20
Pierre-Yves HANNUS Inspecteur du travail DIRECCTE IDF-UT93 4 ème unité de contrôle 1, avenue Youri Gagarine 93016 Bobigny Cedex BOBIGNY, le 23 août 2017 Par courriel : [email protected] Nos Réf : DIVERS / EELV JDS03352 - EML/HC/HC Monsieur l’inspecteur, Je fais suite à l’audition de Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine WARMAN qui sollicitent de l’Inspection du travail qu’elle refuse d’accorder l’autorisation de licenciement demandée par EUROPE ECOLOGIE LES VERTS (EELV). Ce refus est justifié par les éléments de fait et de droit suivants : I. LES FAITS ET LA PROCEDURE 1. Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine WARMAN ont respectivement été engagées en qualité d’attachée de presse et de gestionnaire administrative.

Pierre-Yves HANNUS Inspecteur du travail …...Pierre-Yves HANNUS Inspecteur du travail DIRECCTE IDF-UT93 4ème unité de contrôle 1, avenue Youri Gagarine 93016 Bobigny Cedex BOBIGNY,

  • Upload
    others

  • View
    71

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Pierre-Yves HANNUS Inspecteur du travail DIRECCTE IDF-UT93 4ème unité de contrôle 1, avenue Youri Gagarine 93016 Bobigny Cedex

BOBIGNY, le 23 août 2017 Par courriel : [email protected]

Nos Réf : DIVERS / EELV JDS03352 - EML/HC/HC

Monsieur l’inspecteur, Je fais suite à l’audition de Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine WARMAN qui sollicitent de l’Inspection du travail qu’elle refuse d’accorder l’autorisation de licenciement demandée par EUROPE ECOLOGIE LES VERTS (EELV). Ce refus est justifié par les éléments de fait et de droit suivants :

I. LES FAITS ET LA PROCEDURE 1. Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine WARMAN ont respectivement été engagées en qualité d’attachée de presse et de gestionnaire administrative.

2

Madame Géraldine WARMAN exerce le mandat de déléguée du personnel depuis le 31 janvier 2017. Madame Marjorie DELMOND a été désignée représentante de la section syndicale CGT par lettre du 28 novembre 2016 et exerce en outre le mandat de déléguée du personnel depuis le 31 janvier 2017.

Pièce n° 10 : P.V. des élections professionnelles en date du 31 janvier 2017 Pièce n° 8 : Lettre de la CGT désignant Mme DELMOND en qualité de représentante de

la section syndicale 2. Par lettre remise en main propre le 3 juillet 2017, EELV a convoqué les déléguées du personnel à une réunion sur un projet de réorganisation et de licenciement collectif pour motif économique de moins de 10 salariés en application de l’article L. 1233-8 du code du travail. Au cours de cette réunion qui s’est tenue le 10 juillet 2017, les déléguées du personnel ont été consultées sur un projet de licenciement pour motif économique de 5 salariés sur moins de 30 jours. La note économique remise aux déléguées du personnel invoque la nécessité de procéder au licenciement pour motif économique des salariés en raison :

- D’une « baisse significative » des recettes d’EELV ; - De l’ « assèchement de la trésorerie » ; - De l’endettement à l’égard des régions EELV et de l’impossibilité de recourir aux

finances régionales. 3. C’est dans ce contexte que le présent litige est soumis à l’appréciation de l’Inspection du travail.

II. SUR LE NECESSAIRE REFUS D’AUTORISER LE LICENCIEMENT Madame Marjorie DELMOND conteste particulièrement son licenciement en raison de l’absence de précision par l’employeur de l’ensemble des mandats qu’elle a exercés (A). En toute hypothèse, Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine WARMAN contestent leur licenciement en raison :

- des irrégularités entourant la procédure d’information et de consultation des déléguées du personnel (B),

- de l’absence de pouvoir de licencier du bureau exécutif d’EELV (C), - de l’absence de tout motif économique justifiant les licenciements (D), - du non-respect de l’obligation de reclassement (E), - du lien avec leur mandat (F), - de l’intérêt général (G).

3

A. Sur l’absence de précision de l’ensemble des fonctions représentatives exercées par Madame Marjorie DELMOND

En droit, L’inspecteur du travail doit s’assurer que le salarié bénéficie de la protection légale. Or, la durée de la protection est fonction de la nature des fonctions représentatives exercées. Dans ce cadre, l’employeur a l’obligation de préciser dans sa demande d’autorisation de licencier l’ensemble des fonctions représentatives qui ont été exercées par le salarié. Cette précision est en outre indispensable afin que l’inspecteur du travail puisse vérifier l’éventuel lien avec le mandat ou l’existence d’un motif tiré de l’intérêt général s’opposant au licenciement. En l’absence de mention de l’ensemble des fonctions représentatives qui ont été exercées par le salarié, la jurisprudence juge que la procédure est entachée d’irrégularité substantielle (CE, 13 décembre 2005, Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’Outre-mer). A cet égard, la circulaire DGT du 30 juillet 2012 relative aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés rappelle que : « L’autorité administrative saisie d’une demande d’autorisation doit préalablement s’assurer de l’existence, à la date de l’engagement de la procédure, d’une protection justifiant sa compétence pour statuer. Cette vérification suppose un recensement précis des mandats brigués, exercés ou antérieurement exercés par le salarié concerné. Ce recensement doit en outre être exhaustif, dans la mesure où l’appréciation par l’autorité administrative se fonde notamment sur les conditions d’exercice des fonctions représentatives, l’omission d’une de ces fonctions dans la demande et dans la décision entachant d’illégalité toute décision d’autorisation ». En l’espèce, La demande d’autorisation de licencier adressée par EELV à l’inspection du travail ne précise pas que Madame Marjorie DELMOND a exercé le mandat de représentante de la section syndicale à compter du 28 novembre 2016. Pièce n° 8 : Lettre de la CGT désignant Mme DELMOND en qualité de représentante de

la section syndicale Ce seul constat suffit à l’Inspection du travail pour refuser l’autorisation de licencier Madame Marjorie DELMOND.

