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LE POLYNUCLÉAIRE DANS TOUS SES ÉTATS ! REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MAI 2014 - N°462 // 25 article reçu le 17 décembre 2013, accepté le 7 février 2014. © 2014 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés. RÉSUMÉ Les polynucléaires neutrophiles humains (PN) sont un des pivots de l’immunité innée et constituent un puissant système de défense de l’homme contre les agents pathogènes principalement les bactéries et les champignons qui ont franchi les barrières cutanéomuqueuses, et des structures reconnues comme étrangères telles que les cellules et les molécules endogènes altérées. Les PN sont les premières cellules immunitaires à migrer du sang vers un foyer infectieux ou inflamma- toire. Les activités microbicides et cytotoxiques des PN dépendent de différents mécanismes qui sont d’ailleurs intriqués : libération d’enzymes protéolytiques et production rapide et massive de formes réactives de l’oxygène (FRO) par la NADPH oxydase phagocytaire, c’est ce que l’on appelle l’explosion oxydative des PN. Ces fonctions sont strictement régulées à chaque étape fonctionnelle. Alors que les fonctions des PN ont longtemps été restreintes à leur rôle de cellules phagocytaires « tueuses », il est maintenant bien reconnu qu’ils jouent un rôle beaucoup plus complexe, participant à l’engagement et à la régulation des réponses immunitaires innées et adaptatives ainsi qu’à l’homéostasie tissulaire. Les fonctions des PN illustrent l’intégration complexe des différents partenaires de l‘immunité innée et adaptative dans la défense contre les agents pathogènes. Les PN activés par l’agent pathogène sont donc le plus souvent bénéfiques à l’organisme en participant à l’élimination de cet agent reconnu comme étranger au soi. Ceci est illustré par la survenue d’infections graves et/ou répétées dans certains déficits primitifs touchant différentes fonc- tions du PN. Cependant les PN sont également des armes à double tranchant, car une activation excessive, prolongée ou encore dans un lieu inapproprié peut conduire à des lésions tissulaires sévères impliquées dans la physiopathologie de différentes maladies inflam- matoires aiguës ou chroniques. Polynucléaire neutrophile humain – physiologie. Marguerita Hurtado-Nedelec a,b,c , Pham My-Chan Dang b,c , Renato C. Monteiro a,b,c , Jamel El Benna b,c , Marie-Anne Gougerot-Pocidalo a,b,c, * Physiologie des polynucléaires neutrophiles humains til l 17 b 2013 té l 7 i 2014 a UF « Dysfonctionnements immunitaires » Département d’immuno-hématologie Hôpital Bichat-Claude Bernard (AP-HP) 16, rue Henri Huchard 75877 Paris cedex 18 b Université Paris Diderot – Université Sorbonne Paris Cité Faculté de médecine – Site Xavier Bichat – Paris c Inserm U1149 – ERL CNRS Centre de recherche sur l’inflammation – Paris * Correspondance [email protected] SUMMARY Physiology of human neutrophils Human polymorphonuclear neutrophils (neutrophils) are professional phagocytes known to play a critical role in innate immunity. In responses to a variety of stimuli, neutrophils are the first immune cells to migrate from blood to inflammatory site. They play a critical role in killing bacteria, fungi and eliminating all bodies recognized as foreign, such as altered endogenous cells and molecules. These effector functions depend on release of proteolytic enzymes, inflammatory me- diators and large quantities of superoxide anion (in a phenomenon known as respiratory burst), a source of various reactive oxygen species (ROS). Superoxide anion is produced by a multicomponent enzyme sys- tem, the NADPH oxydase, which is tightly regulated, in order to avoid collateral tissue damages. In recent years, it has become obvious that the contribution of neutrophils to host defense and innate immunity extends well beyond their traditional role as profes- sional phagocytes. Neutrophils participate very early into the recruitment of other immune cells inducing and regulating the innate as well as adaptive immune response. Indeed, they interact with other innate cells but also with antigen-presenting-cells, T and B cells in a complex network. Finally, they play a key role in resolving inflammatory responses and repairing damaged tissues. Neutrophils are therefore most often beneficial to the host by their effector func- tions ; however, when stimulated excessively and/ or inappropriately, neutrophils may generate serious tissue lesions and are involved in acute and chronic inflammatory diseases. Human neutrophil – physiology. 1. Introduction Les polynucléaires neutrophiles humains (PN) sont une des premières barrières de défense contre l’introduction d’un agent pathogène dans l’organisme. Ils sont un des pivots de l’immunité innée et constituent un puissant système de défense de l’homme contre les agents pathogènes principalement les bactéries et les champignons mais aussi les parasites et les virus qui ont franchi les bar- rières cutanéomuqueuses, et des structures reconnues comme étrangères telles que les cellules et les molécules endogènes altérées. Les PN sont les premières cellules

Physiologie des polynucléaires neutrophiles humains

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LE POLYNUCLÉAIRE DANS TOUS SES ÉTATS !

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MAI 2014 - N°462 // 25

article reçu le 17 décembre 2013, accepté le 7 février 2014.

© 2014 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés.

RÉSUMÉ

Les polynucléaires neutrophiles humains (PN) sont un des pivots de l’immunité innée et constituent un puissant système de défense de l’homme contre les agents pathogènes principalement les bactéries et les champignons qui ont franchi les barrières cutanéomuqueuses, et des structures reconnues comme étrangères telles que les cellules et les molécules endogènes altérées. Les PN sont les premières cellules immunitaires à migrer du sang vers un foyer infectieux ou inflamma-toire. Les activités microbicides et cytotoxiques des PN dépendent de différents mécanismes qui sont d’ailleurs intriqués : libération d’enzymes protéolytiques et production rapide et massive de formes réactives de l’oxygène (FRO) par la NADPH oxydase phagocytaire, c’est ce que l’on appelle l’explosion oxydative des PN. Ces fonctions sont strictement régulées à chaque étape fonctionnelle. Alors que les fonctions des PN ont longtemps été restreintes à leur rôle de cellules phagocytaires « tueuses », il est maintenant bien reconnu qu’ils jouent un rôle beaucoup plus complexe, participant à l’engagement et à la régulation des réponses immunitaires innées et adaptatives ainsi qu’à l’homéostasie tissulaire. Les fonctions des PN illustrent l’intégration complexe des différents partenaires de l‘immunité innée et adaptative dans la défense contre les agents pathogènes. Les PN activés par l’agent pathogène sont donc le plus souvent bénéfiques à l’organisme en participant à l’élimination de cet agent reconnu comme étranger au soi. Ceci est illustré par la survenue d’infections graves et/ou répétées dans certains déficits primitifs touchant différentes fonc-tions du PN. Cependant les PN sont également des armes à double tranchant, car une activation excessive, prolongée ou encore dans un lieu inapproprié peut conduire à des lésions tissulaires sévères impliquées dans la physiopathologie de différentes maladies inflam-matoires aiguës ou chroniques.

Polynucléaire neutrophile humain – physiologie.

Marguerita Hurtado-Nedeleca,b,c, Pham My-Chan Dangb,c, Renato C. Monteiroa,b,c, Jamel El Bennab,c, Marie-Anne Gougerot-Pocidaloa,b,c,*

Physiologie des polynucléaires neutrophiles humains

ti l l 17 dé b 2013 té l 7 fé i 2014

a UF « Dysfonctionnements immunitaires »Département d’immuno-hématologieHôpital Bichat-Claude Bernard (AP-HP)16, rue Henri Huchard75877 Paris cedex 18 b Université Paris Diderot – Université Sorbonne Paris CitéFaculté de médecine – Site Xavier Bichat – Paris c Inserm U1149 – ERL CNRSCentre de recherche sur l’inflammation – Paris

* [email protected]

SUMMARY

Physiology of human neutrophils

Human polymorphonuclear neutrophils (neutrophils) are professional phagocytes known to play a critical role in innate immunity. In responses to a variety of stimuli, neutrophils are the first immune cells to migrate from blood to inflammatory site. They play a critical role in killing bacteria, fungi and eliminating all bodies recognized as foreign, such as altered endogenous cells and molecules. These effector functions depend on release of proteolytic enzymes, inflammatory me-diators and large quantities of superoxide anion (in a phenomenon known as respiratory burst), a source of various reactive oxygen species (ROS). Superoxide anion is produced by a multicomponent enzyme sys-tem, the NADPH oxydase, which is tightly regulated, in order to avoid collateral tissue damages. In recent years, it has become obvious that the contribution of neutrophils to host defense and innate immunity extends well beyond their traditional role as profes-sional phagocytes. Neutrophils participate very early into the recruitment of other immune cells inducing and regulating the innate as well as adaptive immune response. Indeed, they interact with other innate cells but also with antigen-presenting-cells, T and B cells in a complex network. Finally, they play a key role in resolving inflammatory responses and repairing damaged tissues. Neutrophils are therefore most often beneficial to the host by their effector func-tions ; however, when stimulated excessively and/or inappropriately, neutrophils may generate serious tissue lesions and are involved in acute and chronic inflammatory diseases.

