Pierre Michel, « Octave Mirbeau : les contradictions d'un écrivain anarchiste »

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  • 8/14/2019 Pierre Michel, Octave Mirbeau : les contradictions d'un crivain anarchiste

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    OCTAVE MIRBEAU : LES CONTRADICTIONS D' UN CRIVAIN ANARCHISTE

    De tous les crivains attirs par la doctrine anarchiste au cours des annes 1890, OctaveMirbeau n'est pas seulement le plus titr, ni celui qui a eu le plus d'impact, que ce soit par seschroniques du Figaro et du Journal ou par ses grands succs populaires au thtre et dans le

    domaine de la fiction. Il est aussi celui qui a fait, le plus durablement, de son ralliement l'idallibertaire le pivot de tout son engagement politique et littraire, et qui y est rest constammentfidle, en dpit des apparences : ds 1873, alors qu'il prostitue sa plume et sert la cause de l'Appelau peuple dans L'Ordre de Paris, il voit dans la doctrine de Proudhon la seule alternative au

    bonapartisme (1) ; et, 43 ans plus tard, alors qu'il est rduit au silence par la maladie et unvieillissement acclr, et qu'il est cras par l'abomination de la guerre, il confie GeorgesDocquois venu l'interviewer : "Je n'ai pas chang. Je suis toujours anarchiste. Mais chez moi,depuis la guerre, l'anarchiste dort. Si je vis, l'anarchiste se rveillera plus intransigeant que

    jamais"(2). Hlas! il n'a plus que trois mois vivre.Cependant l'anarchisme de Mirbeau n'est pas sans poser des problmes du fait des multiples

    contradictions auxquelles il s'est heurt :

    - contradictions d'ordre thorique : entre, d'une part, son rousseauisme naturiste et, d'autrepart, l'influence dcisive exerce sur lui par le marquis de Sade, par Darwin et, surtout, parSchopenhauer ;

    - contradictions d'ordre social : entre son idal libertaire et les impratifs de son mtierd'homme de plume oblig de vendre sa copie sur le march des cervelles humaines ;

    - contradictions d'ordre littraire : entre sa contestation radicale des formes littraires,notamment du roman, et le recours quasiment oblig des genres qu'il juge dpasss etmystificateurs ;

    - contradictions d'ordre politique enfin : entre sa conception de la mission de l'artiste et lesncessits du combat politique.

    ROUSSEAU, DARWIN ET SCHOPENHAUER

    Sur le plan thorique, on peut dgager trois contradictions majeures :

    1. Entre son rousseauisme et son obsession de "la loi du meurtre" - que Joseph deMaistre appelait "la loi de la destruction universelle".

    Sous l'influence de Jean-Jacques, Mirbeau connat souvent la tentation de se rallier une philosophie d'inspiration naturiste. Elle transparat par exemple dans certaines utopiesjournalistiques de ses dbuts, telles que "Royaume vendre" (3), o il rve d'une socit proche dela nature, sans tat, sans cole, et, partant, sans misre, sans haine et sans rvolte. Elle apparat aussidans les prches de l'abb Jules, qui souhaite rduire au minimum "les obligations sociales", "quitoutes engendrent les vices, les crimes, les hontes", et s'loigner "le plus possible des hommes", afinde se rapprocher "des btes, des plantes, des fleurs, en vivant comme elles de la vie splendidequ'elles puisent aux sources mmes de la nature, c'est--dire de la beaut" (4). C'est aussi cenaturisme qui, dans sa dernire oeuvre,Dingo (1913), l'amne, dans le droit fil des cyniques grecs, opposer systmatiquement la beaut et l'intelligence d'un chien, ft-il carnassier, la laideur et l'imbcillit des humains croupissant dans leurs bauges. On comprend ds lors qu'il n'ait de cesse destigmatiser la socit, organise tout entire pour craser l'individu, qu'il s'en prenne l'tat"assassin et voleur" (5), et qu'il voie dans l'anarchie "la reconqute de l'individu" et "la libert dudveloppement de l'individu, dans un sens normal et harmonique" (6).

    Mais en mme temps, hritier du divin Marquis, et, paradoxalement, de Joseph de Maistre, ilne cesse de raffirmer l'universalit de l'inexpiable "loi du meurtre", qui le rvulse. Certes, il sait

    pertinemment que c'est la socit, et particulirement la socit capitaliste du XIXe sicle, qui portela plus grande part de responsabilit dans les monstrueux cataclysmes qui continuent de ravager

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    l'humanit - par exemple les guerres inter-imprialistes, ou les expditions coloniales, quitransforment des continents entiers en de terrifiants jardins des supplices ; et l'ironique ddicace du

    Jardin des supplices, prcisment, "aux Prtres, aux Soldats, aux Juges, aux Hommes qui duquent,dirigent, gouvernent les hommes", sonne bien comme une accusation vengeresse. Mais il n'en reste

    pas moins que cette "loi du meurtre" est antrieure toute organisation sociale. C'est une loi

    naturelle, qui rgit les relations entre toutes les espces vivantes, et la socit ne fait jamais que lacanaliser au profit des dirigeants, qui y voient la justification et en font le fondement de leur ordreinique et homicide - comme Mirbeau l'expose dans le clbre "Frontispice" duJardin des supplices.L'homme prtendument "civilis" n'est en ralit qu'un grand fauve lubrique et froce, dont lesinstincts meurtriers, recouverts d'un lger vernis d'humanit, se rveillent et se dfoulenteffroyablement la premire occasion, comme l'affaire Dreyfus en a apport une loquenteillustration.

