Pour une géopolitique de l’information - Les entretiens du directeur Hors Série n°3

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  • 8/7/2019 Pour une gopolitique de linformation - Les entretiens du directeur Hors Srie n3

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    Pour une gopolitique de linformationJean-Franois Fiorina sentretient avec Bruno Fanucchi

    tre un journaliste parcourant le monde

    constitue souvent un rve de jeunesse.

    Bruno Fanucchi avait donc toutes les cls

    en main pour expliquer aux tudiants

    l'utilit au quotidien de la gopolitique.

    Grand reporter au Parisien, il a galement

    t prsident de l'Association de la presse

    diplomatique franaise, avant de devenir,

    en novembre dernier, prsident de

    l'Association des journalistes de dfense.

    Avec Jean-Franois Fiorina, directeur

    de l'ESC Grenoble, il partage un mme

    constat : la gopolitique se rvle tre

    un outil prcieux pour prparer les esprits de nouvelles configurations.

    JFF. Comme grand reporter, quel regard portez-vous sur la gopolitique ? Com-

    ment la voyez-vous, l'heure o le monde arabese trouve secouen profondeur ?

    BF. La gopolitique permet de mieux comprendre le monde complexe dans lequelnous voluons. Mais plus qu'une thorie, elle doit nous aider analyser les faits.Rien ne remplace l'exprience du terrain.Quand on ne peut y aller soi-mme,ondoit y avoir bien sr des correspondants ou y dpcher des envoys spciaux.

    Mais cela n'empche pas d'avoir au pralable une solide connaissance du cadredans lequel on va voluer. D'autant qu'il faut trs souvent ragir chaud,dans latourmente de l'actualit.

    Une crise comme celle que vit aujourd'hui l'Afrique du Nord est intressante analyser pour les tudiants. Elle bouleverse en effet un certain nombre de para-mtres. La redistribution de la donne doit nous amener faire un effort pour sai-sir en finesse tout la fois ce qui va continuer et ce qui va changer. LaTunisie tantun pays partenaire de longue date de la France, il est patent que ce qui s'y droulene peut en aucun cas laisser indiffrent. On mesure encore davantage l'impor-tance de la connaissance du contexte gopolitique quand on voit qu'une crise n'ar-rive pas forcment seule. Elle peut clater de manire concomitante en plusieursendroits,sans que les vnements aient forcment un lien rel entre eux,avec des

    paramtres souvent trs dissemblables.Ce n'est pas parce que les rues deTunisiesont sous les feux de la rampe que l'on doit oublier qu'il existe de nombreux au-tres foyers de tension, dont certains intressent directement notre pays. Je pense

    Une crise comme celle

    que vit aujourd'hui l'Afrique

    du Nord est intressante

    analyser pour les tudiants.

    Il est vident que toutes ces

    explosions, tous ces dfis

    plus ou moins sous-jacents,

    doivent tre pris en compte

    et analyss par des tudiants

    en cole de commerce. Ils

    mritent d'tre apprcis

    leur juste valeur dans

    la mesure o ils sont

    susceptibles d'affecter la vie

    conomique et l'quilibre

    de socits partenaires

    de notre pays.

    Comprendre Les Enjeux Stratgiques

    Les entretiens gopolitiques bimestriels

    du directeur Hors srie n3 - fvrier 2011

    HS

    n3

    CLES - Les entretiens gopolitiques bimestriels du directeur - HS n3 - fvrier 2011 - www.grenoble-em.com - 1 -

    CLES

    Bruno Fanucchi, grand reporter au Parisien, nouveau prsident de l'Association des

    journalistes de dfense, et Jean-Franois Fiorina, directeur de l'ESC Grenoble, partagentune mme proccupation : veiller nos contemporains aux dfis de la gopolitique,dans un monde complexe et sans cesse mouvant.

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    ainsi la Cte d'Ivoire qui se trouve un tournant majeur de son histoire, ou en-core aux vnements qui se droulent dans le Sahel et dans les zones hautementstratgiques qui s'y rattachent.