Human neutrophil – physiology.

1. Introduction

Les polynucléaires neutrophiles humains (PN) sont une des premières barrières de défense contre l’introduction d’un agent pathogène dans l’organisme. Ils sont un des pivots de l’immunité innée et constituent un puissant système de défense de l’homme contre les agents pathogènes principalement les bactéries et les champignons mais aussi les parasites et les virus qui ont franchi les bar-rières cutanéomuqueuses, et des structures reconnues comme étrangères telles que les cellules et les molécules endogènes altérées. Les PN sont les premières cellules

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et des veinules post-capillaires. L’ensemble des fonctions physiologiques des PN s’exerce donc dans les tissus où, en l’absence de stimulus inflammatoire, les PN meurent spontanément par apoptose en moins de trois jours et sont phagocytés par les macrophages résidents, surtout dans la rate et la moelle osseuse, évitant ainsi la libération de leur contenu toxique. Lorsqu’il existe un foyer inflammatoire, différents stimuli sont libérés induisant une migration rapide et massive des PN du sang circulant en direction du foyer inflammatoire où ces cellules vont exercer leur rôle puis mourir soit par nécrose soit par apoptose.

3. Granulations des PN

Une des particularités du PN est d’être une cellule com-partimentée. Nombre des molécules intervenant dans ses fonctions sont synthétisées et stockées dans les granula-tions apparaissant au cours de la granulopoïèse [7]. Cet empaquetage se fait au fur et à mesure de la synthèse des molécules au cours de la granulopoïèse. Différentes études ont mis en évidence la complexité transcription-nelle qui dirige la différenciation des PN ainsi que le profil d’expression génétique des protéines granulaires. Les granulations sont définies par leur contenu en protéines et par le moment précis de la granulopoïèse où ces protéines sont synthétisées [9, 10]. On distingue schématiquement les granulations azurophiles ou primaires, qui apparaissent au stade promyélocytaire, les granulations spécifiques (secondaires) qui définissent le type du polynucléaire, ici le neutrophile, qui apparaissent à partir du stade de myélocyte, les granulations contenant de la gélatinase (tertiaires) qui apparaissent à partir du stade métamyélo-cyte et les vésicules sécrétoires qui apparaissent les plus tardivement. Cette classification est bien sûr à moduler par une certaine hétérogénéité des granulations qui peuvent être sous-divisées selon la présence ou l’absence d’autres protéines. Le contenu des granulations est résumé de façon non exhaustive dans le tableau I. Dans ce système, des molécules sont donc stockées dans des compartiments séparés dans le PN au repos (granulations, membranes, cytosol). Sous l’effet d’un stimulus dégranulant, une décom-partimentalisation permet de déclencher rapidement des fonctions effectrices. La facilité à dégranuler varie selon la densité de certaines protéines de fusion à la surface des granulations. Ainsi la mobilisation des granulations concernera dans un ordre décroissant d’abord les vésicules sécrétoires, les granulations gélatinases, puis les granu-lations spécifiques et enfin les granulations azurophiles.La mobilisation des granulations contenant des molécules ancrées dans leur membrane induit une fusion entre cette membrane et la membrane plasmique augmentant ainsi leur expression à ce niveau. Ces phénomènes sont bien décrits pour le récepteur des N-formyl peptides, dont le pro-totype est le formyl-méthionyl-leucyl-phényalanine (fMLF) et pour la β2-intégrine CD11b/CD18 intervenant dans la plupart des étapes fonctionnelles du PN. La dégranulation permet aussi le transfert du cytochrome b558 sous-unité catalytique de la NADPH oxydase, du pool granulaire vers la membrane plasmique ou phagosomale. De plus, cette dégranulation permet une libération dans le phagosome et dans le milieu extracellulaire de molécules liées à la

immunitaires à migrer du sang vers un foyer infectieux ou inflammatoire. Les activités microbicides et cytotoxiques des PN dépendent de différents mécanismes qui sont d’ailleurs intriqués : libération d’enzymes protéolytiques et production rapide et massive de formes réactives de l’oxygène (FRO), c’est ce que l’on appelle l’explosion oxydative des PN. Alors que les fonctions des PN ont longtemps été restreintes à leur rôle de cellules phago-cytaires « tueuses », il est maintenant bien reconnu qu’ils jouent un rôle beaucoup plus complexe, participant à l’engagement et à la régulation des réponses immunitaires innées et adaptatives ainsi qu’à l’homéostasie tissulaire. Les fonctions des PN illustrent l’intégration complexe des différents partenaires de l‘immunité innée et adaptative dans la défense contre les agents pathogènes. Les PN activés par l’agent pathogène sont donc le plus souvent bénéfiques à l’organisme en participant à l’élimination de cet agent reconnu comme étranger au soi. Ceci est illustré par la survenue d’infections graves et/ou répétées dans certains déficits primitifs touchant différentes fonctions du PN. Cependant les PN sont également des armes à double tranchant, car une activation excessive, prolongée ou encore dans un lieu inapproprié peut conduire à des lésions tissulaires sévères impliquées dans la physiopa-thologie de différentes maladies inflammatoires aiguës ou chroniques [1-6].

2. Origine et devenir

Les PN sont produits dans la moelle osseuse à partir des cellules souches hématopoïétiques pluripotentes qui se transforment en précurseurs myéloïdes. Ces précurseurs myéloïdes, se différencient en différents types cellulaires dont les polynucléaires neutrophiles, sous l’influence de différents facteurs de croissance comme le GM-CSF (gra-nulocyte monocyte colony stimulating factor) et le G-CSF (granulocyte colony stimulating factor). À partir du myélo-blaste, une phase de prolifération conduisant à l’apparition de promyélocytes, de myélocytes et de métamyélocytes est suivie d’une phase de différenciation des métamyélocytes en polynucléaires immatures puis matures caractérisés par leur noyau polylobé. Au cours de la granulopoïèse apparaissent successivement les granulations qui seront décrites ci-dessous [7, 8]. La granulopoïèse des neutro-philes représente 50-70 % de l’hématopoïèse médullaire. La moelle produit environ 50 milliards de PN par jour chez un adulte dans des circonstances normales. À l’état sta-tionnaire la durée de la granulopoïèse est d’une dizaine de jours mais elle peut diminuer si nécessaire. Dans dif-férentes situations pathologiques, notamment en cas de pathologies infectieuses, un compartiment de réserve médullaire est rapidement mobilisable et la production peut augmenter sous l’influence de diverses cytokines. Après sa maturation médullaire, le PN quitte la moelle osseuse et passe dans la circulation sanguine. Chez l’adulte sain, le nombre des PN circulants est de 1 800 à 7 000 par μL. Un nombre de PN inférieur à 500/μL expose le sujet à un risque infectieux grave. La demi-vie des PN dans le sang est brève (6 à 10 heures) ; ils sont distribués en 2 pools en équilibre dynamique un pool circulant et un pool marginé adhérant à la microcirculation de nombreux organes. Ils migrent ensuite dans les tissus au niveau des capillaires

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matrice des granulations et jouant un rôle dans les fonctions mêmes du PN : molécules bactéricides, myéloperoxydase (MPO), enzymes protéolytiques, médiateurs de l’inflam-mation, cytokines pro et anti-inflammatoires intervenant dans la régulation des réponses immunitaires de l’hôte et dans les réparations tissulaires [3]. Une interaction entre différentes molécules provenant de différentes granulations déversées dans le phagosome peut donner naissance à des molécules actives à partir de précurseurs inactifs comme la « human cathelicidin antimicrobial protein » (hCAP)-18 (pour 18 kDa) stockée dans les granulations spécifiques et clivée par l’élastase stockée dans les gra-nulations azurophiles en LL37 (la partie C-ter de 37 acides aminés), peptide antimicrobien actif contre les bactéries Gram négatif et Gram positif.

