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20 La lettre de l'Itésé Numéro 22 Eté 2014 Dossier " Prospective Automobile & Mobilité " par Gabriel PLASSAT, Expert à l'Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME) R echerchons les principales tendances de fond qui ont, jusqu’à présent, structuré les choix. Le passage de la calèche à l’automobile est bien «discret» au sens mathématique, il ne s’agit pas d’une évolution continue. Personne ne pouvait imaginer au départ le formidable potentiel de cette rencontre [Moteur à Combustion Interne + Pétrole] ; nous sommes probablement en train de vivre le même type de transition vers un système plus large et plus complexe. Dès le départ, le chemin choisi [Moteur à Combustion Interne + pétrole] est celui qui comportait le plus de risques, le plus de difficultés mais le plus haut potentiel en matière d’intérêt individuel. Et si le choix d’investir autant dans ce système [MCI+pétrole] était lié à sa capacité prodigieuse à produire de l’individualisme ? Si cette tendance de fond va se poursuivre, le choix devrait donc se porter sur les solutions technologiques qui maximisent notre «individualisme», c'estàdire des capacités à maximiser notre temps libre, à enchaîner de nombreuses actions dans des environnements multiples et complexes. Depuis l’industrialisation de l’internet mobile, il est probable que la maximisation de notre individualisme ne passe plus principalement par le véhicule, l’objet roulant, mais par l’accès à des connaissances et des savoirs qui nous permettront de mieux réaliser nos activités, de maximiser notre temps libre et éventuellement d’accéder au «meilleur» siège libre roulant, le plus adapté au contexte. Après la calèche et l’automobile, quel système sera alors le plus résilient dans le monde de la rareté ? Les voitures : vêtement de mode et servicielles Deux familles ont été proposées en 2009 : la voiture «vêtement de mode» pour le haut de gamme, la voiture servicielle pour le reste. Rappelons que le terme de voiture servicielle rassemble toutes les formes de services de mobilité comme l’autopartage, le covoiturage, la location, le transport à la demande, et les prochaines qui restent à inventer. La voiture servicielle peut se définir comme étant le complémentaire de la possession exclusive puisqu’il s’agit soit d’utiliser une voiture sans en être propriétaire, soit de partager son véhicule ou un siège libre de son véhicule. La voiture servicielle est également complémentaire des modes collectifs et modes actifs, car la dépossession exclusive modifie automatique les pratiques vers tous les modes alternatifs. Les bases du cahier des charges d’une voiture servicielle En basculant vers la voiture servicielle, les usagers expérimentent un mode radicalement différent aux frontières du privé et du public, de l’individuel et du collectif. Ils vont alors privilégier de plus en plus les fonctionnalités rationnelles de l’objet roulant par rapport à l’irrationnel, dont le consentement à payer pour ce dernier va diminuer. En conséquence, les caractéristiques principales de ce type de véhicule pourront être différentes d’une automobile «traditionnelle». Les pseudo performances (performances vendues mais jamais utilisées comme la puissance installée, la vitesse maximale) pourront être éliminées pour se concentrer sur l’essentiel : la minimisation des coûts d’usages, l’efficacité énergétique, la maximisation de la «maintenabilité», la connectivité et la «partageabilité». Mais ce cahier des charges est aujourd’hui incompatible avec la création de bénéfices pour la plupart des acteurs industriels traditionnels, même si certains commencent à s’y

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20 La lettre de l'I­tésé ­ Numéro 22 ­ Eté 2014

Dossier

" Prospective Automobile & Mobilité "par Gabriel PLASSAT,Expert à l'Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME)

