projet/coûts detransaction”). La créance de la banquesur l’opérateur en CP prend la formed’un loyer versé par une collectivitépublique, présentant donc un risque“secteur public”, par essence très fai-ble. Le contrat de partenariat pourraitpermettre de développer y comprisdans les zones blanches les réseaux decollecte (autrement dit la fibre optiqueGPON : technologie de substitution àl’ADSL, elle offre un débit pouvantaller jusqu’à 100 MB/seconde), etdonc par suite les réseaux de desserte(les services de TIC), étant entenduque le risque transféré à l’entreprisen’est pas un risque volume. Dans cetteperspective, le contrat de partenariatpeut favoriser l’égalité des usagersdevant le service public et la cohésionterritoriale.

1.2. L’enjeude l’évaluation juridiqueet économique préalable

Du principe constitutionnel de libreadministration des collectivités localesdérive le principe du libre choix dumode de gestion des services publicslocaux par les collectivités locales etleurs groupements. Cependant, enpratique, le choix du mode de gestionest déconnecté de toute culture d’éva-luation.

L’ordonnance sur les contrats de parte-

nariat à cet égard est porteuse d’unimportant changement de perspec-tive : pour recourir à de tels contrats,les instances locales ne devront pas seborner à se prononcer sur le seul prin-cipe du recours au contrat de partena-riat. Elles devront au surplus justifierl’intérêt général et l’utilité écono-mique qui conduisent à privilégier laforme du contrat de partenariat parrapport aux autres modes de gestiondes services publics possibles pour unprojet déterminé.

L’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin2004 conditionne en effet le recoursau contrat de partenariat à la satisfac-tion de deux conditions juridiquesalternatives (l’urgence et la complexi-té) et à une analyse économique dontl’objet est de démontrer l’utilité dumontage en contrat de partenariat parrapport aux autres solutions (contrac-tuelles ou en régie) en termes de coûtglobal, de performance et de partagedes risques.

La phase d’évaluation juridique etéconomique (article L. 1414-2 duCGCT) nécessite des compétencesjuridiques, techniques et financièresau profit des collectivités locales. Laphase de négociation, elle-même, sol-licite de telles compétences, sauf à ris-quer une asymétrie d’informationentre les collectivités locales et lesentreprises candidates au partenariat(notamment les grands groupes deBTP) au détriment des premières.

Si l’on considère, notamment en raisondes coûts des ressources financières detransaction, que les contrats de parte-nariat ne pourront raisonnablementêtre envisagés que pour des opérationsrelativement importantes (v. supra2.2.), les collectivités concernéesdevraient être essentiellement lesdépartements et les régions. Les com-munes pourront toutefois s’engagerdans cette voie soit directement, pour

Chapitre 3

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une part minoritaire d’entre elles, soitindirectement, par le transfert de leurscompétences à des établissementspublics de coopération intercommuna-le (EPCI). Les principaux EPCI concer-nés devraient être les communautésurbaines et les communautés d’agglo-mérations, ces deux types de structuresbénéficiant d’une assise financièreassez forte depuis la loi n° 99-586 du12 juillet 1999 relative au renforce-ment et à la simplification de la coopé-ration intercommunale (dite “loiChevènement”). Cependant, même ceséchelons de “taille critique” ne dispo-sent pas nécessairement d’un degréd’expertise suffisant. Il serait souhaita-ble que se constituent des pôles decompétences pluridisciplinaires pourtirer parti de la mise en concurrencedes choix publics, à l’image de ce quiest pratiqué au Royaume-Uni depuis lelancement en 1992 du programme dela Private Finance Initiative (PFI). Ensynthèse, les nouveaux partenariatspublic-privé imposent de nouvellescompétences publiques, ce qui pose laquestion de la mutualisation de certai-nes fonctions, notamment pour lespetites collectivités.

Il n’en demeure pas moins vrai quepour les collectivités, indépendam-ment de leur dimension, la consulta-tion de conseils extérieurs sembleinéluctable. Il s’agit d’une solutionsatisfaisante, mais qui le serait biendavantage si les collectivités étaient àmême d’”évaluer les évaluations”d’origine externe. L’enjeu d’une exper-tise internalisée ne doit pas être négli-gé dans la mesure où il est le gage à lafois d’une indépendance dans la déci-sion par les collectivités locales etd’une efficacité renforcée des choixpublics.

Le rôle de la mission d’appui à la réali-sation des contrats de partenariat,instituée par le décret n° 2004-1119du 19 octobre 2004, doit, à cet égard,faire l’objet d’une appréciation nuan-cée. Elle peut en effet être sollicitéepour “rendre une expertise sur l’éco-nomie générale des projets de contrat”et “assister les personnes publiquesdans le cadre de l’élaboration des pro-jets” et de “la négociation descontrats”. Pour autant, elle ne sauraitavoir vocation à se substituer à descompétences locales éventuellementdéfaillantes. Organisme expert présidépar Noël de Saint-Pulgent, la missiond’appui à la réalisation des contrats departenariat doit être envisagée commeintervenant :

– dans un premier temps, vraisembla-blement de manière active, dès laphase amont, pour toute questiontenant à la bonne conduite de l’éva-luation ;

– dans un second temps, si l’usage desCP se banalise, en dernière instance,au terme d’un solide travail d’étude dela part des personnes publiques qui luidemandent un soutien, pour éviter unengorgement des demandes à prendreen compte, qui serait immanquable-ment préjudiciable à une conclusiondans un délai raisonnable de cescontrats.

Contrats de partenariat et collectivités locales : les enjeux

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• Le contrat de partenariat n’est pasexclu pour les communes, même nonregroupées, comme l’a montré l’uniquecontrat de partenariat signé à ce jour,entre Auvers-sur-Oise (6 900 habitants)et le groupement formé par EL-ALE,société implantée à Sarcelles, déjà four-nisseur d’une vingtaine de communesdu département et ETDE, filiale du grou-pe Bouygues, pour la gestion globale del’éclairage public de la commune (réno-vation, maintenance et fourniture d’é-nergie). L’urgence a été invoquée autitre de l’évaluation préalable comptetenu de la dangerosité des installations,non compatibles aux normes. Les délaisde recours étant expirés, le motif del’urgence ne fera pas l’objet d’uneappréciation par le juge administratif.

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2. Les intérêts économiqueset financiers

Les intérêts économiques et financierslocaux en jeu dans les contrats de par-tenariat s’analysent au vu :

– des ambitions et contraintes des col-lectivités locales : aspects écono-miques, sociaux et budgétaires (2.1.) ;

– des atouts et faiblesses du contrat departenariat en comparaison aux autresmodes de gestion des services publics(2.2.).

2.1. Contraintes et besoinsdes collectivités locales

Le taux d’endettement des collectivitéslocales s’est stabilisé depuis la fin des

années 1980 mais on constate depuisdeux ans un nouvel infléchissementdes finances publiques locales lié à lamontée en charge plus rapide desdépenses (nouvelles compétences,conjoncture économique, nouveauxtextes législatifs et réglementaires –exemple des 35 heures –) par rapportà l’évolution des recettes. Les collecti-vités locales et leurs groupements àfiscalité propre ont plutôt eu tendanceà augmenter leurs dépenses d’investis-sement hors dette depuis 1997(+ 4,6 % par an en moyenne jusqu’en2003), ce qui traduit l’importance deleurs besoins en termes de construc-tion, renouvellement et modernisationd’équipements et d’infrastructures.

Il ne faudrait cependant pas se fonderde manière univoque sur l’état de

Chapitre 3

La mission d’appui à la réalisation des contrats de partenariatdans le paysage juridique des missions d’appui aux PPP

Précisons avant tout que les organes délibérants ne sont aucunement liés par les avis desmissions d’appui aux PPP : ils conservent la plénitude du pouvoir décisionnel sur l’op-portunité ou non de recourir au contrat de partenariat.

La mission d’appui instituée par le décret du 19 octobre 2004 n’est pas l’unique inter-locuteur des collectivités publiques dans la réalisation des contrats de partenariat.Cependant, elle se distingue de toutes autres structures par sa vocation transversale etmultisectorielle.

Les autres missions d’appui, par contraste, sont des structures à vocation sectorielle :

– la Mission nationale d’appui à l’investissement hospitalier (la MAINH) constitue l’in-terlocuteur de premier rang des collectivités publiques concernant des projets d’hôpi-taux (en BEH comme en CP) ;

– l’Agence de maîtrise d’ouvrage des travaux du ministère de la Justice (l’AMOTMJ) pilo-te les études et travaux de nombreuses opérations de construction, rénovation et réha-bilitation de palais de justice et d’établissements pénitentiaires ;

– enfin, un organisme expert chargé de l’évaluation des partenariats de l’État au sein duministère de la Défense (organisme expert Défense) a été institué par le décret n° 2004-1551 du 30 déc. 2004 pris sur le fondement de l’article 2 de l’ordonnance n° 2004-559sur les contrats de partenariat.

Au total, un organisme généraliste et trois organismes sectoriels interviennent gratuite-ment à la demande des collectivités publiques en appui à la phase d’évaluation, étantprécisé que deux des quatre organismes experts ont été institués sur le fondement del’ordonnance et donc ont une vocation plus ciblée sur les contrats de partenariat (et nonles PPP lato sensu) : la mission d’appui à la réalisation des contrats de partenariat et l’or-ganisme expert Défense. Ce dualisme génère une situation d’interrégulation, potentielle-ment conflictuelle en théorie. Cependant, il semblerait que ces institutions cohabitent enbonne intelligence en veillant aux risques de conflits de compétence positifs et négatifset à la cohérence de leurs lignes directrices respectives.