    Il est donc vident que toutes ces explosions, tous ces dfis plus ou moins sous-jacents qui se multiplient, couvent ou clatent, doivent tre pris en compte et ana-lyss par des tudiants en cole de commerce. Ces faits mritent d'tre apprcis leur juste valeur dans la mesure o ils sont susceptibles d'affecter la vie cono-mique et l'quilibre de socits partenaires de notre pays.

    Quelles prcautions doit-on prendre, quand on est un journaliste chevronn, pourcommenter " chaud" une crise de l'ampleur de celle qui frappe aujourd'hui cer-

    taines capitales du monde arabe ? Quels sont les cueils viter, quelles sont les

    rgles lmentaires suivre pour ne pas commettre d'impair ?

    Le B-A-BA de notre mtier consiste bien videmment recouper soigneusementles informations recueillies. Cela doit se faire d'abord auprs des grandes agencesde presse, AFP, Reuter, AP, etc. Ensuite, avec le temps, chaque journaliste seconstitue un rseau de correspondants locaux, dont il va mesurer la fiabilit. La so-lidit des rseaux permet trs vite de confirmer ou au contraire de mettre endoute les lments dont on dispose pour mesurer un phnomne surgi l'im-proviste. Tout va trs vite. Cette dimension de l'accompagnement en temps reldes vnements constitue un paramtre-cl pour comprendre l'volution de la

    profession de journaliste. Les sites web des journaux sont remis jour en per-manence. Il faut donc sans relche vrifier la fiabilit des donnes mises en ligne,et surtout, ce qui est plus dlicat, tre mme de donner les bons clairages, deproposer des pistes intelligentes de rflexion.

    Ce travail de mise en perspective ne s'improvise pas ! Une bonne connaissance desfacteurs gopolitiques est absolument indispensable si l'on veut faire vritable-ment du journalisme digne de ce nom sur le long terme. Mais j'aurais tendance dire qu'une mme exigence est attendue de la part des managers et dcideurs quiuvrent sur la scne internationale. Car ces vnements ont l'vidence des r-percussions sur le monde des affaires. Une crise profonde, dont on voit des imagestrs fortes sur les crans, a inluctablement des consquences normes sur la vieconomique et financire. Les flux commerciaux sont affects, tout comme la ges-tion des ressources humaines. Il faut parfois prendre dans des dlais fort brefs desdcisions majeures, qui ont un cot et un impact non-ngligeables dans la vie d'unesocit. Choisir d'vacuer des expatris, voire de les exfiltrer en cas de crise aige,sont autant de dcisions lourdes de consquences prendre pour une direction.Aussi, dans une telle configuration, une apprhension juste de la situation du paysconcern est indispensable.

    Vous mettez l'accent sur la ncessit qu'il y a de possder une solide grille de d-

    cryptage pour apprcier correctement les vnements, tout en soulignant qu'il faut

    souvent agir dans l'urgence. A l'vidence, c'est l un exercice d'quilibriste complexe

    et prilleux que doit pratiquer au quotidien le journaliste spcialis dans les rela-

    tions internationales

    Oui. Il est clair que la gestion de ces affaires en temps rel se rvle tre mi-nemment sensible. Cette dimension du temps que vous invoquez est importante.Quand vous tes oblig de ragir dans l'instant, il est bon d'avoir un solide back-groundauquel s'adosser, et de bons rseaux pour confirmer ou infirmer telle outelle piste, telle ou telle interprtation. Une erreur la base peut se rvler vitelourde de consquences, et gnrer des interprtations errones. Ces dernirespeuvent elles-mmes entrer dans une spirale infernale et conduire des mau-vaises analyses, donc par voie de consquence des dcisions mal fondes ou car-rment sans fondement, voire l'inverse des ralits observes. Vous pourreztoujours faire ultrieurement les corrections que vous souhaiterez, quand l'infor-mation est lche, il est ensuite trop tard pour rectifier. C'est l un risque consubs-tantiel au systme. Un emballement de l'information peut aboutir dans les faits une dsinformation, pas forcment voulue, mais susceptible de provoquer dsor-dres, incomprhensions et parfois conflits.