Recherchons les principales tendances de fond qui ont,jusqu’à présent, structuré les choix. Le passage de lacalèche à l’automobile est bien «discret» au sensmathématique, il ne s’agit pas d’une évolution continue.Personne ne pouvait imaginer au départ le formidablepotentiel de cette rencontre [Moteur à CombustionInterne + Pétrole] ; nous sommes probablement en trainde vivre le même type de transition vers un système pluslarge et plus complexe. Dès le départ, le chemin choisi[Moteur à Combustion Interne + pétrole] est celui quicomportait le plus de risques, le plus de difficultés mais leplus haut potentiel en matière d’intérêt individuel.Et si le choix d’investir autant dans ce système[MCI+pétrole] était lié à sa capacité prodigieuse àproduire de l’individualisme ? Si cette tendance de fondva se poursuivre, le choix devrait donc se porter sur lessolutions technologiques qui maximisent notre«individualisme», c'est­à­dire des capacités à maximisernotre temps libre, à enchaîner de nombreuses actionsdans des environnements multiples et complexes.Depuis l’industrialisation de l’internet mobile, il estprobable que la maximisation de notre individualisme nepasse plus principalement par le véhicule, l’objet roulant,mais par l’accès à des connaissances et des savoirs quinous permettront de mieux réaliser nos activités, demaximiser notre temps libre et éventuellement d’accéderau «meilleur» siège libre roulant, le plus adapté aucontexte. Après la calèche et l’automobile, quel systèmesera alors le plus résilient dans le monde de la rareté ?

Les voitures : vêtement de mode et serviciellesDeux familles ont été proposées en 2009 : la voiture«vêtement de mode» pour le haut de gamme, la voitureservicielle pour le reste. Rappelons que le terme devoiture servicielle rassemble toutes les formes de servicesde mobilité comme l’autopartage, le covoiturage, lalocation, le transport à la demande, et les prochaines quirestent à inventer. La voiture servicielle peut se définircomme étant le complémentaire de la possessionexclusive puisqu’il s’agit soit d’utiliser une voiture sansen être propriétaire, soit de partager son véhicule ou unsiège libre de son véhicule. La voiture servicielle estégalement complémentaire des modes collectifs et modesactifs, car la dépossession exclusive modifie automatiqueles pratiques vers tous les modes alternatifs.

Les bases du cahier des charges d’une voitureservicielleEn basculant vers la voiture servicielle, les usagersexpérimentent un mode radicalement différent auxfrontières du privé et du public, de l’individuel et ducollectif. Ils vont alors privilégier de plus en plus lesfonctionnalités rationnelles de l’objet roulant par rapportà l’irrationnel, dont le consentement à payer pour cedernier va diminuer. En conséquence, les caractéristiquesprincipales de ce type de véhicule pourront êtredifférentes d’une automobile «traditionnelle». Les pseudoperformances (performances vendues mais jamaisutilisées comme la puissance installée, la vitessemaximale) pourront être éliminées pour se concentrer surl’essentiel : la minimisation des coûts d’usages, l’efficacitéénergétique, la maximisation de la «maintenabilité», laconnectivité et la «partageabilité». Mais ce cahier descharges est aujourd’hui incompatible avec la création debénéfices pour la plupart des acteurs industrielstraditionnels, même si certains commencent à s’y

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21Eté 2014 ­ Numéro 22­ La lettre de l'I­tésé

