processus sedimentaire

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Universit de Lige Facult des Sciences Dpartement de Gologie

Une introduction aux processus sdimentaires

Tout au long des ternels estrans miroitants, infinis marins peupls d'tranges merveilles, se tracent des mondes phmres et mouvants de rides abstraites que la mare rveille.Rides de courant dans un chenal de mare, Trgastel, Bretagne, FB (huile sur bois).

Prof. F. Boulvain, 2011

Table des matires

I. Introductiono o 1. SEDIMENTOLOGIE ET PETROLOGIE SEDIMENTAIRE 2. LES PROCESSUS SEDIMENTAIRES DANS LE CYCLE GEOLOGIQUE 1. L'ALTERATION PHYSIQUE 2. L'ALTERATION BIOLOGIQUE 3. L'ALTERATION CHIMIQUE 3.1. Principales ractions chimiques impliques dans l'altration 3.2. Les paramtres qui contrlent l'altration chimique 3.3. Exemple: l'altration des roches magmatiques 1. EROSION EOLIENNE 1.1. Dflation olienne 1.2. Corrasion 2. RUISSELLEMENT ET EROSION FLUVIALE 2.1. Cuestas 2.2. Torrents 2.3. Rivires et fleuves 2.3.1. Erosion verticale 2.3.2. Erosion latrale 3. EROSION KARSTIQUE 4. EROSION GLACIAIRE 5. EROSION MARINE 5.1. Les mcanismes de l'rosion marine 5.2. Formes d'rosion et d'accumulation littorales 1. GLISSEMENTS EN MASSE EN L'ABSENCE DE FLUIDES 2. ECOULEMENTS GRAVITAIRES 2.1. Grain flows 2.2. Fluidised sediment flows 2.3. Debris flows et mudflows 2.4. Courants de turbidit 3. ECOULEMENTS DE FLUIDES 3.1. Ecoulement laminaire-coulement turbulent 3.2. Mise en mouvement des sdiments 3.3. Transport des sdiments 3.4. Dpt des sdiments 1. LES MORAINES 2. LA GRANULOMETRIE DES SEDIMENTS 2.1. Introduction 2.2. Analyses granulomtriques 2.3. Le granoclassement 3. LES STRUCTURES SEDIMENTAIRES 3.1. Introduction 3.2. Description et gense de quelques figures sdimentaires 3.2.1. Figures formes par rosion la base des bancs 3.2.2. Empreintes d'objets 3.2.3. Autres empreintes de surface au sommet des bancs 3.2.4. Rides, mgarides et dunes

II. L'altrationo o o

III. L'rosiono o

o o o

IV. Le transporto o

o

V. Le dpto o

o

o

3.2.5. Structures internes: litage et lamination 3.2.6. Litage et lamination horizontale dans les sables et les grs 3.2.7. Les rythmites 3.2.8. Les stratifications obliques et entrecroises 3.2.9. Les structures de dformation du sdiment 3.2.10. Les tmoins de l'activit organique

VI. L'volution post-dpt1. PEDOGENESE 1.1. Gnralits 1.2. Critres de pdogense en environnement carbonat 1.2.1. Structures macroscopiques 1.2.2. Structures microscopiques 2. LA COMPACTION 2.1. Evaluation du taux de compaction par mesure directe 3. LA FOSSILISATION 4. LA DIAGENESE 4.1. Evolution de la matire organique 4.2. Cimentation-dissolution-remplacement-recristallisation 4.3. Diagense carbonate 4.4. Compaction et diagense d'une boue argileuse 4.5. Diagense d'un sable 1. L'OCEAN 1.1. Physiographie 1.2. Les mouvements dans l'ocan 2. LES CLIMATS: UNE BREVE INTRODUCTION 3. ZONES GLACIAIRES ET PERI-GLACIAIRES 3.1. Glaciers 3.2. Paysages glaciaires 3.3. Paysages peri-glaciaires 4. ZONES TEMPEREES 5. ZONES ARIDES ET SEMI-ARIDES 5.1. Paysages semi-arides 5.2. Paysages arides 6. ZONES TROPICALES ET EQUATORIALES

o o o

VII. Environnements et processus sdimentaireso o o

o o o

I. Introduction1. SEDIMENTOLOGIE & PETROLOGIE SEDIMENTAIRE La sdimentologie est une discipline jeune parmi les sciences de la Terre. Elle est en effet lie l'essor des tudes du milieu actuel au cours des dernires dcennies. Si le terme "sdimentologie" est relativement neuf et drive de l'anglais "sedimentology" (terme utilis depuis 1932), on peut nanmoins reconnatre en Charles Lyell, le pre du principe de l'actualisme ou mieux, de l'uniformitarisme, un des fondateurs de la sdimentologie. En schmatisant, on peut dire que la sdimentologie au sens strict a pour but l'tude des sdiments. La ptrologie sdimentaire s'attache quant elle l'tude et la reconstitution des environnements de dpt anciens, aprs que les sdiments ont t transforms en roches. Ceci comprend l'identification des processus sdimentaires, des milieux de dpt, l'tude de leur volution au cours du temps, la reconstitution de l'architecture des diffrents environnements au sein d'un bassin de sdimentation et aussi, il ne faut pas l'oublier, l'tude de l'volution des

sdiments au cours du temps (par compaction, diagense,...). Cette distinction un peu floue entre sdiments et roches sdimentaires (des sdiments meubles ou consolids, que le cycle gologique amne hors de leur contexte de dpt original...) n'a pas une importance primordiale et il est courant d'entendre parler de sdimentologie pour les deux objets d'tude. Dans cette optique, la sdimentologie peut s'appuyer sur plusieurs autres disciplines: la ptrographie, la stratigraphie (biostratigraphie, lithostratigraphie, stratigraphie squentielle,...), la cartographie gologique, la gochimie et la gochimie isotopique, la gographie, la biologie, etc. L'importance de la sdimentologie est considrable: prs de 90% de la surface terrestre est couverte de sdiments ou est constitue de roches sdimentaires, avec les proportions suivantes: argilites/siltites: 63%; grs: 22%; calcaires: 15% (chiffres bass sur des mesures directes, pondres par des mthodes gochimiques). Malgr leur grande tendue, les roches sdimentaires ne reprsentent cependant que le 1/20e en volume de la crote superficielle (16 km d'paisseur). Leur tude est nanmoins capitale pour les raisons suivantes:

elles contiennent le ptrole, le gaz naturel, le charbon et les fertilisants; elles reprsentent un des principaux aquifres; elles contiennent les fossiles, sur lesquels reposent notre connaissance de l'volution de la vie sur Terre; elles sont en relation avec l'atmosphre et l'hydrosphre (cycle du C, etc.); elles permettent de reconstituer l'volution de notre plante par les tudes palogographiques, paloclimatiques, depuis l'chelle locale jusqu' celle des bassins. L'enregistrement sdimentaire tant continu, cette reconstitution est elle aussi continue, au contraire des informations apportes par le magmatisme et le mtamorphisme.

2. LES PROCESSUS SEDIMENTAIRES DANS LE CYCLE GEOLOGIQUE Rappelons d'abord ce qu'est le "cycle gologique". Les roches peuvent tre classes en trois grands groupes qui sont les roches ignes ou magmatiques, les roches sdimentaires et les roches mtamorphiques. Les roches ignes rsultent du refroidissement et de la cristallisation de magmas, issus soit du manteau, soit de la fusion de roches mtamorphiques. Les roches mtamorphiques rsultent de la modification, par l'action de la chaleur et de la pression, de roches ignes ou sdimentaires, lesquelles proviennent de la lithification par diagense de sdiments. Comme ces sdiments proviennent de la dsagrgation de roches sdimentaires, mtamorphiques ou magmatiques, l'ensemble de ces phnomnes forme un cycle appel "cycle gologique" (Fig. I.I). Dans le cours qui va suivre, on tudiera les tapes de ce cycle gologique impliquant les processus sdimentaires.

Figure I.I: le cycle gologique. Au sein du cycle gologique, les processus sdimentaires comprennent l'altration, l'rosion, le transport, le dpt et la diagense. Les sdiments dtritiques, forms de grains issus de la dgradation de roches prexistentes, transports et dposs dans un bassin de sdimentation, constituent l'illustration la plus vidente de cette partie du cycle gologique. Dans le cas des sdiments biognes et chimiques, rsultats de la prcipitation organique et/ou chimique, les constituants sont amens au bassin sdimentaire sous la forme d'ions solubles. Une exception notable est cependant fournie par les sdiments d'origine volcanique, o les particules sont injectes directement dans le milieu de dpt. Plus spcifiquement, l'altration est la destruction de roches ignes, mtamorphiques ou sdimentaires par dsagrgation mcanique et dcomposition chimique, voire biologique (glifraction, insolation, dcompression, action des racines, de l'eau, du vent, etc.). L'altration donne naissance une grande varit de produits: sols, dbris rocheux, ions en solution dans les eaux superficielles. L'rosion correspond l'enlvement de ces produits d'altration des zones d'altration active et le transport est leur mouvement vers les zones de dpt. La lithification est le rsultat de processus comme la compaction, la recristallisation, la cimentation Les diffrents processus sdimentaires font donc l'objet de ce premier cours introductif. Ils seront d'abord traits sparment dans l'ordre de leur intervention dans le cycle gologique, ensuite, dans le dernier chapitre "transversal", ces processus seront mis en scne dans les principaux environnements marins et terrestres. Dans la suite de l'enseignement, ce sont les "produits", sdiments et roches sdimentaires, qui feront l'objet de notre attention (ptrologie sdimentaire).Pour en savoir plus:

Quelques ouvrages gnraux de sdimentologie: F. Boulvain, 2010. Ptrologie sdimentaire: des roches aux processus. Technosup, 259 pp. H. Chamley, 1990. Sedimentology. Springer-Verlag, 285 pp. Un bon ouvrage, clair et prcis, centr plus sur les sdiments dtritiques que sur les carbonates. Pas de photographies, mais de bons schmas. I. Cojan & M. Renard, 2006. Sdimentologie (2e dition). Dunod, 444 pp. Un bon ouvrage rcent (en franais) de sdimentologie intgrant les derniers dveloppements (analyse squentielle, diagense, etc.). Pas beaucoup de photographies, mais de bons schmas. D. Prothero & F. Schwab, 1998. Sedimentary geology (an introduction to sedimentary rocks and stratigraphy). Freeman & Co, 422 pp. Trs bel ouvrage, rcent, bien illustr de schmas et photographies. H.G. Reading, 1996. Sedimentary environments: processes, facies and stratigraphy. Blackwell, 688 pp. Bon ouvrage, trs complet. M. Tucker, 2001. Sedimentary petrology (3rd edition). Blackwell, 262 pp. Une trs bonne introduction la ptrologie sdimentaire, bien illustre.

Dans une optique plus spcialise: H-E. Reineck & I.B. Singh, 1980. Depositional sedimentary environments. Springer, 549 pp. Un classique, dj ancien, mais toujours excellent, centr sur les environnements de dpt des sdiments siliciclastiques. Trs belles photographies de figures sdimentaires.

