Psychanalyse et mythologie. La névrose actuelle des Danaïde

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REVUEFRANÇAISEDE

PSYCHANTOME XXI

N° 1

JANVIER-FÉVRIER 1957

PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE

108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, PARIS

1957



PSYCHANALYSE ET MYTHOLOGIE :

La névrose sexuelle des Danaïdes

par D. KOURETAS (d'Athènes) (i)

Comme tous les vastes esprits à qui « rien de ce qui est humain n'est

étranger » (Terence), les poètes tragiques grecs du Ve siècle avant notre

ère, Eschyle, Sophocle et Euripide, sont parvenus à concevoir les

personnages de leurs tragédies et à décrire leur comportement d'une

manière si véridique, si représentative et, pour ainsi dire, archétypique,

que, malgré,les particularitésdes réactions affectives en

rapportavec

le milieu social et les idées régnantes à l'époque, il subsisté un fond

d'universalité dans la structure psychique de ces personnages, qui défie

les siècles et frappe la mémoire collective. Dans les drames antiques,

en effet, sont représentés les conflits de l'inconscient sous une forme

accessible et apte à émouvoir, à travers leurs symbolismes, un grand

nombre de gens de toutes les époques et de tous les pays.

Eschyle dans le drame Les Suppliantes, qui a trait à l'aventure des

Danaïdes, les cinquante filles du roi de Libye, Danaos, qu'il a eues avecdifférentes femmes, s'est indubitablement servi des données fournies

par la légende et la tradition mythique, mais il a su les façonner avec

une telle perspicacité psychologique qu'il est arrivé à représenter sur

scène et à dramatiser ce qu'il y a de particulier dans la personnalité des

femmes qui ont peur de la maternité avec négation de leur rôle de partenaire

sexuel (frigidité) et attitude agressive envers le sexe masculin [complexe

de virilitéd'après

MarieBonaparte (De

la sexualité de lafemme,

P. U.F.)ou complexe de Diane, d'après Charles Baudouin (L'âme enfantine et

la psychanalyse, I : Complexes, Genève)]. « Le complexe de virilité »,

nous dit Hélène Deutsch (La psychologie desfemmes, P. U. F., I, p. 428),« se caractérise par la prédominance de tendances actives et agressives

(I) Communication présentée au LIVe Congrès des Neurologistes et Aliénistes de Langue

française (Bordeaux, août 1956).

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qui aboutissent à des conflits avec l'entourage et surtout avec ce que lafemme possède en elle de féminin... La peur de la féminité mobilise

les tendances masculines, qui à leur tour augmentent le trouble » (I).Au début de la pièce, les Danaïdes font leur apparition, et dès les

premiers vers indiquent la raison de leur fuite hors de leur lointain payset du refuge qu'elles cherchent à Argos, ville grecque du Péloponnèse,où règne le roi Pelasgos (2) : c'est l'horreur du mâle, de son étreinte,ainsi que la répugnance profonde que leur inspire la convoitise del'homme qui les désire et le dégoût qui s'empare d'elles à la seule penséedu mariage. L'expression de ces sentiments de révolte et d'inaccep-tation de la féminité, comme un refrain, revient sans cesse au cours dela pièce.

C'est afin d'échapper au mariage que veulent leur imposer leurs

cousins, les cinquante fils d'Aigyptos, que les filles de Danaos, accompa-gnées de leur père, s'en vont, sur un bateau à cinquante rameschercher un asile sur une terre étrangère. A noter qu'en Egypte le

mariage était permis même entre frère et soeur.

Ce qui a incité les Danaïdes à se réfugier sur la terre d'Argos, c'estl'espoir d'y trouver bon accueil. En effet, leur aïeule Io, disent-ellesau roi d'Argos, était originaire du pays, d'où elle fut chassée par son

propre père, le roi Inachos, à cause de rêves incestueux, à contenu

oedipien, dirions-nous aujourd'hui, qui hantaient son sommeil : signes

prémonitoires d'une schizophrénie à forme paranoïde, ainsi que nous

avons pu en apporter les preuves dans une précédente étude, nous

appuyantsur le texte même des drames

d'Eschyle,Prométhée enchaîné

et Suppliantes (3).