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raréfaction des finances publiquespour privilégier la solution descontrats de partenariat. En effet,subordonner le recours au contrat departenariat à des situations où lesfinances publiques ne permettent pasde procéder autrement et où la délé-gation de service public ne peut pasêtre envisagée consisterait en unusage non optimisé de ce contrat.Fondé sur une logique similaire àcelle du contrat de PFI anglo-saxon, lecontrat de partenariat, moyennant uneétude préalable sérieuse, devrait per-mettre de réaliser des économies d’é-chelle ainsi qu’une disponibilité desouvrages plus rapide (laquelle génèrede l’utilité socio-économique) parrapport à la réalisation d’une mêmeopération en maîtrise d’ouvragepublique. Le seul critère pertinent auplan économique qui doit conduire àjuger de l’opportunité ou non ducontrat de partenariat est le suivant :les coûts de transactions générés parle CP sont-ils inférieurs ou supérieursaux avantages socio-économiques liésà la réalisation de l’équipement ou del’infrastructure ?

Au surplus, le contrat de partenariatrend possible une pression fiscaleétalée dans le temps, ainsi qu’unpartage des risques, ce que ne per-mettent :

– ni la délégation de service public(DSP), le plus souvent financée par lesusagers du service et fondée en toutétat de cause sur un transfert intégraldes risques au partenaire (notammentle risque volume, encore dit “risquetrafic” ou “risque fréquentation”) ;

– ni le marché public (MP), où lecocontractant est nécessairement payépar un prix supporté sur une seuleannée d’exercice par le contribuable,et qui en toute hypothèse maintientl’intégralité du risque du côté de lapersonne publique.

2.2. Atouts et faiblesses du contratde partenariat

•• Les coûts de transaction

Il n’existe pas de rapport de propor-tionnalité pur entre la complexité del’opération envisagée en CP et lescoûts de transaction y afférant.

Plus précisément, les coûts de transac-tion comportent une part fixe irréduc-tible, indépendamment du type d’opé-ration envisagé, qui associe les coûtssuivants : évaluation préalable, rené-gociations, recherche d’information,contrôle de l’opérateur. L’indem-nisation des entreprises non retenuespourrait également être envisagée : ils’agit d’une simple faculté aux termesde l’article 7 de l’ordonnance et del’article L. 1414-7 du CGCT, mais lesdébats entre opérateurs publics et pri-vés conduisent le plus souvent àconsidérer qu’une telle indemnisationdes candidats non retenus, maisinscrits dans la short list lors du dialo-gue compétitif, semble indispensablepour inciter les entreprises à proposerleurs candidatures, et faire ainsi jouerla concurrence pour bénéficier desmeilleures offres (ce sujet cristallise uncertain nombre de craintes du côté desentreprises, parallèlement à l’enjeu dela confidentialité des informationséchangées lors du dialogue compé-titif).

Par ailleurs, pour des opérations d’unmontant comparable, les coûts detransaction augmentent lorsquedécroît le niveau d’expertise de la col-lectivité publique (cf. coût du recoursaux conseils extérieurs).

En conséquence, pour des opérationsde faible ampleur, s’impose la conclu-sion suivant laquelle les contrats departenariat ne sont pas le montageéconomiquement pertinent – nonob-stant les obstacles juridiques liés à la

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phase d’évaluation –, à la réserve près,toutefois, qu’en assignant au partenai-re la réalisation d’une opération àobjets multiples (ex. : constructiond’une piscine, d’un centre culturel etmaintenance de l’éclairage public surune zone déterminée), on peutescompter des effets d’échelle sur lescoûts de transaction.

En synthèse, le contrat de partenariatrisque d’induire des coûts de transac-tion plus importants que les marchéspublics et les délégations de servicepublic, en particulier pour les collecti-vités qui ne disposent pas en internedes compétences requises en termed’évaluation. Toutefois, cet écart pour-rait se réduire au fur et à mesure de labanalisation des contrats de partena-riat. Or, l’utilisation du CP est notam-ment conditionnée par :

– l’apprentissage des collectivitéslocales et de leurs groupements en ter-mes d’expertise juridique, financièreet économique ;

– la réduction du risque juridique etéconomique qui inquiète aujourd’huiles élus.

•• Le coût d’opportunité

Contrats de longue durée, les CP ris-quent d’impacter le budget des collec-tivités locales et de leurs groupementsprincipalement dans des dépenses defonctionnement sur plusieurs dizainesd’années. Ces dépenses correspondentà autant de ressources que les collecti-vités ne pourront pas mettre à disposi-tion d’autres projets de biens collec-tifs. En effet, au plan comptable, lescollectivités locales sont tenues derespecter l’équilibre du budget de lasection de fonctionnement, phénomè-ne qui, mis en rapport avec la conclu-sion d’un contrat de partenariat, limitele solde d’autofinancement (ce solde,calculé par la différence des recettes etdes dépenses de fonctionnement, ali-mente en principe la section d’inves-

tissement). Le contribuable et la col-lectivité risquent d’avoir à supporterun coût d’opportunité supérieur encontrat de partenariat par rapport à unprojet mené en marché public ou endélégation de service public, dès lorsque les marchés sont en principe decourte durée et que les délégations,caractérisées par une logique de trans-fert du risque, sont moins coûteusespour la collectivité en cas d’aléa (saufcas de mise en jeu, toutefois, des théo-ries du fait du prince, des sujétionsimprévues et de l’imprévision). Enfin,si les infrastructures, équipements etservices fournis par le partenaireengendraient sur le long terme une uti-lité soio-économique inférieure auxprévisions initiales, le coût du contratde partenariat serait principalementsupporté par les générations futures,ce qui pourrait être politiquement pro-blématique.

L’idée est donc qu’avec les contrats departenariat, les collectivités localesprennent un risque de voir réduitesleurs marges de manœuvre dans laconduite de projets futurs sur unepériode relativement longue (5 à 30ans environ). Cet élément obligera lescollectivités locales à bien veiller àl’utilité future des biens et servicesréalisés en CP, et en conséquenceobserver une vigilance particulièredans les secteurs soumis à des risquesd’importantes mutations technolo-giques. La remarque vaut cependantégalement pour une solution en bailemphytéotique administratif (BEA)avec convention d’organisation du ser-vice public adossée, et a fortiori pourune solution en DSP, contrat de duréeaussi longue que le CP, et ce, que lesfinancements publics proviennent del’utilisateur (usager du service) ou ducontribuable (collectivité). Plus préci-sément, le coût d’opportunité en DSPdevrait, pour deux raisons au moins,excéder le coût d’opportunité en CP :

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– d’une part, parce que l’ordonnancesur les contrats de partenariat prévoitau titre des clauses obligatoires desclauses de rendez-vous avec le parte-naire pour réévaluer les conditions ducontrat (double avantage du CP : uncontrat complet et ouvert) ;

– d’autre part, parce que le surcoûtfinancier lié à l’externalisation du pré-financement (cf. taux pratiqués par lesbanques et notation des agences)devrait dans la plupart des cas êtremoins onéreux en CP qu’en DSP,compte tenu du fait qu’à la différencedu délégataire, le partenaire ne devraitsupporter que les risques qu’il est lemieux à même de maîtriser (cetteréflexion autour du partage optimaldes risques n’est pas nouvelle maiselle n’est que très rarement mise àprofit dans les concessions, tandis quel’ordonnance sur les contrats de parte-nariat en fait un critère d’évaluationpréalable, un sujet de négociationsainsi qu’une clause obligatoire ducontrat) et que les banques disposentd’une garantie assise sur le loyer versépar l’administration au partenaire.

Enfin, si les contrats de partenariatentament le solde d’autofinancement,il faut réaliser que pour mener à bienles projets éligibles aux contrats departenariat en maîtrise d’ouvragepublique, les collectivités localesseraient obligées d’engager des fondsd’investissement et surtout de recourirà l’emprunt. Dans cette perspective, leremboursement de la dette place éga-lement les collectivités en situation derestriction budgétaire future.

•• Les avantages liés à la globalité ducontrat

Le contrat de partenariat, compte tenude son caractère global, devrait per-mettre :

– la réduction des risques d’interface(en particulier entre conception et

construction, et entre construction etmaintenance) en responsabilisant lecocontractant sur l’intérêt qu’il tire àne négliger aucune des phases del’opération, étant donné qu’il suppor-te une partie des risques liés à chacu-ne de ces étapes ;

– la réalisation d’économies d’échelle(effet synergie en ressources humaineset structurelles) ;

– la mise à disposition pour les usa-gers d’équipements caractérisés parune certaine cohérence architecturaleet en bon état sur une longue durée(cf. maintenance et entretien).

Ces différents avantages ne se retrou-vent pas dans le modèle du marchépublic, contrat nécessairement limitédans son objet, dans la mesure où laloi MOP proscrit en principe lerecours aux marchés de conception-réalisation. De surcroît, même dans lecadre des marchés de conception-réalisation, la maintenance ne peutêtre dévolue au même cocontractant.

•• Disponibilité de l’ouvrage et paie-ment public : une avantageuse disso-ciation dans le temps

Le contrat de partenariat permet à unepersonne publique de faire préfinan-cer un ouvrage ou une infrastructurepar un opérateur qui ne sera rémuné-ré que progressivement, le dernierpaiement étant réalisé en fin d’exé-cution du contrat. Concrètement, lamajeure partie des paiements publicsinterviendra dans la plupart des caslors de la phase d’entretien-mainte-nance. Ainsi les collectivités peuvententreprendre des projets à forte utilitééconomique et sociale, mais quiauraient présenté des difficultés rédhi-bitoires en termes de dépenses d’in-vestissement s’il s’était agi de lesmener dans le cadre de marchéspublics.

Contrats de partenariat et collectivités locales : les enjeux

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À cet égard, au titre des clausesperformantielles (clauses de bonus/malus), le CP pourra comprendre despénalités pour inciter le partenaire àgarantir une disponibilité de l’ouvragedans un certain délai de même qu’unequalité constante de l’entretien. EnGrande-Bretagne, ces clauses sontd’usage fréquent et ont démontré leurefficacité (cf. rapport du NationalAudit Office de février 2003 : lesdélais ne seraient dépassés que dans24 % des cas en PFI contre 70 % descas en projets publics).