II. L'altrationSi l'on examine un sable fluviatile dans la partie amont du bassin versant d'une zone o affleurent des granites (30 50% plagioclases, 5 35% FK, 5 10% quartz), on constatera paradoxalement que le quartz en est un minral essentiel. Dans la partie aval du systme fluviatile, il peut mme tre pratiquement seul. C'est l'altration qui est responsable de l'augmentation de la proportion de quartz (minral rsistant) dans les sdiments. En effet, les silicates de haute temprature (pridots, pyroxnes, plagioclases calciques...) sont vulnrables l'altration car l'arrangement des ttradres de silice est peu organis (nso- , soroinosilicates).. Les minraux de moyenne et basse temprature (inosilicates deux chanes, phyllo- et tectosilicates) sont plus rsistants. Les verres, amorphes car figs trs haute temprature, sont les plus vulnrables. Donc, la vulnrabilit l'altration des minraux issus de la cristallisation d'un magma dcrot proportionnellement l'ordre de cristallisation prcis, entre autres, dans les sries ractionnelles de Bowen (autre manire d'exprimer les choses...). Dans le cas du quartz, il faut ajouter le fait que ce minral possde aussi une bonne rsistance aux chocs car il ne se clive pas. L'altration a pour effet de dcomposer une roche en (1) des ions solubles et des grains qui vont tre mobiliss par l'rosion d'une part et (2) un dpt rsiduel d'autre part, demeurant sur place. Les mcanismes responsables de l'altration, phnomne prenant place aux tempratures et pressions "faibles" rgnant la surface de la terre, sont l'altration physique, l'altration organique et l'altration chimique. 1. L'ALTERATION PHYSIQUE

Les processus mis en oeuvre dans l'altration physique sont les suivants: - les alternances de gel-dgel, en climat suffisamment humide, fragmentent les roches (cryoclastie). L'eau en gelant augmente son volume de 9-10% et agit comme un coin, largissant progressivement les fractures; - les variations rptes de temprature (40-50C d'amplitude journalire dans le Sahara) ont peu prs le mme effet que le gel: les diffrences de dilatation thermique entre les minraux d'une roche provoquent l'apparition de fractures; - la dcompression survient lorsque des roches ayant subit un enfouissement sont libres de la pression lithostatique par rosion des formations surincombantes. Des joints de dcompression, pratiquement parallles la surface du sol se dveloppent progressivement. - l'usure mcanique par des grains dtritiques emports par le vent, l'eau, la glace.

Altration physique. A: cryoclastie d'un basalte (roche macroglive), Islande; B: cryoclastie d'un schiste (roche microglive), Belgique; C: joints de dcompression dans un massif granitique, Ploumanach; D: glace charge de sable et de graviers, Pyrnes. 2. L'ALTERATION BIOLOGIQUE

On distingue l'altration provoque par l'action chimique de composs produits par des organismes (plantes, microbes,...) de l'action purement mcanique de plantes ou d'animaux (par exemple: dilatation progressive des racines jouant le rle de coin dans des fractures de roches). L'ingestion de matriaux par des animaux vivant dans les sols est un processus faisant intervenir en mme temps les deux types de mcanismes cits. Un premier processus important est l'oxydation de la matire organique (par la fermentation ou la respiration), produisant de l'eau et du CO2, lui-mme impliqu dans des ractions de mise en solution: C6H12O6+ 6 O2 6 CO2+ 6 H2O La combinaison du CO2 et de l'eau donne naissance l'acide carbonique (H2CO3), un acide faible qui peut nanmoins solubiliser la calcite (ou un autre carbonate): H2CO3+ CaCO3 Ca++ + 2 HCO3On a en effet observ que pour une concentration de CO2 quivalente la concentration atmosphrique (~3.10-4 atm), la concentration de Ca++ et HCO3- tait de respectivement de 20 mg/l et 60 mg/l. Dans un sol o la concentration de CO2 peut atteindre 3.10-2 atm, les concentrations respectives de Ca++ et HCO3- peuvent augmenter jusqu' 90 mg/l et 260 mg/l. L'action des microorganismes est importante et ne se limite pas la production de CO2. Ds leur arrive en subsurface, les minraux des roches sont soumis leur mtabolisme. Des colonies microbiennes croissent leur surface, s'infiltrent dans les fractures la recherche d'lments essentiels la vie. L'altration microbienne se manifeste surtout sous la forme d'une dissolution par des acides organiques dont le plus frquent est l'acide oxalique. L'attaque des minraux par ces acides libre des cations mtalliques qui, combins aux anions organiques donneront naissance des complexes organo-mtalliques (dans le cas des oxalates, combins au calcium issu de la dissolution des carbonates, cela donnera naissance CaC2O4, frquent dans les sols). Beaucoup de microbes possdent la facult de produire des molcules spcifiques en fonction du type de minral dgrader. L'exemple de la Fig. II.1 montre la mise en solution du fer partir de hornblende par des bactries. Outre l'action des acides organiques, la formation de biofilms d'EPS ("exopolymeric substances" ou polymres extracellulaires) maintient une hydratation constante autour des minraux qui favorise les ractions de mise en solution. Ces processus d'altration microbienne par dissolution de minraux primaires et prcipitation de nouveaux minraux d'origine biognique (comme l'oxalate de calcium) modifient l'aspect de la roche et mritent le nom de "diagense microbienne". Cette diagense particulire se marque souvent par la prcipitation de microcristaux en remplacement de cristaux plus grands. C'est le processus de "micritisation" dans le cas des carbonates, frquent en particulier dans les sols.

Figure II.1: mise en solution du fer partir de hornblende, avec ou sans l'intervention de la bactrie du sol Streptomyces. D'aprs Konhauser (2007), simplifi. 3. L'ALTERATION CHIMIQUE L'altration chimique agit de deux faons: certains minraux (halite, calcite) sont dissous totalement et leurs ions sont vacus en solution. D'autres minraux, comme les micas ou les feldspaths sont transforms en d'autres espces minrales (surtout en argiles), souvent de granulomtrie plus fine et plus facilement mobilisables par l'rosion. La plupart des ractions impliques dans l'altration ncessitent la prsence d'eau et d'air. Passons en revue les ractions les plus significatives. 3.1. Principales ractions chimiques impliques dans l'altration - mise en solution: c'est la raction la plus simple, faisant intervenir de l'eau, ou un acide. Envisageons quelques cas concrets:

la solubilit du quartz est trs faible (6 ppm dans les eaux de surface); la raction de mise en solution est la suivante: SiO2 + 2 H2O H4SiO4 la calcite, par contre est beaucoup plus soluble, parce que que l'eau de pluie se charge en CO2 et agit comme un acide faible lors de sa mise en contact avec la calcite (environ 2000 ppm). La raction est la suivante: CaCO3 + H2O + CO2 Ca+++ 2 HCO3- (bicarbonate en solution). la halite et les autres halognures sont trs solubles (solubilits de l'ordre du millier de ppm).

- hydratation et dshydratation, ou de manire plus concrte: minral+eau=nouveau minral hydrat; la dshydratation tant le processus inverse. Les ractions les plus importantes sont:

la dshydratation du gypse pour produire de l'anhydrite: CaSO4.2H2O CaSO4+ 2 H2O; l'hydratation de l'hmatite pour produire de la limonite: Fe2O3+ 3 H2O 2 Fe(OH)3; l'hydratation de la kaolinite pour produire de la gibbsite.

- hydrolyse. Cette raction est le processus par lequel un cation d'un minral est remplac par le H+ d'une solution acide. Cette raction a pour consquence de dtruire le minral (mise en solution complte) ou de le convertir en une nouvelle espce. A titre d'exemple, l'olivine et le pyroxne se dissolvent compltement, alors que les feldspaths se dissolvent partiellement, produisant de la silice en solution et des minraux argileux. Comme les eaux mtoriques contiennent du CO2 dissout, les ractions se prsentent comme suit:

Mg2SiO4 (forstrite) + 4 H2 CO3 2 Mg++ + 4 HCO3- + H4SiO4 4 NaAlSi3O8 (albite) + 4 H2 CO3 + 18 H2O 4 Na+ + 8 H4SiO4 + Al4Si4O10(OH)8 (kaolinite) + 4 HCO3-

(Remarque: ces ractions d'altration des minraux silicats sont donc des "pompes" CO2 atmosphrique!) - oxydation-rduction. Le processus d'oxydation le plus connu est la transformation de Fe2+ en Fe3+; le Mn se comporte de la mme manire que le fer, avec la pyrolusite (MnO2) et la manganite (Mn2O3.H2O) comme principaux produits d'oxydation.

(Fe2+)2SiO4+ 1/2 O2+ 5 H2O 2 Fe3+(OH)3 + H4SiO4 4 FeS2+ 15 O2 + 8 H2O 2 Fe2O3+ 8 H2SO4 constituants solubles minraux rsiduels minraux noforms Na+, Ca2+, K+, Mg2+, H4SiO4, HCO3-, SO42-, Clquartz, zircon, magntite, ilmnite, rutile, grenat, sphne, tourmaline, monazite kaolinite, montmorillonite, illite, chlorite, hmatite, goethite, gibbsite, boehmite, diaspore, silice amorphe, pyrolusite

constituants acides organiques, acides humiques, krogne organiques Tableau II.1: produits les plus courants de l'altration chimique. 3.2. Les paramtres qui contrlent l'altration chimique Le climat est probablement le facteur le plus important dans le contrle de l'altration chimique. Si l'on considre en effet l'aspect cintique des ractions chimiques, il est clair qu'une temprature leve va les favoriser. L'humidit est galement importante, puisque beaucoup de ractions se passent en milieu aqueux. L'altration chimique est donc prminente en climat chaud et humide. En climat froid, mme si les prcipitations sont abondantes, l'eau est l'tat de neige ou de glace, favorisant plutt l'altration physique

(Fig. II.2). D'autres facteurs occupent galement une place importante, quoique plus indirecte: c'est par exemple le cas du drainage. Si les ions mis en solution ne sont pas vacus, un quilibre chimique sera atteint et les ractions d'altration vont s'arrter. Le relief, galement, contrle la pente des rseaux fluviatiles et la rapidit des courants, donc l'intensit de l'vacuation des ions: on a pu montrer par exemple que pour des circulations faibles, l'albite est transforme en kaolinite, alors qu'avec une circulation plus rapide, elle est transforme en gibbsite (car l'acide silicique est vacu).

Figure II.2: influence du climat sur le profil d'altration. En climat tempr, l'altration est surtout mcanique. L'altration chimique est faible et consiste surtout dans le dpart de cations trs solubles comme Na+ et Ca++ des minraux les moins stables; une arne est cre. En climat tropical, l'altration est surtout chimique. L'eau abondante et chaude provoque une mise en solution de la plupart des minraux, avec reprcipitation des ions Fe, Al, Si sur place (cuirasse). L'horizon riche en argile rsulte de processus de noformation partir des minraux de la roche mre et partir des ions venant des horizons suprieurs. Enfin, la base du profil, on retrouve la roche-mre avec une zone d'arnitisation trs peu dveloppe. L'acidit-alcalinit et le degr d'oxydo-rduction des eaux sont galement des paramtres importants contrlant l'altration chimique. Si l'on porte en graphique l'Eh en fonction du pH pour des environnements naturels varis (Fig. II.3), on constate que l'eau pluviale est lgrement acide, tout comme les sols. Ce sont donc deux environnements o dissolution et hydrolyse vont jouer un rle dominant. Par contre, le pH de l'eau de mer est de l'ordre de 8: peu de ractions d'hydrolyse ont donc lieu en milieu sous-marin. On observe aussi que la plupart des environnements en contact avec l'atmosphre sont oxydants. Des conditions rductrices ne sont observes que dans des milieux isols de l'atmosphre (bassins stratifis, nappes profondes,...) ou des milieux dont tout l'oxygne est consomm (par exemple suite l'oxydation de la matire organique).