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intéresser comme GM et Citroën. Il devient alorsnécessaire et possible de considérer l’intégralité de lachaîne de valeur des mobilités pour chercher ailleurs laplus value, et consentir à concevoir et produire autrementdes objets roulants devenus des commodités. Peu à peu,la segmentation traditionnelle n’aura plus de sens àl’exception du haut de gamme sur lequel nousreviendrons.Sur le long terme, de plus en plus de personnesexpérimenteront que la maximisation de leurs libertésindividuelles peut être réalisée en utilisant des véhiculesserviciels dont la plupart sont basés sur le partage desobjets. Ce paradoxe, plus de partage pour plusd’individualisme, que nous appellerons le partageparadoxal, est un point clé qu’il faut explorer.Le partage paradoxalTous les services de mobilité actuels et futurs seront baséssur des processus permettant de mieux utiliser desressources (véhicule, énergie, infrastructure) pourmaximiser leurs usages. Les gains marginaux générés parces processus permettront de plus en plus et de mieux enmieux, de redistribuer aux utilisateurs des avantages :temps, argent, réseau, image numérique… Les outilsnumériques vont bien sûr permettre ces développements,ces redistributions et les accélérer. Leur maîtrise totale estun point clé sur lequel nous reviendrons également. Lesservices de mobilités utilisent donc des objets roulants, les«voitures servicielles», qui sont partageables. Il apparaîtainsi un découplage possible entre la possession exclusived’un véhicule et la capacité à être mobile, autonome et àmaximiser son «individualisme». Puis, le momentviendra où la possession de l’objet sera, pour de plus enplus de personnes, un frein à l’individualisme.Pour le moment, les véhicules low cost et surtout lesvéhicules d’occasions permettent de cumuler possessionexclusive «à bas prix» et individualisme. Mais descontraintes vont grandir sur ces deux segments :augmentation des coûts d’usage (énergie, maintenance,assurance, parking…) et prises en compte des externalitésréelles (pollutions, congestion, espace occupé, recyclagedes matières premières) sous la forme d’uneaugmentation des contrôles (technique, pollution), et destaxes (kilométrique, péage urbain, stationnement). Lapossession exclusive sera de moins en moins possiblefinancièrement et en même temps, le numériquepermettra d’accéder plus facilement aux véhiculesserviciels et au partage de toutes ces charges financières.Ces contraintes en croissance contiennent donc les germesd’un changement au niveau de l’usage des véhicules.Elles auront comme conséquence des modificationsmajeures dans la conception des véhicules pour répondreà ces nouveaux besoins. Elles permettront alors de mieuxles partager et de mieux les inclure dans des services,renforçant ainsi la transition en cours. Il devient probable

qu’un saut «discret» apparaisse alors entre lesautomobiles traditionnelles et les véhicules serviciels.Le haut de gammeLe cas du haut de gamme est radicalement opposé. Dansce cas, les charges engendrées par la possession exclusiverestent inférieures aux bénéfices en matièred’individualisme. Ces charges doivent malgré tout êtremaîtrisées et prévisibles pour créer les conditions d’unmarché de seconde main (ce sera sans doute là le pointfaible des constructeurs haut de gamme). Sur cesvéhicules, des mécanismes opérant depuis un siècle vontse poursuivre : plus de technologie, plus derenouvellement et plus vite, grande versatilité descarburants utilisables et connectivités totales etpermanentes. Le cybercar haut de gamme existerapermettant à ses occupants de ses déplacer sans s’enoccuper. Nous verrons qu’exactement les mêmestechnologies pourront être utilisées pour réinventer enprofondeur le secteur des transports. Les clients seront deplus en plus exigeants au fur et à mesure que les chargesengendrées par la possession exclusive vont croître ; lesconstructeurs capables de répondre à ces contraintesseront en nombre de plus en plus réduit malgré lenombre de marque en augmentation. Le sur­mesuredeviendra la norme sur tous les continents.L’internet mobile : solution d’individualisme parexcellence

L’avenir de l’automobile est donc intimement lié à lacompréhension des mécanismes et des moyenspermettant d’augmenter notre individualisme. Sur cesujet, le téléphone portable ou assistant numérique coupléà Internet représente, à l’échelle du globe, le meilleurvecteur permettant de maximiser notre individualisme enrépondant à toutes les situations et en nous apportant uneinformation adaptée. Cet objet nous permet de revisiter etmodifier les arbitrages réalisés par le passé. Ainsi, pourêtre plus « libre » (nous reviendrons également sur cemot) nous allons consentir à partager des véhicules alorsque ces derniers étaient, jusqu’à présent, un moyen deliberté individuelle.