Après l'argument de la parenté, qui ne fut pas assez efficace pourdécider le roi à les recevoir dans son pays, les fugitives en arrivent auxmenaces de suicide devant les statues mêmes des dieux, en vue d'extor-

(1) Cf. Karl ABRAHAM, Manifestations of the female castration complex, in Selected Paper s. — Ruth M. BRUNSWICK, The preaedipal phase of the libido development, Psychoan. Quarterly,

1940, 393.—

S. FREUD, Finige ps3'ehische Folgen der anatomischen Geschlechts-Uuterscnieds. — Ûber du weibliche Sexualitât, in Gesammclie Werke, XIV. —Jeanne I^AMPL DE GROOT,

Zur Fntwicklnng des OEdipuskomplexes der Frau, Internationale Zeitschrift für Psychoanalyse,1927, 269.

(2) D'après ROCHETTE (cité par KOETNIOTIS, dans L'histoire d'Argos, Athènes, 1892, p. 173),l'arrivée des Danaïdes à Argos doit être située autour de l'année 1572 av. J.-C. Suivant la

conclusion basée sur les Inscriptiones Graecae (XII, 5444, 15-18) la date doit être reportéeà 1510 av. J.-C. et coïncide à peu près à celle de l'exode d'Egypte de Moïse avec son peuple.

(3) D. KOURETAS, Le complexe oedipien du personnage d'Io, etc., communication à la

Société de Psychanalyse de Paris, 7 juin 1949 (Revue fr. de Psychanalyse, 1949, 445), inséréedans le volume en grec intitulé : Caractères anormaux dans les drames grecs antiques. Etude

psycliatialytiqueet

psychopathologique, 314 p., Athènes, 1951.



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quer le consentement de Pelasgos, qui est hésitant et craint, à juste titre,des complications et les risques d'une guerre incertaine avec les

Égyptiades. D'après G. Méautis (Eschyle et la trilogie, Grasset, Paris,P- 57)5 (CIe suicide par pendaison amène sur le pays des fléaux, famineset maladies, qui ne peuvent être détournés que par des sacrifices

expiatoires ».

Devenant de plus en plus pressantes, elles invoquent leur qualitéde suppliantes et ajoutent (v. 392 et suiv., d'après l'excellente traductionde Paul Mazon, éd. « Les Belles-Lettres ») :

LE CHOEUR. — Ah !que jamais je

ne tombe aupouvoir

desmâlesvainqueurs ! (s'exclame la première du choeur des Suppliantes). Fuir,

sans guides que les étoiles, voilà le lot que plutôt je m'assigne, s'il me

préserve d'un hymen odieux.Plus loin, faisant appel à l'aide divine, elles supplient Jupiter (v. 524

et suiv.) :« Seigneur des seigneurs... Puissance souveraine entre les puissances,

du haut de ta félicité, Zeus, entends-nous ! Éloigne de nous la démesure

mâle, digne objet de ta haine, et dans la sombre mer plonge le malheuraux flancs noirs. »

Ici, elles font allusion au bateau avec lequel leurs cousins se sontlancés à leur poursuite. A la fin de la pièce, après s'être assurées l'appuidu roi des Pelasgues, qui a renvoyé le messager des Égyptiades, chargépar eux de la mission de les emmener de force, les Danaïdes, momen-tanément libérées, adressent leurs remerciements à Jupiter (v. 1863et

suiv.)en ces

termes :LE CHOEUR. — Que le Seigneur Zeus m'épargne un hymen cruel avecun époux abhorré... qu'il donne la victoire aux femmes !