Figure II.3: graphique des proprits Eh/pH des principaux environnements naturels. 3.3. Exemple: l'altration des roches magmatiques Ces roches sont en dsquilibre thermodynamique lors de leur arrive l'affleurement. Il s'agit gnralement de roches polyminrales et leur sensibilit l'altration est fonction la fois de l'altrabilit des diffrents minraux et de la structure de la roche. A sensibilit gale des minraux, les roches gros grains (pegmatites) sont plus vulnrables que les roches grains fins (aplites). L'altrabilit des minraux constituants des roches magmatiques est en fonction inverse de leur ordre de cristallisation dans les magmas. Cette relation est galement prsente dans le groupe des feldspaths, o l'orthose est peu altrable, alors que les plagioclases le sont plus. Au sein des plagioclases, la sensibilit l'altration augmente de l'albite l'anorthite. Prenons l'exemple des ractions mises en jeu lors de l'altration de l'orthose:

les premiers stades de l'altration de l'orthose aboutissent la formation de minraux argileux, l'illite, ou si le drainage est mauvais, les smectites: orthose + eau illite + silice + potassium (entran en solution) Ce processus est appel bisiallitisation car le rapport Si/Al (gal 3 dans l'orthose) est de 2 dans l'illite; en cas de lessivage plus important de la silice (altration plus pousse), on obtient de la kaolinite ou le rapport Si/Al est de 1. Il s'agit du processus de monosiallitisation; enfin, dans le stade ultime (climat tropical humide), toute la silice est lessive et il ne subsiste qu'un hydroxyde d'aluminium, la gibbsite, dans laquelle le rapport Si/Al est gal zro. Ce processus est appel allitisation et aboutit la formation de bauxites mais, comme le plus souvent le produit d'altration contient du fer, on parle de ferrallitisation ou de latrisation.

Profils d'altration. A: en climat tempr, Habay, Belgique. Un sol trs peu pais surmonte des sables et argiles triassiques. B: en climat tropical, Broome, Australie. La coloration rouge du sol est due l'accumulation des oxydes-hydroxydes de fer; rm: roche-mre ; s: profil d'altration.

III. L'rosionL'rosion correspond la mobilisation des produits de l'altration. Une fois librs, ces produits sont transports par l'air, l'eau, la glace (...), laissant certaines "formes d'rosion" caractristiques sur le massif rocheux soumis l'altration. Nous envisagerons ci-dessous les plus courantes. 1. EROSION EOLIENNE 1.1. Dflation olienne Le vent soufflant sur une surface dsertique balaie les particules les plus fines et peut faire apparatre la surface rocheuse (hamadas sahariennes). Lorsque le sol comporte des matriaux

de taille varie (sols alluviaux, par exemple), la dflation limine la fraction la plus fine, laissant sur place un dsert pav de cailloux (reg). Lorsque le sol est argileux, on observe la formation de longues rigoles mtriques (yardangs). La dflation est responsable de la formation de grandes dpressions dsertiques comme les chotts du Sahara ou les playas des dserts amricains. La dflation s'exerce jusqu' ce que le niveau hydrostatique soit atteint. A ce moment, elle s'arrte et il s'ensuit des surfaces planes s'talant sur des centaines de kilomtres, souvent indures par une crote de sel.

A: surface dsertique ayant subi la dflation olienne, responsable de la concentration des lments les plus grossiers (reg); B: dtail montrant la coloration noirtre et l'aspect brillant des cailloux: cette patine est le "vernis du dsert". Hmar Laghdad, Anti-Atlas, Maroc. 1.2. Corrasion

Les grains de quartz transports par le vent polissent les cailloux rsiduels en faonnant des dreikanters ou des cailloux ttradriques (suivant le nombre de faces), caractriss par des facettes planes runies par des angles mousss. Les grains transports eux-mmes sont piquets et mats, subsphriques. Ils sont appels "ronds-mats" en morphoscopie et prsentent des croissants et des figures en V, ds aux chocs. La concentration plus grande des grains de sable proximit du sol provoque une rosion diffrentielle avec la formation de rochers en champignons. Lorsqu'elle s'exerce sur des roches o alternent lits, lamines,... durs et plus tendres, la corrasion provoque une rosion diffrentielle qui met en vidence le contraste de duret. 2. RUISSELLEMENT ET EROSION FLUVIALE En terrain argileux ou schisteux, aprs une forte pluie, les eaux empruntent les fissures du sol, les largissent progressivement en chenaux parallles qui fusionnent par croulement des crtes qui les sparent. En mme temps, les ttes des chenaux reculent vers l'amont (rosion rgressive). Ce processus est responsable de la formation des "bad lands".

Formation de "bad lands" par rosion rgressive dans un versant; Piau Engaly, Pyrnes, France. En terrain calcaire, l'usure et la dissolution par les eaux de ruissellement forment les lapiez, structures verticales suivant les lignes de plus grande pente. Les eaux courantes peuvent former des cupules de dissolution.

Formes de dissolution par les eaux courantes et de ruissellement. A: vue gnrale de la paroi calcaire surplombant la rivire Fitzroy (Australie); la partie infrieure (blanche) est rgulirement inonde par les crues de la rivire, alors que la partie suprieure est toujours exonde. Des formes de dissolution diffrentes en rsultent: lapiez (B) verticaux dans la partie suprieure de la paroi et cupules (C) dans la partie infrieure. Dans des dpts trs htrognes (moraines), la prsence de blocs trs lourds rend l'argile sur laquelle ils reposent plus compacte et la protge du ruissellement: c'est de cette faon que naissent les chemines de fes ou demoiselles coiffes. Les chaos granitiques sont dus la mobilisation de l'arne (sable issu de la dsagrgation du granite), ce qui dgage les boules de granite non altr, empiles en dsordre (Ploumanach). Les paysages ruiniformes se dveloppent dans des formations htrognes qui prsentent des diffrences de solubilit (dolomie-calcaire) ou de duret (sable-grs).

Demoiselles coiffes dans une moraine Thus, prs de Gap (France).

A: formation d'un chaos granitique par desquamation des granites le long des joints; Ile Grande, Bretagne; B: vacuation de l'arne et basculement des blocs ainsi dgags, avec formation d'un chaos; Trgastel, Bretagne.

Exemple d'un paysage ruiniforme: le cirque dolomitique de Mourze (Jurassique), Larzac, France.

Un autre exemple clbre de paysage ruiniforme: Bryce Canyon, Utah, USA. Il s'agit de grs et d'argiles tertiaires. 2.1.Cuestas Des successions sdimentaires faiblement inclines, formes d'alternances de couches tendres et de couches rsistantes l'rosion peuvent donner naissance un relief en cuestas (Fig. III.1). La cuesta comprend un front, plus ou moins abrupt, d l'interruption de la couche rsistante, une dpression longeant le pied de l'abrupt et creuse dans les couches tendres et un revers qui correspond peu prs au dos de la couche rsistante incline. En avant du front, il arrive que des reliefs isols tmoignent de l'ancienne extension de la formation rsistante: ce sont des buttes-tmoins. Divers facteurs modlent la morphologie de la cuesta: citons essentiellement la diffrence de rsistance l'rosion des deux formations qui conditionne le caractre plus ou moins abrupt du front; le pendage et l'paisseur relative de la formation rsistante qui tous deux contrlent l'aspect plus ou moins rectiligne du front: une

formation rsistante mince ou de faible pendage donnera naissance un front trs dissqu par l'rosion et donc trs sinueux au contraire d'une formation rsistante paisse ou de pendage lev.

Figure III.1: schma montrant la disposition thorique des cuestas et de leur rseau hydrographique. En ce qui concerne le rseau fluviatile, il est soit consquent (et il suit le pendage gnral des formations en entaillant la cuesta, sans que la duret relative des roches intervienne), soit subsquent et longe le front de la cuesta en respectant les couches les plus rsistantes. La Lorraine belge offre un bel exemple de relief en cuestas, avec des formations rsistantes (grs, calcaire), alternant avec des formations plus tendres (argile, marne), affectes d'un trs faible pendage vers le sud.

Cuesta forme par les grs de la Formation de Wingate (Jurassique) reposant sur les argilites et siltites rouges plus tendres de la Formation de Chinle (Trias). Bitter Springs, Arizona, USA.

Une cuesta vue d'avion (Utah, USA). Remarquer le rseau consquent qui entaille profondment le front de la cuesta. 2.2. Torrents Les torrents forment la partie amont des systmes fluviatiles, localiss dans des rgions fortement dclives. Un torrent comprend trois parties: le bassin de rception, sorte de cirque o se rassemblent les eaux de ruissellement et o dominent les processus d'rosion; le chenal d'coulement, souvent troit et pente forte; le cne de djection o sont dposs les matriaux mobiliss (Fig. III.2).

Fig. III.2: les diffrentes composantes d'un torrent.

Les composantes de la partie amont d'un systme fluviatile (Vignemalle); A: bassin de rception=glacier; B: torrent glaciaire; C: plaine d'pandage avec chenaux en tresses. 2.3. Rivires et fleuves 2.3.1. Erosion verticale Le rseau fluviatile peut tre consquent (il suit la ligne de plus grande pente du terrain et est perpendiculaire au rivage) ou subsquent (il s'coule dans les substrats tendres en contournant les terrains les plus rsistants). Un rseau fluviatile consquent a en gnral un aspect

dendritique, hirarchis, tandis qu'un rseau subsquent a un aspect en treillis orient en fonction des directions des couches gologiques (exemple: ruisseaux et rivires du Condroz). Par ailleurs, lorsque les cours d'eau s'enfoncent dans leur substrat, deux mcanismes sont possibles: la surimposition correspond au dblaiement progressif d'une couverture meuble par rosion alors que l'antcdence est le rsultat de l'encaissement d'un rseau dj form par remonte progressive du substrat. Ces phnomnes donnent naissance des rseaux fluviatiles peu adapts la gologie et au relief prexistants. A un moment dtermin et en un point dtermin de son cours, tout coulement d'eau possde une certaine nergie. Cette nergie dpend du dbit et de la vitesse. La vitesse est elle-mme fonction de la pente longitudinale du lit. Une partie de l'nergie du cours d'eau est utilise par le transport de la charge (sable, galets,...); une autre partie est consomme par les frottements internes entre les filets d'eau, surtout si le rgime est turbulent. Le surplus est disponible pour roder. On parlera d'nergie brute pour l'nergie totale du cours d'eau et d'nergie nette pour celle qui est utilise roder (=nergie brute - transport de la charge - frottements). On comprend donc par exemple que si l'nergie brute n'est pas suffisante pour le transport et les frottements, le cours d'eau non seulement ne peut roder, mais dpose une partie de sa charge. En s'enfonant par rosion, les cours d'eau creusent des valles qui possdent un profil caractristique en "V". En terrain massif et dur (granite), la tendance est l'enfoncement vertical (gorges). En climat priglaciaire, le profil transversal des valles devient dissymtrique, phnomne d l'action de l'insolation sur un des versants. Le profil longitudinal des systmes fluviatiles matures est galement caractristique et rsulte d'un quilibre long terme entre la charge transporte et la pente (la pente d'quilibre n'est pas celle qui permet juste au cours d'eau de couler, mais bien celle qui lui permet de couler et de transporter). On y relve les caractres suivants:

le creusement se fait en remontant partir du niveau de base (rosion rgressive); Le niveau de base correspond au niveau de la mer dans le cas des fleuves. Dans le cas des rivires, il correspond la confluence avec une rivire plus grande; l'quilibre vers lequel tend le profil longitudinal du cours d'eau se fait par creusement des sections pente trop prononce et remblaiement des sections pente trop faible (Fig. III.3A); le profil d'quilibre est concave, tangent vers le bas au niveau de base (Fig. III.3A). Lorsque cette situation est atteinte, l'rosion s'arrte; une chute du niveau de base amne une reprise d'rosion; une remonte du niveau de base provoque un alluvionnement (dpt de sdiments) (Fig. III.3B).

