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INSTITUT NATIONAL POLYTECHNIQUE DE GRENOBLE
N° attribué par la bibliothèque /_/_/_/_/_/_/_/_/_/_/
THESE
pour obtenir le grade de :
DOCTEUR DE L’INPG
Spécialité : « Mécanique des Milieux Géophysiques et Environnement »
Préparée dans l’Unité de Recherche Hydrologie-Hydraulique, Cemagref (Lyon) Dans le cadre de l’Ecole Doctorale « Terre, Univers, Environnement »
Présentée et soutenue publiquement par
Julien VETTER
Le 5 juillet 2004
Contribution d’un code de calcul météorologique méso-échelle à la climatologie des pluies en zone de relief
Directeur de thèse : Jean-Dominique CREUTIN
Composition du Jury proposé THIELEN J. Senior Researcher JRC Ispra, Italie Rapporteur HUBERT P. Professeur ENSMP Rapporteur GRESILLON J.M. Professeur INPG Examinateur DUCROQ V. Ingénieur de la Météorologie, Météo-France Examinateur NEPPEL L. Maitre de conférences, Université Montpellier II Examinateur CREUTIN J.D. Directeur de Recherche CNRS, LTHE Directeur de Thèse LEBLOIS E. Ingénieur GREF, Cemagref Co-directeur de thèse
INSTITUT NATIONAL POLYTECHNIQUE DE GRENOBLE
N° attribué par la bibliothèque /_/_/_/_/_/_/_/_/_/_/
THESE
pour obtenir le grade de :
DOCTEUR DE L’INPG
Spécialité : « Mécanique des Milieux Géophysiques et Environnement »
Préparée dans l’Unité de Recherche Hydrologie-Hydraulique, Cemagref (Lyon) Dans le cadre de l’Ecole Doctorale « Terre, Univers, Environnement »
Présentée et soutenue publiquement par
Julien VETTER
Le 5 juillet 2004
Contribution d’un code de calcul météorologique méso-échelle à la climatologie des pluies en zone de relief
Directeur de thèse : Jean-Dominique CREUTIN
Composition du Jury proposé THIELEN J. Senior Researcher JRC Ispra, Italie Rapporteur HUBERT P. Professeur ENSMP Rapporteur GRESILLON J.M. Professeur INPG Examinateur DUCROQ V. Ingénieur de la Météorologie, Météo-France Examinateur NEPPEL L. Maitre de conférences, Université Montpellier II Examinateur CREUTIN J.D. Directeur de Recherche CNRS, LTHE Directeur de Thèse LEBLOIS E. Ingénieur GREF, Cemagref Co-directeur de thèse
Remerciements Cette thèse est le fruit d’un travail de 3 ans qui n’aurait bien sur pas été possible sans l’aide
d’un certain nombre de personnes.
J’aimerais remercier tout d’abord, Etienne Leblois, mon co-encadrant au Cemagref (co-
équipier même devrais-je dire), dont la présence et l’aide m‘ont beaucoup apporté. Sa bonne
humeur, son enthousiasme, ses (trop ?) nombreuses idées et son sens du sacrifice ont réussi à
compenser à certains moments mon côté défaitiste et ma trop grande prudence. Il a su
m’épauler jusqu à la fin de la thèse et nous avons progressé ensemble dans la thématique de
météorologie en montagne. Ce fut un compagnon de route agréable et un jour j’arriverai à le
tutoyer.
Je remercie aussi Jean Dominique Creutin, mon Directeur de thèse pour ses conseils et ses
critiques avisés, son expérience et sa rigueur scientifique, qui ont permis de bien cadrer mon
travail.
Mes remerciement vont aux membres du jury, Jutta Thielen et Pierre Hubert mes rapporteurs,
Véronique Ducrocq et Luc Neppel, pour leurs remarques positives et encourageantes. Je
remercie aussi particulièrement Jean Michel Grésillon, qui a suivi mon travail de loin avec
beaucoup de positivisme en tant que chef de l’unité Hydrologie-Hydraulique. Il m’a permis de
retrouver confiance dans certains moments de doute.
Je tiens a remercier aussi Sandrine Anquetin pour ses conseils et son aide précieuse sur la
partie simulation.
J’aimerais remercier particulièrement José Ribot Bruno, la mémoire du TPG, pour les
données récoltées pendant les 8 ans de fonctionnement de la première version du réseau de
mesure et pour les moments privilégiés partagés sur les pentes de Chartreuse ou Belledonne.
Ce travail n’aurait pas pu être réalisé sans l’aide de Météo-France, qui nous a notamment
fourni le code numérique et les radiosondages de Lyon St Exupéry. Je remercie donc
sincèrement Annick Auffrey et Pascale Chevrand.
L’utilisation du code MésoNH étant relativement complexe je remercie aussi Juan Escobar,
Jacqueline Duron grâce à qui Diaprog n’a plus de secret pour moi, et Isabelle Mallet pour son
dépannage par mail un mois avant la fin de ma thèse d’un programme essentiel pour mon
travail
.
Je tiens à remercier aussi toutes les personnes qui, même si elles n’ont pas suivi mon travail,
ont contribué à rendre ses 3 ans (et plus…) plus qu‘agréable.
Ahmad Ghavasieh, mon compagnon d’infortune tout au long de cette thèse, avec qui j’ai
partagé bien plus qu’un bureau. Il a eu le grand mérite de supporter mes pitreries et mes
moments de déprime, mon bavardage perpétuel et mes ronchonnements le tout sans jamais
s’énerver, toujours calme et de bonne humeur. Je le remercie pour toutes nos discussions sur
l’état du monde, pour sa générosité et pour tous ces repas partagés dans le bureau quand
j’avais oublié ma carte de cantine.
Toute la bande de joyeux lurons sans qui mon séjour au Cemagref aurait paru bien morne :
- Sandy et ses petites couettes, avec qui j’ai tant partagé (ses cigarettes, nos moments
de doute, la pêche électrique, les concerts pluvieux et tout le reste) et qui m’a fait
découvrir Grenoble,
- Fredéric, mon autre fournisseur attitré de nicotine, camarade de déprime, avec qui
broyer du noir n’a jamais été aussi savoureux et qui, sous ses airs de misanthrope
bourru, cache un cœur d’or,
- Jean-Philippe, le smurfeur éthylique, le chef de la relieuse, qui ne supporte pas grand
chose mais nous a tant fait rire avec ses calembours…
- Eric, Président d’escapade, fameux secouriste spécialiste du point de compression,
qui malgré son aspect rigide n’est jamais le dernier à lever son verre,
- Guillaume, avec qui relever les pluviomètres a toujours été un plaisir (sauf quand il
oublie ses raquettes…) et qui finalement n’a qu’un seul défaut, être supporter de
Verts…
- Raouf, mon tunisien préféré, toujours de bonne humeur et si chaleureux avec les
stagiaires. Je le remercie du fond du cœur pour ses schémas SIG.
- Anne-Laure, documentaliste hors pair, que je n’oublierai plus jamais d’inviter,
- Maria-Héléna, avec qui nous ne sommes jamais d’accord mais qui s’est si gentiment
occupé de moi dans les derniers mois que je lui pardonne volontiers,
- Oldrich qui m’a permis de découvrir l’Afrique,
- Kamal, le marocain de poche dont la gentillesse est elle gigantesque,
- Philippe, le dépanneur, colporteur de mes déboires médicaux,
- Noémie, toujours prête à rire à mes mauvaises blagues,
- Christine et son couscous fantôme, notre mamie gâteau pas gâteuse,
- Aurélie toujours gentille et prévenante,
- Benjamin le surfeur marseillais qui a choisi le mauvais Olympique,
- et aussi Pascal Breil pour son aide statistique, Jean-Pierre Laskowsky son bonnet et
sa sciure, Anne Eicholz et Hélène Faurant les deux mamans de l’unité, Sandra, Julien,
Clément et tous les stagiaires que j’ai pu cotoyer, Latif Djerboua le roi des ACP,
Sebastien et Alain, Paul Le Pimpec pour ses stagiaires qualité de qualité, Marie Bé la
militante, Jean Guillaume, Bruno Biedermann, Isabelle, Lars et Irina et tous les autres
que j’aurais oubliés…
Bien sûr un grand merci plein de tendresse à Pauline, qui m’a soutenu jusqu’aux derniers
instants, a relu le manuscrit et suivi consciencieusement mes présoutenances à minuit dans le
salon…
Je remercie également mes parents pour 20 ans de travail d’éducation à temps plein, Nico et
ma petite Mily mes frère et sœur, Benjamin, René, Criquette, Thierry, Carlo, Fabien, Audrey,
les Julies, Laure et Greg pour être tous venus à ma soutenance, Yonnel pour être venu au pot,
Xavier même s’il n’est venu à rien du tout… Laurent et Muriel pour les squats à Grenoble
forcément au dernier moment, mes grand-mères, mes chiens, le Husky Club de France,
l’Olympique Lyonnais, les stylos Bic, etc.