•• Transfert des risques, paiementpublic et “bancabilité”

La rémunération de l’entreprisecocontractante en contrat de partena-riat sera de type binôme, comportantune part fixe ainsi qu’une part varia-ble, fondée sur un système debonus/malus en fonction du respectdes objectifs de performance assignésau partenaire. L’état actuel du droit nepermet pas de déterminer avec exacti-tude quel taux pourra être retenu pourla part variable. Cependant, il ne fau-drait pas que l’administration la fondesur un transfert des risques de typeexploitation, sauf à risquer une annu-lation contentieuse du montage,requalifié dès lors en délégation deservice public.

Il n’en demeure pas moins vrai quel’existence même d’une part fixe dansla rémunération du partenaire a poureffet de transformer pour une partiesignificative un risque de crédit“société de projet” en un risque “sec-teur public”, donc un risque très faiblepour la banque créancière de l’opéra-teur privé partenaire.

2.3. Les enjeux comptables :distinction des systèmesde comptabilité

L’analyse des impacts de la conclu-sion de contrats de partenariat sur les

comptes des collectivités publiques(cf. 3.) ne saurait être appréhendéesans distinguer au préalable les diffé-rents systèmes de comptabilité : laComptabilité nationale, la comptabili-té privée et les comptes des collectivi-tés territoriales.

• La Comptabilité nationale produitdes données agrégées pour la Franceentière. Elle est élaborée par l’INSEE,dans le cadre du système européende comptabilité. Elle permet notam-ment de mesurer la dette publiquequi sert de critère de Maastricht. Ladécision d’Eurostat du 11 février2004 porte sur cette Comptabiliténationale. La “déconsolidation” per-met de requalifier comme nonpublique, au niveau agrégé, des det-tes inscrites dans les comptes de col-lectivités locales au titre de PPP, àcondition que le risque soit porté parle partenaire privé. Il s’agit d’uneopération statistique qui n’a aucunimpact direct sur les comptes des col-lectivités elles-mêmes. Cela a enrevanche un impact sur la mesure dela dette publique. À court terme, tantque de nouveaux PPP ne seront paslancés, ce mécanisme peut faire bais-ser le ratio dette/PIB de la France enfaisant basculer des dettes de la caté-gorie dette publique à la catégoriedette privée. À long terme, cela peutencourager les PPP, car les empruntsliés aux investissements publics ainsiréalisés ne seront pas comptabilisésdans la dette publique.

• La comptabilité privée sert à donnerune image de la situation patrimonia-le et financière d’une entreprise pri-vée. Il faut distinguer les comptessociaux, produits par chaque entrepri-se ayant la personnalité morale, et lescomptes consolidés, qui donnentl’image financière globale d’un grou-pe d’entreprises, c’est-à-dire d’une oudes maisons mères avec sa ou ses filia-les. Les comptes consolidés font

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notamment apparaître l’ensemble desdettes de toutes les entités du groupe.La principale question est alors dedéfinir quel est le périmètre de conso-lidation (l’ensemble des entreprisesqui sont considérées comme contrô-lées par la maison mère, et dont lescomptes seront intégrés) et le moded’intégration des bilans des sociétés.En attendant d’éventuelles réformesliées à l’harmonisation des normescomptables (IAS/IRFS), les règles habi-tuelles s’appliquent : en fonction dupourcentage de détention du capitald’une société (par exemple qui portele projet PPP) par la maison mère, lesdettes sont intégrées totalement, par-tiellement ou pas du tout dans lescomptes consolidés.

• Les comptes des collectivités territo-riales n’ont pas à suivre la règle défi-nie par Eurostat et ne sont pas soumisdirectement aux exigences du Pactede stabilité. Un certain nombred’élus craignent cependant que lecontrat de partenariat ne crée dessituations de désendettement fictif(cf. 3.).

2.4. Taux d’actualisation :la mesure de l’utilité socialedes dépenses publiques

Avec les nouveaux PPP, des interroga-tions assez vives émergent sur leséventuelles dérives financières : cen’est pas parce qu’il existe une procé-dure légale de financement qu’un pro-jet est économiquement justifié etqu’il convient nécessairement de leréaliser. Si l’on part du principe géné-ral que la décision publique doit paressence maximiser le bien-être social,on remet au centre du débat la ques-tion de l’évaluation socio-écono-mique des projets par les pouvoirspublics, responsables du bon usagedes deniers publics.

Responsables du bon usage desdeniers publics, les décideurs publicsdoivent être à même de s’assurer :

– d’abord que les dépenses qu’ilsengagent sont utiles et répondent àl’intérêt général ;

– puis que les avantages attendus duprojet valent les dépenses engagées etles coûts qui seront supportés par lacollectivité.

De ce point de vue, la valorisation dutaux d’actualisation n’est pas sansconséquence : ni sur l’arbitrage entrele court terme et le long terme, ni surl’arbitrage entre les différents projetslorsque se manifeste une contraintebudgétaire. Le calcul économique – etle taux d’actualisation qui lui est asso-cié – permet en effet d’expliciter lavision partagée que la collectivité sefait de l’avenir. Définir un taux d’ac-tualisation qui traduit la pondérationrelative du présent et du futur dans laprise en compte des impacts monéta-risés des décisions collectives – vérita-ble “taux de substitution” entre le pré-sent et l’avenir –, c’est s’accorder surle bon niveau d’effort que la collecti-vité doit consentir aujourd’hui pourrépondre aux enjeux de demain.

Contrats de partenariat et collectivités locales : les enjeux

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• La rentabilité socio-économique d’unprojet pour la collectivité se distingue dela seule rentabilité financière dans lesens où elle intègre d’autres élémentsque les seuls flux financiers : sécurité,pollutions et nuisances, raréfaction decertains biens naturels tels que ressour-ces énergétiques ou matières premières,progrès scientifique et technologiqueescomptés, effet de serre et changementclimatique, comportements des consom-mateurs et usagers, risques économiqueset sociaux… Ces évaluations doiventalors apprécier la nature des bénéfices etdes coûts, le fait que certains effets sontsûrs et que d’autres sont incertains, voiredifficilement prévisibles, et que ces effetspeuvent se produire à des dates diffé-rentes.

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Le Commissariat général du Plan aprocédé, à la demande du Premierministre et dans le prolongement desdécisions du Comité interministérield’aménagement et de développementdu territoire (CIADT, réunion du 18décembre 2003), à une révision dutaux d’actualisation qui était depuis1985 la référence utilisée dans l’éva-luation socio-économique des projetsd’investissement publics (“Le prix dutemps et la décision publique”, rap-port du groupe d’experts présidé parD. Lebègue, collection Les Regardsprospectifs, n° 1, Commissariat géné-ral du Plan, février 2005). Si une tellerévision satisfait bien des attentes, ellene peut véritablement aider à la déci-sion que si on apporte d’autre part uneréponse aux difficultés de mise enœuvre de l’évaluation socio-écono-mique, qui doit elle-même être enri-chie. Aussi la revalorisation du tauxd’actualisation se comprend dans uneperspective de réhabilitation politiquedu calcul économique comme aide àla décision.

Cette réhabilitation se décline autourdes principaux points suivants :

– un renforcement de la formation desagents publics nationaux et territo-

riaux dans l’utilisation du calcul éco-nomique (à l’instar des pratiquesinitiées au sein de la Communautéeuropéenne) ;

– une application étendue du calculéconomique : traditionnellementemployé dans les projets d’infrastruc-tures, il gagnerait à l’être dans tous lessecteurs d’intervention des pouvoirspublics (transports, énergie, R & D,défense, santé/hôpitaux, systèmes sco-laire et universitaire, justice, retrai-tes…) ;

– une sophistication indispensable ducalcul, pour qu’il intègre l’utilitésociale d’éléments souvent détermi-nants dans les projets mais d’évalua-tion difficile (cet enrichissement passepar un renforcement de la rechercheet la mobilisation des nombreux sec-teurs concernés pour établir les règlesélémentaires d’usage qui leur sontadaptées ; il passe également par laparticipation de la France auxréflexions européennes visant à dres-ser des cadres référentiels communs,alors que l’harmonisation des tauxdevient un objectif majeur pour traiterles projets de coopération bilatérale etles interventions financières propresou partenariales de la Communauté –fonds structurels, partenariats public-privé… –) ;

– la recherche d’un large consensusdes nombreux acteurs économiques etsociaux impliqués, s’agissant des prin-cipes généraux de calcul et de la priseen compte de certaines externalités(vecteur indispensable de crédibilitédes principes et valeurs retenus, cetteambition justifie que les investigationspréliminaires soient menées dans uncadre interministériel et ouvert large-ment à l’extérieur – comme peut l’êtrele Commissariat général du Plan – etque les propositions retenues puissentensuite faire l’objet d’un débat pluslarge sanctionné par une décisionpolitique).

Chapitre 3

• L’actualisation est l’opération qu’il estnécessaire de faire pour rendre compa-rables des valeurs économiques quis’échelonnent dans le temps : il s’agit deramener la valeur future d’un bien,d’une dépense à une valeur actuelle.L’actualisation repose sur deux élémentsessentiels : l’appréciation des flux moné-taires (échéancier des dépenses et recet-tes immédiates et futures, réelles ou ficti-ves) et le taux d’actualisation (coeffi-cient permettant de ramener le futur auprésent). Le taux d’actualisation est untaux de substitution entre le futur et leprésent ; il traduit la valeur du tempspour une entreprise ou une collectivité :c’est en quelque sorte le “prix dutemps”.

