20
Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre, décembre 76 oct. nov. déc. 2014 ISSN 1371 - 2519 Des habitants disent "9 X NON" à l'implantation d'antennes GSM Antennes GSM Des habitants disent "9 X NON" à l'implantation d'antennes GSM Seniors Alzheimer Changer le regard des intervenants Promotion de la santé 20 ans déjà… Medimmigrant célèbre ses noces de porcelaine ! Campagne Vie & VIH aujourd’hui Question Santé asbl - 72 rue du Viaduc - 1050 Bruxelles P 204068

Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Périodique trimestriel, paraiten mars, juin, septembre, décembre

N° 76 oct. nov. déc. 2014ISSN 1371 - 2519

Des habitants disent "9 X NON" à l ' implantation d'antennes GSM

Antennes GSMDes habitants disent "9 X NON" à l ' implantation d'antennes GSM

SeniorsAlzheimer

Changer le regard des intervenants

Promotion de la santé20 ans déjà… Medimmigrant

célèbre ses noces de porcelaine !

CampagneVie & VIH aujourd’hui

Question Santé asbl - 72 rue du Viaduc - 1050 Bruxelles P 204068

Page 2: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

2 Bruxelles Santé 76

sommaire

En direct de ...Etterbeek - Des habitants

disent « 9 x NON » à

l’implantation d’antennes GSM 3

SeniorsAlzheimer - Changer le regard

des intervenants 9

Promotion de la santé20 ans déjà…

Medimmigrant célèbre

ses noces de porcelaine ! 12

CampagneVie & VIH aujourd’hui 14

Echo du CBPSQuand des travailleurs de différents

secteurs se rencontrent pour déposer

leurs impasses et échanger

leurs ressources ! 16

Débat 18

Informations Sur le VIH/SIDA 20

EditoDéjà plus d’une année de mobilisation pour un groupe d’habitants de la commu-ne d’Etterbeek, qui luttent contre l’installation d’antennes relais pour téléphonie. Bruxelles Santé vous présente en page 3 les avis de ces habitants et des diverses institutions (IBGE, IEB, commune, etc) impliqués dans ce débat. Pour les acteurs économiques, la présence d’un réseau 4G est à l’évidence indispensable à Bruxel-les. Par contre, certains s’interrogent sur le réel besoin à titre individuel et relève l’ambivalence entre le souhait d’usage de la 4G et le refus d’avoir des antennes sur les toits proches de son habitation. L’article relève aussi la modification de la norme de sécurité qui est intervenue à Bruxelles, et qui contredit des recommandations émises par le Conseil Supérieur de la Santé.

En page 9, la rédactrice nous invite à changer de regard sur la maladie d’Alzhei-mer. Trop souvent, ce mot évoque des images très négatives : on ne voit plus une personne, mais un malade d’emblée très limité dans son potentiel. Ce regard an-goisse davantage la personne et aggrave sa perte de confiance en ses ressources. Or les évolutions diffèrent d’une personne à l’autre et les capacités demeurent longtemps… surtout lorsqu’elles sont stimulées. Les corolaires de cette repré-sentation sociale de la maladie sont multiples : une infantilisation ravageuse pour le patient et son entourage, un isolement et un sentiment d'impuissance des pro-ches. L’article conclut en insistant pour remettre la personne atteinte d’Alzhei-mer au centre de la relation de soins. Un accompagnement bienveillant et gra-dué, respectueux des capacités de la personne souffrant d’Alzheimer mériterait d’être soutenu par les structures bruxelloises.

L’asbl Medimmigrant répond à diverses questions sur base de son expérience de deux décennies d’existence à Bruxelles. Les activités de l’association sont cen-trées sur les soins de santé aux migrants et concernent aussi bien des personnes issues des secteurs médical, social et juridique que des personnes en situation de séjour illégal ou précaire. L’asbl propose des formations au secteur médicosocial et au public cible, un site Internet, des brochures, etc. A lire en page 12 pour en savoir plus.

A l’occasion de la campagne pour la journée mondiale de lutte contre le sida, Bruxelles Santé a rencontré Thierry Martin, directeur de la plateforme Prévention Sida. Il nous présente en page 14 l’exposition de témoignages visibles dans les gares bruxelloises et plaide pour une prévention combinée, basée 3 axes:- le préservatif qui reste un moyen de prévention essentiel,- le dépistage précoce pour éviter toute nouvelle contamination et permettre aux séropositifs de rester en meilleure santé car le traitement est pris plus tôt,- les nouveaux traitements antirétroviraux qui réduisent fortement le risque de transmission du VIH.

L’écho du CBPS est consacré à des ateliers d’échanges de pratique mis en place en partenariat avec l’asbl Repères. Les dates d’un cycle débutant en février 2015 sont précisées en page 17.

Notre rubrique « Débats » donne, comme d’habitude, la parole aux groupes politi-ques démocratiques. Les préoccupations sont multiples, allant du défi posé par le vieillissement dans la précarité, du développement du plan e-Health, de la réduc-tion des risques en matière d’assuétudes, d’une approche du sans-abrisme par la stratégie du « Housing First », au décloisonnement des politiques de santé.

Bruxelles Santé vous souhaite une bonne lecture, de bonnes fêtes de fin d’an-nées et vous fixe rendez-vous en 2015 !

Page 3: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 3

En direct de ...

Etterbeek

Des habitants disent « 9 x NON » à l’implantation d’antennes GSM En septembre dernier, les habitants du quartier Malou-Chambéry-Saint-Antoi-ne à Etterbeek organisaient une fête de quartier pas tout à fait comme les autres. Ils célébraient en effet leur première année de mobilisation contre l’installation d’antennes relais au numéro 60 de l’avenue Jules Malou. De farouches opposants aux nouvelles technologies ? Pas vraiment… Arrêt sur une mobilisation aux allures d’une saga qui s’annonce longue.

Fin des vacances d’été 2013, d’étranges af-fichettes sont glissées dans les boîtes aux lettres des riverains du quartier Malou-Chambéry-Saint-Antoine. Elles portent l’inscription « 9 x Non » surmontée d’un immense symbole triangulaire signalant un danger d’exposition aux ondes électro-magnétiques. De nombreux habitants de ce quartier familial et résidentiel paisible tombent alors des nues : « Des antennes, où ?... Ici ?! Qui ? Pourquoi ? » Beaucoup, dans leurs allées et venues dans le quar-tier, n’ont guère prêté attention au docu-ment affiché dans l’avenue Jules Malou indiquant qu’une enquête publique était en cours suite à une demande de permis pour l’installation de neuf antennes GSM introduite par l’entreprise de télécom Mo-bistar1. A leur décharge, il faut souligner que l’affiche rouge, placée sur un panneau un peu de guingois devant des places de parking, en tout petits caractères, n’incite pas vraiment à la lecture2 et passe un peu inaperçue malgré sa couleur. Si la plupart ont passé leur chemin, certains – plus cu-rieux ou vigilants ? – ont par contre pris le temps de la lire. Les plus surpris dans l’histoire sont les habitants de l’immeuble dont le toit est censé accueillir les neuf antennes. Le bâtiment, un ancien hôpital reconverti en logements à loyer modéré, appartient au CPAS de la Ville de Bruxelles qui n’a pas averti ses locataires. Plus tard, ces derniers apprendront que le CPAS

n’avait pas à le faire puisque l’installation d’antennes sur les toits fait uniquement l’objet d’un accord passé entre un opé-rateur télécom et un propriétaire. Sans doute, l’affichage public – pour informer et demander l’avis des riverains – est-il censé pallier le manque de communica-tion avec les locataires et les autres habi-tants du quartier. Une façon de faire as-sez interpellante soulignent ces derniers en ces temps où les citoyens sont appelés à participer davantage aux questions les touchant.

Très vite, la pétition que font circuler les habitants pour s’opposer à l’installation des neuf antennes récolte un peu plus de 500 signatures. Ils dénoncent notamment le fait que deux crèches et une école joux-

tent la zone d’implantation. « Ils s’inquiè-tent ainsi des retombées que pourraient avoir ces neuf antennes et deux mâts sur la santé des habitants », expliquait alors un riverain résidant en face du bâtiment du CPAS. La mobilisation avait d’ailleurs fait grand bruit puisque de nombreux médias s’en étaient fait l’écho dans leurs différentes éditions du 9 septembre de l’année dernière. Ce jour-là, même le bourgmestre libéral, Vincent De Wolf, avait fait le déplacement pour apporter son soutien aux habitants. Outre la cou-verture médiatique de leur combat, ces derniers ont décidé d’exploiter tous les moyens légaux dont ils disposaient pour exprimer leur point de vue. Des courriers et des mails ont ainsi été envoyés aux mandataires communaux, à la direction du CPAS de la Ville de Bruxelles et à Mo-bistar. Des contacts ont été pris avec le service d’aménagement du territoire de la commune d’Etterbeek, de même qu’avec celui de la Région bruxelloise pour s’infor-mer sur les éventuels recours à introduire. Bruxelles Environnement - IBGE (Institut Bruxellois pour la Gestion de l’environ-nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie mobile, a également été contacté. Pour implanter leurs antennes relais, les opé-rateurs, jusqu’il y a quelques mois en-core, devaient en effet obtenir un permis

A Etterbeek, le panneau annonçant l’ouverture d’une enquête publique a été l’élément déclencheur de la mobilisation.

Page 4: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

4 Bruxelles Santé 76

d’environnement de classe 2 et un permis d’urbanisme. Le premier a pour but d’assurer la protection de la population contre les inconvénients ou risques que peuvent entraîner certaines activités ou certains équipements3. Le second est nécessaire quand on veut construire ou apporter un changement à un bâtiment4, en l’occurrence placer des antennes sur un toit.