La dcroissance gnrale de la pente du profil s'explique par le fait que le dbit augmente vers l'aval et que la granulomtrie des sdiments transports diminue. Il ne faut cependant pas croire que le profil d'quilibre des fleuves tend s'annuler compltement au voisinage de la mer, puisqu'ils ont encore une charge transporter (notons que la transgression post-glaciaire est responsable de l'envahissement de la partie infrieure des valles fluviales et que certains fleuves n'ont peut-tre pas encore atteint leur nouveau profil d'quilibre).

Figure III.3: A: acquisition du profil d'quilibre par un cours d'eau. B: modification du profil d'quilibre lors d'une monte ou d'une baisse du niveau de base. C: profil longitudinal d'une valle glaciaire; aprs disparition du glacier, les parties de la valle situes en amont d'un verrou peuvent abriter un lac. Dans la plupart des cas, le lit des cours d'eau est dlimit par des berges, dfinissant le lit mineur. Au-del des berges se situe la plaine d'inondation ou lit majeur. Dans certains cas, un chenal d'tiage apparat dans le lit mineur.

Lit majeur et lit mineur rvls suite une inondation. Le lit mineur est encore visible par les arbres qui le bordent. Vue d'avion, USA. Une terrasse se forme chaque fois que le cours d'eau s'encaisse dans ses propres alluvions (reprise d'rosion): la surface du lit majeur est alors suspendue au-dessus du cours d'eau. Si le phnomne se reproduit plusieurs reprises, on a formation de terrasses tages ou embotes (Fig. III.4). La terrasse la plus basse est toujours la plus rcente.

Figure III.4: terrasses tages et terrasses embotes. A: les chutes du niveau de base provoquent un encaissement successif avec des terrasses de plus en plus jeunes vers le bas; B: la premire chute du niveau de base est trs accentue, provoquant un profond encaissement; par la suite, les chutes du niveau de base ne sont plus aussi fortes et n'entament plus que la terrasse la plus ancienne.

Nombreuses terrasses tages Pokhara (Npal). La terrasse t1 est la plus ancienne et la terrasse t5 est la plus rcente. 2.3.2. Erosion latrale En plus de l'rosion verticale, se produit dans les rivires une rosion latrale, conduisant la formation d'une plaine alluviale. Ce type d'rosion apparat quand le profil d'quilibre est presque ralis et que l'rosion verticale devient faible. Comme l'rosion latrale est fortement contrle par la rsistance des roches l'rosion, la largeur de la plaine alluviale est variable et gnralement rduite dans les roches dures. Le mcanisme de l'rosion latrale est li principalement au dveloppement des mandres. Une fois forms, les mandres ont tendance se dplacer vers l'extrieur et vers l'aval du cours d'eau par rosion sur la rive concave (o la vitesse du courant est la plus forte) et dpt sur la rive convexe (o la vitesse est la plus faible). L'accumulation des sdiments se fait sous la forme de point bars ou lobes de mandre. Le recoupement des mandres gnre des mandres abandonns (Fig. III.5).

Figure III.5: formation des mandres par rosion de la rive concave et sdimentation sur la rive convexe. L'ensemble se dplace vers l'aval. Recoupement de mandre et dveloppement d'un mandre abandonn.

Dveloppement d'un point bar par dpt de sdiment le long de la rive convexe; de petites rides de courant se forment au sommet; La Chevratte, Lahage, Lorraine belge.

Exemple de mandre recoup: le Cirque de Navacelle, Hrault, Causse du Larzac, France. Le cours actuel de la rivire est figur en trait plein; le cours parcourant l'ancien mandre en tirets.

Autre exemple de mandre recoup Minerve, Montagne Noire, France. Dans ce cas-ci, le recoupement est souterrain: c'est le rsultat de la dissolution du calcaire. L'entre du cours souterrain de la Cesse se marque gauche de la photo par un spectaculaire pont naturel. L'ancien cours est visible droite, sous le pont; ce niveau, le lit de la rivire est plusieurs mtres plus haut que le lit actuel.

Il faut remarquer que le dveloppement des mandres est aussi le reflet d'un certain quilibre entre rosion et transport: un chenal sinueux tant plus long qu'un chenal rectiligne, sa pente est plus faible et la vitesse du courant (et donc la possibilit de transporter des sdiments) est plus rduite. Une rivire n'est donc pas libre de dvelopper indfiniment des mandres; il faut qu'elle conserve assez de puissance pour transporter sa charge, sinon son chenal se comble, des inondations de plus en plus frquentes se produisent et il apparat un trac moins sinueux. En d'autres termes, on peut dire que si une rivire peut s'adapter des conditions hydrodynamiques nouvelles par rosion verticale ou remblaiement, elle peut s'adapter galement en modifiant ses mandres. Certains mandres prsentent un aspect particulier. Ainsi, dans les roches schisteuses, l'rosion latrale s'exerant beaucoup plus facilement dans une direction, les mandres peuvent prendre une forme tire (mandres de la Semois). 3. EROSION KARSTIQUE Les formes d'rosion qui rsultent de la dissolution de roches (surtout calcaires) par les eaux douces sont trs particulires: elles reoivent le nom de morphologie karstique d'aprs une rgion de la Croatie. Les diffrents lments d'un paysage karstique sont schmatiss la Figure III.6.

Figure III.6: Elments gomorphologiques d'un paysage karstique. (1) terrains non karstiques; (2) canyon; (3) recule; (4) valle sche; (5) rsurgence de rivire; (6) perte; (7) doline; (8) ouvala; (9) lapiez; (10); aven; (11) grotte; (12) source vauclusienne; (13) rivire souterraine. On distingue des morphologies souterraines et des morphologies ariennes: - Le rseau souterrain ou endokarst est influenc par les discontinuits gologiques: cassures, diaclases, failles du massif calcaire qui conditionnent la direction des galeries. On distingue la partie fossile du rseau, dnoye, de la partie active o s'coulent les rivires souterraines. Les splothmes regroupent toutes les formes de concrtionnement comme les stalactites (caractrises par un canal central o circule l'eau), les stalagmites (pleines), les draperies, etc. Les gours sont des barrages difis sur le fond des cours d'eau souterrains, souvent l'intervention d'obstacles. Les pisolithes sont des concrtions sphriques rsultant de mouvements tourbillonnants dans des cuvettes. Toutes ces concrtions rsultent du dgazage du CO2, provoquant la prcipitation de CaCO3.

Splothmes. A: draperies dans la grotte du Pre Nol Han-sur-Lesse; B: gours, rivire souterraine, Canning Basin, Australie; C: pisolithes, carrire souterraine de Mazy. - Les formes ariennes (exokarst) comprennent les canyon et avens, rsultant de l'effondrement du toit de galeries et de salles proches de la surface, les dolines, dpressions circulaires o s'infiltrent les eaux de surface, les ouvalas, rsultant de la coalescence de plusieurs dolines, les poljs, plaines karstiques endoriques o s'observent des reliefs rsiduels ou mogotes. Les recules sont des chancrures dans un plateau calcaire dbouchant sur un cirque au fond duquel s'observe en gnral une rsurgence et les valles sches sont des valles abandonnes suite l'infiltration souterraine d'une rivire par une perte.

Dolines (flches), Pic du Midi, Pyrnes.

Mogotes (calcaire dvonien) prs de Yangshuo, Guangxi, Chine. 4. EROSION GLACIAIRE Les formes remarquables de l'rosion glaciaire sont visibles deux chelles: grande chelle, on observe des valles caractristiques, dites "en U" ou "en auges" dont la section transversale en auge avec des parois verticales s'oppose la forme "en V" des valles fluviatiles. Cette forme caractristique s'explique par une rosion latrale plus importante que l'rosion verticale. Lorsque deux ou plusieurs glaciations se sont succdes, on obtient des auges embotes (Fig. VII.14). Le profil longitudinal des valles glaciaires est lui aussi caractristique, avec des tronons faible pente, correspondant des largissements et des tronons forte pente coupls avec des rtrcissements ou verrous. On peut mme observer des contrepentes en amont des verrous (Fig. III.3C). En amont des valles glaciaires s'observent les cirques glaciaires. A petite chelle, l'rosion glaciaire se manifeste par des surfaces polies et arrondies (roches moutonnes), souvent stries par des blocs durs enchsss dans la glace (stries glaciaires). Dans beaucoup de cas, ces roches moutonnes prsentent une pente plus faible vers l'amont (usure) que vers l'aval (arrachement de blocs), permettant de reconstituer le sens d'coulement des glaciers.

A: stries glaciaires sur une roche use par l'action d'un glacier, valle du Marcadeau; B: roches moutonnes, Pont d'Espagne (France). Le rseau de lignes correspond des veines de quartz, mises en relief par la dissolution plus rapide du granite.

5. EROSION MARINE 5.1. Les mcanismes de l'rosion marine Les principaux agents de l'rosion marine sont les vagues et les courants, auxquels on peut ajouter l'action des embruns emports par le vent (altration chimique).

Formation de taffoni (cavits) sur une falaise de basalte, par l'action corrosive des embruns. Cap d'Agde, France.

L'action rosive des vagues rsulte des facteurs suivants:

un mitraillage par le sable et gravier transports; la pression de l'eau contre les parois (elle peut atteindre 30 tonnes/m2); une succion lorsque les vagues se retirent (dplacement de blocs de plusieurs milliers de tonnes); des vibrations par suite de chocs successifs (phnomnes de rsonance).

Le matriel sdimentaire mobilis subit ensuite un tri granulomtrique efficace: le matriel fin est emport vers le large ou dpos dans des zones calmes alors que le matriel grossier s'accumule proximit de la cte. Les sdiments mis en suspension par les vagues peuvent tre galement transports par les courants. Les grains de sable qui subissent l'action des vagues et des courants prennent un aspect luisant ("mouss-luisant" par opposition au "rondmat" du transport olien).

