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On nous le dit et on nous le répète. Il faut manger moins gras. Pourtant, les graisses sont et restent indispensables au bon fonctionnement de notre organisme : les lipides sont les constituants de base des membranes cellulaires, ils sont de plus à l’origine d’hormones et de molécules essentielles pour la régulation des fonctions physiologiques et ils assurent aussi une réserve d’énergie. Et même si l’organisme est capable de synthétiser la plupart des types de matières grasses à partir d’autres matériels énergétiques tels que les glucides, il ne peut toutefois synthétiser les acides gras dits essentiels… Or, les graisses, de façon générale, ont véritablement été diabolisées ces dernières décennies et plus particulièrement depuis l’observation, dans les années 1940, d’une augmentation des troubles cardiovasculaires aux États-Unis. Qui veut la peau du gras ? Au milieu des années 1950, l’« hypothèse lipidique » pointa du doigt les graisses saturées d’origine animale, les accusant de provoquer une élévation de la teneur en cholestérol du sang, à la faveur de dépôts sous forme de plaques dans les artères. Très rapidement, les matières grasses animales, particulièrement celles issues des produits laitiers, furent mises au pilori et les consommateurs furent orientés vers les margarines végétales, dont le marché devint florissant. Pendant longtemps, le discours médical et scientifique à l’attention du grand public sur ce sujet est resté relativement simple et monolithique. Pourtant, à y regarder de plus près, dès l’époque de l’émission de l’« hypothèse lipidique », le débat « beurre vs margarine » fut vif et il est toujours loin d’être clos. Dès 1956, un médecin, le Docteur Duddley White s’opposa à l’hypothèse lipidique et à la grande campagne du régime de Prudence (un régime qui prônait de remplacer le beurre, le saindoux, la viande de bœuf et les œufs par l’huile de maïs, la margarine, le poulet et les céréales). Voyez-vous, j’ai commencé ma carrière comme cardiologue en 1921 et je n’ai pas vu un seul infarctus du myocarde jusqu’en 1928. Avant 1920, les graisses de l’alimentation étaient celles du beurre et du saindoux, et je pense que nous tirerions profit du type de régime que nous avions à l’époque où personne n’avait encore entendu parler d’huile de maïs. Ces arguments tout à fait empiriques du Docteur White sont rapportés sur le site de la Fondation Weston Price, une association américaine composée de scientifiques indépendants, qui milite pour la défense et la promotion des aliments riches en nutriments et un retour à une alimentation non industrielle. Bien qu’il s’agisse d’un groupe de scientifiques qui revendique son activisme, cette Fondation a le mérite de mettre en lumière un discours plus nuancé sur les graisses que celui qui est généralement médiatisé et mis en avant par les grands groupes margariniers. Certains membres de la Fondation Weston Price, à l’instar de Maria Enig, directrice de l’équipe de chercheurs sur les matières grasses à l’Université du Maryland, n’hésitent pas à affirmer que les régimes modernes riches en huiles végétales hydrogénées sont la cause d’une augmentation significative des maladies cardiovasculaires et des cancers. Avant 1920, les graisses de l’alimentation étaient celles du beurre et du saindoux. Le grand méchant gras ? Les graisses n’ont jamais eu aussi mauvaise réputation qu’aujourd’hui. Pourtant, dans cette ambiance lipophobe, les publicités pour diverses matières grasses sont nombreuses. Régime méditerranéen et huile d’olive, margarines enrichies en acides gras oméga 3 ou en stérols végétaux… Comment s’y retrouver ? Par Isabelle Masson. Illustration Caät Fradier. 49 PERSPECTIVES 07 FÉVRIER 2009

perspectives 07 février 2009 Le grand méchant gras

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Page 1: perspectives 07 février 2009 Le grand méchant gras

On nous le dit et on nous le répète. Il faut manger moins gras. Pourtant, les graisses sont et restent indispensables au bon fonctionnement de notre organisme : les lipides sont les constituants de base des membranes cellulaires, ils sont de plus à l’origine d’hormones et de molécules essentielles pour la régulation des fonctions physiologiques et ils assurent aussi une réserve d’énergie. Et même si l’organisme est capable de synthétiser la plupart des types de matières grasses à partir d’autres matériels énergétiques tels que les glucides, il ne peut toutefois synthétiser les acides gras dits essentiels… Or, les graisses, de façon générale, ont véritablement été diabolisées ces dernières décennies et plus particulièrement depuis l’observation, dans les années 1940, d’une augmentation des troubles cardiovasculaires aux États-Unis.

