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SYNTHÈSE ET RECOMMANDATIONS 13 POST’U (2016) Nouveaux anticoagulants oraux et endoscopie digestive ; Christian Boustière (u) Service de gastro-entérologie. Hopital Saint-Joseph, Bd de Louvain, 13825 Marseille E-mail : [email protected] Objectifs pédagogiques – Connaître les nouveaux anticoagu- lants oraux et leurs caractéristiques pharmacologiques – Savoir classer les actes endosco- piques en fonction de leur risque hémorragique potentiel – Pouvoir déterminer les modalités d’arrêt et de reprise du médicament lors d’un geste endoscopique – Savoir adapter le geste endoscopique et sa surveillance en fonction du risque hémorragique Introduction Les prescriptions de nouveaux anti- coagulants oraux directs ou AOD (ex. NACO) ont augmenté de manière continue depuis leur mise sur le mar- ché en 2008 et tendent à remplacer progressivement les AVK dans la pré- vention des accidents thrombo-embo- liques des fibrillations atriales non valvulaires et des thrombophlébites profondes.Selon l’ANSM, 3,12 millions de patients étaient sous anticoagulants et le remplacement des AVK par les AOD a concerné plus de 100 000 patients en 2013. On estime que 50 % des anti- coagulants oraux actuellement utilisés sont des AOD. Une première recommandation avait été publiée dès 2011 conjointement par le Groupe d’Intérêt en Hémostase Périopératoire (GIHP) et Hémostase et Thrombose (GEHT) [1] et plus récem- ment une stratégie sur la prise en charge des complications hémorra- giques péri-opératoires [2]. La gestion des patients sous anti-agrégants pla- quettaires (AAP) devant bénéficier d’une endoscopie digestive avait fait l’objet d’une recommandation conduite par la SFED et l’HAS en 2011 puis d’un guideline européen publiée par l’ESGE [3]. Ces travaux ont servi de base à une nouvelle recommandation concernant cette fois-ci les AOD et conduite par un groupe européen pour, proposer des règles d’utilisation des AOD lors de la réalisation des endosco- pies digestives. Le but est donc de pré- ciser quelles sont les modalités d’inter- ruption temporaire des AOD en tenant compte à la fois du risque thrombo- tique du patient et du risque hémorra- gique potentiel de la procédure endos- copique. Cependant, contrairement aux AAP,les données publiées sont très peu nombreuses et reposent princi- palement sur des avis d’experts [4, 5] et sur l’analogie que l’on peut faire avec les AVK (Recommandations HAS 2008). Ce texte est donc basé sur les recommandations récentes améri- caines publiées en 2015 [6] et surtout Européennes en 2016 [7]. Les anticoagulants oraux directs (AOD) Les différents médicaments disponibles Trois molécules sont actuellement dis- ponibles : le dabigatran (Pradaxa®), qui est une pro-drogue, inhibiteur de la thrombine et le rivaroxaban (Xarelto®) et l’apixaban (Eliquis®) qui sont des inhibiteurs du facteur Xa ou anti-Xa. Tous les AOD sont des inhibiteurs de la voie principale de la coagulation et à ce titre sont d’action plus rapide et sont plus puissants que les AVK. Les doses utilisées sont variables en fonc- tion des indications et du terrain (âge et comorbidités). La concentration maximale est atteinte rapidement avec un délai d’action court de 2 à 6 heures et une demi-vie d’élimination moyenne de 7 à 15 heures. Les indications validées Schématiquement, elles recoupent les indications des AVK à l’exclusion des valvulopathies : – la prévention du risque thrombo- embolique veineux en postopéra- toire de chirurgie orthopédique majeure ; – la prévention du risque embolique de la fibrillation atriale ; – le traitement de la thrombose veineuse profonde et de l’embolie pulmonaire. Les AOD ne sont pas indiqués pour la prévention des thromboses des stents coronariens.