Force des vagues; le gardien de phare donne l'chelle.

A: sable quartzeux olien dont les grains ont un aspect "rond-mat" (Cervants, Australie). B: sable marin, galement quartzeux, dont les grains ont un aspect "mouss-luisant" (Kalbarri, Australie). Ces diffrences refltent la nature diffrente de l'agent de transport. 5.2. Formes d'rosion et d'accumulation littorales La principale forme d'rosion littorale est la falaise. On distingue les falaises vives, encore battues par la mer et les falaises mortes, spares de la mer par une zone de dpt. Les falaises se forment par sapement la base et boulements par pans.

Falaise vive: e: encoche d'rosion; b: blocs tombs de la falaise; g: cordon de galets de craie forms par usure du matriel de la falaise. CapBlanc Nez, France. Le matriel rod peut s'accumuler dans les zones les plus calmes (Fig. III.7) et un rivage dentel o les zones les plus rsistantes forment des caps peut voluer vers une certaine rgularisation par rosion-accumulation. La cte tendra dans ce cas prendre une orientation perpendiculaire la houle dominante (Fig. III.8).

Figure III.7: formes d'rosion et accumulation littorale. A: Rfraction de la houle autour d'un cap et naissance d'une zone d'eau plus calme o l'nergie est disperse et o se forme une plage de fond de baie. B: exemple de la cte prs d'Erquy, Bretagne.

Figure III.8: rgularisation progressive d'une cte rocheuse par rosion des caps et accumulation en fond de baie.

IV. Le transportLes sdiments sont transports depuis les zones sources jusqu'aux zones de dpt par trois types de processus: (1) glissements en masse par gravit en l'absence de fluides (avalanches de dbris ="rockfalls", glissements de terrain, ="landslides"); (2) coulements gravitaires en prsence de fluides ("debris flows", "grain flows", "mudflows", turbidites); (3) coulements d'eau, d'air ou de glace. 1. GLISSEMENTS EN MASSE EN L'ABSENCE DE FLUIDES Dans ce type de processus, les fluides ne jouent qu'un rle mineur, par leur effet lubrifiant la base des units transportes. Ces processus dplacent des masses considrables de sols et dbris rocheux sur des distances courtes (de l'ordre du km). Leur impact sdimentaire est pourtant important, car ils mettent les matriaux mobiliss la disposition du systme fluviatile. Un exemple classique d'avalanche de dbris est la catastrophe qui a affect le village suisse de Elm en 1881: environ 106 m3 de roches se sont dtachs d'une paroi, formant aprs une chute de 450 m un manteau de dbris de 10 20 m d'paisseur sur 3 km2. La vitesse de dplacement de ces dbris a atteint 155 km/h et 115 personnes ont perdu la vie dans la catastrophe. Par ailleurs, des glissements en masse gigantesques ont t observs sur la Lune et sur Mars o, en l'absence de systme fluviatile, ils forment l'essentiel des processus sdimentaires.

Avalanche de dbris dans un vallon; Piau Engaly, Pyrnes, France. 2. ECOULEMENTS GRAVITAIRES Dans ces phnomnes, les particules sdimentaires sont en suspension dans un fluide, mais leur mouvement est d la gravit, non au dplacement du fluide lui-mme ( la diffrence d'un coulement liquide conventionnel). On distingue quatre types d'coulements gravitaires: (1) les "grain flows", (2) les "debris flows", (3) les "fluidised sediment flows" et (4) les courants de turbidit (="turbidity currents") (Figs. IV.1 & 2). 2.1. Grain flows Les grain flows se dclenchent lorsque la pente d'un dpt est suprieure la pente d'quilibre. Les particules sont maintenues en mouvement par des forces dispersives dues aux multiples collisions entre les grains. L'air (l'eau) n'agit que comme un lubrifiant mais ne propulse pas les grains. De grandes stratifications entrecroises peuvent tre produites, mais chaque unit est homogne et ne prsente pas de structure interne (Fig. IV.2). L'exemple le plus connu de grain flow est l'avalanche de sable provoque au revers d'une dune devenue trop raide.

Ecoulement (grainflow) de sable au flanc d'une dune.

Figure IV.1: classification des 4 types d'coulements gravitaires en fonction des interactions entre grains et fluide.

Figure IV.2: lithologie, texture et figures sdimentaires des quatre types d'coulements gravitaires. 2.2. Fluidised sediment flows Ce type d'coulement gravitaire est constitu de grains maintenus en suspension par un excs de pression du fluide intergranulaire. Les fluidised sediment flows demeurent en mouvement aussi longtemps que cet excs de pression est maintenu. De nombreuses structures sdimentaires caractristiques sont produites: figures de charge (="load casts"), "convolute laminations", volcans de sable (="sand volcanoes"), figures en assiettes (="dish structures"), structures d'chappement de fluide (="fluid escape structures") (Fig. IV.2). L'exemple le plus connu de ce phnomne est les sables mouvants (="quick sand"): ces sables saturs en eau (par exemple suite un dpt rapide) perdent leur cohsion lors de l'application d'une pression extrieure. A l'chelle gologique, cette pression extrieure est souvent le fait d'une onde sismique. 2.3. Debris flows et mudflows

Les mudflows sont des coulements de boue sous l'action de la gravit. Si cette boue contient de gros lments (galets, blocs), on parle alors de debris flow. Ces coulements ont l'aspect du bton frais et se mettent en mouvement lorsque de fortes pluies ont satur d'eau leur fraction fine. Leur vitesse de propagation peut atteindre une centaine de km/h et ils provoquent le dplacement de blocs de taille parfois considrable. Le maintien en suspension de ces gros lments est d la rigidit de la matrice et sa densit relativement forte. Lorsque les forces de gravit deviennent moins fortes que les forces de frottement (internes et sur le fond), la coule s'arrte: on dit qu'elle gle. Les debris flows sont mal classs avec localement un granoclassement inverse la base (Fig. IV.2). On trouvera des expriences filmes de debris flow sur: http://faculty.gg.uwyo.edu/heller/sed_video_downloads.htm

Debris flow calcaire; flysch ocne, Kotli, Istrie (Croatie). 2.4. Courants de turbidit Les courants de turbidit sont des coulements gravitaires dans lesquels le sdiment est maintenu en suspension par la turbulence du fluide interstitiel. Ils se produisent lorsqu'un choc (tremblement de terre, vague) branle une masse de sdiment (Fig. IV.3). Ce mlange d'eau et de sdiment (25 mg/l 1 kg/l) possde une densit plus grande que celle de l'eau et se dplace vers le bas sous l'effet de la gravit. Insistons une fois de plus sur le fait que ce n'est pas le fluide qui fait se mouvoir le courant de turbidit, mais la pesanteur. Le fluide ne fait que

maintenir les particules en suspension. Les observations exprimentales font attribuer aux courants de turbidit : - un grand pouvoir de dplacement: par exemple, lors du tremblement de terre dans l'Atlantique Nord en 1929, la rupture chelonne des cbles tlgraphiques transatlantiques a permis de constater que le courant de turbidit s'tait dplac une vitesse de 25 100 km/h suivant la pente; - une grande extension des dpts: dans l'exemple repris ci-dessus, le dpt provoqu par le courant de turbidit a couvert plus de 200.000 km2 de fond ocanique; l'paisseur de sdiments dposs variant de quelques centimtres un mtre d'paisseur; - un grand pouvoir de transport: le mme exemple a mis en jeu plus de 200 km3 de sdiment.

Figure IV.3: naissance d'une turbidite: un glissement de terrain dans la partie suprieure du talus continental mobilise une grande masse de sdiment; au dbut du glissement, le sdiment est peine dstructur et on retrouve des structures de slumps; progressivement, la masse de sdiment va se comporter comme un debris flow en descendant le talus continental; par ailleurs, en rodant et incorporant les sdiments rencontrs sur son chemin, sa densit et sa vitesse augmentent; ensuite, par incorporation d'eau, la cohsion entre les particules de sdiment diminue et des tourbillons commencent se former: le courant de turbidit se dveloppe; un certain moment, le debris flow "gle" et le courant de turbidit continue seul se dplacer. Les sdiments dposs par les courants de turbidit sont appels turbidites (Fig. IV.4). Un coulement gravitaire individuel correspond une turbidite, caractrise en gros par un granoclassement normal. En effet, la tte, la partie moyenne et la queue du courant de densit dposent successivement en un point des grains grossiers, moyens et fins en succession verticale. Les turbidites, comme les autres coulements gravitaires sont donc des dpts instantans l'chelle gologique. On distingue, en fonction de la granulomtrie de la turbidite et de son loignement par rapport la source des sdiments, trois grandes classes de turbidites : - les turbidites de forte densit, grains grossiers, relativement mal classes, avec une surface basale nettement rosive; elles sont gnralement chenalises et mises en place sur ou proximit des talus (proches donc des sources);

- les turbidites de moyenne densit, avec la base diffrentes structures rosives de type flute cast, sole marks, etc. et des figures sdimentaires souvent bien marques (voir ci-dessous); - les turbidites de faible densit, constitues de sdiments plus fins, bien classs et laminaires; elles sont mises en place dans le bassin et possdent une grande extension latrale. Dans le cas des turbidites de moyenne densit, une squence idale a t mise en vidence et formalise (Fig. IV.4): il s'agit de la squence de Bouma (1962). Elle comprend de la base au sommet : - une unit massive et assez grossire, parfois granodcroissante; localement, la base, on peut observer des sdiments remanis (terme A); - une unit laminations planes, granodcroissante (terme B) ; - une unit stratifications obliques (terme C) ; - une unit faite d'alternance de sable fin, de silt et de plite (terme D) ; - une unit silto-plitique laminaire et granodcroissante (terme E) ; - enfin, un inter-turbidites, correspondant la lente dcantation des sdiments ocaniques fins, laquelle se surimpose de la bioturbation.

Figure IV.4: modles de turbidites. Cette rpartition verticale des diffrents termes se retrouve aussi latralement au sein d'une mme turbidite, au fur et mesure que l'on s'loigne de l'axe de l'coulement.

Le modle de Piper (1978), correspondant aux turbidites de faible densit, est en fait driv du terme E de la squence de Bouma, tandis que le modle de Lowe (1982) comprend des units graveleuses mises en place par un transport de type grain flow (R), par traction (S1, S2) et par suspension (S3). Le terme S3 peut tre mis en parallle avec le terme A de la squence de Bouma (Fig. IV.4). Remarquons donc que les termes les plus grossiers des turbidites, souvent non classs, sont interprts par certains auteurs comme des dpts se rapprochant plus d'un "debris flow", d'un "grain flow" ou d'un "fluidised sediment flow" que d'un dpt turbiditique au sens strict. On trouvera des expriences filmes de courants de turbidit sur: http://faculty.gg.uwyo.edu/heller/sed_video_downloads.htm L'essentiel de ce qui prcde concerne des courants de turbidit dont la densit plus leve que la densit du fluide environnant maintient l'coulement proximit du fond. On a cependant mis en vidence des coulements turbides dont la densit est intermdiaire entre les eaux de surface et les eaux de fond plus salines ou dont la densit diminue fortement au cours de leur propagation par incorporation d'eau et dpt de sdiment. Dans ce cas, partir d'une certaine profondeur, un nuage se forme qui emporte les sdiments les plus fins une certaine hauteur au-dessus du fond, abandonnant un lit de sdiment gnralement massif. Ce serait l'explication des mystrieux "sables massifs profonds", pauvres en structures sdimentaires part quelques figures d'chappement de fluide...

