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Difficile? Compliquée? Utopique? L’intégration scolaire n’a encore aujourd’hui rien d’évident. Par leur parcours, Joana et Anna prouvent cependant qu’elle est possible et enrichissante pour tous. Histoire de deux intégrations réussies. insieme 1/08 12 POINT FORT J oana a bientôt 17 ans. Elle est élève au collège des Grandes-Communes à Genève. Un collège ordinaire, avec son grand préau et ses centaines d’élèves. Joana est dans une classe de neuvième année, tout ce qu’il y a également de plus ordinaire. Seule Joana n’est pas tout à fait ordinaire. Car Joana est trisomique. Malgré son handicap, elle achèvera sa scolarité obliga- toire cet été. Une belle manière de conclure un parcours exemplaire, intégratif et réussi. Car Joana a toujours fréquenté le milieu ordinaire. De 3 à 5 ans, elle a été dans une crèche. Elle a intégré ensuite l’école de son quartier. D’abord seulement les matinées, puis toujours plus, ne passant finalement que 2 à 3 demi-journées en école spécialisée. Joana a accompli ce cursus sans accroche. Elle a juste connu quelques difficultés en 3 ème primaire et redoublé sa 6 ème pour consolider cer- tains acquis. Madame Franco, sa maman, est heureuse et fière du chemin accompli par sa fille. ”Joana va bien. Elle a ap- pris à lire. Elle est avec les autres enfants. Je suis conten- te“, dit-elle. Mais la première à se réjouir du tout cela, c’est Joana. ”J’aime l’école. Avec mes amis. Je travaille et j’apprends“, explique-t-elle, enthousiaste, avant de citer ses matières favorites: ”J’aime le français, le dessin, le sport. L’anglais, pas toujours. Mais je n’aime pas les maths“, dit-elle en consultant l’horaire de son carnet journalier. Vers plus d’intégration Si le parcours de Joana est exemplaire, il est aussi excep- tionnel: elle est en effet actuellement la seule élève mentalement handicapée intégrée individuellement au niveau du cycle d’orientation à une telle intensité (une intégration de 7 demi-journées sur 9, complétée par un accueil au centre spécialisé du Lac). La seule du collège. La seule du canton.* Il faut dire que l’intégration scolaire en est encore à ses débuts. Elle fait lentement son chemin. Et elle rencontre encore bien des réticences. ”C’est vrai, des freins exis- tent. Ils peuvent être liés aux enseignants qui craignent Texte: France Santi / Photo: Pierre-Yves Massot de ne pas savoir faire ou de se trouver devant une surcharge de travail. Ou aux enseignants spécialisés qui craignent que le milieu ordinaire soit mal adapté, voire néfaste pour l’élève particulier“, note Christine Debruè- res, enseignante spécialisée au Centre des Voirets, dont elle est aussi depuis janvier de cette année la responsa- ble pédagogique. C’est elle qui a suivi Joana tout au long de sa scolarité jusqu’en huitième année. Du côté des parents aussi, l’intégration fait parfois peur. Ils craignent qu’elle se fasse n’importe comment, que leurs enfants ressortent dévalorisés de l’expérience, voi- re traumatisés. Il leur faut un certain courage pour tenter l’expérience. Et de l’endurance aussi, pour faire face aux réticences qui peuvent joncher le parcours. C’est du moins ce que laisse entendre la maman de Joana qui a dû surmonter sa timidité, demander, insister et faire face pour imposer l’intégration de sa fille. Elle avoue d’ailleurs L’intégration, c’est possible insieme_1-08_def.indd 12 3.3.2008 10:38:19 Uhr

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difficile?

compliquée?

utopique?

l’intégration

scolaire n’a encore

aujourd’hui rien

d’évident. Par leur

parcours, Joana et

anna prouvent

cependant qu’elle

est possible et

enrichissante pour

tous. histoire de

deux intégrations

réussies.

insieme 1/0812

point fort

Joana a bientôt 17 ans. Elle est élève au collège des

Grandes-Communes à Genève. Un collège ordinaire,

avec son grand préau et ses centaines d’élèves. Joana

est dans une classe de neuvième année, tout ce qu’il y

a également de plus ordinaire. Seule Joana n’est pas

tout à fait ordinaire. Car Joana est trisomique.