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POST’U (2016)

Nouveaux anticoagulants orauxet endoscopie digestive; Christian Boustière(u) Service de gastro-entérologie. Hopital Saint-Joseph, Bd de Louvain, 13825 Marseille

E-mail : [email protected]

Objectifs pédagogiques

– Connaître les nouveaux anticoagu-lants oraux et leurs caractéristiquespharmacologiques

– Savoir classer les actes endosco-piques en fonction de leur risquehémorragique potentiel

– Pouvoir déterminer les modalitésd’arrêt et de reprise du médicamentlors d’un geste endoscopique

– Savoir adapter le geste endoscopiqueet sa surveillance en fonction durisque hémorragique

Introduction

Les prescriptions de nouveaux anti-coagulants oraux directs ou AOD (ex.NACO) ont augmenté de manièrecontinue depuis leur mise sur le mar-ché en 2008 et tendent à remplacerprogressivement les AVK dans la pré-vention des accidents thrombo-embo-liques des fibrillations atriales nonvalvulaires et des thrombophlébitesprofondes. Selon l’ANSM, 3,12 millionsde patients étaient sous anticoagulantset le remplacement des AVK par lesAODaconcernéplusde100000patientsen 2013. On estime que 50 % des anti-coagulants oraux actuellement utiliséssont des AOD.Une première recommandation avaitété publiée dès 2011 conjointementpar le Groupe d’Intérêt en HémostasePériopératoire (GIHP) et Hémostase etThrombose (GEHT) [1] et plus récem-ment une stratégie sur la prise encharge des complications hémorra-giques péri-opératoires [2]. La gestiondes patients sous anti-agrégants pla-quettaires (AAP) devant bénéficierd’une endoscopie digestive avaitfait l’objet d’une recommandationconduite par la SFED et l’HAS en 2011puis d’un guideline européen publiéepar l’ESGE [3]. Ces travaux ont servi debase à une nouvelle recommandationconcernant cette fois-ci les AOD etconduite par un groupe européen pour,proposer des règles d’utilisation desAOD lors de la réalisation des endosco-pies digestives. Le but est donc de pré-ciser quelles sont les modalités d’inter-ruption temporaire des AOD en tenantcompte à la fois du risque thrombo-tique du patient et du risque hémorra-gique potentiel de la procédure endos-copique. Cependant, contrairementaux AAP, les données publiées sont trèspeu nombreuses et reposent princi-palement sur des avis d’experts [4, 5]et sur l’analogie que l’on peut faire avec

les AVK (Recommandations HAS2008). Ce texte est donc basé sur lesrecommandations récentes améri-caines publiées en 2015 [6] et surtoutEuropéennes en 2016 [7].

Les anticoagulants orauxdirects (AOD)

Les différents médicamentsdisponibles

Trois molécules sont actuellement dis-ponibles : le dabigatran (Pradaxa®), quiest une pro-drogue, inhibiteur de lathrombine et le rivaroxaban (Xarelto®)et l’apixaban (Eliquis®) qui sont desinhibiteurs du facteur Xa ou anti-Xa.Tous les AOD sont des inhibiteurs dela voie principale de la coagulation età ce titre sont d’action plus rapideet sont plus puissants que les AVK. Lesdoses utilisées sont variables en fonc-tion des indications et du terrain (âgeet comorbidités). La concentrationmaximale est atteinte rapidementavec un délai d’action court de 2 à6 heures et une demi-vie d’éliminationmoyenne de 7 à 15 heures.

Les indications validées

Schématiquement, elles recoupent lesindications des AVK à l’exclusion desvalvulopathies :– la prévention du risque thrombo-

embolique veineux en postopéra-toire de chirurgie orthopédiquemajeure ;

– la prévention du risque emboliquede la fibrillation atriale ;

– le traitement de la thromboseveineuse profonde et de l’emboliepulmonaire.

Les AOD ne sont pas indiqués pour laprévention des thromboses des stentscoronariens.

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Les précautions d’emploi

En cas d’insuffisance rénale, la duréed’action est prolongée par retard d’éli-mination avec un risque hémorragiqueaccru et il est donc impératif de véri­fier la clairance de la créatinine (for­mule de Cockroft) chez tout patientavant d’utiliser un AOD. Au-dessousde 50 ml/mn, le traitement devra êtrerigoureusement ajusté et il est contre-indiqué si clairance de la créatinine< 30 ml/mn. Cette précaution concernesurtout le dabigatran qui est excrété à80 % par le rein, alors que l’éliminationrénale n’est que de 30 à 35 % pour lerivaroxaban et l’apixaban. La prescrip-tion des AOD devrait être limitée chezle sujet âgé et n’est pas justifiée lorsquele patient est bien contrôlé sous AVK.La surveillance d’un traitement parAOD est très différente de celle des AVKpuisqu’il n’y a pas de contrôle biolo-gique du niveau d’anticoagulation. Lestests habituels pour évaluer l’hémos­tase ne sont pas utilisables en pra­tique (TP, INR, TCA) car même s’ils sontsouvent modifiés, ils ne reflètent pasle degré d’anticoagulation. La posolo-gie est fonction avant tout de l’indica-tion mais elle pourra être adaptée s’ilexiste une insuffisance rénale et l’uti-lisation prudente est possible chez lesujet âgé.