A: Turbidites visennes dans la coupe de Lenthric (Montagne Noire, France). B: dtail montrant la succession de deux turbidites; la base du terme A est grossire et constitue d'un conglomrat; le terme B est finement laminaire.

3. ECOULEMENTS DE FLUIDES 3.1 Ecoulement laminaire-coulement turbulent La capacit d'un fluide mobiliser et transporter des sdiments dpend de nombreux facteurs dont les principaux sont sa masse volumique, sa viscosit et sa vitesse. Pour mmoire, la

masse volumique de l'eau de mer est d'environ 1,03 g/cm3, celle de l'eau douce de 1 g/cm3, celle de la glace de 0,9 g/cm3. Par contre, la masse volumique de l'air est trs faible, de l'ordre de 0,001 g/cm3. En ce qui concerne la viscosit, celle de l'air est trs faible, celle de la glace est leve et celle de l'eau est intermdiaire. Les principales diffrences entre sdiments oliens (sable fin et silt), glaciaires (galets, sable, boue) et alluviaux sont la consquence de ces masses volumiques et viscosits distinctes. La vitesse de l'agent de transport dtermine largement le type d'coulement, soit laminaire, soit turbulent. Dans un coulement laminaire, les filets d'eau restent parallles entre eux: ce rgime tranquille est ralis par exemple pour un coulement d'eau tal sur de grandes surfaces ainsi que pour des fluides visqueux comme les coules boueuses. Dans un rgime turbulent, les filets d'eau se mlangent, forment des tourbillons et ne restent plus parallles entre eux et parallles au fond. Ceci a une consquence importante quant la capacit d'rosion et de transport du fluide: la composante ascendante des tourbillons et filets d'eau maintient les sdiments en suspension ou favorise leur rosion. Le "nombre de Reynolds" permet de mettre en vidence la transition coulement laminairecoulement turbulent. Il est dfini comme suit:

Re=2V.r/o V est la vitesse du fluide; sa masse volumique; sa viscosit et r la profondeur du chenal dans lequel se fait l'coulement. Pour des Re de 500 2000, l'coulement est laminaire: c'est le cas des glaciers (qui ne sont de bons agents de transport que parce que la viscosit leve de la glace retarde le dpt des sdiments), des coulements aqueux sur de grandes surfaces ("sheet flows"), des fleuves dbit lent. Au-dessus de 2000, l'coulement est turbulent: c'est le cas de la plupart des rivires, des courants de turbidit et du vent. Il faut ajouter ceci un effet particulier d la prsence d'une couche-limite turbulente proximit immdiate des substrats, mme dans le cas d'un coulement laminaire. Cette couche limite favorise l'rosion et le transport. Un cas particulier de l'coulement turbulent est l'coulement torrentiel. Ce type d'coulement apparat de grandes vitesses et est responsable d'une rosion intense. Lorsqu'une rivire passe d'un rgime turbulent un rgime torrentiel, sa vitesse augmente et sa surface s'abaisse. Les vagues de la surface s'attnuent. L'apparition du rgime torrentiel peut tre dtermin par le "nombre de Froude":

F=V/g.r)1/2o V est la vitesse du fluide; g l'acclration de la pesanteur et r la profondeur du chenal dans lequel se fait l'coulement. Si F est infrieur 1, le cours d'eau est en rgime turbulent. S'il est suprieur 1, il est en rgime torrentiel. 3.2. Mise en mouvement des sdiments

La mise en mouvement d'une particule sur le fond peut tre largement explique par le thorme de Bernoulli. Brivement, il tablit que la somme des nergies cintiques (de vitesse) et pizomtriques (de pression) d'un fluide sur un objet doit tre constante. En d'autres termes, cela signifie que quand la vitesse d'un courant s'acclre autour d'un objet, la pression diminue. L'illustration classique de ce principe est l'coulement de l'air autour d'une aile d'avion: l'air passant au-dessus de l'aile parcourt un chemin plus grand et acclre; sa pression diminue donc par rapport l'air circulant en dessous de l'aile et est responsable de l'apparition d'une force ascensionnelle. Ce phnomne est le mme pour un grain au fond d'un chenal et est responsable de sa mise en suspension. Ds que le grain est en suspension, le trajet des lignes de courant devient symtrique et d'autres forces prennent le relais pour rendre compte de son transport. 3.3. Transport des sdiments Plusieurs modes de transport ont t observs (Fig. IV.5): il s'agit du roulement et de la traction le long du fond, de la saltation (transport par bonds, suite des chocs successifs) et du transport en suspension. Les particules en mouvement par roulement, traction et saltation constituent la charge de fond ("bedload"), gnralement forme de galets et de sable (cf. film sur http://faculty.gg.uwyo.edu/heller/sed_video_downloads.htm). La charge en suspension est surtout constitue d'argile et de silt. La charge en suspension des coulements turbulents est beaucoup plus importante que celle des coulements laminaires.

Figure IV.5: modes de transport des particules dans un courant. La granulomtrie des particules sdimentaires a donc une influence majeure sur leur transport (et sur leur vitesse de sdimentation). Ces relations sont synthtises par le diagramme de Hjulstrm (Fig. IV.6). Ce graphe (essentiellement bas sur des expriences en laboratoire) montre la vitesse minimale d'un courant ncessaire pour mobiliser, transporter et dposer des grains de quartz de granulomtrie variable. Si l'on examine d'abord la partie suprieure de ce graphe (rosion des particules), la portion de la courbe reprsentant l'rosion des particules moyennes grossires (sable fin galets) semble logique: la vitesse du courant ncessaire pour mobiliser des grains augmente avec leur granulomtrie. Pour les particules fines, par contre, la courbe montre une augmentation de la vitesse du courant avec la diminution de la granulomtrie. Ce comportement paradoxal est la consquence de la cohsion leve des particules fines, surtout lie un effet lectrostatique. La partie infrieure du graphe montre la relation entre la granulomtrie des particules et la vitesse du courant lors de leur dpt.

Figure IV.6: diagramme de Hjulstrm. 3.4. Dpt des sdiments Ds qu'une particule est mise en suspension, elle commence aussitt sdimenter. Sa vitesse de sdimentation est donne par la loi de Stokes :

v=c.d2 o c est une constante gale : (p-f).g/18v reprsente la vitesse de sdimentation, la viscosit du fluide, f sa masse volumique et p celle de la particule; d est le diamtre de la particule. Ce qui signifie bien sr qu' minralogie constante, la vitesse de sdimentation augmente avec la taille des grains. Quelques remarques supplmentaires dduites de cette formule: les minraux lourds, dont la densit est leve, sdimentent rapidement; les fluides trs visqueux, comme les coules de boue peuvent transporter des grains beaucoup plus gros que les fluides moins visqueux. Remarquons que la loi de Stokes est normalement valable pour des particules sphriques. En fait, des particules allonges comme les paillettes de micas ont une vitesse de sdimentation plus lente que celle thoriquement prvue. Un autre cart la loi thorique est constat pour les particules trs anguleuses qui gnrent autour d'elles de petits tourbillons qui ralentissent leur chute.

Tri par densit de sable quartzique (clair) et de minraux lourds (foncs) sur une plage de l'Oregon (USA). Photo M. Humblet.

V. Le dptLe dpt des sdiments a lieu lorsque la vitesse de l'agent de transport diminue ou lorsque cet agent de transport disparat (fonte de la glace). La granulomtrie des particules, la texture des sdiments, la gomtrie des dpts sont d'importants indices sur l'agent de transport, sa vitesse au moment du dpt, sa direction, etc. Les grains se dposent avec leur face plane parallle au lit sdimentaire. Ils montrent souvent un phnomne d'imbrication. Les grains allongs sont stables quand leur grand axe est parallle la direction du courant. Envisageons d'abord le cas des dpts glaciaires. 1. LES MORAINES Les moraines sont des formes d'accumulation laisses par les glaciers, lors de leur retrait ou de leur fonte totale. Contrairement aux formes d'rosion (voir ci-dessus), elles s'observent surtout dans la partie aval du systme glaciaire. La caractristique essentielle des dpts morainiques est leur mauvais classement granulomtrique, d'o le nom d'argile blocaux qui leur est associ. Ce phnomne est la consquence du mauvais pouvoir de classement de la glace (remarque: c'est aussi le cas des debris flows, voir ci-dessus). Les moraines ayant subi compaction et diagense sont appeles tillites.

A: argile blocaux d'une moraine actuelle, Jostedalsbreen, Norvge. B: dtail. Dans les dpts en milieu aqueux, par contre, la granulomtrie des sdiments a une importance considrable. 2. LA GRANULOMETRIE DES SEDIMENTS 2.1. Introduction La granulomtrie d'un sdiment renseigne videmment sur la nature et la vitesse de l'agent de transport, par l'intermdiaire de la loi de Stokes. Il faut cependant tenir compte d'un lment important: le stock sdimentaire disponible la source. Pour prendre un exemple, on pourrait observer un dpt de sable trs bien tri, d non pas aux caractristiques de l'agent de transport, mais tout simplement au fait que c'tait le seul matriau disponible dans le bassin de sdimentation. On peut donc dire que quelle que soit la comptence des courants (leur capacit de transport), ils ne pourront pas vhiculer de grains plus grossiers que ceux disponibles la source. Un cas particulier est celui des carbonates. La taille des fossiles ne renseigne sur la comptence des agents de transport que s'ils ont t dplacs. De nombreux organismes sont incorpors dans le sdiment sans avoir subi aucun dplacement.