1
Table des matières
Table des matières ................................................................................................................ 1
A. Position du problème......................................................................................................... 7
Introduction .......................................................................................................................... 9
Chapitre 1 : Influences du relief sur la formation nuageuse et le déclenchement des
précipitations ...................................................................................................................... 13
I Introduction.................................................................................................................... 13
II Phénomènes liés au relief en atmosphère stable........................................................... 14
1) Microphysique ......................................................................................................... 14
2) Dynamique............................................................................................................... 15
3) Interactions avec les échelles synoptiques : leffet seeder-feeder ........................... 17
III Phénomènes liés au relief en atmosphère instable ...................................................... 17
1) Humidité .................................................................................................................. 18
2) Instabilité conditionnelle.......................................................................................... 18
3) Déclenchement des précipitations............................................................................ 18
4) Interactions avec les échelles synoptiques ............................................................... 21
IV Conclusion .................................................................................................................. 22
Chapitre 2 : Les différentes approches dans l’étude des pluies en montagne .............. 23
I Les méthodes dinterpolation......................................................................................... 23
II Les modèles conceptuels des précipitations orographiques ......................................... 25
III Les modèles déterministes et lexpérience MAP ........................................................ 26
2
IV Conclusion .................................................................................................................. 29
B. Présentation des données ................................................................................................ 31
Chapitre 3 : Présentation du transect de pluviographes TPG....................................... 33
I Introduction.................................................................................................................... 33
II Localisation du réseau .................................................................................................. 33
III Climatologie sur le domaine ....................................................................................... 36
Chapitre 4 : Les radiosondages......................................................................................... 39
I I Introduction ................................................................................................................. 39
II II Les données............................................................................................................... 39
Chapitre 5 : Simulations bidimensionnelles : les raisons du choix et les limites
potentielles........................................................................................................................... 43
I Introduction.................................................................................................................... 43
II Sélection des épisodes .................................................................................................. 43
III Choix dune modélisation bidimensionnelle............................................................... 45
1) Le transect de pluviographes ................................................................................... 46
2) Approche climatologique......................................................................................... 46
IV Limites a priori du 2D................................................................................................. 47
1) Les radiosondages.................................................................................................... 48
2) Phénomènes météorologiques dus au relief ............................................................. 48
V Conclusions .................................................................................................................. 51
Chapitre 6 : Homogénéité des radiosondages sélectionnés............................................. 53
I Principe .......................................................................................................................... 53
3
II Etude de la pression...................................................................................................... 53
III Etude de la température............................................................................................... 60
IV Etude de lhumidité ..................................................................................................... 63
V Etude de la stabilité ...................................................................................................... 68
VI Etude de la vitesse du vent.......................................................................................... 73
VII Analyse en Composantes Principales sur lensemble des variables
thermodynamiques ........................................................................................................... 80
VIII Exemples de la variabilité des radiosondages .......................................................... 88
IX Conclusions................................................................................................................. 92
Chapitre 7 : Les pluies sur le TPG.................................................................................... 95
I La pluviométrie dans les Alpes...................................................................................... 95
II Pluviométrie sur le TPG sur la période 1987/1995 ...................................................... 96
III Pluviométrie sur le TPG pour les journées sélectionnées ........................................... 99
IV Etude des pluies fortes sur les pluviomètres du TPG................................................ 101
V Conclusions ................................................................................................................ 105
C. Etude des relations entre les radiosondages et les pluies observées............................ 107
Chapitre 8 : Représentativité des radiosondages .......................................................... 109
I Introduction.................................................................................................................. 109
II Corrélations simples pluies / indicateurs météorologiques ........................................ 110
III Conclusions ............................................................................................................... 118
D. Modélisation MésoNH .................................................................................................. 121
Chapitre 9 : L’outil numérique Méso-NH ..................................................................... 123
4
I Présentation générale de Méso-NH et motivations du choix dutilisation .................. 123
II Présentation scientifique de MesoNH ........................................................................ 124
1) Hypothèses ............................................................................................................. 124
2) Equations principales ............................................................................................. 127
3) Paramétrisation des précipitations ......................................................................... 132
Chapitre 10 : Simulation de cas semi réels .................................................................... 135
I Simulations .................................................................................................................. 135
II Résultats des simulations Méso-NH........................................................................... 138
III Comparaison avec les cumuls mesurés par les postes du TPG ................................. 140
1) Distribution des cumuls ......................................................................................... 140
2) Moyennes des cumuls le long du relief.................................................................. 142
IV Comparaison des pourcentages doccurrence de pluie ............................................. 146
V Etude des pluies extrêmes .......................................................................................... 149
VI Moyennes de paramètres physiques.......................................................................... 152
VII Qua-t-on perdu avec nos hypothèses...................................................................... 156
1) Schéma microphysique chaud de Kessler.............................................................. 156
2) La configuration bidimensionnelle ........................................................................ 159
VIII Simulation longue................................................................................................... 163
IX Conclusions............................................................................................................... 164
E. Conclusions et perspectives........................................................................................... 167
Conclusions générales ...................................................................................................... 169
5
Perspectives....................................................................................................................... 173
Bibliographie..................................................................................................................... 177
Table des figures............................................................................................................... 185
F. Annexes.......................................................................................................................... 195
Annexe 1 : Rappels sur les précipitations ...................................................................... 197
I Processus physiques..................................................................................................... 197
1) Air humide, rapport de mélange, saturation........................................................... 197
2) La condensation ..................................................................................................... 197
3) Croissance des gouttelettes : effet Bergeron, coalescence..................................... 198
II Stabilité ....................................................................................................................... 198
III Stabilité, saturation et nuages.................................................................................... 202
IV Niveau de condensation, niveau de convection libre................................................ 202
Annexe 2 : Le TPG matériel, mesures et lacunes .......................................................... 205
I Matériel et mesures ...................................................................................................... 205
II Lacunes....................................................................................................................... 206
1) Nature des précipitations et conditions climatiques d'altitude............................... 206
2) Problèmes techniques en dehors de la saison hivernale......................................... 207
3) Quantification des lacunes ..................................................................................... 208
Annexe 3 : Les radiosondages ......................................................................................... 211
I Historique..................................................................................................................... 211
II Le ballon sonde........................................................................................................... 211
6
Annexe 4 : Analyse en composantes principales ........................................................... 213
I Pratique ........................................................................................................................ 213
II Interprétation des résultats dune ACP....................................................................... 215
1) Nombre daxes à retenir......................................................................................... 215
2) Signification des composantes principales ............................................................ 216
3) Contributions des individus aux axes .................................................................... 217
Annexe 5 : Thermodynamique de l’air humide............................................................. 219
I Calcul du flux dhumidité ............................................................................................ 219
II Eau précipitable .......................................................................................................... 220
III Indicateurs multipliés par lhumidité relative ........................................................... 220
Annexe 6 : Corrélations pluies TPG / indicateurs météorologiques............................ 223
Annexe 7 : Compléments sur les simulations................................................................. 227
I Namelist standard......................................................................................................... 227
II Temps de simulation................................................................................................... 230
7
A. Position du problème
8
9
Introduction
De tout temps, les hommes ont été fascinés par les montagnes. Quelles soient le repaire des
démons ou bien la résidence des dieux, lobsession quils ont eu depuis plus dun siècle à les
gravir en est la preuve la plus marquante. Cette fascination peut trouver son explication dans
leur beauté, leur majesté, mais très certainement aussi dans les terreurs quelles suscitent. Les
conditions climatiques qui y règnent rendent en effet les conditions de vie particulièrement
rudes. Le froid, la neige, le vent sont autant de phénomènes qui mènent la vie dure aux
habitants des massifs montagneux. Avalanches, glissements de terrain, orages violents et
crues éclair sont autant de catastrophes qui ont tué et continuent encore à le faire dans les
montagnes de part le monde.
Le relief influence de manière très importante les conditions météorologiques locales. Un des
effets les plus marquants de cette influence est le contrôle exercé sur le déclenchement, la
distribution spatiale, et le renforcement des précipitations. Il est en effet notoire que les
précipitations ont tendance à croître avec laltitude (Smith, 1979). Ceci se constate facilement
sur les cumuls annuels, plus importants en montagne que dans les plaines avoisinantes (on a
par exemple 2280 mm pour la pluie moyenne annuelle au Mont-Aigoual alors quelle est de
750 mm à Nîmes), doù le rôle de château deau des massifs montagneux, important en
France, vital en zone aride. Cette abondance de pluie sur les massifs montagneux est liée
également à labondance de phénomènes extrêmes, notamment de pluies intenses : le rôle des
Cévennes comme facteur de déclenchement et de renforcement des précipitations liées aux
épisodes cévenoles est un exemple connu et abondamment étudié (Cosma, 2000 ; Cosma et
al., 2002 ; Creutin, 1979 ; Creutin & Obled, 1982 ; Lebel, 1984 ; Miniscloux, 2001). Ces
pluies intenses conduisent bien souvent à de désastreuses inondations. Les crues doctobre
2000 en Italie du Nord en sont des exemples tragiques parmi tant dautres.