    La capacit vrifier et recouper les informations fait parfois dfaut lorsque l'ontravaille en temps rel. Car il faut tre au diapason des autres, si possible d'ailleursles devancer dans la course l'information. Ce dfaut, car c'en est un, est inhrent

    Avec le temps, chaque

    journaliste se constitue

    un rseau de correspondants

    locaux, dont il va mesurer

    la fiabilit. La solidit

    des rseaux permet trs vite

    de confirmer ou au contraire

    de mettre en doute

    les lments dont on dispose

    pour mesurer un phnomne

    surgi l'improviste.

    Une bonne connaissancedes facteurs gopolitiques

    est absolument indispensable

    si l'on veut faire vritablement

    du journalisme digne de ce

    nom sur le long terme.

    Mais j'aurais tendance

    dire qu'une mme exigence

    est attendue de la part

    des managers et dcideurs

    qui uvrent sur la scneinternationale. Car ces

    vnements ont l'vidence

    des rpercussions

    sur le monde des affaires.

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    aux bouleversements qui ont affect le monde de l'information via l'apparitiond'Internet et le rle chaque jour croissant des rseaux sociaux qui s'appuient surdes technologies sans cesse renouveles, plus performantes, plus rapides Ilconvient donc de garder ces lments l'esprit pour temprer certaines tenta-tions qui nous feraient parfois "aller plus vite que la musique". Car en suivant le fildes vnements le nez coll aux crans d'ordinateurs, on prend le risque de ne plusrflchir, de ne plus mettre correctement les vnements en perspective.

    Pour prouver la validit des informations reues, pour bien cadrer le dbat, pour

    reflter au mieux la ralit, un solide rseau de correspondants confirms se r-vle tre ncessaire. Se crer au fil du temps son rseau de capteurs, avec les-quels on est en contact permanent pour sentir les volutions du pays, lesfluctuations de la conjoncture, reste capital. C'est d'ailleurs trs souvent la premiresource d'alerte. Notons d'ailleurs que travaillant trs en amont, bnficiant deleurs propres rseaux, les journalistes sont frquemment informs plus rapide-ment que les reprsentations diplomatiques. La qualit des hommes n'est pas in-criminer. C'est simplement le constat que les sources journalistiques sont souvent

    plus ractives que les circuits officiels, qui par nature sontplus lourds grer, et o les diffrentes strates franchirexigent parfois de respecter des procdures complexes.

    Pour vous, la gopolitique a donc une composante "ter-

    rain" essentielle ?Oui, c'est indniable. La gopolitique, mes yeux, passed'abord par la connaissance des ralits du terrain. Lessubtilits ne s'enseignent pas toujours travers les livreset les thses, quelle que puisse tre leur valeur. Dcouvrirla face cache d'un pays, sa ralit vivante et ncessaire-ment complexe, exige un vcu, un arpentage allant bienau-del des cnacles officiels. En ce sens, les voyagesd'tudes sont ncessaires, ils ouvrent des portes, mais ilsne sont pas toujours suffisants pour apprhender cor-rectement la ralit d'un pays. Il faut savoir aller au-deldes apparences, des a priori, des ides toutes faites. Il

    convient aussi d'tre capable de comprendre que tout ne se droule pas forcmentselon un schma cartsien, que notre manire de penser d'occidental n'est peut-tre pas de mise partout et en tous lieux. Bref, qu'il existe d'autres reprsentationsdu monde, d'autres manires de le percevoir, d'autres faons d'y vivre, en fonctionde paramtres qui parfois nous chappent, parfois nous heurtent. La diversit dumonde doit nous enseigner une certaine modestie. Il nous faut apprendre la plu-ralit des opinions et accepter que les regards soient diffrents selon les latitudeset les histoires des peuples que nous rencontrons.