Granulomtrie des sdiments: exemples: galets, graviers et sable, rgion de Ploumanach, Bretagne. 2.2. Analyses granulomtriques

A l'origine, les analyses granulomtriques taient effectues par tamisage l'aide de tamis mailles carres dont les ouvertures croissent suivant une progression gomtrique de raison 21/2. Ces tamis taient secous manuellement ou l'aide de dispositifs mcaniques tels le systme Ro-TAP, recommand par les comits de normalisation. Lorsque l'on tamise, on classe les grains d'aprs leur largeur et les frquences des grains d'une classe dtermine sont values en pesant les fractions retenues sur les tamis successifs. Pour les fractions les plus fines, les mthodes de dcantation ou de sdimentation sont utilises: on disperse un sdiment dans un rcipient rempli d'un liquide (en gnral de l'eau dont la temprature est connue) et l'on mesure, des intervalles de temps bien dtermins, la quantit de matire reste en suspension (mthode de la pipette, laser,...) ou celle dj sdimente (principe de la balance de sdimentation). Actuellement, des appareils de plus en plus perfectionns (granulomtre laser) facilitent les analyses. Pour reprsenter les distributions granulomtriques, on peut utiliser:

des histogrammes ou diagrammes colonnes (Fig. V.1A), forms de rectangles jointifs dont les bases respectives reprsentent les intervalles de classes et dont les hauteurs correspondent aux frquences des diffrentes classes (poids exprims en % des fractions rcoltes sur les diffrents tamis). Si l'on pouvait rduire l'intervalle de classe de manire le faire tendre vers zro, le contour en escalier limitant l'histogramme se rapprocherait d'une courbe continue, la courbe de frquence. On se hasarde parfois tracer une courbe de frquence en joignant le milieu des gradins de l'histogramme; des courbes cumulatives (Fig. V.1B): on cherche ici connatre la proportion du sdiment qui est suprieure -ou infrieure- une valeur donne du diamtre granulomtrique. Dans le cas d'un tamisage, on porte en abscisse les ouvertures linaires des mailles des tamis et en ordonne, le pourcentage en poids de sdiment traversant le tamis (% de passant) ou ne le traversant pas (% de refus). Les ingnieurs portent gnralement les ouvertures des tamis dans un ordre croissant tandis que les sdimentologues adoptent presque toujours une disposition inverse. Lorsque l'intervalle de classe diminue, le diagramme cumulatif se transforme en courbe cumulative; on peut construire cette courbe en joignant les rentrants du diagramme cumulatif; des courbes cumulatives ordonne de probabilit (Fig. V.1C): les courbes de frquence, construites avec une chelle logarithmique des diamtres des grains ressemblent aux courbes en cloche de Gauss exprimant les distributions log-normales. On admet souvent, comme un postulat, que les dimensions des grains de sable taient originellement distribues suivant une courbe log-normale. Par consquent, il est utile de connatre dans quelle mesure la courbe granulomtrique d'un sable donn s'carte de la courbe thorique. Pour cela, on a calcul une chelle spciale des ordonnes, dites ordonnes de probabilit, grce laquelle une distribution log-normale se traduit par une droite au lieu d'une courbe en forme de S tir. Grce une telle reprsentation, on peut juger si un sdiment a t remani ou non, s'il rsulte d'un mlange de plusieurs phases granulomtriques, dposes suivant diffrents processus de transport (traction, saltation, suspension), etc.

Figure V.1: courbes granulomtriques d'un gravier. A: histogramme et courbe de frquence; B: diagramme et courbe cumulative; C: diagramme cumulatif ordonne de probabilit. La Figure V.2 montre une srie de courbes granulomtriques reprsentant diffrents types de dpts.

Figure V.2: courbes granulomtriques cumulatives de quelques sdiments. A: gravier fluviatile; B: gravier de la Fig. 7; C: sable marin ctier; D: sable fluviatile; E: loess; F: argile blocaux.

Pour caractriser ces courbes et pour les comparer les unes aux autres, on peut utiliser des paramtres statistiques et notamment:

la tendance centrale de la distribution granulomtrique peut tre dfinie par le grain mdian (Md). Il correspond au diamtre lu en abcisse sur la courbe cumulative, en regard de l'ordonne 50% des frquences pondrales cumules. C'est donc le grain tel que 50% en poids du sdiment tudi est plus gros et 50% plus petit. On estime que le grain mdian est une mesure de la dpense moyenne d'nergie dveloppe par l'agent de transport; la dispersion des valeurs de la distribution autour de la tendance centrale traduit le bon ou le mauvais classement du sdiment: elle exprime la constance ou l'irrgularit du niveau nergtique de l'agent de transport. Cette mesure est donne, notamment, par le cofficient de classement de Trask: So = Q3/Q1)1/2 o Q1 reprsente le premier quartile de la distribution (c--d. la valeur de D correspondant l'ordonne 75% des frquences cumules) et Q3 reprsente le troisime quartile de la distribution (correspondant l'ordonne 25%). Dans l'exemple du sable fluviatile de la figure 8, on lit Md= 2,82 mm, Q1= 0,71 mm et Q3= 2,82 mm, d'o So= 1,99. Dans l'chelle propose par Fuchtbauer (1959), le classement de ce sable est mauvais. Echelle de Fuchtbauer Degr de classement trs bon bon moyen mauvais trs mauvais So = Q3/Q1)1/2 2,00

Tableau V.1: valuation du degr de classement d'un sdiment suivant l'chelle de Fuchtbauer (1959). Pour dcrire et caractriser les courbes granulomtriques, les sdimentologues utilisent souvent des paramtres graphiques construits partir de certains percentiles. Il existe un grand nombre de ces paramtres (presqu'autant que de sdimentologues). Voici ceux dfinis par Inman en 1952 et qui ont au moins le mrite d'avoir rsist au temps. Les valeurs indicatives choisies sont les diamtres correspondant aux frquences pondrales de 5, 16, 50, 84 et 95 % que l'on note f5, f16, etc. Les paramtres de Inman sont calculs de la faon suivante: - mdiane: Mdf= f50; - moyenne: xf= 1/2(f16+f84); - cart-type: sf= 1/2(f84-f16); - asymtrie: A1f= (xf-Mdf)/sf A2f= (f5+f95-2Mdf)/2sf;

(l'asymtrie -skewness- d'une distribution traduit un meilleur/moins bon classement des particules fines par rapport celui des grosses particules. Le premier cofficient A1f concerne la partie centrale de la distribution, tandis que le second A2f considre plus spcialement les queues de la distribution, c--d. les fractions les plus fines et les plus grossires de celle-ci); - acuit: B= (f95-f5-2sf)/2sf; (l'acuit -curtosis- d'une distribution traduit un meilleur/moins bon classement des particules de la mdiane par rapport au classement des queues de la distribution). En conclusion, on peut dire que les analyses granulomtriques sont de bons descripteurs des sdiments meubles, mais l'utilisation des rsultats pour reconstituer la nature des agents de transport et de dpt, le type de source s'est jusqu' prsent solde par des semi-checs: pourquoi? (1) D'autres facteurs que la granulomtrie conditionnent le transport et le dpt des grains: la densit (quartz par rapport aux minraux lourds, par exemple) et la forme des grains (sphriques, anguleux, allongs... souvent directement lie la minralogie) ont une influence dterminante. (2) L'analyse des distributions granulomtriques est base sur le postulat que les agents de dpt agissent sur des populations de grains de type log-normale, ce qui n'est pas forcment le cas. L'analyse morphoscopique: pour complter l'analyse granulomtrique, on peut tudier la forme des grains en envisageant le degr de sphricit, le degr d'mouss (voir fascicule TP) ainsi que l'aspect des surfaces: grains impressionns, grains non uss, ronds mats, mousss luisants, etc. Ces tudes cherchent prciser la nature de l'agent de transport. Il faut cependant faire la part des caractres dj acquis par des grains qui peuvent tre recycls plusieurs fois. 2.3. Le granoclassement Un caractre important (et facile observer) des sdiments est la prsence ventuelle de granoclassement ("graded bedding"). On distingue le granoclassement normal ("fining upwards") o les sdiments deviennent de plus en plus fins vers le haut et le granoclassement inverse ("coarsening upwards") o les sdiments sont de plus en plus grossiers vers le haut. Ces phnomnes sont videmment lis la diminution (l'augmentation) progressive de la comptence de l'agent de transport. Ils sont frquents et bien dvelopps dans les turbidites et dans les dpts de fin de crue. A l'chelle millimtrique, on les observe aussi dans certains types de rythmites et de laminites (voir ci-dessous). 3. LES STRUCTURES SEDIMENTAIRES 3.1. Introduction Les structures ou figures sdimentaires constituent un important indicateur des conditions de transport et de dpt des sdiments. Leur interprtation est facilite d'une part par l'tude de la nature actuelle et d'autre part par l'exprimentation en laboratoire. Certaines structures sdimentaires sont caractristiques d'un environnement bien particulier (glaciaire, dsertique,...) mais la plupart sont communes plusieurs milieux de dpt et ncessitent

l'utilisation de critres complmentaires pour l'interprtation des paloenvironnements (autres figures sdimentaires, fossiles, contexte gnral). Plusieurs types de classification des structures sdimentaires ont t suggrs. Relevons surtout les classifications bases sur la position des figures dans les sdiments (au mur, au toit ou dans la couche sdimentaire), sur leur gense (formes par des courants, des organismes, etc) et sur leur poque de formation (avant, pendant ou aprs le dpt de la couche sdimentaire). De fait, la plupart des structures sdimentaires peuvent tre rparties entre structures pr-, syn- et post-dpt. Les structures pr-sdimentaires sont observes la surface suprieure des bancs constitus auparavant (et la surface infrieure des nouveaux bancs sous la forme de contre-empreintes) avant le dpt de nouveaux sdiments. Elles sont rapporter le plus souvent des processus d'rosion. Exemple: traces de glissement d'objets sur le fond. Beaucoup de ces structures fournissent des indications sur la direction et le sens des courants. Les structures synsdimentaires se forment au cours du dpt des sdiments et tmoignent de la vitesse, nature, sens, direction des agents de transport. Un bon exemple est la stratification entrecroise. La bioturbation, due aux agents biologiques, est gnralement contemporaine ou lgrement postrieure au dpt des sdiments. On la retrouvera gnralement associe aux phnomnes syn-dpt. Les structures post-sdimentaires se dveloppent dans le sdiment aprs son dpt. On relve les rarrangements hydrostatiques (figures de charge), les structures dues aux dplacements latraux de masses de sdiments (slumps), les structures de dessiccation, les structures dues la pdogense, etc. Le cas particulier des figures diagntiques fait intervenir des processus lis la modification physico-chimique des sdiments dans les conditions de pression et temprature de subsurface. Enfin, il faut rappeler que certaines structures sdimentaires servent, dans les sries plisses, dterminer la polarit des couches (voir cours de cartographie). 3.2. Description et gense de quelques structures sdimentaires Le but de ce paragraphe est de dcrire, figurer et interprter les figures sdimentaires les plus susceptibles d'tre observes dans les dpts, principalement dtritiques. Interprter signifie que par analogie avec des observations ralises dans la nature actuelle, on essaie de faire correspondre un type d'environnement une gamme de figures sdimentaires. 3.2.1. Figures formes par rosion la face suprieure des bancs Les "flute casts" (Fig. V.4) sont forms par affouillement du fond par les courants (vortex). Ils sont reconnaissables par leur forme oblongue, allonge ou triangulaire dont la "queue" indique le sens du courant. En section, ils sont asymtriques avec la partie la plus profonde pointant vers l'amont. Ce sont donc d'excellents indicateurs des palocourants. Ils sont souvent accompagns d'autres figures comme les tool marks et les groove marks (voir cidessous). On les observe souvent la base des turbidites et galement dans certains chenaux fluviatiles.

Flute casts dans un grs fin de la Formation de Pepinster, Emsien, Colonster. La flche indique le sens du courant. Les flutes apparaissent en moulage la base du banc surincombant. Les figures en croissant ("crescent marks") (Fig. V.4) prennent naissance lorsqu'un objet pos sur le fond provoque une dflexion des lignes de courant. Il en rsulte une rosion l'avant de l'objet et un dpt l'arrire. La forme de la figure est contrle par la gomtrie de l'objet. Cette figure est trs frquente en milieu littoral.

Figure en croissant forme autour d'un fragment de tourbe; la flche indique le sens du courant. Verdronken Land van Saeftingen.

A beaucoup plus grande chelle, on peut rapprocher les tombolos, forme d'accumlulation littorale, des figures en croissant. Les tombolos se dveloppent en arrire d'lots rocheux la faveur de zones plus calmes (Fig. V.3).