    Si telle est la loi infrangible de la Nature "aux desseins impntrables", cela a-t-il un sens derver d'instaurer un jour une organisation sociale pacifie qui prtende s'en affranchir ?

    2. Entre son darwinisme affich et son refus du darwinisme social - qu'il ridiculise en

    particulier dansLes 21 jours et dans sa farceInterview :Si la Nature impose toutes les espces vivantes un duel mort entre ceux qui mangent et

    ceux qui sont mangs ; si la slection naturelle permet aux mieux adapts de l'emporter et desurvivre, cependant que les autres sont condamns disparatre, pourquoi n'en serait-il pas de mmedans les socits humaines ? S'il s'agit d'une loi naturelle immuable et universelle, comment et aunom de quoi contester que les plus aptes et les mieux arms pour le "struggle for life" fournissentles lites dirigeantes et crasent "le btail ahuri des humains", comme dit Mallarm ? PourtantMirbeau, toute sa vie, s'est battu inlassablement pour les plus dmunis et a, selon la formule deZola, "donn son coeur aux misrables et aux souffrants de ce monde" (7).

    Certes, il a toujours condamn le systme de slection des prtendues lites, et stigmatisl'arrivisme et l'affairisme qui permettent aux dmagogues sans scrupules, tel Eugne Mortain du

    Jardin des supplices, et aux requins de la finance, tel l'immortel Isidore Lechat desAffaires sont lesaffaires, d'exercer impunment leur omnipotence criminelle. Mais, en prconisant "une absoluelibert", indispensable l'panouissement maximal des potentialits individuelles ; en se proposantde rduire l'tat " son minimum de malfaisance", par peur de l'tat tentaculaire et totalitaire dessocialistes collectivistes ; en s'opposant toutes les mesures protectionnistes qui paralysentl'innovation et touffent "les nergies latentes" et le "pouvoir de cration" de l'homme, condamn"fatalement la routine, la strilit, la paresse, la mort" (8), Mirbeau ne risque-t-il pas de

    justifier le rgne des plus forts et l'crasement des larves humaines ? Au nom de la libert, ne fait-il pas le jeu du libralisme conomique , qui assure le triomphe des brasseurs d'affaires et desspculateurs et qui, dans la pratique, apparat comme la totale ngation de l'idal libertaire ?L'ambivalence de ses sentiments l'gard d'Isidore Lechat, pour qui il ne cache pas sa tendresse,

    parce qu'il voit en lui un grand crateur, et mme "un idaliste" (9), souligne crment l'impasse deson culte de la libert "absolue".

    3. Entre sa foi anarchiste et son pessimisme schopenhauerien, qui confine bien souventau nihilisme (10).

    Pour Mirbeau, en effet, et il ne cesse de le proclamer, "la frocit est le fond de la naturehumaine" ; les idaux sont homicides ; le progrs n'est qu'une illusion ; la science, la philosophie, lalittrature et l'art ne sont que des "corruptions" ou des "mystifications" ; et les seuls remdes l'angoisse existentielle et la souffrance, consubstantielle la vie et la pense, sont lacontemplation et le renoncement des bouddhistes en qute du Nirvana (11). Ds lors, il y a quelque

    paradoxe, de la part de notre Don Quichotte, se battre continuellement dans l'espoir d'"augmenterla somme possible de bonheur parmi les hommes" (12), lors mme qu'il est bien convaincu que "larvolte est impuissante"(13), que le troupeau humain, "quoi qu'il fasse, o qu'il aille, s'achemine

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    vers la mort", et que le progrs n'est qu'"un pas en avant vers l'inluctable fin" (14).Cette dualit qui le dchire, Mirbeau l'exprime souvent au moyen de dialogues o

    s'affrontent les deux faces de lui-mme, notamment dans le chapitre final des 21 jours d'unneurasthnique (1901) et dans une chronique du 29 mars 1898, "L'Espoir futur". En fait, s'il n'acess de lutter pour les valeurs qu'il a faites siennes - le Juste, le Vrai, le Beau - , ce n'est pas parce

    qu'il y croit comme une dvote croit en son dieu, car ces valeurs n'existent videmment pas en elles-mmes et ne sont que le produit des exigences de l'esprit humain. Ce n'est pas davantage parce qu'ilen attend une amlioration de la tragique condition de l'homme, qui "se trane pantelant du nant dela vie au nant de la mort" (15) : il sait que ce serait vain, et il se mfie de "l'opium de l'esprance",avatar des religions "opium du peuple", avec lequel les "mauvais bergers" de toute obdienceanesthsient et bernent les proltaires qu'ils exploitent (16). Mais parce que le combat pour la justiceest, avec la contemplation de l'oeuvre d'art, le seul moyen de confrer l'existence terrestre, sinonun sens, du moins une dignit, dont tout tre pensant a besoin pour contrebalancer le "taediumvitae" et rendre l'existence un peu moins insupportable.