4

B. Sur les vices affectant la procédure d’information et de consultation des déléguées du personnel

En toute hypothèse, la demande d’autorisation de licencier Mesdames DELMOND et WARMAN sera rejetée en raison des irrégularités suivantes entourant la procédure d’information-consultation des déléguées du personnel menée par EELV :

a) Sur l’insuffisance de l’information relative au nombre de ruptures conventionnelles conclues par EELV dans un contexte de réduction des effectifs

En droit, La procédure d’information-consultation des représentants du personnel applicable dépend du nombre de salariés dont le licenciement est envisagé. Cette procédure est plus ou moins souple selon qu’il s’agit du licenciement pour motif économique de moins de 10 salariés (c. trav., art. L. 1233-8 et s.) ou de 10 salariés et plus (c. trav., art. L. 1233-31). A cet égard, dans un arrêt du 9 mars 2011 (Cass. soc. 9 mars 2011, n° 10-11.581), la Cour de cassation a jugé que lorsqu’elles ont une cause économique et s’inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituent la ou l’une des modalités, l’ensemble des ruptures conventionnelles doivent être prises en compte pour déterminer la procédure d’information et de consultation des représentants du personnel applicable. Cette décision se justifie par l’interdiction faite à l’employeur de déroger aux règles d’ordre public et protectrices édictées par le droit du licenciement pour motif économique en ayant recours à des ruptures conventionnelles. En l’espèce, 1. Les déléguées du personnel ont été réunies et consultées au sujet d’un projet de licenciement pour motif économique de moins de 10 salariés. La note d’information remise aux déléguées du personnel précise toutefois (p. 6 § 9) : « Afin de remédier aux difficultés économiques depuis la fin de l’année 2015 et d’assainir la situation économique et financière, un plan d’économies a été adopté en janvier 2016. Ce plan prévoyait un total de 206 k€ en 2016 puis 223 k€ d’économies annuelles à partir de 2017. Il a été scrupuleusement mis en œuvre et s’est traduit par différentes mesures, auxquelles se sont ajoutées un certain nombre de départs par rupture conventionnelle qui ont eu pour effet d’alléger la masse salariale du parti ». Ainsi, l’employeur indique clairement avoir recouru à plusieurs ruptures conventionnelles pour motif économique afin de réduire les effectifs.

5

Cependant, aucune précision n’a été fournie aux déléguées du personnel sur le nombre de départs concernés, de sorte qu’elles n’ont pas été en mesure de contrôler la conformité de la procédure d’information-consultation menée par l’employeur. L’inspecteur du travail constatera que l’information fournie aux représentants du personnel est insuffisante et que, par conséquent, la procédure est substantiellement viciée. 2. Par ailleurs, si après vérification de l’inspection du travail il s’avérait que EELV a recouru à au moins 5 ruptures conventionnelles, portant ainsi le nombre de salariés licenciés à 10 salariés, la procédure d’information-consultation des déléguées du personnel sur la base d’un projet de licenciement pour motif économique de moins de 10 salariés serait à nouveau viciée. En outre, en application de l’article L. 1233-29 du code du travail, en présence d’une procédure d’information-consultation concernant le licenciement de 10 salariés ou plus, l’employeur aurait dû informer et consulter les délégués du personnel au cours de deux réunions. De ce premier chef, la demande d’autorisation de licencier sera refusée.

b) Sur l’insuffisance de l’information relative aux raisons économiques et financières du projet de licenciement collectif

En droit, En vue de l’information-consultation sur le projet de licenciement collectif pour motif économique, l’employeur doit fournir aux représentants du personnel par écrit les informations listées aux articles L. 1233-8 (licenciement de moins de 10 salariés) et L. 1233-31 (licenciement de 10 salariés ou plus) du code du travail. Ces informations comprennent en premier lieu les « raisons économiques et financières du projet de licenciement collectif ». Ces informations sont indispensables aux représentants du personnel afin qu’ils puissent rendre un avis utile. En l’espèce, 1. EELV a indiqué dans la note d’information remise aux délégués du personnel que les licenciements économiques seraient justifiés par des difficultés économiques. Ces difficultés résulteraient principalement :

- De la « baisse très significative des recettes d’EELV » ; - De l’ « assèchement » de la trésorerie ; - De l’endettement à l’égard des régions EELV.