Qui veut la peau du gras ?Au milieu des années 1950, l’« hypothèse lipidique »

pointa du doigt les graisses saturées d’origine animale, les accusant de provoquer une élévation de la teneur en cholestérol du sang, à la faveur de dépôts sous forme de plaques dans les artères. Très rapidement, les matières grasses animales, particulièrement celles issues des produits laitiers, furent mises au pilori et les consommateurs furent orientés vers les margarines végétales, dont le marché devint florissant. Pendant longtemps, le discours médical et scientifique à l’attention du grand public sur ce sujet est resté relativement simple et monolithique.

Pourtant, à y regarder de plus près, dès l’époque de l’émission de l’« hypothèse lipidique », le débat « beurre vs margarine » fut vif et il est toujours loin d’être clos. Dès 1956, un médecin, le Docteur Duddley

White s’opposa à l’hypothèse lipidique et à la grande campagne du régime de Prudence (un régime qui prônait de remplacer le beurre, le saindoux, la viande de bœuf et les œufs par l’huile de maïs, la margarine, le poulet et les céréales). Voyez-vous, j’ai commencé ma carrière comme cardiologue en 1921 et je n’ai pas vu un seul infarctus du myocarde jusqu’en 1928. Avant 1920, les graisses de l’alimentation étaient celles du beurre et du saindoux, et je pense que nous tirerions profit du type de régime que nous avions à l’époque où personne n’avait encore entendu parler d’huile de maïs. Ces arguments tout à fait empiriques du Docteur White sont rapportés sur le site de la Fondation Weston Price, une association américaine composée de scientifiques indépendants, qui milite pour la défense et la promotion des aliments riches en nutriments et un retour à une alimentation non industrielle. Bien qu’il s’agisse d’un groupe de scientifiques qui revendique son activisme, cette Fondation a le mérite de mettre en lumière un discours plus nuancé sur les graisses que celui qui est généralement médiatisé et mis en avant par les grands groupes margariniers.

Certains membres de la Fondation Weston Price, à l’instar de Maria Enig, directrice de l’équipe de chercheurs sur les matières grasses à l’Université du Maryland, n’hésitent pas à affirmer que les régimes modernes riches en huiles végétales hydrogénées sont la cause d’une augmentation significative des maladies cardiovasculaires et des cancers.

Avant 1920, les graisses de l’alimentation étaient celles du beurre et du saindoux.

Le grand méchant gras ?Les graisses n’ont jamais eu aussi mauvaise réputation qu’aujourd’hui. Pourtant, dans cette ambiance lipophobe, les publicités pour diverses matières grasses sont nombreuses. Régime méditerranéen et huile d’olive, margarines enrichies en acides gras oméga 3 ou en stérols végétaux… Comment s’y retrouver ?Par Isabelle Masson. Illustration Caät Fradier.

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Haro sur les transLe fait est qu’au fur et à mesure des recherches et

découvertes scientifiques, les bienfaits des margarines végétales n’ont plus été aussi clairs. Plusieurs études ont, au fil des années, permis de cerner deux ennemis de la santé cardiovasculaire. En effet, pour solidifier les huiles végétales et en faire de la margarine, on utilise la technologie de l’hydrogénisation, c’est-à-dire qu’on ajoute sous pression de l’hydrogène sur une liaison non saturée pour la rendre saturée. Cette technique entraîne, d’une part, la transformation de graisses polyinsaturées en graisses saturées nocives et, d’autre part, la production d’acides gras trans dont l’influence nocive sur la santé artérielle a été révélée ces dernières années : il est désormais admis que les graisses trans d’origine technologique (les acides gras trans naturels, présents notamment dans certaines matières grasses animales, ne semblent pas montrer les mêmes effets délétères), comme les acides gras saturés, augmentent les niveaux de cholestérol LDL (ou mauvais cholestérol) dans le sang… Mais aussi, et c’est plus grave encore car ce n’est pas le cas des graisses saturées, que ces gras trans abaissent le taux de cholestérol HDL (le « bon » cholestérol). De plus, en 2008, une étude française réalisée par l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et l’Institut de cancérologie Gustave Rouy ont démontré que le risque de cancer du sein augmente avec la teneur en acides gras trans, reflet de la consommation en produits manufacturés.