Lunité Hydrologie-Hydraulique du Cemagref de Lyon est très impliquée sur les dangers liés
aux inondations. Elle sintéresse plus particulièrement à la prévention et aux problèmes
daménagement du territoire dans les zones exposées à ces risques. Dans cette optique, elle a
été naturellement amenée à sintéresser aux pluies et avant tout à leur distribution
fréquentielle. En zone de relief, cet intérêt sest traduit notamment par limplantation en 1987
10
dun réseau de pluviographes selon un axe sétendant du Bas Dauphiné jusquau massif de
Belledonne en passant par la Chartreuse. Ce laboratoire de terrain a été nommé TPG
(Transect de Pluviographe pour lanalyse et la modélisation de Gradients dintensité en
altitude).
0.0
20.0
40.0
60.0
80.0
100.0
120.0
140.0
0 10 20 30 40 50 60
D(TPG) (km)
Qua
ntile
s po
ur T
= 10
ans
(mm
)
0200400600800100012001400160018002000
Légende :
(a)
0.0
50.0
100.0
150.0
200.0
250.0
300.0
350.0
400.0
0 10 20 30 40 50 60
D(TPG) (km)
Qua
ntile
s po
ur T
= 10
ans
(mm
)
0200400600800100012001400160018002000
Légende :
(b)
Figure 1 : Structuration par le relief (non lissé, représenté en trait plein en arrière plan),
pour des durées inférieures (a) et supérieures (b) à la journée,
du champ des quantiles de période de retour 10 ans. Extrait de Desurosne (1992)
Les premières mesures ont fait lobjet du travail de thèse dIsabelle Desurosne (Desurosne,
1992). Cette étude a principalement consisté en un traitement statistique des cumuls observés
entre 1987 et 1992. Elle a notamment permis de mettre en évidence certaines caractéristiques
de la répartition des précipitations fortes dans cette zone :
- lexistence en moyenne dun gradient pluviométrique altitudinal sur les
versants au vent des reliefs ;
Introduction
11
- une décroissance générale des pluies au fur et à mesure de la progression vers
le cur du massif alpin ;
- un effondrement des précipitations à lintérieur du massif de la Chartreuse.
Ces résultats sont restés très descriptifs et ne permettent pas une véritable prise en compte et
une bonne compréhension des phénomènes physiques entraînant les précipitations. Or la
communauté météorologique française a progressé sensiblement dans la mise au point de
modèles météorologiques réputés savoir générer des champs atmosphériques et de
précipitation continus à des échelles détaillées intéressant lhydrologie, à base de processus
météorologiques bien pris en compte notamment par la vertu dune simulation non
hydrostatique de latmosphère. Ceci sest concrétisé notamment sous la forme du modèle
Méso-NH, défini, développé et maintenu en collaboration entre le CNRM de Météo-France et
le Laboratoire dAérologie de lUniversité Paul Sabatier, et disponible à la communauté
scientifique (Lafore et al., 1998).
Lutilisation de ce modèle pour les besoins de lhydrométéorologie est un axe de travail
prometteur pour une bonne articulation entre météorologues et hydrologues. Plusieurs
laboratoires sy investissent actuellement. La plupart se penchent sur les mécanismes de base
tels que transcrits par le modèle, investiguant avec soin quelques événements météorologiques
particuliers.
La perspective du présent travail est différente : nous avons essayé de construire une
climatologie des précipitations sur le transect TPG, réalisant avec MesoNH de très
nombreuses simulations numériques, et de comparer cette climatologie à celle obtenue des
observations. Le premier objectif est de déterminer quel peut être lapport dun modèle
météorologique dans une caractérisation de laléa pluviométrique ; le modèle a dans cette
démarche le statut dun interpolateur à base physique enrichissant une approche de nature
statistique et cartographique. Le deuxième objectif est de contribuer à la compréhension des
phénomènes associées aux précipitations observées dans cette zone.
Dans ce document nous exposerons en premier lieu des rappels sur la physique des
précipitations en zone de relief, les différentes approches utilisées pour la caractérisation de
laléa pluviométrique, ainsi que les travaux déjà menés.
12
Nous présenterons ensuite le domaine détude et les données atmosphériques utilisées dans
nos simulations numériques : des radiosondages effectués à Lyon-St Exupéry et
correspondant à des flux de nord-ouest. Nous préciserons les raisons et les modalités de leur
sélection. Les simulations ayant été réalisées en deux dimensions, nous justifierons ensuite
notre choix dune telle configuration ainsi que les éventuels problèmes que cette approche
simplifiée peut amener.
Pour que notre démarche soit pertinente, il fallait sassurer que les données atmosphériques
dentrée soient un minimum représentatives des pluies que nous cherchions à modéliser. La
partie suivante sera donc consacrée à la recherche dune durée de simulation pertinente avec
les observations par létude des liens entre les radiosondages de Lyon et les pluies observées.
La dernière partie traitera du travail de simulation à proprement parler. Nous effectuerons une
rapide présentation du modèle Méso-NH. Puis nous examinerons les différentes
paramétrisations que nous avons utilisé dans nos modélisations. Et enfin, nous présenterons
les résultats des simulations, que nous discuterons avant de conclure.
13
Chapitre 1 : Influences du relief sur la formation nuageuse et le déclenchement des précipitations
I Introduction
Les zones de montagnes sont connues pour avoir un impact important au niveau
météorologique local. Plus particulièrement, les reliefs ont une grande influence sur la
formation nuageuse le long des pentes et de ce fait sur la répartition des précipitations. En
effet, trois processus permettent quune masse dair humide atteigne la saturation, condition
dapparition de la condensation :
- lenrichissement de lair humide par lévaporation depuis une source deau
proche ;
- le refroidissement isobare dune masse dair humide ;
- le refroidissement provoqué par la détente adiabatique liée à un soulèvement.
De ces trois processus, le plus important dans notre cas sera le soulèvement. Les montagnes
provoquent en effet le soulèvement adiabatique de deux manières différentes. La première est
mécanique, quand lair est contraint à passer au-dessus de lobstacle orographique. La
deuxième est thermique, quand des phénomènes de convection apparaissent sur les pentes
chauffées par le soleil.
Nous présenterons les processus orographiques conduisant à la formation de nuages stables,
de type stratiforme, puis nous nous intéresserons à ceux occasionnant la formation de nuages
instables convectifs, de type cumuliforme.
On trouvera en annexe 1 les rappels de base sur la génération des précipitations et sur la
stabilité. Pour plus dinformation sur les sujets abordés dans cette partie, le lecteur pourra se
référer à louvrage de Triplet et Roche (Triplet & Roche, 1986) permettant dacquérir les
notions fondamentales de météorologie, puis éventuellement aux manuels plus approfondis de
Holton (Holton, 1992) et de De Moor (De Moor & Veyre, 1991).
14
II Phénomènes liés au relief en atmosphère stable
Dans ce paragraphe, nous nous intéressons aux processus microphysiques et dynamiques liés
à la formation de nuages stables stratiformes, ainsi quaux interactions possibles avec des
phénomènes météorologiques de plus grande échelle1.
1) Microphysique
On considère le cas dun écoulement stable, stratifié, forcé au passage dun relief, dont les
lignes de courant restent plus ou moins parallèles au sol et dont lhumidité est principalement
contenue dans les deux premiers kilomètres. Durant lascension de la côte au vent, lair atteint
le niveau de condensation (Lifting Condensation Level ou LCL. Cest le niveau au delà
duquel les particules dair humide originaires du sol arrivent à saturation, cf. annexe 1), se
sature, formant par condensation un nuage stratiforme stable. En redescendant le long de la
pente sous le vent, lair se désature, il y a vaporisation des goutelettes nuageuses, cest le bord
de fin du nuage.
Dans ce cas simple, le déclenchement et la répartition spatiale des précipitations sont
gouvernés en majeure partie par la microphysique. En effet dans de nombreux cas, seuls les
phénomènes de microphysique froide, impliquant leau en phase glace et survenant quand le
haut des nuages soulevés par le relief atteint lisotherme 0°C, peuvent permettre aux gouttes
datteindre suffisamment rapidement leur niveau de précipitation. On peut noter aussi que les
effets radiatifs sur les bases inférieures et supérieures des nuages jouent un rôle assez
important, notamment en augmentant le taux de croissance des gouttelettes.
Les précipitations de ce type sont appelées précipitations orographiques pures, dans le sens où
elles sont uniquement déclenchées par le soulèvement dû à la montagne. Il sagit cependant
dun modèle théorique, le processus décrit nétant observable isolément quassez rarement
(Barros & Lettenmaier, 1993 ; Barros & Lettenmaier, 1994).
1 Pour la dénomination de petite ou grande échelle on se pliera à lusage anglo-saxon devenu
général dans la communauté météorologique (Salby, 1996).
Chapitre 1 : Influences du relief dans la formation nuageuse et le déclenchement des précipitations
15
Dans la majeure partie des cas, lécoulement nest en effet pas aussi simple : du fait de
processus dynamiques importants comme le blocage dynamique ou les ondes de montagne,
les lignes de courant sont rarement parallèles au sol, et lhumidité est souvent distribuée sur
une large couche de la troposphère. Les écoulements réels sont alors beaucoup plus
complexes. On observera de fait, que ce sont, en règle générale, les processus dynamiques qui
contrôlent le régime de précipitations.