Bruxelles-capitale et le réseau 4G

Pour être comprise, la mobilisation des habitants du quartier Malou-Chambéry-Saint-Antoine doit être replacée dans le contexte de la téléphonie mobile belge. En 2011, le nombre d’utilisateurs de por-tables dans notre pays était estimé à 93%. Un article en ligne publié en 2013 parlait de 120 GSM pour 100 habitants, ce qui fait globalement 13 millions de télépho-nes mobiles en circulation5. Comment cela marche-t-il ? Les communications par GSM se font via la propagation d’ondes

électromagnétiques transmises entre les GSM et des antennes relais. Cela signifie que le nombre d’antennes est allé crois-sant puisque chaque antenne permet de recouvrir une zone, une superficie don-née. La multiplication d’antennes s’expli-que aussi par l’évolution de la technolo-gie : de la 2G (voix et SMS), on est passé à la 3G (envoi des données) et, à présent, à la 4G qui permet de télécharger des applications facilement sans WIFI, d’uti-liser la visioconférence, de partager et d’envoyer des pièces “lourdes” (sons, photos, vidéos), de visionner des vidéos partout, etc.6 À Bruxelles, l’histoire de la 4G a été amorcée depuis peu.

Les opérateurs en sont encore au dé-veloppement de la 4G qui nécessite, di-sent-ils, des antennes supplémentaires. En 2013, la capitale comptait déjà une centaine d’antennes compatibles. Or, se-lon les opérateurs (Proximus, Mobistar, Base…), il en faudrait 350. Restait donc à trouver les sites où les antennes peu-vent être installées. C’est là où les choses se corsent pour eux… Et ce qui faisait dire à Evelyne Huytebroeck (Ecolo), alors

Ministre bruxelloise de l’Environnement, « la population souhaite disposer du meilleur réseau », « mais s’offusque dès qu’une nouvelle antenne doit être po-sée »7.

En réalité, ils ne sont pas les seuls à être en cause puisque le dossier de la 4G faisait l’objet de discussions au sein du gouvernement bruxellois depuis 2007. Pendant toute la période, les opéra-teurs télécom n’avaient d’ailleurs cessé de s’en plaindre soulignant l’important retard technologique qui était pris par rapport à d’autres pays. Leur lobby avait même prévenu à l’époque que l’absence de la 4G signifiait, entre autres arguments, la

Les Bruxellois, un obstacle au dévelop-pement de l’internet mobile ultra rapide ?

Le bâtiment du CPAS de la ville de Bruxelles sur lequel des antennes GSM doivent être placées.

Page 5: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 5

fin de la vocation internationale de Bruxel-les et le départ massif des entreprises8. Fi-nalement, leurs plaintes auront été écou- tées puisque les changements qu’ils ap-pelaient de leurs vœux ont fini par arriver. Confrontés à la difficulté de trouver des propriétaires acceptant d’installer des an-tennes sur leur toit, les opérateurs se sont tournés vers la Région qui, « pour com-penser ce problème », a indiqué mettre à disposition des bâtiments publics. Autre décision régionale prise : la législation en matière d’ondes électromagnétiques qui définisssait une norme de 3V/m – une des plus faibles d’Europe – prise pour proté-ger la santé des citoyens, a été modifiée par une nouvelle ordonnance autorisant le déploiement de la technologie 4G dans la capitale. Votée en début d’année, l’or-donnance autorise désormais une norme de 6V/m, contrairement à ce qui pendant longtemps avait été dit. Si les opérateurs sont plutôt satisfaits, nombreux sont ceux qui ne le sont pas, parmi lesquels les habitants des quartiers résidentiels où les antennes veulent être placées.

Et… le principe de précaution ?

L’ancienne norme d’émission d’ondes électromagnétiques avait été prise au regard de ce principe. « Cette norme de 3V/m est un compromis qui a été accep-té en 2007 par la quasi-totalité du parle-ment. Les associations de défense des citoyens demandaient que le seuil soit fixé à 0,6V/m. En effet, sous ce seuil aucun effet biologique ne peut être observé. Ces derniers mois, les opérateurs télécom ont martelé l’information selon laquelle la nor-me bruxelloise serait 200 fois plus stricte que les recommandations de l’OMS... en 1999. Mais depuis les choses ont bien évo-lué. Il en va du principe de précaution : près de 1.800 études scientifiques dû-ment répertoriées mettent en cause l’ex-position aux ondes et pointent du doigt des dangers sanitaires pour l’homme, en particulier pour les catégories de la popu-lation les plus sensibles. Femmes encein-tes, enfants, personnes électrosensibles, sont tous soumis à un danger plus grand.

Aujourd’hui on rappelle partout des pré-cautions de base, comme utiliser une oreillette, éloigner les portables des en-fants, etc. La norme de l’OMS valait pour une personne adulte, en bonne santé, et soumise à 30 minutes de communication par jour. Et non pas pour des enfants dont la cour de récréation ou la salle de classe sont inondées d’ondes toute la journée. Il en va donc d’un principe de précaution bien légitime. Aujourd’hui, il y a suffisam-ment de preuves de la dangerosité des ondes que pour protéger le citoyen de leur exposition. La norme, en empêchant la pollution électromagnétique de notre environnement, offre également une pro-tection sanitaire des citoyens. »

« Que fait-on de la santé des citoyens ? » demandent les riverains du quartier Ma-lou-Chambéry-Saint-Antoine : « Qu’en est-il du principe de précaution ? ». Cer-tes, mais n’est-ce pas aussi l’argument qu’avancent généralement tous ceux qui s’opposent aux nouvelles technologies ? Les habitants disent qu’ils ne sont pas contre et s’expliquent notamment sur le site consacré à leur combat : « Il existerait actuellement un débat sur la possible no-civité du GSM et des antennes relais.

Pour ce qui est du GSM, il faut savoir que le débat est clos pour les pédiatres, mé-decins et scientifiques. Il ne fait pour eux aucun doute que l’utilisation du GSM (et Iphones, tablettes, téléphone sans fil DETC, certains « baby-phone », etc.), par-ticulièrement par ou pour les enfants, est nocive. Seuls les fabricants, les opérateurs, les médias et trop de décideurs politiques continuent de “douter” malgré les preu-ves apportées par un nombre croissant d’études sérieuses et reconnues. Pour ce qui est des antennes relais, le débat est toujours en cours et plus délicat, car dans ce cas, même ceux qui font le choix de peu ou ne pas utiliser de GSM se voient impo-ser un rayonnement électromagnétique

continu, de jour comme de nuit. Mais ici aussi un nombre croissant d’études scien-tifiques démontrent un impact indéniable des antennes sur le sommeil et la santé des populations voisines. Dans les diffé-rents domaines technologiques, de l’auto-mobile à l’aéronautique, l’innovation et le progrès passent par l’économie et un impact moindre sur l’environnement. Les technologies mobiles et les opérateurs représentent un enjeu trop important pour leur permettre d’échapper à cette logique. Le déploiement de nouvelles technologies mobiles ne représente pas un progrès quand elles provoquent une augmentation objective des pollutions ur-baines déjà nombreuses »9.

Pot de terre contre pot de fer ?

Les publicités qui vantent les avantages de la 4G mettent toutes en avant la vi-tesse de téléchargement (jusqu’à 10 fois supérieure à celle de la 3G note un opéra-teur sur son site) et la possibilité de regar-der des vidéos HD en streaming, jouer des jeux vidéos en ligne, regarder la télévision en déplacement ou surfer comme à la maison. Avec la 4G, la vitesse de naviga-tion est similaire à celle atteinte par une connexion internet fixe. Le message des

Certains doutent encore...

Fresque murale - Maison de quartier Chambéry

Page 6: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

6 Bruxelles Santé 76

Dans un combat qui semble être celui de David contre Goliath,

les habitants de Malou-Chambéry-Saint-Antoine

ne sont en rien prêts à céder du terrain, déterminés qu’ils sont

à introduire les recours.

Fresque murale rue ChambéryMaison de quartier Chambéry

Page 7: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 7

opérateurs est clair : plus besoin d’être enfermé pour profiter d’Internet et de tous les autres avantages. Ainsi présen-tée, la 4G ne peut que séduire… Cepen-dant ces prouesses technologiques qui permettent de s’affranchir des murs, est-ce là l’essentiel, rappelle-t-on encore du côté d’Etterbeek ? Cette interrogation est aussi abordée par Inter-Environnement Bruxelles (IEB) : « La 4G n’est pas une né-cessité publique et ne sauvera pas de vies. Son déploiement ne permettra que des futilités. La télévision sans fil ? Elle existe depuis plus d’un demi-siècle... Jouer à des jeux dans le métro ou regarder des films en streaming dans l’espace public mé-rite-t-il de remettre en cause le principe de précaution ? Où sont donc passées les grandes déclarations des parlementaires qui portaient l’ordonnance de 2007 (…) IEB demande l’application du principe de précaution, et que la technique soit mise au service de la santé et non la santé en danger pour des gadgets »10. Au regard de ces arguments, certains se demandent si le camp des opposants aux antennes, comme celui de tous ceux qui ont le « mal-heur » – ou l’outrecuidance ? – de poser des questions dérangeantes, ne veut tout simplement pas un retour au temps des cavernes. Existe-t-il d’autres alternatives ? « Des solutions existent, indique l’IEB : aujourd’hui, dans la plupart des cas, le retour au filaire est préconisé mais c’est principalement parce que les opérateurs n’ont jamais réellement cherché à trouver des techniques qui protègent la santé du public… Reste à savoir si le monde poli-tique est prêt à prendre les décisions qui inciteront les opérateurs à inventer des réseaux de demain compatibles avec la santé de tous. Sinon, ce sera la fuite en avant. Car après la 4G viendra à coup sûr la 5G, puis la 6G, puis la 7G… »11