    DU PROLTAIRE AU JUSTICIER

    La deuxime srie de contradictions, d'ordre social, tient au statut social d'Octave Mirbeau :il est un professionnel de l'criture. C'est--dire qu'il n'est pas un oisif, un rentier, un mondain,consacrant ses loisirs la cration littraire ; ni un salari qui, aprs ses huit ou dix heures de travailalinant, trouve une compensation ses humiliations quotidiennes dans le polissage du chef-d'oeuvre dont il rve. Il vit de sa plume, et il lui faut trouver sa place dans le champ de la littratureet se dresser, avec ses frres de chane, "contre l'infme capital littraire" (17). Pendant unedouzaine d'annes, il a t un vritable "proltaire de lettres" (18) : il a d, successivement ou tout la fois, "faire le domestique", comme secrtaire particulier de Dugu de la Fauconnerie et d'ArthurMeyer, "faire le trottoir", comme chroniqueur gages L'Ordre de Paris, L'Arigeois, au Gauloiset dansLes Grimaces, et "faire le ngre", en crivant pour ses divers employeurs des brochures de

    propagande et des "Salons", des recueils de nouvelles et une plthore de romans (19). C'est trstardivement, l'ge de trente-six ans, qu'il a commenc voler de ses propres ailes, aprs uneretraite de sept mois Audierne, en 1884. Mais il n'en continue pas moins dpendre de sa plume

    pour assurer sa subsistance quotidienne et pour payer les dettes colossales accumules au cours desquatre annes de sa liaison dvastatrice avec une femme la cervelle d'oiseau et la cuissse lgre,Judith Vimmer - la Juliette Roux du Calvaire. Il est donc condamn vendre ce qu'il a de plus

    prcieux aux "marchands decervelles humaines" (20), directeurs de journaux et de revues, diteurset ngriers. Dans une socit o le mercantilisme a tout gangren et o tout se vend et s'achte -comme il ne cesse de le rpter dans tous ses romans "ngres" de l'poque - , l'crivain est soumis la mme loi d'airain que les proltaires manuels.

    Nanmoins, aprs le grand tournant des annes 1884-1885 (21), deux diffrences essentiellesapparaissent dans les conditions d'exercice de sa profession d'crivain :

    - D'abord, sa rputation de pamphltaire, de conteur, de critique d'art, et, probablement aussi,de romancier - bien que ses premiers romans aient paru sous pseudonyme - , est suffisammenttablie pour qu'il puisse dsormais faire jouer son profit l'inflexible loi de l'offre et de la demande.Il peut faire monter les prix - passant de 125 francs la chronique en 1885 300 francs en 1888 et350 partir de 1894 - , et il peut traiter armes moins ingales avec les diteurs Ollendorff etCharpentier et avec les directeurs du Gaulois, du Figaro, de L'cho de Paris et du Journal. Lamenace de sa dmission, brandie plusieurs reprises, suffit le plus souvent imposer desrdacteurs en chef sourcilleux ou misonistes des articles, politiques ou esthtiques, qu'ils ontcommenc par refuser de peur d'effrayer leur lectorat.

    - Ensuite, il entame sa "rdemption" en mettant dornavant sa plume exceptionnelle auservice des valeurs et des causes qui sont les siennes. Il cesse d'tre "un imposteur" (22) pour se

    battre dsormais, visage dcouvert et pour son propre compte, en faveur de la justice, dans les arts

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    et les lettres comme dans l'ensemble de la socit. Mais, ce faisant, il va contre-courant desprjugs corrosifs dont la Sainte Trinit - la famille, l'cole et l'glise (23) - a enduit les cervelles deses contemporains, rduisant la grande majorit d'entre eux l'tat de "croupissantes larves" (24). Ils'est en effet fix pour objectif d'ouvrir les yeux de ses lecteurs en les obligeant dcouvrir touteschoses - notamment les hommes honors et les institutions les plus respectables - sous un jour

    nouveau qui en rvle crment les tares et "les bosses morales" : vritable rvolution du regard,complmentaire, dans le domaine de la pense, de celle qu'accomplissent, dans celui desperceptions, ses "dieux" Claude Monet et Auguste Rodin, et qui tend rien moins qu' manciperles esprits alins et les rendre aptes exercer leur libert.

    Dans son combat libertaire, il se trouve ds lors confront au dilemme suivant :- Ou bien, pour assurer la parution rgulire de sa copie et pour prserver son impact sur un

    lectorat rticent, il cde aux exigences de ses employeurs et, de compromis en compromissions, ilpourrait finir par oublier ses objectifs d'mancipation intellectuelle.

    - Ou bien il se refuse faire la moindre concession aux habitudes culturelles et au confortmoral et intellectuel de ses lecteurs, au risque de perdre sa place exceptionnelle, et grassementrmunre, dans la presse grand tirage (ce qui lui arrive en mai 1902, quand il est chass du

    Journal) et de ne publier sa prose que chez des diteurs marginaux ou dans des revues tirageconfidentiel, perdant du mme coup toute chance d'influencer durablement une fraction significativede l'opinion publique.