4. Migration tissulaire

Les PN sont les premières cellules à migrer du sang circulant vers un foyer inflammatoire. Les PN sont physiologiquement au repos dans le sang ; mais sous l’influence de différents stimuli provenant du foyer inflammatoire, les PN adhèrent aux cellules endothéliales des capillaires ou des veinules post-capillaires, se glissent entre celles-ci (diapédèse), rampent entre les cellules endothéliales et les cellules musculaires lisses (péricytes), traversent la membrane basale pour se diriger de façon orientée vers leur cible au niveau tissulaire [11-13].

Cette migration transendothéliale est extrêmement bien orchestrée par les médiateurs de l’inflammation et sous la dépendance de molécules d’adhérence exprimées d’une part par les PN, d’autre part par les cellules endothéliales. La première étape de cette migration fait intervenir une adhérence aux cellules endothéliales, réversible, de faible affinité, par l’intermédiaire de molécules d’adhérence de la famille des sélectines (L-sélectine à la surface des PN, E et P-sélectine à la surface des cellules endothéliales activées par des médiateurs provenant du foyer inflammatoire). Les sélectines interagissent avec les groupements sialyl-Lewisx présents sur de nombreuses molécules à la surface des deux partenaires cellulaires et avec des glycoprotéines jouant le rôle de contre-récepteurs tel « P-selectin glycoprotein ligand-1 » (PSGL-1) présents sur de nombreuses sous-populations de leucocytes. Sous l’influence du flux san-guin, les forces de cisaillement induisent un roulement des PN à la surface de l’endothélium activé et les ralentissent au contact de l’endothélium. Les cellules endothéliales activées produisent dans un second temps des média-teurs notamment des facteurs chimioattractants activant les PN. Cette activation induit la perte des L-sélectines par coupure protéolytique due à l’activation d’une métal-loprotéase. Les médiateurs agissant par l’intermédiaire de récepteurs couplés aux protéines G comme certains chimioattractants induisent l’ouverture des β2-intégrines dans leur forme activée et l’augmentation de leur expression membranaire, par dégranulation. Les β2-intégrines activées

Tableau I – Liste non exhaustive du contenu des granulations

(protéines ancrées dans les membranes et liées à la matrice des granulations).

Protéines ancrées dans la membrane

Granulations azurophiles Granulations spécifiquesGranulations

gélatinaseVésicules sécrétoires

V-type H ATPaseCD63,CD68

CD11b/CD18Cytochrome b558fMLF-RCD66, CD67, CD15TNF-R, IL-10-R,urokinase-type plasminogen-activator-R (uPAR)Fibronectine-RLaminine-RThrombospondine-RVitronectine-RSNAP-23, VAMP-2, StomatineG-protéine-α-sous-unitéSCAMPRap1, Rap2

CD11b/CD18Cytochrome b558fMLF-RCD67TNF-R,MMP25SNAP-23, VAMP-2,Nramp1

CD11b/CD18Cytochrome b558fMLF-RCD67CD35MMP25SNAP-23, VAMP-2CD10, CD13, CD16C1q-RPhosphatase alcaline

Protéines liées à la matrice

LysozymeÉlastaseCathepsine GProtéinase 3α-défensinesBPISialidaseAzurocidine β-glucuronidaseMyéloperoxysase

LysozymeCollagénase, gélatinaseuPA, cystatin Cc, cystatin FchCAP18, NGALB12-binding protein Lactoferrine Haptoglobine Pentraxin 3, prodefensineOrosomucoïdeHéparanase β2-microglobulineCRISP3

LysozymeGélatinaseArginase 1β2-microglobuline,CRISP3

Tétranectine

Cf texte d’après Borregaard N. Blood 1997 ;89(10):3503-21. SNAP-23 : synaptosomal-associated protein, 23kDa.VAMP2 : vesicle-associated membrane protein 2.SCAMP : secretory carrier membrane protein 3.CRISP3 : cysteine-rich secretory protein.

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se lient aux molécules d’adhérence ICAM (intercellular adhesion molecules) exprimées à la surface des cellules endothéliales (figure 1). Cette modulation de l’expression des molécules d’adhérence à la surface des PN produit une adhérence ferme (de forte affinité et non réversible) qui arrête le roulement et consolide l’ancrage du PN à l’endo-thélium inflammatoire grâce au réarrangement du cytosque-lette autour de la partie intracytosolique des β2-intégrines. Le résultat final de ces événements est l’ouverture des jonctions interendothéliales. Une migration par transcytose à travers les cellules endothéliales est maintenant égale-ment acceptée [13]. Des résultats récents montrent que les PN rampent entre cellules endothéliales et péricytes de façon dépendante des β2-intégrines et d’ICAM-1 avant de passer à travers des brèches entre les péricytes, brèches qui s’élargissent sous l’influence de médiateurs de l’inflam-mation [11]. Une dégradation de la membrane basale par les métalloprotéases libérées à partir des granulations les plus facilement mobilisables facilite la migration vers le site inflammatoire [7]. La migration orientée (chimiotac-tisme) vers le site inflammatoire se fait sous l’influence de gradients de substances chimioattractantes provenant de la cible ou dont la production est induite par la cible. Les principales substances chimioattractantes sont : les N-for-myl-peptides dérivés des protéines bactériennes tel le fMLF, le C5a, le leucotriène B4 (LTB4), le platelet activating factor (PAF) et les chimiokines dont le prototype est l’interleu-kine-8 (IL-8) pour le PN humain. Les facteurs chimioat-tractants se lient à des récepteurs à 7 domaines trans-membranaires couplés à une protéine G hétérotrimérique.

Les mécanismes du mouvement sont complexes, faisant intervenir les mouvements de calcium intracellulaire et de nombreuses voies de transduction aboutissant au déclen-chement de la polymérisation/dépolymérisation des filaments d’actine et à la polarisation du PN [14] : le PN se déforme, prenant une forme triangulaire en lançant en avant des pseudopodes et plaçant son noyau à l’arrière de la cellule ; il se déplace dans le sens du gradient de la substance chimioattractante. Une adhérence aux matrices extracellu-laires correctement régulée est nécessaire au mouvement.Comme décrit ci-dessus, les étapes d’adhérence à l’endo-thélium et aux matrices extracellulaires sont nécessaires à une migration des PN du sang vers le site infectieux où se situe l’agent pathogène. Un déficit quantitatif ou fonction-nel de molécules critiques dans le bon déroulement de ces étapes telles les β2-intégrines exprimées par les PN, les groupements glycosylés sialyl Lewisx exprimés à la surface des PN et des cellules endothéliales sera responsable d’un déficit de défense de l’hôte contre l’agent pathogène [15] défini comme « leukocyte adhesion deficiency » ou LAD de type I et III concernant l’expression et l’activation des β2-intégrines et LAD II dû à un défaut d’expression des sucres fucosylés tel le sialyl Lewisx. Les explorations conduisant à la découverte de ces déficits font appel à la mesure de la migration orientée des PN (chimiotactisme). Différentes méthodes existent dont la méthode de migration sous aga-rose consistant à placer les PN dans un puits central. Deux puits opposés contiennent l’un le chimioattractant, l’autre un tampon contrôle. La mesure du déplacement du front de migration vers le chimioattractant est comparée à celle

Figure 1 – Migration transendothéliale du PN.