Malgré son handicap, elle achèvera sa scolarité obliga-

toire cet été. Une belle manière de conclure un parcours

exemplaire, intégratif et réussi. Car Joana a toujours

fréquenté le milieu ordinaire. De 3 à 5 ans, elle a été dans

une crèche. Elle a intégré ensuite l’école de son quartier.

D’abord seulement les matinées, puis toujours plus,

ne passant finalement que 2 à 3 demi-journées en

école spécialisée. Joana a accompli ce cursus sans

accroche. Elle a juste connu quelques difficultés en

3ème primaire et redoublé sa 6ème pour consolider cer-

tains acquis.

Madame Franco, sa maman, est heureuse et fière du

chemin accompli par sa fille. ”Joana va bien. Elle a ap-

pris à lire. Elle est avec les autres enfants. Je suis conten-

te“, dit-elle. Mais la première à se réjouir du tout cela,

c’est Joana. ”J’aime l’école. Avec mes amis. Je travaille

et j’apprends“, explique-t-elle, enthousiaste, avant de

citer ses matières favorites: ”J’aime le français, le dessin,

le sport. L’anglais, pas toujours. Mais je n’aime pas les

maths“, dit-elle en consultant l’horaire de son carnet

journalier.

Vers plus d’intégrationSi le parcours de Joana est exemplaire, il est aussi excep-

tionnel: elle est en effet actuellement la seule élève

mentalement handicapée intégrée individuellement au

niveau du cycle d’orientation à une telle intensité (une

intégration de 7 demi-journées sur 9, complétée par un

accueil au centre spécialisé du Lac). La seule du collège.

La seule du canton.*

Il faut dire que l’intégration scolaire en est encore à ses

débuts. Elle fait lentement son chemin. Et elle rencontre

encore bien des réticences. ”C’est vrai, des freins exis-

tent. Ils peuvent être liés aux enseignants qui craignent

Texte: France Santi / Photo: Pierre-Yves Massot

de ne pas savoir faire ou de se trouver devant une

surcharge de travail. Ou aux enseignants spécialisés qui

craignent que le milieu ordinaire soit mal adapté, voire

néfaste pour l’élève particulier“, note Christine Debruè-

res, enseignante spécialisée au Centre des Voirets, dont

elle est aussi depuis janvier de cette année la responsa-

ble pédagogique. C’est elle qui a suivi Joana tout au

long de sa scolarité jusqu’en huitième année.

Du côté des parents aussi, l’intégration fait parfois peur.

Ils craignent qu’elle se fasse n’importe comment, que

leurs enfants ressortent dévalorisés de l’expérience, voi-

re traumatisés. Il leur faut un certain courage pour tenter

l’expérience. Et de l’endurance aussi, pour faire face aux

réticences qui peuvent joncher le parcours. C’est du

moins ce que laisse entendre la maman de Joana qui a

dû surmonter sa timidité, demander, insister et faire face

pour imposer l’intégration de sa fille. Elle avoue d’ailleurs

L’intégration, c’est possible

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Intégration réussie: Joana finira sa scolarité obligatoire cet été.

qu’elle n’y serait jamais arrivée toute seule. ”Pour réussir,

il faut bénéficier de soutien. Il faut une association à ses

côtés. Il faut trouver des enseignants motivés. Il faut

discuter avec les directions d’école. Joana a eu de la

chance, son enseignante spécialisée était toujours dispo-

nible et a toujours tout arrangé. Sans elle, cela aurait été

difficile“, explique Madame Franco.

Pour Joana, l’investissement de son enseignante spécia-

lisée a été très important. Est-ce la seule clé de ce succès?

Pour Joana, l’investissement de son enseignante spécia-

lisée a été très important. Mais ce n’est pas la seul clé du

succès. Alors, quelles sont les conditions qui ont permis

à Joana de suivre ce chemin et qui pourrait permettre à

d’autres enfants de suivre ses pas. Car, comme le souli-

gne Madame Franco, ”si Joana a pu le faire, d’autres

enfants peuvent aussi le faire.“ Ces questions sont

d’autant plus importantes qu’actuellement, dans le

cadre de la mise en oeuvre de la RPT, les cantons redéfi-

nissent leurs lignes directrices en matière d’enseigne-

ment spécialisé (voir encadré p. 15).