Selon cette étude, les femmes ayant des taux élevés d’acides gras trans dans le sérum ont un risque d’avoir un cancer du sein presque doublé par rapport aux femmes ayant le taux le plus bas. Parallèlement à ces constats, la recherche nous éclaire aujourd’hui de façon plus précise sur les bénéfices que l’on peut tirer de la consommation de certaines matières grasses animales. Découverts il y a quelques années seulement, les acides gras conjugués (Conjugated Linoleic Acid, CLA) forment une nouvelle famille de lipides, distincte des acides gras saturés, monoinsaturés et polyinsaturés. Ces CLA auraient montré, au cours de travaux portant sur des animaux, une faculté à lutter contre l’athérosclérose. Au cours d’études sur l’être humain, ils auraient aussi

révélé leur rôle dans la réduction du risque de cancer du sein, ainsi que dans la limitation du processus de mise en réserve du gras. Or les produits laitiers sont la principale source de CLA dans l’alimentation humaine et le beurre en est particulièrement riche. Le hic c’est que les CLA ne sont pas dissociés et isolés des autres acides gras polysaturés présents dans les produits laitiers.

Du bon usage du grasAvec le temps donc, le

discours scientifique a tendance à se nuancer : s’il reste certain qu’un excès de graisses saturées est nocif et que les acides gras (poly et mono) insaturés peuvent avoir un rôle dans la prévention des maladies cardiovasculaires, les spécialistes de la nutrition prônent désormais la diversité en matière de consommation de graisses. Cet équilibre idéal est d’autant plus difficile à trouver par le consommateur : non seulement, les étiquetages nutritionnels sont loin d’êtres suffisamment clairs et précis, mais lorsqu’ils le sont, il faut de solides connaissances en diététique et nutrition pour les interpréter. Comment s’y retrouver ? Pour le docteur Jacques Médart, médecin nutritionniste auteur

Le risque de cancer du sein augmente avec la teneur en acides gras trans.

Le B.A.- BA du gRAsSources d’énergie, ces matières grasses sont indispensables à l’équilibre du régime alimentaire et participent à la fabrication des cellules et au fonctionnement du système nerveux. On distingue les acides gras saturés, dont les chaînes hydrocarbonnées ne comportent pas de doubles liaisons, et les acides gras insaturés, présentant une ou plusieurs doubles liaisons dans leur chaîne, ce qui leur vaut le qualificatif de monoinsaturés ou polyinsaturés.

H Les acides gras saturés Où les trouver ? Principalement dans les graisses d’origine animale (lait, beurre, viande), mais aussi dans certaines huiles végétales comme l’huile de palme. Le moins Les acides gras saturés ralentissent le recyclage du mauvais cholestérol au niveau du foie et entraînent une augmentation de la quantité de cholestérol sanguin et de la durée du séjour de celui-ci dans le sang (ce qui favorise son oxydation). Conséquences : une augmentation de la fréquence des maladies cardiovasculaires. Le plus Ce sont des graisses très stables qui présentent une bonne résistance à l’élévation thermique

H Les acides gras monoinsaturés Où les trouver ? Dans l’huile d’olive mais aussi dans celles de colza et dans l’huile d’arachide. Le moins L’huile d’olive s’oxyde à la lumière et doit donc impérativement être conservée à l’obscurité. L’huile de colza n’a qu’une résistance thermique modeste. Le plus Ils font baisser le cholestérol total et le mauvais cholestérol. Ce sont des graisses stables, de bonne conservation. Les huiles d’olive et d’arachide conviennent bien pour la cuisson (qui doit, dans tous les cas, être réalisée à une température aussi peu élevée que possible : jamais plus de 180º).