Gestion des accidentshémorragiques

Les AOD provoquent moins d’acci­dents hémorragiques graves que lesAVK mais les saignements mineurssont plus fréquents en particulierdigestifs et dans ce cas il s’agit d’unsaignement gastro-duodénal dans 2/3des cas. Quels que soient le type et lagravité du saignement, il faut avanttout connaître le type d’AOD, et l’heurede la dernière prise car l’effet du médi-cament va s’estomper dans les 8 à 12 hpermettant en général l’arrêt spontanédu saignement. En cas de saignementgrave et non contrôlable, on peut obte-nir maintenant le dosage plasmatiquede produit résiduel avec le temps dethrombine dilué pour le dabigatranou « pradaxémie » et l’activité anti-Xaspécifique pour l’apixaban et le riva-roxaban ou « xareltémie »… Si ce tauxcirculant reste élevé, on peut avoirrecours à des concentrés hémosta-tiques standards ou enrichis (CPP-FEIBA) et très prochainement à desreversions efficaces avec des antidotesspécifiques qui seront prescrites dans

le cadre d’ATU de cohorte : andexanet(réversion des anti-Xa) ou idarucizu-mab (réversion du dabigatran). Enfinune dialyse peut être proposée chez lespatients traités par dabigatran en casd’altération de la fonction rénale.

Interactions médicamenteuses

Il n’a pas été démontré d’interactionsavec les inhibiteurs de la pompe à pro-tons (IPP) souvent prescrits chez cespatients, soit à titre préventif, soit enraison d’un antécédent ulcéreux oud’un reflux. En cas de traitement d’éra-dication d’Helicobacter Pylori, la qua-drithérapie bismuthée est possible carle bismuth, la tétracycline, le métroni-dazole n’interfèrent pas avec les AODalors que la clarithromycine peut dimi-nuer leur action. D’autres médica-ments sont contre-indiqués avec lesAOD : kétoconazole, itraconazole,dronédarone, ciclosporine, tacrolimuset AINS (sauf aspirine à visée anti-agrégante).

Modalités d’arrêtet de reprise des AOD

La cinétique rapide des AOD est lacaractéristique qui va changer noshabitudes en termes de gestion desanticoagulants (AC). En effet, il fautconsidérer que l’efficacité est réduitede plus de 50 %, 24 heures après la der-nière prise et devient nulle à 48 heures.Malgré la facilité d’utilisation que pro-cure cette élimination rapide, il faudraprendre en compte tous les facteurspouvant allonger la durée d’action parretard d’élimination (âge, fonctionrénale, interactions médicamenteuses),et rester prudent lors des procédures àrisque hémorragique élevé.Les recommandations qui vont suivresont directement extraites du guide-line ESGE. En pratique, un arrêt de48 heures est en général suffisantavant une endoscopie avec une reprisedu traitement 24 h après le geste, ce quicorrespond au total à 3 jours de non-prise (J-2, J-1, J0) et reprise à J + 1. Unarrêt court avec un simple « saut » dela dernière prise est suffisant pourtoute procédure à faible risque hémor-ragique. La survenue d’un saignementdifféré est plus fréquente sous AC clas-sique avec un délai moyen de 4 jours,alors que les AOD sont pleinementefficaces seulement 4 à 6 h après lareprise, ce qui augmente le risque de

saignement précoce. C’est un change-ment de paradigme par rapport auxAVK car il faut considérer un AODcomme une « héparine en comprimé »et de ce fait, il n’est pas recommandéde faire un relais par HBPM, sauf chezles patients à risque thrombotiqueélevé après avis cardiologique. Dans lesrares cas où l’arrêt des AOD doit êtreprolongé au delà de 48h et chez despatients à risque thrombotique élevé,un relais par héparine peut être indi-qué mais contrairement au relais parAVK, la reprise des AOD devra succéderaux injections d’anticoagulants sanspériode de superposition des traite-ments. Aucune règle ne peut être pro-posée mais idéalement cette périodedite de sécurité sera de 5 à 7 jours postintervention. Enfin, la prise concomi-tante d’aspirine ne modifie pas ceschéma.En pratique on peut donc envisager3 modalités d’arrêt des ADO selon leniveau de risque de la procédure et desfacteurs de risque du patient :– arrêt court : simple « saut » de la der-

nière prise (12 h ou 24 h selon laposologie) ;