Tout est dans la collaboration”Pour permettre une intégration en milieu scolaire, tous

les intervenants doivent devenir des partenaires. Le mot

clé, c’est la collaboration“, lance l’enseignante spéciali-

sée Christine Debruères. Il faut qu’un ou une ensei-

gnante ”ouvre la porte“. Dans l’idéal, il faut même plus.

Il faut que cette personne bénéficie d’un réel soutien,

tant de la part de l’école spécialisée que de sa propre

direction. ”Lorsque le projet d’une enseignante devient

le projet de toute l’école, le parcours s’effectue plus

facilement“, ajoute l’enseignante spécialisée qui se féli-

cite d’avoir pu travailler main dans la main avec le Col-

lège des Grandes-Communes. La direction s’est en effet

point fort

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point fort

ANNONCE

pleinement impliquée dans ce projet d’intégration. ”La venue de Joana

a été préparée avec soin. Une cellule pédagogique a été mise en place.

Une équipe d’enseignants intéressés et pouvant suivre Joana sur trois

ans a été constituée“, confirme Jean-Noël Rey, directeur du Cycle des

Grandes-Communes.

Dès le début, les échanges ont été intenses entre l’institution de Joana

et le collège, entre Christine Debruères et les professeurs ordinaires,

plus particulièrement avec Chantal Dupré, l’enseignante titulaire de

Joana depuis la 7ème année. Pour cette dernière, il était essentiel d’avoir

une personne de contact, d’obtenir des réponses et des outils pour son

travail au quotidien. ”Je n’avais pas de crainte à accueillir Joana. Mais

ne connaissant rien du handicap, j’avais beaucoup de questions. Je me

demandais comment communiquer avec elle, quelles exigences à avoir,

tant au niveau social qu’en ce qui concerne ses performances scolai-

res“, dit-elle. Sans ces échanges, rien n’aurait été possible. ”Pour moi,

l’intégration de Joana est un travail d’équipe“, résume Chantal Dupré.

Un travail d’équipe… C’est exactement en ces termes que les parents

d’Anna expliquent l’intégration réussie de leur fille en milieu ordinaire.

”Si ça marche, c’est parce qu’Anna est entourée d’un véritable réseau

de partenaires“, lance Bertrand Gentizon, le papa d’Anna.

Anna a 9 ans. Elle vit dans le canton de Vaud. Elle un retard mental

accompagné d’hyperactivité. Elle commence tout juste à parler. Elle a

toujours fréquenté le milieu ordinaire. Son intégration s’est faite à des

taux variables, selon les années, au gré des possibilités trouvées avec

les différents établissements scolaires qui l’ont accueillie. Aujourd’hui,

elle passe 2 demi-journées par semaine dans une classe ordinaire de

1ère année primaire.

Le réseau dont parlent les parents s’est constitué petit à petit. ”A l’ori-

gine, tout est venu de nous. C’est nous qui avons pris contact, qui

avons négocié… mais aujourd’hui, nous sommes entourés par de vrais

partenaires“, confirme le père d’Anna.

Ces partenaires sont des membres de l’école ordinaire, de l’école spé-

cialisée, du service de l’enseignement spécialisé, du service des besoins

spéciaux de la petite enfance, l’ergothérapeute et eux, bien sûr, les

parents. Ils se réunissent 2 à 6 fois par année pour faire le point et

établir les objectifs pédagogiques du projet d’intégration d’Anna. Les

objectifs posés pour Anna sont très ouverts. Il s’agit, par exemple,

qu’elle arrive à manger correctement ou à pratiquer des jeux sociaux.

Pour y parvenir, l’école privilégie les cours ”créatifs“, soit des cours de

bricolage plutôt que de maths. Et ça marche! Anna se sent bien et fait

de grands progrès. ”Elle a notamment appris à jouer avec les autres

enfants“, confirme Caterina Gentizon, sa maman.

C’est une victoire pour les parents dont le souci principal est d’offrir

des outils de socialisation, de la faire participer au monde qui l’en-

toure. ”Nous désirons qu’Anna vive dans le même univers que nous,

ses parents, et que ses deux frères. Nous voulons lui laisser la possibi-

lité d’avoir une place dans le monde ordinaire“, explique sa maman.