Les deux autres pièces de la Trilogie ne sont pas entièrement

parvenues jusqu'à nous. On connaît la suite de la légende d'aprèsd'autres sources citées par W. H. Roscher (Ausführliches Lexikon dergriechischen und rômischen Mythologie) et par Pauly-Wissowa (Real-encyclopädie) : le père des Danaïdes contraint par ses neveux,' devenusde plus en plus exigeants et menaçants à donner son consentementau mariage, fait semblant d'y céder, mais donne en cachette un couteauà chacune de ses filles qui, à son instigation se vengent de la violence

qu'elles subissaient en égorgeant leurs maris pendant la nuit des noces

(cf. Eschyle, Prométhée, v. 860 et suiv.), à l'exception d'une seule,



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Hypermestre. Celle-ci, « enivrée du désir d'avoir des enfants » (d'après

l'expression d'Eschyle lui-même dans Prométhée, v. 865), épargne

Lyncée, l'époux que lui donna le sort (I). C'est elle qui fondera par

la suite la lignée royale, d'où devra sortir le héros national de la Grèce

antique, « celui qui rapprochera le plus l'homme de la divinité : Héra-

clès » (G. Méautis, loc. cit., p. 70).

Le châtiment infligé aux autres Danaïdes, les meurtrières, est bien

connu : après leur mort, elles ont été condamnées aux enfers de remplir

d'eau un tonneau sans fond, ce qui fut considéré comme le prototype

de toute tâche vaine et inutile (Platon, Axiochos, 371c; Gorgias, 493b

;République, 363 d. Cf. Erwin Rohde, Psyché, Payot, 603, et G. Megas,

Hermès, LXVIII, 1933, 415).

Envisagé à la lumière des données psychanalytiques la légende des

Danaïdes présente les points intéressants suivants :

Tout d'abord leur attachement oedipien à Danaos, « le père qui

inspire tous nos desseins, qui inspira notre révolte » (v. 12-14), d'après

ce qu'elles déclarent dès leur entrée en scène. Attachement qui leur

est bien rendu de sa part à lui qui abandonna patrie, trône et palais

et entreprit une traversée longue et pleine de risques, afin de les préserver

du mariage. C'est que, de son côté, le père des Danaïdes avait, lui aussi,

son complexe (2), que je me permettrai de nommer contre-oedipe

(à l'exemple du contre-transfert) : penchant incestueux inconscientdu père pour sa fille, dont le pendant, c'est-à-dire la tendance inces-

tueuse inconsciente de la mère pour le fils, a été décrit par Freud en 1928,

dans son étude intitulée Dostoïewski et le parricide, à propos de l'analyse

d'une nouvelle de Stephan Zweig : 24 heures de la vie d'une femme

(Gesammelte Werke, XIV, 397).

Après la scène dans laquelle le roi des Argiens, avec le consente-

ment de ces derniers, a déclaré prendre sous sa protection les fugitives,

(I) EURIPIDE, dans le drame Hècube (v. 887), fait allusion à une autre légende, qui présente

certaines ressemblances avec celle des Danaïdes et qui concerne les femmes de l'île Lemnos

sur la mer Egée. D'après le Scholiaste d'Euripide et Apollodore (I, 9,17), ces femmes, négligeant

le culte de Vénus, ont été infligées d'une odeur repoussante. S'adonneraient-elles à l'onanisme ?

Quoi qu'il en soit, leurs maris les délaissaient et cherchaient des captives et des étrangères. Pour

se venger, les femmes de cette île les massacrèrent tous pendant leur sommeil. Seule Hypsipyle

ne se résigna pas à tuer son père (ou son mari) Thoas (P. GRIMAI,, Dictionnaire de la mythologie

grecque et romaine, P. U. F., ; G. THOMSON, Aeschylus and Athens, I<ondon).

(2) Bien improprement appelé « complexe du roi Lear » (Arpad Pauncz) ou « complexe de

Jocaste » (Ed. Pesch).



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avec leur père, celui-ci se met à vanter, comme le ferait un amoureux

jaloux, les charmes de ses filles en ces termes (v. 996-1006) :

DANAOS.—

Je vous invite à ne pas me couvrir de honte, puisquevous possédez cette jeunesse qui attire les yeux des hommes. Le tendrefruit mûr n'est point aisé à protéger : les bêtes s'y attaquent toutcomme les hommes, vous le savez, les oiseaux ailés comme les quadru-pèdes. De même, des corps pleins de sève Cypris elle-même va procla-mant le prix, en invitant l'amour à cueillir la fleur de jeunesse. Aussi,sur la délicate beauté des vierges, tous les passants, succombant au

désir, lancent-ils le trait charmant du regard.