Différents médiateurs produits au niveau du site inflammatoire induisent une modulation de l’expression des protéines d’adhérence à la surface du PN et des cellules endothéliales aboutissant dans un premier temps à une adhérence de faible affinité et au roulement des PN à la surface de l’endothélium puis dans un deuxième temps à une adhérence de forte affinité avec arrêt du PN et passage transendothélial de façon orientée vers le site inflammatoire.

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de la migration spontanée. Cette technique est simple et reproductible. La migration des PN entre 2 compartiments séparés par un filtre et contenant, l’un les PN, l’autre le chimioattractant est également très utilisée (chambre de Boyden ou transwell). L’étude de l’adhérence à différentes surfaces et notamment à des cellules endothéliales peut également être réalisée. Les molécules déficitaires seront définitivement identifiées par cytométrie en flux grâce à des anticorps spécifiques marqués par des fluorochromes [16].

5. Reconnaissance

et phagocytose

Arrivés au contact de l’agent pathogène, les PN recon-naissent leur cible grâce aux pattern recognition receptors (PRR), qui vont se lier sur des motifs moléculaires conser-vés au cours de l’évolution des microorganismes : les pathogen-associated molecular patterns (PAMPs) ou des molécules exprimées par des cellules « en danger » (DAMPs damage associated molecular patterns) [17]. L’activation des PRR engage de nombreuses voies de signalisation impliquées dans les fonctions effectrices des PN. Les PRR incluent les toll like receptors (TLRs), les nucleotide-binding oligomerization domain proteins (NODs), les récepteurs des lectines comme les dectines et les récepteurs des ADN et ARN intracellulaires. Ces récepteurs détectent de nombreux motifs microbiens, dérivés de bactéries ou de virus [17, 18]. À présent, 10 membres de la famille TLR ont été identifiés chez l’homme. Le PN exprime tous les TLRs, excepté le TLR3 [19] et leur engagement active de multiples mécanismes aboutissant à : 1) l’amplification de la réponse inflammatoire, 2) la stimulation de la bactéri-cidie et 3) la régulation de la migration et de l’apoptose [18]. Chaque TLR reconnaît plus spécifiquement certains motifs microbiens ou dérivés de protéines endogènes altérées. Les TLR engagent des voies de signalisation impliquées dans les fonctions effectrices des PN [20, 21].Des déficits dans les voies de signalisation des TLR ont été décrits en 2003 [22] et 2008 [23] respectivement, pour les molécules « interleukin-1 receptor-associated kinase 4 » (IRAK-4) « myeloid differentiation primary response 88 » (MyD88). Ils sont responsables d’une prédisposition aux infections à pyogènes principalement Streptococcus pneu-moniae et à un moindre degré Staphylococcus aureus mais sans infections fongiques. Ils sont dépistés par l’étude des réponses (production de FRO ou de cytokines) aux ago-nistes des TLR en comparaison à des agonistes empruntant des voies plus en aval (par ex LPS vs TNFα) L’adhérence entre le PN et sa cible est facilitée par les opsonines, par-ticulièrement les immunoglobulines d’isotype IgG1 et IgG3 (figure 1) et les protéines du complément dérivées du C3. Les immunoglobulines se fixent de façon spécifique par l’intermédiaire de leur site anticorps sur les épitopes de l’agent pathogène et par l’intermédiaire de leur fragment cristallisable (Fc) sur les récepteurs Fcγ des PN (voir article de RC. Monteiro et al. dans ce numéro). Le PN exprime constitutivement deux récepteurs Fcγ de faible affinité le CD32a (Fcγ RIIa) et le CD16b (FcRγ IIIb), tandis que le récepteur de haute affinité le CD64 (Fcγ RI) est inductible par l’interféron-γ (IFNγ) ou le G-CSF. Différentes réponses du

PN sont induites par l’engagement du CD32a : mobilisation de calcium intracellulaire, phosphorylation de protéines, production d’anions superoxyde, polymérisation de l’actine [24]. La stimulation par l’IFNγ ou le G-CSF induit une forte expression de CD64 [25]. Lors d’infections bactériennes, son expression est deux fois plus élevée que lors d’une infection virale. L’opsonisation par les immunoglobulines est particulièrement importante dans la défense contre les bactéries encapsulées.Les protéines qui proviennent de l’activation du complé-ment par différentes voies, notamment le C3b et le C3bi, se déposent à la surface de l’agent pathogène et se lient aux récepteurs CR1 (CD35), CR3 (CD11b/CD18) et CR4 (CD11c/CD18) du PN. Ces récepteurs sont exprimés à la surface des PN après dégranulation des vésicules sécré-toires (CR1 et CR3) et des granulations gélatinases/spé-cifiques (CR3).La reconnaissance et l’adhérence à la cible sont le plus souvent suivies d’une phagocytose de la particule lorsque sa taille le permet et que les signaux transductionnels engagent ce mécanisme. L’ingestion du pathogène se fait grâce à la formation du phagosome (vacuole qui contient la particule ingérée) [26], qui débute par l’invagination de la membrane plasmique en contact étroit avec la particule à phagocyter, et se termine par la projection de celle-ci en pseudopodes qui englobent complètement la particule (figure 1). Une fois formé, le phagosome rentre dans une phase de maturation qui conduit à la formation du pha-golysosome après la fusion avec les diverses granula-tions décrites ci-dessus. Tous ces événements permettent une destruction optimale de l’agent pathogène dans un espace protégé, la vacuole de phagocytose [27]. L’étude de la phagocytose peut se faire microscopiquement en comptant le nombre de particules ou de bactéries plus ou moins opsonisées qui sont internalisées dans le PN. Des techniques par cytométrie en flux à l’aide de sondes fluorogènes sensibles au pH intraphagolysosomale per-mettent de faire la différence entre bactéries réellement phagocytées et celles liées à la membrane cellulaire [16].

6. Mécanismes tueurs

L’englobement du micro-organisme en conjonction avec l’interaction au niveau membranaire de différentes molécules (N-formyl peptides dérivés des protéines bactériennes, endotoxines ou encore produits d’origine cellulaire tels que les cytokines) vont engager les PN dans leurs fonctions effectrices dont la destruction de l’agent pathogène est un évènement critique dans la défense de l’hôte. Deux grands types de mécanismes interviennent de façon coopérative : d’une part des mécanismes de dégranulation indépendants de l’oxygène conduisant au déversement de substances bactéricides dans le phagosome et d’autre part la produc-tion de FRO par activation d’un système enzymatique, la NADPH oxydase. Ces événements sont intriqués comme le montrent les exemples suivants : le déversement de la MPO à partir des granulations azurophiles dans le phago-some intervient dans la transformation des FRO, la fusion des sous-unités du cytochrome b558 ancrées dans les membranes des granulations spécifiques avec celle du phagosome permet l’assemblage de la NADPH oxydase

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à ce niveau. Malgré la coopération de ces mécanismes, ils seront exposés séparément dans un but didactique.

6.1. Système bactéricide indépendant de l’oxygèneLes mécanismes de dégranulation interviennent : en induisant, comme décrit ci-dessus, une augmenta-

tion de l’expression de certaines protéines à la surface du PN ou leur recyclage, permettant l’amplification des mécanismes de réception des signaux de stimulation ;

1) des enzymes : lysozyme, hydrolases acides, glycosidases, protéases, etc. (tableau I) contribuant à la dégradation des microorganismes. Le fonctionnement des hydrolases acides est favorisé par une diminution transitoire du pH après fusion de granulations contenant une pompe à protons avec la membrane du phagosome ; 2) les protéines cationiques à activité microbicide [28] : les α-défensines « human neutrophil peptide » (HNP) 1-4 sont des petits peptides cycliques actifs contre les bactéries Gram négatif, Gram positif, des champi-gnons et même des virus. Les défensines des PN humains induisent la formation de canaux dans les membranes des micro-organismes perturbant leur perméabilité membranaire [29]. Les défensines sont probablement un facteur primitif de défense retrouvé très tôt au cours de l’évolution animale. Les BPI (bactericidal permeability increasing protein) [30] ont une homologie avec les protéines décrites sous le nom de LBP (lipopolysaccharide (LPS) - binding proteins) et sont très efficaces dans la défense contre les bactéries Gram négatif en altérant les propriétés des membranes bactériennes. Les serprocidines (sérines-protéases à activité microbicide) comme l’élastase, la protéinase 3, la cathepsine G participent également à la microbicidie intraphagosomale ; 3) d’autres protéines à activité antimicrobiennes stockées dans les gra-nulations spécifiques/gélatinases comme la lactoferrine, la NGAL (neutrophil gelatinase-associated lipocalin), la cathe-licidine hCAP18 clivée par l’élastase en LL37 active contre les bactéries Gram négatif et Gram positif jouent un rôle important et illustrent également une coopération entre le contenu des différents types de granulations [7, 8].