    A cet gard, il est frappant de constater que nombre de dcideurs de haut niveau,d'hommes politiques ou d'intellectuels, ont une vision biaise des pays qu'ils tra-versent. Ils n'en ont qu'une perception la manire des dcors Potemkine, se fiantaux seules apparences sans chercher connatre la ralit quasiment charnelle deces pays. Ils y collent des schmas de pense occidentaux, cent lieux des rali-ts locales. Cet aveuglement conduit inluctablement des interprtations erro-nes, donc des impasses ou des issues dramatiques. L'erreur est de croire quel'on connat un pays en se bornant en ctoyer les lites sous les dorures des sa-lons officiels ou dans les restaurants branchs d'une capitale. Les ralits sont sou-vent des annes-lumire de ces rceptions et de ces faux-semblants. Il faut aucontraire se donner la peine d'aller la rencontre des autochtones, de nouer peu peu un dialogue avec eux, de les entendre tout en tant capable de faire abs-traction de nos jugements a priori. Cette facult d'coute et cette capacit allervers l'autre permettent d'tablir des contacts d'autant plus solides et fiables qu'ilsse btissent sur le long terme.

    C'est la raison pour laquelle je me rjouis que les coles et universits franaisess'ouvrent de plus en plus sur l'tranger. Le fait d'enseigner et surtout de pratiquer

    la gopolitique, d'effectuer des sjours loin de chez soi, de s'inscrire dans unechane de coopration internationale entre coles de diffrents continents, toutcela est positif. C'est le signe que notre pays prend conscience de l'urgence de

    En suivant le fil

    des vnements le nez coll

    aux crans d'ordinateurs,

    on prend le risque de ne plus

    rflchir, de ne plus mettre

    correctement les vnements

    en perspective.

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    Je me rjouis que les coles

    et universits franaises

    s'ouvrent de plus en plus

    sur l'tranger. Le faitd'enseigner et surtout

    de pratiquer la gopolitique,

    d'effectuer des sjours loin

    de chez soi, de s'inscrire dans

    une chane de coopration

    internationale entre coles

    de diffrents continents, tout

    cela est positif. C'est le signe

    que notre pays prend

    conscience de l'urgence deformer les lites de demain

    de manire plus raliste.

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    former les jeunes gnrations et les lites de demain de manire plus raliste.Certes, un gros travail reste accomplir en amont. Ce n'est pas en dbarquant del'avion que l'on doit commencer s'intresser au pays. C'est bien avant, en se pr-parant s'ouvrir de nouvelles cultures et d'autres manires de penser et devivre. A cet gard, il est vident que la gopolitique constitue un outil prcieuxpour prparer les esprits de nouvelles configurations. Quand je dis prparer,c'est aussi prendre conscience des dangers et des chausse-trappes que l'on peutrencontrer dans un contexte radicalement diffrent.

    Ce qui passe aussi par une bonne connaissance de l'histoire des pays concernsOui, bien sr. A cet gard, je suis d'ailleurs surpris que souvent, au plus haut niveaude l'Etat, on envoie en mission des gens trs brillants, trs diplms, mais qui n'ontpas toujours - loin s'en faut ! - une apprhension correcte des situations dans la-quelle ils se trouvent plongs. La connaissance des livres et le fait d'tre un bel es-prit ne suffisent pas toujours. Cela est particulirement vrai (et dangereux !) quandon volue dans certaines zones gopolitiques explosives ou trs exposes. Il m'aainsi t donn de rencontrer un responsable politique, nomm dans un thtred'oprations haut risque, qui ne connaissait rien, mais vraiment strictement rien,du secteur o il dbarquait. C'tait d'ailleurs la premire fois qu'il mettait les piedsdans ce pays d'une complexit inoue On a parfois la fcheuse impression quel'on accorde des missions, non en fonction de la capacit des personnes les rem-

    plir, mais selon des critres chappant toute rationalit, reposant soit sur deschoix d'ordre politique, soit sur des coteries. Avec la cl bien souvent des r-sultats dsastreux, qui ne sont pas perus comme tels forcment depuis Paris, maisqui produisent bel et bien des effets fcheux sur le terrain. Lors de crises ma-jeures, cela peut avoir des consquences incalculables, parfois mortelles.

    Le rle du journaliste de terrain est aussi de faire toucher du doigt aux lecteurs fran-

    ais la complexit des situations gopolitiques ?