Pour les habitants du quartier Malou-Chambéry-Saint-Antoine, comme pour ceux de la rue Puccini à Anderlecht et d’autres quartiers de la capitale confron-tés à l’installation d’antennes relais12, toute la question est de savoir si les auto-rités publiques entendent le refus de nombreux citoyens de voir déployer des antennes qui surexposeront davantage les Bruxellois aux ondes électromagné-

tiques. Aux pétitions s’ajoutent d’autres actions. Le Conseil communal d’Etterbeek a été interpellé et a entendu les représen-tants des riverains lors de sa séance du 21 octobre 2013. En leur répondant, le bourgmestre qui la présidait leur avait indiqué que l’IBGE, qui entre-temps avait rendu un avis favorable à la demande de permis d’environnement introduite par Mobistar, n’avait nullement tenu compte de l’avis défavorable que la commune lui avait signifié. Légalement, l’IBGE n’est pas tenu de le faire. Vincent De Wolf avait aussi souligné que le Collège avait déjà décidé quelques semaines auparavant de consulter un avocat quant à l’éventualité d’introduire un recours. Finalement la dé-cision de l’introduire avait été prise dans la semaine qui avait précédé la tenue du Conseil communal. Seule la commune peut en effet introduire un recours pour s’opposer à l’octroi d’un permis d’envi-ronnement. Il a également fallu s’oppo-ser au permis d’urbanisme en cours. Là, en cas d’avis favorable de l’IBGE, les ri-verains ont la possibilité d’introduire un recours devant le Conseil d’Etat. Toutes ces démarches ne sont pas faciles, notam-ment parce qu’elles sont assez complexes pour le citoyen lambda peu habitué aux rouages administratifs et juridiques des dossiers aussi techniques. Il lui faut les maîtriser vite s’il veut pouvoir réagir ra-pidement. Les délais pour introduire les recours sont habituellement assez courts. Compte-t-on là-dessus pour le décourager de se lancer dans ce type de démarches ? Il faut signaler que depuis le début de leur combat, les habitants bénéficient du sou-tien du Syndicat des Locataires.

Autre élément pouvant constituer un obs-tacle : le montant que le citoyen pourrait avoir à débourser si jamais il perdait son recours. Des frais qui peuvent également très vite s’élever. Dans un combat qui semble être celui de David contre Goliath, les habitants de Malou-Chambéry-Saint-Antoine ne sont en rien prêts à céder du terrain, déterminés qu’ils sont à introduire les recours. Des collectes sont organisées pour disposer des fonds nécessaires. Cel-le de l’année passée a permis de réunir la somme nécessaire pour déposer le dos-sier de recours.

Jouent-ils tous cartes sur table ?

Dans ce type de dossier, il est difficile de faire l’unanimité. A Etterbeek, les habi-tants font-ils uniquement de la résistance parce qu’ils ne veulent pas d’antennes dans leur quartier ? Nous avons déjà évo-qué le principe de précaution qu’ils soulè-vent. Ils avancent également la présence de deux crèches, de l’école maternelle et primaire Sainte-Geneviève, du centre d’ac-cueil l’Arche, de l’école t’Regenboogje… Une zone sensible, martèlent-ils, avec des populations plus vulnérables qu’il convient de protéger. A cela s’ajoutent les logements, la présence de nombreuses fa-milles avec enfants, particulièrement dans l’immeuble du CPAS. « Or, soulignent-ils sur leur site, sur les plans du dossier remis par Mobistar, nous constatons que seul un des trois bâtiments de l’école primaire Sainte-Geneviève est signalé en bleu, ce-lui qui est le plus éloigné. Étrangement les cours de récréation, où les enfants sont à l’air libre donc plus exposés encore, sont ignorées. Coïncidence ? Difficile à croire quand on constate que ce type d’“oublis” se répètent dans différents dossiers simi-laires remis par les opérateurs à l’IBGE. De plus ce sont toujours les bâtiments scolai-res ou de santé les plus proches qui sont omis, le doute n’est donc plus permis. Il s’agit visiblement d’une volonté de mi-norer la situation réelle. Plus troublant : l’IBGE en tolérant de tels “oublis” semble manquer à sa mission d’information et de protection de la population concernée. » Et de citer à titre d’exemple, le dossier remis par l’opérateur (KPN-Base) dans la commune d’Anderlecht. De tels agis-sements ne seraient pas spécifiques aux opérateurs belges, puisque des comités de riverains dans d’autres pays européens font le même constat13. Aux « oublis », il faut aussi relever des « erreurs » au niveau d'Etterbeek : « Mobistar prétend que les deux mâts de 3,5 m et leurs neuf antennes émettrices (ndlr : 3 pour la 2G, 3 pour la 3G et 3 pour la 4G) placés sur les toits du 60 avenue Jules Malou ne seraient visibles que d’un point précis situé sur le parvis de l’église Saint-Antoine. Dès octobre 2013 nous démontrions photos à l’appui, qu’au

Page 8: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

8 Bruxelles Santé 76

contraire ces mâts et antennes seraient visibles d’une bonne partie de l’avenue, de la place, du parvis et des alentours de l’église, bref depuis la majeure partie de la zone de protection. Ce point est impor-tant vu que le bâtiment est situé dans le périmètre de protection d’un bâtiment classé ».

Le comportement d’autres intervenants bruxellois a également de quoi surpren-dre. Ainsi, pourquoi la nouvelle ordonnan-ce régionale autorise-t-elle la norme de 6V/m alors que jusque-là les responsables politiques avaient dit et répété qu’on en resterait à 3V/m ? Qu’est-ce qui explique cette volte-face ? D’ici quelques années, faudra-t-il encore augmenter la puissance des antennes pour la 5G ou la 6G et en dé-ployer davantage ?... Il y a un an, le CPAS de la Ville de Bruxelles avait instauré un moratoire sur la « proposition de location pour l’installation d’antennes émettrices d’ondes pour téléphonie sur l’immeuble à l’avenue Malou ». A cette occasion, il avait adressé un courrier à l’IBGE lui demandant de se prononcer sur la question de la no-civité des ondes. Ce qui n’avait pas man-qué d’étonner le Syndicat des Locataires « puisqu’en théorie il n’existe aucun enga-gement légal avec Mobistar. Dans ce ca-dre le seul moratoire que le CPAS pourrait instaurer, c’est en interrompant toute dis-cussion avec les opérateurs de téléphonie mobile. Faut-il en outre rappeler aux res-ponsables du CPAS qu’il n’existe aucune loi qui les oblige à installer sur les toits de leurs immeubles des antennes de télépho-nie mobile ? Et ce même si les opérateurs étaient détenteurs de toutes les autori-sations requises ! ». Et pourquoi, poursui-vait le syndicat, s’adresser à l’IBGE plutôt qu’aux ministres chargées de la santé aux niveaux fédéral et régional ?

A luta continua ?D’autres interrogations subsistent. Pourquoi, par exemple, le moratoire ne concerne-t-il pas tous les bâtiments de logements du CPAS ? Yvan Mayeur (PS, ex-président du CPAS), à l’occasion d’une rencontre avec des riverains l’année der-

nière, avait indiqué que son institution n’était en rien motivée par l’appât du gain, la location de toit pour installer des antennes ne rapportant pas grand-chose. Le chiffre de 6000€ par antenne/an aurait été cité : est-il exact ? En France, on évo-que des montants compris entre 9.000€

et 15.000€. L’organisme aura beau dire que 6.000€ ne représentent que peanuts, mais le montant multiplié par le nombre de toits où les antennes seraient placées et la durée des contrats passés avec les opérateurs télécoms (15 ans renouvela-bles ?) ne rend-il pas l’argument quelque peu léger ? Le CPAS semblait aussi atten-dre des habitants qu’ils apportent la preu-ve de la nocivité des ondes. N’est-ce pas là un bel exemple de retournement de preu-ve ? Aux opérateurs, on leur demande quoi ?... Enfin, n’est-on pas également en droit de demander si les populations des logements sociaux et assimilés (majoritai-rement plus vulnérables culturellement et économiquement) sont sacrifiées sur l’autel de la 4G ? Tout comme l’ensemble des Bruxellois à qui rien n’a été demandé. On en veut encore pour autre preuve la modification législative intervenue voilà quelques mois : il n’est en effet plus ques-tion d’introduire de demande de permis d’environnement pour les antennes émet-trices.

Que devient la démocratie là-dedans ? Et un parallèle avec le dossier de l'amiante ne peut manquer d'être fait, indique-t-on encore du côté d'Etterbeek. Ce n’est que 20, 30, voire 40 ans après l'exposition à l'amiante, que des milliers de personnes à

travers le monde ont commencé à déve-lopper des maladies et à en mourir. L’his-toire doit-elle se répéter avec les anten-nes ? Qui payera les pots cassés ?... Affaire à suivre.

Anoutcha Lualaba Lekede

1. Pour améliorer la couverture en 2G et 3G et développer celle de la 4G.

2. Une enquête publique se déroule sur une période de 15 à 30 jours pendant la-quelle les citoyens peuvent consulter les dossiers de demande de permis soumis à enquête. Les enquêtes publiques sont organisées par les communes. Elles sont signalées par des affiches rouges placées à proximité du bien faisant l’objet de la demande de permis. L’enquête publique fait partie des mesures particulières de publicité. La moitié au moins du délai prescrit d'une enquête publique se situe en dehors des périodes de vacances sco-laires d'été, de Pâques et de Noël., http://urbanisme.irisnet.be

3. Les installations de classe 2 ont un impact modéré sur l’environnement et le voisina-ge. Pour ces installations, il faut obtenir un permis d’environnement de classe 2. Si les installations de classe 2 sont : consi-dérées d’utilité publique (réseau de dis-tribution d’électricité, téléphonie mobi-le…) ; et/ou exploitées par une personne de droit public (ambassade, administra-tion…) ; et/ou situées dans un bâtiment classé au patrimoine (maison Horta…) ; il faut obtenir un permis d’environnement de classe 2 « public » délivré par Bruxelles Environnement, http://www.bruxellesen-vironnement.be

4. http://urbanisme.irisnet.be5. La Belgique compte 120 GSM pour 100 ha-

bitants, http://www.lavenir.net6. A. Laurent, G. Durand, A. Colleau, La 4G va

débarquer à Bruxelles début 2014, http://www.lesoir.be

7. La 4G va débarquer à Bruxelles début 2014, http://belgium-iphone.lesoir.be

8. N. Prignot, 4G, il faut respecter le principe de précaution…, http://www.ieb.be

9. http://julesmalou.wordpress.com10. N. Prignot, Ordonnance « 4G » : cessons la

fuite en avant…, http://www.ieb.be11. Ibidem.12. Lire : Anderlecht en justice contre l’IBGE

pour s’opposer à l’installation d’antennes émettrices et Auderghem dit non à 8 an-tennes GSM, http://www.lacapitale.be

13. 4G à Paris : Résistance des écologistes et des riverains, http://www.rtbf.be

Voir aussi : http://www.sante.belgique.be/eportal/Aboutus/relatedinstitutions/

Ce qui veut dire qu’il n’y aura plus d’enquête publique, en d’autres termes, il n’y aura plus à se mettre les habitants à dos.