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•• Un taux d’actualisation situé dansun nouveau contexte

Dans la logique actuelle, l’État sedésengage de plus en plus de la sphè-re productive pour se consacrer à destâches de régulation, sous la pressionde l’intégration européenne et de lamondialisation, avec notamment lalibéralisation des mouvements decapitaux et la montée en puissancedes collectivités territoriales qui les

accompagnent. La perspective d’ungrand nombre d’investissementslourds se dessine aujourd’hui aussibien au niveau européen (inter-connexion des grands réseaux) qu’auniveau des collectivités (investisse-ment dans les réseaux de distribu-tion). Dans une situation de multipli-cité de financeurs aux logiques diffé-renciées, faut-il définir autant de tauxd’actualisation qu’il y a de collectivi-tés ? Si en théorie le taux d’actualisa-

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Le nouveau taux d’actualisation

Le taux d’actualisation public est unique et s’applique de manière uniforme à tous lesprojets d’investissement publics considérés et à tous les secteurs d’activité. S’écarter dece principe conduirait à accepter systématiquement des incohérences importantes dansl’allocation des ressources publiques. Il est recommandé aux collectivités territoriales –notamment aux Conseils régionaux – d’utiliser le même taux, surtout pour les investis-sements dont l’envergure est plus large que celle du territoire de référence.

La problématique de l’actualisation doit être clairement séparée d’au moins deux autresaspects du calcul économique qui lui sont souvent à tord associés : la question du déve-loppement durable (externalités et risques par secteurs et par projets) et la question desfonds publics (contraintes budgétaires et coût d’opportunité des fonds publics).

Le taux d’actualisation est un taux d’actualisation calculé hors prime de risque. La priseen compte du risque ne doit pas être intégrée par le biais d’une augmentation implicitedu taux d’actualisation. Le risque doit être traité pour lui-même au niveau de l’évalua-tion de chacun des projets et cela tant pour les prévisions de quantité que pour cellesde prix. Ce point constitue un élément majeur des évaluations qui a été jusqu’ici consi-dérablement sous-estimé. Cela ne disqualifie pas l’intérêt de l’évaluation du risque dansle cadre de l’évaluation du coût des opérations – objet du contrat, mais en revanche,cela signifie que la question du risque doit être clairement séparée de celle du tauxd’actualisation. Elle peut inversement être associée au calcul du taux d’intérêt à longterme des obligations publiques, sur la base des obligations assimilables du Trésor(OAT).

Le taux d’actualisation se comprend comme l’ensemble formé par le taux d’actualisationet un système de prix relatifs des biens dans lequel notamment le prix de l’environne-ment croît nettement par rapport aux autres.

Le taux d’actualisation est un taux d’actualisation réel et doit dont être utilisé dans descalculs effectués en monnaie constante (hors inflation).

Le taux d’actualisation de base est ramené de 8 % à 4 %.

Le taux d’actualisation est décroissant avec le temps pour les évaluations qui portent surle très long terme. La décroissance du taux est effective à partir de 30 ans. La décrois-sance du taux d’actualisation est continue pour éviter les effets de seuil ; il s’appuie surla formule proposée dans le rapport. La décroissance du taux d’actualisation est limitéepar un plancher fixé à 2 %.

Ce taux doit faire l’objet de révisions périodiques tous les 5 ans, pour éviter d’être endéphasage avec les principaux indicateurs macro-économiques (croissance potentielledu pays, évolution des taux d’intérêts à long terme, variables démographiques, etc.).Cette révision doit s’appuyer sur un exercice de prospective sur la croissance écono-mique.

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tion constitue un choix tutélaire lié àla liberté de prélever l’impôt et d’in-vestir, force est de constater qu’unediversité des taux d’actualisationn’apporterait pas de changementssignificatifs et compliquerait inutile-ment les débats. Pour l’État et pour lescollectivités territoriales, il apparaîtdonc plus raisonnable d’en rester à unseul taux de référence.

En conclusion, l’utilisation du calculéconomique sur ces bases moderni-sées peut contribuer grandement àaugmenter, à effort égal, la “produc-tion d’utilité publique” et à enrichirles débats en objectivant sur la basede procédures reconnues par lesacteurs l’utilité sociale des projetsenvisagés.

3. Les enjeux politiqueset budgétaires

Globalement, on constate aujourd’huiun manque d’enthousiasme des éluslocaux pour le contrat de partenariat.Cette situation est susceptible d’évolu-tion, mais en l’état, ce sentiment descepticisme au niveau local à l’égarddes contrats de partenariat mérite quel’État y prête attention et en examineles ressorts.

3.1. Les réserves à l’égarddes contrats de partenariat

Envisager cette difficulté sous l’angledu clivage politique serait procéder àune analyse simpliste. En effet, les réti-cences que suscitent au niveau localles contrats de partenariat se manifes-tent d’une manière suffisammentgénérale pour qu’elles ne puissent êtreattitrées à des logiques partisanes.

Les arguments qui suscitent ou sontsusceptibles de susciter des réserveschez les élus sont de différentsordres :

•• Les arguments tendant à relativiserle caractère innovant du contrat departenariat

Historiquement, les montages conces-sifs – ou associant des éléments dedéfinition des concessions et des affer-mages – constituent les premières for-mes de partenariat public-privé, étantentendu que ce sont des contrats glo-baux, de longue durée, caractériséspar une maîtrise d’ouvrage privéeainsi que par un transfert des risques àla charge du délégataire.

Partant, le contrat de partenariat (CP)ne présenterait pas d’avantage compa-ratif évident vis-à-vis de la délégationde service public (DSP). Au contraire,faisant l’objet de procédures de passa-tion relativement complexes et juridi-quement risquées, le CP constitueraitune solution moins opportune que laDSP pour obtenir des effets similaires.

Cette argumentation, fût-elle partielle-ment fondée, appelle un certain nom-bre de nuances.

La première tient au clivagepartage/transfert des risques entre CPet DSP. Il est indéniable que la DSPpostule un transfert maximum desrisques là où le CP répartit ceux-cientre les acteurs qui les maîtrisent lemieux. Cette différence est essentielleen termes comptables et en termes debancabilité. En effet, les banques ren-chérissent le taux du prêt consentilorsque l’assuré se voit transféré unrisque sujet à un fort aléa – ainsi lerisque d’exploitation, difficile à maîtri-ser pour les entreprises délégataires –,tout transfert de risque ayant un prix, afortiori s’il est difficilement maîtrisa-ble.

La seconde tient au fait que le CP rendpossible des opérations non suscepti-bles d’être réalisées en concession ouen affermage, à savoir :

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– des opérations ne portant pas sur lagestion même d’un service public ;

– ou encore des opérations pour les-quelles il paraît économiquement oupolitiquement peu souhaitable detransférer le risque volume (économi-quement, car il s’agit d’un risque nonmaîtrisable par celui qui en a la char-ge ; politiquement, car ce transfertpeut se traduire par un coût excessifsupporté par l’usager du servicepublic).

•• La transcription comptable desopérations réalisées en contrat departenariat

Les responsables locaux sont nom-breux à s’interroger sur la transcriptioncomptable des contrats de partenariat.Cette question suscite trois types decraintes :

– celle de la débudgétisation desloyers versés au partenaire ;

– celle de la constitution d’un endette-ment occulte ;

– celle d’une mise à mal du budget defonctionnement par des opérations qui

relèvent en principe davantage de lasection d’investissement.

Dans l’attente des résultats de laréflexion conduite par le Conseilnational de la comptabilité, c’est undispositif transitoire qui est proposéaux collectivités territoriales et acteurspublics. Cependant, il est indispensa-ble que ce dispositif soit finalisé etcomplété grâce à la réflexion du CNCconcernant notamment le mode decomptabilisation de la dette contrac-tée par le partenaire public.

Ce dispositif transitoire apparaîtcomme une solution de compromis,voire dans certains cas une solutioncontradictoire avec la norme Eurostat,l’Office statistique des Communautéseuropéennes. En tant qu’autorité sta-tistique de la Commission, Eurostatn’examine pas les motivations, larationalité et l’efficacité des partena-riats publics privés, mais doit fournirdes orientations claires concernantleur traitement dans les comptes natio-naux, et leur impact sur les donnéesdu secteur des administrationspubliques.

Contrats de partenariat et collectivités locales : les enjeux

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Le projet pour l’exécution d’une missiond’intérêt général concerne-t-il spécifiquement

une mission de service public ?

Non Oui

La rémunération du partenaire privéest-elle substantiellement liée

aux résultats de l’exploitation ?

Non Oui

Contrat de partenariat(CP)

Délégation de servicepublic (DSP)

Source : IGD

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La question centrale, en termes decomptabilité nationale, posée par lesCP, est celle de la comptabilisationdes actifs – objets du contrat de parte-nariat, actifs qui peuvent être enregis-trés soit comme actifs publics soitdans le bilan du partenaire privé. Encomptabilité nationale, ces actifs peu-vent être considérés comme actifs nonpublics exclusivement s’il existe uneforte évidence que le partenaire privésupporte la plus grande partie durisque lié au partenariat spécifique.

Eurostat a sélectionné trois catégoriesprincipales de risques “génériques”

• Le “risque de construction”, cou-vrant notamment des événementscomme la livraison tardive, le non-respect de normes spécifiées, les sur-coûts, la déficience technique et leseffets extérieurs négatifs.

• Le “risque de disponibilité” dans lecas où le partenaire privé n’est pas enmesure de livrer le volume contrac-tuellement convenu ou de répondre,comme spécifié dans le contrat, auxnormes de sécurité ou de certificationpubliques liées à la prestation de ser-vices aux utilisateurs finals ; cecis’applique également lorsque le parte-naire ne répond pas aux normes dequalité relatives à la prestation de ser-vices, requises dans le contrat etdécoulant d’un manque évident de“performance” du partenaire.