6.2. Système NADPH-oxydase producteur des formes réactives de l’oxygèneSous l’influence de divers stimuli, les PN produisent très rapidement des formes toxiques de l’oxygène altérant la structure des protéines, des lipides et des acides nucléiques [31]. Cette production rapide et massive est appelée « explo-sion oxydative ». Comme décrit précédemment, ce sys-tème bactéricide agit en conjonction avec les substances à activité anti-microbienne et les protéases délivrées dans le phagosome.

6.2.1. Formes réactives de l’oxygène produites par les PNCertains stimuli déclenchent une consommation d’oxygène et une production brutale de formes réactives de l’oxy-gène par les PN. Ce phénomène a été défini sous le terme d’« explosion oxydative ». Cette voie métabolique est indé-pendante de la chaîne respiratoire mitochondriale. L’oxygène consommé par les PN est converti enzymatiquement en anion superoxyde (O2

.-) par le transfert univalent de 2 électrons

à partir du NADPH cellulaire provenant de la voie des hexoses monophosphates [1]. Cette réaction est catalysée par la NADPH oxydase. L’O2

.- est la source des autres FRO : le peroxyde d’hydrogène (H2O2), le radical hydroxyl OH

. hau-

tement toxique [31]. Par ailleurs, la myéloperoxydase libérée à partir des granules azurophiles dans la vacuole catalyse la transformation de H2O2 en présence d’un halogène tel Cl¯ en acide hypochloreux (HOCl), composé voisin de l’eau de javel, hautement bactéricide. D’autres réactions entre ces différentes FRO et leur environnement donnent naissance à d’autres composés toxiques (singulet d’oxygène, chlora-mines…). Les lésions biochimiques créées par les FRO sont multiples, induisant des peroxydations lipidiques aboutissant à une désorganisation membranaire, une atteinte protéique avec fragmentation, agrégation, oxydation des groupements sulfhydryles, une atteinte des acides nucléiques avec cassure et mutation de l’ADN. La production des FRO se fait sur la face interne de la membrane du phagosome au contact de l’agent pathogène phagocyté atteignant de hautes concentrations dans ce milieu clos qu’est le phagosome. Les FRO jouent un rôle majeur dans la microbicidie comme le démontre la survenue d’infections potentiellement létales chez des sujets atteints de granulomatose septique chronique « chronic gra-lulomatous disease » (CGD). Les phagocytes de ces patients ne produisent pas de FRO en raison d’un déficit dans l’un des composants de la NADPH oxydase.Les FRO produites par la face externe de la membrane plas-mique sont physiologiquement peu concentrées dans le milieu extracellulaire. Cependant, produites de façon excessive ou inappropriée dans le milieu extracellulaire elles peuvent par-ticiper à la survenue de lésions tissulaires au niveau du site inflammatoire [1, 2, 5]. La mesure de la production de FRO par les PN se fait par différentes techniques telles la réduction du cytochrome c inhibable par la superoxyde dismutase (SOD) qui est le test de référence de la production extracellulaire de l’anion superoxyde, la réduction du nitrobleu de tétrazolium (NBT) qui précipite en bleu de formazan à l’intérieur de la cellule, l’émission de lumière par des sondes pénétrant ou non dans la cellule et oxydées par les FRO, l’oxydation de sondes fluorogènes intracellulaires dont l’émission de fluo-rescence sera mesurée par cytométrie en flux [16].

6.2.2. Structure du système NADPH oxydaseLe système enzymatique constituant la NADPH oxydase est un système multimoléculaire complexe formé de diffé-rents composants protéiques dispersés entre le cytosol et les membranes dans le PN à l’état de repos [32-34], cette séparation spatiale assurant l’innocuité du système. Chaque composant de l’oxydase porte la désignation « phox » pour « phagocyte oxydase ». Les composants membra-naires sont le cytochrome b558 et une petite protéine G de la famille Ras : Rap1A. Les composants cytosoliques (dans les cellules au repos) sont les protéines p47phox, p67phox et p40phox associées dans le cytosol des PN au repos sous forme d’un complexe et une petite protéine G de type Rac2 (ras-related C3 botulinum toxin substrate 2) dans le PN humain (Rac1 dans le monocyte). Le cytochrome b558 est composé de la sous-unité p22phox et de la sous-unité fortement glycosylée, la gp91phox assemblées de façon non covalente au niveau membranaire (figure 2).

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Figure 2 – NADPH oxydase phagocytaire (NOX2).

Dans le PN au repos, la NADPH oxydase est inactive avec dispersion de ses sous-unités entre les membranes (gp91phox, p22phox formant le cytochrome b558) et le cytosol (p47phox, p67phox, p40phox sous forme de complexe et une petite protéine G rac2). Une stimulation appropriée induit une phosphorylation des sous-unités cytosoliques qui changent de conformation, la séparation de Rac de son inhibiteur Rho-GDI et la translocation de ces composants vers la membrane où ils se lient au cytochrome b558. C’est le regroupement de l’ensemble des sous-unités qui produit une enzyme active permettant le transfert des électrons du NADPH vers l’oxygène moléculaire pour donner naissance à l’anion superoxyde.

Figure 3 – Sous-unités cytosoliques de la NADPH oxydase phagocytaire (NOX2).

Représentation schématique des différents domaines responsables des interactions des sous-unités cytosoliques entre elles et avec les composants membranaires. Domaine PX (phox homology domain) interagit avec les phospho-inositides membranaires ; domaine SH3 (Src-homology 3 domain) interagit avec les régions riches en proline (PRR). L’autoinhibitory domain (AIR) maintient la p47phox repliée sur elle-même à l’état de repos. TPR1-4 : régions riches en tétratricopeptides interagissant avec Rac. AD : domaine activateur régulant l’activité du cytochrome b558. PB1 (Phox and Bem domain1) présent sur p67phox et p40phox interagissent entre eux.