Page 9: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 9

Seniors

AlzheimerChanger le regard des intervenantsLa maladie d'Alzheimer n'est pas forcément ce que l'on croit. Pour s'adapter le plus possible aux réalités des malades et mettre en place un accompagnement adapté, il faudrait, d'abord, changer les regards. Et passer derrière le miroir des idées fausses...

Tout faux ou presque : lorsque nous pen-sons à la maladie d'Alzheimer – ou aux pa-thologies qui lui ressemblent –, une série de stéréotypes s'imposent à nous. Cette tendance n'exclut pas les professionnels du social et de la santé. Le problème, c'est que ces représentations, généralement négatives, influencent nos réactions ou nos comportements face aux malades, et aggravent souvent les problèmes. En voici la portée, à travers 5 exemples.

1. Une fois posé le diagnostic de maladie d'Alzheimer, "tout est foutu".

En Belgique, 136.000 personnes sont concernées par cette pathologie neuro-dégénérative qui entraîne des pertes cer-tes irrémédiables, mais progressives. Or, très fréquemment, on ne pense à cette maladie qu'à partir d'images extrêmes, en considérant ses effets ultimes et son stade terminal, porteur des déficits les plus élevés.

En réalité, à partir du diagnostic, la plupart des malades gardent des compétences et des capacités pendant plusieurs années. Les troubles de la mémoire, la désorien-tation dans le temps et dans l'espace, les problèmes d'expression orale, de recon-naissance, de raisonnements abstraits,

prendre la maladie au quotidien" (voir l'encadré). Comme le dit un malade : "Pourquoi tenter de parler si on ne me parle plus, parce qu'on considère que je n'en suis plus capable ?".

2. "Depuis que j'ai Alzheimer, il n'y a que mon chien qui me regarde comme avant." (un malade1)

Dès que la maladie est soupçonnée et, plus encore, diagnostiquée, les regards et les attitudes changent à l'égard de la per-sonne. En elle, on ne voit plus qu'un ma-lade, pour lequel certains évoquent "un enterrement sans fin", "une lente mort de l'esprit", "une perte de soi".

Selon Baldwin Van Gorp et Tom Vercruys-se (chercheurs au Centrum voor Media-cultuur en Communicatie-Technologie, à la KUL), la première des représentations véhiculées par les médias et/ou adoptées par la société à propos d'Alzheimer2, est celle d'un dualisme corps-esprit. En per-dant des facultés comme la mémoire ou les capacités cognitives et linguistiques, la personne serait comme privée de son essence humaine et automatiquement exclue d'un monde qui ne célèbre que l'esprit. "Ce n'est plus ma mère", entend-on dire. L'entourage parle aussi parfois

etc., vont aller augmentant, parallèlement à la perte des neurones et selon les zones touchées. Mais cela se déroule à des ryth-mes variables, en fonction des personnes, de leur histoire, de leur parcours de vie, ainsi que de leur environnement. Elles ne deviennent donc pas automatiquement incapables de tout faire, de prendre des décisions les concernant et, moins enco-re, de tout ressentir.

La vision réductrice de la maladie, qui se résume trop souvent par un : "En cas d'Alzheimer, tout est foutu", n'est pas sans conséquence. Ainsi, en dépit de la manifestation de premiers signes évoca-teurs, un grand nombre de personnes, terrorisées par l'idée qu'un tel diagnostic puisse être posé, repoussent le moment de consulter un médecin. Ce délai empê-che de mettre en place une série d'initiati-ves, de mesures précoces, ou de débuter des interventions centrées sur les besoins de la personne et sur ce qu'elle exprime pour ses choix de vie à venir.

De plus, une fois le diagnostic finalement posé, "pour l'entourage, le piège consiste à commencer à tout faire à la place de la personne, sans rien proposer de construc-tif. On accélère ainsi ses pertes et son dé-clin cognitif, ce qui augmente les difficul-tés au quotidien. En réalité, le principe du 'use it or lose it' s'applique ici : moins la personne est sollicitée, plus elle va perdre ses capacités", assure Valentine Charlot, neuropsychologue, gérontologue, cofon-datrice de l'association Le Bien vieillir, et auteur de "Vivre avec Alzheimer. Com-

Page 10: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

10 Bruxelles Santé 76

draient à distance... En attendant, il faut pourtant se contenter de traitements qui parviennent – dans certains cas – à nor-maliser les comportements en début de maladie et contribuent alors à améliorer la qualité de vie du malade et de son en-tourage. Sans jamais être suffisants à long terme. La quête du traitement "miracle", tout comme une approche purement médi-cale ou médicamenteuse, pourraient pousser à négliger d'autres options de traitements ou à ignorer leur existence. Il s'agit de ceux qui, à partir d'une meilleure connaissance de la maladie, bâtissent un accompagnement éthique autour d'une personne vulnérable, avec des comporte-ments psycho-sociaux adaptés, soucieux de stimuler les capacités restantes. Pour se développer, ces pistes nécessiteraient une impulsion "politique" pour encoura-ger, développer et potentialiser toutes les aides possibles à partir d'approches cognitives et de réhabilitation.

4. « Depuis qu'il (elle) est malade, tout s'est arrêté ».

La maladie d'Alzheimer est-elle conta-gieuse ? On pourrait le penser, tant elle isole socialement la personne concernée et son entourage. Certes, plus la mala-die progresse, plus elle atteint l'autono-mie. Néanmoins, et en particulier dans la première phase du trouble, l'utilisa-tion d'aide-mémoires, d'agenda, de ca-lendrier, d'un étiquetage adapté, peut permettre de conserver des activités, et aider à continuer à mener une vie sociale propre à entretenir l'autonomie5. Quand la maladie est installée, il s'agit encore de continuer à créer une structure de vie sta-ble, en instaurant des rituels, des horaires fixes, un programme régulier qui mobilise les compétences restantes et n'exclut pas les sorties. La recherche constante d'un équilibre en-tre l'acceptation de la perte de certaines

de "morts-vivants" avec lequel il serait im-possible de communiquer, "d'une ombre sans parole", d'individus déjà "passés de l'autre côté"...

Pourtant, la personne n'est pas morte. Ses comportements sont différents. Mais elle n'est pas réduite exclusivement à une maladie qui lui retirerait toute place dans la société. Un rapport de la Fondation Roi Baudouin3 évoque le danger de la "pro-phétie autoréalisatrice" née d'une telle vi-sion : les regards négatifs insécurisent et angoissent davantage encore la personne. Dès lors, elle accumule les réactions mala-droites. Autour d'elle, l'incompréhension grandit. Au final, le fardeau de la maladie s'accroît et devient plus lourd encore qu'il n'aurait pu l'être.

Dans de nombreux cas, un deuil précoce de l'autre entraîne une autre consé-quence : son infantilisation, qui mène à un maternage, ravageur pour tout le monde. La personne malade est perçue "comme une plante". On ne voit en elle que ses capacités perdues, plutôt que celles qui restent. Dès lors, on risque de passer à côté des moyens de court-cir-cuiter, autant que possible, l'absence de communication verbale, ou les me-sures qui permettraient d'améliorer la vie de la personne et de son entourage. En fait, s'il y a un deuil à faire, ce n'est pas celui concernant la personne : elle est toujours présente. Comme le souligne le Pr C.Fazio : "La maladie ne devient jamais plus grande que l'homme"4.

3. « L'espoir, c'est la recherche ».

Face à une maladie dont le diagnostic est vécu comme un traumatisme, un coupe-ret ou une condamnation à une (longue) agonie peu enviable, la foi dans la science permet de garder l'espoir. Grand public et corps médical rêvent de pouvoir disposer d'une ou de plusieurs molécules qui effa-ceraient les problèmes ou les maintien-

facultés, tout comme la stimulation des capacités restantes, font partie du traite-ment. Avec l'aide éventuelle de logopèdes et de psychologues, les visites fréquentes, le soutien social et l'inclusion de la person-ne dans des activités sociales concourent au maintien de la qualité de vie de la per-sonne et à celle de son entourage. Isabel-le Parentani, de l'asbl Entr'Ages, raconte que lors d'une activité intergénération-nelle organisée entre des étudiants et des personnes âgées qui avaient monté (et joué), ensemble, une pièce de théâtre, un vieil homme touché par des problèmes de mémoire avait pu assurer sans faiblir son rôle sur scène : une jeune fille le tenait par l'épaule et appuyait discrètement pour lancer le départ des citations que son par-tenaire lisait lors de chaque signal...

La régression progressive de la communi-cation provoque évidemment, aussi, bien des difficultés. Néanmoins, une communi-cation non verbale peut prendre le relais. Elle est longtemps préservée, au moins en partie, y compris dans les formes avan-cées de la maladie. Les gestes, le toucher, les postures, les expressions faciales in-forment sur ce que ressent la personne... Mais encore faut-il connaître les attitudes qui permettent de garder un lien, de com-muniquer directement ou autrement, de se synchroniser au niveau du rythme et des limitations imposées par la maladie.