H Les acides gras polyinsaturés (ou vitamine F) Où les trouver ? Notamment dans l’huile de tournesol, de colza, de carthame, de soja, de noix… Le moins Très fragiles, ne supportent pas d’être élevés à haute température (tout au plus chauffés) et s’oxydent facilement à l’air. Ils deviennent alors toxiques. Le plus Ils jouent un rôle capital dans la fluidité des membranes cellulaires. Ils sont des éléments constitutifs du tissu nerveux et de la rétine, et facilitent la cicatrisation, agissent positivement sur le métabolisme des hormones…

En savoir plus

H « Manuel pratique de nutrition. L’alimentation préventive et curative », Jacques Médart, éd. De Boeck, 2005 (nouvelle édition à paraître en 2009).

H « Cholestérol ou graisses hydrogénées, qui est le vrai coupable ? », Marcel Arickx, éd. Testez, 2008.

H Le site de la Weston Price Foundation : http://www.westonaprice.org/

H Le site de Taty Lauwers, conseillère en cuisine naturelle, qui a traduit des articles de la Weston Price Foundation et prépare un ouvrage sur le gras : www.taty.be

H Le site de Maurice Legoy, biologiste et vétérinaire retraité qui pose un regard critique sur l’alimentation contemporaine : http://maurice.legoy.free.fr

H Deux sites qui font régulièrement le point sur les recommandations nutritionnelles et les actualités de la recherche dans ce domaine : www.healthandfood.be, www.mangerbouger.be

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graisses trans sans que cela soit mentionné sur l’étiquette ! De plus, l’huile de palme, riche en graisses saturées, est de plus en plus présente dans les produits industriels. En 2007, le Canada a interdit l’utilisation de plus de 2 % d’acides gras trans d’origine artificielle dans tout produit, emboîtant le pas au Danemark qui avait déjà adopté cette mesure en 2003. Aux États-Unis, la teneur en acides gras trans doit être indiquée sur les emballages des produits alimentaires depuis le 1er janvier 2006. En Europe toutefois, il n’existe pas d’autre règle que celle de signaler leur présence au sein de l’étiquetage, sans notion de quantité obligatoire. On se méfiera donc des mentions « matières grasses hydrogénées ou partiellement hydrogénées » qui traduisent la présence de graisses saturées par hydrogénation. On peut aussi faire le choix des produits bio qui, eux, ne contiennent à coup sûr aucun acide gras trans, puisque le cahier des charges de cette filière interdit l’utilisation de graisses artificiellement modifiées. Dans son « Manuel pratique de nutrition », le Docteur Jacques Médart cite le nutritionniste français Apfelbaum : si le discours médical actuel est court, progressiste et brillant, le langage de la nutrition est long, ennuyeux et compliqué. L’exemple de la complexification des connaissances sur les matières grasses illustre la difficulté d’accès aux informations qui permettent de composer une assiette réellement saine… et nous confirme aussi qu’il est plus que jamais nécessaire que chacun s’y intéresse ! H