2) Dynamique
Blocage aérodynamique
Le blocage aérodynamique est un phénomène fréquemment rencontré en montagne. Il se
produit si, lécoulement arrivant sur le relief, les couches dair décollées du sol se retrouvent
plus froides que lair ambiant, constituant une zone de haute pression le long des pentes. La
partie inférieure de lécoulement fait demi-tour en redescendant la pente. Ceci est bien illustré
sur la Figure 2. Cet écoulement descendant, découplé de lécoulement principal, génère des
zones de convergence loin en amont du relief, qui peuvent si elles sont bien caractérisées
donner lieu à cet endroit déjà à la formation de nuages ainsi quà des précipitations. Mais
surtout, sur le relief lui-même, ce phénomène permet dans certains cas dexpliquer des cumuls
importants quun simple soulèvement orographique ne permettrait pas : le blocage provoquant
un soulèvement des masses dair anticipé par rapport à lobstacle permet en effet aux
hydrométéores de se former en plus grande quantité. Ceci a été constaté notamment par
Revell dans les Alpes de Nouvelle Zélande (Revell et al., 2002).
Figure 2 : effet de blocage dynamique (extrait de Banta (1990))
16
Ondes de relief
Les ondes de relief sinterprètent comme le résultat de la perturbation de lécoulement créé
par le franchissement dun relief. Les forces de flottabilité exercent une poussée sur les
particules soulevées pour quelles retrouvent leur position déquilibre. Avec les forces de
gradient de pression, elles agissent de concert pour faire osciller les particules. La structure
verticale de latmosphère, la vitesse du vent et la hauteur de la montagne sont déterminantes
pour ce qui est du devenir de ces ondes (atténuation, propagation verticale ou vers laval
seulement, etc.).
Pour plus de précisions, on se reportera au manuel de Holton déjà cité (Holton, 1992) ou à
Durran (Durran, 1990). On notera quen atmosphère sèche, le phénomène des ondes de relief
est susceptible dans certaines conditions dune intégration analytique, dont les solutions
servent typiquement de banc dessai aux codes de physique atmosphérique (cf. documentation
scientifique MesoNH, chapitre 11).
Sagissant des précipitations, le principal effet des ondes de montagne est de créer des zones
dascendance renforcée où la production deau liquide sera plus importante et donc les
chances de précipitations augmentées.
Figure 3 : représentation des lignes de courant d’un écoulement au passage d’un relief
développement d’une onde avec propagation verticale
Chapitre 1 : Influences du relief dans la formation nuageuse et le déclenchement des précipitations
17
3) Interactions avec les échelles synoptiques : l’effet seeder-feeder
Les zones montagneuses peuvent aussi contribuer à renforcer les processus de grandes
échelles. Elles ont des effets importants sur les tempêtes cycloniques et les systèmes frontaux
dans le renforcement et la redistribution des précipitations. Dans le cas dun stratus
orographique au-dessus dune colline, imbriqué dans un système pluvieux de grande échelle à
plus haute altitude, les gouttes de pluie de ce dernier vont, en traversant le nuage
orographique, entraîner dans leur chute ses gouttelettes par effet de coalescence. Ce
phénomène, avancé par Bergeron (Bergeron, 1965), porte le nom deffet seeder-feeder. Il peut
être responsable, selon les cas, dune augmentation comprise entre 25 et 50 % des
précipitations mesurées sur la colline par rapport à celles enregistrées ailleurs (Banta, 1990),
sur des épisodes précis il a été mesuré jusquà quatre fois plus de pluie au sommet quau pied
des pentes (Gray & Seed, 2000). Il est observé en général pour des montagnes peu élevées et
assez étroites (Barros & Lettenmaier, 1994). Il dépend fortement des conditions de grande
échelle et de la vitesse du flux, ainsi que de la forme du relief (Bader & Roach, 1977 ;
Carruthers & Choularton, 1983). En effet, plus le taux de précipitation du système pluvieux
synoptique est important, plus le renforcement est important. Une vitesse de vent plus élevée
amène un taux de précipitation sur le relief plus important quand celui-ci est relativement
étendu. Par contre, dans le cas dobstacles courts, cest souvent linverse et une vitesse trop
importante aura tendance à advecter les gouttes de pluie à laval de la colline.
III Phénomènes liés au relief en atmosphère instable
Les nuages instables se forment quand une couche dair en instabilité au moins latente est
soulevée jusquà son niveau de convection libre (Level of Free Convection LFC. Cest le
niveau auquel une particule issue des couches basses commence la convection libre, cf.
annexe 1). Les particules dair humide vont naturellement monter en altitude et le nuage va se
développer sur toute la hauteur de la couche instable. Les échelles de tels nuages vont du
cumulus peu épais aux cumulonimbus dont certains pourront atteindre la tropopause. Ces
phénomènes sont souvent associés à de très fortes pluies pouvant occasionner des crues
dévastatrices.
18
De manière générale, la formation de nuages convectifs et dorages requiert trois facteurs :
une humidité suffisante pour assurer la condensation et le grossissement des gouttelettes, une
atmosphère avec de linstabilité, et une impulsion de déclenchement. Cest dans le
déclenchement que se situe le rôle majeur du relief.
1) Humidité
Le premier ingrédient pour la formation et le développement dorages, est la présence dune
humidité suffisante dans les basses couches de latmosphère. Cette humidité a deux origines
principales :
- les mouvements de grandes échelles peuvent la transporter par advection à
partir des grandes étendues deau (mers, océans) ;
- lévaporation de sources locales, comme des lacs, des étangs ou des mares et
même des sols humides après des pluies antérieures.
On notera que même quand les mouvements synoptiques namènent pas suffisamment
dhumidité, il peut y avoir formation nuageuse et précipitation à partir des sources locales.
2) Instabilité conditionnelle
Le rôle de la montagne comme déclencheur sera maximal quand le taux de décroissance de la
température dans la troposphère sera tel que latmosphère est en instabilité conditionnelle
latente, soit donc stable hors saturation, devenant instable si elle vient à saturation.
Cela se traduit par le fait quil doit être compris entre le taux de décroissance adiabatique et le
taux de décroissance pseudoadiabatique. On a alors sd Γ>Γ>Γ , où Γ est le taux de
décroissance de la température, Γd et Γs représentant respectivement les pentes de
ladiabatique et de la pseudoadiabatique passant par le point détat. Il est équivalent de dire
que la température potentielle θ croit avec laltitude et que la température pseudoadiabatique
θw décroit.
3) Déclenchement des précipitations
Les montagnes peuvent fournir limpulsion nécessaire au développement de nuages
cumuliformes de trois manières différentes :
Chapitre 1 : Influences du relief dans la formation nuageuse et le déclenchement des précipitations
19
- par soulèvement directe au niveau de convection libre ;
- par forçage thermique ;
- par effets dynamiques.
Soulèvement direct au LFC
Quand une masse dair humide potentiellement instable franchit une montagne plus haute que
le niveau de son LFC, on parlera de soulèvement direct au LFC. Dès ce niveau atteint, la
masse dair est plus chaude que lair ambiant et la convection apparaît, permettant le
développement de nuages cumuliformes.
Forçage thermique
Le principe général est quune montagne chauffée par le soleil génère une couche dair chaud
au-dessus delle, généralement de quelques centaines de mètres dépaisseur. La différence de
température entre lair au voisinage immédiat de la montagne et lair plus loin du relief va
engendrer un centre de basses pressions près de la montagne et donc de la convergence et des
mouvements ascendants.
Lamplitude de ces circulations thermiquement forcées dépend de la différence de
température entre les masses dair. Cette différence de température est elle même fonction du
flux de chaleur sensible disponible. Lénergie disponible se répartissant entre chaleur latente
dévaporation et chaleur sensible en surface, limportance des mouvements thermiques
dépendra du partage entre les deux termes dans léquation de bilan radiatif. Plus il y a
évaporation et moins le flux de chaleur de surface sera conséquent. Sur des pentes au sol
humide, gorgé deau, lamplitude de la convection et donc le développement de nuages
cumuliformes sera plus faible que sur un sol aride (il a été effectivement constaté que
linitiation de cumulus résultant de processus thermiques est plus forte dans les régions sèches
que dans celles humides (Banta, 1990). Ceci entraîne de fortes différences de climatologie
locale suivant la localisation géographique des différentes régions montagneuses).
L'occurrence et la localisation des phénomènes de forçage dynamique va également dépendre
de l'intensité des vents aux sommets des orographies concernées.
20
Si le vent est léger, l'orientation par rapport au soleil va jouer un rôle prédominant. Les pentes
des reliefs orientées à l'Est et recevant les premiers rayons du soleil sont favorisées dans le
développement de la convection matinale et de la formation nuageuse cumuliforme dès le
début de la journée.