Le contre-OEdipe du père — que l'on peut aisément entrevoir etvérifier même en dehors de l'analyse, dans les cas d'opposition du pèreau mariage de sa fille, surtout s'il s'agit de fille unique et de mariaged'amour — s'accompagne de sentiments hostiles envers l'objet choisi

par elle. Cette hostilité est camouflée et rationalisée sous différents

prétextes. Chez Danaos elle a pris deux directions : meurtre des préten-dants par les mains de ses filles et violente réaction coléreuse, qui le

poussaà

emprisonneret

traduire en jugement celle, Hypermestre, quiosa désobéir à ses ordres et laissa vivre son mari. Elle fut acquittée parles Argiens ou, d'après une autre version, par Vénus elle-même, inter-venue pour la sauver, d'après le fragment appartenant à un drame

perdu (Athénée, iy', 600 Nauck 2, Tr. Gr. Fr. 44), dans lequel la déessede l'Amour rappelle solennellement aux hommes la loi divine quiperpétue la vie. S'opposant à cette loi, les autres Danaïdes s'adressentà deux reprises à la déesse vierge Artémis (145-148 et 1030-1034).

LE CHOEUR. — Que la chaste fille de Zeus, clémente à qui imploresa clémence, laisse tomber sur moi de son visage austère un regardassurant mon salut !

Que la chaste Artémis jette sur cette troupe un regard de pitié, afin quenul hymen ne nous vienne ployer sous le joug de Cypris ! A qui je haissoit réservée cette épreuve.

Diane en effet,appelée par

lepoète Artémis,

de son nomgrec,

est« vierge et chasseresse, c'est bien la fille qui s'insurge contre le mâleet qui ne voulant pas reconnaître sa destinée de femme, repousse laféminité ; n'est-elle pas représentée avec l'arc et les flèches, attributsvirils par excellence ? » (Edgar Pesch, La psychologie affective, Bordas éd.,

1947, 415). Il est à remarquer que, sur un vase provenant du MonteSaraceno et se trouvant actuellement au Musée de Palerme (Cook,Zeus, III, 400, fig. XXXVI), deux Danaïdes, parmi les six représentées



602 REVUE FRANÇAISE DE PSYCHANALYSE

en train de porter leurs pots pleins d'eau, sont très visiblement muniesd'attributs virils.

La crainte de la maternité, qui ne fait qu'un chez bien des jeunesfilles et bien des femmes avec la fuite de la féminité et qui, d'aprèsCharles Baudouin (loc. cit., 78) est un « signe classique d'un fort

complexe de Diane non résolu », comporte le désir inconscient de pos-session de l'organe mâle (I). « Le caractère de ce type de femme, affirmeHélène Deutsch (loc. cit., I, 246), se fonde sur l'identification avec lamère active (phallique) ou avec le père. » Le père oedipien, ajouterons-nous, en ce qui concerne les Danaïdes,

quiont

adoptéet mis en oeuvre

l'attitude méfiante et hostile de Danaos envers les autres hommes,telle qu'elle se montre dans le passage sus-mentionné, où il les met en

garde contre eux. C'est l'envie ou la jalousie de la masculinité qui hanteles femmes ainsi névrosées, dont la rivalité avec l'homme et l'agressi-vité se dissimulent sous une forme plus ou moins tolérable et en appa-rence anodine derrière le désir d'égaler l'homme sur le plan intellectuelet moral ou se sublime dans le choix d'une carrière d'ordinaire réservée

aux hommes ; dans d'autres cas, ladite agressivité, d'une façon plusactive, alimente des désirs inconscients de castration du partenaire,

laquelle a trouvé chez les Danaïdes son expression la plus tragique (2).Le supplice enfin auquel les Danaïdes ont été obligées de se sou-

mettre aux enfers, en essayant de remplir éternellement d'eau untonneau percé, indique l'inefficacité de leur tâche, fiée au fait qu'ellesne possèdent pas le moyen d'accomplir un acte symbolisant la virilité,d'où la stérilité de leurs efforts sans cesse renouvelés.

