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Revue des Maladies Respiratoires (2010) 27, 67—71 CAS CLINIQUE Pleurésie exsudative révélant un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale Exsudative pleurisy revealing an infected aneurysm of the abdominal aorta J. Péron, K. Bouledrak, A. Grouet, L. Gerinière, P.-J. Souquet Service de pneumologie, centre hospitalier Lyon Sud, hospices civils de Lyon, 165, chemin du Grand-Revoyet, 69310 Pierre-Bénite, France Rec ¸u le 17 avril 2009 ; accepté le 16 aoˆ ut 2009 Disponible sur Internet le 1 d´ ecembre 2009 MOTS CLÉS Anévrisme infectieux ; Anévrisme de l’aorte abdominale ; Pleurésie hémorragique Résumé Introduction. — La survenue d’une pleurésie sérohémorragique est un mode de révélation rare, souvent méconnue de rupture d’un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale. Observation. — Un homme de 84 ans a été adressé pour prise en charge d’un épanchement pleural gauche sérohémorragique associé à un syndrome infectieux. Le patient avait présenté deux mois auparavant une septicémie à staphylocoque résistant à la méticilline dont le point de départ avait été un mal perforant plantaire. Le patient était apyrétique et ne présentait pas de douleur abdominale. Le scanner thoraco-abdominal réalisé sans injection de produit de contraste montrait une masse abdominale péri-aortique ayant fait évoquer une pathologie tumorale. Un scanner injecté et une ponction péri-anévrismale ont confirmé qu’il s’agissait d’un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale en voie de rupture dans la plèvre gauche. L’évolution a été défavorable malgré un traitement médical par double antibiothérapie. Conclusion. — Devant une pleurésie sérohémorragique et à plus forte raison associée à un syn- drome infectieux mal expliqué, un anévrisme de l’aorte abdominale doit être recherché. Le traitement chirurgical de l’anévrisme doit être pratiqué à chaque fois que l’état général, la localisation et la morphologie de l’anévrisme le permettent. © 2009 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P.-J. Souquet). 0761-8425/$ — see front matter © 2009 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rmr.2009.11.001

Pleurésie exsudative révélant un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale

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Page 1: Pleurésie exsudative révélant un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale

Revue des Maladies Respiratoires (2010) 27, 67—71

CAS CLINIQUE

Pleurésie exsudative révélant un anévrismeinfectieux de l’aorte abdominale

Exsudative pleurisy revealing an infected aneurysm of the abdominal aorta

J. Péron, K. Bouledrak, A. Grouet,L. Gerinière, P.-J. Souquet ∗

Service de pneumologie, centre hospitalier Lyon Sud, hospices civils de Lyon,165, chemin du Grand-Revoyet, 69310 Pierre-Bénite, France

Recu le 17 avril 2009 ; accepté le 16 aout 2009Disponible sur Internet le 1 decembre 2009

MOTS CLÉSAnévrismeinfectieux ;Anévrisme de l’aorteabdominale ;Pleurésiehémorragique

RésuméIntroduction. — La survenue d’une pleurésie sérohémorragique est un mode de révélation rare,souvent méconnue de rupture d’un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale.Observation. — Un homme de 84 ans a été adressé pour prise en charge d’un épanchementpleural gauche sérohémorragique associé à un syndrome infectieux. Le patient avait présentédeux mois auparavant une septicémie à staphylocoque résistant à la méticilline dont le pointde départ avait été un mal perforant plantaire. Le patient était apyrétique et ne présentaitpas de douleur abdominale. Le scanner thoraco-abdominal réalisé sans injection de produitde contraste montrait une masse abdominale péri-aortique ayant fait évoquer une pathologietumorale. Un scanner injecté et une ponction péri-anévrismale ont confirmé qu’il s’agissaitd’un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale en voie de rupture dans la plèvre gauche.L’évolution a été défavorable malgré un traitement médical par double antibiothérapie.Conclusion. — Devant une pleurésie sérohémorragique et à plus forte raison associée à un syn-

drome infectieux mal expliqué, un anévrisme de l’aorte abdominale doit être recherché. Letraitement chirurgical de l’anévrisme doit être pratiqué à chaque fois que l’état général, la

ie de l’anévrisme le permettent.

localisation et la morpholog © 2009 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (P.-J. Souquet).