– arrêt standard : 72 h (pas de prise48 h avant et reprise dès le lende-main) ;

– arrêt prolongé : 5 jours, réservé auxprocédures à haut risque et pouvantnécessiter un relais par héparine ;

– cette décision d’arrêt du traitementdoit être indiquée clairement dansle dossier du patient et devra fairel’objet idéalement d’une discussioncollégiale (anesthésiste et cardio-logue).

En résumé : arrêt court, pas de contrôlebiologique, pas de relais HBPM.

Évaluation du risquehémorragique des actesendoscopiques (Fig. 1)

La classification des actes endosco-piques en fonction de leur risquehémorragique potentiel répartit habi-tuellement ces actes en 2 groupes :Faible risque et Haut risque. Cependantil paraît plus pragmatique de scinderla catégorie « Haut risque « en 2 sous-groupes en fonction de la possibilité ounon d’effectuer une hémostase endos-copique soit immédiate, soit différéeen cas de saignement. Toutes les pro-cédures de résection des polypes dutube digestif haut et bas peuvent donc

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entrer dans ce sous-groupe à hautrisque contrôlé.

Les actes endoscopiques à faiblerisque hémorragique

Il s’agit de tous les actes endoscopiquesdiagnostiques, avec ou sans biopsie àla pince, qui peuvent donc être réalisésquel que soit le traitement anti-throm-botique en place et sans modificationsde ce traitement. Un arrêt bref peutcependant être envisagé, s’il existe desfacteurs de risque de saignement asso-ciés ou si l’on doit réaliser des biopsiesmultiples (cartographie endobrachyœ-sophage (EBO), surveillance MICI).

Les actes à Haut risque avecpossibilité d’hémostase directe(risque contrôlé)

Il s’agit des résections à l’anse ycompris par mucosectomie des polypesdu tube digestif haut ou bas. Par contrela dissection sous muqueuse reste àhaut risque même si une hémostasepréventive est possible. Il faut rappelerque quels que soient le siège, la tailleou la technique utilisée, la polypecto­mie nécessite l’interruption des AOD :un arrêt standard, dernière prise 48 havant et reprise 12 à 24 h après le geste,est donc recommandé. En cas de risquehémorragique important (très grospolype ou polypes multiples) ou si lepatient présente des facteurs de risque(sujet âgé, insuffisance rénale, ou prised’un agent-antiplaquettaire), un arrêtprolongé de 5 jours peut être conseillé.Compte tenu du risque de saignementdifféré à la reprise du traitement, il estrecommandé d’utiliser autant que pos-sible toutes les mesures préventivesendoscopiques ayant prouvé leur effi-cacité (clips, anse largeable, pince coa-gulante) et de traiter immédiatementtout saignement même mineur per-procédure. En cas de mucosectomie, ilest conseillé de fermer la brèchemuqueuse avec des clips pour toutpolype colique > 1 cm et pour toutpolype duodénal. Le traitement de tousles vaisseaux visibles est impératif.Plusieurs études récentes ont démon-tré l’efficacité des clips en préventiondu saignement retardé post-polypec-tomie/mucosectomie en particulierchez des patients sous AC. Les facteursde risque de saignement le plus sou-vent trouvés sont la taille du polype(> 2 cm), la présence d’un vaisseauvisible (en cas de mucosectomie) etaussi un excès de coagulation per

Figure 1. Classification des actes endoscopiquesen fonction de leur risque hémorragique potentiel (selon Guideline ESGE 2015)

Faible risque Haut risqueMaintien des AOD ou saut dernière prise Arrêt des AOD (J-2, J-1, J0, J + 1)Endoscopie OGD et biopsies Polypectomie (anse), Mucosectomie *Coloscopie et biospies Dissection sous muqueuseÉchoendoscopie diagnostique Échoendoscopie Ponction, drainageCPRE sans sphinctérotoomie CPRE sphinctérotomie, sphinctéroclasieEntéroscopie sans surtube Dilatations digestives et prothèses, SGPE,

LVO préventive* Ces actes sont à haut risque mais avec contrôle possible d’un saignement en utilisant systémati-quement les mesures hémostatiques préventives. Un arrêt prolongé (5 jours) peut être envisagé pourles autres actes à haut risque ou s’il existe des facteurs de sur-risque (insuffisance rénale, associationavec AAP).