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Il s’agit d’une flavohémoprotéine à potentiel d’oxydoré-duction extrêmement bas, ce qui lui permet de réduire directement l’oxygène de l’air. La p22phox est essentielle à la maturation et à l’expression stable de la gp91phox. La gp91phox contient des sites de liaison au NADPH, au « flavin adenine dinucleotide » (FAD) et deux hèmes res-ponsables du transfert des électrons. C’est la sous-unité catalytique de la NADPH oxydase. La gp91phox appar-tient à une famille de protéines présentes dans différentes cellules autres que les phagocytes et appelées NOX pour NADPH oxydases [35]. Dans ce cadre, la gp91phox a été renommée NOX2. Dans les PN au repos, le cytochrome b558 est présent, majoritairement dans les membranes des granulations spécifiques, gélatinases et vésicules sécrétoires, une faible quantité étant retrouvée dans la membrane cytoplasmique. Lors d’une stimulation des PN, la plus grande partie du cytochrome b558 associée à la petite protéine G Rap1A est transférée dans la mem-brane cytoplasmique et intervient dans l’organisation du complexe oxydasique actif par interaction avec les fac-teurs cytosoliques, en particulier avec la p47phox et par association avec le cytosquelette [36]. Le flavocytochrome b558 contient donc le site catalytique de la NADPH oxy-dase et le site de l’arrimage des autres composants de l’oxydase. Il semble que son interaction avec la p47phox et la p67phox induise un changement dans sa conforma-tion qui permettrait la liaison du NADPH et l’initiation du flux d’électrons. Après activation, les molécules p47phox, p67phox et p40phox sont phosphorylées et transloquent vers la membrane de façon indépendante de Rac2. La p47phox est la protéine pivot de l’assemblage des autres composants de la NADPH-oxydase. Elle comprend diffé-rents domaines protéiques : un domaine PX (« phox homo-logy domain » du côté N terminale, deux domaines SH3 (Src-homology 3 domain), un domaine auto-inhibiteur (AIR) et du côté C-terminale un domaine riche en proline. Sa région COOH-terminale est très basique et riche en sérine et arginine (figure 3). La phosphorylation de la p47phox joue un rôle central dans la formation d’un complexe oxy-dasique actif. Dans le PN au repos la protéine est repliée sous forme inactive, le domaine AIR masquant les deux domaines SH3 et le domaine PX. Après phosphorylation, une modification conformationnelle permet le dépliement de la p47phox et de nouvelles interactions entre les deux domaines SH3 et le domaine riche en prolines des autres constituants, en particulier celui de la p22phox, ce qui déclenche l’assemblage de l’enzyme. La phosphoryla-tion de la p47phox joue donc un rôle majeur dans l’orga-nisation de l’oxydase [37]. La p67phox est nécessaire au transfert d’électrons. Elle possède un site de liaison pour le NADPH, 4 régions riches en tétratricopeptides, un domaine activateur qui régule l’activité catalytique du cytochrome b558, un domaine PB1 (phox and bem domain1), deux domaines SH3 et une séquence riche en proline. La p67phox s’associe fortement au cytosquelette et forme un complexe avec la p47phox par l’intermédiaire de son domaine SH3-terminal.La p40phox possède également un domaine PB1 permettant une interaction homotypique avec le domaine PB1 de la p67phox. Par ailleurs, le domaine PX peut à son tour inte-ragir avec les phosphoinositides (PI3,4P2) membranaires.

Les différents motifs structuraux (notamment SH3 et domaines riches en prolines) présents dans chacun des composants cytosoliques p47phox, p67phox et p40phox régulent leurs interactions entre elles et avec le cytochrome b558 [34].La NADPH oxydase active est formée, après stimulation du PN dans des conditions diverses, par le regroupe-ment au niveau membranaire et sous-membranaire des divers composants de l’oxydase [32-34]. C’est ce regroupement qui déclenche le transfert d’électrons à partir du NADPH sur la flavine puis sur les groupements héminiques du cytochrome b et enfin sur l’oxygène moléculaire donnant naissance à l’anion superoxyde à l’origine des autres FRO. La production de FRO par la NADPH oxydase activée est nécessaire à la défense de l’organisme contre un certain nombre d’agents patho-gènes : bactéries Gram positives et Gram négatives, champignons, mycobactéries comme le démontrent les infections à répétition dont souffrent les patients atteints de CGD. Cependant, une production excessive ou dans un lieu inapproprié de FRO par la NADPH oxydase par-ticipe à la physiopathologie de maladies inflammatoires aiguës ou chroniques telles le syndrome de détresse respiratoire de l’adulte, la polyarthrite rhumatoïde, le syndrome d’ischémie reperfusion…

6.2.3. Activation et régulation du système NADPH oxydaseAu cours de la migration du PN vers un site infectieux ou inflammatoire, la NADPH oxydase passe par différents états : inactif, « primé », activé ou désactivé. Comme décrit ci-dessus la NADPH oxydase est inactive dans le PN au repos dans le sang circulant. Différents événements comme des interactions avec des cytokines pro-inflam-matoires (par exemple ; le tumor necrosis factorα(TNFα), le GM-CSF ou l’IL-8) ou encore le LPS, l’adhérence à l’endothélium exerçent un effet de « priming » (préactiva-tion) sur la NADPH oxydase : ces conditions de préacti-vation n’induisent pas par elles-mêmes la production de FRO mais augmente fortement la réponse oxydative à un deuxième agoniste ajouté ultérieurement, par exemple un chimioattractant comme les peptides N-formylés, le C5a, le LTB4, le PAF…. Ces phénomènes de « pri-ming » par les médiateurs de l’inflammation notamment certaines cytokines pro-inflammatoires jouent un rôle important dans la régulation de l’activation de la NADPH oxydase [38, 39] aussi bien sur le plan physiologique dans la défense antimicrobienne que dans différentes situations pathologiques impliquant une hyperactivation de la NADPH oxydase.L’activation complète de la NADPH oxydase aboutissant à la production de FRO en réponse à un seul stimulus peut être induite par un grand nombre de facteurs par-ticulaires (bactéries, levures plus ou moins opsonisées, etc.) et solubles (peptides N-formylés, fragment C5a du complément, LTB4, PAF, ionophores calciques, activa-teurs de PKC [protéine kinase C]). Les effets de certains médiateurs de l’inflammation notamment les peptides N-formylés chimioattractants, fragment C5a du com-plément, LTB4, PAF dépendent de leurs concentrations : ils induiront un « priming » à faible concentration et une

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activation complète à forte concentration. Ce phénomène de priming est dû à différents mécanismes dont tous ne sont pas encore élucidés : une augmentation de l’expres-sion du récepteur aux N-formyl peptides à la surface cellulaire a été invoquée ; notre équipe a montré que le GM-CSF ainsi que le TNF induisaient une phosphoryla-tion partielle de la p47phox sur la serine 345 présente au sein d’une séquence consensus de reconnaissance pour les « mitogen-activated protein kinases » (MAPKs) de type -PXSP- [38]. Les résultats montrent que diffé-rentes MAPKs convergent pour phosphoryler la Ser345 de la p47phox, permettant ainsi une potentialisation de la production des FRO par les PN. Cependant le méca-nisme induisant cette potentialisation n’était pas connu. Nous avons récemment montré qu’une proline isomérase (Pin1) se fixant sur la sérine 345 phosphorylée lors du priming par le TNFα induisait un changement de confor-mation de la p47phox facilitant sa phosphorylation par d’autres kinases notamment les PKC. Une accessibilité plus facile de ces kinases, complétant la phosphorylation de la p47phox, permettrait une translocation plus rapide à la membrane des protéines cytosoliques et une acti-vation optimale de la NADPH oxydase [40]. Cette sérine 345 peut être considérée comme un « site du priming ».À l’inverse, une désactivation du système est nécessaire à la résolution du phénomène inflammatoire. Le prétrai-tement des PN avec une substance pharmacologique peut diminuer la réponse oxydative à un agoniste ajouté ultérieurement [41]. Par ailleurs, certaines cytokines dites anti-inflammatoires, telle l’IL-10, exercent un effet négatif sur la régulation de la NADPH oxydase et participent à ces phénomènes de désensibilisation du PN [42]. Des médiateurs lipidiques participent à l’inactivation du PN au cours de la résolution de l’inflammation comme nous le décrirons plus loin. Afin d’exercer son activité anti-infec-tieuse tout en évitant la survenue de lésions tissulaires secondaires à une stimulation excessive, le PN doit être soumis à une régulation fine et précise à chacune de ses étapes fonctionnelles.