    Mirbeau a naturellement essay d'chapper aux tenailles du dilemme et de dpasser lacontradiction, et il a russi le tour de force d'tre la fois le plus radicalement subversif descrivains de l'avant-sicle et, ce nonobstant, l'un des plus populaires : ses chroniques du Journaltaient lues par plus d'un million de personnes ; plusieurs de ses romans ont connu un grand succsde ventes (Le Calvaire,Le Jardin des supplices, et surtoutLe Journal d'une femme de chambre) ; et

    Les Affaires sont les affaires a remport un triomphe sur toutes les scnes d'Europe. Commentexpliquer ce paradoxe ? dfaut d'une analyse littraire, qui demanderait de longs dveloppementset qui serait hors de propos, je me contenterai de formuler deux lments de rponse :

    - Mirbeau n'est jamais ennuyeux, et mme lorsqu'il est au fond de l'abime, tenaill par ledoute, dgot de tout et tent par le suicide, il n'en parvient pas moins transmuer son dsespoir enhumour noir ou en ironie grinante et faire rire ou sourire ses lecteurs. La vis comica de sescaricatures, de ses interviews imaginaires, de ses sayntes, de ses chroniques au vitriol, contribue dsarmer le lecteur, tent de devenir complice. Le prix payer, c'est qu' force de ne rien prendre ausrieux et de dsacraliser tout ce qu'un vain peuple rvre, il risque d'tre entran dans le discrditde ce qu'il dmasque et de n'apparatre, aux yeux des rfractaires, que comme un provocateur ou unamuseur sans importance. Et puis, son succs n'est pas dpourvu d'ambigut : le rire peut finir pardsamorcer la critique sociale, et le polmiste risque d'tre rcupr par le systme mme qu'ildnonce : ne disait-on pas, par exemple, que le dimanche, o paraissaient ses chroniques enPremier-Paris, les ventes duJournaltaient suprieures de 10% celles des autres jours ?

    - De plus, il possde un tel sens de l'observation et une telle maestria stylistique qu'ilparvient donner vie la matire inerte qu'il manipule, suscitant l'admiration de lecteurs aussidiffrents et aussi exigeants que Mallarm et Tolsto, Taine et Bergson, Marcel Schwob et GeorgesRodenbach. Bergson par exemple dclarait : " Il a un don de vie qui m'tonne. Faire parler,marcher, rflchir, souffrir un personnage me parat un prodige. Et ce don m'a toujours merveillchez Mirbeau"(25). C'est ce "don de vie" qui permet notre imprcateur d'intresser son lecteur etde retenir son attention, malgr qu'il en ait. Mais le risque est alors de ne toucher que sa sensibilitsuperficielle, et de n'veiller en lui que des motions phmres qui n'entament pas sa carapace de

    prjugs.Difficile quilibre que celui que doit raliser tout instant un pamphltaire l'audience de

    masse, dsireux de secouer, voire de violenter, un lectorat par trop passif, pour l'obliger ragir, exercer son esprit critique et assumer sa libert, mais qui, en mme temps, ne peut se permettre de

    bafouer trop ouvertement ses prjugs les plus chers de peur d'tre tiquet "nerv", "nergumne",

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    "excessif" ou "frntique" et de perdre toute chance d'agir sur lui. Les indispensables compromis,sans lesquels il ne pourrait se faire entendre, peuvent parfois tendre fcheusement vers lacompromission et faire capoter les entreprises les mieux engages. C'est ce qui s'est pass, parexemple, avecLes Mauvais bergers, tragdie proltarienne cre en dcembre 1897, au Thtre dela Renaissance, par les deux plus grandes stars de la scne : Sarah Bernhardt, quinquagnaire, dans

    le rle de lajeune pasionaria Madeleine, et Lucien Guitry, le nabab, dans celui du leader anarchisteJean Roule. Toutes les conditions du succs sont runies : le cinquime acte, o l'on voit lesouvriers grvistes massacrs par la troupe, bouleverse tous les coeurs, et le lendemain toute la

    presse est dithyrambique... Mais que d'ambigut dans semblable succs ! Car le public qui verse salarme sur les malheurs imaginaires des deux monstres sacrs, et qui du mme coup remplit le tiroir-caisse de la grande Sarah, est le mme que celui qui applaudit aux massacres d'ouvriers Fourmieset Carmaux : des bourgeois en smoking et des mondaines rutilantes de bijoux ! Belle illustrationde la catharsis aristotlicienne telle que l'analyse Rousseau... (26) Quant aux proltaires alins quele dramaturge entendait conscientiser, ils n'ont gure le loisir de frquenter les thtres du

    boulevard. Prenant conscience de sa bvue, Mirbeau s'est jur, mais un peu tard, de ne plus selaisser piger, et il a conu pour sa pice un tel ressentiment qu'il et souhait la rayer de son oeuvre

    (27). Pour mmoire, signalons une autre contradiction d'ordre social : l'ancien " proltaire delettres", au terme de sa carrire, a fini par devenir millionnaire, et nombre de bonnes mes, ycompris Edmond de Goncourt, n'ont pas manqu d'ironiser sur cet anarchiste " qui il faut pourvivre et la femme et le boire et le manger cots dans les plus hauts prix" et qui dpense "une

    soixantaine de mille francs par an" (28). De fait, en pousant une ancienne thtreuse enrichie dansla galanterie (29), en menant grand train et en s'offrant le luxe de devenir chtelain, Cormeille-en-Vexin, Mirbeau donne ses dtracteurs des verges pour se faire battre. Sans insister, faisons-leur

    pourtant remarquer deux choses :- D'une part, l'argent acquis tardivement par son travail d'crivain sert aussi faire vivre la

    presse anarchiste -Les Temps nouveaux, par exemple - et secourir quantit de personnes dans la

    gne, proltaires, vagabonds, jeunes artistes, et mme Zola, pour le compte duquel il paye de sapoche, en aot 1898, l'amende de 7.555 francs que lui a value "J'accuse".