0761-8425/$ — see front matter © 2009 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.rmr.2009.11.001

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KEYWORDSInfected aneurysm;Aneurysm of theabdominal aorta;Haemorrhagicpleurisy

SummaryIntroduction. — The development of a sero-sanguinous pleural effusion is a rare, often overloo-ked, manifestation of a ruptured infected aneurysm of the abdominal aorta.Case report. — A man of 84 years was referred for management of a left-sided pleural effusionassociated with symptoms of infection. He had presented two months previously with methicillinresistant staphylococcal septicaemia, the origin of which was a plantar ulcer. The patient wasapyrexial and had no abdominal pain. A thoraco-abdominal CT scan without contrast showed aperi-aortic abdominal mass suggesting a tumour. A contrast enhanced scan and peri-aneurysmalaspiration showed that it was an infected aneurysm of the abdominal aorta that had rupturedinto the left pleural cavity. The progress was unfavourable despite double antibiotic therapy.Conclusion. — In the face of a sero-sanguinous pleurisy, particularly if associated with unexplai-ned symptoms of infection, a search should be made for an abdominal aortic aneurysm. Surgicaltreatment of the aneurysm should be undertaken if the general condition of the patient andthe localisation and morphology of the aneurysm permit.© 2009 SPLF. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ntroduction

a présentation clinique des anévrismes infectieux de’aorte abdominale est souvent atypique. Le tableaulassique associant fièvre, douleur abdominale et masse bat-ante abdominale n’est présent que dans la moitié des cas.ous rapportons le cas d’un patient de 84 ans présentantne pleurésie gauche sérohémorragique associée à un syn-rome infectieux initialement au second plan, révélatrice’un anévrisme infectieux de l’aorte abdominale en voie deupture dans la cavité pleurale. Ce mode de révélation inha-ituelle doit être connu afin de ne pas retarder le diagnostict la mise en route du traitement médical et chirurgical quie doit d’être précoce.

bservation

. M., âgé de 84 ans, a été adressé le 8 janvier 2009 dansotre service de pneumologie pour la prise en charge’un épanchement pleural exsudatif et la découverte d’uneasse abdominale péri-aortique suspecte.Dans les antécédents du patient, on retrouvait : une

ypertension artérielle, un tabagisme sevré depuis uneingtaine d’année, une dyslipidémie traitée, une arythmieomplète par fibrillation auriculaire traitée par antivita-ine K (AVK), une artériopathie oblitérante des membres

nférieurs sévère, une sténose des troncs supra-aortiques,n diabète insulinodépendant avec complications micro-asculaires importantes, notamment une néphropathieiabétique avec insuffisance rénale chronique (créatininé-ie de base autour de 150 �mol/l), une rétention aiguë’urine en août 2007 traitée par résection trans-urétrale derostate, avec une prostatite à pyocyanique dans les suitespératoires traitée quatre semaines par Ceftazidime IV,ne hémorragie digestive basse non expliquée en 2007 avec

églobulisation.

En novembre 2008, le patient avait présenté une sep-icémie à Staphylococcus aureus résistant à la méticilline,ont le point de départ était un mal perforant plantaire duied droit. Une IRM du pied avait éliminé une ostéite. Cet

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pisode avait été traité par ceftriaxone, ofloxacine et gen-amycine quatre jours, remplacés par teicoplanine et acideusidique du fait d’une aggravation de l’insuffisance rénalet de l’adaptation nécessaire à l’antibiogramme pour uneurée totale de 21 jours.

Le 30 décembre, le patient a consulté aux urgences pourne dyspnée associée à une altération de l’état généralans fièvre. Le patient était traité depuis une semaine enmbulatoire par amoxicilline—acide clavulanique pour uniagnostic d’infection pulmonaire. Le patient ne décrivaitas de douleur abdominale. La radiographie de thorax aévélé un épanchement pleural gauche abondant. La bio-ogie sanguine a mis en évidence une hyperleucocytose

polynucléaires neutrophiles (15 800/mm3 globules blancsont 13 000/mm3 polynucléaires neutrophiles), un syndromenflammatoire (CRP à 205 mg/l), une anémie arégénérativeormocytaire avec une hémoglobine à 8,3 g/dl, une insuf-sance rénale avec une créatinine à 182 �mol/l et uneytolyse hépatique (ASAT à deux fois la normale et ALATtrois fois la normale). Le patient a été traité par cef-

riaxone et lévofloxacine à son arrivée aux urgences, avantue n’aient été réalisées d’hémocultures ou de ponctionleurale. Une seule hémoculture est revenue positive àtaphylocoque doré résistant à la méticilline. Les AVK ontté arrêtés au profit de l’héparine calcique. Les ponctionsleurales itératives ont ramené un liquide sérohématique,xsudatif avec un taux de protéine autour de 32 g/l, pour unerotéinémie à 64 g/l. Le chiffre de polynucléaires s’élevait