6

Force est cependant de constater d’abord que s’agissant des recettes, EELV se borne à lister les seules recettes issues du financement public, des cotisations des adhérents et du reversement des élus. EELV ne détaille nullement la situation des autres recettes, à savoir les recettes apportées par les commissions, les coopérateurs, les dons et les journées d’été organisées par le parti. 2. Ensuite, EELV ne donne aucune information aux délégués du personnel sur le montant de la trésorerie qui serait « asséchée ». Les représentants du personnel ont été mis dans l’incapacité d’apprécier utilement les affirmations de l’employeur. Enfin, EELV affirme que les régions EELV réclameraient le remboursement des sommes prêtées à l’échelon national en raison de la baisse de leur trésorerie, sans pour autant préciser le montant des trésoreries des régions. 3. Faute d’information sur le montant de l’ensemble des recettes perçues par EELV et l’évolution de la trésorerie du parti sur plusieurs années, les représentants du personnel n’ont pas été mis en mesure d’apprécier l’impact réel et concret de la prétendue baisse de recettes. Cette absence de transparence vicie substantiellement la procédure d’information-consultation des représentants du personnel. De ce deuxième chef, l’autorisation de licencier sera refusée.

c) Sur l’inexactitude des informations relatives à l’effectif d’EELV EELV affirme dans la note économique que l’effectif serait de 9 salariés (p.11). Or, il ressort de la DADS que les membres du bureau exécutif sont également salariés d’EELV.

Pièce n° 6 : DADS d’EELV L’absence d’indication claire du nombre de salariés présents au sein d’EELV vicie également la procédure. De ce troisième chef, l’autorisation de licencier sera refusée.

d) Sur l’illicéité des catégories professionnelles présentées par EELV aux représentants du personnel

En droit, 1. Les articles L. 1233-8 et L. 1233-31 du code du travail disposent que l’employeur doit définir et présenter, dans le document transmis en vue de la réunion avec les représentants

7

du personnel, les catégories professionnelles au sein desquelles des suppressions de postes vont intervenir. C’est au sein de ces catégories que seront appréciés les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Il n’y a que lorsqu’il n’y aucun choix à effectuer entre les salariés susceptibles d’être licenciés que l’employeur n’a pas à respecter de critères d’ordre des licenciements. Tel est le cas lorsque le licenciement vise une catégorie professionnelle dans son ensemble (Cass. soc. 27 mai 1997, n° 95-42.419 ; Cass. soc. 18 décembre 2000, n° 98-44.577 ; Cass. soc. 15 janvier 2003, n° 00-44.930 ; Cass. Soc. 24 janvier 2007, n° 04-41.648). Tel est également le cas lorsque le salarié qui occupe le poste à supprimer est le seul dans sa catégorie professionnelle (Cass. soc. 15 janvier 2003, préc. ; Cass. soc. 13 septembre 2005, n° 03-43.788 ; Cass. Soc. 3 mai 2007, n° 06-40.520). 2. Ceci étant, dans ces deux hypothèses, pour que l’employeur n’ait pas à respecter les critères d’ordre des licenciements, encore faut-il que la définition des catégories professionnelles soit licite. De jurisprudence constante, « la notion de catégories professionnelles, qui sert de base à l’établissement de l’ordre des licenciements, concerne l’ensemble des salariés qui exercent, au sein de l’entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune » (Cass. soc. 13 février 1997, n° 95-16.648, Bull. civ. V, n° 63 ; voir également : Cass. soc. 28 septembre 2010, pourvois n° 09-65.118 et n° 09-65.120,; Cass. soc. 2 avril 2008, n° 07-40.571 ; Cass. soc. 22 janvier 2014, pourvois n° 12-23.045 et n° 12-23.046). Les catégories professionnelles doivent être définies de façon objective et concerner des qualifications et fonctions proches, qui ne permettent pas de cibler des salariés. Une définition trop large ou trop restrictive des catégories professionnelles a pour effet de fausser le jeu des critères d’ordre des licenciements. Ainsi, en scindant artificiellement des fonctions similaires en plusieurs catégories professionnelles, l’employeur ne respecte pas les critères d’ordre des licenciements (voir par exemple : Cass. soc. 27 mai 2015, n° 14-11.688, publié au Bulletin). La Cour de cassation juge que « la catégorie professionnelle ne se réduit pas à un emploi déterminé » (Cass. soc. 12 janvier 2006, n° 04-41.769, Bull. civ. V, n° 13). Dans ce cadre, il appartient à l’administration de vérifier que les catégories professionnelles, servant de base au périmètre des licenciements, regroupent, chacune, l’ensemble des salariés qui exercent au sein de l’entreprise des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune (CE, 30 mai 2016, n° 387798). En l’espèce, 1. EELV a présenté aux déléguées du personnel des catégories professionnelles illicites.

8

Sous couvert de catégorie professionnelle, EELV s’est borné à cibler les emplois des salariés et à opérer un choix subjectif entre les salariés à licencier, à défaut d’application de critères objectifs d’ordre des licenciements. En effet, il résulte de la note d’information remise aux déléguées du personnel (p. 11) que les catégories professionnelles existantes au siège du parti seraient les suivantes :

- Directeur de cabinet, - Attaché de presse, - Rédacteur en chef, - Chargé de mission sur les questions internationales, - Régisseur évènementiel, - Chargé de communication, - Responsable administratif et financier, - Gestionnaire administrative.