Par contre, les vents d'intensité plus forte détermineront la localisation des phénomènes de
convection. Si le LFC se trouve en dessous du sommet, les nuages se formeront sur les pentes
amont. Si le LFC est situé au-dessus du sommet de la montagne, les nuages se formeront sur
les pentes aval.
Dynamique
Parmi les effets dynamiques pouvant déclencher la convection, on retrouve le phénomène de
blocage présenté dans le cas de nuages stables. En fait, les zones de convergence en amont du
relief, vont engendrer des mouvements ascendants qui s'ils atteignent le LFC vont créer des
nuages instables.
Figure 4 : convection par blocage
On retrouve aussi les ondes de montagnes, déjà évoquées précédemment. En atmosphère
instable elles vont créer des zones d'ascendance en aval de la montagne, dans lesquelles les
tempêtes peuvent être entraînées et de ce fait se trouver renforcées.
Si l'obstacle montagneux n'est pas très large ou que la masse d'air arrive de manière
transversale par rapport au relief, l'écoulement peut le contourner plutôt que de passer au-
dessus. Ceci dépend fortement du nombre de Froude :
Chapitre 1 : Influences du relief dans la formation nuageuse et le déclenchement des précipitations
21
NhUFr=
où U représente la vitesse longitudinale moyenne de la tranche dair concernée, h la hauteur
de la montagne et N la fréquence de Brunt-Vaisala. Pour 1≥Fr , la masse d'air a tendance à
franchir lobstacle alors que si 1≤Fr , il va y avoir plutôt contournement.
Figure 5 : convection par déflection d'écoulement
Dans le cas dun contournement, les deux flux latéraux, en se rejoignant à l'aval de l'obstacle,
vont former une zone de convergence pouvant être à l'origine de systèmes convectifs.
On le voit, la capacité de la montagne à engendrer localement de la convection dépend de très
nombreux facteurs et notamment de la stabilité de l'écoulement.
4) Interactions avec les échelles synoptiques
Les phénomènes de grandes échelles peuvent avoir 3 rôles :
- un rôle de suppression : un système anticyclonique, avec ses forts mouvement
de subsidence, peut annihiler toute convection ;
- un rôle de permission : la circulation de grande échelle n'entrave pas la
formation de convection, qui reste déterminée localement ;
- un rôle de forçage : des systèmes à grande échelle comme les fronts, les
ondes de gravité, etc., sont eux mêmes facteurs de formation de convection
profonde ; la montagne contribue à renforcer cette convection profonde.
22
IV Conclusion
Ce chapitre avait pour but de présenter les principales manières par lesquelles un relief peut
influencer la météorologie locale et plus particulièrement les précipitations et leur répartition
géographique.
Cest principalement en tant que précurseur de ce soulèvement que les montagnes jouent un
rôle important dans le déclenchement des précipitations, de manière mécanique (blocages,
ondes, soulèvement direct au niveau de convection libre) ou thermique (initiation de la
convection grâce au pentes surchauffées).
La catégorisation des phénomènes ne doit pas faire illusion : en réalité tous ces phénomènes
se combinent, interagissent les uns sur les autres ; les interactions avec les systèmes
synoptiques ont leur importance (effet seeder-feeder). Les interactions entre les différentes
échelles, entre dynamique et microphysique semblent encore moyennement comprises et font
des précipitations un des objets détude des plus complexes en matière de météorologie en
montagne.
Face à une telle situation, où lestimation réaliste des pluies en montagne ne peut être quun
but encore lointain, voyons quelles sont les approches actuellement explorées par la
communauté scientifique.
23
Chapitre 2 : Les différentes approches dans l’étude des pluies en montagne
Nous avons vu précédemment que les montagnes jouent un rôle important dans le
déclenchement et la répartitions des précipitations, lesquelles peuvent générer des crues
catastrophiques. Dans ce contexte on comprend bien limportance accordée à la connaissance
des précipitations en zone de relief et des phénomènes qui les génèrent. Le premier moyen est
bien sûr lobservation.
Le problème est la représentativité spatiale dun pluviographe. Déjà en zone de plaine
lhydrologue se plaint de linsuffisante densité des réseaux pluviométriques, alors que la pluie
est réputée varier assez peu spatialement, au moins quant à ses caractéristiques statistiques,
celles qui intéressent laménageur. Que dire en montagne, où la pluie serait spatialement
hétérogène non seulement au niveau des événements, mais aussi quant à ses propriétés
statistiques ? En effet, les précipitations présentant une grande variabilité en fonction de
laltitude, de lexposition, etc. Il serait nécessaire davoir des réseaux très denses pour bien
récolter toute linformation.
Mais les conditions daccès aux postes souvent difficiles en montagne, les coût élevés
dentretien et les conditions météorologiques mettant les appareils à rude épreuve ne
permettent pas de multiplier de telles installations, et il est donc apparu utile dutiliser des
méthodes de calculs pour spatialiser au mieux linformation obtenue par lobservation.
I Les méthodes d’interpolation
Une des approches les plus couramment répandues est linterpolation. On va chercher à
évaluer linformation pluviométrique en un point à partir de celle connue aux points
environnants. La méthode la plus simple est celle du polygone de Thiessen, qui consiste à
affecter à chaque point la valeur souhaitée (cumul ou propriété statistique) relative à la station
la plus proche (Thiessen, 1911). On peut préférer, partant des valeurs aux stations
environnantes, en calculer une moyenne pondérée. La pondération peut être une fonction
donnée de la distance entre la station dappui et le point visé, linverse du carré de la distance
24
par exemple. Lapproche géostatistique, qui tient compte dans le krigeage (Creutin & Obled,
1982 ; Delhomme, 1978a ; Delhomme, 1978b ; Delhomme, 1979) de la variabilité observée
du champ et de la position respective des points de données, améliore de beaucoup cette
approche. Cependant aucune de ces méthodes dans leurs versions originelles ne prend en
compte explicitement le relief, ce qui les rend fort peu pertinentes en zone de montagne.
Il existe différentes manières dintégrer la topographie dans la spatialisation de linformation
pluviométrique. Desurosne, dans son étude sur le TPG (Desurosne, 1992 ; Desurosne et al.,
1996), a établi par exemple des régressions linéaires en fonction de laltitude sur les quantiles
de pluie. La méthode AURELHY (Analyse Utilisant le RELief pour lHYdrométéorologie),
développée par Benichou et Le Breton (Benichou & Le Breton, 1987) cherche à prendre en
compte en plus de laltitude au point considéré, celle des points du voisinage. Lutilisation de
méthodes géostatistiques telles le cokrigeage ou le krigeage à dérive externe pour
cartographier les pluies avec laide de laltitude est aussi couramment répandue. On peut citer
Phillips (Phillips et al., 1992) et Goovaerts (Goovaerts, 2000) qui les ont utilisés pour les
précipitations moyennes annuelles respectivement dans lOrégon aux Etats Unis et dans
lAlgarve au Portugal.
Le problème, soulevé notamment par Frei (Frei & Schär, 1998), est que toutes ces méthodes
nintègrent que laltitude comme paramètre géomorphologique alors que la pluie va dépendre
aussi de lexposition, de la pente, etc., en calculant de telles régressions sur de larges régions
on a tendance à surestimer le gradient de précipitation en fonction de laltitude.
Une alternative peut être de calculer de régressions multiples entre la pluie et plusieurs
variables descriptives du relief. Laborde (Laborde, 1984) a inauguré cette approche en
Lorraine, Slimani (Slimani, 1985) puis Bois (Bois et al., 1997) dans les Cévennes. Plusieurs
travaux ont été réalisés dans les Alpes ((Saidi Bououdinas, 1996) ; (Leblois, 1997), ).
Kieffer Weiss a ainsi essayé dans sa thèse sur la cartographie des pluies intenses en montagne
de caractériser chaque point de son maillage alpin par une série de paramètres topographiques
qui sont laltitude, la pente, lexposition, lencaissement, le rayon de courbure, la distance à la
mer et au fleuve, la position dans larc alpin et leffet barrière (Kieffer Weiss, 1998). Elle a
ensuite construit des régressions entre ces variables et des paramètres pluviométriques comme
la pluie décennale, le gradex ou le coefficient de Montana. Le développement de ces
méthodes est soutenu par lutilisation de plus en plus courante de Systèmes dInformation
Chapitre 2 : Les différentes approches dans l’étude des pluies en montagne
25
Géographique (SIG), qui permettent à partir de laltitude moyenne de chaque cellule dun
maillage den déduire dautres caractéristiques de morphométrie topographique (Faulkner &
Prudhomme, 1998 ; Marquinez et al., 2003). Le modèle PRISM (Daly et al., 1994) par
exemple permet même le calcul des régressions linéaires entre la pluie et laltitude sur des
facettes regroupant plusieurs cellules dun SIG ayant la même pente et la même exposition.
Toutes ces méthodes visent des descripteurs climatiques plutôt que des événements : on
travaille à léchelle temporelle de grandes séries de données, et on cartographie des moyennes
de précipitations ou des quantiles de pluie. Cette information est heureusement la plus utile
pour prendre en compte la pluviométrie des zones étudiées dans les aménagements par
exemple.