    - D'autre part, son tardif enrichissement n'a nullement entam sa fougue iconoclaste, commele prouve, par exemple, sa scandaleuse comdie de moeurs au vitriol, Le Foyer, reprsente laComdie-Franaise au terme d'une longue bataille politico-judiciaire (30). Le millionnaire est bienrest rouge - ou, plutt, noir....

    LE CONTEMPTEUR DES GENRES LITTRAIRES

    Beaucoup plus srieuse est la contradiction d'ordre littraire laquelle il s'est trouvconfront lorsqu'il a d faire ses gammes dans cinq genres littraires obligs : la chronique, lacritique d'art, le conte, le roman et la comdie. Car il a une conscience fort claire de leur caractreminemment conservateur, voire mystificateur. Convaincu qu'il ne s'agit l que de produits deconsommation de masse destins anesthsier la conscience des lecteurs et des spectateurs pour enfaire un troupeau abti et obissant, il est bien oblig, s'il veut au contraire veiller chez euxl'tincelle de la conscience, d'en subvertir la forme, au risque de heurter, voire de scandaliser, ceuxqu'il appelle des "aveugles volontaires" (31). Il recourt pour cela deux procds privilgis : latotale subjectivit et la drision.

    - La subjectivit : Toutes ses chroniques politiques ou esthtiques, la quasi-totalit de sescontes, de ses nouvelles et des romans publis sous son nom ( la seule exception de la premire

    partie de Sbastien Roch) sont crits la premire personne et obligent le lecteur se pntrer de lavision du monde propre l'auteur. Mais elle est si trange, voire si scandaleuse, aux yeux du

    profanum vulgus, que Mirbeau, comme son matre Tolsto, risque fort d'tre tax de folie, ou dumoins d'exagration - comme si ce n'tait pas la ralit qui exagrait, et non l'crivain charg de

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    au nom de laquelle on mutile les choses qui gnent pour les adapter aux besoins de confort moraldes lecteurs, par exemple "les tnbres de la subconscience" et les incohrences du coeur humain, sicontraires aux habitudes et aux exigences de "l'art latin" (36). Elle constitue donc un dni de ralit,et il la transgresse dlibrment pour lui opposer le vrai, ft-il jug "invraisemblable" par les"aveugles volontaires".

    - Le code de la crdibilit romanesque, qui assure la cohrence interne l'oeuvre et donneau lecteur l'illusion du vrai. Mirbeau se plat de plus en plus la ruiner, en multipliant au contraireles marques de dsinvolture. Il renoue ainsi avec les origines du roman et se situe dans le droit fil deRabelais, de Cervantes, de Sterne et de Diderot.

    - Le code de la biensance, pure hypocrisie au nom de laquelle on refuse le droit de citlittraire quantit de personnages et de choses de la vie, commencer par la sexualit et les

    perversions humaines, afin d'en donner une vision aseptise compatible avec les normes sociales.Mirbeau s'emploie au contraire faire clater les appareils normatifs, proclamer haut et fort cequ'il est dcent d'occulter prcautionneusement. Il est donc celui par lequel le scandale arrive, et onle lui fera payer au prix fort aprs sa mort (37).

    Ainsi, notre crivain libertaire, sans rompre compltement avec les genres traditionnels, n'en

    a pas moins tent de s'affranchir de nombre de rgles et traditions qui l'entravaient. Mais il s'estheurt du mme coup aux plus vives rticences de la critique tardigrade, et il a couru le risque d'treincompris, ou violemment rejet par une partie de son lectorat potentiel : ainsi Sbastien Roch(1890) a-t-il t victime d'une vritable conspiration du silence ; Le Journal d'une femme dechambre (1900) a t accueilli dans un silence de mort, boycott par la grande presse, et considr

    par maints historiens de la littrature comme un ouvrage "rotique", voire "pornographique", toutjuste bon pour l'Enfer des bibliothques ; La 628-E 8 (1907) a paru amput du scandaleux chapitresurLa Mort de Balzac (38) ; et plusieurs scnes des Affaires sont les affaires et du Foyer ontsoulev des tolls lors de leur cration la Comdie-Franaise.

    L' ARTISTE ET LE MILITANT

    Enfin, ultime contradiction, d'ordre politique : l'artiste, chez Mirbeau, ne converge pastoujours avec le militant libertaire engag dans la grande bataille de l'mancipation humaine. Leurlogique est fondamentalement diffrente.