    C'est certain. Pdagogie d'abord ! Travaillant pour ma part dans un journal popu-laire et grand public comme l'est Le Parisien, il est de mon devoir d'aider nos lec-teurs comprendre, de manire simple, les enjeux lis tel ou tel dossier. Il fautleur donner les cls pour comprendre ce qui se passe, afin qu'ils puissent se faireune opinion. Notre travail est moins un travail de spcialiste que celui d'un passeur,

    essayant de faire percevoir une ralit autre aux lecteurs, ralit qu'ils ont parfoisdu mal imaginer. Nous devons donc sensibiliser, expliquer, rapporter, bref, en unmot dcrypter et raconter. Avec un langage que nos lecteurs puissent compren-dre. Ce qui implique de ne pas se cantonner des analyses techniques, mais ausside faire passer l'motion qui ressort de telle ou telle situation. D'o par exemplela ncessit de rapporter des histoires ou des faits, qui, en un clair, vont permet-tre de mieux apprhender une situation. Cet effort de vulgarisation est indispen-sable. Et il me semble qu'il participe de la mme tendance qui est la vtre veillernos contemporains aux dfis de la gopolitique, dans une scne internationalesans cesse mouvante et tellement complexe

    Quels conseils majeurs donneriez-vous de jeunes tudiants passionns par la go-

    politique ?

    D'abord, il faut savoir marcher ! Je plaisante moiti, mais je crois qu'il est im-portant d'avoir un contact physique avec le pays que l'on dcouvre et que l'onveut comprendre. Pour cela, il ne faut pas craindre de marcher dans les rues, en-trer dans les choppes et les cafs, sentir l'humeur des habitants. C'est ainsi, en che-minant et en observant, que l'on peut aller au-del de la seule approcheintellectuelle, ncessaire mais pas forcment suffisante. Quand je dis marcher, jeveux dire aussi tre capable d'aller la rencontre de l'autre, savoir l'couter, s'in-tresser lui. C'est un conseil que l'on doit donner d'ailleurs non seulement auxtudiants, mais aussi aux hommes d'affaires, aux diplomates ou aux intellectuels. Atitre personnel, je suis assez fascin par la Russie. Or, si vous n'avez pas pris lemtro Moscou, vous ne connaissez pas Moscou. Je suis peu prs certain que90% des dlgations officielles en visite dans la capitale russe ne se sont jamaisdonn la peine de prendre le mtro. Dommage pour elles ! Car c'est en percevant

    tous ces infimes dtails de la vie quotidienne que l'on peut le mieux apprhenderl'me d'un peuple. Et l, ne touchons-nous pas l'un des ressorts vivants et fonda-mentaux de la gopolitique ?... I

    Travaillant pour ma part

    dans un journal populaire

    et grand public comme l'est

    Le Parisien, il est de mon

    devoir d'aider nos lecteurs

    comprendre, de manire

    simple, les enjeux lis tel

    ou tel dossier. [] Il me sem-

    ble qu'il participe de la mme

    tendance qui est la vtre

    veiller nos contemporains

    aux dfis de la gopolitique,

    dans une scne internationale

    sans cesse mouvante

    et tellement complexe

    Je crois qu'il est important

    d'avoir un contact physique

    avec le pays que l'on veut

    comprendre. Pour cela, il ne

    faut pas craindre de marcher

    dans les rues, entrer dans

    les choppes et les cafs,

    sentir l'humeur des habitants.

    C'est ainsi, en cheminant

    et en observant, que l'on peut

    aller au-del de la seule

    approche intellectuelle,

    ncessaire mais pas

    forcment suffisante. []

    C'est un conseil que l'on

    doit donner d'ailleurs

    non seulement aux tudiants,

    mais aussi aux hommesd'affaires, aux diplomates

    ou aux intellectuels.