Ces méthodes ont cependant de gros inconvénients. En premier lieu, elles dépendent
entièrement de lobservation. Sans données de pluie préalables elles sont inapplicables. Dans
des zones où les réseaux de mesures sont bien fournis et où il sagit dinterpoler entre
plusieurs stations, elles peuvent se révéler très efficaces. Mais dans les zones les plus
démunies, notamment à haute altitude où les pluviographes sont rares ou quasiment
inexistants, on se retrouve à extrapoler à partir des données de moyenne altitude, et elles
montrent rapidement leurs limites. Le second point réside dans le fait quelles ne permettent
aucune compréhension des phénomènes physiques intervenant dans les processus de
précipitation. Elles ne tiennent généralement pas compte des paramètres météorologiques et
se contentent dintroduire le rôle de la topographie dune manière intuitive, donc souvent peu
fondée, peu objectivée donc difficilement transmissible et surtout assez peu généralisable.
II Les modèles conceptuels des précipitations orographiques
Une autre approche est celle de modèles conceptuels, introduisant un peu de physique et de
dynamique de manière très simplifiée, et indépendants dans leur fonctionnement des mesures
de précipitation au sol. Lidée de base présentée par Smith (Smith, 1979) est que, dans le cas
dun écoulement dair stable et saturé sur une montagne, la pluie au sol sera directement liée
au soulèvement induit par les pentes de lobstacle. Elle est proportionnelle à la convergence
des basses couches, lhypothèse étant faite que les lignes de courant restent parallèles à
lobstacle et quune partie fixe de leau condensée tombe instantanément. Le taux de
précipitation R est donné par :
26
hVqR a ∇⋅=r
0ερ
où ρa est la densité de lair humide, q0 le rapport de mélange de vapeur, V la vitesse constante
du flux h∇ la pente locale de la montagne au point considéré et ε la fraction deau condensée
qui va tomber. Alpert a conçu un modèle analogue tenant compte en outre de manière
schématique de ladvection de la pluie par le vent horizontal (Alpert, 1986 ; Alpert & Shafir,
1989a ; Alpert & Shafir, 1989b ; Alpert & Shafir, 1991). Smith a amélioré son modèle en
intégrant des constantes de temps pour la transformation de leau nuageuse en pluie et la
chute des hydrométéores (Smith, 2003).
Ces modèles facilement interprétables sont assez couramment utilisés en hydrologie. Ils ont
lavantage de ne pas avoir besoin de beaucoup de paramètres pour le forçage et sont peu
gourmands en calculs. Ils sont en outre assez efficaces, au moins en moyenne, ayant su
prendre en compte les deux facteurs prépondérants que sont le rôle du soulèvement et la
diminution de lhumidité avec laltitude.
Cependant ils restent relativement grossiers, notamment du fait de leur simplicité quant à
deux aspects clefs que sont la dynamique atmosphérique (le flux supposé rester parallèle à
lobstacle) et la microphysique (ils ne prennent pas en compte lévaporation des
hydrométéores ni ses effets sur lécoulement et peuvent surestimer les pluies (Jiang, 2003 ;
Smith, 2003). Dans le cas dune succession dascendances et de subsidences le taux de
précipitation peut même excéder le flux de vapeur entrant (Smith et al., 2003) ; lefficacité
des précipitations est paramétrée et constante partout). Ils sont fort peu efficaces dans la
simulation dépisodes particuliers.
III Les modèles déterministes et l’expérience MAP
La représentation précise de la physique des précipitations en zone de relief requiert donc une
bonne représentation de la dynamique des écoulements associés, des processus
microphysiques générateurs de pluie, ainsi que de leurs différentes interactions. Ceci passe
par lutilisation de codes numériques 3D, résolvant les équations de la mécanique
atmosphérique associées avec une représentation explicite des hydrométéores. Les dernières
années ont vu le développement de modèles travaillant à méso-échelle, et non hydrostatiques -
une nécessité pour que puissent être mieux décrites les accélérations verticales et donc les
Chapitre 2 : Les différentes approches dans l’étude des pluies en montagne
27
précipitations. Elles ont ainsi ouvert de nouvelles voies dans la modélisation des pluies en
montagne. On citera MM5 (Grell et al., 1994) et surtout Méso-NH (Lafore et al., 1998), outil
central pour nous qui sera présenté plus loin.
Le développement de tels outils est complètement lié à la réalisation dintenses campagnes de
mesure internationales, ou « expériences » si on suit la terminologie anglo-saxonne, qui
fournissent le matériau dobservation nécessaire à la fois au développement des idées et à la
validation des différentes composantes des codes de calcul. Sagissant spécifiquement des
interactions entre le relief et les phénomènes atmosphériques, citons les campagnes ALPEX,
PYREX et MAP. On notera cependant que la pertinence de ces expérience pour valider les
codes dans leur globalité reste sujette à débat au sein même de la communauté
météorologique. Certains comme Knight notamment (Knight, 1987), pensent quelles ne
permettent de valider que certaines parties ou certains modules indépendamment des autres
(schéma convectif, paramétrisation de la microphysique entre autres exemples).
Lexpérience internationale MAP (Mesoscale Alpine Programme) (Binder & Schär, 1995 ;
Bougeault et al., 2001a ; Bougeault et al., 2001b) avait pour but lamélioration des
connaissances et la prévision des précipitations et de la circulation atmosphérique au
voisinage dune chaîne montagneuse. La campagne de terrain sest déroulée du 7 septembre
au 15 novembre 1999 dans les Alpes.
La simulation numérique de plusieurs épisodes de pluies intenses dans la région du lac
Majeur, associés à un flux de sud dair méditerranéen humide, a permis den appréhender les
différents mécanismes précurseurs et le rôle important de lorographie (Gheusi & Stein,
2003). Elle a mis en évidence les différences de circulation et de pluviométrie entre deux
épisodes proches au niveau des conditions synoptiques mais différents quand à leur nombre
de Froude. Dans le cas de lécoulement stable une zone de blocage avant les flancs de la
montagne a empêché lair très humide des basses couches de sélever au-dessus des pentes.
Les précipitations associées sont restées de type stratiforme et peu intenses. Lair à plus haute
altitude a été contraint de passer par dessus la zone de blocage ce qui a occasionné un
maximum de précipitation bien en amont du relief. Dans le cas instable au contraire, toutes les
couches se sont retrouvées soulevées par lorographie en labsence de blocage. Linstabilité a
en outre permis le développement dune convection ce qui a encore renforcé les cumuls de
précipitation (Rotunno & Ferretti, 2003).
28
Ces observation ont permis délaborer un modèle conceptuel liant la formation des pluies
orographiques au nombre de Froude (Medina & Houze, 2003). Dans le cas des situations
bloquées (à faible nombre de Froude), on a peu de soulèvement orographique, lascension se
fait de manière assez douce et progressive et apporte de lair faiblement humide. Les
précipitations ont un caractère stratiforme. Dans le cas découlements à fort nombre de
Froude, toutes les couches sont soulevées, y compris lair humide de la couche limite.
Contrairement aux cas stables où la formation des hydrométéores se fait en phase glace, les
processus de givrage deviennent ici prépondérants et les précipitations sont donc beaucoup
plus intenses.
Les études de cas ont laissé apparaître le bon comportement de certains modèles numériques à
haute résolution, dont Méso-NH. La distribution spatiale des précipitations est globalement
bien représentée. Dun point de vue quantitatif, les résultats sont moins concluants,
particulièrement pour les cumuls horaires, même si une légère amélioration par rapport à la
phase préparatoire de lexpérience semble être constatée. Les simulations sont très sensibles
aux conditions initiales et notamment à la distribution dhumidité en basse couche (Asencio et
al., 2003), ce qui rend leur utilisation en prévision assez difficile.
Les modèles déterministes, basés sur les équations de la mécanique des fluides et des schémas
microphysiques complexes, permettent donc de relativement bien reproduire la répartition des
précipitations ainsi que la dynamique et la physique associée, tout en contribuant grandement
à la compréhension des processus météorologiques.
Les résultats dépendent en grande partie de la précision avec laquelle sont connues et
introduites les conditions initiales et conditions aux limites.
Les modèles de mesoéchelle étant à aire limitée, lutilisation de champs issus des modèles
opérationnels ou de ré-analyses vient aider la prise en compte des conditions de grande
échelle. La technique des modèles emboîtés (grid nesting) permet également datténuer le
problème de définition des conditions aux limites au prix dun allongement considérable des
temps de calculs. La fixation des conditions initiales reste souvent délicate.
De fait, les modèles de mesoéchelle servent le plus souvent pour des retours dexpérience,
simulations dépisodes précis, bien documentés et ayant fait souvent lobjet de campagnes de
mesure les plus complètes possibles. Ces constatations semblent condamner lutilisation de
Chapitre 2 : Les différentes approches dans l’étude des pluies en montagne
29
tels modèles dans une perspective climatologique impliquant la simulation dun grand nombre
dévénements.