et Les omégA 3 ?Les oméga 3 sont des acides gras polyinsaturés (AGPI), comme les oméga 6 : leur dénomination vient de la position de la double liaison sur la molécule. Certains de ces acides gras sont dits « essentiels » car ils ne peuvent être fabriqués par notre corps et doivent donc être apportés par l’alimentation. C’est le cas de l’acide alpha-linolénique (ALA) et de l’acide linoléique (LA), à partir desquels nos enzymes produisent des acides gras hautement insaturés, aux plus longues chaînes. L’ALA, acide gras oméga 3, donnera naissance aux acides éicosapentaénoïque (EPA) et docosahexaénoïque (DHA), tandis que le LA, acide gras oméga 6 est à la base de la production de l’acide arachidonique (AA). On sait aujourd’hui que les oméga 3 jouent un rôle important dans la prévention des maladies cardiovasculaires ainsi que dans les échanges cellulaires, le développement et le fonctionnement du cerveau. Depuis la révolution industrielle, notre alimentation a connu une augmentation importante du rapport oméga 6/oméga 3 : on consomme actuellement dix à quinze fois plus d’oméga-6 que d’oméga-3. D’une part parce que les animaux qui se nourrissaient autrefois essentiellement du pâturage sont aujourd’hui engraissés au moyen d’aliments riches en oméga 6, tels que le maïs. D’autre part à cause d’un engouement pour les huiles riches en oméga 6 (huile de tournesol, huile de maïs). Et enfin, à cause d’une faible consommation de poissons gras et autres produits marins.Les diverses instances mondiales qui mettent au point les recommandations nutritionnelles s’accordent sur l’importance de l’équilibre idéal de 1 pour 5 dans le rapport entre les acides gras essentiels des deux séries oméga-3 et 6. Un trop fort apport en oméga 6 par rapport aux oméga 3 nuit au bon déroulement du processus de synthèse des dérivés hautement insaturés à partir de ces acides gras essentiels, produits grâce aux mêmes enzymes. Pour assurer un apport suffisant en acides gras essentiels et dérivés hautement insaturés, il est donc conseillé de consommer seulement 5 fois plus d’oméga 6 que d’oméga 3 (et non dix à quinze fois plus comme c’est souvent le cas) : consommer, pour les préparations froides, de l’huile de colza ou de noix plutôt que de l’huile de tournesol ou de maïs et consommer des oméga 3 dits « sophistiqués » qu’on trouve dans les poissons gras (thon, saumon sauvage, sardine, hareng), de préférence peu cuits (les conserves ou les fumaisons constituent une bonne alternative).

MENU SAINT-VALENTIN45 Euros

Mise en boucheAlliance de Sushi et Sashimi

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du « Manuel pratique de nutrition. L’alimentation préventive et curative » (éd. De Boeck, 2005), le fait qu’une matière grasse soit bonne ou mauvaise pour la santé tient beaucoup aux quantités consommées et à l’usage qu’on en fait. Et de souligner que l’on ignore encore trop souvent que toutes les matières grasses renferment les trois types d’acides gras. Il n’y a pas d’huiles monoinsaturées ni d’huiles polyinsaturées pures, il y a juste des huiles qui

contiennent proportionnellement plus d’acides gras monoinsaturés, comme l’huile d’olive, des huiles qui contiennent proportionnellement

plus de polyinsaturés, comme l’huile de tournesol, et des huiles qui contiennent proportionnellement plus

d’acides gras saturés, comme l’huile de palme.

Autre fait important dont il faut tenir compte pour opérer des choix judicieux

concernant les matières grasses : leur résistance à la température. Et c’est

là qu’intervient un nouveau paradoxe : ce sont les acides gras saturés qui sont les plus résistants à haute température, ceux-là même qui sont les moins fréquentables au niveau cardiovasculaire ! Les monoinsaturés résistent aussi relativement à la cuisson, pour autant qu’on ne dépasse pas les 180° C. Mais les acides gras polyinsaturés sont eux très sensibles à l’élévation thermique… Pour la cuisson, rappelle le docteur Médart, il faut toujours garder en tête qu’une graisse qui fume est impropre à la consommation ! Selon moi, le maître-choix pour frire et rôtir est la graisse d’oie : sa composition est très proche de celle de l’huile d’olive, mais elle a une meilleure résistance thermique. Enfin, toujours selon Jacques Médart, la méfiance est de mise concernant les margarines dévolues à la cuisson. Certaines d’entre elles contiennent plus de 60 % d’acides gras polyinsaturés : ces produits présentent-ils une garantie suffisante de résistance thermique ? En décortiquant les étiquettes des produits destinés à la cuisson, on peut avoir de désagréables surprises, insiste le médecin nutritionniste, donnant en exemple une matière grasse à cuire à base d’huile d’olive et d’huile de palme dont le taux de graisses saturées est de 56 %, contre les 15 % de l’huile d’olive pure. Ce genre de matière grasse se rapproche alors fortement du beurre… Tout en gardant de faux airs d’« aliment santé » ! Certaines graisses de cuisson dites « light » ne contiennent que 56 % de matière grasse, alors que dans une huile, il y a 100 % de matière grasse. A priori, c’est bien. Mais le but de la cuisson, c’est « frire et rôtir », si vous avez une matière grasse avec 44 % de graisse en moins, il faudra en mettre 44 % en plus dans la poêle ! Plus grave, il arrive qu’on y ajoute des oméga 3 et des oméga 6 en en faisant la promotion ! On peut trouver certains produits destinés à la cuisson contenant 5 % de graisses saturées, 19 % de monoinsaturés et 26 % de polyinsaturés : ce genre de matière grasse est dangereuse ! En l’élevant à 180 ºC, elle commence à produire des hydrocarbures saturés qui sont cancérigènes. Et ces oméga 6 et 3 dont on vante la présence dans la pub, résistent mal à l’élévation thermique.