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Cette voie, impensable il y a 10 ans, est directement liée àl’industrialisation mondiale du 3ème mode decommunication nomade : l’internet mobile. Ce moded’échange révolutionne actuellement tous les secteurséconomiques sur tous les territoires, renverse les rapportsde force, supprime des intermédiaires à faible valeurajoutée, et nous permet de mieux comprendre lacomplexité du monde dans chaque situation, dans chaquecas personnel. Pour le secteur des transports, lesinvestissements publics et privés peuvent être mieuxrentabilisés en faisant correspondre l’impensable jusqu’àprésent : l’offre et la demande de sièges libres. Les outilsnumériques permettront également de connaître lademande, de comprendre les mécanismes d’acceptationde nouvelles solutions de mobilité, pour finalementdévelopper des outils de co­conception avec les usagersdes services eux­mêmes. Cette double capacité est le cœurdes futurs systèmes de mobilités portés par le numériqueet les véhicules serviciels. Il leur confère une granderésilience aux chocs à venir en maximisant l'usage desmodes collectifs et des modes actifs.Pour les constructeurs automobiles, la maîtrise de ce 3èmemode de communication doit devenir prioritaire. Sanscela, ils ne comprendront pas le monde qui vient.D’autres acteurs accéderont à des connaissances totalesdes pratiques réelles de mobilités exploitant toutes lesdonnées numériques disponibles. Ceci servira de basepour développer les services de mobilité portés par lenumérique dans lesquels nous utiliserons des voituresservicielles. Ils domineront alors pour longtemps lesfabricants d’objets roulants.Les Lords of the cloudsComme l’indique Douglas Ruchkoff dans les 10commandements à l’ère du numérique, lors des deuxprécédentes révolutions (inventions de l’écriture puis del’imprimerie), il y a eu très peu d’écrivains et beaucoup delecteurs ; or cette 3ème révolution change radicalement parles opportunités offertes et les risques à l’inaction. Si nouscontinuons à utiliser ce 3ème mode en «lecteur» sansapprendre à créer, à programmer, à l’utiliser, les risquessont grands que les programmeurs, ceux qui créent lescodes (le mot « code » prend ici tout son sens), dominentce 3ème mode de communication : l’internet mobile. Nosdécisions, nos choix, nos modes de vie seront alorsstructurés par les programmeurs. La « liberté » offerte parles services de mobilité sera donc assez limitée, voireillusoire. Jaron Lanier, dans You’re not a gadget, insisteégalement sur les points faibles et les manques du web2.0.Avec le recul d’un des pionniers du web, et notammentdu concept de réalité augmentée, Jaron Lanier critiqueLinux et Wikipédia, comme étant certes des avancées enmatière construction collaborative, mais dont les livrablesne surpassent pas vraiment les versions commerciales.L’internet mobile 2.0 offre, d’après J. Lanier, despossibilités qui sont à ce jour largement sous utilisées,

tout en créant des monopoles, en matière d’accès à nosdonnées et aux nouveaux usages qu’elles génèrent, qu’ilappelle les Lords of the cloud. Dans le monde destransports, il est maintenant connu et partagé, que lacréation, le partage et la gestion des données sont unpoint clé d’optimisation des modes eux­mêmes et de lamultimodalité ; donc des services de mobilité en général.Les Lords of the cloud pourraient alors dominer lesservices de mobilité.