IV Conclusion
Létude des précipitations en zone de relief ainsi que des phénomènes qui les engendrent est
de première importance pour la compréhension et une meilleure détermination des risques
dinondation. Les recherches se développent petit à petit et plusieurs approches coexistent.
Les méthodes dinterpolation sont couramment utilisées pour la cartographie de laléa
pluviométrique en montagne. Basées sur diverses combinaisons entre techniques danalyse de
données, de régression et de géostatistique, elles ont lavantage dêtre peu coûteuses en temps
de calcul. Elles dépendent très fortement des données au sol existantes ; lextrapolation dans
les zones sans mesures peut savérer très imprécise. Si ces techniques se raffinent avec les
années, elles plafonnent nécessairement du fait quelles ne prennent pas en compte les
processus météorologiques.
Les modèles orographiques conceptuels sont basés sur lidée selon laquelle le phénomène
physique dominant est le soulèvement adiabatique dune masse dair humide par une
montagne, dont on peut rendre compte par une schématisation assez simple. Peu coûteux en
temps de calcul, de tels modèles sont couramment utilisés en hydrologie. Sils arrivent à bien
représenter le rôle du relief sur la répartition moyenne des pluies, leur traitement par trop
schématique des processus dynamiques et microphysiques peut savérer problématique dans
de nombreux cas (traitement de la convection, du blocage, etc.).
Les modèles numériques déterministes basés sur les équations de la mécanique des fluides
semblent le meilleur moyen à lheure actuelle de représenter les phénomènes atmosphériques
dans leur complexité. Le développement récent des codes non hydrostatiques adaptés à la
mésoéchelle tend à appuyer dans ce sens. En prenant en compte les différentes échelles, ils
permettent une compréhension des processus générateurs de précipitations. Cependant les
résultats sont très sensibles aux conditions initiales et aux conditions aux limites. Ils ne
peuvent représenter de manière précise que des épisodes bien documentés, ayant fait lobjet
au préalable de campagne de mesure intensive, telle la campagne MAP. Le travail de
préparation, le temps de calcul et le travail dexploitation des volumineux fichiers résultants
30
étant particulièrement importants, lutilisation de ces modèles en 3D pour un grand nombre de
simulations ne paraît pas possible ni même pertinente dans limmédiat.
Le présent travail sintéresse à la distribution des pluies dont nous souhaiterions retrouver les
caractéristiques observées par un transect de pluviographes. Comme nous tenons au
maximum à prendre en compte la physique atmosphérique, nous travaillerons donc avec
laide du code numérique Méso-NH.
Notre démarche est clairement climatologique et ne peut se fonder que sur la réalisation dun
grand nombre de simulations : pour que le temps de calcul soit réduit autant que possible,
nous avons fait le choix dutiliser le modèle en bidimensionnel, avec un traitement très
schématique des conditions initiales et aux limites. Ce traitement simplifié se fonde sur la
géométrie particulière du domaine étudié, pour laquelle le réseau de mesure, quasi linéaire, a
été bâti, et se limitera à la classe de temps susceptible dêtre adéquatement décrite dans ces
conditions.
31
B. Présentation des données
33
Chapitre 3 : Présentation du transect de pluviographes TPG
I Introduction
Depuis une vingtaine dannée, le Cemagref sintéresse à la thématique de laléa
pluviométrique en zone de montagne. Dans cette idée il a été décidé dimplanter un réseau
unidirectionnel de pluviographes dans les Alpes du Nord, afin de mesurer les précipitations
liquides. Après une étude de faisabilité (Meignien, 1986), les premiers postes du transect ont
été installés. Fin 1991, le TPG (pour Transect de Pluviographes pour lanalyse et la
modélisation de Gradients dintensité en altitude) disposait de 23 postes opérationnels. Il a
fait lobjet dun travail de thèse, réalisé par I. Desurosne (Desurosne, 1992). Le transect a
ensuite été modifié, certains anciens postes ont été supprimés et on a prolongé le réseau avec
de nouveaux pluviographes en Maurienne dans le cadre du projet INTERREG II. Ce nouveau
réseau a été appelé TPGEst, son axe sest retrouvé translaté vers le nord par rapport à lancien
et il a perdu sa linéarité. Il actuellement toujours en fonctionnement, mais plus forcément pour
longtemps.
Nous avons utilisé, dans le travail de thèse, les données de pluie de la période 1987-1995, qui
sont spatialement les plus denses et les plus susceptibles dêtre modélisées par nous. Cest la
raison pour laquelle nous allons présenter le TPG dans sa configuration linéaire initiale, sa
localisation géographique, les différentes stations qui le composent. Nous présenterons
ensuite des pluviographes utilisés puis discuterons le problème des lacunes
II Localisation du réseau
Le transect sétendait sur les départements du Rhône et de lIsère, sur une distance de 100 km,
le long dun axe orienté du nord-ouest au sud-est, reliant Lyon à Fond-de-France (Figure 6).
Cette orientation correspond à la direction de propagation des perturbations en provenance du
nord-ouest, supposées au moment de limplantation contribuer le plus significativement aux
34
pluies. Le TPG traversait perpendiculairement les trois massifs daltitude croissante que sont
le Bas Dauphiné (900 m), la Chartreuse (2000 m), et Belledonne (3000 m).
Le réseau était quasiment unidimensionnel et on le considèrera comme tel. Léquation de
régression liant les coordonnées Lambert II des postes est la suivante :
8,255151,0 +⋅−= XY
Le coefficient de la régression est r = 0.989. Les stations étaient distantes de 1.2 km en
moyenne de laxe théorique du TPG. La distance moyenne entre les projections successives
est de 2.3 km, ce qui représente une assez bonne densité.
Figure 6 : localisation du réseau de mesure TPG (1987/1995)
La Figure 7 montre la répartition des postes et leur altitude sur laxe théorique.
Chapitre 3 Présentation du transect de pluviographes TPG
35
P20P18
P19
P16
P15P14
P13P12
P11
P10
P07
P09
P08
P06
P05P04
P03
P02
P01P97P99P98
P96
0
500
1000
1500
2000
2500
3000
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90
topo pluvio
Bas Dauphiné
Chartreuse
Belledonne
P20P18
P19
P16
P15P14
P13P12
P11
P10
P07
P09
P08
P06
P05P04
P03
P02
P01P97P99P98
P96
0
500
1000
1500
2000
2500
3000
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90
topo pluvio
Bas Dauphiné
Chartreuse
Belledonne
Figure 7 : localisation et altitude des différents postes du TPG
Nom des stations X Lamb.II Y Lamb.II Altitude (m) P96 Ruy 834.25 2069.85 395
P98 Cessieu 838.05 2066.55 320 P97 Paladru 852.1 2058.2 494
P99 Panissage 845.5 2059.6 395 P01 Massieu 854.2 2054.3 470
P02 La Boutière 859.5 2052.8 750 P03 Les Vernays 862.05 2050.8 600
P04 St Laurent du Pont 865.7 2049.5 410 P05 Orcière 867.7 2046.15 500 P06 La Diat 871.9 2043.2 800
P08 Les Essarts 874.2 2044.5 1350 P07 Perquelin 874.8 2042.9 1000 P09 La Scia 875.05 2044.5 1700
P10 St Michel du Touvet 878.75 2044.85 1300 P11 St Bernard du Touvet 879.5 2042.6 910
P12 Lumbin 881.2 2040.35 230 P13 Froges 880.2 2039 230
P14 Goncelin 885.1 2038.8 780 P15 Les Berts 886.1 2037.65 940
P16 Chalet de Pipay 888 2036.2 1350 P19 Prapoutel 887.2 2035.2 1580
P18 Haut Pipay 889.2 2036.15 1820 P20 Chalet des Fanges 891.2 2036.9 1270
Tableau 1 : coordonnées des différents postes du TPG (Lambert II)
36
III Climatologie sur le domaine
La classification des régimes synoptiques affectant lespace rhônalpin réalisée par Blanchet
(Blanchet, 1990) ; Blanchet 1992 & 19962), a permis de dresser la climatologie du domaine
durant la période 1987/1995. On compte 63 % de temps perturbé, soit 2079 journées. Sur tous
ces jours, 27 % correspondent à des flux douest (W1,W2,W3), 16 % à des marais
barométriques (MB), 15 % à des flux de sud-ouest (SW1,SW2,SW3) et 12 % à des flux de
nord-ouest (NW1,NW2,NW3). Les 30 % restant se partagent entre les gouttes froides, les flux
de sud, les fronts stationnaires, les flux de sud-est et de nord-est. Si on excepte les marais
barométriques qui correspondent à des phénomènes de faible forçage synoptique, on constate
que la majeure partie des perturbations proviennent du secteur ouest.
0
2
4
6
8
10
12
14
16
18
W1 W2 W3 MB SW1 SW2 SW3 NW1 NW2 NW3
pour
cent
age
Figure 8 : répartition des journées perturbées sur le massif alpin pour la période 87/95
Flux d’ouest
Ils correspondent aux grands flux douest de la zone tempérée. On en distingue trois types.