5."Les 'vraies' victimes, ce sont les proches".

Les atteintes des capacités mentales, les troubles de l'humeur et de comporte-ment, la détérioration physique progres-sive, sont autant de facteurs qui mènent à l'isolement et qui contribuent au sen-timent d'impuissance des proches. Les chercheurs de la VUB ont montré que dans les médias, l'accent est fortement mis sur le poids que la maladie fait porter à un entourage présenté comme une vic-time collatérale directe.

Page 11: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 11

Alzheimer à contre-courant

"Il n'y a a pas grand chose à faire sur un plan médical. Mais beaucoup à faire pour accompagner les personnes atteintes de maladies de la mémoire". Cette thèse et cette conviction, Valentine Charlot la décline dans "Vivre avec Alzheimer, comprendre la maladie au quotidien" (Editions Mardaga). L'auteur s'y adresse directement aux malades, rappelant ainsi que contrairement aux idées reçues, le diagnostic de la maladie ne symbolise pas la fin de tout, et qu'ils n'ont pas à devenir les nouveaux pestiférés de la société. Au contraire. La démonstration de Valentine Charlot repose sur ce qu'il est possible de faire encore, et sur l'importance de continuer à utiliser les compétences restantes. A contrario, elle révèle le poids des représentations et des idées reçues qui nuisent aux malades, mais aussi à leur entourage, et qui contribuent à poser des freins à des prises en charge adéquates. Ce livre fort, différent, inattendu sur certains points, est donc, aussi, une manière de communiquer différemment sur cette maladie. Enfin.

Pour la famille, l'erreur serait de ne comp-ter que sur elle-même et d'attendre avant de faire appel à tous les soutiens possi-bles. Lorsque ces derniers sont mis en pla-ce de manière précoce, anticipativement, ils contribuent à sauvegarder une meilleu-re qualité de vie pour tous. Trop souvent aussi, l'entourage endosse le rôle des pro-fessionnels et/ou ne clarifie pas assez les fonctions de chaque intervenant. Comme l'explique Valentine Charlot, les proches répondent souvent aux situations urgen-tes et avancent, le nez dans le guidon, sans aucun recul ni l'apport d'un regard externe. Du coup, ils ne parviennent plus à sauvegarder de l'énergie pour la relation familiale et affective. Par amour ou par obligation, certains se transforment en serveurs-conjoints. Souvent, leurs bonnes intentions se fracassent alors aux réalités de la maladie. Comme pour confirmer tou-tes les idées reçues qui alourdissent leur sort et celui des malades ?

Plaidoyer pour unregard plus juste

En guise de conclusions, il semble qu’une réflexion et une prise de conscience soient nécessaires, pour remettre la per-sonne atteinte d’Alzheimer au centre de la relation de soins. Cette attitude serait cohérente dans une société qui prône l’autonomie, l’indépendance individuelle et l’empowerment. La liberté du patient de choisir, notamment son mode et son lieu de vie, devrait être une préoccupa-tion des intervenants. Un accompagne-ment bienveillant et gradué, respectueux des capacités de la personne souffrant d’Alzheimer mériterait d’être soutenu par les structures socio-sanitaires et d’aide à domicile bruxelloises. Cela passe proba-blement par des efforts de sensibilisation, de formation et une reconnaissance de ce travail par les pouvoirs publics.

Pascale Gruber

1. Cité dans "Vivre avec Alzheimer. Compren-dre la maladie au quotidien", Valentine Charlot, Editions Mardaga.

2. Framing et reframing, communiquer autre-ment sur la maladie d'Alzheimer. Rapport de la Fondation Roi Baudouin (2011).

3. Ibidem.

4. Ibidem.

5. Les soins aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou d'une maladie ap-parentée : perspectives et enjeux. Série : Apprivoiser la maladie d'Alzheimer (et les maladies apparentées). Fondation Roi Baudouin (2009) ou Un autre regard sur la maladie d'Alzheimer - et les maladies appa-rentées. Fondation Roi Baudouin (2010).

Une autre vision de la maladie

Le site www.mongeneraliste.be consacre un dossier à la mala- die d'Alzheimer. Il évoque le processus qui mène à la dé-générescence neuronale, ses conséquences au niveau des symptômes, et les différents stades par lesquels passent un grand nombre des personnes atteintes par cette pathologie. Il rappelle qu’actuellement, les médicaments sont très loin de permettre de tout régler. Dès lors, le site tente de mettre en évidence une autre approche, encore souvent négligée : celle qui contribue à créer un accompagnement adapté à la personne, afin de préser-ver autant que faire se peut son autonomie et éviter son isolement. Le texte donne ainsi divers conseils, propose des pistes pour préserver la com-munication avec le malade et indique aussi quelques adresses utiles.

Page 12: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

12 Bruxelles Santé 76

Promotion de la santé

20 ans déjà… Medimmigrant célèbre ses noces de porcelaine !Retour en arrière sur deux décennies d’action à Bruxelles

Veerle Evenepoel, coordinatrice de l’asbl Medimmigrant

Depuis 1994, Medimmigrant offre une assistance individuelle aux personnes en situation de séjour précaire nécessitant des soins médicaux à Bruxelles. Sur le plan structurel, l’asbl travaille à améliorer l’ac-cès aux soins de santé et le prolongement ou l’autorisation de séjour pour raisons médicales. Pour atteindre ces objectifs, elle donne des formations, rédige des re-commandations politiques et participe à divers groupes de travail consacrés à ces questions. Medimmigrant fait le point sur son parcours…

Med... immigrant ?

L’asbl a été fondée le 11 août 1994. Au départ, Medimmigrant s’appelait le « Point d’appui personnes sans-papiers » (« Steunpunt Mensen Zonder Papieren »). Point d’info alors « généraliste », nous répondions toutefois à de nombreuses questions concernant la santé. Il faut dire qu’à l’époque, aucun cadre légal ne ré-glait la problématique des soins de santé pour les personnes « sans papiers ». Nous sommes alors devenus le « Point d’appui médical pour personnes sans papiers » (« Medisch Steunpunt Mensen Zonder Pa-pieren »).

Avec le temps, les questions traitées se sont complexifiées. Nous avons alors dé-veloppé notre action en ce sens et élargi notre public cible afin de répondre aux be-soins du terrain. C’est en 2004 que l’asbl a été rebaptisée « Medimmigrant ». Nous trouvions en effet que cette appellation convenait mieux à une organisation qui

s’occupait principalement des soins de santé pour les migrants. Nous visions ainsi aussi bien les personnes en situation de séjour illégal, « sans-papiers », que les per-sonnes avec un titre de séjour provisoire, comme les demandeurs d’asile, les per-sonnes en procédure de regroupement familial par exemple. En fait toutes les personnes en situation de séjour précaire dépourvues d’assurance-maladie en Belgi-que, ainsi que les professionnels de santé confrontés à ce public.

Que fait Medimmigrant au juste ?

Nous répondons aux questions qui nous sont adressées par téléphone ou par courriel. Nous nous concentrons sur les personnes et les organisations établies dans la Région de Bruxelles-Capitale. Les questions viennent aussi bien des person-nes issues des secteurs médical, social et juridique que des personnes en situation de séjour illégal ou précaire. Toutes les demandes que nous traitons touchent à la santé. La plupart des questions portent sur la procédure de l’aide médicale urgen-te, mais également sur l’accès à l’assuran-ce-maladie, le séjour de courte ou longue durée pour raisons médicales, etc.

Outre cette assistance individuelle, nous consacrons aussi beaucoup de temps à donner des formations au secteur médico-social et au public cible, à actualiser notre site Internet, à réaliser des brochures, à élaborer des recommandations politi-ques…

Pourquoi Medimmigrant travaille-t-il pour la Région de

Bruxelles-Capitale ?

Bruxelles est une région en mouvement confrontée à un afflux constant de nou-veaux habitants et travailleurs médico-so-ciaux ayant besoin d’information. Région multiculturelle, on y parle aussi plusieurs langues. Un soutien aux personnes ayant besoin de soins de santé et au personnel du secteur médical et social est donc plus que nécessaire. La demande est grande !

La situation à Bruxelles est-elle très différente

par rapport à la Flandre ou à la Wallonie ?

La spécificité de la Région bruxelloise, c’est bien entendu son caractère multicul-turel, mais aussi la densité de sa popula-tion. Sur le plan de l’aide octroyée par les CPAS, cette spécificité ne peut qu’avoir des répercussions. La Région de Bruxel-les-Capitale a une densité de population élevée pour une superficie totale de 152 km². Elle compte 19 CPAS, alors que le CPAS de Gand, par exemple, est responsa-ble à lui tout seul des habitants d’une ré-gion presque aussi grande. Chaque CPAS a sa propre interprétation de la législation fédérale et un mode de fonctionnement propre. Il peut aussi bien y avoir des diffé-rences entre deux CPAS bruxellois, qu’en-tre un CPAS bruxellois et wallon par exem-ple. Les personnes en situation de séjour

Page 13: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 13

précaire déménagent plus souvent que les autres et elles ont aussi moins souvent un médecin de famille. A Bruxelles, les frontières communales sont vite traver-sées, et à chaque déménagement, c’est souvent un nouveau dossier qui doit être ouvert…

Medimmigrant perçoit-il une évolution

sur le terrain ?