675/mm3 et le taux de lymphocytes à 230/mm3. Lesultures de liquide pleural sont revenues négatives. Les exa-ens cytologiques n’ont pas retrouvé de cellule anormale.

e scanner thoraco-abdominopelvien, réalisé initialementans injection du fait de l’insuffisance rénale chronique duatient, a retrouvé une masse irrégulière, homogène, deensité tissulaire autour de l’aorte abdominale infiltrant leilier diaphragmatique gauche, ayant fait évoquer en pre-ier lieu une pathologie tumorale de type sarcomateuse

u lymphomateuse. Des calcifications étaient retrouvées auein de cette masse. En revanche, on ne retrouvait aucunigne en faveur d’une spondylodiscite. Une échographie car-iaque transthoracique ne retrouvait pas de signe évocateur

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Figure 1. Scanner non injecté. Visualisation du double contourartériel (flèche). Infiltrat à bord irrégulier péri-anévrismal (étoile).

d’endocardite infectieuse. Le 5 janvier, la bi-antibiothérapiea été arrêtée du fait de son inefficacité sur le syndromeinfectieux. Une fenêtre antibiotique a été réalisée, mais leshémocultures réalisées alors ont été stériles. Le dossier a étédiscuté le 12 janvier en réunion de concertation pluridiscipli-naire d’oncologie pulmonaire, il a été décidé de réaliser unnouveau scanner avec une ponction de l’éventuelle lésiontumorale. Le diagnostic d’anévrisme aortique a alors étéjugé moins probable que l’origine tumorale, sur l’aspecttomodensitométrique de la lésion.

Le 16 janvier, un nouveau scanner a donc été réalisé eta mis en évidence sur la lésion un aspect de double contourcalcifié, entouré d’un infiltrat à limite floue (Fig. 1). Auniveau pulmonaire, un aspect hyperdense au sein du liquided’épanchement pleural évoquait un saignement récent dansla plèvre et donc un anévrisme en voie de fissuration. Laponction sous scanner de l’infiltrat péri-anévrismal a ramenéun liquide purulent contenant du staphylocoque doré résis-tant à la méticilline.

Le diagnostic évoqué a alors été celui d’un anévrismeinfectieux secondaire à la septicémie à Staphylococcusaureus survenue en novembre 2008. Devant l’incertitudediagnostique, un scanner avec injection d’iode a été réalisé,malgré l’insuffisance rénale, ce qui a permis de confirmer lediagnostic en retrouvant un anévrisme sacculaire entouréd’un infiltrat irrégulier à bords flous remontant jusqu’audiaphragme. Le scanner retrouvait également un échappe-ment de produit de contraste dans la plèvre, évoquant unerupture de l’anévrisme (Fig. 2). Le patient a été récuséen chirurgie du fait du risque opératoire élevé lié notam-ment à l’infection active, et de la localisation à haut risquede l’anévrisme qui contre-indiquait le recours à une endo-prothèse (risque majeur d’occlure le tronc cœliaque etl’artère mésentérique supérieure). Le patient a recu un trai-tement médical seul, consistant en une bi-antibiothérapieanti-staphylococcique. L’association linézolide et rifampi-

cine a initialement été choisie du fait de l’insuffisancerénale du patient, dont le débit de filtration glomérulaireétait alors estimé à 43 ml/min par 1,73 m2 et de l’antécédentd’insuffisance rénale aiguë sous aminoside. Puis un relais par

dcdp

igure 2. Scanner injecté. Visualisation de l’aspect en doublehenal de la lumière artérielle. (étoile). Épanchement pleuralflèche).

otrimoxazole et rifampicine a été effectué du fait d’uneensibilité du germe au cotrimoxazole à l’antibiogramme etu risque hématologique du linézolide. Il a bénéficié d’unupport transfusionnel et de soins de confort actifs.