2 Communications personnelles à Isabelle Desurosne.
Chapitre 3 Présentation du transect de pluviographes TPG
37
Le type W1 regroupe les perturbations touchant la partie nord de la région Rhône Alpes, les
précipitations en découlant sont modérées. On retrouve une dépression sur le Nord des îles
Britanniques et une partie de la péninsule Scandinave et un anticyclone centré sur lEspagne
et remontant sur le Sud-Ouest de la France.
Le type W2 correspond à des perturbations touchant toute la région. Les précipitations sont
assez importantes sur les versants au vent des reliefs et plus modestes dans les vallées
intérieures. On a une dépression centrée sur les îles Britanniques et un anticyclone légèrement
à louest de la péninsule Ibérique.
Le type W3 regroupe les perturbations affectant la partie sud de la région. La situation
synoptique correspond à un anticyclone positionné sur le Nord de lEurope et une partie de la
Scandinavie.
Flux de sud-ouest
On peut également en distinguer trois types.
Le type SW1 regroupe des perturbations qui touchent la partie nord-ouest de la région. Les
précipitations y sont assez faibles. On retrouve une dépression positionnée sur le Nord des îles
Britanniques et un anticyclone sur lEst de la Méditerranée et lEurope du Sud-Est (Italie,
Grèce, Roumanie).
Le type SW2 correspond un peu aux même conditions synoptiques (dépression sur le
Royaume Uni, anticyclone sur lEurope du Sud-Est), mais légèrement décalé vers le sud. Les
perturbations affectent donc plus la région et on peut observer des précipitations assez
abondantes, de nature souvent orageuses sur une partie des préalpes.
Le type SW3 correspond à des perturbations traversant essentiellement le Sud de la région.
Flux de nord-ouest
Le type NW1 correspond à des perturbations traversant les Alpes du nord. On est en présence
dun anticyclone sur la péninsule Ibérique qui remonte sur le golfe de Gascogne et une
dépression sur lEurope du Nord et le Sud de la Scandinavie.
38
Les perturbations du type NW2 touchent de plein fouet le centre du massif alpin. On observe
de fortes précipitations sur les versant au vent des reliefs, ici les versants ouest et nord-ouest.
La situation synoptique correspond à un anticyclone sur la partie ouest de la péninsule
Ibérique et une dépression centrée sur lEurope de lOuest.
Le type NW3 correspond aux perturbations abordant la partie sud de la région. La situation
synoptique est souvent une perturbation centrée sur la Manche.
39
Chapitre 4 : Les radiosondages
I I Introduction
Nous disposons de radiosondages effectués à la station de Lyon-Satolas3 entre 1987 et 1995,
et qui seront les données dentrée du modèle atmosphérique. Un radiosondage est un profil
vertical des propriétés thermodynamiques de latmosphère, effectué physiquement par un
lâcher de ballon-sonde. Un bref rappel historique ainsi que la description du ballon sonde et
de son instrumentation embarquée sont disponibles en annexes 3. Dans ce chapitre nous
détaillerons les mesures effectuées et linformation quelles peuvent apporter sur
lorganisation verticale de latmosphère.
II II Les données
Linstrumentation embarquée sur un ballon-sonde donne la pression, la température et
lhumidité relative à pas de temps constants. Température de rosée et rapport de mélange se
déduisent des éléments précédents par calculs de thermodynamique de lair humide.
Laltitude sobtient ensuite par intégration (usage de la Loi de Laplace). Le déplacement du
ballon permet la détermination de la vitesse du vent (direction, intensité).
3 devenu en 2000 Lyon-Saint-Exupéry, en hommage à lécrivain.
40
Sigle (Météo-France) Unité S.I. Unité usuelle Date et heure DAT
Pression P Pa HPa Altitude ALTI m m
Température T K C Température du point de
rosée TD K C
Humidité relative U % % Rapport de mélange R kg/kg g/kg
Direction du vent (=doù il vient)
DD radian
° (Nord=0, Est = 90°, .)
Vitesse du vent FF m/s m/s
Tableau 2 : descripteurs primaires d’un point de radiosondage
Les lois de la thermodynamique permettent de déduire de ces mesures dautres descripteurs
relatifs à lair humide : température potentielle, la température pseudo-adiabatique potentielle,
le rapport de mélange à saturation, etc.
Sigle (Météo-France) Unité S.I. Unité usuelle Masse volumique de lair ρ kg/m3
Humidité absolue à saturation
rw kg/kg g/kg
Pente de ladiabatique sèche
γd (dry) K/m K/100m
Pente de ladiabatique saturée
γsat (saturated) K/m K/100m
Température pseudo-adiabatique
θ K C
Température pseudo-adiabatique saturée
θw K C
Tableau 3 : quelques descripteurs secondaires importants d’un point de radiosondage
Pour lensemble dun radiosondage, on peut aussi calculer un certain nombre dindicateurs
globaux utiles. Le LCL (Lifting Condensation Level) est le niveau au-delà duquel les
particules dair humide originaires du sol arrivent à saturation et qui indique donc laltitude de
la base des nuages. Le LFC (Level of Free Convection), niveau auquel une particule issue des
couches basses commence la convection libre. Ces indicateurs sont présentés en annexe 1. Le
CAPE (Convective Available Potential Energy) est lénergie potentielle susceptible dêtre
transformée en énergie cinétique par réorganisation verticale du radiosondage et de générer
des mouvements verticaux. Cest donc un indicateur de limportance que peut prendre la
convection profonde si elle se déclenche. Il existe également un CINE, indication relative à
limpulsion verticale quil faudrait donner aux basses couches pour que la convection se
déclenche.
Chapitre 4 : Les radiosondages
41
Les différentes formules sont disponibles dans la littérature scientifique consacrée à la
physique atmosphérique. Pour leur pédagogie et leur exhaustivité, on peut citer entre autres
les ouvrages de Tsonis (Tsonis, 2002) et de Salby (Salby, 1996).
Le report des points dun radiosondage se fait classiquement sur un diagramme
thermodynamique adapté dénommé émagramme, dont la coordonnée verticale est
logarithmique en pression, la coordonnée horizontale la température (en échelle à 45°).
Figure 9 : exemple du radiosondage du 23/01/93 à 12h reporté sur un émagramme
(logiciel du Cemagref)
Sur la Figure 9, on trouve un exemple de radiosondage reporté sur émagramme. La courbe
noire, courbe détat, montre lévolution verticale de la température T. Les points de rosées
figurent comme des + . La courbe bleue, courbe du thermomètre humide, montre lévolution
verticale de la température Tw, température du thermomètre mouillé. Les deux courbes sont
confondues en atmosphère saturé, lécart entre les deux courbes augmentant quand lair est de
42
plus en plus sec. Lanalyse locale du radiosondage (basée sur la dérivée verticale des
grandeurs ci-dessus mentionnées) permet de calculer dT/dz , gradient vertical de température,
et de le comparer aux pentes locales des adiabatique sèche et pseudo-adiabatique, Γs et Γh ;
ceci gouverne la stabilité en air sec/humide ou saturé. Ces éléments sont figurés en traits noirs
en lisière gauche (épais : stable ; fin : instable). Dans lexemple on observe quelques zones
dinstabilité convective latente. Enfin, la direction et la force du vent sont visualisées en
lisière droite. Les échelles non figurées sont strictement celles de lémagramme 761 employé
par Météo-France.
Comme dans toute opération de mesure, divers problèmes peuvent entraîner des lacunes à
différents niveaux. Ces problèmes peuvent être un mauvais fonctionnement de la sonde ou
bien du radio-émetteur, typiquement pendant des épisodes météorologiques perturbés (lors de
notre visite au centre de Lyon-Satolas, deux sondes ont été successivement lancées et le
contact perdu suite à une brusque tempête de neige).
Lutilisation de radiosondages « à trous », peut savérer problématique. Nous avons recouru à
linterpolation verticale, dune part pour combler les lacunes dans les données, mais aussi
pour rajouter des niveaux à hauteur et/ou pression choisies. Cette interpolation ne porte que
sur les variables primaires : pression, cote, vitesse et direction du vent, température, humidité.
Les autres variables sont recalculées à partir des données interpolées. Toutes les interpolations
sont linéaires, sauf pour cote et pression dont la dépendance exponentielle est prise en compte
comme suit (dans ce qui suit : h = haut ; b = bas)
On suppose quil existe une hauteur déchelle H telle que −⋅= Hzh hePP 0 et −⋅= Hzb bhePP 0 , doù
−−= Hzz
b
h hbePP et on peut estimer localement H comme : ( )
bh
bh
PPzzH
ln−−= ; doù lestimation de la
pression en un point de cote z compris entre zb et zh : ( ) −−⋅= bh bzz zzbhb P
PPP , et celle de la cote en un
point de pression P comprise entre Pb et Ph par ( )( )( )
bhbbhb
PPPP
zzzzln
ln⋅−+=
Pour le vent, grandeur vectorielle, direction et intensité sont interpolées séparément et
linéairem