A la seule lecture de l’intitulé des catégories professionnelles listées par EELV il apparaît clairement qu’il ne s’agit en réalité que des emplois précis occupés par les salariés. Manifestement, des emplois ont été artificiellement répartis entre plusieurs catégories professionnelles alors qu’ils auraient dû être regroupés au sein d’une seule et même catégorie. La note d’information ne livre pas le début d’une explication sur le mode de définition et de construction des catégories professionnelles arrêtées par l’employeur. Les déléguées du personnel n’ont pas été mis en mesure de vérifier que les catégories professionnelles arrêtées par l’employeur répondent aux exigences légales et n’ont pas pour effet de fausser le jeu des critères d’ordre des licenciements. Le document transmis en vue de la réunion d’information-consultation ne fournissant aucune information sur le mode de définition ni les critères de construction des catégories professionnelles arrêtées, la procédure est entachée d’une irrégularité substantielle. 2. Des catégories professionnelles licites seraient les suivantes :

- communication : directeur de cabinet, rédacteur en chef, attaché de presse, chargé de mission sur les questions internationales et régisseur évènementiel ;

- Administratif/comptabilité : responsable administratif et financier et gestionnaires administratives.

Sur la catégorie professionnelle des emplois en lien avec la communication

S’agissant d’abord de la catégorie professionnelle regroupant les métiers relatifs à la communication du parti, il s’avère que la mission du rédacteur en chef, de l’attaché de presse ou encore du chargé de mission sur les questions internationales est de rédiger essentiellement des notes d’information au profit du secrétariat national, qui s’en sert ensuite lors de sa communication externe, et de gérer les éléments de communication du parti. L’intitulé des postes de ces salariés est totalement trompeur (d’ailleurs EELV ne verse nullement les fiches de poste des salariés) dans la mesure où chacun d’eux est amené à exercer les fonctions des uns et des autres en fonction des besoins et des nécessités du mouvement.

9

Ces salariés ont avant tout une activité militante qui prime sur leurs fonctions salariales, non définies précisément par EELV. A titre d’illustration :

- le « directeur de cabinet » (dont les fonctions précises ne sont nullement définies) réalise aujourd’hui les fonctions dévolues au rédacteur en chef, à l’attaché de presse et au chargé de mission sur les questions internationales ;

- Le régisseur évènementiel assure une grande partie des fonctions de la rédactrice en chef mais également de celles de l’attachée de presse.

Madame Géraldine BOYER, rédactrice en chef, atteste ainsi que : « Exerçant la profession de rédactrice en chef au sein du parti politique EELV depuis 25 ans, mes fonctions professionnelles consistent principalement en la conception et l’exécution de campagnes de communication pour le parti, en la rédaction de textes politiques (veille sur l’actualité, recherche d’informations, coordination d’intervenants rédacteurs, rédaction de journaux, articles, points web, tracts, communiqués, plaquettes, livrets, programmes, réponses à des courriers, etc.) et en la mise en page (création graphique de tracts, affiches, flyers, visuels internet, …). Agée de 50 ans avec 2 enfants à charge et après 25 années d’ancienneté, je fais aujourd’hui l’objet d’une véritable discrimination du fait d’être licenciée alors que :

- D’une part, Monsieur Vincent Madeline, directeur de cabinet, âgé de 25 ans environ, sans enfant, qui a été embauché en CDI au début de l’année 2017 en pleine procédure de départs volontaires est maintenu en poste alors que ses fonctions professionnelles recoupent en très grande partie les miennes (rédaction de textes, communication, coordination) et que dès mon licenciement il a occupé mes fonctions en cours (ex : préparation du programme des journées d’été des écologistes de Dunkerque du 23 au 26 aout 2017) ;

- D’autre part, Monsieur Julien SAGE, chargé de l’évènementiel, âgé d’une 30aine d’années, sans enfant, embauché en CDI il y a environ 5 années est maintenu en poste alors qu’une partie de ses fonctions recoupent également les miennes (rédaction – site web des journées d’été par exemple – graphisme, recherche d’images illustratives, communication évènementiel, …).

Pièce n° 12 : Attestation de Madame BOYER

Madame Marjorie DELMOND, attachée de presse, atteste également que : « Le directeur de cabinet du secrétaire national, Vincent Madeline, depuis son embauche en CDI en janvier 2017, partage une partie de mes fonctions concernant les relations avec la presse, demande d’interview et mise en valeur des positions du parti auprès des journalistes, envoi des communiqués de presse. (…) En outre, Vincent Madeline occupe d’ores et déjà mes fonctions, alors que mon licenciement n’est pas effectif ».

Pièce n° 11 : Attestation de Madame DELMOND

10

Ainsi, les fonctions de ces quatre salariés sont similaires et révèlent l’existence d’une formation commune. Il n’existe pas de barrière stricte entre les fonctions de ces salariés. Ajoutons que, de l’aveu de l’employeur, après licenciement du rédacteur en chef, le directeur de cabinet aura bien vocation à réaliser les fonctions de la rédactrice en chef et de l’attachée presse (note économique, p. 10 § 2.2.2). Il n’existe ainsi aucune justification à l’exclusion du directeur de cabinet de la catégorie professionnelle des salariés concernés par le licenciement économique.