Le patient est décédé le 24 janvier dans un contexte deajoration du syndrome inflammatoire et de défaillanceultiviscérale.

iscussion

’est Osler en 1885 qui a défini le terme d’anévrismeycotique pour désigner les anévrismes artériels liés aux

ndocardites infectieuses [1]. Ils représenteraient 0,7 à,6 % des anévrismes aortiques [2,3]. L’anévrisme mycotiquee l’aorte abdominale est une affection grave. Les signesvocateurs sont classiquement des douleurs abdominales,ne masse pulsatile abdominale, une température élevéet un syndrome inflammatoire biologique. Cette association’est présente que dans 16 à 50 % des cas [2,4]. Environ0 % des anévrismes infectieux de l’aorte sont symptoma-iques [2]. La présentation clinique est en effet variable,t il existe des formes apyrétiques dans environ 11 à 52 %es cas [3,5—7], des formes évoquant une sciatique avecouleur lombaire irradiant au membre inférieur [5], desableaux algiques aigus de type abdomen chirurgical [2], uneouleur testiculaire unilatérale [8]. Le diagnostic cliniquest difficile à faire avant la rupture de l’anévrisme qui estrésente dans 24 à 53 % des cas au moment du diagnostic2,3], et qui doit être évoquée devant une douleur abdomi-ale avec syndrome infectieux non expliqué [4]. Lin et al.apportent un épanchement pleural chez 57 % des patientsorteurs d’anévrismes aortiques infectieux dans une série de

e l’aorte thoracique. L’épanchement pleural hémorragiqueomme mode de révélation principal d’un anévrisme infectée l’aorte abdominale n’a été décrit que dans un mode derésentation très aigu [10].

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La présentation clinique des anévrismes non infectieuxe l’aorte abdominale en voie de rupture est souvent trom-euse, avec environ 16 à 60 % d’erreur de diagnostic de laart du premier contact médical [11—13], ce qui est res-onsable d’une dégradation importante du pronostic. Lesrésentations fréquemment décrites sont [11,12] :la triade classique : masse pulsatile abdominale + douleurabdominale + hypotension, présente dans uniquement20 à 40 % des cas [11,12] ;tableau mimant une colique néphrétique ou une pyéloné-phrite ;douleur de fosse iliaque gauche évoquant une diverticu-lite ;douleur abdominale aiguë mimant une perforation intes-tinale ;douleur vertébrale aiguë évoquant un lumbago ;douleur pelvienne ;malaise général et état de choc ;douleur de hanche aiguë [13].

L’épanchement pleural hémorragique comme mode deévélation des ruptures d’anévrismes aortiques infectieuxu non a été bien décrit pour les anévrismes de l’aortehoracique [14—16]. Concernant les ruptures d’anévrismebdominal, peu de cas ont été décrits, et il ne semble pas yvoir de latéralisation préférentielle [10,17].

L’origine de l’épanchement pleural dans les anévrismesnfectés est probablement liée au développement d’une fis-ule entre l’anévrisme infectieux et la plèvre. Dans d’autresas, la présence d’une pleurésie peut être liée à une réac-ion pleurale au phénomène infectieux abdominal. Dans leas rapporté, la présence de l’épanchement pleural hémor-agique semble donc être un signe de rupture de l’anévrismenfectieux.

La présentation clinique du patient est atypique danslusieurs sens :l’absence de fièvre, mais présence d’un syndrome inflam-matoire biologique ;l’absence de douleur abdominale et absence de massebattante abdominale ;la présence d’une pleurésie sérohématique stériled’évolution subaiguë comme principal point d’appel cli-nique [10] ;l’absence d’injection de produit de contraste iodé lorsdu premier scanner abdominal, du fait de l’insuffisancerénale. En effet, l’aspect de l’anévrisme faisait évoquerinitialement une pathologie purement tissulaire de typetumoral, ayant fait décider une ponction diagnostique.

Les germes les plus fréquemment responsables’anévrismes infectés sont le staphylocoque doré, lesalmonelles, Brucella et le pneumocoque [2—5,18,19]. Lesnfections à salmonelle prédominent dans les localisationsnfrarénales [6]. La porte d’entrée est inconnue dans9 à 58 % des cas [2,3,7]. Quand elle est retrouvée, il’agit le plus fréquemment d’une endocardite infectieuse1], d’une infection pulmonaire, urinaire, abdominale ou

’une infection d’un site de ponction. Toutes les portes’entrée infectieuses sont possibles. Dans le cas cliniqueapporté, la porte d’entrée infectieuse est une septicémiestaphylocoque doré résistant à la méticilline dont le pointe départ est un mal perforant plantaire.

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J. Péron et al.