    Pour Mirbeau, l'artiste est un tre d'exception qui, grce la force de son temprament, a pursister au nivellement socio-culturel, et qui, par une ascse continue et douloureuse, est parvenu sauvegarder l'innocence de son regard d'enfant : " Il voit, dcouvre, comprend, dans l'infini

    frmissement de la vie, des choses que les autres ne verront, ne dcouvriront, ne comprendrontjamais" (39). C'est ce qui le rend potentiellement subversif dans une socit o l'tat, garant del'ordre bourgeois, ne peut tolrer "qu'un certain degr d'art", selon la formule de l'inamovibleministre Georges Leygues, souvent cite par Mirbeau (40). Mais cela prsente aussi pour lui deuxconsquences douloureuses : d'une part, il est en butte l'incomprhension du public "suffrage-universalis" et l'hostilit des mdiocres - ide romantique reprise par Baudelaire ; d'autre part, ilest condamn la dsesprance de ne jamais atteindre l'idal entrevu. Cette tragdie de l'artiste, qu'ila voque dans son romanDans le ciel, en s'inspirant de l'exemple de Vincent Van Gogh, Mirbeauet ses "dieux" Monet et Rodin l'ont vcue douloureusement : "Devant le mystre qu'est le frisson dela vie, et qu'il est impossible d'treindre compltement pour le fixer en un vers, sur une toile, dansdu marbre [...], le plus triomphant des artistes, mme un Shakespeare, mme un Velasquez, mmeun Rodin, se sent bien petit et bien impuissant" (41). Ce sentiment lancinant d'impuissance et cettedsesprance propres aux mes d'artistes les prdisposent mal l'action militante et la foi quisoulve les montagnes.

    De surcrot, la mission de l'artiste est d'exprimer dans ses oeuvres les "motions" toutespersonnelles qu'veille en lui le spectacle du monde extrieur : celui de la nature, dont Monet tentede saisir les plus impalpables frmissements ; mais aussi celui, combien dcourageant, de la triste

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    humanit l'agitation strile et aux pulsions homicides. Ds lors, aux yeux du militant politique,l'artiste est guett par deux dangers :

    - force de vouloir saisir l'insaisissable, exprimer l'inexprimable et raliser l'impossible, ilpeut tre tent de dserter son devoir social pour s'absorber totalement dans la qute mortifre d'unabsolu qui toujours se drobe, l'instar du peintre Lucien de Dans le ciel, qui finit par se couper la

    main "coupable". Mirbeau, qui parle en connaissance de cause, met souvent en garde son amiMonet contre cette "maladie du toujours mieux" (42).- force de ruminer son dsespoir, il peut tre, plus que tout autre, contamin par l'angoisse

    existentielle et le nihilisme moral, dont Mirbeau a souffert toute sa vie, particulirement lors del'interminable crise des annes 1890-1895. Faut-il s'tonner ds lors si son oeuvre, expression toute

    personnelle de son "temprament", reflte sa vision pessimiste et dsespre de la conditionhumaine ?

    Cette qute d'un idal esthtique compltement tranger la politique, et ce nihilismed'inspiration schopenhauerienne sont bien peu propices inspirer aux lecteurs la foi dans l'actionmancipatrice. De fait, nombre d'oeuvres de Mirbeau peuvent apparaitre plus dcourageantes quemobilisatrices. Nous ne citerons que deux exemples, rvlateurs du dcalage entre un artiste comme

    Mirbeau, foncirement indpendant, ouvert tous les mystres de la nature, toutes ses beauts,mais aussi toutes ses angoisses, et avant tout soucieux de nous faire partager, par la magie desmots, sa perception unique du monde, ft-elle dsesprante, et un militant anarchiste comme JeanGrave, professionnel de la rvolution, qui a de la littrature une conception visiblement utilitaire, etqui se doit d'entretenir le moral de ses maigres troupes, ft-ce coup d'artifices et d'illusions (43).

    - Tout d'abord, l'exemple des Mauvais bergers, dont le cinquime acte est nihiliste souhaitet reflte bien "le got amer du nant" caractristique du dramaturge, selon son ami Geffroy (44) :la troupe est intervenue et a mitraill les ouvriers en grve, Jean Roule a t tu, Madeleine enceintemeurt son tour, et le rideau tombe sur le pre Thieux, snile comme le vieux roi de La PrincesseMaleine de Maeterlinck, qui rpte mcaniquement : "C'est la paye !" L'action pour transformer lacondition ouvrire ne peut-elle donc aboutir qu'au massacre, et l'histoire n'est-elle dcidment qu'un

    "charnier", sans le moindre espoir de ces germinations futures que Zola laissait entrevoir la fin deGerminal ? Telle est bien en effet la conclusion de Mirbeau, que Jaurs juge "effarante" (45) :"L'autorit est impuissante. La rvolte est impuissante. Il n'y a plus que la douleur qui pleure dansun coin, sur la terre, d'o l'espoir est parti. Le jour o les misrables auront constat qu'ils ne

    peuvent s'vader de leur misre, briser le carcan qui les attache pour toujours au poteau de lasouffrance, le jour o ils n'auront plus l'esprance... ce jour-l, c'est la destruction, c'est la mort !" (46)

    Cette conclusion est peut-tre lucide, mais, en niant l'efficacit de la rvolte, en refusant toutespoir aux "damns de la terre", Mirbeau ne les condamne-t-il pas son tour et jamais "au poteaude la souffrance" ? Jaurs n'est pas le seul tre choqu. Le compagnon Jean Grave fait part sonami de ses rserves : il trouve la conclusion "trop pessimiste" et conteste que les anarchistes tels queJean Roule puissent tre considrs eux aussi comme de "mauvais bergers", puisqu'ils n'entendentdiriger personne et se contentent de jeter des ides pour amener les gens se prendre en charge eux-mmes : "Mais mettons que cet tat de propagande en fasse des bergers malgr eux, mettons qu'ilsn'ont pas encore trouv la bonne solution, ce qui est fort possible, aprs tout, il n'en dcoule pasmoins quelques vrits de leur enseignement. Vrits qui serviront ceux qui viendront pour endcouvrir d'autres. Et l'ide de l'enfant de Jean Roule venant au monde aurait t, selon moi, d'uneallgorie plus vraie, plus vivante. En le faisant mourir avec la mre, c'est la ngation de tout effortet de toute critique. Il ne reste plus qu' aller piquer une tte dans la Seine" (47).