Du sur mesurePour Joana aussi, l’intégration scolaire vise en priorité l’acquisition de

compétences sociales. Et comme Anna, Joana fait dans ce domaine

d’énormes progrès. Si en 7ème année, elle restait dans son coin et était

souvent seule, elle s’est fait une place. Elle va maintenant de temps en

temps en pause avec un groupe de filles. Elle a même invité des cama-

rades à son anniversaire. Elle a pris de l’assurance en classe également,

osant toujours plus participer, prendre la parole d’elle-même.

Mais qui dit acquisition de compétences sociales ne dit pas absence

d’apprentissage cognitif. Pour Christine Debruères, c’est une erreur que

de vouloir séparer ces deux dimensions. ”A l’école, il n’y a pas de socia-

lisation sans apprentissage, pas d’apprentissages sans socialisation.

Joana a gagné en indépendance et autonomie. Elle a aussi appris à

écrire des phrases. Elle a développé des capacités cognitives de mé-

moire, de réflexion, d’organisation.“ Intégrer ne se résume donc pas à

placer un enfant dans une classe, sans le stimuler de façon adaptée.

Mais ce n’est pas non plus vouloir lui faire atteindre les mêmes perfor-

mances. ”En intégration, il y a adaptation réciproque. Les attitudes

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comme les objectifs sont adaptés“, résume Christine

Debruères.

C’est pourquoi Joana profite d’un horaire personnalisé,

établi en collaboration entre les partenaires. Elle passe,

par exemple, un jour par semaine en école spécialisée.

Elle ne fait pas d’allemand, profitant de ces heures libé-

rées pour aller à la médiathèque, soit seule soit en com-

pagnie de son enseignante spécialisée. Elle bénéficie

aussi d’exercices adaptés, de données écrites en lan-

gage simplifié et d’une attention particulière de la part

de son enseignante titulaire. ”Quand la classe doit pas-

ser une épreuve, j’en profite pour m’occuper personnel-

lement de Joana“, confirme Chantal Dupré.

Anna aussi jouit d’un programme adapté. Du ”sur

mesure“ qui mélange soutien pédagogique et intégra-

tion sociale. Pour les parents d’Anna, cette capacité

d’adaptation de l’école ordinaire et de l’école spéciali-

sée est indispensable au projet d’intégration d’Anna. ”Il

y a de telles différences entre chaque handicap et entre

chaque enfant handicapé qu’il n’est pas possible de

s’appuyer sur un modèle. Il faut s’adapter à chaque cas.

Ce qui marche pour l’un ne fonctionnera pas forcément

pour l’autre“, dit Bertrand Gentizon, le papa d’Anna.

Les parents d’Anna espèrent que cette flexibilité conti-

nuera d’exister. Ils ont un peu peur car ils ont entendu

dire que l’intégration, dans le canton de Vaud, ce sera

du tout ou rien. Eux pour qui le passage de l’école pri-

maire au secondaire représente déjà un grand point

d’interrogation, ne voient pas Anna intégrée à 100% à

la manière de Joana. Du coup, ils craignent de devoir

carrément renoncer au projet d’intégration d’Anna.

Un enrichissement pour tousCe serait une grande perte. Pour leur fille. Pour eux.