(1) Cf. D. KOURETAS, Sur un cas de névrose à base d'envie du pénis, Revue française de Psy-chanalyse, 1950, n° 4, pp. 522-553 (communication à la Société psychanalytique de Paris sousle titre : Andromaque ou le cas d'une femme phallique, 9-5-50).

(2) « Ce fin psychologue qu'est Eschyle, cet observateur profond de l'âme humaine a tenu,dès le début de son oeuvre, à rendre plausible l'acte atroce de ces femmes égorgeant leurs marisle soir même de leurs noces et il l'a fait en montrant des êtres révoltés jusqu'au plus profondd'eux-mêmes, hantés de l'idée de suicide et qui pourront donc passer, par une transition insen-sible et aisée, de cette idée à celle de l'assassinat » (G. MÉAUTIS, loc. cit., 58). Au sujet d'un

jeunenévrosé en traitement

psychanalytique,le Dr René HELD

(Psychopathologiedu

regard,L'évolution psychiatrique, 1952, II, p. 235), fait les remarques suivantes : « Jamais il n'a pu nous

regarder en face. Mais il est plein de désirs de meurtre à notre égard et à l'égard d'autrui et sanscesse nous « fourre sous le nez »ses idées de suicide ».



LES LIVRES

Alfred BINET et Th. SIMON, La mesure du développement de l'intelligence,

Bourrelier, édit.Félix CESSELIN, Comment évaluer le niveau intellectuel, adaptation française

du Terman-Merrill, Bourrelier, édit.

Ces deux rééditions ont paru récemment. Ce sont deux classiques. La

première a le charme vétusté et un peu inutile pour nous de l'époque où ellea été élaborée. Comme le dit Th. Simon, cette brochure, à l'exception descourbes Bonnis, est la reproduction à peu près intégrale du bulletin n° 70 dela Société Alfred-Binet (1911). Les gravures, les figures à comparer, les figuresavec des lacunes, pieusement conservées depuis 50 ans (on les trouve déjà

dans L'Année psychologique de 1908) ont survécu aux stations de métro et auxbecs de gaz de la même époque. Les enfants ne s'en étonnent-ils pas ? Certes,parmi les initiateurs de la psychologie moderne non-psychanalytique, A. Binetest peut-être le plus important, le plus scientifique, le plus complet et le plusactuel. Mais la mémoire de ce travailleur génial et d'une infatigable curiosité,méritait mieux qu'une reproduction intégrale et momifiée de son travailde 1911. C'est de l'étranger qu'est venu le rajeunissement du Binet-Simon,ou plus exactement c'est aux États-Unis que l'oeuvre de Binet a continué devivre. Lisez en effet la préface de H. Piéron et l'introduction de Cesselin, dudeuxième de ces classiques, vous y verrez résumer l'essentiel des critiques adres-

sées au Binet-Simon et aux courbes de Bonnis, la discussion de la notion de Q. I.,la nécessité d'étalonnage français. Remarquons en passant que les mots de« mesure, d'évaluation » sont trompeurs. Disons une fois de plus qu'on nemesure pas l'intelligence, mais qu'on compare (grâce à des étalonnages) les

comportements intelligents soit d'individus de deux âges donnés, soit d'indi-vidus d'un âge ou (et) d'un groupe social donné.

M. BÉNASSY.

Jakob WYRSCH, La personne du schizophrène, Paris, Presses Universitaires de

France, 1956, Bibliothèque de Psychiatrie, 160 p. Bibliogr.

Cet ouvrage est la traduction française, par Jacqueline Verdeaux, de DiePerson des Schizophrenen, Bern, 1949.

C'est une étude à la fois clinique, psychologique et anthropo-phéno-ménologique.

L'auteur, professeur de psychiatrie à l'Université de Berne, a voulu consi-

gner ses propres expériences avec les schizophrènes qu'il avait suivis dans lesasiles en partageant parfois leurs préoccupations et leur vie. Il ne les a pasexaminés seulement en psychiatre, cherchant à discerner leurs symptômes ou

leur souffrance. En plus, il a tenu à les voir vivre leur monde schizophrénique.

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