• Le “risque lié à la demande” cou-vrant la variabilité de la demande(plus élevée ou plus faible qu’escomp-tée lors de la signature du contrat)lorsque celle-ci n’est pas imputable aucomportement (gestion) du partenairedu secteur privé, mais à d’autres fac-teurs, tels que le cycle économique,

Chapitre 3

Dispositif comptable et budgétaire transitoireapplicable aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics(source : MINEFI, “Les contrats de partenariat : principes et méthodes”)

S’agissant des collectivités et établissements publics locaux, les précisions suivantespeuvent être apportées pour le paiement des premières rémunérations des partenairesprivés (les comptes actuels des nomenclatures sont utilisés, ils feront l’objet d’uneactualisation ultérieure si nécessaire) :

– la partie de la rémunération représentant un coût de fonctionnement s’impute aucompte de charge 61131 (mandat en section de fonctionnement) ;

– la partie de la rémunération représentant un coût de financement s’impute au comp-te de charge 6618 (mandat en section de fonctionnement) ;

– la partie de la rémunération représentant un coût d’investissement s’impute au comp-te d’actif 276432 (mandat en section d’investissement). Elle est, le cas échéant, éligibleau FCTVA dans les conditions fixées par l’article L1615-12 du CGCT.

Par ailleurs, l’engagement pluriannuel pris par la collectivité au titre d’un contrat de par-tenariat devra être traduit par le vote d’une autorisation de programme (AP) concernantla rémunération correspondant à l’investissement réalisé par le tiers. Pour les départe-ments, les régions et leurs établissements publics, qui peuvent d’ores et déjà avoirrecours aux autorisations d’engagement (AE) pour certaines dépenses de fonctionne-ment, la partie correspondant à la part de la rémunération imputée en section de fonc-tionnement devra également faire l’objet du vote d’une AE. Pour les communes et leursétablissements publics, qui ne peuvent pour l’instant recourir aux AE, l’engagement plu-riannuel correspondant à la rémunération imputée en section de fonctionnement devrafaire l’objet au minimum d’une retranscription dans l’annexe au budget prévue par lestextes. Celle-ci retracera en effet l’ensemble des engagements de la collectivité au titred’un contrat de partenariat.

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de nouvelles tendances du marché, laconcurrence directe ou l’obsolescen-ce technologique.

Si les actifs demeurent propriété dupartenaire à l’issue du projet, et si cesactifs continuent de représenter unevaleur économique significative, ilssont normalement classés dans lebilan du partenaire privé. À l’inverse,si le partenaire public a l’obligationferme d’acquérir les actifs à l’issue ducontrat à un prix prédéterminé nereflétant pas la valeur économique desactifs à ce moment (telle qu’escomp-tée sur la base d’une hypothèseconservatrice au moment de la signa-ture du contrat), ou a payé pour ledroit d’acquérir les actifs pendanttoute la durée du contrat moyennantdes paiements réguliers supérieurs àce qu’ils auraient été sans ce droit, ilpeut alors être fondé d’enregistrer lesactifs comme actifs publics.

Ainsi, les actifs peuvent être considé-rés comme non publics et sortir dupatrimoine des administrations publi-ques seulement si les deux conditionssuivantes sont réunies :

– le partenaire privé supporte le risquede construction ;

– le partenaire privé supporte aumoins l’un des deux risques suivants:celui de disponibilité ou celui lié à lademande.

Ceci a des conséquences importantespour les finances publiques, tant dupoint de vue du déficit que de la dette.Les dépenses initiales en capital, rela-tives aux actifs, seront enregistréescomme formation de capital fixe desadministrations publiques, avec unimpact négatif sur le déficit/excédentpublic. En contrepartie de cettedépense de l’État, la dette publique ausens de Maastricht augmentera. Lespaiements réguliers du partenaire

public au partenaire privé auront unimpact sur le déficit/excédent publicuniquement pour ce qui est de la par-tie relative aux achats de services et à“l’intérêt imputé”.

Ainsi, Eurostat prévoit deux modes decomptabilisation (montages consoli-dants et déconsolidants) et recom-mande que les actifs liés à un partena-riat public-privé soient classés commeactifs non publics ou actifs publics enfonction de cette analyse des risques(construction, disponibilité/demande)et leur répartition entre l’opérateurprivé et l’entité publique.

Montages consolidants et montagesdéconsolidants selon Eurostat : trans-cription comptable pour les collecti-vités locales

Un montage consolidant consisterait àcomptabiliser en dépenses de la sec-tion d’investissement les coûts liés àl’acquisition du bien et en recettesl’emprunt souscrit pour le finance-ment, puis chaque année pendant ladurée du contrat à comptabiliser :

– en section de fonctionnement lescharges financières, les dépenses demaintenance, et les dotations auxamortissements ;

– en section d’investissement, lesdépenses liées au remboursement ducapital de la dette et les recettes d’or-dre liées aux amortissements.

La dette serait ainsi intégrée dans lescomptes de la collectivité.

Un montage déconsolidant consiste-rait simplement à comptabiliser unloyer en section de fonctionnementpendant toute la durée du contrat. Ladette est en quelque sorte “externali-sée” auprès de l’opérateur, titulaire ducontrat de partenariat.

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Le choix entre les deux montagesdépendrait selon la norme Eurostat del’analyse des risques : si ceux-ci sontsupportés par l’opérateur, la collectivi-té pourra opter pour un montage“déconsolidant”. Dans le cas inverse,elle devra prendre en compte l’actif etle passif dans ces comptes.

Difficultés liées au dispositif transitoi-re pour la comptabilisation des opé-rations en contrats de partenariat

Le dispositif transitoire figurant dans leguide intitulé “Principes et méthodes”élaboré par le ministère de l’Écono-mie, des Finances et de l’Industrie pré-sente plusieurs difficultés pour les col-lectivités locales :

– si on préconise une harmonisationentre la comptabilisation des opéra-tions en contrats de partenariat entreles administrations publiques et lesadministrations publiques locales, ilconstitue une solution de compromisentre le montage “consolidant” et“déconsolidant” ;

– il minore la dette des collectivités cequi rend peu lisible l’analyse financiè-re et la comparaison entre collectivitéslocales.

•• Les risques juridiques

Les réserves des élus à l’égard descontrats de partenariat sont particuliè-rement motivées par l’existence derisques de remise en cause par le jugede la décision de recourir à un CP, ou– si elle est distincte de la signature ducontrat – sur le fondement de l’irrégu-larité de l’évaluation préalable, quirequière en effet de démontrerl’urgence ou la complexité du projet.

Certes, le risque juridique caractérisetout aussi bien les MP et les DSP (onsait la subtilité du critère de la rému-nération “substantiellement liée auxrésultats de l’exploitation”), mais il estrenforcé et plus préjudiciable en CP :

– renforcé, car le dispositif d’évalua-tion juridique et économique préala-ble n’est pas encore assimilé par lescollectivités, qui en revanche ont tiréles enseignements de la pratique desprocédures en MP ou en DSP ;

– plus préjudiciable, car les coûts detransaction en CP sont supérieurs, desorte qu’une annulation contentieuseprésente un coût plus important pourles collectivités.

S’il ne faut pas sous-estimer le risquejuridique, il faut cependant le relativi-ser. En particulier, la mission d’appuipermettra de sécuriser la passation descontrats de partenariat, saisie desquestions des acteurs locaux. Et ledéveloppement des contrats de parte-nariat rendra possible à terme l’ap-prentissage de bonnes pratiques pro-pres à annihiler l’aléa dans la condui-te des procédures de passation. À cetégard, le contrat de partenariat pour-rait connaître le même succès que lamise en œuvre de la loi Sapin.

•• La question de l’incertitude

Les collectivités locales sont aujour-d’hui très préoccupées par la questiondes transferts de compétences et com-pensations financières y afférant(actuellement insuffisantes). Ce pro-blème les place dans une situationd’incertitude budgétaire sur l’avenir.La conclusion de contrats de partena-riat tendrait à renforcer l’incertitude.

•• L’asymétrie d’information et lacrainte d’une évasion des compéten-ces locales

Les élus locaux appréhendent aujour-d’hui la conduite des négociations encontrats de partenariat : une distorsionimportante caractériserait le poidsrespectif des acteurs au détriment descollectivités locales, y compris lescommunautés. Dans cette perspec-tive, notamment, certains élus locauxet maîtres d’œuvres expriment des

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craintes quant à la qualité architec-turale des infrastructures ou ouvragesconcernés (cependant, l’article 12 del’ordonnance permet d’apporter uncertain nombre de garanties de cepoint de vue, envisageant les obliga-tions liées au transfert partiel ou totalde la conception des ouvrages).

Par ailleurs, une généralisation durecours aux contrats de partenariatpourrait induire une perte de compé-tence des collectivités localesconsidérées en terme de maîtrised’ouvrage ; ceci pose un problèmed’indépendance des choix publics.En effet, comment une collectivitéqui se dessaisirait de ses compéten-ces internes serait-elle à même dejuger de manière éclairée la compé-tence externe ?

Ces objections se rattachent à uneprojection possible mais peu probablede recul net de la maîtrise d’ouvrage

publique au profit de la gestion parte-nariale. Cependant elles doivent êtreprises en compte dans la probléma-tique plus générale des risques liés aumanque de formation et de culture del’évaluation des collectivités locales.

Par ailleurs, on ne peut pas exclure lescénario d’une compétence optimiséedes collectivités locales dans l’évalua-tion et le contrôle d’opérations exter-nalisées (logique du “faire faire”), quirenforcerait la capacité à “faire” par lebénéfice des retours d’expériences enpartenariat avec les acteurs privés,spécialistes des domaines concernéspar les différentes opérations – objetdu PPP.

•• Les déficits d’information, de péda-gogie et d’exemplarité par l’État

Les collectivités locales hésitent às’engager dans une voie dans laquelleon ne dispose pas de retours d’expé-

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Les transferts de charges en rapport aux transferts de compétences inscrits dans la loin° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales s’évaluentpour leur ensemble à hauteur de 9,6 à 11 milliards d’euros dont environ 8 milliardsd’euros pour les départements, le solde étant essentiellement destiné aux régions (sour-ce : ADF, Ernst & Young, Étude d’impact de l’Acte II de la décentralisation – Aspectsfinanciers et organisationnels, avril 2005).