L’angio-IRM et l’angio-TDM permettent d’apporter’autres arguments diagnostiques. À la TDM [9,20,21], ileut être retrouvé :un épaississement (81 %) ou un œdème circonférentiel ducontour artériel, entourant une lumière initialement decalibre normal, avec un rehaussement irrégulier en cou-ronne par le produit de contraste (86 %), puis interruptiondes calcifications intimales (71 %) précédant la dilatationde la lumière aortique ;un contour aortique calcifié évident (90 à 93 %) ;une réaction para-aortique :◦ un œdème ou un infiltrat péri-aortique (48 à 67 %),◦ un hématome péri-aortique (14 %),◦ une masse tissulaire para-aortique (48 à 71 %) ;un caractère sacculaire de l’anévrisme (90 à 93 %) ;une thrombose anévrismale ;une visualisation de bulles d’air dans la paroi del’anévrisme (7 à 33 %) ;une destruction osseuse adjacente à l’anévrisme (4 à 5 %) ;une évolution rapide de l’anévrisme lors d’examens répé-tés (100 %).

Mais ces examens ont surtout pour objectif d’évaluer deacon précise la localisation et les possibilités opératoirese l’anévrisme.

Les autres examens pour arriver au diagnostic sontrincipalement le TEP-scanner [22], qui montre un hyper-étabolisme des parois anévrismales, et la scintigraphie aux

eucocytes marqués, qui montre une fixation des leucocytesu niveau de la paroi de l’anévrisme.

Les anévrismes infectieux sont grevés d’une mortalitélevée en l’absence de prise en charge chirurgicale. Le délaintre les premiers symptômes et la chirurgie est encoreong, étant en moyenne de 38 jours [2].

Les options chirurgicales sont débattues et dépendente la localisation de l’anévrisme, de sa morphologie et duerrain du patient. Citons les différents matériels utilisés :rothèse synthétique, enduite ou non d’antibiotiques, auto-reffe veineuse [23], allogreffe artérielle. Les différentesechniques : voie endovasculaire ou chirurgie traditionnelle,econstruction in situ ou extra-anatomique [3]. Dans le casapporté, la localisation de l’anévrisme rendait impossiblee recours à la voie endovasculaire ; le caractère actif de’infection et le mauvais état général du patient contre-ndiquaient la chirurgie.

L’évolution sans traitement chirurgical des anévrismesnfectieux même de petit diamètre se fait vers la rupture

court terme de l’anévrisme [4,6]. En revanche, après unraitement chirurgical sous couvert d’une antibiothérapiedaptée, les suites opératoires à long terme ne diffèrent pase celles des anévrismes non infectieux, bien que le tauxe complications immédiates et notamment chirurgicalesoient plus importantes [2,6,7]. Les facteurs principaux deauvais pronostic de ces anévrismes sont : l’âge, le sexe

éminin, les infections non à salmonelles, la rupture de’anévrisme, la localisation suprarénale et l’absence de prise

n charge chirurgicale de l’anévrisme. [2—4,7].

L’évolution péjorative du patient était prévisible du faite l’association de plusieurs éléments de mauvais pronostic :la présentation clinique trompeuse ayant été responsabled’un retard à la prise en charge spécifique ;

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Pleurésie exsudative révélant un anévrisme infectieux de l’a

• le caractère suprarénal de l’anévrisme, le caractère actifde l’infection et le mauvais état général du patient ayantcontre-indiqué un geste chirurgical ou endovasculaire ;

• le caractère rompu de l’anévrisme ;• l’infection à staphylocoque résistant à la méticilline, sans

recours possible à une antibiothérapie optimale du fait del’insuffisance rénale.

La plupart de ces facteurs sont non modifiables. Ce diag-nostic doit donc pouvoir être évoqué rapidement afin d’enpermettre une reconnaissance plus précoce. Il s’agit du prin-cipal facteur pronostique modifiable de l’observation.

Conclusion

Les anévrismes infectieux sont un enjeu diagnostiqueimportant du fait de leurs particularités sémiologiques etradiologiques et de la gravité de leur évolution en l’absencede traitement adapté. La découverte d’un anévrisme infec-tieux en voie de rupture par un épanchement pleural est rareet cette observation montre bien l’importance d’évoquerrapidement ce diagnostic chez un patient présentant un syn-drome infectieux mal expliqué et une présentation cliniquecompatible.

Conflit d’intérêt

Les auteurs ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêt.

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