Pour tout le monde. Car, comme les deux parents

aiment le souligner, l’intégration fait du bien à tous. Ils

en veulent pour preuve les témoignages des ensei-

gnants ayant accueilli Anna.Tous soulignent ce qu’Anna

leur a apporté tant au niveau personnel que profession-

nel et l’influence positive d’Anna sur la dynamique de

classe. Les parents des autres élèves aussi se montrent

reconnaissants. ”Certains parents nous ont remerciés

parce que, grâce à Anna, leurs enfants apprennent

beaucoup sur la tolérance et la différence… Et mainte-

nant, certains camarades de classe invitent même Anna

à leur anniversaire. C’est formidable!“, raconte sa ma-

man. Le papa enchaîne: ”Il faut arrêter avec notre so-

ciété de ségrégation. Il faut construire des ponts. Dans

ce projet d’intégration, nous sentons une petite touche

d’universalité.“

Bien entendu, tout n’est pas rose. Il y a toujours des

moqueries. Les frères d’Anna sont les premiers à le

savoir et à trouver cela injuste. Ils ont même une fois

exprimé le fait que, s’ils avaient une baguette magique,

ils l’utiliseraient pour que les autres arrêtent de se

moquer de leur sœur. Joana aussi est parfois regardée

de travers ou fait l’objet de remarques désobligeantes

de la part des collégiens. Mais ces regards sont lancés

par ceux qui ne la connaissent pas soulignent ses cama-

rades de classe. Eux, ils préfèrent parler d’enrichisse-

ment pour qualifier leurs années passées avec Joana. Ils

se sentent aujourd’hui beaucoup plus à l’aise face au

handicap mental, face à cette différence. ”Si ça a chan-

gé pour nous, ça doit aussi pouvoir changer dans la

société“, conclut l’un d’eux.

A propos de changement, Joana s’apprête à vivre une

nouvelle étape. Elle intégrera un centre de formation

professionnelle pour jeunes personnes mentalement

handicapées. Son rêve? Travailler dans le supermarché

de son quartier, là où elle a sa famille, ses amis, son

cours de danse, ses repères. Joana a envie de garder le

contact, d’avoir l’occasion de ”dire bonjour“ aux gens

qu’elle connaît.

Quand aux parents d’Anna, ils espèrent que leur fille

puisse intégrer une classe de troisième année afin d’être

avec des enfants de son âge. Pour le reste, ils s’abstien-

nent de tirer quelque plan que ce soit sur la comète,

conscients de la fragilité de leur projet: ”L’intégration

d’Anna est un chantier perpétuel“, disent-ils.

n

* Le canton de Genève compte actuellement 34 enfants intégrés de 1 à 7 demi-journée(s) au niveau primaire, ainsi que 6 adolescents dans la classe intégrée du CO de Bois-de-Clarens et 2 autres dans d’autres cycles.

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point fort

l’intégration, c’Est quoi?Pour Christine Debruères, il est important de souligner que l’intégration n’est pas assimilation. Contrairement à l’assimilation qui demande – à l’aide d’appuis spécifi-ques – que l’élève parvienne à faire comme ses camara-des, l’intégration, elle, appelle à une adaptation réciproque. ”Les activités sont les mêmes chaque fois que c’est possi-ble. Les objectifs, moyens et attitudes sont adaptés si né-cessaire. Des appuis sont of-ferts pour que ces objectifs (adaptés) personnalisé, fixés dans le projet, soient at-teints“, explique Christine Debruères. Pour insieme, l’intégration demande que l’école s’adap-te et se transforme, afin d’être capable d’accueillir l’enfant différent, quel que soit son handicap. Elle défend une intégration qui a pour but la poursuite d’objectifs d’apprentissage individuali-sés, adaptés à chaque enfant ayant des besoins spécifiques grâce à une organisation correspondante de l’ensei-gnement et avec le soutien d’enseignants spécialisés.

Plus d’intégrationAvec la mise en œuvre de la péréquation financière (RPT), en-trée en vigueur au 1er janvier de cette année, les cantons ont trois ans pour définir leur politique en la matière. Pour garder une certaine unité, la CDIP (Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique) a élaboré un accord inter-cantonal sur la collaboration dans le domaine de la pédagogie spécialisée. Cet accord pose les standards en matière d’ensei-gnement spécialisé. Il établit aussi le principe de l’intégration des enfants ayant des besoins éducatifs spécifiques dans l’éco-le ordinaire. ”Ce concordat représente un signe fort en faveur de l’intégration. Mais les moyens qu’il propose pour concrétiser cette intégration et la manière dont il définit l’intégration res-tent trop généraux. La situation risque de varier de canton en canton“, explique Heidi Lauper, co-directrice d’insieme Suisse. Elle invite les associations et parents à être particulièrement attentifs à la façon dont le principe sera concrétisé au niveau cantonal. Pour soutenir leurs démarches d’intégration, Heidi Lauper invite les parents cependant à y faire recours, tout comme à la loi sur l’égalité pour les handicapés (LHand Art. 20, al. 2).

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