Tableau. Recommandations d’arrêt AOD et risque hémorragique

Possibilitéd’hémostase

directeAOD

Conduite à tenir Commentaires

Faible Non Pas de modification des AOD Arrêt bref possible(saut de la dernière prise)

Élevé Oui Arrêt standard : 3 joursArrêt 5 jours en cas de :– Polype > 1 cm– Polypes multiples– Insuffisance rénale– Prise d’AAP

Moyens d’hémostase préventifsrecommandés :– Anse largable, clips– Surélévation adrénalinediluée– Fermeture site de –mucosectomie par clips– Privilégier la mucosectomie

Élevé Non Arrêt prolongé : 5 jours –Abréviation : AAP = anti agrégant plaquettaire. NB : la prise d’AAP ne modifie pas la conduite à tenirsauf mention contraire.

Figure 2. Mesures préventives per-endoscopiques :clips, anse largable, pince coagulante

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endoscopique. Il est donc déconseillépour les petits polypes (moins de6 mm) d’utiliser la pince chaude géné-ratrice de nécrose de coagulation pro-fonde et d’avoir plutôt recours à uneanse froide.L’exérèse des petits polypessessiles sera plutôt faite par mucosec-tomie moins génératrice de saigne-ments que l’exérèse directe à l’anse. Ilfaudra bien informer le patient de cerisque de saignement qui se produithabituellement dans les 2 à 7 joursaprès le geste et prévoir un éventuelrecours à un traitement endoscopique.

En cas de gros polype et a fortiori en casde nombreux polypes, on pourra danscertains cas différer l’exérèse endosco-pique si l’arrêt du traitement anti-coagulant est possible dans un délairelativement court (moins de 6 mois)et s’il n’y a pas de risque carcinologiqueconnu.

Les actes endoscopiques à hautrisque (sans possibilitéd’hémostase directe)

Pour tous ces actes, il faut interromprele traitement 3 jours avant et le reprise48 h après le geste, donc un arrêt enmoyenne de 5 jours.

L’arrêt des AOD est recommandé en casde sphinctérotomie endoscopique oude sphinctéroclasie avec un risque desaignement majoré en cas de macro-lithiase ou de diverticule juxta-papil-laire. En cas d’urgence, la mise en placed’une endoprothèse biliaire (plastiqueou métallique couverte) sans sphincté-rotomie doit être envisagée.

La ponction sous échoendoscopienécessite aussi l’arrêt des ADO et lerisque hémorragique serait plus impor-tant lors de la ponction de lésionskystiques.L’arrêt des AOD est également recom-mandé pour les dilatations des sté-noses digestives ou la pose de pro-thèses entérales et pour la gastrostomieendoscopique.

Conclusion

La connaissance de ces nouveauxmédicaments et une certaine prudencedans leur utilisation permettront d’évi-ter les complications hémorragiqueslors de procédures endoscopiques thé-rapeutiques. Les modalités d’arrêt desAOD sont maintenant mieux définiesavec, en général, un arrêt 48 h avant laprocédure et une reprise le lendemain.Si un arrêt prolongé est nécessaire, ladécision fera l’objet d’une concertationpluri-disciplinaire (cardiologue, anes-thésiste) afin de gérer le relais parhéparine et sa durée. Enfin il faut rap-peler que contrairement au traitementpar AVK, il n’existe pas actuellementde test de coagulation simple pourévaluer l’efficacité des AOD et que laposologie est surtout fonction desindications.

Références

1. Sié P, Samama CM, Godier GA, Rosencher N,Steib A, Llau JV, Van der Linden P, Pernod G,Lecompte T, Gouin-Thibault I, Albaladejo P.

Chirugie et actes invasifs chez les patientstraités au long cours par un anticoagulantoral anti-IIa ou anti-Xa direct. Propositionsdu Groupe d’intérêt en Hémostase Péri-opératoire (GIHP) et sur l’Hémostase et laThrombose (GEHT). Annales Françaisesd’Anesthésie et de Réanimation 2011;30:645-50.