Cette nouvelle phase de décentralisation repose sur une révision constitutionnelle quis’accompagne de la loi organique du 29 juillet 2004 relative à l’autonomie financièredes collectivités locales, et qui garantit constitutionnellement le maintien de l’autonomiefinancière des collectivités territoriales via une compensation financière intégrale,concomitante aux transferts effectifs des compétences.

La Commission consultative sur l’évaluation des charges émet un avis sur la justecompensation de ces charges transférées.

La loi prévoit une compensation calculée sur la base des dépenses effectuées par l’Étatavant le transfert de compétences (moyenne sur 3 ans pour les dépenses de fonction-nement, moyenne sur au moins 5 ans pour l’investissement). En revanche, elle ne garan-tit pas de compensation financière “glissante”, c’est-à-dire l’adéquation entre l’évolutionde la charge et de la recette. Ce risque d’absence d’évolutivité de recette transférée(TIPP) a notamment posé problème à un certain nombre de départements face àl’augmentation régulière et sensible du nombre de demandeurs du RMI depuis sa miseen application en 2004. De même, les transferts de charges des régions serontcompensés avec cette même TIPP, qui a évolué en 2005 de 1 % par rapport à 2004. Enoutre, des incertitudes demeurent encore à ce jour sur les modalités de transferts de lataxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA), recette destinée à compenser l’en-semble des transferts départementaux inscrits dans la loi du 13 aôut 2004, dont ceux dela voirie nationale et des personnels TOS.

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rience. Actuellement, les seuls cas quipermettent aux collectivités d’évaluerl’intérêt du contrat de partenariat neconcernent pas cette forme spécifiquede contrat mais des formes apparen-tées (PFI anglo-saxons, autres exem-ples étrangers et internationaux et PPPsectoriels avec en particulier les bauxemphytéotiques hospitaliers).

De surcroît, on a pu déplorer la len-teur de la mise en place de la missiond’appui et de la publication concomi-tante du guide des bonnes pratiquesdu ministère de l’Économie, desFinances et de l’Industrie (27 mai2005).

Enfin, il serait souhaitable que l’États’engage en faveur des collectivitéslocales dans l’organisation de jour-nées de formation consacrées à l’ap-prentissage des procédures de passa-tion en contrat de partenariat. Lesmaîtres d’ouvrage publics ne pourrontprocéder à l’évaluation et assurer dansde bonnes conditions la négociationque s’ils bénéficient préalablementd’un solide programme de formation.L’État doit donc prendre en considéra-tion les difficultés inhérentes à la ges-tion du changement.

3.2. Mise en perspective :de nouveaux modesd’action publique

Les contrats de partenariat créent aumoins deux types d’innovationsmajeures dans les modes d’actionpublique, au-delà de la question desapports au pur plan du droit de lacommande publique.

• Le premier type d’innovation tient àla logique d’évaluation juridique etéconomique préalable qui les sous-tend.

Aujourd’hui, des réflexions sontconduites dans diverses instances

pour tenter de valoriser l’utilité socio-économique des projets publics sui-vant leurs modes de gestion, parallèle-ment à une réflexion autour de l’enjeude la réversibilité des choix des modesde gestion. C’est du reste toute laproblématique de la Charte des servi-ces publics locaux du 16 janvier2002, signée par l’Association desmaires de France (AMF), l’Associationdes maires des grandes villes deFrance (AMGVF), l’Assemblée desdépartements de France (ADF),l’Association des régions de France(ARF) et l’Institut de la gestion délé-guée (IGD), qui définit une séried’objectifs visant à garantir “la qualitéet la performance [des servicespublics] et favoriser la cohésion tantsociale que territoriale”.

Avec le contrat de partenariat, il vas’agir de procéder à une évaluationcomparative des modes de gestionpour un projet donné – conditionindispensable pour conclure uncontrat de partenariat –, mais on peuttrès bien imaginer que la sphèrepublique reproduise ce type de rai-sonnement avant d’opter pour d’autressolutions que le contrat de partenariat.Dans cette optique, l’évaluation pré-alable pourrait à l’usage dépasser lestrict champ de son objet et inciter lescollectivités locales à mieux détermi-ner les avantages comparatifs et lescoûts relatifs des différentes solutionsdont elles disposent pour mener àbien des projets d’utilité publique.

Le bénéfice que la collectivité pourratirer du calcul économique est tribu-taire de la capacité de l’État à renforcerou à créer en son sein des dispositifsappropriés d’évaluation de politiquespubliques et à assurer leur diffusion etleur promotion vers les corps consti-tués impliqués ou concernés par l’éva-luation (Cour des comptes, Parlement,Conseil d’État…) comme vers les diffé-rents échelons de collectivités territo-

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riales, notamment régionaux. La systé-matisation des évaluations a posterioriconstituerait également un bon moyend’améliorer de manière continue laméthode d’évaluation elle-même et depréconiser – voire d’imposer si néces-saire – des cadres de référence pourtraiter certains problèmes difficiles. Lesinsuffisances relevées pourraient aussimotiver des programmes de recherchearticulés avec les besoins de l’évalua-tion sous des aspects tant théoriquesque de portée opérationnelle. Là enco-re l’intervention du niveau européenconstitue une opportunité à recher-cher.

On peut rappeler à cet égard que laBanque européenne d’investissement(BEI), institution créée par le traitéinstituant la Communauté européen-ne, met à disposition des États et descollectivités locales des prêts dont “ladurée de vie moyenne (…), plus lon-gue que celle des prêts bancaires, estbien adaptée aux contrats de partena-riat” (X. Bezançon, L. Deruy, R.Fiszelson, M. Fornacciari, 2005). Lesprêts accordés par la BEI sont caracté-risés par des taux particulièrement

bas, ce qui implique qu’elle soit, encontrepartie, particulièrement attenti-ve à la bancabilité du projet. Les col-lectivités intéressées par cette modali-té devront bien veiller à instruire dansles délais requis leurs demandes definancement auprès de la BEI.

• Le second type d’innovation résidedans la logique de fourniture d’un“package” de prestations de servicequi est inhérente aux contrats de par-tenariat.

La personne publique achète non pasun ouvrage mais un service à son par-tenaire, service qui consiste à réalisermais surtout à assurer l’entretien régu-lier d’un équipement utile à la collec-tivité. Cette nouvelle approche globa-le conduit à une dépréciation relativedu critère du moins-disant sur laphase de la construction, pour lui pri-vilégier celui de l’offre économique-ment la plus avantageuse. Pour leurpart, les entreprises sont dans l’obliga-tion de considérer davantage la duréede vie de l’ouvrage (et de son utilitésocio-économique) que la durée de saseule construction.

Contrats de partenariat et collectivités locales : les enjeux

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Les principaux objectifs de la Charte des services publics locaux :

– la clarté des rôles entre autorité organisatrice, usager et opérateur,

– la réversibilité des choix dans les modes de gestion,

– la mise en place d’indicateurs de performance pour comparer les différentes options(régie/délégation),

– la recherche d’un équilibre entre incitation de l’opérateur et diffusion des gains de pro-ductivité au bénéfice du progrès social, économique et environnemental.

Plus récemment, un rapport confié par l’IGD à Christian Babusiaux, ancien directeurgénéral de la DGCCRF, a recommandé la mise en compétition des modes de gestion desservices publics locaux, à partir d’une refonte de certaines règles ayant pour effet denuire à la comparabilité des modes de gestion et à leur réversibilité (La Documentationfrançaise, juin 2005). Le rapport souligne notamment que la comparaison entre régie etdélégation se heurte à des exigences moins importantes en terme de comptabilité pourles personnes publiques par rapport à celles auxquelles sont soumis les opérateurs pri-vés. À ce facteur discriminant s’ajoutent de nombreuses distorsions dans la compétition,notamment du point de vue de la récupération de la TVA, de l’assujettissement à la taxeprofessionnelle et du paiement de la redevance d’occupation du domaine public.

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En synthèse, le contrat de partenariatcontraint à la prise en compte du longterme dans des domaines où aupara-vant les regards publics et privésavaient tendance à se focaliser sur lecourt terme (la construction). Il obligeégalement le secteur public et le par-tenaire privé à dialoguer en bonneintelligence dans un objectif commund’amélioration des services publics.

Les contrats de partenariat : uninstrument de développement écono-mique pour les collectivités locales

En cas d’utilisation raisonnée ducontrat de partenariat, nombreux sontceux qui, à l’instar du président del’Institut de la gestion déléguéeClaude Martinand, pronostiquent unerelance de la croissance économiquefrançaise (cf. colloque “Les Échos”, 19mai 2005).

Cette perspective optimiste se fondesur les avantages socio-économiquesqui s’attacheraient à l’usage descontrats de partenariat et plus généra-lement des PPP dans des secteurs stra-tégiques (santé, éducation, NTIC,réseau ferré, énergie, environnement,infrastructures…) : “Le lancement dePPP stratégiques sur une échelle suffi-sante, de l’ordre de 10 milliards d’eu-ros par an après une montée en puis-sance de trois ou quatre ans, pourrait,selon les élasticités macro-écono-miques habituelles, apporter de 0,2 %à 0,4 % de croissance annuelle enplus, soit des créations d’emploisannuelles nettes supérieures à 50 000.Les PPP stratégiques sont des fers delance au service d’un État stratègepour accélérer le retour de l’économiefrançaise sur un sentier de croissancerapide” (C. Saint-Étienne, 2005).

Dans un contexte marqué par leralentissement de la croissance éco-nomique française, la priorité donnéepar le Gouvernement à l’emploi et la

volonté de donner vie aux ambitionsde la Stratégie de Lisbonne (Conseileuropéen des 23 et 24 mars 2000), leséconomistes s’accordent pour direque l’efficacité de la relance dépendde la qualité des investissements rete-nus et non des montants des dépensesengagées. La question de la mesurede l’utilité socio-économique des pro-jets est donc déterminante.