Figure V.3. A: dveloppement d'un tombolo par accumulation de sdiments en arrire d'un lot rocheux. B: tombolo de gravier derrire l'Ilot Saint-Michel, Bretagne. Les marques de ruissellement ("rill marks") sont des figures d'rosion dendritiques mm-cm formes par un systme de "micro-rivires" lors du retrait des eaux sur les plages ou lors de phnomnes de ruissellement subarien sur des sdiments fins. La divergence des ramifications se fait vers l'aval (=dans le sens du ruissellement).

Marques de ruissellement ("rill marks") la surface de la plage Saint-Michel, Erquy, Bretagne; la flche indique le sens du courant. Les "scour marks" sont des figures d'affouillement prsentes la face suprieure des bancs ou l'intrieur de ceux-ci. En plan, les scour marks sont allongs suivant la direction des courants. Typiquement, ces figures tronquent la lamination du sdiment sous-jacent. Ces cicatrices d'rosion sont habituellement irrgulires, avec un certain relief, mais peuvent tre lisses par les courants.

Scour marks, plage de Vild-la-Marine, Baie du Mont-Saint-Michel, France.

Figure V.4: diffrents types d'rosion la base des bancs. 3.2.2. Empreintes d'objets

Les figures de traction ("groove marks") (Fig. V.4) sont des rainures creuses dans le sdiment sous-jacent par des objets trans sur le fond par les courants, voire par des icebergs. Ils se prsentent sous la forme de crtes rectilignes, troites et allonges de quelques mm plusieurs dizaines de cm, souvent parallles entre elles. Ce sont de bons indicateurs de la direction des courants (mais pas de leur sens). Ils sont galement frquents dans les turbidites, les facis fluviatiles et les facis priglaciaires. Les figures d'impact ("tool marks ") (Fig. V.4) sont des empreintes formes par des objets transports par les courants venant pisodiquement en contact avec le fond (objets en saltation). Ces objets peuvent tre des fragments de sdiment ou des tests d'organismes.

Tool et groove marks dans un grs fin. Flysch ocne, Kotli, Istrie (Croatie). 3.2.3. Autres empreintes de surface au sommet des bancs Les linations primaires de courant ("parting lineations") sont des tranes allonges de quelques mm de large et quelques dm de long prsentes sur la surface suprieure des bancs. Elles sont en gnral spares les unes des autres d'un cm au plus. Elles correspondent une orientation prfrentielle de l'allongement des grains paralllement au courant et se mettent en place gnralement sur des sdiments lamination plane (coulement rapide).

Linations primaires de courant ("parting lineation") la surface de la plage Saint-Michel, Erquy, Bretagne. Les fentes de retrait ("desiccation cracks") s'observent dans des sdiments fins soumis la dessiccation dans les environnements ctiers et lacustres. Elles s'organisent en rseaux polygonaux de maille millimtrique plurimtrique. Les fissures entre les polygones sont ouvertes et peuvent tre ultrieurement remplies par des sdiments. Elles se terminent en coin vers le bas. Des fentes de retrait horizontales peuvent galement apparatre ("sheet cracks"). D'autres types de fentes de retrait, les fissures de synrse ("syneresis cracks") peuvent apparatre en milieu sous-aquatique sans l'intervention d'une mersion. Elles sont lie des phnomnes de variation de salinit. On les identifie par leur caractre incomplet et l'absence de la forme en V.

Dessiccation sur une plage prs de la Chapelle Sainte Anne, Baie du Mont Saint-Michel, France.

A: mud cracks dans des sdiments continentaux thuringiens, La Lieude, France; B: fissure de dessiccation avec relvement des bords du polygone (flche), Lias, Le Perthuis, France. Les empreintes de cristaux. Sous des conditions favorables, des cristaux varis (glace, halite, gypse) se dveloppent la surface des sdiments non consolids. Mme si ces cristaux sont ultrieurement dissous, leur empreinte peut tre conserve. A noter que cristaux de sel et de gypse peuvent se former aussi bien en milieu arien qu'aquatique.

Empreintes de cristaux de halite dans un grs.

Empreintes de cristaux de glace dans de la boue calcaire actuelle. L'avance des vagues sur une plage donne naissance un petit bourrelet de sdiment, formant des lignes sinueuses et recoupes.

Lignes dues l'avances des vagues sur une plage sableuse. Les gouttes de pluie ("rain drops"). Les gouttes qui frappent la surface d'un sdiment non consolid y creusent de petits cratres circulaires ou elliptiques. Le bord du cratre est en trs lger relief par rapport la surface du sdiment, ce qui permet de les diffrencier des structures produites par des bulles d'air qui s'chappent du sdiment. Si les gouttes sont nombreuses, la surface devient gaufre et irrgulirement creuse.

Empreintes de gouttes de pluie sur un sdiment argileux: Grand Fort Philippe, actuel. 3.2.4. Rides, mgarides et dunes Ce sont des formes de dpt ("bedforms") essentiellement dveloppes en contexte sableux. Les rides ("ripples") sont trs communes sur les surfaces des bancs alors que les dunes et mgarides ("sand waves", "megaripples") sont assez rarement prserves. La migration latrales des dunes et rides donne naissance diffrents types de stratifications obliques (voir ci-dessous). Deux grands types de rides (chelle du mm-cm en coupe transversale) se distinguent (Fig. V.5): les rides de vagues et les rides de courant. Les premires sont formes par l'action des vagues sur un sdiment non cohrent, en gnral dans la gamme des sables fins. Leur coupe transversale est typiquement symtrique. Les secondes sont gnres par l'action de courants unidirectionnels. L'asymtrie qui les caractrise permet donc de dduire le sens du courant: pente forte en aval, pente faible en amont. Sur la base de la forme en plan des rides, on parlera de rides crtes rectilignes, crtes sinueuse, ou linguodes.

Figure V.5: formation des rides de vagues (A) et de courant (B). Les rides de vagues sont symtriques car les filets d'eau dcrivent des orbites circulaires (aplaties proximit du fond), provoquant un mouvement de va et vient sur le substratum. Les courants, au contraire, construisent des rides asymtriques par dpt sur la face aval l'intervention du courant de retour. Ds que la pente de la face aval dpasse le talus d'quilibre, une avalanche se produit et une lamine est cre.

Exemples de rides de courant, classes en fonction de leur rgularit; A: rides rectilignes de grande taille; B: rides plus sinueuses; C: rides elliptiques partiellement modifies par thixotropie; D: rides trs irrgulires formes proximit d'un obstacle (Trgastel, Bretagne). Les dunes et mgarides, de taille plus importante (chelle du dm-m en coupe transversale), peuvent atteindre plusieurs centaines de mtres d'extension horizontale. Leur surface est porteuse de petites rides et elles se caractrisent par de grandes stratifications obliques dues leur dplacement latral. Ces structures s'observent sur les plates-formes (bancs de sable) et dans le lit des fleuves.

Mgarides dans le chenal de la Somme (France), mare basse. Des rides plus petites se dveloppent dans les mares entre les mgarides lors de la mare basse, suite au clapotis (induit par le vent). Rides, mgarides et stratifications planes sont, avec les antidunes, des formes gnres par des courants de plus en plus forts (Figs V.6, V.7). La lamination pendage amont des antidunes est produite lors de l'effondrement des structures et de leur dplacement dans le sens contraire du courant. Les antidunes sont en phase avec les vagues qui les produisent.

Figure V.6: formes sdimentaires produites en fonction de la vitesse du courant.

Figure V.7: diagramme exprimental associant les formes sdimentaires produites la granulomtrie du sdiment et la vitesse du courant.

Courants rapides favorisant la formation d'antidunes dans un chenal ctier (Oregon, USA). Photo M. Humblet. L'interfrence de plusieurs trains de rides d'orientation diffrente (vagues et courant, par exemple), gnre des structures complexes appeles structures en rateau.

Structures en rateau en Baie de Somme (France). On trouvera des expriences filmes de formation de rides et antidunes sur: http://faculty.gg.uwyo.edu/heller/sed_video_downloads.htm D'autres photos de structures sdimentaires sur: http://wwwgeology.ucdavis.edu/%7EGEL109/ 3.2.5. Structures internes: litage et lamination Le litage ("bedding") est l'expression de la stratification l'chelle du banc (cm et plus) tandis que la lamination reprsente la stratification l'chelle du mm et en de, au sein des bancs. Litage et lamination sont produits par des changements plus ou moins priodiques dans la sdimentation (variations de la granulomtrie, de la composition des sdiments). Les contacts entre lamines successives peuvent tre progressif, net ou rosif. A ct des cas o la lamination s'exprime de manire visible dans le sdiment, il est frquent d'tre confront des dpts l'aspect homogne. Cette homognit peut n'tre qu'apparente et disparatre par exemple lors d'examens aux rayons X. Dans le cas d'une homognit relle, il peut s'agir de sdiments dont la bioturbation a effac la lamination ou encore de dpts en masse ou apriodiques. 3.2.6. Litage et lamination horizontale dans les sables et les grs Les sables stratification plane parallle sont constitus de lamines pratiquement horizontales de quelques mm 2 cm d'paisseur. La lamination y est l'expression de diffrences granulomtriques ou minralogiques (exemple des lamines de minraux denses). Ces laminations peuvent tre faiblement inclines en raison d'une palopente douce; elles peuvent aussi tre spares entre elles par de trs faibles discordances angulaires. Ces laminations planes sont engendres par les alles et venues des vagues ("wash and backwash") dans les environnements de plages exposs. L'arrive d'une vague s'accompagne d'un apport sdimentaire qui se dpose lors de son retrait sous forme de lamination granoclassement inverse. Six seize lamines peuvent tre cres chaque mare. Si les sdiments sont enrichis en minraux denses et opaques, le dpt rsultant sera constitu de couches claires (quartzeuses) alternant avec des couches plus fonces, enrichies en minraux denses.

Stratifications planes sur une plage, mises en vidence le long de la berge d'un chenal. Actuel, Santa Cruz, Californie, USA. D'autres phnomnes sont gnrateurs de stratification plane dans les sables, citons: - la stratification plane cres par les courants de turbidit (terme B). Le granoclassement y est cependant normal; - certains facis des tempestites; - le parting lineation (voir ci-dessus), lorsque plusieurs striations se superposent verticalement; - les rivires en crue lors de phases d'coulement trs rapide; - en dessous de la vitesse d'coulement ncessaire pour former des rides (voir-ci-dessous), des stratifications planes peuvent aussi tre produites. Contrairement la stratification plane par "wash and backwash", les laminations cres par les trois derniers processus sont assez peu distinctes et de faible continuit latrale. 3.2.7. Les rythmites Ce type de lamination cyclique comprend les dpts constitus d'alternances de minces (mmcm) lits de composition, couleur, texture ou granulomtrie diffrente. Le mcanisme gnrateur d'une telle rythmicit rside dans des changements rgulirement rpts dans

l'apport et l'accumulation des matriaux arrivant dans le bassin sdimentaire. Il peut s'agir de changements frquence leve (mares) ou faible (saisons). Citons surtout : Le litage de mare ("tidal bedding"): les lamines sableuses se dposent pendant la monte ou le re