Des phénomènes nouveaux surgissent ré-gulièrement, et la législation adoptée ne cesse de soulever de nouvelles questions. Nous pouvons citer de nombreux exem-ples : la crise de l’accueil des demandeurs d’asile qui a entraîné un manque de places dans les centres d’accueil et ainsi considé-rablement entravé l’accès aux soins de santé. Les ressortissants de pays tiers qui séjournent dans un autre pays européen et qui arrivent en Belgique ont aussi be-soin de soins médicaux, mais ils n’ont pas toujours une assurance-maladie…

Les occupations d’églises se traduisent par une augmentation de demandes d’aide adressées à un CPAS donné… Ces dernières années, un certain nombre de droits des personnes en situation de sé-jour précaire ont été rognés : ainsi, on ne les considère plus comme des élèves régu-liers de l’enseignement néerlandophone pour adultes. Les familles indigentes en situation de séjour illégal n’ont plus droit à une place dans un centre d’accueil, sauf dans un centre de retour…

D’un autre côté, depuis 2006 par exem-ple, le gouvernement rembourse les frais de séjour des personnes en situation de séjour illégal admises dans un hôpital psy-chiatrique. Les mineurs non accompagnés scolarisés peuvent être couverts par une assurance-maladie, les étrangers munis d’un document de séjour peuvent depuis peu faire du bénévolat, ce qui augmente leur bien-être… Et puis, il y a la législa-tion : l’arrêté royal relatif à l’aide médicale urgente aux personnes en situation de sé-jour illégal qui est toujours en vigueur.

Qu’implique cet arrêté royal ?

Les personnes en situation de séjour il-légal indigentes peuvent introduire une demande de prise en charge de leurs frais médicaux (futurs) auprès du CPAS de leur lieu de résidence. Le CPAS mènera ensuite une enquête sociale et prendra une déci-sion positive ou négative. Dans l’ensem-ble, nous nous réjouissons de l’existence de cette réglementation, même si toute une série de problèmes se posent aux ni-veaux local et suprarégional.

Medimmigrant s’efforce de trouver des

solutions structurelles. Y arrive-t-il toujours ?

Nous continuons à constater la très gran-de diversité des outils de travail et des procédures des CPAS. Ainsi, certains CPAS par exemple utilisent une carte médicale, dont l’apparence diffère à chaque fois et donne accès à des droits différents. C’est une source de confusion aussi bien pour les prestataires de soins que pour les per-sonnes en situation de séjour illégal. En effet, ce public cible déménage plus sou-vent. Nous regrettons aussi que certains CPAS tiennent à collaborer de manière ex-clusive avec certains prestataires de soins; de ce fait, les autres prestataires de soins ne peuvent pas jouer leur rôle vis-à-vis de cette catégorie sociale.

L’asbl Medimmigrant pense-t-elle qu’un seul grand

CPAS serait préférable ou qu’une autre

instance doit être créée pour traiter les demandes d’aide de

ces personnes ?

Le CPAS nous semble le mieux placé pour mener une enquête sociale. Il dispose de l’expertise nécessaire et est en outre com-pétent pour les autres habitants résidant

sur son territoire. Mais un grand CPAS ne garantit pas un meilleur service. Les CPAS doivent être proches des gens et peu-vent garder leur particularité, mais leurs outils de travail devraient être davantage harmonisés. Les CPAS ne communiquent pas assez sur leurs modes de fonction-nements. Par exemple, très peu de CPAS bruxellois distribuent des brochures sur la procédure de l’aide médicale urgente.

Comment Medimmigrant voit-il l’avenir ?

Nous espérons que les responsables po-litiques resteront convaincus de la néces-sité d’accorder des soins de santé à toute personne résidant en Belgique, quel que soit son statut de séjour.

La migration est une réalité que nous de-vons admettre. On ne refrène pas la réa-lité, mais bien la migration… En revanche, nous devons nous efforcer de bien l’enca-drer et de bien la gérer. Il est important d’octroyer des soins médicaux aux per-sonnes qui en ont besoin : pour des rai-sons non seulement humanitaires, mais aussi de santé publique.

Medimmigrant tient à remercier ses pou-voirs subsidiants, à savoir la VGC (santé) et la Cocom (santé), pour leur soutien financier. Nous espérons qu’ils resteront convaincus de l’utilité de notre action.

Pour en savoir plusMedimmigrantRue Gaucheret 1641030 BruxellesT : 02 274 14 33/34M : [email protected] : www.medimmigrant.be

Page 14: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

14 Bruxelles Santé 76

Campagne

Vie & VIH aujourd’huiCette année, la campagne de la Journée Mondiale de Lutte contre le Sida s’est accompagnée d’une exposition de témoignages visible dans les gares bruxelloi-ses. Seize témoignages relatifs au VIH/Sida ont incité les usagers de la SNCB à la réflexion, à la prévention, à la solidarité... Cette exposition est aussi un outil mis à disposition des institutions et organismes intéressés.

L’année passée, avec Thierry Martin, Directeur de la Plateforme Prévention Sida, nous avions refait le point sur l’état des connaissances et sur les stratégies de prévention en matière de Sida. Cette année, Thierry Martin nous explique la genèse du nouvel outil d’informations sur le VIH, l’exposition « Vie & VIH aujourd’hui » : « Depuis 3 ou 4 ans, le monde du VIH connaît un profond chan-gement. Les moyens de soigner le Sida et les moyens de prévention ont fort progressé. En effet, depuis 2008 et l’an-nonce par une équipe suisse qu’une charge virale indétectable diminuait le risque de transmission du VIH de plus de 90% et la confirmation ultérieure de cette découverte, une nouvelle stratégie

de prévention dite combinée s’est mise en place. Elle comprend le préservatif, le dépistage et les traitements antiré- troviraux. Ces moyens de prévention com-plémentaires ont permis une très impor-tante amélioration des conditions de vie des séropositifs, bien que les personnes vivant avec le VIH soient toujours victimes de discrimination au travail, dans le monde médical, dans la vie de tous les jours… Le Sida est à présent considéré comme une maladie chronique, avec laquelle on peut vivre de très nombreuses années si on suit correctement son traitement. La préven-tion combinée sera d’ailleurs le thème de la campagne d’information en 2015. »

On entend par prévention combinée, la combinaison de différents moyens de pré-vention : - le préservatif qui reste un moyen de

prévention essentiel, - le dépistage précoce pour éviter toute

nouvelle contamination et permettre aux séropositifs de rester en meilleure santé car le traitement est pris plus tôt,

- les nouveaux traitements antirétrovi-raux qui réduisent fortement le risque de transmission du VIH.

Le concept de prévention combinée vise à construire des synergies entre straté-gies de prévention comportementales (changer les comportements à risques

Page 15: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 15

Le VIH ne fait pas de différences, les té-moignages réunis le démontrent. Les personnes qui témoignent, vivant avec le VIH ou non, ont des profils très variés et sont des gens « comme tout le monde ». Ils aiment, travaillent, ont une famille, des amis. Ils s’interrogent sur leur vie, sur le regard de la société, sur leurs prises de ris-que, sur leurs traitements. Ils parlent des tabous, du soutien de leur entourage, de la prévention, de leur quotidien et aussi d’espoir.

« L’idée que nous voulons transmettre, nous explique Thierry Martin, est que tout le monde a quelque chose à dire sur le VIH, que nous sommes tous concernés. Nous souhaitons aussi faire passer un message positif puisqu’il est aujourd’hui possible de vivre – et plutôt bien – avec le VIH. Cette exposition a été montrée dans les quatre grandes gares bruxelloises pour la Journée Mondiale de Lutte contre le Sida et au parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Elle est mise à dispo-sition des institutions et organismes qui souhaiteraient la présenter. Notre souhait est que cette exposition tourne et qu’elle puisse être vue par le plus de gens possi-bles. »

Mais les dernières élections laisse le sec-teur dans un climat d’incertitude, Thierry Martin : « Actuellement, nous espérons que le Plan National Sida avalisé lors de la précédente législature par tous les ac-teurs concernés soit mis en place par la nouvelle ministre de la santé, Maggie De Block. Nous espérons aussi que les minis-tres en charge de la santé, Maxime Prévôt pour la Région wallonne et Cécile Jodo-gne en Région bruxelloise développent une politique cohérente en matière de Sida et d’IST. Enfin, nous espérons qu’une décision positive soit prise concernant le dépistage délocalisé et/ou démédicalisé. Le dépistage est essentiel dans les politi-ques de prévention car le problème n’est pas la personne séropositive qui connaît son statut et se soigne mais la personne infectée par le VIH qui s’ignore. »

Propos recueillis par Marie-Hélène Salah

individuels et collectifs), structurelles (agir sur les facteurs sociaux, économi-ques, juridiques, culturels et éducatifs susceptibles de vulnérabiliser les per-sonnes et les groupes les plus exposés à l’épidémie et de faire obstacle aux changements de comportement) et biomédicales, afin de proposer un plus grand nombre d’outils efficaces dans la lutte contre le VIH et les autres IST.

Beaucoup de choses ont donc changé dans le monde du VIH et le public n’en est pas toujours bien informé. Thierry Martin : « Il nous a donc paru nécessaire de faire le point sur le VIH aujourd’hui et nous avons choisi de le faire à tra-vers des témoignages. Nous avions déjà réalisé une exposition « Vivre ensemble, un autre regard sur les séropositifs » en 2002-2003. Douze ans plus tard, il était donc intéressant de recueillir de nou-veaux témoignages. Nous avons récolté les paroles de seize personnes dont six atteintes du VIH et un médecin. Nous souhaitions que ces témoignages reflè-tent la diversité de notre société ; il y a des homosexuels, des hétérosexuels, des hommes, des femmes, des vieux, des jeunes, des personnes issues de l’immi-gration… Certaines s'expriment à visage couvert car il est encore difficile d'affron-ter le regard des autres. D’autres, comme Jean-Marc et Antonia, ont déjà témoi-gné lors de la précédente exposition, en 2002.

Nous – une photographe elle-même séropositive, un caméraman et moi- même – sommes allés à la rencontre des témoins et nous avons filmé les inter-views. Ces rencontres sont présentées sous forme d’affiches avec une photo de la personne qui témoigne et un texte extrait de son témoignage. Le site Inter-net complète l’exposition avec les vidéos en ligne des interviews. Les internautes ont aussi la possibilité de s’exprimer en filmant leur propre intervention et en la postant sur www.preventionsida.org. Leur vidéo sera ensuite partagée sur les réseaux sociaux. »

Page 16: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

16 Bruxelles Santé 76

Echo du CBPS

Voici plus de 10 ans que l'asbl Repères et le CBPS travaillent ensemble. Lors des formations données par Repères et les accompagnements méthodologiques menés par le CBPS, des professionnels de champs divers, témoignent de la com-plexité croissante des problématiques rencontrées sur leur terrain. Force est de constater que de nombreux éducateurs, personnels de santé, assistants sociaux, etc., sont confrontés à des personnes cu-mulant des problématiques si complexes et multifactorielles qu’ils se sentent de plus en plus démunis et impuissants dans leur pratique professionnelle.