Sur la catégorie professionnelle des emplois en lien avec le pôle administratif S’agissant ensuite de la catégorie professionnelle administratif/comptabilité, de l’aveu encore de l’employeur, les trois salariés concernés faisaient partie du même pôle administratif et comptable (note économique, p. 9). Il est donc étonnant que lors de la construction des catégories professionnelles, l’employeur ait choisi d’exclure le « responsable administratif et financier », qui n’est rien d’autre que le comptable. Or, aussi bien le comptable que le gestionnaire paie ont assurément une formation commune, peu important les fonctions exercées à la demande de l’employeur. D’ailleurs, une nouvelle fois, de l’aveu de l’employeur, après suppression des postes de gestionnaire paie et de standardiste, les tâches de ces salariés seront confiées au comptable (note économique, p. 11). 3. En l’absence de catégorie professionnelle licite, EELV n’a pas consulté les représentants du personnel sur les critères d’ordre des licenciements et a choisi de licencier les 5 salariés les plus âgés, les plus anciens et ayant des enfants à charge :

- Monsieur Constantin FEDOROVSKI, chargé des relations internationales, 61 ans et 28 ans d’ancienneté ;

- Madame Géraldine BOYER, rédactrice en chef, âgée de 50 ans et 25 ans d’ancienneté ;

- Madame Géraldine JOURNEUX, gestionnaire administrative, âgée de 48 ans et 18 ans d’ancienneté ;

- Madame Marjorie DELMOND, attachée de presse, 45 ans et 18 ans d’ancienneté ; - Madame Géraldine WARMAN, gestionnaire administrative, âgée de 42 ans et 17 ans

d’ancienneté. Par ailleurs, il convient de préciser que l’employeur, qui avait initialement embauché le directeur de cabinet en CDD, a décidé de lui proposer un CDI à compter du 1er janvier 2017, malgré le contexte de réduction d’effectif.

Pièce n° 5 : Courriel de contestation de Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine BOYER du 15 décembre 2016

EELV a donc clairement choisi de préserver le poste du directeur de cabinet, âgé d’une vingtaine d’années, au détriment du poste de Madame BOYER, rédactrice en chef, ou du poste de Madame DELMOND, attachée de presse, raison pour laquelle les catégories professionnelles ont été illicitement construites.

11

De même, EELV a fait le choix de préserver le poste du régisseur évènementiel, âgé d’une trentaine d’années, là encore au détriment du poste de Madame BOYER. Partant, et de ce quatrième chef, la demande d’autorisation de licencier sera refusée en raison de l’insuffisance des informations communiquées aux déléguées du personnel sur la construction des catégories professionnelles et de l’illicéité de cette construction.

C. Sur l’absence de pouvoir de licencier du bureau exécutif d’EELV

En droit, 1. EELV constitue un mouvement politique doté de statuts et d’un règlement intérieur. Le fonctionnement du parti et des organes du parti est entièrement régi par ces textes. Au sein du parti, c’est le conseil fédéral qui prend les décisions relatives au fonctionnement du parti conformément à l’article 27 des statuts : « Le conseil fédéral est l’instance dirigeante de la structure politique nationale d’EELV. Le conseil fédéral est l’instance chargée de fixer les orientations politiques (…). Il vote le budget et approuve les comptes. Le conseil fédéral a le pouvoir d’ester en justice au nom d’EELV ».

Pièce n° 1 : Statuts d’EELV Le bureau exécutif a pour seul mandat de veiller à l’exécution des décisions du conseil fédéral, conformément à l’article 30 des statuts : « Le bureau exécutif national assure l’exécution des décisions du parti, ainsi que le fonctionnement régulier de EELV dans les conditions fixées par le règlement intérieur. Le bureau exécutif national assure la permanence politique du parti, dans le respect des décisions du conseil fédéral, des congrès et des référendums ». 2. S’agissant plus particulièrement du budget du parti, l’article II-3-13 du règlement intérieur précise : « Le conseil fédéral vote chaque année le budget national d’EELV, sur proposition du bureau exécutif et avis de la commission finances. Le conseil fédéral peut procéder en cours d’année à des modifications budgétaires après avis de la commission finances ».

Pièce n° 2 : Règlement intérieur d’EELV Ainsi, le bureau exécutif a pour mandat d’exécuter les décisions du conseil fédéral, dans le cadre du budget approuvé par le conseil fédéral.

12

En l’espèce, 1. Par décision du 10 janvier 2016, le conseil fédéral a :

- Approuvé l’objectif du bureau exécutif de réduire les dettes du national de façon significative d’ici fin 2017 ;

- Validé les budgets prévisionnels pour 2016 et 2017 ; - Confirmé par conséquent les mesures d’économie complémentaires à ces budgets

présentées par le bureau exécutif : o « mandate le BE pour envisager en 2016 la réduction de la masse salariale de

30 %. Demande au BE, dans la perspective regrettable de devoir réduire la masse salariale, de conduire avec les salariés la concertation et la procédure souhaitable et nécessaire (compte-rendu d’étape écrits, bilan concret, information à chaque CF…) ».

Puis, lors du conseil fédéral des 10 et 11 décembre 2016, le bureau exécutif a présenté un nouveau budget prévisionnel et rectificatif pour les années 2017 à 2019 prévoyant notamment un maintien de la masse salariale à hauteur de 7,1 équivalents temps plein. Ce nouveau budget a également été adopté par le conseil fédéral.

Pièce n° 3 : Compte-rendu de la réunion du conseil fédéral d’EELV des 10 et 11 décembre 2016

2. Le bureau exécutif n’a nullement respecté le mandat donné par le conseil fédéral. Le bureau exécutif a entrepris de procéder à plusieurs ruptures conventionnelles en 2017 et entend aujourd’hui licencier 5 salariés supplémentaires, réduisant ainsi la masse salariale de plus de 70 %. A l’issue de la réorganisation souhaitée par l’employeur et des licenciements, l’effectif serait au plus de l’équivalent de 3,5 temps plein (soit 2 temps plein, un mi-temps et un 3/4 de temps). Le bureau exécutif n’a donc pas pouvoir pour procéder au licenciement des salariés, faute de mandat donné par le conseil fédéral dans le cadre d’un budget rectificatif, conformément aux statuts et au règlement intérieur. Partant, de ce cinquième chef, l’autorisation de licencier sera refusée.