6.3. Microbicidie médiée par des filets extracellulaires émis par les PN : neutrophil extracellular traps (NETs)Récemment a été décrit un phénomène original de bacté-ricidie ou bactériostasie dépendant de l’émission de filets extracellulaires (neutrophil extracellular traps ou NETs) par les PN après désintégration de toutes ses structures membranaires et mort de la cellule. Ce phénomène est déclenché par l’activation des PN par des facteurs solubles tels les endotoxines bactériennes, certaines cytokines et ne nécessitent pas l’englobement des bactéries dans la vacuole de phagocytose. Ce phénomène dépend de la production de FRO par la NADPH oxydase puisque ces filets n’apparaissent pas lors de l’inhibition de la NADPH oxydase ou chez les patients atteints de CGD déficitaires dans la production de FRO ; de plus ils sont induits par l’H2O2. Ces filets sont des filaments de chromatine dépliée formés d’ADN et d’histones et recouverts de nombreuses molécules à activité antimicrobienne issues des granula-tions des PN (élastase, cathepsine G, lactoferrine, MPO, gélatinase par exemple) [43]. Ces filets immobilisent les

bactéries Gram positives et Gram négatives comme Staphylococcus aureus, Salmonella typhimurium mais aussi des champignons comme Candida albicans et maintiennent à leur contact une concentration élevée de protéines à activité antimicrobienne empêchant leur dissémination et favorisant leur destruction [44]. Les événements moléculaires reliant la production de FRO à la formation de NETs sont mal connus à ce jour [45]. La formation de NETs augmenterait l’efficacité microbicide du PN aussi bien spatiale que temporelle puisque le PN pourrait ainsi agir sur des microorganismes présents dans son environnement mais non englobés et poursuivre sa lutte antimicrobienne en quelque sorte post-mortem.

7. PN et régulation

du système immunitaire

On sait maintenant depuis plusieurs années que le PN n’est pas uniquement une cellule tueuse mais joue un rôle important dans l’engagement et la régulation des réponses immunitaires innées et adaptatives [3, 46]. Le PN participe de par ses sécrétions à la régulation des fonctions de nombreux partenaires du système immunitaire et de ses propres fonctions ainsi qu’au remodelage tissulaire : ainsi les FRO produites dans le milieu extracellulaire modulent la signalisation intracellulaire [47], régulant les fonctions des cellules présentes au site inflammatoire comme par exemple leur apoptose [48], les réponses prolifératives lymphocytaires [49, 50] et la production de cytokines pro-inflammatoires [51]. Par ailleurs, la libération d’en-zymes protéolytiques régule l’environnement tissulaire, la conformation de certains médiateurs les activant ou les désactivant. Par exemple, l’activation et la matura-tion de cytokines de la famille IL-1 comme la pro-IL-1β ou l’IL-33 implique leur clivage par des enzymes comme l’élastase du PN. D’autres cytokines comme l’adiponec-tine, impliquée [52] dans le métabolisme lipidique mais aussi dans certaines maladies inflammatoires, peuvent exercer des rôles pro ou anti-inflammatoires selon qu’elles sont entières ou clivées. L’élastase produite par les PN peut ainsi réguler l’activité de ces cytokines et moduler la réponse inflammatoire induite par celles-ci. Il faut insister sur le fait que les PN produisent de nombreux média-teurs de l’inflammation (PAF, LTB4, etc.) ainsi que des cytokines pro et anti-inflammatoires interagissant avec la plupart des cellules de l’immunité. Parmi les cytokines produites par le PN, l’IL-8 est majoritaire. Sa production est responsable, en conjonction avec les autres chimioat-tractants produits par le PN (LTB4, PAF) d’un phénomène important d’amplification de la migration des PN sur le lieu de l’inflammation. Par ailleurs, le PN produit selon les stimuli rencontrés des chimiokines pour différentes cellules immunitaires, en particulier monocytes, cellules dendri-tiques, natural killer, lymphocytes Th1 et Th17 régulant ainsi l’engagement des réponses immunitaires [3]. Une originalité du PN est de pouvoir libérer rapidement par exocytose des médiateurs et cytokines dès son arrivée sur le site inflammatoire et de relayer dans un deuxième temps cette production par une synthèse de novo. Même si la production de cytokines par les PN est inférieure à

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celle des monocytes, les PN sont les premières cellules infiltrant massivement le foyer inflammatoire, suggérant que leur production de cytokines peut être déterminante à ce stade précoce de la réponse immunitaire innée [3, 46]. La mesure de la production de cytokines par les PN implique une excellente purification car la moindre conta-mination par des monocytes qui produisent quantitati-vement plus de cytokines et parfois des cytokines diffé-rentes peuvent donner lieu à des interprétations erronées. Ainsi le PN humain ne produit pas d’IL-10 à l’inverse du monocyte [53].De plus, les PN interviennent dans les régulations des réponses immunitaires par une interaction directe avec les cellules immunitaires innées ou adaptatives (figure 4). Des études in vitro chez la souris et chez l’homme ont montré que ces interactions peuvent être bidirectionnelles.Concernant les effets des PN sur les cellules dendri-tiques (CD), les interactions entre PN et cellules dendri-tiques immatures grâce à leurs molécules d’adhérence (CD11b/CD18-DC-SIGN) [54] et une sécrétion de cytokines induisent la maturation des CD et modulent la présen-tation de l’antigène aux lymphocytes T CD4+. De plus, ils transmettent des dérivés de l’agent pathogène à la cellule dendritique [55]. Ces interactions peuvent avoir des effets différents selon les molécules impliquées. Par exemple, les interactions cellule/cellule médiées par des molécules d’adhérence, entrainent l’activation et la maturation des CD [54]. En revanche, les interactions

médiées par des enzymes comme l’élastase du PN vont diminuer l’activation et la capacité des CD à stimuler les lymphocytes T probablement en stimulant la produc-tion de TGFβ par les CD et en modifiant leurs capaci-tés de phagocytose et de production de cytokines [56]. Les interactions entre les peptides anti-microbiens libérés par les PN activés par les IgG, et les cellules dendritiques plasmacytoides participent à la réponse T autoréactive et au développement du diabète de type I [57].Les PN peuvent moduler la fonction des cellules NK par différents mécanismes comme la production de FRO, la libération d’enzymes (élastase, lactoferrine) ou la production de cytokines. Ces molécules vont stimuler la prolifération, la production d’IFNγ et les effets cytotoxiques des NK. Il a aussi été démontré, en particulier dans la prolifération tumorale, que la libération, par dégranulation des PN, d’autres enzymes comme l’arginase est impliquée dans la diminution de la prolifération des cellules NK et de leur production d’IFNγ, favorisant ainsi le développement de tumeurs et de métastases. De plus, l’interaction PN/NK est réciproque et peut stimuler les fonctions du PN (survie, production de FRO et de cytokines) via la produc-tion d’IFNγ et de GM-CSF par les cellules NK.Les interactions PN/LyT sont également bidirectionnelles et entraînent une augmentation du recrutement mutuel de ces deux populations vers le foyer inflammatoire. La production de certaines cytokines par les LyT augmente la survie et l’activation des PN. Réciproquement, le PN

Figure 4 – Interactions cellulaires du PN.

Au niveau du site inflammatoire, le PN peut interagir avec différentes cellules immunitaires : cellules natural killer (NK), lymphocytes T (LT), cellules dendritiques (CD) favorisant leur maturation, mais aussi avec d’autres cellules non représentées sur ce schéma (monocytes régulant par leur production de cytokines l’activité des PN). Les PN peuvent migrer dans les organes lymphoides secondaires et interagir avec les cellules dendritiques et différentes populations de lymphocytes T (LT).

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peut effectuer une cross-présentation de l’antigène aux LyT CD8, favorisant leur prolifération et leurs fonctions effectrices [58]. Après injection intradermique d’un anti-gène, le PN le transporte vers les organes lymphoïdes pour le présenter aux lymphocytes T CD8. Cette dernière observation a permis de mettre au point de nouveaux modèles de vaccination transcutanée et intradermique qui semblent plus efficaces que par voie intramusculaire [59].Une étude récente a mis évidence que certaines sous-populations de PN stimulaient la production d’immuno-globulines, par les lymphocytes B (LyBM) mémoire qui se trouvent dans la zone marginale de la rate. Après avoir phagocyté des micro-organismes dans les tissus infectés les PN migrent dans la zone marginale de la rate et rentrent en contact avec les LyBM. Cette interaction va stimuler l’hypermutation somatique et la commutation isotypique des immunoglobulines via la production de molécules co-stimulatrices des LyB par le PN (BAFF [B-cell activating factor], APRIL [a proliferation inducing ligand]) [60].