Face à un travail « en solitaire », ces pro-fessionnels vivent des situations d’échec : trop d’obstacles à surmonter seuls pour améliorer la situation du demandeur, sentiment d’une obligation à toujours intervenir dans l’urgence (voire quand il est déjà trop tard), difficultés à travailler en interdisciplinarité, découpage des pro-blématiques, résistance des demandeurs face à une pluralité d’intervenants, injonc-tion à être plus dans le contrôle social que dans l’accompagnement des usagers… Le turn-over du personnel de certains sec-teurs est probablement révélateur de ce sentiment d’épuisement et d’échec des professionnels de terrain. C’est pour sou-tenir ces travailleurs, qu’ont été mis en place ces ateliers d’échanges de pratiques où la méthode préconisée se base sur les concepts de promotion de la santé et pri-vilégie la participation des travailleurs.

Pas si seul.e que cela…

Nous sommes deux animateurs, un for-mateur de Repères et un responsable de

Quand des travaille urs de différents secteurs se rencontrent pour déposer leurs impasses et échanger leurs ressources !« Pas tout seul face à mes impass es, ma pratique, mes questions professionnelles… » sont des ateliers d’échanges de pratiques ouverts à des travailleurs issus de différents secteurs. Ils sont menés conjointement par l’asbl Repères et le CBPS. Une deuxiè-me session se clôture, une troisiè me édition se profile en janvier 2015. Focus sur ces ateliers mixant questions, décryptages institutionnels, élaboration colle ctive de nouvelles pistes de travail.

Pour toutes informations concernant l’exposition« Vie & VIH aujourd’hui » :

Plate-Forme Prévention SidaRue Jourdan, 151 à 1060 Bruxelles Tél: +32 02/733 72 99 Fax:+32 02/646 89 68

Pour apporter son témoignage dans le cadre de l’exposition« Vie & VIH aujourd’hui » :www.preventionsida.org

La Plate-Forme Prévention Sida a aussi publié une nouvelle brochure informative « Vivre avec le VIH ». Cette brochure est destinée à aider les personnes vivant avec le VIH à mieux comprendre leur maladie, à se soigner et à mieux vivre avec leur séropositivité. Elle peut également être utile aux person-nes qui orientent et aident les personnes séropositives à prendre le mieux possible soin d’elles.

Parce que le Sida se transmet non seu-lement par le virus VIH, mais aussi par le silence, l'indifférence, l'ignorance, les préju-gés et les tabous.

Enfin, elle est un outil précieux pour les proches et, au-delà, pour tous ceux qui souhaitent s’informer sur les réalités de l’épidémie et les difficultés que les per-sonnes vivant avec le VIH peuvent ren- contrer.

Cette brochure peut être commandée à la Plate-forme Prévention Sida ou téléchar-gée sur le site : http://preventionsida.org/2014/07/vivre-avec-le-vih-2014/

Page 17: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 17

projet du CBPS. Un tandem, chacun muni de sa spécificité, pour éprouver ce « pas tout seul » où va se construire un espace de questions, d’hypothèses où chacun est invité à participer. Confidentialité et respect de chacun sont évidement les rè-gles de mise, mais aussi l’importance de la présence de chacun dans un espace qui fonde sa légitimité dans la dynamique de la pluralité des regards.

A chaque séance, une question, un « cas » est exposé par un participant au reste du groupe. Les phrases sont tantôt hésitan-tes ou tranchantes, le débit lent ou rapide. Certains participants se disent surpris de s’entendre reformuler par d’autres ce qu’ils ne parvenaient pas à rassembler. L’écoute, elle, est toujours attentive même déclinée sous un autre mode, ce qui est exprimé par l’un fait résonance aux questions que se posent les autres, ou mettent en forme d’autres interroga-tions. Et d’autres de se dire qu’ils ne sont peut-être pas si seuls s’ils partagent des questions ensemble.

Après cette écoute, les questions, les hypothèses puis les interprétations de chacun des participants s’échangent, des pistes s’ébauchent. Le travail collectif s’élabore. Au fil des séances, des liens se tissent, ainsi est expérimenté, par la pra-tique en groupe, ce fameux « travailler ensemble ». Ces ateliers sont l’occasion de s’autoriser à questionner ses prati-ques, prendre du recul, découvrir d’autres pratiques professionnelles, rechercher de nouvelles pistes de travail et ainsi se ressourcer au travers d’échanges avec d’autres.

Nous espérons qu’en étant mis dans une position de ressources pour leurs collè-gues en formation, les participants re-trouvent l'estime de base de leur travail et de leurs compétences. Car ces ateliers d'échange de pratiques nourrissent éga-lement la confiance en soi et la créativité, ingrédients nécessaires pour transmettre ces ressources aux différents publics ren-contrés au quotidien.

Quels effets ?

Selon les dires des participants, participer à un groupe dégagé d’enjeux institution-nels communs permet de s’exprimer avec une plus grande liberté, ce qui favorise réflexion et prise de recul. Pour certains participants, cet espace complète ce qui existe déjà dans leur institution (réunion d’équipe et supervision). Pour d’autres, cela vient suppléer l’absence de ressour-ces internes. Cette prise de recul per-met de nuancer le point de vue d’origine autour de la problématique initialement nommée. On s’aperçoit que les aspects personnels, professionnels et institution-nels sont souvent imbriqués dans ce qui fait impasse. Le partage de regards, de cultures, d’options, d’habitudes, d’expé-riences apporte un éclairage nouveau sur certaines situations.

Les participants identifient des effets à différents niveaux :Institutionnels. Comprendre autrement ce qui est problématique permet de re-tourner dans son institution avec plus de distance et moins d’enjeux personnels. On partage alors autrement avec ses collègues une réflexion sur une situation complexe.

Personnels. Le travail effectué clarifie une part de ce qui est personnel et singu-lier dans ce qui fait impasse. Il permet de nuancer ce qui est en jeu et de faire la part entre les dimensions subjectives et objec-tives des difficultés, d’identifier en quoi une sensibilité personnelle fait parfois frein ou parfois ressource dans certains contextes difficiles ou face à certains ty-pes de problématiques.

Professionnels. La prise de recul permet un repositionnement à l’égard des usa-gers à la fois sur le plan de la mobilisation des ressources institutionnelles, celles de réseau et celles des ressources liées à la «posture adoptée» dans la relation de travail.

Nous espérons que ce qui fera ressource pour les travailleurs aura un effet sur leurs pratiques au bénéfice des usagers.

Et pour 2015, si vous êtes intéressé(e) par cette expérience, 8 dates à planifier dans votre agenda : 24/02, 24/03, 28/04, 26/05, 23/06, 22/09, 20/10, 24/11/2015.

L’équipe de Repères et du CBPS

Renseignements pratiques :8 ateliers sont prévus les mardis de 13 heures 30 à 16 heures 30 :24/02, 24/03, 28/04, 26/05, 23/06, 22/09, 20/10, 24/11Prix de l’ensemble des ateliers : 80 euros

Quand des travaille urs de différents secteurs se rencontrent pour déposer leurs impasses et échanger leurs ressources !« Pas tout seul face à mes impass es, ma pratique, mes questions professionnelles… » sont des ateliers d’échanges de pratiques ouverts à des travailleurs issus de différents secteurs. Ils sont menés conjointement par l’asbl Repères et le CBPS. Une deuxiè-me session se clôture, une troisiè me édition se profile en janvier 2015. Focus sur ces ateliers mixant questions, décryptages institutionnels, élaboration colle ctive de nouvelles pistes de travail.

Page 18: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

18 Bruxelles Santé 76

Débats

Le vieillissement à l’aune de la précarité : un défi pour Bruxelles

La situation socio-économique des Bruxel-lois est loin d’être reluisante puisque près de 30% d’entre eux vivent avec un revenu inférieur au seuil de risque de pauvreté et que plus d’un quart des enfants de moins de 18 ans grandissent dans ces conditions. Cette situation de précarité sociale a des conséquences inquiétantes. Je songe en-tre autres aux difficultés de se loger et aux inégalités d’accès aux soins de santé ainsi qu'au risque réel de déficit de prévention et de dépistage.

Le boom démographique engendre en outre des besoins nouveaux. A Bruxel-les, il faut tenir compte du vieillissement progressif de la population (avec de for-tes disparités entre communes) : sa part de population très âgée augmente et la population bruxelloise qui va entrer dans les tranches d’âge les plus âgées est diffé-rente de la précédente : moins aisée, plus multiculturelle mais également plus habi-tuée à faire largement appel aux soins de santé. Les défis vont donc être multiples.

Pour rencontrer ces défis, le Mouvement réformateur (MR) souhaite que les autori-tés publiques bruxelloises répondent à la demande d’institutions de soins à laquelle il faudra faire face à l’avenir. A cet égard, il est par exemple urgent de travailler au renforcement de l’offre des structures résidentielles pour personnes âgées sur le territoire bruxellois en remédiant à l’ab-sence de maisons de repos dans les quar-

tiers densément peuplés de personnes plus âgées et dans les zones plus défavori-sées. En outre, nous encourageons le dé-veloppement des formes alternatives de soins et de logements mais aussi l'émer-gence de l'intergénérationnel.

Les maisons de repos et de soins publi-ques, trop peu nombreuses, souffrent aussi de barèmes salariaux extrêmement bas entraînant déjà à l’heure actuelle des problèmes de terrain. Au MR, nous som-mes aussi très attentifs à cette question afin de garantir durablement la qualité des soins dispensés.