D. Sur l’absence de motif économique justifiant le licenciement En droit, 1. Il résulte des nouvelles dispositions de l’article L. 1233-3 du code du travail que : « Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

13

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés. Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à : a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ; b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ; c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ; d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ; 2° A des mutations technologiques ; 3° A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ; 4° A la cessation d’activité de l’entreprise. La matérialité de la suppression, de la transformation d’emploi ou de la modification d’un élément essentiel du contrat de travail s’apprécie au niveau de l’entreprise. Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l’exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, résultant de l’une des causes énoncées au présent article ». 2. Seules des difficultés sérieuses, présentes au jour de la rupture du contrat de travail, peuvent justifier un licenciement pour motif économique (cass. soc., 30 mars 2010, n° 09-40.068).

En l’espèce,

Sur la prétendue baisse significative des recettes et l’assèchement de la

trésorerie 1. EELV justifie d’abord l’existence de difficultés économiques en raison de la baisse significative des recettes du parti. Selon l’information communiquée par l’employeur dans sa note économique (p. 4-5), le total des recettes pérennes seraient de :

- 2015 : 3.797 k€ - 2016 : 3.342 k€ - 2017 (estimation) : 3.135 k€ - 2018 (prévisionnel) : 1.370 k€

Il résulte de cette note que l’employeur entend en premier lieu licencier ses salariés sur la base d’estimations et de prévisions, ce qui n’est pas sérieux.

14

En second lieu, là où EELV entend relever une baise « significative » des trois recettes listées, il apparaît sur trois ans (2015-2017) une baisse légère de 600.000 euros en comparaison du montant total des recettes qui reste supérieur à 3 millions d’euros, ce qui n’a rien d’alarmant. Il sera également démontré plus avant que cette baisse des recettes n’a nullement impacté les résultats financiers du parti. 2. En réalité, EELV fonde les licenciements essentiellement sur les prévisions de l’année 2018. Or, ces prévisions ne peuvent en aucun cas justifier des licenciements dans la mesure où EELV n’intègre nullement les prochaines échéances électorales :

- Européennes en 2019 ; - Municipales en 2019 ; - Départementales en 2021 ; - Régionales en 2021.

Nul ne sait quel sera le succès du parti aux prochaines élections européennes et locales. 3. Surtout, à la date des licenciements en juillet 2017, EELV ne justifie pas de difficultés sérieuses. En effet, le financement public au titre des législatives 2012 (2,086 millions par an) est effectif jusqu’en mars 2018 et le résultat d’exploitation d’EELV a non seulement été positif sur les trois derniers exercices comptables mais il a également augmenté. Contrairement aux affirmations d’EELV, le parti est loin de l’état de cessation des paiements. Il suffit de lire le rapport des commissaires au compte pour l’exercice clos au 31 décembre 2016 pour constater que :

- Le total des produits représente 9.118.003 euros, pour des charges représentant 6.679.864 euros ;

- Le résultat d’exploitation représente un excédent de 2.438.139 euros ;

- La trésorerie représente (compte financiers à l’actif) plus de 5 millions d’euros alors que la dette envers les banques et les fournisseurs ne représente que 1.331.570 + 825.227 = 2.156.797 euros ;

- La trésorerie a par ailleurs augmenté de 2,9 millions d’euros (et non pas de 2 millions

d’euros) à la suite de la vente du siège du parti et de 378.000 euros à la suite de la vente de l’immeuble située rue d’Arcueil à Paris 13ème.

Pièce n° 4 : Bilan EELV au 31 décembre 2016

Par rapport à 2015 (année de référence choisie par EELV), les résultats d’EELV sont en nette amélioration en 2017 ainsi qu’il ressort de la publication des comptes d’EELV au titre de l’exercice clos 2015 :

- Le total des produits représentait en 2015 la somme de 8.747.272 € ;

15

- Le total des charges représentait en 2015 la somme de 7.589.180 euros ;

- Le résultat d’exploitation qui était également excédentaire en 2015 représentait

1.158.292 euros.

Pièce n° 13 : Publication des comptes d’EELV au titre de l’année 2015 Ainsi, en 2017, par rapport à 2015 :

- Le total des produits (correspondant au « chiffre d’affaires » pour une entreprise) a augmenté de 4,23 % ;

- Le résultat d’exploitation a quant à lui augmenté de 110 % ! Par ailleurs, à la lecture du compte-rendu du budget prévisionnel 2017-2019, il ressort que le remboursement des régions (2% par an) et des prêts bancaires ne représente que 167.000 euros en 2017, puis 47.000 euros en 2018 et 2019.