    - Quant auJournal d'une femme de chambre, il donne de la vie, de la nature humaine, de lasocit en gnral et de l'alination de la domesticit en particulier, une image si noire que JeanGrave est tout "embarrass" quand il lui faut en rendre compte pourLes Temps nouveaux, tant il atrouv "cette lecture plutt pnible" : "C'est avec une impression de tristesse et de dcouragementqu'on ferme le livre, en se demandant si la pourriture et la gangrne ne finiront pas de nous

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    dvorer [...] C'est que le tissu d'abominations que nous dvoile Mirbeau n'est coup d'aucuneattnuation, d'aucune claircie permettant de respirer un peu l'aise" (48). Dcidment, l'angoissemtaphysique fait mauvais mnage avec le messianisme rvolutionnaire, la lucidit avecl'engagement, et le pessimisme de la raison avec la foi dans les lendemains qui chantent... Artisteexigeant, Mirbeau ne saurait se soumettre la discipline du militant.

    UN ANARCHISTE ATYPIQUE

    Dchir par une foule de contradictions qu'il assume lucidement, parce que, pour un ferventde la dialectique l'oeuvre dans l'univers, c'est la contradiction qui est l'origine de toutes choses,Mirbeau est un crivain inclassable doubl d'un anarchiste atypique. Profondment angoiss depuisson adolescence, comme en tmoignent ses bouriffantesLettres Alfred Bansard(49), souvent en

    proie au dsespoir, il ne nous en a pas moins lgu une oeuvre tonique, roborative, jouissive,souvent mme jubilatoire. La cration littraire a t pour lui un exorcisme, et l'engagementlibertaire le remde son spleen et sa neurasthnie.

    C'est, paradoxalement, parce qu'il n'attend rien des hommes, parce qu'il rejette "l'opium de

    l'esprance", parce qu'il se mfie comme de la peste des utopies clefs en main, lourdes destotalitarismes du XXe sicle, parce qu'il a horreur de la langue de bois, des embrigadementsirraisonns et des rponses toutes faites, parce qu'il refuse de n'tre que le porte-parole d'unechapelle, parce qu'il n'a souci que de vie et d'humanit, et que mpris pour la dmagogie et lesincantations des "mauvais bergers" de tout poil, fussent-ils tiquets anarchistes, qu'il nous livre uneoeuvre dont l'ambigut mme constitue une richesse essentielle. En matrialiste convaincu, il semfie des idaux homicides stigmatiss par l'abb Jules. Mais il n'en affirme pas moins avecconstance des valeurs relatives qui lui servent de boussole, sans entretenir pour autant la moindreillusion : il n'est pas ncessaire d'esprer pour entreprendre. Raliste, il lui faut bien reconnatre leprimat de la nature (la loi du meurtre), de l'exploitation (le capitalisme) et de l'oppression (laservitude). Mais, volontariste, il proclame en mme temps, pour reprendre une importante

    distinction d'Andr Comte-Sponville, la primaut, dans l'action politique comme dans la crationlittraire, de la culture, sans laquelle il n'y a plus que des fauves ou des larves, et de la libertindividuelle, sans laquelle l'humanit n'est plus qu'un troupeau de moutons conduits l'abattoir. Cen'est qu'en regardant en face l'horreur des choses qu'on peut envisager, petit petit, de lestransformer ; et, pour citer de nouveau Comte-Sponville, c'est du "dsespoir" qu'on peut tenter,comme Mirbeau, de s'lever vers la "batitude" (49).

    Pierre MICHELUniversit d'Angers

    NOTES1. Voir Pierre Michel, "Octave Mirbeau et l'Empire", paratre en 1994 dans Littrature et

    nation.2. Georges Docquois,Nos motions pendant la guerre, Albin Michel, 1917, p. 13.3.Le Gaulois, 29 avril 1883 (Combats politiques de Mirbeau, Sguier, 1990, pp. 51-56).4. L'Abb Jules, ch. III de la deuxime partie (Combats pour l'enfant, Ivan Davy, 1990, p.