Enfin, avec 68,6 % des dépenses d’in-vestissements publics (Observatoiredes finances locales, juillet 2005), lescollectivités territoriales sont les pre-miers acteurs du développementlocal. L’usage du contrat de partena-riat pourrait leur permettre pour cer-tains projets de répondre mieux etplus rapidement aux attentes d’infras-tructures et de services publics dans leseul souci de l’intérêt général.

3.3. Pistes d’évolution

Pour que les collectivités locales puis-sent mettre à profit les contrats de par-tenariat, dispositif que l’État a jugéutile d’instituer, nous proposons unensemble de pistes d’évolution.

L’amélioration de l’ordonnancen° 2004-559

Nous suggérons une réécriture partiel-le de l’ordonnance en ce qui concer-ne l’indemnisation des entreprisesnon retenues.

Actuellement, l’article 7 de l’ordon-nance et l’article L. 1414-7 du CGCTindiquent qu’”Il peut être prévuqu’une prime sera allouée à tous lescandidats ou à ceux dont les offres ontété les mieux classées”.

Nous préconisons que le législateurrende l’indemnisation obligatoire aumoins pour les deux candidats lesmieux placés sur la short list après lecandidat retenu (ou les deux meilleurs

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candidats stricto sensu en cas d’aban-don du projet en cas de négociationsavancées).

Cette indemnisation nous sembledevoir être obligatoire pour favoriserune concurrence effective sur les pro-jets en partenariat, la présentation desolutions techniques et financièresperformantes étant très coûteuse pourles entreprises, notamment les grou-pements de PME que l’ordonnanceambitionne pourtant ne pas défavori-ser.

Les entreprises, même protégées parl’exigence de confidentialité qui pèsesur les personnes publiques, hésite-ront à divulguer des process innovantsen phase de dialogue compétitif sielles ne sont pas indemnisées encontrepartie à hauteur au moins d’unepart substantielle des études enga-gées.

Au-delà de la reformation, la clarifi-cation des textes

Il existe une contradiction apparenteentre les termes de l’article 2 dernieralinéa de l’ordonnance (équivalent del’article L. 1414-2 dernier alinéa duCGCT) et ceux des décrets pris sur sonfondement.

En effet, l’ordonnance dispose que“l’évaluation est réalisée avec leconcours d’un organisme expert choi-si parmi ceux créés par décret”, ce quilaisse à supposer un caractère systé-matique sinon prescriptif de la consul-tation auprès de la mission d’appui àla création des contrats de partenariatou de l’organisme expert Défense.Pourtant, la lecture des décrets insti-tuant de tels organes exclut claire-ment l’hypothèse d’une consultationqui serait obligatoire pour les collecti-vités. En ce sens, l’article Premier dudécret n° 2004-1119 du 19 octobre2004 portant création de la mission

d’appui à la réalisation des contrats departenariat dispose qu’”il est créé unorganisme expert chargé de procéderen liaison avec toute personne intéres-sée à l’évaluation prévue à l’article 2de l’ordonnance susvisée”.

Il y a là une ambivalence des termesqui est de nature à soulever desinquiétudes inutiles quant à la sécuri-té de la passation des contrats de par-tenariat.

L’ordonnance d’autre part n’est pasclaire sur le possible recours à la titri-sation, forme de financement structu-ré consistant à isoler des créancesdans une entité ad hoc qui en faitl’acquisition en se finançant parl’émission de titres souscrits par desinvestisseurs qualifiés (L. Deruy, S.Lagumina, 2005).

Enfin, reste en suspens la question desavoir si la gestion d’un service publicpeut être déléguée dans le cadre del’ordonnance. L’ordonnance disposeque le partenaire peut se voir confierla gestion “d’ouvrages ou d’équipe-ments nécessaires au service public”,ainsi que – à titre facultatif – “d’autresprestations de services concourant àl’exercice, par la personne publique,de la mission de service public dontelle est chargée”. Au sens du droitcommunautaire, il ne fait guère dedoute que les contrats de partenariatsont des marchés publics (de travauxou de services selon ce qui prédomi-ne dans l’objet de l’opération), et nondes concessions, puisqu’il n’y a pas apriori de transfert du risque d’exploi-tation. Toutefois, on pourrait imaginerle transfert de missions de gestion deservice public dénué de transfert durisque d’exploitation. L’ordonnancene consacre pas explicitement cettehypothèse mais ses termes sont insuf-fisamment précis pour totalementl’exclure.

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L’amélioration progressive du guide“Contrats de partenariat. Principes etméthodes” du MINEFI

C’est là un objectif que se donne lamission d’appui à la réalisation descontrats de partenariat que l’on nepeut qu’approuver.

En l’état, ce guide des bonnes pra-tiques, par sa qualité, sa clarté et larichesse de ses informations, constitueun outil indispensable pour les collec-tivités locales ambitionnant la conclu-sion de contrats de partenariat. Leguide élaboré par la MAINH sertactuellement de référence majeuredans la conduite des projets en BEH.On ne peut que plébisciter la perfecti-bilité de ces guides.

Pédagogie, information et consulta-tion par l’État à destination desresponsables locaux

C’est un point crucial.

Certes, la conduite des projets en PPPest grandement favorisée par lerecours à l’expertise des missionsd’appui, mais encore faut-il que lesacteurs locaux soient sensibilisés enamont aux enjeux de la réforme etsurtout qu’ils puissent exprimer leursquestions et réserves afin que l’Étatpuisse y apporter des réponses.

Nous suggérons donc :

– l’organisation de journées de forma-tion tout à la fois extrêmement péda-gogiques et fournissant aux partici-pants des informations très précisessur les contrats de partenariat et plusgénéralement les PPP ;

– la réalisation d’une consultationauprès des collectivités locales sedonnant pour objet de déterminer lesattentes des élus.

Du côté des collectivités locales laconstitution de pôles de compétencespluridisciplinaires peut être envisa-gée, pour organiser la mutualisationd’un certain nombre de fonctions. Lagestion du changement introduit parla culture de l’évaluation gagnera àêtre mise à profit elle constitue un définon négligeable.

La finalisation du dispositif compta-ble et budgétaire transitoire

Le dispositif transitoire applicable auxcollectivités locales souffre de certai-nes contradictions avec la décisiond’Eurostat qu’il conviendra de solu-tionner.

Par ailleurs, la question de la trans-cription comptable des opérations encontrat de partenariat est suffisam-ment sensible du point de vue desresponsables locaux pour que l’Étatapporte en la matière des éléments decompréhension beaucoup plus précis.

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Si les contrats de partenariat restent àce jour d’application marginale (unseul contrat signé, mais cependant denombreux projets à l’étude), ils aurontau moins eu un effet majeur : relancerle débat sur les partenariats public-privé.

Ce débat n’est pas sans soulever desdifficultés politiques et culturelles.

D’abord, il relance avec vigueur lathématique de la réforme de l’État. Lamanifestation la plus significative à cetégard est assurément la notion d’éva-luation comparative des modes degestion des services publics. Lescontrats de partenariat contraignent eneffet les personnes publiques à chiffrerles coûts des projets réalisés en maî-trise d’ouvrage publique, là où aupa-ravant elles n’en percevaient pasnécessairement la plénitude, vu l’ab-sence d’obligation à leur encontre deprésenter des comptes projets consoli-dés. L’enjeu lié à cette question estcelui de favoriser la performance et latransparence de l’action publique parla mise en place notamment d’instru-ments de contrôle et de régulationadaptés. La nouvelle approche métho-dologique du contrat de partenariatdevrait conduire également à un chan-gement culturel de la puissancepublique au sens où elle nécessite deraisonner en terme d’achat de “servicerendu” et non plus de “service ououvrage acheté”.

De surcroît, le renforcement du parte-nariat public-privé aura de nombreuxeffets qu’il est plus ou moins faciled’anticiper. Parmi ceux-là, on enretiendra deux qui sont explicitementrecherchés et souvent mis en avantdans les débats : d’une part le parte-nariat public-privé devrait accélérer laréalisation des investissements que lespouvoirs publics n’ont pas toujours lesmoyens de financer, d’autre part ildevrait renforcer les responsableslocaux dans leur capacité à réaliser

des projets et donc conforter le pro-cessus de décentralisation en coursdans notre pays.

Les collectivités territoriales sont par-fois arrêtées dans leurs projets par lacontrainte budgétaire sachant que lesmarges de manœuvre supplémentai-res dépendent du bon vouloir de l’État(décision en matière de fiscalité, sub-ventions, aides…). Le contrat de parte-nariat peut ouvrir des opportunités quichangeront cet état de fait. La systé-matisation de ces pratiques peut doncà terme modifier les équilibres despouvoirs entre les niveaux local etnational.

Par ailleurs, on pressent aujourd’huique si les contrats de partenariat peu-vent être envisagés pour une multitudede domaines, leur avantage compara-tif par rapport aux solutions contrac-tuelles classiques semble particulière-ment significatif dans les domaines oùles services externalisés sont les pluscomplexes et représentent des enjeuxvitaux pour les entreprises (l’économiedes services, par opposition aux biensindustriels). Les contrats de partenariatgagneront à être développés là où lesecteur privé est plus performant quele secteur public, par le savoir-fairequi est le sien et par les solutions inno-vantes qu’il propose pour résoudre lacomplexité.

Il faut encore rappeler que l’ordon-nance sur les contrats de partenariataccorde une part non négligeable auxmécanismes permettant de garantir lerespect des obligations de servicepublic qui s’imposent à l’opérateurprivé, de même que les contrats departenariat n’ont pas pour objet depermettre la rétrocession à la sphèremarchande du cœur des activités deservice public.

La réforme des partenariats public-privé constitue une voie à exploiterpour les collectivités locales. Le nou-

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CONCLUSION

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veau dispositif (les contrats de parte-nariat), s’il présente de nombreuxavantages comparatifs par rapport auxautres formes d’association du secteurprivé à des projets publics, reste per-

fectible, et c’est dans cette optiqueque nous avons rédigé les quelquesrecommandations qui nous semblentessentielles pour encourager une utili-sation efficace des nouveaux PPP.