Pièce n° 3 : Compte-rendu de la réunion du conseil fédéral d’EELV des 10 et 11 décembre 2016

Il est clairement établi qu’EELV :

- est loin de l’état de cessation des paiements ;

- dispose d’une importante trésorerie couvrant largement la légère baisse des trois recettes listées dans la note économique, baisse qui n’a nullement impacté les résultats financiers du parti ;

- a vu ses résultats financiers augmenter considérablement depuis 2015 contrairement

à ce qui est affirmé dans la demande d’autorisation de licencier. L’ « assèchement » affirmé de la trésorerie n’est pas réel pas plus que les difficultés économiques, raison pour laquelle ni la note économique ni la demande d’autorisation de licencier adressée à l’Inspection du travail ne sont transparentes sur ce point.

Sur l’endettement envers les régions EELV affirme encore que l’endettement envers les régions accentuerait les difficultés rencontrées par le parti au niveau national. Cet argument ne peut nullement justifier les licenciements. Il résulte des statuts d’EELV que le parti est organisé sous forme de fédération dirigée par un conseil fédéral au niveau national. Le financement public est alloué au seul mouvement EELV national qui, ensuite, selon des décisions discrétionnaires du conseil fédéral, répartit la somme allouée entre le national et les régions. D’une année à une autre la répartition, et donc la « dette » du national vers le régional, peut être modifiée, atténuée ou augmentée.

16

Cette « dette » ne constitue qu’une opération comptable au sein d’un même mouvement qui constitue un tout indivisible. La somme allouée au parti appartient au mouvement politique dans sa globalité.

Pièce n° 13 : Publication des comptes d’EELV au titre de l’année 2015 Enfin, il résulte du budget prévisionnel 2017-2019 présenté par le bureau exécutif que le remboursement de la « dette » aux régions ne représente que 2% par an.

Pièce n° 3 : Compte-rendu de la réunion du conseil fédéral d’EELV des 10 et 11 décembre 2016 (p. 31)

Cette « dette » ne constitue donc pas une contrainte économique réelle qui pèse sur le parti et on voit mal comment une région agirait en cessation des paiements à l’égard du mouvement dont elle dépend économiquement et politiquement.

Sur la seule volonté de réaliser des économies en dehors de toute difficulté économique

EELV entend en réalité tirer profit des mauvais résultats aux élections présidentielle et législatives 2017 pour réaliser des économies d’échelle en vue de mener à bien de nouveaux chantiers politiques. Pour preuve, il suffit de lire le compte-rendu de la réunion du conseil fédéral des 11 et 12 décembre 2016 d’EELV pour constater que le bureau exécutif a eu pour mandat de dégager des économies sur le budget 2017-2019 afin de financer un certain nombre de chantiers politiques. Les licenciements économiques voulus par le bureau exécutif n’ont pour but que de parvenir à cette économie. Or, le licenciement économique justifié par le seul souci de faire des économies n’est pas fondé (cass. soc., 15 décembre 1998, n° 96-44.571 ; cass. soc., 9 décembre 2003, n° 01-46.228). Il résulte de tout ce qui précède que le motif économique invoqué par EELV n’est définitivement pas justifié. Partant, de ce sixième chef, l’autorisation de licencier sera refusée.

E. Sur le non-respect de l’obligation de reclassement 1. L’employeur doit démontrer la matérialité des efforts et démarches entrepris pour reclasser les salariés préalablement à leur licenciement (CE, 31 juillet 1992, n° 105.670). Cet effort de reclassement doit s’apprécier au niveau de l’entité dans sa globalité. EELV ne constituant pas une entreprise, les notions classiques relatives au reclassement au sein de l’ « entreprise » ou du « groupe » ne sont pas adaptées.

17

Cependant, la notion de « groupe » n’est plus subordonnée par la jurisprudence administrative et judiciaire à la reconnaissance de l’existence d’une société-mère et de relations capitalistiques entre différentes sociétés (CE, 5 décembre 2008, n° 299.166, HGP GAT FILATURES). Cette notion s’apprécie de manière extensive (voir par exemple cass. soc., 23 mai 1995, n° 94-41.250 pour le cas d’une association). Le seul critère à prendre en compte aujourd’hui est la possibilité de permutation du personnel entre des entités distinctes (Cass. soc. 19 mai 1988, n° 96-41.295). 2. Selon une jurisprudence constante, la recherche de reclassement doit être précise et individualisée (CE, 29 juin 2009, n° 307.964 ; CE, 28 janv. 2004, n° 257.130, CE, 12 octobre 2006, n° 287.489). L’employeur doit rechercher les possibilités de reclasser le salarié aux meilleures conditions possibles compte tenu des postes disponibles. En vue de rechercher loyalement le reclassement du salarié, l’employeur doit prendre en compte sa qualification, sa rémunération, ses responsabilités et la nature de l’emploi. La jurisprudence sanctionne de manière constante l'employeur qui se borne à adresser une lettre circulaire aux autres sociétés du groupe (Cass. soc. 17 octobre 2001, n° 99-42.464 ; Cass. Soc. 13 février 2008, n° 06-44.984) ou à notifier le licenciement sans attendre la réponse des entreprises du groupe qu'il avait sollicitées (Cass. soc. 21 mars 2001, n° 99-43.108). En l’espèce, Dans la note économique présentée aux déléguées du personnel, EELV s’est engagé à rechercher le reclassement des salariés au sein de l’ensemble du mouvement, puisque le personnel est effectivement permutable entre les diverses entités du mouvement. Cette recherche concerne 26 structures régionales et 3 institutions politiques. En vue de cette recherche, par lettre datée du 12 juillet 2017, EELV a sollicité toutes ces entités. Cependant, EELV s’est borné à adresser une simple lettre circulaire à ces entités sans aucune précision sur la rémunération des salariés. EELV a en outre laissé aux diverses entités un délai de réponse restreint au 18 juillet (soit 6 jours, voire moins en raison de la durée de l’envoi postal). Sans attendre l’ensemble des réponses de ces entités, EELV a enfin entrepris de saisir l’Inspection du travail en vue de licencier les déléguées du personnel. Il résulte des faits qu’EELV n’a mené aucune recherche loyale et sérieuse de reclassement. EELV avait pour seul démarche de se préconstituer des preuves en vue de faire croire à un semblant de recherche de reclassement.