8. Résolution de l’inflammation

et apoptose des PN

Après l’élimination de l’agent pathogène, la réponse inflammatoire s’autolimite, et démarre en même temps le processus de réparation tissulaire (figure 5). Cette phase de résolution est fondamentale pour la protection

des tissus, l’établissement d’une mémoire immunitaire adéquate ainsi que pour le retour à un état d’homéostasie. Pour les PN ceci implique la diminution de leur accumu-lation dans le site inflammatoire, la suppression de leur activation, la production de protéines anti-inflammatoires, l’induction de leur apoptose et leur élimination par les macrophages [61]. Les principaux facteurs déterminant l’arrêt de la migration et de l’activation des PN au niveau du site inflammatoire sont : 1) Le changement du profil d’expression des cytokines et de leurs antagonistes (IL-1/IL-1Ra, TNF/TNF-R soluble) ainsi que de la balance entre cytokines pro- et anti-inflammatoires (IL-10, IL-4 et IL-13) sécrétées par les cellules du foyer inflammatoire (macrophages, neutrophiles et cellules endothéliales) [3]. La dégradation des facteurs chimioattractants et les phénomènes de désensibilisation des PN vis-à-vis des chimiokines jouent également un rôle important ; 2) les dérivés lipidiques comme les lipoxines, les résolvines et les protectines, considérés comme des vrais agonistes de la résolution de l’inflammation [62]. Dans ce cadre, les PN participent eux-mêmes à cette résolution réalisant un « switch » dans la synthèse des médiateurs lipidiques, une diminution de la synthèse de LTB4 s’accompa-gnant d’une augmentation de la synthèse de lipoxine A4 qui participe à l’arrêt du recrutement des PN et 3) les molécules qui régulent l’apoptose du PN. Comme déjà mentionné, les PN ont une demi-vie courte mou-rant spontanément par apoptose en quelques heures. En culture, leur demi-vie est d’environ 12-16 heures.

Figure 5 – Résolution de l’inflammation et PN.

Les PN participent eux-mêmes à la résolution de l’inflammation par la commutation de leur synthèse de médiateurs lipidiques : diminution de la synthèse de leucotriène B4 (LTB4) proinflammatoire associée à une augmentation de la synthèse des lipoxines qui freinent le recrutement des PN, favorisent le recrutement des monocytes qui maturant en macrophages phagocytent les PN apoptotiques et produisent d’autres médiateurs anti-inflammatoires favorisant la réparation tissulaire.(D’après Serhan CN, Am J Pathol 2010;177(4):1576-91).

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Cette demi-vie courte pourrait être interprétée comme un mécanisme de contrôle strict du renouvellement et du nombre de PN dans l’organisme. Une dérégulation de l’entrée en apoptose peut induire différents phéno-mènes pathologiques : une mort accélérée du PN peut participer à différentes causes de neutropénie favori-sant le risque infectieux alors qu’un retard de l’entrée en apoptose peut participer à la physiopathologie de différentes maladies inflammatoires et auto-immunes. On distingue une apoptose spontanée constitutive du PN [63] et une apoptose induite par la phagocytose [64] qui sont régulées par l’environnement notamment cytokinique. Finalement, les PN apoptotiques sont recon-nus et phagocytés par les macrophages résidents [65]. La phagocytose des PN apoptotiques fait basculer les macrophages vers un phénotype anti-inflammatoire favorisant encore la résolution de l’inflammation et la réparation tissulaire [66]. Une agression extrême des PN peut conduire à une nécrose dite primaire avec une perte rapide et irréparable de l’intégrité de la membrane plasmique conduisant à la libération dans l’environne-ment des composants toxiques du PN induisant des lésions tissulaires.

9. Rôle dans la surveillance

anti-tumorale

Récemment, le PN a été identifié comme une des cel-lules pouvant infiltrer les tumeurs et ayant un rôle dans la progression et la prolifération tumorale [67]. Ce rôle peut être anti- ou pro- tumoral en fonction des cytokines produites. Les données obtenues à partir de modèles animaux suggèrent que tout comme les macrophages, les neutrophiles sont capables d’exprimer des phénotypes différents en réponse à l’environnement cytokinique des tumeurs [68]. Le PN peut intervenir dans l’élimination des tumeurs grâce à la production des FRO et à la libération d’enzymes protéolytiques comme l’élastase et peut aussi potentialiser les réponses T anti-tumorales par inhibi-tion du TGF-β [68]. À l’opposé, la production par les PN de FRO peut être à l’origine d’instabilités génomiques favorisant l’apparition et la progression des tumeurs [69]. La production d’HOCl a été associée à l’apparition de mutations ponctuelles et à des altérations de l’ADN dans des lignées de tumeurs pulmonaires [70]. De plus, l’HOCl peut activer de nombreuses métalloprotéases (MMP-2, MMP-7, MMP-8 et MMP-9) et inactiver le « tissue inhi-bitor of metalloprotease 1 » (TIMP-1), ce qui entraîne une augmentation de l’activité de la MMP-9 et favorise le détachement des cellules tumorales et leur migration vers la circulation facilitant ainsi le développement de métastases [71]. Enfin, la production par le PN de facteurs de croissance comme le « vascular endothelial growth factor » (VEGF) peut également favoriser la progression tumorale [72].D’autre part, des enzymes contenues dans les gra-nulations peuvent aussi jouer un double rôle dans la progression tumorale. Comme noté plus haut, l’élas-tase peut participer à l’élimination des tumeurs mais sa participation dans la progression tumorale a été

évoquée dans des modèles de cancer du poumon chez la souris et chez l’homme. L’élastase est capable de stimuler la prolifération tumorale en hydrolysant l’IRS-1 (insulin receptor substrate-1) qui dans des conditions homéostatiques maintient un blocage de la voie PI3K-PDGFR (phosphatidyl inositol 3-kinase/potent mitogen platelet-derived growth factor receptor). La dégradation de l’IRS lève le blocage de cette voie et aboutit à une stimulation de la prolifération tumorale [73].

10. Rôle dans les réactions

anaphylaxiques

Des études récentes chez la souris ont suggéré l’impli-cation des PN dans les réactions allergiques, via leurs récepteurs FcγRIIA. En présence d’un allergène, ces récep-teurs sont activés par des IgG spécifiques de l’allergène ce qui entraîine la libération de médiateurs anaphylac-togéniques comme le facteur d’activation plaquettaire. La déplétion des PN, dans ce modèle, protège les souris contre le choc anaphylactique déclenché par l’injection de l’allergène [74].

11. Conclusion

Les polynucléaires neutrophiles humains sont un des pivots de l’immunité innée et constituent un puissant système de défense de l’homme contre les agents patho-gènes principalement les bactéries et les champignons qui ont franchi les barrières cutanéomuqueuses, et des structures reconnues comme étrangères telles que les cellules et les molécules endogènes altérées. Les neutro-philes sont les premières cellules à migrer du sang vers un foyer infectieux ou inflammatoire. Les neutrophiles matures sont des cellules compartimentées stockant dans leurs granulations des molécules « prêtes à l’emploi » synthétisées durant la granulopoïèse. Sous l’influence d’un stimulus adapté, une décompartimentalisation déclenche des fonctions effectrices rapides, sous-ten-dant l’efficacité de ces cellules de l’immunité innée. Mais ces cellules sont également capables de synthèse de novo des médiateurs relayant les premières fonctions effectrices. Les activités microbicides et cytotoxiques des neutrophiles dépendent de différents mécanismes qui sont d’ailleurs intriqués : libération d’enzymes pro-téolytiques, de protéines à activité antimicrobienne et production rapide de formes réactives de l’oxygène (FRO). Alors que les fonctions des neutrophiles ont longtemps été restreintes à leur rôle de cellules phagocytaires « tueuses », il est maintenant bien reconnu qu’ils jouent un rôle beaucoup plus complexe, participant à l’enga-gement et à la régulation des réponses immunitaires innées et adaptatives ainsi qu’à l’homéostasie tissulaire. Les fonctions des neutrophiles illustrent l’intégration complexe des différents partenaires de l‘immunité innée et adaptative dans la défense contre les agents patho-gènes et la physiopathologie de différentes maladies.

Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de

conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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LE POLYNUCLÉAIRE DANS TOUS SES ÉTATS !

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