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    CLES - Les entretiens gopolitiques bimestriels du directeur - HS n3 - fvrier 2011 - www.grenoble-em.com - 5 -

    Raison d'tre des Entretiens du Directeur

    En rencontrant tous les deux mois despersonnalits de haut niveau qui prati-

    quent la gopolitique, Jean-FranoisFiorina aime rappeler que l'intrt del'ESC Grenoble pour cette discipline

    rpond des objectifs bien prcis :

    Notre volont est d'inciter nos parte-

    naires et nos tudiants faire preuve d'unnouvel tat d'esprit. Il s'agit de leur pro-

    poser non seulement une grille de lecturedu rel adapte aux enjeux du monde

    contemporain, mais aussi de nouveaux ou-tils d'aide la dcision. Pour les entre-

    prises, il s'agit d'tre capables de ragir lemieux et le plus rapidement possible. Pournos tudiants, il s'agit moins d'voluer sur

    le court terme que de se prparer unecourse de fond.D'o une formation qui vise davantage

    former les esprits qu' apprendre de sim-ples techniques, qui, de toute faon, vo-

    lueront. Pour les uns comme pour lesautres, il est cependant impratif de bien

    comprendre l'intrt de la gopolitique,non pas comme rfrent universitaire abs-

    trait, mais comme mthode permettantd'approcher et cerner le monde dans sacomplexit, afin d'tre au plus prs des

    enjeux rels. La gopolitique doit servir gagner des marchs, ou du moins nepas en perdre. Autrement dit, elle constitue

    une cl prcieuse pour voluer dans lemonde d'aujourd'hui, et surtout de de-

    main. (Communication & Influencen19, mai 2010) I

    Bruno Fanucchi

    Franais avec des racines ita-

    liennes, Bruno Fanucchi est n

    Paris en 1956. Mari, pre de

    trois enfants, il a opt pour une

    carrire journalistique aprs

    avoir obtenu une matrise de

    droit priv l'universit de Paris-

    II en 1978. L'anne suivante, il

    entre au Parisien comme repor-

    ter, puis chef-adjoint du service

    politique. Cette position l'amne

    faire de trs nombreux voyages

    officiels aux cts des prsidents

    Mitterrand et Chirac. En mme

    temps, il effectue, toujours pour

    Le Parisien, de trs nombreuses

    missions comme grand reporter.

    Ce qui lui vaut de parcourir les

    zones haut risque de la plante,

    celles o se produisent des faits

    majeurs, affectant la scne inter-

    nationale et bouleversant la

    donne gopolitique. On le voit

    ainsi rgulirement en Afghanis-

    tan, en Isral, au Liban, au

    Moyen-Orient et aussi bien en

    Colombie qu'au Vietnam. Mais on

    le croise surtout ces dernires

    annes en Afrique : Burkina-Faso,

    Cameroun, Cte-d'Ivoire, Gabon,

    Niger, Sngal, Tchad Son cen-tre de prdilection reste toute-

    fois une Europe de l'Est, qui

    volue grande vitesse et qu'il

    connat depuis longtemps (de la

    Pologne la Roumanie), et bien

    sr la Russie pour laquelle il

    prouve une authentique pas-

    sion.

    Le regard de Bruno Fanucchi sur

    la gopolitique est aussi celui

    d'un journaliste qui prend

    cur son mtier, et n'hsite pas

    s'engager pour exercer des

    responsabilits de haut niveau. Il

    a ainsi t Prsident de l'Asso-

    ciation de la Presse diplomatique

    franaise de 2006 2010

    (www.pressediplo.com). Cette

    association regroupe plus de 150

    journalistes professionnels trai-

    tant de politique internationale

    et reprsentant tous les grands

    organes de presse franais.

    En novembre 2010, Bruno

    Fanucchi a pris la tte de l'Asso-

    ciation des journalistes de dfense

    (www.ajd-info.fr). Il a ainsi assum

    la succession de son ami Frdric

    Pons, rdacteur en chef de l'heb-

    domadaire Valeurs actuelles. L'As-

    sociation des journalistes de

    dfense compte dans ses rangs

    quelque 150 journalistes profes-sionnels, spcialistes des questions

    de dfense. Elle organise chaque

    anne des voyages spcialiss,

    axs sur les grands enjeux gopo-

    litiques et de scurit. L'A.J.D. est

    soutenue par de nombreux orga-

    nismes officiels, au premier rang

    desquels le ministre de la D-

    fense, mais aussi par des entre-

    prises et des grandes coles, parmi

    lesquelles l'Ecole suprieure de

    commerce de Grenoble.I

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