18

En conséquence, l’autorisation de licencier sera rejetée également de ce septième chef.

F. Sur le lien avec le mandat En droit, De jurisprudence constante, la demande d’autorisation de licencier doit être rejetée en cas de lien avec le mandat du salarié protégé ou son appartenance syndicale (CE, 30 octobre 2009, n° 298.398). Plusieurs indices peuvent révéler l’existence d’une discrimination :

- L’absence manifeste de motif économique (CE, 17 juin 1985, n° 39.310) ; - Une proportion anormale de salariés protégés affectés par une mesure de

licenciement ou de départ (CE, 25 mai 1994, n° 100.791) ; - L’absence de recherche sérieuse et loyale de reclassement (CE, 15 décembre 1991,

n° 169.792). En l’espèce, Il a été démontré que les licenciements souhaités par EELV ne reposent sur aucun motif économique sérieux. Il a également été démontré que l’employeur n’a pas sérieusement cherché à construire des catégories professionnelles licites (pour se laisser le choix des salariés à licencier). Il a également été démontré que l’obligation de reclassement n’a pas été sérieusement respectée. Ces diverses irrégularités révèlent une volonté manifeste d’EELV de se séparer des salariés protégés dans un contexte de renouvellement social et politique souhaité par le bureau exécutif. Ainsi, EELV a rompu conventionnellement le contrat de travail de Madame Najat LEBLEGUET, déléguée du personnel lors des dernières élections professionnelles, avant le début de la procédure de licenciement collectif pour motif économique. EELV a licencié pour motif économique Madame Géraldine BOYER, qui a successivement exercé les mandats de déléguée du personnel et représentante de la section syndicale. EELV souhaite encore licencier dans la présente procédure Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine WARMAN. En un temps très bref, EELV a rompu et souhaite la rupture des contrats de travail de l’ensemble des salariés qui ont exercé des fonctions représentatives. Il résulte de ce qui précède que la demande d’autorisation de licencier Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine WARMAN est en lien avec leur mandat.

19

Cette demande sera donc refusée de ce huitième chef.

G. Sur le nécessaire refus de l’autorisation de licencier au nom de l’intérêt général En droit, De jurisprudence constante, l’Inspection du travail peut refuser le licenciement d’un salarié protégé au nom de l’intérêt général. Le motif d’intérêt général peut ainsi être retenu dans le souci de maintenir une représentation du personnel au sein de l’entité (CE, 11 février 2005, n° 247.673). En l’espèce, Il ne reste aujourd’hui au sein d’EELV que deux déléguées du personnel. Or, l’employeur sollicite l’autorisation de licencier ces deux représentants du personnel dans un contexte où la présence de salariés protégés est plus que jamais nécessaire au sein d’un mouvement poursuivant une course effrénée vers la recherche de nouvelles économies en vue des élections présidentielle et législatives 2022, au détriment de la stabilité de l’emploi interne. Notons par ailleurs qu’EELV a fonctionné avec une masse salariale plus importante à des époques où le parti ne connaissait pas un grand succès électoral. La présence de représentants du personnel est donc nécessaire afin que les salariés puissent interroger le bureau exécutif sur ses décisions. En cas d’autorisation de licencier, le bureau exécutif sera délié de toute contrainte résultant du mandat des salariés protégés. Au nom de l’intérêt général, et de ce dernier chef la demande d’autorisation de licencier sera rejetée.

* * *

Il résulte de l’analyse précise des arguments avancés par EELV qu’il y a lieu de refuser d’autoriser les licenciements de Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine Warman qui reposent sur des éléments parfaitement fantaisistes.

* * *

20

Les pièces visées sont annexées à la présente.

Je reste à votre disposition pour vous fournir toutes les informations que vous jugerez utiles à l’examen de la demande d’autorisation de licenciement formulée par EELV.

Je vous prie de croire, Monsieur l’inspecteur du travail, à l’assurance de ma respectueuse considération.

Hugues CIRAY

Liste des pièces annexées à la présente :

1. Statuts d’EELV

2. Règlement intérieur d’EELV

3. Compte-rendu de la réunion du conseil fédéral d’EELV des 10 et 11 décembre 2016

4. Bilan EELV au 31 décembre 2016

5. Courriel de Mesdames Marjorie DELMOND et Géraldine BOYER du 15 décembre 2016

6. DADS d’EELV

7. Décision du conseil fédéral des 9 et 10 janvier 2016

8. Lettre de la CGT désignant Mme DELMOND en qualité de représentante de la section syndicale

9. Lettre de ASSO SYDNICAT désignant Mme BOYER en qualité de représentant de la section syndicale

10. P.V. des élections professionnelles en date du 31 janvier 2017

11. Attestation de Madame DELMOND

12. Attestation de Madame BOYER

13. Publication des comptes d’EELV au titre de l’année 2015