Conclusion

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• Lois et règlements

Loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 rela-tive à la maîtrise d’ouvrage publiqueet à ses rapports avec la maîtrised’œuvre privée

Loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relati-ve au service public pénitentiaire

Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993relative à la prévention de la corrup-tion et à la transparence de la vie éco-nomique et des procédures publiques

Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002d’orientation et de programmationpour la sécurité intérieure (LOPSI),article 3-II

Loi n° 2002-1138 du 9 septembre2002 d’orientation et de programma-tion pour la justice (LOPJ)

Loi n° 2003-73 du 27 janvier 2003relative à la programmation militairepour les années 2003 à 2008

Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003pour la sécurité intérieure

Loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003habilitant le Gouvernement à simpli-fier le droit, article 6

Ordonnance n° 2003-850 du 4 sep-tembre 2003 portant simplification del’organisation et du fonctionnementdu système de santé ainsi que des pro-cédures de création d’établissementsou de services sociaux ou médicaux-sociaux soumis à autorisation

Ordonnance n° 2004-559 du 17 juin2004 sur les contrats de partenariat

Décret n° 2004-1119 du 19 octobre2004 portant création de la missiond’appui à la réalisation des contrats departenariat

Décret n° 2004-1145 du 27 octobre2004 pris en application des articles3, 4, 7 et 13 de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contratsde partenariat et L. 1414-3, L. 1414-4et L. 1414-10 du Code général descollectivités territoriales

Projet de loi organique modifiant laloi organique n° 2001-692 du 1er août2001 relative aux lois de finances,amendements présentés par M. lesénateur Jean Arthuis et adoptés par leSénat le 16 décembre 2004

Décret n° 2004-1551 du 30 décembre2004 instituant un organisme expertchargé de l’évaluation des partenariatsde l’État au sein du ministère de laDéfense

• Jurisprudence

Conseil constitutionnel, décisionn° 2002-460 DC, 22 août 2002, loid’orientation et de programmationpour la sécurité intérieure

Conseil constitutionnel, décisionn° 2003-473 DC, 26 juin 2003, loihabilitant le Gouvernement à simpli-fier le droit

Conseil d’État, n°269814, 27 octobre2004, M. Sueur et autres

Conseil constitutionnel, décisionn° 2004-506 DC, 2 décembre 2004,loi de simplification du droit

• Lignes directrices

Eurostat, décision “Le déficit et ladette – Traitement des partenariatspublic-privé”, 11 février 2004,STAT/04/18

Commission des Communautés euro-péennes, Bruxelles, 30 avril 2004,COM(2004) 327 final, livre Vert sur lespartenariats public-privé et le droitcommunautaire des marchés publicset des concessions

Ministère des Solidarités, de la Santéet de la Famille, Mission nationaled’appui à l’investissement hospitalier,Le guide du bail emphytéotique hospi-talier, un outil global et innovant auservice de l’investissement hospitalier,février 2005

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BIBLIOGRAPHIE

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• Ouvrages

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COSSALTER (P.) et DU MARAIS (B.), LaPrivate Finance Initiative, IGD, 2001

BEZANÇON (X.), DERUY (L.), FISZELSON

(R.) et FORNACCIARI (M.), Les nouveauxcontrats de partenariat public-privé,Le Moniteur, 2005

• Rapports publics – études

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Mission interministérielle pour la qua-lité des constructions publiques, rap-port d’enquête, Comprendre les pra-tiques européennes. Le développe-ment de la procédure de PPP/PFI enGrande-Bretagne, novembre 2003

European Commission, rapportRessource Book on PPP Case Studies,juin 2004

Commissariat général du Plan, rapportdu groupe d’experts présidé parLEBÈGUE (D.), Le prix du temps et ladécision publique, La Documentationfrançaise, février 2005

Institut de la gestion déléguée, rapportdu groupe d’experts présidé parBABUSIAUX (C.), Régie, marché, contratde partenariat, délégation. Quellecompétition pour l’amélioration duservice public ? Comparabilité,transparence, réversibilité, LaDocumentation française, juin 2005

• Revues

“La Gazette”, Études et Documents,cahier détaché, IGD, Évaluation descontrats globaux de partenariat.Principes, méthode et comparaisons,5 avril 2004

“La Gazette”, Études et Documents,cahier détaché, Les contrats de parte-nariats publics/privés. Présentationdes aspects juridiques, fiscaux et finan-ciers, 26 juillet 2004

“Le Moniteur”, cahier détaché n° 2,n° 5264, BREVILLE (A.) et BEZANÇON

(X.), Quel montage contractuel en par-tenariat public-privé ? Étude compa-rée des différentes formes contractuel-les y compris le nouveau contrat departenariat, 15 octobre 2004

“Le Moniteur”, cahier détaché n° 2,n° 5286, BEZANÇON (X.) et FORNACCIARI

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BABIN (L.) et MACAIRE (A.), Réseaux detélécommunications : le recours auxcontrats de partenariats public-privé,“Petites Affiches”, n° 182, p. 3-11, 10septembre 2004

BRACONNIER (S.), L’apparition descontrats de partenariat dans le champde la commande publique, “JCP G.”,p. 2134-2142, 24 novembre 2004

DERUY (L.) et LAGUMINA (S.), L’ordon-nance relative aux contrats de parte-nariat : dépasser la polémique,“BJCP”, n° 36, p. 348-361

DERUY (L.), Partenariats public-privé :réforme contractuelle ou révolutionculturelle ?, “Les Échos”, 23 juin 2003

KIRAT (T.), L’allocation des risques dansles contrats : de l’économie descontrats “incomplets” à la pratiquedes contrats administratifs, “Revueinternationale de droit économique”,n° 1, p. 11-46, 1er janvier 2003

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QUIGGIN (J.), Risk, PPPs and the PublicSector Comparator, “AustralianAccounting Review”, vol. 14, n° 2,p. 51-61, juillet 2004

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Bibliographie

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ANNEXE 1

Équipe du projetPPP et actions locales

Remerciements

Catherine Maubert, chargée de mis-sion, chef de projet du groupe Racines

Catherine Presse, assistante

Luc Baumstark, conseiller scientifique,chef de projet, groupe Utilities

Guilhem Bentoglio, chargé de mis-sion, chef de projet, groupe Délos

Stéphane Cadiou, conseiller scienti-fique, groupe Racines

Laurent Deruy, avocat à la Cour,Cabinet Gide-Loyrette-Nouel, chargéd’enseignement, Paris-II

Philippe Hirtzman, chef du Servicedes entreprises et du développementdes activités économiques

Albane Hugé, stagiaire DESS droitpublic de l’économie de Paris-II, grou-pe Racines

Catherine Marcadier, conseiller scien-tifique, groupe Racines

Contacts :[email protected]@plan.gouv.fr

Que soient ici remerciés chaleureuse-ment pour leur aide, leur temps etleurs encouragements :

• Institut de la gestion déléguée, grou-pe de travail “Dimensions macro-éco-nomiques des partenariats public-privé” ; en particulier :

Cédric Le Bris, chargé de mission,Institut de la gestion déléguée

Vincent Piron, directeur de la straté-gie, Vinci concessions

Christian Saint-Étienne, professeurdes universités, président de l’InstitutFrance Stratégie

Noël de Saint-Pulgent, président de laMission d’appui à la réalisation descontrats de partenariat

• Ludovic Babin, avocat à la Cour,Cabinet Lovells

• Pierre Couturier, directeur des finan-ces, Conseil général de l'Aube

• Louis-François Fleri, responsableexpérimentation "e-Bourgogne",Conseil régional de Bourgogne

• Stéphane Manoukian, directeur demission, Cabinet Ernst & Young

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ANNEXE 2

Compositiondu groupe de projetRacines

Catherine Maubert, chef de projet,chargée de mission, Commissariatgénéral du Plan

Membres extérieurs

Laurent Davezies, professeur, Institutd’urbanisme de Paris ; chercheur,Centre de recherche sur l’environne-ment, les transports, l’économie et lesinstitutions locales, université de Paris-Val-de-Marne

Aïssa Dermouche, préfet du Jura

Michel Doly, président du Conseiléconomique et social de la régionAuvergne ; professeur, faculté demédecine et de pharmacie, universitéd’Auvergne Clermont-1

Bernard Fortino, directeur régionalFrance Sud (OTV) – VeoliaEnvironnement ; premier adjoint deChâteau-Arnoux-Saint-Auban (Alpes-de-Haute-Provence) ; délégué de laCommunauté de communes de laMoyenne-Durance

Michel Franck, président honoraire dela Chambre de commerce et d’indus-trie de Paris ; expert près la Cour d’ap-pel de Paris

Pierre Jamet, directeur général des ser-vices du Conseil général du Rhône

Francis Laffon, rédacteur en chef duquotidien “L’Alsace” ; membre del’Association des Journalistes de l’in-formation sociale

Anne Lalo, maître de conférences,université de Nice Sophia-Antipolis ;chercheur, Laboratoire d’analysessociologiques et anthropologiques desrisques (LASAR), université de Caen

Philippe Laurent, maire de Sceaux(Hauts-de-Seine) ; vice-président duConseil général des Hauts-de-Seine

Michel Piron, député de Maine-et-Loire ; conseiller général du canton deThouarcé, conseiller municipal deThouarcé ; président de la Commu-nauté de communes des Côteaux-du-Layon

Michel Rostagnat, chargé de mission,Inspection générale de l’adminis-tration, ministère de l’Intérieur, de laSécurité intérieure et des Libertéslocales

Membres internesdu Commissariatgénéral du Plan

Stéphane Cadiou, conseiller scienti-fique

Philippe Hirtzman, chef du Servicedes entreprises et du développementdes activités économiques (SEDAE)

Benoît Lajudie, chargé de mission

Catherine Marcadier, conseiller scien-tifique

Albane Huge, stagiaire

Catherine Presse, assistante

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