Tous les éléments du système sont là.L’internet mobile apporte des éléments decompréhension hyper contextualisés pour chaquesituation et chaque personne, permettant de mieux choisiret de mieux s’organiser. Cela se traduit pour lestransports à la possibilité d’accéder à des sièges libres non«possédés» et ainsi de réduire progressivement lapossession exclusive d’automobile. Ce partage«contraint» permet paradoxalement de maximiser noschoix individualistes.Cette voie des services de mobilité se déploiera enpoursuivant la même tendance de fond qui a conduit àinvestir dans le couple [MCI+pétrole]. Mais la révolutionnumérique permettra de passer à un niveau decomplexité supérieur. Alors que l’automobile ne s’adaptepas à son contexte et à son utilisateur (cela doit être« pensé » par le constructeur et traduit en «dur» dans lescomposants du véhicule), les services de mobilité portéspar l’internet mobile auront quand à eux cette capacité :connaître les flux, comprendre les processus d’acceptationd’un nouveau service en fonction des contextes, destemporalités et des personnes, et modifier enconséquence le service lui­même.En résumant, les services de mobilité s’adapteront àtoutes les demandes qui se seront elles­mêmes adaptéesaux services, incluant ainsi les «boucles rétroactives duvivant». Le cybercar utilisé sous des formes partagéespourrait alors se développer devenant ainsi public, privé,individuel et collectif ; cet objet roulant est, sous cetteforme, l’aboutissement de la voiture servicielle. Exploitantces nouvelles formes de mobilités, les opportunités pourmaximiser notre individualisme seront immenses, autantque les risques …

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23Eté 2014 ­ Numéro 22­ La lettre de l'I­tésé

Dossier

Les données sur nos mobilités, sur notre «acceptabilité,acceptation et intégration» des différents services,représentent des connaissances stratégiques quipourraient rester dans les mains des Lords of the cloud.Ce vaste sujet implique une participation active despouvoirs publics, un renforcement des acteurs gérant cesquestions et une prise de conscience citoyenne, avec desprojets comme mesdonnées. Mais ce pré requis concernantles données ne sera pas suffisant ; les codes et applicationscréant, gérant et organisant les services de mobilitédevront également être compris et rédigés par le plusgrand nombre (usagers, collectivités, entreprises) enmettant en œuvre des processus originaux d’intelligencescollectives.Revenons maintenant sur les objets roulants, lesvéhiculesDans ce contexte, les objets roulants, les véhicules quenous connaissons aujourd’hui, seront très différents. Toutsimplement parce que nous ne les utiliserons pas de lamême façon, parce que nos liens avec cet objet aurontprofondément changé. Aujourd’hui, les générations Y despays de l’OCDE portent un autre regard sur l’automobile,sur le permis de conduire. Ces changements sont réfléchiset majeurs, ils préfigurent la venue du point debasculement.Pour ces véhicules, la question de l’énergie de propulsiondevient secondaire : les gains par personne transportéesont obtenus principalement en augmentant fortement lenombre de personne par véhicule. La question du choixde la filière énergétique se pose de nouveau au niveau desa capacité à augmenter l’individualisme des usagers(donc à réduire les coûts et les externalités), à partager lesobjets et à les intégrer dans les services de mobilité. Plus levecteur énergétique assurera ces trois caractéristiques,plus il se diffusera.Les véhicules serviciels seront conçus pour s’insérer dansdes services, leurs caractéristiques (puissance installée,vitesse maximale, accessoires) et architectures serontprécisément déterminées pour répondre à ces missions etrien de plus. Les acteurs capables d’industrialiser cesvéhicules seront les constructeurs automobiles maiségalement de véhicules industriels ou de motocycles.Mais les acteurs capables de décrire précisément lesbesoins, les spécifications des véhicules (partageabilité,connectivité, maintenabilité, TCO) pour les insérer dansles services qu’ils concevront et exploiteront, serontprincipalement les acteurs du numérique, ceux qui aurontaccès aux données, aux connaissances, aux codes et auxapplications, les Lords of the cloud. Ces dernierspiloteront alors la chaîne de valeur du système complet,les objets roulants seront devenus de simplescommodités, renforçant encore les changements d’usageset de pratiques des mobilités.

Si nous maîtrisons les risques, nous aurons alors réaliséun saut majeur mais «discret», et déployé des systèmescomplexes adaptables à de multiples environnements quiauront la capacité de maximiser l'usage des ressourcesmatérielles pour nous permettre de réaliser nos activitésen les réorganisant si besoin.