    54).5. Interview dansLe Gaulois du 25 fvrier 1894.6. Prface La Socit mourante et l'anarchie, de Jean Grave (Combats politiques, p. 129).7. Lettre de Zola Mirbeau du 3 aot 1900 (catalogue Sotheby de la vente du 12 octobre

    1987, Monaco).8. "Une Face de Mline", Le Journal du peuple, 1er mars 1899 (L'Affaire Dreyfus, Sguier,

    1991, p. 260).9. "Il vit un rve comme Bonaparte, Bismarck ou Chamberlain, il porte dans sa tte des

    bauches d'entreprises et d'affaires, de fantastiques scnarios de combinaisons financires, commeil y en a d'autres qui sacrifient tout pour raliser leur idal dans des statues ou des tableaux"

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    (interview par Maurice Le Blond,L'Aurore, 7 juin 1903).10. Voir Pierre Michel, Les Combats d'Octave Mirbeau, ch. III ( paratre en septembre

    1994, dans les Annales de l'Universit de Besanon).11. Il est significatif cet gard qu'il ait sign Nirvana ses stupfiantes Lettres de l'Inde de

    1885 (dites par nos soins, L'choppe, 1991).

    12. "Dpopulation",Le Journal, 18 novembre 1900 (Combats pour l'enfant, p. 187).13. "Un Mot personnel",Le Journal, 19 dcembre 1897.14. "En traitement", Le Journal, 5 septembre 1897 (Contes cruels, Sguier, 1990, t. I, p.

    227).15. "Un Crime d'amour",Le Gaulois, 6 fvrier 1886.16. "Un Mot personnel", loc. cit.17. L'expression est de Mirbeau dansLes Grimaces du 17 dcembre 1883.18.Ibidem.19. Sur la ngritude de Mirbeau, voir l'tude de Pierre Michel dans les Actes du Colloque

    Octave Mirbeau de Crouttes, d. du Demi-cercle, 1994, pp. 81-101.20. Lettre Paul Hervieu de novembre 1885 (Correspondance gnrale, l'ge d'homme,

    1994, t. I).21. Sur ce "grand tournant", voir le ch. IX de la biographie d'Octave Mirbeau, par P. Michelet J.-F. Nivet, Sguier, 1990.

    22. C'est ainsi que se considre le "ngre" d'un roman d'Isaac Singer, Ennemies (1972) :quoiqu'irrligieux et athe, il crit des tudes talmudistes pour un rabbin.. 23. Voir notre prface aux Combats pour l'enfant.

    24. L'expression apparat dansDans le ciel(L'choppe, 1989). Sur ces "larves", voir le ch. Vdes Contes cruels.

    25. Cit par Albert Ads, dansLa Pyramide - Trois hommes et une vrit, tude manuscritesur Mirbeau, Maeterlinck et Bergson, f. 9 (archives de Mme Ads-Theix).

    26. en croire Urbain Gohier dans L'Arme et la nation (1899), des spectateurs auraient

    mme applaudi la saine intervention de l'arme...27. Interview par Paul Gsell,La Revue, 15 mars 1907.28. Edmond de Goncourt,Journal, coll. Bouquins, t. III, pp. 702-703.29. Voir notre biographie d'Alice Regnault, pouse Mirbeau, d. l'cart, Alluyes, 1993.30. Voir l'article de Pierre Michel sur "La Bataille du Foyer" dans la Revue d'histoire du

    thtre, 1991-III., pp. 195-230.31. "La Fille lisa",L'Ordre de Paris, 25 mars 1877 (reproduit dans les Cahiers Goncourt

    n 2, printemps 1994).32.Ibidem.33. Voir l'tude de Pierre Michel sur "LesFarces et moralits", dans les Actes du colloque

    Octave Mirbeau d'Angers, Presses de l'Universit d'Angers, 1992, pp. 379-392.34. Interview par Maurice Le Blond,L'Aurore, 7 juin 1903.35. Voir l'introduction auJardin des supplices, paratre dans notre dition des romans de

    Mirbeau dans la collection Bouquins ; et notre article "En mission : premire mouture duJardin dessupplices", dans les Cahiers Octave Mirbeau, n 1, mai 1994.

    36.Lettre Tolsto, l'cart, Alluyes, 1991, p. 15.37. Sur "Mirbeau romancier", voir notre prface ses romans, paratre ; et le chapitre VI de

    notre thse surLes Combats d'Octave Mirbeau.38. Publi par P. Michel et J.-F. Nivet aux ditions du Lrot (1989).39. "Le Chemin de la croix",Le Figaro, 16 janvier 1888 (Combats esthtiques de Mirbeau,

    Sguier, 1993, t. I, p. 345).40. Combats esthtiques, t. II, p. 402, p. 444 et p. 482.41. "Le Chemin de la croix", loc. cit.42. Correspondance avec Claude Monet, d. du Lrot, Tusson, 1990, p. 50.

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    43. Voir Pierre Michel, "Octave Mirbeau et Jean Grave", prface de la CorrespondanceMirbeau-Grave, d. du Fourneau, 1994.

    44. Gustave Geffroy, "Octave Mirbeau",Le Journal, 19 dcembre 1897.45. "Effarant" : tel est le titre de l'article que Jean Jaurs a consacr aux Mauvais bergers

    dansLa Petite rpublique du 25 dcembre 1897.

    46. "Un Mot personnel", loc. cit.47. Lettre de Jean Grave Octave Mirbeau du 18 janvier 1898 (Correspondance Mirbeau-Grave, pp. 86-87).

    48.Les Temps nouveaux, suppl. au n 18, 1900, p. 96.49. Publies par nos soins, aux d. du Limon, Montpellier, 1989.50. Voir Andr Comte-Sponville, Trait du dsespoir et de la batitude, 1982.