Gaëtan Van Goidsenhoven Député bruxellois MR

Chef de Groupe MR au Parlement francophone

eHealth, une avancée obligatoire dans le secteur de la santé

Aujourd’hui, « l’e-Santé » est indissocia-ble de l’évolution des technologies de l’information et de la communication. Il s’agit d’une avancée obligatoire dans le domaine de la santé et son usage se déve-loppe progressivement partout au sein de l’Union Européenne.

Ce concept d’eHealth renvoie à l’utilisa-tion d’outils et services en ligne et couvre notamment les interactions entre les pa-tients et les prestataires de services, ou encore les échanges entre les acteurs de

la santé eux-mêmes (hôpitaux, pharma-ciens, médecins…), comme par exemple la possibilité de consulter le dossier d’un patient en ligne ou encore d’envoyer des prescriptions médicales via le web.

Afin de stimuler son déploiement, la Commission Européenne a l’ambition de développer un ensemble d’indicateurs mesurant la valeur ajoutée des solutions eHealth. Aux yeux des FDF, les avantages de cet outil ne sont pourtant plus à dé-montrer, ils coulent de source.

D’ailleurs, il existe un ambitieux plan fé-déral visant à renforcer son utilisation, notamment dans des domaines tels que l’échange d’informations entre prestatai-res médicaux ou encore la concertation médico-pharmaceutique.

L’implémentation d’un tel outil conjugé à une collaboration optimale des différents réseaux du secteur permettra d’assurer une meilleure gestion des données, mais surtout, chose tant attendue par le sec-teur, une évidente et importante simplifi-cation des charges administratives.

Ces nombreux avantages motivent le FDF à avancer rapidement sur le plan eHealth, raison pour laquelle ils défendent dans la déclaration gouvernementale régionale leur volonté d’appliquer le plan fédéral eHealth dans les plus brefs délais.

Michel ColsonDéputé et Président de groupe à la Cocof

Page 19: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Bruxelles Santé 76 19

Réduction des risques : arrêtons de tergiverser !

Apparue il y a plus de vingt ans, la dé-marche de réduction des risques est aujourd'hui largement reconnue dans le secteur médico-social. En revanche, elle reste encore méconnue et mécomprise par nombre d'autorités publiques et par la population, alors que ses bénéfices pour la santé, tant du public visé que de l'ensemble des habitant-e-s, ne sont plus à démontrer.

C'est la raison pour laquelle, sous la pré-cédente législature, la commission Santé du Parlement francophone bruxellois a auditionné les acteurs de terrain, et pro-duit des recommandations visant « à la reconnaissance culturelle et structurelle de la réduction des risques ». De même, le Collège de la Cocof avait demandé à diffé-rents acteurs (FEDITO bruxelloise, Coordi-nation locale drogues Bruxelles, et Modus Vivendi) de rédiger un « Plan bruxellois de réduction des risques ».

Celui-ci a été finalisé au printemps dernier, mais il a fallu que j'interroge la ministre Jodogne en séance plénière du Parlement francophone bruxellois pour que le Col-lège s'intéresse à nouveau au dossier. Et la réponse fut pour le moins surprenante : non seulement madame Jodogne indique n'avoir jamais reçu le plan (visiblement, la passation entre l'ancienne et l'actuelle ministre a connu des ratés), mais en outre elle estime que les transferts liés à la 6e réforme de l'État vont l'amener à rééva-luer le plan avant de le mettre en œuvre. Il va pourtant de soi que ces enjeux étaient parfaitement connus des rédacteurs du plan, et que celui-ci a donc été élaboré en intégrant une vision transversale et inté-grée de la réduction des risques sur le ter-ritoire bruxellois.

Pour Ecolo, il n'y a pas à tergiverser : le plan bruxellois de réduction des risques doit être mis en œuvre au plus vite !

Zoé GenotDéputée bruxelloise

Sans-abrisme : le Housing First pour éviter la descente auxenfers en terme de santé ?

Une situation socio-économique plus fragile est statistiquement corrélée à un niveau de santé plus faible. C’est parti-culièrement frappant si l’on examine la situation des sans-abris.

Vivre « sans chez soi » s’accompagne d’une surmortalité effarante. Un taux de mortalité 3,5 fois plus élevé que la population générale a été mesuré dans une étude longitudinale de 10 ans à Rotterdam. Ceci correspond à une diminution de l’espérance de vie à 30 ans respectivement de 11 et 16 ans pour les hommes et femmes vivant dans la rue!

Les pathologies physiques s’enchaînent, mais c’est la pathologie mentale qui amè-ne plus de débats. Cause ou conséquence du sans-abrisme ? Ces constats connus en matière de santé étant posés, quoi de neuf dans le domaine aujourd’hui ? La stratégie du Housing First rencontre de plus en plus l’intérêt des politiques, met-tant la question du logement au centre de la sortie de rue. Il s’agit de reconnaître la nécessité d’un logement comme premiè-re étape de la sortie de rue, et ce dans une optique de réduction des risques, c’est-à-dire avec un bas seuil d’exigence, une orientation vers les publics les plus fragi-les, une grande liberté de choix au niveau du patient et avec un dispositif d’accom- pagnement très important. Un program-me national évalue actuellement l’effica-cité d’une telle stratégie dans le contex-te belge sous forme de projets pilotes. Bruxelles semble y rencontrer des diffi-cultés particulières, liées au cadre insti-tutionnel et à la crise du logement. Dans ce contexte, j’aurai le plaisir de participer en novembre à une mission associative à Montréal où le dispositif existe depuis 2008 avec succès. C’est incontestable-ment une thématique dont nous reparle-rons !

Catherine MoureauxDéputée bruxelloise et à la Communauté

Française PS - Cheffe de groupe au PFB

Les premiers pas vers un décloisonnement des politiques de santé

« Bougez-vous, cela fait un bien fou ! » Le slogan publicitaire n'est pas neuf mais il prend chaque jour davantage de consis-tance. Et c'est l'Institut Karolinska à Stoc-kholm en Suède qui détient la palme de la recherche ayant démontré les effets d'une activité physique intense sur la structure de l'ADN. Plus précisément en renforçant l'expression des gènes du métabolisme impliqués entre autre dans la régulation du glucose. Une bonne nouvelle pour les diabétiques et pour les personnes au sta-de du pré-diabète.

Les diabétologues n'ont pas attendu, il est vrai, les résultats de cette étude pour soutenir l'activité physique comme straté-gie majeure de prévention et de gestion du diabète. Et ils ont trouvé une oreille attentive en la personne du nouveau mi-nistre du sport, René Collin, qui, lors de la journée mondiale du diabète, s'est dé-claré particulièrement attentif à soutenir les stratégies rendant les infrastructu-res sportives plus accessibles à l'ensem-ble de la population dont, rappelons-le, 50 % est sédentaire et en surcharge pondérale, cumulant les risques de déve-lopper un diabète.

Je plaide, nous plaidons pour décloison-ner davantage les politiques afin de dé-velopper une véritable vision de la santé intégrée dans les multiples secteurs qui structurent le quotidien des Bruxellois. Et la recherche scientifique, tant dans le do-maine bio-médical que social, représente un point d'appui déterminant pour légiti-mer ce décloisonnement.

André du Bus, Député cdH

Page 20: Périodique trimestriel, parait en mars, juin, septembre ... · nement), chargé de se prononcer sur les dossiers de demandes de permis intro-duites par les opérateurs de téléphonie

Rédaction : Anoutcha Lualaba Lekede Marie-Hélène Salah Pascale Gruber

Conseil de rédaction : Dr Robert Bontemps Dr Murielle Deguerry Thierry Lahaye Dr Roger Lonfils Solveig Pahud Dr Patrick Trefois

Graphisme : Carine Simon

Avec le soutien de la Commission communautaire françaisede la Région de Bruxelles-Capitale.

Une réalisation de l’asbl Question SantéTél.: 02/512 41 74 Fax: 02/512 54 36E-Mail : [email protected]://www.questionsante.org

Editeur responsable : Dr. P. Trefois, 72 rue du Viaduc - 1050 Bruxelles

Les articles non signés sont de la rédaction.Les articles signés n’engagent que leur auteur

La prévention SIDA peine à toucher les personnes sourdes

Beaucoup de personnes sourdes ont aujourd’hui encore une connaissance très vague – voire inexistante – des modes de transmission du SIDA. Si une personne sourde ne peut en parler dans sa langue signée avec ses proches, elle ne pourra pas compter, comme tout entendant, sur les campagnes de prévention car la barriè-re de la langue orale et écrite reste réelle pour une très grosse majorité des sourds. Les personnes sourdes sont souvent mal informées. Par exemple lors du dépistage, la communication entre patient sourd et médecin se fait généralement par écrit. Mais bien souvent la personne sourde ne comprend pas les termes utilisés ni ce qu’ils impliquent. Certaines croient même que « séropositivité » signifie ne pas avoir le virus du SIDA puisqu’il est écrit « posi-tif » dans le mot, dans le sens que tout va bien.

Il était urgent de remettre à neuf la pré-vention SIDA pour les personnes sourdes. La Fédération Francophone des Sourds de Belgique et la Plateforme Prévention Sida ont réalisé une nouvelle brochure dont les dessins ont été réalisés par le Centre Francophone de la Langue des Signes, destinée aux personnes sourdes (et ma-lentendantes). La brochure est disponible gratuitement auprès de la Plateforme Prévention SIDA et sur le site Internet de la Fédération Francophone des Sourds de Belgique www.ffsb.be. La réalisation d’une ver-sion en langue des signes est prévue. En complément à cette brochure d’informa-tion, il existe un lexique de vocabulaire en LSFB sur les termes employés dans le cadre de la prévention SIDA. Celui-ci est disponible sur commande auprès du Cen-tre Francophone de la Langue des Signes : www.cfls.be