Étiquettes à la loupeEn résumé, pour manger mieux gras, il faut

apprendre à décoder les étiquettes. Et pas uniquement celles des matières grasses à tartiner ou à cuire ! Car l’ennemi le plus féroce de notre santé se cache ailleurs. Aujourd’hui, confirme le Docteur Médart, il y a une phobie du gras visible. Celui du jambon, du steak, de la cuisson, celui sur le pain. Mais on mange des biscuits « petit-déjeuner » aux céréales, à l’image favorable à la santé, qui contiennent 20 % de matières grasses. C’est presque de la saucisse ! Les produits industriels, non contents de contenir de forts taux de graisses, sont très souvent réalisés à base d’huiles végétales hydrogénées et contiennent souvent les fameuses graisses trans dont ont dénonce les effets plus haut. Si les producteurs de margarines ont amélioré leur technologie pour que dans la majorité des margarines que nous achetons le pourcentage de graisses trans soit faible (il avoisine le plus souvent 1 % et dépasse rarement les 3 %), beaucoup d’aliments industriels sont faits avec des matières grasses de très mauvaise qualité qui peuvent renfermer 10 à 12 % de

Matière grasse AGS% AGMI% AGPI AGS /100g +AGMI

Beurre 83 61 35 4 96Huile de palme 100 52 38 10 90Huile de tournesol 100 13 22 65 35Huile de soja 100 17 21 62 38Huile de colza 100 9 60 31 69Huile d’arachide 100 21 54 25 75Huile d’olive 100 15 75 10 90Graisse d’oie 98 29 60 11 89

mAngeR mieux gRAsH Les recommandations du Conseil Supérieur de l’Hygiène prônent un apport en lipides équivalent à 30 % (maximum 35 %) de l’apport énergétique total, avec maximum 10 % sous forme d’acides gras saturés et un minimum de 10 % sous forme d’acides gras monoinsaturés.

H Comment évaluer sa consommation de graisses ? Selon le Dr Jacques Médart, une cuisine est relativement grasse à partir du moment où la quantité de matières grasses utilisées pour la préparation des repas excède 1000 g par mois pour un ménage de quatre personnes et si l’utilisation des graisses tartinables dépasse 20 à 30 g par personne et par jour.

H Attention particulière pour les oméga 3 : ils doivent idéalement représenter 1,3 à 2 % des apports énergétiques totaux, avec plus de 1 % d’ALA et plus de 0,3 % de DHA et EPA (voir encadré). Bien que ces derniers soient en partie générés par la transformation de l’ALA, il reste nécessaire d’en consommer et donc de diversifier les apports sous des formes végétales et animales. Pour un bilan énergétique type de 2400 kcl, il faudrait consommer environ 2,66 g d’ALA et 800 mg EPA et DHA. Cet nutritionnel en ALA, peut être atteint avec 5 cuillères à café d’huile de noix ou 7,5 cuillères à café d’huile de colza. Pour consommer suffisamment d’EPA et de DHA, il faudrait manger chaque semaine 230 g de poisson gras ou 860 g de poisson mi-gras…

H La cuisson, une étape cruciale : pour la cuisson à la poêle, privilégier l’huile d’olive, l’huile d’arachide et la graisse d’oie et garder en tête que les graisses cuites à haute température sont dangereuses. Renouveler l’huile de friture au bout de 5 à 6 utilisations. Ne pas cuire les aliments riches en oméga 3, car ils ne résistent pas à la température. Un petit truc intéressant ? Faire blondir des oignons permet de prévenir l’oxydation de la matière grasse.

H Déceler les graisses trans sur les étiquettes et fuir les aliments qui en contiennent.

H Conserver les huiles à l’abri de la lumière et de la chaleur.

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