2. Pernod G, Albaladejo P, Godier A ,Samama CM, Susen S, Gruel Y, Blais N,Fontana P, Coheni A, Llau JV, Rosencher N,Schved JF, de Maistre E, Samama M,Mismetti P, Sié P. Prise en charge des compli-cations hémorragiques graves et de lachirurgie en urgence chez les patients rece-vant un anticoagulant oral anti-IIa ou anti-Xadirect. Propositions du Groupe d’intérêt enHémostase Périopératoire (GIHP). AnnalesFrançaises d’Anesthésie et de Réanimation2013;32:691–700.

3. Boustière C, Veitch A, Vanbiervliet G, Bulois P,Deprez P, Laquiere A, Laugier R, Lesur G,Mosler P, Nalet B, Napoleon B, Rembacken B,Ajzenberg N, Collet JP, Baron T, Dumon-ceau JM. Endoscopy and antiplatelet agents.Endoscopy 2011;43:445-58.

4. Baron TH, Kamath PS, McBane RD. Mana-gement of Antithrombotic Therapy inPatients Undergoing Invasive Procedures.N Engl J Med 2013;368:2113-24.

5. Novel oral anticoagulants in gastroentero-logy practice. Jay Desai, Christopher B.Granger, Jeffrey I. Weitz, James Aisenberg.Gastrointest Endosc 2013;78:227-39.

6. ASGE Standards of Practice Committee. Themanagement of antithrombotic agentsfor patients undergoing GI endoscopy.Gastrointest Endosc 2016;83:3-16.

7. Veitch AM, Vanbiervliet G, Gershlick AH,Boustiere C, Baglin T, Smith LA, Radaelli F,Knight E, Gralnek IM, Hassan C, Dumon-ceau JM. Endoscopy in patients on antipla-telet or anticoagulant therapy, includingdirect oral anticoagulants: British Society ofGastroenterology (BSG) and EuropeanSociety of Gastrointestinal Endoscopy(ESGE) guidelines. Gut 2016;65:374-89.

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66Les Six points fortsLe risque de saignement est majoré sous AOD pour toutes lesendoscopies thérapeutiques.Les modalités d’arrêt et de reprise des AOD doivent tenir compte de leurbiodisponiblité et du risque thrombotique du patient.Pour la majorité des endoscopies, un arrêt des AOD de 48 h avant legeste est suffisant avec reprise le jour même ou le lendemain.Avec les AOD, il n’est pas recommandé de faire un relais par HBPM.Le risque hémorragique différé étant plus fréquent sous anticoagulant,il faut en informer le patient et assurer une surveillance prolongée.Les patients à très haut risque sont ceux prenant aussi un antiagrégantet les insuffisants rénaux (Cockroft < 50).

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Questions à choix unique

Question 1

Parmi les médicaments suivants lequel est un AOD ?

❏ A. Prasugrel❏ B. Ticagrelor❏ C. Apixaban❏ D. Dipyridamole

Question 2

Quel est le test biologique permettant de contrôler l’activité d’un AOD ?

❏ A. Taux de prothrombine❏ B. INR❏ C. TCA❏ D. TCK❏ E. Aucun de ces tests

Question 3

Vous programmez une coloscopie en raison d’un immuno-test positif chez un patient de 56 ans sous AOD (Xarelto) pour uneFA avec une score de CHADS-VASC2 à 3. Que proposez-vous ?

❏ A. Pas d’arrêt de l’AOD❏ B. Arrêt 5 jours avec relais par HBPM❏ C. Arrêt 48 h avant le geste❏ D. Report de la coloscopie en raison d’un arrêt envisageable de l’AOD❏ E. Simple saut de la dernière prise

Question 4

Au cours de cette coloscopie, vous retrouvez un polype sessile du côlon droit de 12 mm, que faites-vous ?

❏ A. Vous reprogrammez la coloscopie en décidant un arrêt prolongé de 5 j❏ B. Vous faites une exérèse à l’anse en utilisant un courant de coagulation❏ C. Vous pratiquez une mucosectomie après injection de sérum adrénaliné❏ D. Vous pratiquez une mucosectomie puis fermeture par des clips

Question 5

Après l’exérèse qui s’est déroulée sans saignement, que faites-vous pour la reprise de l’AOD ?

❏ A. Reprise immédiate car il n’y a pas eu de saignement❏ B. Reprise 12 à 24 h après le geste et information du patient❏ C. Reprise 48 h après le geste car le risque embolique est faible❏ D. Relais par HBPM pendant 7 jours pour éviter tout saignement différé